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par Frédéric Dal Vecchio, Juriste-Fiscaliste et Chargé d'enseignement à l'Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines
le 07 Octobre 2010
L'arrêt "Helidan" rapporte des faits dont la gravité est, malheureusement, loin d'être exceptionnelle en entreprise : ils engendrent des conséquences intéressantes du point de vue de la procédure.
Une compagnie d'hélicoptères, ayant notamment pour activité l'école de pilotage et le transport de personnes pour des vols touristiques, fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle des redressements lui sont notifiés. A cette occasion, la société contribuable découvre des détournements de fonds commis par une personne, ayant usurpé le titre d'expert-comptable, au moyen de déclarations de crédits de TVA qui entraîneront ultérieurement une condamnation prononcée par le juge correctionnel.
En premier lieu, eu égard à la faculté de se faire assister par le conseil de son choix pour discuter la notification de redressements (LPF, art. L. 54 B N° Lexbase : L5586G4N), la société se fonde sur la nullité du mandat pour erreur sur la qualité du mandataire (C. civ., art. 1110 N° Lexbase : L1198ABY). La société contribuable reprochait à l'administration de ne pas l'avoir prévenue immédiatement de l'existence de discordances substantielles quant à la TVA au point de discréditer "nécessairement l'interlocuteur du vérificateur". La société Helidan prétendait alors en tirer argument car la requérante a subodoré que la personne mandatée avait tenté, avant toute chose, de sauvegarder ses intérêts propres en ne fournissant pas les explications qui auraient nécessairement mis en évidence les manoeuvres frauduleuses dont elle s'était rendue coupable.
Le mandant dispose de toute latitude pour choisir son mandataire : les dispositions du Code civil admettent même la désignation d'un incapable mineur (C. civ., art. 1990 N° Lexbase : L2213ABL) ; la jurisprudence ayant étendu cette solution à l'ensemble des incapables (Cass. civ., 5 décembre 1933, DH, 1934, p. 49 et s., 1935, 1 25 ; J. Huet, J. Ghestin (dir.), Traité de droit civil Les principaux contrats spéciaux, LGDJ, 2001, p. 1102).
Il est de la responsabilité du seul mandant de nommer et de révoquer le mandataire s'il s'avère que ce dernier n'est pas digne de sa confiance (C. civ., art. 2004 N° Lexbase : L2239ABK). En droit fiscal, la doctrine administrative a toujours affirmé la liberté de choix du contribuable quant au conseil retenu qui n'est d'ailleurs pas nécessairement un membre d'une profession libérale tel qu'un avocat, un notaire ou un expert-comptable (1). Et l'administration fiscale n'est pas tenue d'exiger un mandat exprès (CE Contentieux, 31 mai 2000, n° 178122, M. Catania N° Lexbase : A4038AWH ; CE Contentieux, 29 mars 1978, n° 4460, M. Delaporte N° Lexbase : A2466AI8 (2) ; v. dans le même sens pour le juge de l'impôt judiciaire : Cass. com., 31 octobre 2006, n° 05-11.013, SCI Rosalie N° Lexbase : A2030DSY) ce qui va dans le sens des dispositions du Code civil régissant le mandat (3) (C. civ., art. 1985 N° Lexbase : L2208ABE). La jurisprudence, en s'appuyant sur l'apparence, valide le principe même d'une procédure de vérification de comptabilité lorsque l'interlocuteur de l'administration fiscale a agi de fait (CAA Marseille, 3ème ch., 24 mars 2005, n° 02MA01886, Ministre de l'Economie c/ Société YBB N° Lexbase : A6761DHU). Par conséquent, l'argumentation de la société requérante reposant sur l'absence de mandat signé ne pouvait prospérer.
Les circonstances de l'espèce soulèvent une interrogation quant au droit au débat oral et contradictoire -qui est une garantie substantielle de la procédure (CE Contentieux, 21 mai 1976, n° 94052 N° Lexbase : A1516AXG ; CE 7° s-s., 2 mai 1990, n° 58215, Donati, RJF, juin, 1990, n° 721 ; S. Austry, Débat oral et contradictoire : où en est la jurisprudence ?, RJF, mars 1997, p. 142) et dont la charge de la preuve, en cas de méconnaissance par l'administration, repose sur le contribuable (CE 9° et 10° s-s-r., 2 octobre 2002, n° 224786, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ Mlle de Noyer N° Lexbase : A9503AZY) sous l'appréciation souveraine des juges du fond (CE Contentieux, 18 octobre 1996, n° 160839, M. Mallet N° Lexbase : A1275APW) -quand bien même, ainsi que l'énonce la cour administrative d'appel de Versailles, l'administration fiscale n'aurait pas l'obligation de prévenir immédiatement le dirigeant de la société vérifiée des carences "susceptibles de mettre en cause la responsabilité de son comptable". Dans l'état actuel de la jurisprudence du Conseil d'Etat, "le contrôle du juge porte moins sur l'objet du débat oral et contradictoire que sur les conditions de sa possibilité. Ce contrôle porte uniquement sur la mise en place des conditions favorables à l'intervention de ce dialogue" (concl., P. Collin, sous CE 3° et 8° s-s-r., 30 décembre 2002, n° 231167, SARL Le Grand Bazar, BDCF, 2003, n° 41). Au cas d'espèce, même si la société requérante prétend que la procédure n'a été menée exclusivement qu'avec la personne indélicate, la cour administrative d'appel de Paris relève qu'il résulte de l'instruction qu'une seconde personne était également mandatée pour suivre la procédure. La requérante ne rapporte pas la preuve que ce second mandataire n'aurait pas suivi les opérations de vérification de comptabilité dans des conditions satisfaisant les droits de la société contribuable. La juridiction d'appel en conclut alors que rien ne permet d'affirmer que l'ensemble des circonstances propres à cette affaire ait été incompatible avec un débat oral et contradictoire avec le vérificateur. En d'autres termes, pour la cour administrative d'appel de Paris, à défaut de preuve d'absence de débat oral et contradictoire entre le contribuable et l'administration fiscale, qu'importe la qualité de l'échange même s'il a été mené avec une personne ayant usurpé un titre professionnel protégé par la loi : l'administration fiscale a permis à la société requérante de nouer un débat avec elle. Il appartiendra en conséquence aux contribuables de savoir choisir avec discernement le mandataire qui les représentera !
S'agissant de l'attitude de l'administration fiscale qui a reçu pendant plusieurs années des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée présentant un crédit alors même que la société Helidan soutient que son activité ne le permettait pas, sur le plan des principes, le contribuable est responsable des déclarations souscrites, fût-ce par l'intermédiaire d'un tiers. En revanche, en matière de recouvrement de l'impôt, dans une hypothèse qui n'intéresse pas ici la société Helidan, il est vrai que la jurisprudence accepte de prendre en compte l'incurie des services de l'Etat -et plus particulièrement du comptable public- lorsque ce dernier n'a pas mis en oeuvre avec diligence la procédure de solidarité à l'encontre des dirigeants d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement en cas d'impossibilité de recouvrer les impositions et pénalités dues puisque les dispositions de la loi visent une responsabilité exclusive incompatible, par essence, avec la carence du comptable public (LPF, art. L. 267 N° Lexbase : L3699HBM ; Cass. com., 22 mai 1991, n° 89-19.675, M. Marsac c/ Receveur divisionnaire des Impôts de Niort et autre N° Lexbase : A2801ABD ; instruction du 6 septembre 1988, BOI 12 C-20-88 N° Lexbase : X0670AA3).
La société Helidan entendait aussi opposer la violation de l'obligation de loyauté envers le contribuable inscrite dans la charte du contribuable de 2005 mais l'on sait que son contenu est inopposable aux agents de l'administration fiscale à la différence de la "charte des droits et obligations du contribuable vérifié" (LPF, art. L 10 N° Lexbase : L3904AL8) dont la méconnaissance par l'administration emporte des conséquences quant à la régularité de la procédure. En définitive, la charte de l'automne 2005 n'est que l'expression d'une politique de communication. Sur ce point, l'argumentation de la requérante ne pouvait aboutir.
Enfin, s'agissant de la possibilité prévue par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié de saisir la hiérarchie du vérificateur -c'est-à-dire l'inspecteur divisionnaire ou principal puis, en cas de divergences importantes, l'interlocuteur départemental- la cour administrative d'appel de Versailles répond que ladite charte n'exige pas "que l'un ou l'autre prenne position expressément sur la demande du contribuable". Dans ces conditions, nous avons peine à comprendre l'intérêt de tels recours si les personnes saisies n'ont aucune obligation d'y répondre, sauf à retarder l'issue inéluctable d'un recours devant le juge de l'impôt. C'est peut-être l'effet recherché (4). Au cas d'espèce, la juridiction d'appel estime qu'il n'a pas été porté atteinte aux droits de la société contribuable et que la procédure d'imposition n'est pas irrégulière au sens de l'article L. 10 du LPF dès lors que l'interlocuteur départemental lui a répondu ne pas prendre position avant l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.
