La lettre juridique n°235 du 9 novembre 2006 : Social général

[Textes] La création d'un "dividende du travail" par le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié

Réf. : Projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié

Lecture: 5 min

N4893ALS

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Textes] La création d'un "dividende du travail" par le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3208655-textes-la-creation-dun-dividende-du-travail-par-le-projet-de-loi-pour-le-developpement-de-la-partici
Copier

par Nicolas Mingant, Ater en droit privé à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

le 07 Octobre 2010

Après concertation avec les partenaires sociaux et consultation du Conseil supérieur de la participation, l'Assemblée nationale a adopté, le 11 octobre 2006, en première lecture, après déclaration d'urgence, un projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié. Ce projet avait été présenté en Conseil des ministres une première fois le 21 juin 2006, puis, après qu'une lettre rectificative lui ait ajouté plusieurs dispositions, une seconde fois le 21 septembre 2006. Ces dernières dispositions ne seront pas abordées dans ce commentaire, dont l'objet se limitera à présenter brièvement les principales mesures concourant à la création d'un "dividende du travail".
  • Intéressement

L'article 1er du projet de loi institue un article L. 442-14-1 dans le Code du travail. Selon le 1°) de cet article, le conseil d'administration, le directoire ou le chef d'entreprise peut décider de verser un supplément d'intéressement au titre de l'exercice clos selon les modalités de répartition prévues par l'accord d'intéressement ou par un accord spécifique, ces sommes (qui bénéficient du même régime fiscal et social que celle issues du calcul de base) pouvant, notamment, être affectées à la réalisation d'un plan d'épargne d'entreprise, d'un plan d'épargne interentreprises ou d'un plan d'épargne pour la retraite collectif.

Selon l'exposé des motifs du projet de loi, cette possibilité d'attribuer un supplément d'intéressement vise à faire bénéficier du dispositif "les entreprises qui souhaitent davantage s'appuyer sur l'intéressement, outil de motivation très prisé, ou qui ne sont pas assujetties à la participation".

Le projet crée, également, une nouvelle catégorie d'intéressement (par l'ajout d'un alinéa à l'article L. 441-1 du Code du travail N° Lexbase : L7694HBL). Il s'agit d'un "intéressement de projet", institué par les accords d'intéressement, "au profit de tout ou partie des salariés d'une entreprise concourant avec d'autres entreprises, juridiquement indépendantes ou non, à une activité caractérisée et coordonnée".

  • Participation

Selon le 2°) de l'article L. 442-14-1 nouveau du Code du travail, les organes dirigeants de l'entreprise peuvent également verser un supplément de réserve spéciale de participation selon les modalités de répartition prévues par l'accord de participation ou par un accord spécifique.

Ces dispositions ont, notamment, pour objectif de pallier les insuffisances de la formule de calcul actuelle de la participation, dont les artisans du projet de loi voudraient qu'elle devienne un simple minimum légal. Chaque entreprise serait, au-delà de ce minimum légal, autorisée, en fonction de ses spécificités, à adopter ses propres critères de "partage des fruits de la croissance".

Il convient d'observer que l'idée initiale d'imposer la participation dans les entreprises de moins de 50 salariés a été abandonnée, notamment parce que le patronat et le Conseil supérieur de la participation s'y sont fermement opposés.

L'article 5 du projet de loi crée, cependant, un article L. 442-15-1 du Code du travail qui institue une obligation de négocier en la matière.

Dans les 3 ans de la publication de la loi, syndicats et patronat devront négocier, au niveau des branches, des accords de participation applicables dans les entreprises de moins de 50 salariés. En l'absence d'initiative patronale, une négociation devra s'ouvrir dans les 15 jours suivant la demande d'une ou plusieurs organisations représentatives. Au final, les entreprises concernées resteront, cependant, libres d'appliquer ou non les accords éventuellement conclus au niveau des branches.

  • Elargissement de l'actionnariat salarié

Aux termes de l'article 16 du projet de loi, l'article L. 443-6 du Code du travail permet, désormais, aux entreprise d'attribuer à l'ensemble de leurs salariés des actions gratuites placées sur un plan d'épargne d'entreprise (dans la limite d'un montant égal à 7,5 % du plafond annuel de la Sécurité sociale par adhérent).

