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N8784BCC
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par David Bakouche, Professeur agrégé des Facultés de droit
le 01 Novembre 2013
Ainsi la jurisprudence a-t-elle eu à connaître du cas dans lequel l'obligé se garde bien de révéler à l'autre que la condition suspensive ne pourra se réaliser parce qu'elle a déjà défailli. La question s'était explicitement posée dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 31 mars 2005 (4). En l'espèce, une promesse de vente avait été conclue sous condition d'obtention d'un certificat d'urbanisme ou d'une note de renseignement d'urbanisme ne révélant aucune restriction significative susceptible de déprécier l'immeuble ou le rendre impropre à sa destination et sous condition de l'absence de servitude légale ou conventionnelle. Or, le bénéficiaire, ayant appris que le vendeur avait créé sur le fonds une servitude au profit du fonds voisin, avait finalement demandé l'exécution de la convention, donc la réalisation de la vente, renonçant ainsi à se prévaloir de la condition suspensive, mais avait sollicité en parallèle des dommages et intérêts sous la forme d'une réduction du prix. La Cour de cassation, pour rejeter cette demande, énonce que "les époux n'avaient pour seule alternative que de se prévaloir de la caducité de la promesse ou d'y renoncer et de poursuivre la vente aux conditions initiales, ce qu'ils avaient refusé", si bien qu'ils n'étaient pas fondés à demander la réalisation forcée de la vente moyennant la réduction du prix à titre de dommages et intérêts. L'arrêt enseigne donc, en traitant la question de la défaillance de la condition de façon purement objective, que le contrat est en quelque sorte à prendre ou à laisser pour le contractant en faveur duquel la condition avait été stipulée, sans qu'une renégociation ne soit concevable en considération de la bonne ou de la mauvaise foi de l'autre partie.
Une dernière hypothèse reste à envisager : celle de la prise en considération de la bonne ou de la mauvaise foi du promettant qui invoque la défaillance de son cocontractant dans la réalisation attendue de la condition suspensive. Un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 14 septembre 2005 est, à cet égard, éclairant (5). En l'espèce, des époux promettent de vendre un immeuble donné à bail à des tiers auxquels ils ont délivré congé. Ils le font sous condition suspensive que la maison soit libérée au jour de la vente par acte authentique. Or, la condition ne s'étant pas réalisée dans le délai convenu, les promettants vendent le bien, moyennant un prix supérieur, à d'autres que leurs cocontractants. Ceux-ci les assignent, demandant, d'une part, la nullité de la vente et, d'autre part, que la vente soit à leur égard considérée comme parfaite. Les juges du fond avaient accueilli ces prétentions, faisant valoir que les promettants devaient soumettre leur nouvelle proposition à ceux auxquels ils avaient initialement promis de vendre et qui avaient été évincés par l'attitude inconséquente des locataires laissés en place. Leur décision est cependant cassée, sous le visa de l'article 1134, alinéa 3, du Code civil (N° Lexbase : L1234ABC) : "en statuant ainsi, alors que l'obligation de bonne foi suppose l'existence de liens contractuels et que ceux-ci cessent lorsque la condition suspensive auxquels ils étaient soumis a défailli, la cour d'appel a violé le texte susvisé". Autrement dit, et c'est l'apport de l'arrêt, une fois la défaillance de la condition acquise, l'éventuelle mauvaise foi du promettant devient indifférente.
(1) Cass. civ. 3, 12 septembre 2007, n° 06-15.640, Mme Jeannine Grégoire, veuve Tournay, FS-P+B (N° Lexbase : A2167DYW) et nos obs., Promesse de vente immobilière et défaillance de la condition suspensive, Lexbase Hebdo n° 274 du 25 septembre 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N4965BCU).
(2) Voir, not., Cass. civ. 1, 13 novembre 1997, n° 95-18.276, M. Gabizon et autre (N° Lexbase : A0647ACX), Bull. civ. I, n° 310 ; Cass. civ. 1, 9 février 1999, n° 97-10.195, Epoux Dubuis c/ Epoux Herolt (N° Lexbase : A0167AUQ), Bull. civ. I, n° 50 ; Cass. civ. 1, 7 mai 2002, n° 99-17.520, M. Sylvain Lefebvre c/ M. Jean-François Segard, F-P (N° Lexbase : A6204AYG), Bull. civ. I, n° 124.
(3) Cass. civ. 3, 8 décembre 1999, n° 98-10.766, Société Pia c/ Epoux Guillard et autre (N° Lexbase : A5417AWK), Bull. civ. III, n° 240.
(4) Cass. civ. 3, 31 mars 2005, n° 04-11.752, M. Pascal Moreau c/ M. Frédéric Fernandez, FS-P+B (N° Lexbase : A4572DHS), RJDA 2005, n° 946, p. 807.
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