L'arrêt "Voiron" s'inscrit dans le cadre de plusieurs contentieux opposant des associés d'une même société à l'administration fiscale sur lesquels la juridiction administrative a été appelée à statuer (v. également : CAA Lyon, 2ème ch., 3 juillet 2008, n° 05LY00890, M. Paul Voiron N° Lexbase : A4314EAZ ; CAA Lyon, 2ème ch., 3 juillet 2008, n° 05LY00891, M. Louis Voiron N° Lexbase : A4315EA3 ; CAA Lyon, 2ème ch., 3 juillet 2008, n° 05LY00892, M. Pierre Voiron N° Lexbase : A4316EA4).
Sur le plan procédural, concernant la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (CDI) qui peut être saisie par l'administration fiscale elle-même ou à la suite de la demande du contribuable formulée auprès de l'administration (LPF, art. L. 59 N° Lexbase : L3970ALM), le requérant reprochait à l'administration fiscale d'avoir rejeté sa demande de saisine et d'avoir biffé la mention écrite, sur la réponse aux observations du contribuable, de la possibilité de saisir la CDI. Cependant, aux termes de l'article L. 59 A en vigueur à l'époque des faits (N° Lexbase : L8554AEK), la CDI intervenait lorsque le désaccord portait sur, notamment, le montant du bénéfice industriel et commercial. Or, au cas d'espèce, ce n'était pas le montant des bénéfices qui était discuté mais le principe même de l'imposition entre les mains des associés en l'absence de perception d'une somme. La CDI était par conséquent incompétente (v. : CE 3° et 8° s-s-r., 1er décembre 2004, n° 250344, Société France Telecom Transpac N° Lexbase : A1036DE4 (5)) puisqu'elle est appelée à trancher des questions de fait et non de droit (QE n° 2319, de Hénart Laurent, réponse publiée au JOANQ du 21 octobre 2002, p. 3723 N° Lexbase : L4518A8T ; v. depuis la réforme opérée par l'article 26 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004, de finances rectificative pour 2004 : instruction du 18 avril 2005, BOI 13 M-1-05 [LXB= X0480AD7] (6)).
Sur le fond, ce contentieux a trait aux modalités d'imposition d'associés d'une société à responsabilité limitée qui, par principe, relève des dispositions de l'article 206 du CGI relatives à l'impôt sur les sociétés (CGI, art. 206 N° Lexbase : L2389IB4) mais, en l'espèce, a profité du régime fiscal des sociétés de personnes (CGI, art. 239 bis AA N° Lexbase : L4952HLY) permettant aux SARL nouvelles ou préexistantes, dont le capital est détenu par les membres d'une même famille, de relever de l'impôt sur le revenu avec l'accord de tous les associés (CGI, art. 8 N° Lexbase : L2311IB9).
Par voie contractuelle, les créanciers de la SARL Voiron frères ont renoncé, à la condition de pouvoir poursuivre le contribuable au titre d'un cautionnement qu'il avait souscrit au profit de l'un des créanciers, à la poursuite du recouvrement des créances moyennant leur paiement partiel pour solde de tout compte par la société débitrice et l'indivision Joseph Voiron, dont faisait partie le contribuable requérant. Le contrat précise, alors, que le versement a eu lieu et que la renonciation des créanciers "a été définitive et sans réserve".
Sur le plan fiscal, il n'est pas contestable que ces abandons de créances consentis par les créanciers de la SARL doivent être regardés, dans les livres comptables de la débitrice, comme un produit imposable. Ce faisant, en application de l'article 8 du CGI, l'associé requérant était imposable à raison de sa quote-part dans le capital de la société à responsabilité limitée. Ainsi, l'argumentation -classique- reposant sur l'absence d'appréhension matérielle de la somme correspondante est sans portée puisque l'on sait que la doctrine administrative a précisé que "les associés sont passibles de l'impôt dès la réalisation des bénéfices ou revenus" (Doc. adm. 5 B 142, du 1er septembre 1999). Il n'est aucunement fait référence au versement des bénéfices ou revenus aux intéressés (v. ainsi dans l'hypothèse d'un associé commandité d'une société en commandite simple : CE Contentieux, 8 juillet 1992, n° 81365, M. Guaveia N° Lexbase : A7304ARX).