Pour les entreprises émettrices, les charges liées à l'attribution de ces actions sont déductibles de l'assiette de l'impôt sur les sociétés, à condition qu'elles soient attribuées à l'ensemble des salariés, de manière homogène et selon des critères objectifs.

Plus précisément, la répartition peut être uniforme, proportionnelle à la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'exercice ou proportionnelle aux salaires ou retenir conjointement ces différents critères. Il s'agit, en la matière, ainsi que l'indique l'exposé des motifs, de donner une "incitation forte au développement d'un actionnariat salarié large, qui ne soit pas excessivement affecté par les différences de capacité contributive des salariés selon leurs revenus".

L'indisponibilité de 5 ans, attachée au placement des actions sur le PEE (il était à l'origine question de ramener le délai d'indisponibilité de 5 à 3 ans mais l'idée a été abandonnée au cours de la procédure parlementaire), gage d'un actionnariat salarié durable, s'accompagnera pour les salariés de l'exonération d'impôt sur le revenu de l'avantage financier résultant de l'attribution définitive des actions ("gain d'acquisition") et de la plus-value réalisée lors de leur cession.

  • Groupements d'employeurs et groupements d'intérêt économique

La diffusion et l'élargissement de la participation et de l'intéressement, objectifs du projet de loi, doivent être adaptés aux nouvelles formes d'activité ou d'association juridique d'entreprises. Pour cette raison, l'article 3 du projet pose le principe de l'assujettissement des groupements d'employeurs et groupements d'intérêt économique aux dispositifs de négociation d'accords de participation, d'épargne salariale et d'intéressement en les adaptant (les articles L. 132-27 N° Lexbase : L3139HI4, L. 441-2 N° Lexbase : L7695HBM et L. 442-2 N° Lexbase : L6958GTU du Code du travail sont, notamment, modifiés en ce sens).

  • Sécurisation des accords

L'objectif de développement de la participation et de l'actionnariat salarié ne peut être atteint sans une certaine sécurisation des accords collectifs adoptés en la matière. C'est pourquoi l'article 8 du projet :

- permet que l'accord d'intéressement, l'accord de participation et le règlement d'un plan d'épargne, lorsqu'ils sont conclus concomitamment, fassent l'objet d'un dépôt commun auprès de l'administration (ajout d'un alinéa à l'article L. 132-27) ;

- facilite le dépôt des accords d'intéressement. Ceux-ci n'ont plus à être déposés dans le délai très court de 15 jours après leur signature mais dans un délai plus large, ce qui permettra ainsi d'éviter aux entreprises une contrainte conduisant à la perte des bénéfices fiscaux et sociaux attachés aux dispositifs (modification de l'article L. 441-2 du Code du travail) ;

- oblige l'administration et les organismes de recouvrement des cotisations sociales à se prononcer sur la conformité des accords proposés aux textes en vigueur dans un délai de 4 mois. En l'absence d'observation motivée dans ce délai, les accords et règlements des plans d'épargne et les accords de participation seront considérés comme conformes aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur. Aucun contrôle ultérieur ne pourra conduire à remettre en cause le contenu de ces textes et justifier une requalification conduisant à la restitution des exonérations fiscales et sociales dont auront bénéficié les salariés (institution d'un article L. 444-11 du Code du travail).

  • Participation des salariés actionnaires à la gestion de l'entreprise

Parce que "la démarche du dividende du travail trouve son complément naturel dans l'association des salariés à la marche des entreprises", l'article 15 du projet modifie les premiers alinéas des articles L. 225-23 (N° Lexbase : L5894AI7) et L. 225-71 (N° Lexbase : L5942AIW) du Code de commerce pour définir l'obligation et les modalités de mise en oeuvre de la représentation des salariés actionnaires dans les conseils d'administration et les directoires dès lors que ceux-ci possèdent plus de 3 % du capital de l'entreprise.

Pour ne pas dissuader les petites et moyennes entreprises d'ouvrir leur capital, cette disposition, d'application directe, ne concerne que les entreprises cotées.

Le projet de loi est actuellement devant le Sénat en première lecture et sera discuté en séance publique les mercredi 8, jeudi 9 et vendredi 10 novembre 2006.

newsid:94893

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus