Dans un jugement en date du 5 octobre 2010, le tribunal correctionnel de Paris a condamné un
trader à cinq ans de prison dont trois fermes pour abus de confiance, introduction frauduleuse de données, faux et d'usage de faux, et à des dommages-intérêts d'un montant record de 4 915 610 154 euros. Selon le tribunal, le délit d'abus de confiance est constitué dans la mesure où le
trader, en passant sur les marchés, des ordres exorbitants au regard tant dans leurs nominaux cumulés que des risques qui en découlaient pour la banque, a sciemment détourné les moyens techniques mis à sa disposition en les utilisant à d'autres fins que celles au service desquelles ils lui avaient été confiés. Sur l'introduction frauduleuse de données, estimant, notamment, qu'en toute hypothèse, le caractère frauduleux de l'introduction des données est indépendant du caractère innovant et complexe des techniques employées, de l'évidence de la fictivité des opérations sous-jacentes, le tribunal correctionnel considère que le délit apparaît parfaitement constitué à l'encontre du mis en examen qui a sciemment saisi des opérations sans réalité économique, qu'il a, par la suite, pour partie annulées, dans le seul but de masquer ses engagements hors mandat et hors limites. Sur les délits de faux et d'usage de faux, le tribunal relève notamment que le texte des courriels adressés par le mis en examen a été choisi afin de répondre précisément aux attentes des services de contrôle qui le questionnaient et d'échapper à leur sagacité, tout en impliquant dans ces réponses des tiers totalement étrangers à ses malversations, dont il usurpait la signature sans le moindre scrupule. Dès lors, la culpabilité résulte d'agissements multiples et de natures diverses répondant à une stratégie occulte qui lui est personnellement et exclusivement imputable. Enfin, sur la peine, le tribunal retient que le mis en examen a su développer des stratégies innovantes et appréciées de ses supérieurs et recourir de façon occulte à des pratiques dont il a estimé que l'efficacité l'autorisaient à s'affranchir des règles, qu'il s'est livré à un total renversement des rôles en se positionnant comme victime d'un système dont il se dit la créature et que, bien au-delà de la trahison de la confiance professionnelle, le cynisme des agissements s'est exprimé lorsqu'il a prétendu que la banque avait fait preuve d'opportunisme en se saisissant de son affaire pour relativiser les pertes découlant de la crise des
subprimes et qu'il a mené une campagne de communication, prenant à témoin cette fois-ci l'opinion publique. Enfin sur l'action civile, le tribunal retient que les dommages de la banque trouvent leur origine dans la prise de positions directionnelles hors mandat pour un montant nominal global équivalent au double des fonds propres de la banque et s'étendent à la totalité des pertes enregistrées des suites des opérations de débouclage desdites positions.
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