S'agissant du principe d'imposition d'un revenu net de charges (CGI, art. 13 N° Lexbase : L1050HLH), ce qui s'entend de la prise en compte "des dépenses effectuées en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un revenu", la cour administrative d'appel de Lyon estime que le contribuable -qui ne percevait aucune rémunération de la société à responsabilité limitée- aurait pu déduire de son revenu imposable, au titre des bénéfices industriels et commerciaux, le versement effectué. Cependant, la juridiction d'appel estime, en l'espèce, que tel n'était pas le cas en s'appuyant sur le fait que le contribuable "n'allègue même pas que le versement d'une somme par l'indivision Joseph Voiron aurait été une condition mise à ce qu'il puisse en percevoir, ou aurait été de nature à augmenter en proportion sa quote-part des résultats d'exploitation de la société au titre desquels il est personnellement imposable".
A la suite d'une vérification de comptabilité d'une activité d'agent d'assurances et d'un contrôle sur pièces portant sur des revenus fonciers, des redressements sont notifiés par l'administration fiscale au contribuable.
En appel (CAA Paris, 5ème ch., 18 septembre 2006, n° 04PA02319, M. Patrick Cayrou N° Lexbase : A2471DSC), le contribuable prétend que l'administration aurait usé d'une méthode de reconstitution des recettes et des dépenses viciée. Or, une méthode de reconstitution est utilisée lorsque la comptabilité fait défaut ou lorsqu'elle est irrégulière (7) (v. s'agissant d'un restaurant pour une méthode de reconstitution dite "des vins" : CAA Paris, 5ème ch., 30 septembre 2004, n° 00PA01510, M. Ibrahim Soliman N° Lexbase : A2831DEL) au point de la rejeter comme non probante malgré son apparence régulière en la forme. Au cas particulier, l'administration fiscale s'est bornée à vérifier l'exactitude des déclarations et elle a pris soin de relever, dans la notification de redressements, que la quasi-totalité des justificatifs réclamés lui avaient été présentés : par conséquent, l'administration n'avait utilisé aucune méthode de reconstitution de comptabilité.
S'appuyant, notamment, sur les dispositions de l'article 240 du CGI dans les termes alors en vigueur au moment des faits (N° Lexbase : L5002HLT) -"Les personnes physiques qui, à l'occasion de l'exercice de leur profession versent à des tiers des commissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations, honoraires occasionnels ou non, gratifications et autres rémunérations, doivent déclarer ces sommes dans les conditions prévues aux articles 87, 87 A et 89, lorsqu'elles dépassent 500 F par an pour un même bénéficiaire"- la cour administrative d'appel de Paris énonce que le contribuable n'a pu contester la réalité des sommes versées à ce titre par des personnes physiques agissant pour le compte de compagnies d'assurances et qu'il n'a pas établi "que les sommes litigieuses auraient dû être imputées sur un autre exercice". En substance, de telles déclarations emportent présomption.
Cette prise de position justifiera la censure du Conseil d'Etat et le règlement de l'affaire au fond (CJA, art. L. 821-2 N° Lexbase : L3298ALQ).
En effet, pour la Haute juridiction administrative, les dispositions de l'article 240 du CGI "n'instituent pas une présomption de versement opposable au bénéficiaire désigné dans la déclaration". Par conséquent, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit en jugeant que le contribuable devait établir l'exactitude des sommes versées par les compagnies d'assurance ainsi que leurs dates d'encaissement. La présente décision "Cayrou" doit être rapprochée de la jurisprudence "Elia" de 1996, la Haute juridiction administrative ayant déjà eu l'opportunité de rappeler que les dispositions de l'article 240 du CGI "n'institu[aient] pas une présomption de versement opposable au bénéficiaire désigné dans la déclaration" (CE Contentieux, 28 février 1996, n° 128087, Ministre chargé du Budget c/ M. Elia N° Lexbase : A7543ANP). Les mêmes conclusions s'imposent quant aux déclarations annuelles souscrites à la suite du versement des salaires par les employeurs (TA Versailles, 1ère ch., 4 juillet 1995, req. n° 87-5248, M. Michelon, concl. V. Haïm, Dr. fisc., 1996, comm. 607) qui peuvent être utilisées comme moyen de preuve corroboré par d'autres éléments réunis par l'administration (CE Contentieux, 2 février 1990, n° 62056, M. Boucard N° Lexbase : A4931AQP ; CAA Bordeaux, 3ème ch., 7 février 1995, n° 93BX00820, Michel Bernat N° Lexbase : A0699BEM).
