Le Quotidien du 10 février 2020 : Filiation

[Brèves] Accouchement sous X et impossibilité pour le père d’établir tout lien de filiation avec l’enfant dès son placement en vue de l’adoption : conformité à la Constitution

Réf. : Cons. const., 7 février 2020, décision n° 2019-826 QPC (N° Lexbase : A39793DQ)

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[Brèves] Accouchement sous X et impossibilité pour le père d’établir tout lien de filiation avec l’enfant dès son placement en vue de l’adoption : conformité à la Constitution. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/56525159-breves-accouchement-sous-x-et-impossibilite-pour-le-pere-detablir-tout-lien-de-filiation-avec-lenfan
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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 19 Février 2020

► Les mots «deux mois» figurant au deuxième alinéa de l’article 351 du Code civil (N° Lexbase : L2867ABS), dans sa rédaction résultant de la loi n° 96-604 du 5 juillet 1996 relative à l’adoption (N° Lexbase : L1121G8Z), et les mots «et à toute reconnaissance» figurant à la deuxième phrase du premier alinéa de l’article 352 du même code (N° Lexbase : L2868ABT), dans sa rédaction issue de la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 portant réforme de l’adoption, sont déclarés conformes à la Constitution ;

► en effet, il y a lieu d’écarter les prétendus griefs tirés tant de la méconnaissance du droit de mener une vie familiale normale et de l’exigence constitutionnelle de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, que de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi, avancés par le requérant qui dénonçait les dispositions en cause en ce qu’elles empêchaient le père d’un enfant né d’un accouchement anonyme d’établir tout lien de filiation avec lui dès son placement en vue de l’adoption et avant même que l’adoption soit prononcée.

C’est en ce sens que s’est prononcé le Conseil constitutionnel, aux termes d’une décision rendue le 7 février 2020 (Cons. const., 7 février 2020, décision n° 2019-826 QPC N° Lexbase : A39793DQ).

♦ Pour écarter les griefs tirés de la méconnaissance de l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant et du droit de mener une vie familiale normale (Préambule de la Constitution de 1946, dixième et onzième alinéas N° Lexbase : L6815BHU), les Sages relèvent d’une part, qu’en prévoyant qu’un enfant sans filiation ne peut être placé en vue de son adoption qu’à l’issue d’un délai de deux mois à compter de son recueil, le législateur a entendu concilier l’intérêt des parents de naissance à disposer d’un délai raisonnable pour reconnaître l’enfant et en obtenir la restitution et celui de l’enfant dépourvu de filiation à ce que son adoption intervienne dans un délai qui ne soit pas de nature à compromettre son développement. D’autre part, la reconnaissance d’un enfant pourrait faire obstacle à la conduite de sa procédure d’adoption. En interdisant qu’une telle reconnaissance intervienne postérieurement à son placement en vue de son adoption, le législateur a entendu garantir à l’enfant, déjà remis aux futurs adoptants, un environnement familial stable.

Le Conseil constitutionnel rappelle également que le père de naissance peut reconnaître l’enfant avant sa naissance et jusqu’à son éventuel placement en vue de l’adoption. Dans le cas d’un enfant né d’un accouchement secret, l’article 62-1 du Code civil (N° Lexbase : L8886G9Y) prévoit que, si la transcription de la reconnaissance paternelle s’avère impossible, le père peut en informer le procureur de la République, qui doit procéder à la recherche des date et lieu d’établissement de l’acte de naissance de l’enfant. De plus, il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que la reconnaissance d’un enfant avant son placement en vue de l’adoption fait échec à son adoption même lorsque l’enfant n’est précisément identifié qu’après son placement.

Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la conciliation qu’il y a lieu d’opérer, dans l’intérêt supérieur de l’enfant remis au service de l’aide sociale à l’enfance, entre le droit des parents de naissance de mener une vie familiale normale et l’objectif de favoriser l’adoption de cet enfant, dès lors que cette conciliation n’est pas manifestement déséquilibrée.

♦ S’agissant du grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi (DDHC, art. 6), les Sages rappellent que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit. Si, en règle générale, ce principe impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n’en résulte pas pour autant qu’il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes.

Si, dans le cas d’un accouchement secret, le père et la mère de naissance se trouvent dans une situation différente pour reconnaître l’enfant, les dispositions contestées, qui se bornent à prévoir le délai dans lequel peut intervenir le placement de l’enfant en vue de son adoption et les conséquences de ce placement sur la possibilité d’actions en reconnaissance, n’instituent en tout état de cause pas de différence de traitement entre eux. Elles n’instituent pas davantage de différence de traitement entre les parents de naissance et les futurs adoptants.

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