Réf. : CJUE, 1er octobre 2019, aff. C-616/17 (N° Lexbase : A1225ZQG)
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par Yann Le Foll
le 09 Octobre 2019
► Le Règlement concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (Règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009 N° Lexbase : L9336IEI), n’étant pas incompatible avec le principe de précaution, les règles procédurales applicables à l’autorisation de produits contenant du glyphosate, sont donc valables.
Ainsi statue la CJUE dans une décision rendue le 1er octobre 2019 (CJUE, 1er octobre 2019, aff. C-616/17 N° Lexbase : A1225ZQG).
Faits. En 2016, plusieurs personnes se sont introduites dans des magasins et ont dégradé des bidons de désherbants contenant du glyphosate, ainsi que des vitrines en verre. Ces faits ont conduit à l’engagement, à l’encontre de ces personnes, de poursuites pénales devant le tribunal correctionnel, du chef de dégradation ou détérioration d’un bien d’autrui commise en réunion.
Contexte. Ce produit fait débat depuis plusieurs années en France et en Europe, les pouvoirs publics étant régulièrement accusés de laxisme quant aux possibilités d’utilisation de celui-ci par les agriculteurs. Le juge administratif a pris une position plus tranchée en estimant que doit être annulée l’autorisation de mise sur le marché du Roundup Pro 360 pour cause d’atteinte à l’environnement susceptible de nuire de manière grave à la santé humaine (TA Lyon, 15 janvier 2019, n° 1704067 N° Lexbase : A0700YT4).
Devant le tribunal correctionnel, les prévenus ont invoqué l’état de nécessité et le principe de précaution, lequel s’impose au législateur de l’Union, lorsqu’il adopte des règles régissant la mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques (CJUE, 4 mai 2016, aff. C‑477/14 N° Lexbase : A3312RMM), en faisant valoir que leurs agissements avaient pour but d’alerter les magasins concernés et leur clientèle sur les dangers liés à la commercialisation, sans avertissements suffisants, de désherbants contenant du glyphosate, d’empêcher cette commercialisation et de protéger la santé publique ainsi que leur propre santé.
Renvoi. Afin de se prononcer sur le bien-fondé de cet argument, la juridiction de renvoi s’interroge sur l’aptitude de la réglementation de l’Union à assurer pleinement la protection des populations et estime, dès lors, devoir statuer sur la validité du Règlement (CE) n° 1107/2009 au regard du principe de précaution, lequel, rappelons-le, s’impose
Décision. Concernant le reproche selon lequel la disposition conférant au fabricant du produit qui doit être mis sur le marché une trop grande marge d’appréciation, s’agissant de l’identification de la substance qu’il désigne comme «substance active» de son produit, la Cour indique que celui-ci ne dispose pas de la faculté de choisir discrétionnairement quel composant dudit produit doit être considéré comme étant une substance active aux fins de l’instruction de cette demande.
Concernant les dispositions du Règlement prévoyant, selon les requérants, que les analyses et évaluations contenues dans le dossier sont fournies par ce fabricant, sans contre-analyse indépendante ni publicité suffisante, la CJUE énonce qu’il n’apparaît pas de manière manifeste que les critères énoncés à cette disposition seraient insuffisants pour permettre une détermination objective des substances concernées et pour garantir que les substances jouant effectivement un rôle dans l’action des produits phytopharmaceutiques sont effectivement prises en compte lors de l’évaluation des risques résultant de l’utilisation de ces produits.
Concernant une éventuelle absence de prise en compte suffisante de la présence de plusieurs substances actives dans un même produit et du possible «effet cocktail» auquel cette circonstance peut donner lieu, les procédures conduisant à l’autorisation d’un produit phytopharmaceutique doivent impérativement comprendre une appréciation non seulement des effets propres des substances actives contenues dans ce produit, mais aussi des effets cumulés de ces substances et de leurs effets cumulés avec d’autres composants dudit produit.
Enfin, concernant la réalisation de tests suffisants en ce qui concerne la toxicité à long terme, la CJUE rappelle qu’un produit phytopharmaceutique ne peut être autorisé que s’il est établi qu’il n’a pas d’effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine, une telle preuve devant être apportée par le demandeur. Or, un produit phytopharmaceutique ne saurait être considéré comme satisfaisant à cette condition lorsqu’il présente une forme de carcinogénicité ou de toxicité à long terme.
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