La jurisprudence du Conseil d'Etat doit d'autant plus être approuvée que l'administration ne peut s'en tenir aux seules mentions figurant dans de tels documents dès lors que des charges -sociales notamment- viennent en déduction des versements et ne permettent pas d'établir une totale correspondance entre les sommes déclarées et celles perçues. De plus, le régime des bénéfices non commerciaux de droit commun relève de la comptabilité de caisse (CGI, art. 93 N° Lexbase : L0547HW8) à laquelle sont soumis les agents d'assurances (8) (CE Contentieux, 23 février 1979, n° 11426 N° Lexbase : A1783AKA). Or, en retenant la méthode des créances acquises -qui ne peut faire l'objet que d'une option exercée par le contribuable depuis le 1er janvier 1996 (CGI, art. 93 A N° Lexbase : L1987HL8) et dont les faits de l'espèce ne rapportent pas l'existence puisque l'arrêt d'appel vise l'article 93 du CGI- l'administration fiscale "n'a pas vérifié si certaines des sommes n'avaient pas été encaissées par le requérant au cours de l'année suivant celle de leur versement par les sociétés". Elle a ainsi nécessairement méconnu le référentiel de la comptabilité de caisse dans lequel s'inscrivait le contribuable car un décalage temporel peut survenir entre le versement des sommes par le débiteur et la possibilité pour le contribuable, soumis au régime de droit commun des bénéfices non commerciaux, de les encaisser et de les comptabiliser étant entendu que, selon la jurisprudence, une somme est réputée encaissée à la date où le bénéficiaire en a eu la libre disposition (D. adm. 5 G-221 n° 5, 15 septembre 2000 ; v. pour un paiement par chèque : CE Contentieux, 3 avril 1981, n° 18320 N° Lexbase : A3638AKX ; pour un paiement par virement bancaire : CE 9° et 10° s-s-r., 21 juin 2002, n° 222179, M. Manseau N° Lexbase : A9687AYG).
En toute cohérence, le Haut conseil conclut à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu pour les années considérées car il appartenait "à l'administration de justifier de la réalité du versement au titre de chacune des années vérifiées des sommes que les compagnies d'assurances ont déclaré avoir versées".
On rappellera un fait déterminant dans cette affaire dont l'administration fiscale a méconnu les conséquences en terme de procédure : le contribuable n'a jamais acquiescé aux redressements émis à son encontre et la charge de la preuve a alors toujours pesé sur l'administration (jurisprudence constante, notamment : CE 9° et 7° s-s-r., 29 janvier 1975, n° 90138 N° Lexbase : A9624B8X ; CE Contentieux, 18 mars 1981, n° 16881 N° Lexbase : A3894AKG ; CE Contentieux, 18 octobre 1993, n° 93876, SCI Le Vasco de Gama N° Lexbase : A1021AN7 ; CE 3° et 8° s-s-r., 16 juin 2003, n° 241983, M. Gardet N° Lexbase : A8688C8B, concl. F. Séners, BDCF, octobre 2003, n° 118).
(1) "Le mot conseil' contenu dans le texte légal n'est pas employé par référence à un texte organisant une profession. Il en résulte que le contribuable peut choisir n'importe quelle personne comme conseil (c'est ainsi que le mari peut assister, comme conseil, sa femme exploitante)", Doc. adm., 13 L 1312, § 3, 1er juillet 2002.
(2) "Considérant que si, aux termes des articles 1649 septies [N° Lexbase : L1843HM9] à 1649 septies F du CGI, les vérifications doivent se dérouler chez le contribuable, il résulte de l'instruction que si, après avoir commencé chez le sieur Delaporte la vérification du chiffre d'affaires déclaré pour la période en litige s'est poursuivie et achevée dans le cabinet de son comptable, c'est le contribuable lui-même qui avait emporté et déposé chez celui-ci les livres et les pièces qui en étaient l'objet ; que, dans ces circonstances, la possibilité d'un débat oral et contradictoire ayant été offerte au sieur Delaporte, la vérification doit être tenue pour régulière, sans qu'il y ait lieu de rechercher si ce dernier avait donné à son comptable un mandat exprès de le représenter".
