Réf. : Cass. civ. 1, 22 janvier 2020, n° 17-18.177, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A14933CB)
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par Vincent Téchené
le 29 Janvier 2020
► En exonérant l’INA de prouver par un écrit l’autorisation donnée par l’artiste-interprète, l’article 49, II, de la loi du 30 septembre 1986 modifiée (N° Lexbase : L8240AGB), ne supprime pas l’exigence de ce consentement mais instaure une présomption simple d’autorisation qui peut être combattue et ne remet pas en cause le droit exclusif de l’artiste-interprète d’autoriser ou d’interdire la reproduction de sa prestation ainsi que sa communication et sa mise à la disposition du public.
Tel est le principe énoncé par la première chambre civile de la Cour de cassation le 22 janvier 2020, mettant ainsi un terme à l’affaire «Kenny Clarke» (Cass. civ. 1, 22 janvier 2020, n° 17-18.177, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A14933CB).
L’affaire. Reprochant à l’INA de commercialiser sur son site internet, sans leur autorisation, des vidéogrammes et un phonogramme reproduisant les prestations notamment d’un batteur de jazz décédé en 1985, ses ayants droit, l’ont assigné pour obtenir réparation de l’atteinte ainsi prétendument portée aux droits d’artiste-interprète dont ils sont titulaires, en invoquant l’article L. 212-3 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L2484K9U), aux termes duquel sont soumises à l’autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image. La Spedidam est intervenue volontairement à l'appel, en sollicitant la condamnation de l’INA à lui payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice collectif subi par la profession d’artiste-interprète. Déboutés par un arrêt d’appel (CA Versailles, 10 mars 2017, n° 15/07483 N° Lexbase : A2375T3D), rendu sur renvoi après cassation (Cass. civ. 1, 14 octobre 2015, n° 14-19.917, FS-P+B+I N° Lexbase : A2713NTN ; lire N° Lexbase : N9597BUY), les ayants droit de l’artiste-interprète ont formé un nouveau pourvoi en cassation.
Dans un arrêt du 11 juillet 2018, la Cour de cassation (Cass. civ., 1, 11 juillet 2018, n° 17-18.177, FS-P+B N° Lexbase : A9537XXI ; lire N° Lexbase : N5089BXR) a rejeté le premier moyen du pourvoi dirigé contre l’arrêt déclarant irrecevable l’intervention de la Spedidam et a saisi la CJUE d’une question préjudicielle portant sur l’interprétation des articles 2, sous b), 3, paragraphe 2, sous a), et 5 de la Directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 (N° Lexbase : L8089AU7), au regard de l’article 49, II, de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, modifiée par l’article 44 de la loi n° 2006-961 du 1er août 2006 (N° Lexbase : L8240AGB), instaurant, au profit de l’INA, un régime dérogatoire pour l’exploitation des prestations des artistes-interprètes constituant son fonds.
La décision. La Cour de cassation reprend la réponse apportée par la CJUE dans son arrêt du 14 novembre 2019 (CJUE, 14 novembre 2019, aff. C-484/18 N° N° Lexbase : A9066ZX3 ; lire N° Lexbase : N1231BYA) : l’article 2, sous b), et l’article 3 § 2, sous a), de la Directive 2001/29/CE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale qui établit, en matière d’exploitation d’archives audiovisuelles par une institution désignée à cette fin, une présomption réfragable d’autorisation de l’artiste-interprète à la fixation et à l’exploitation de sa prestation, lorsque cet artiste-interprète participe à l’enregistrement d’une œuvre audiovisuelle aux fins de sa radiodiffusion.
Or, selon l’arrêt d’appel, l’INA a une mission particulière donnée par les lois successives de conserver et de mettre en valeur le patrimoine audiovisuel national, qu’il assure la conservation des archives audiovisuelles des sociétés nationales de programme et contribue à leur exploitation, qu’il détient seul les archives de son fonds et qu’il est seul titulaire des droits de leur exploitation. Il ajoute que les vidéogrammes et phonogrammes litigieux sont soumis au régime dérogatoire dont bénéficie l’INA. Il en résulte ainsi que l’artiste-interprète avait participé, en l’espèce, à la réalisation de ces œuvres aux fins de leur radiodiffusion par des sociétés nationales de programme et qu’il avait, d’une part, connaissance de l’utilisation envisagée de sa prestation, d’autre part, effectué sa prestation aux fins d’une telle utilisation. Ainsi, énonçant la solution précitée, la Cour de cassation rejette le pourvoi.
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