(3) "Le mandat peut tout aussi bien être verbal, ajoute l'article 1985, et cela montre que, sous réserve de conditions de preuve, le Code civil ne pose pas d'exigence particulière pour l'existence du mandat : le principe est donc le consensualisme, ce qui laisse la plus grande liberté aux parties", J. Huet, op. cit., p. 1127.
(4) "Le droit fiscal, encore davantage que le droit administratif, tend à multiplier les autorités consultatives pour encadrer le travail de l'administration. [...] ce sont des autorités ni tout à fait administratives, ni tout à fait juridictionnelles. Et pour cause, le fisc se sert de ces commissions pour poser des étapes supplémentaires entre lui-même et le juge. A nouveau, il cherchait à conserver la mainmise sur le contentieux fiscal", C. de la Mardière, Recours pour excès de pouvoir et contentieux administratif de l'impôt, LGDJ, coll. : Bibliothèque de science financière, 2002, p. 239.
(5) "Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des énonciations de l'arrêt attaqué, la Société France Telecom Transpac a également fait valoir, aux mêmes fins que les précédents moyens d'appel, qu'elle avait été privée de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, toutefois, en vertu de l'article L. 59 A du Livre des procédures fiscales, la commission susmentionnée ne peut compétemment connaître, en matière d'impôt sur les sociétés, que des désaccords portant sur le montant du bénéfice industriel et commercial ; que, dès lors, en jugeant que le litige opposant la Société France Telecom Transpac au service et portant sur le droit à imputation, sur ce bénéfice, de certains crédits d'impôts n'entrait pas dans le champ de cet article et en jugeant, par suite, que la substitution, en cours d'instance contentieuse, de la procédure de redressement contradictoire à la procédure de répression des abus de droit initialement diligentée à l'encontre de cette société n'avait pas privé l'intéressée, dans les circonstances de l'espèce, de la possibilité de saisir ladite commission, la cour n'a pas commis d'erreur de droit".
(6) "L'article L. 59 A du Livre des procédures fiscales (LPF), modifié par la loi précitée, élargit la compétence de la commission départementale à l'examen des conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allègements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, et précise, dans les matières pour lesquelles elle est appelée à formuler un avis, la nature des désaccords qui peuvent être soumis à son appréciation. Ainsi, le texte prévoit la compétence de la commission à l'égard de toutes les questions de fait, y compris lorsque les faits contribuent à la qualification juridique d'une opération, et instaure un pouvoir de qualification des faits dans des cas exceptionnels où le droit et le fait sont étroitement liés, tels que le caractère anormal d'un acte de gestion, le principe et le montant des amortissements et des provisions, le caractère déductible des travaux immobiliers".
(7) "Considérant que M. S., qui ne conservait pas les notes de restaurant, a présenté au vérificateur des bandes de caisse enregistreuse découpées journellement, circonstance ne permettant pas à ce dernier de s'assurer que la totalité des recettes était retracée ; qu'en outre, l'état des stocks de l'année concernée n'était pas détaillé et qu'au 31 décembre 1985, la caisse dégageait un solde inexpliqué ; qu'enfin, le service établit par un procès-verbal de la brigade spécialisée du Pas-de-Calais et des pièces y annexées ainsi que par une ordonnance du juge d'instruction d'Arras que le contribuable s'est livré par deux fois, durant la période vérifiée, à des achats sans facture ; que ces circonstances, qui étaient de nature à faire regarder la comptabilité comme entachée d'irrégularités et dépourvue de valeur probante, autorisaient le vérificateur à reconstituer les recettes du contribuable selon une méthode extra-comptable ; que les redressements étant conformes à l'avis émis le 23 janvier 1990 par la commission départementale des impôts, il incombe à M. S., en application de l'article L. 192 du Livre des procédures fiscales, d'établir l'exagération des impositions qu'il conteste".
(8) Ils peuvent, à certaines conditions, voir leurs revenus imposables selon les règles ayant court en matière de traitements et salaires.
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