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le 07 Octobre 2010
La loi de sauvegarde des entreprises (loi n° 2005-845, 26 juillet 2005 N° Lexbase : L5150HGT) est, par principe, applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er janvier 2006. Toutefois, certaines dispositions sont applicables, dès la publication de la loi du 26 juillet 2005 au Journal officiel, soit le 27 juillet 2005, aux procédures ouvertes antérieurement. D'autres dispositions, plus nombreuses, sont applicables depuis le 1er janvier 2006 à des procédures ouvertes antérieurement. Il en est ainsi de certaines dispositions intéressant les sanctions. L'occasion a déjà été donnée dans ces colonnes d'évoquer l'application de loi du 26 juillet 2005 à des mesures d'interdiction de gérer prononcées sous l'empire de législations antérieures, en l'occurrence la loi du 13 juillet 1967 (loi n° 67-563, 13 juillet 1967, sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la faillite personnelle et les banqueroutes N° Lexbase : L7803GT8). Une nouvelle difficulté d'application des dispositions transitoires se présente, ici, avec la question de savoir si la loi nouvelle s'applique lorsqu'une procédure de redressement judiciaire à titre de sanction est prononcée contre un dirigeant, alors que l'exécution provisoire de cette décision a été arrêtée dans le cadre d'un appel interjeté à son encontre ?
A cette question, la Cour de cassation, s'appuyant sur l'article 192 de la loi du 26 juillet 2005, répond que "les procédures ouvertes en vertu de l'article L. 624-5 du Code de commerce (N° Lexbase : L3851HBA), dans sa rédaction antérieure à cette loi, ne sont pas affectées par son entrée en vigueur ; il s'ensuit que la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ouverte, à titre de sanction, contre un dirigeant social par une décision prononcée antérieurement au 1er janvier 2006, fût-elle frappée de voies de recours, continue d'être régie par les dispositions du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi précitée, peu important que l'exécution provisoire ait été, le cas échéant, arrêtée".
Cet arrêt est important, comme en atteste les mentions de publication de la Cour de cassation (P+B+I+R). Toute réforme des procédures collectives s'accompagne nécessairement d'une cohorte de problèmes liés à l'application de la législation nouvelle dans le temps, qui sont nécessairement les premières questions que fait naître la loi nouvelle. A certains égards, la législation nouvelle est beaucoup plus douce que la précédente, et, notamment, dans le régime des sanctions civiles et patrimoniales. La tentation est grande de raisonner comme en matière pénale et de considérer que la loi nouvelle plus douce à vocation à régir la situation qui nous occupe. Sanction civile n'est cependant pas sanction pénale. Seul un texte particulier peut donc venir déroger au principe selon lequel la loi nouvelle n'a vocation à régir que les procédures ouvertes à compter de son entrée en vigueur, c'est-à-dire, en l'occurrence, le 1er janvier 2006.
La loi du 26 juillet 2005 a créé, en substitut à la sanction que constitue le redressement ou la liquidation judiciaire à titre personnel, l'obligation aux dettes sociales. Par cette sanction, il s'agit de faire supporter au dirigeant condamné tout ou partie des dettes sociales, sans pour autant placer ce dirigeant sous procédure collective, comme le faisait la législation précédente. Or, cette sanction de l'obligation aux dettes sociales peut être prononcée contre le dirigeant de la personne morale pour toute procédure ouverte contre les personnes morales à partir de l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005 (loi 26 juillet 2005, art. 191-5°), c'est-à-dire le 27 juillet 2005. Mais, pour qu'il en soit ainsi, encore faut-il que le redressement ou la liquidation judiciaire à titre personnel n'ait pas été prononcé contre le dirigeant avant le 1er janvier 2006. En effet, selon l'article 192 de la loi du 26 juillet 2005, les procédures ouvertes à titre de sanction ou au titre de la solidarité avec le débiteur ne sont pas affectées par l'entrée en vigueur de la loi de sauvegarde des entreprises. Ainsi, dès lors qu'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire à titre personnel a été ouverte contre le dirigeant avant le 1er janvier 2006, l'article 191-5° de la loi du 26 juillet 2005 est sans application. Il est donc impossible de condamner le dirigeant à l'obligation aux dettes sociales.
L'article 192 de la loi du 26 juillet 2005 n'exige pas que la décision prononçant le redressement ou la liquidation judiciaire à titre personnel soit devenue définitive. Il vise seulement les "procédures ouvertes à titre de sanction". Peu importe, donc, que la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire à titre personnel soit frappée d'appel. Est tout aussi indifférent le fait que l'exécution provisoire de la décision ait été arrêtée. La discussion pouvait néanmoins exister sur ce point, dans la mesure où, si l'exécution provisoire de la décision est arrêtée, il est possible de soutenir que la procédure à titre de sanction n'a pas été ouverte...
P.-M. Le Corre
Selon l'article 1857, alinéa 1er, du Code civil (N° Lexbase : L2054ABP), "à l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements". L'article 1858 du Code civil (N° Lexbase : L2055ABQ) complète la solution en indiquant que "les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale". Comment, dans ces conditions, coordonner le droit de poursuite à l'encontre d'un associé d'une société civile immobilière avec la procédure collective atteignant cette dernière ?
Cette préoccupation est au coeur d'un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation. Dans cette affaire, la société civile immobilière Vega, comptant au nombre de ses associés la société Promofi, est déclarée en liquidation judiciaire. Après avoir déclaré sa créance et attendu plus de quatre années, la société Nacc demande que la société Promofi soit condamnée à lui payer une somme proportionnelle au montant de sa participation dans le capital social. Sa demande ne sera pas reçue par les juges du fond. Elle forme un pourvoi que la Cour de cassation va, sans surprise, rejeter en ces termes : "si l'exercice des poursuites contre les associés n'est pas subordonné à la clôture de la procédure collective ouverte à l'égard de la société, il appartient au créancier d'établir que le patrimoine social est insuffisant pour le désintéresser ; [qu']en l'espèce, ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que la société Nacc justifie que divers actifs ont été réalisés et déduits de la dette de la société Véga mais ne justifie pas qu'il n'existe plus d'actifs à réaliser et qu'aucun document ne permet de justifier de l'insuffisance du patrimoine social pour couvrir la créance dont le paiement est sollicité ; la cour d'appel a pu [...] décider que la société Nacc n'était pas recevable dans sa demande".
Cet arrêt est intéressant, non pas tant par la nouveauté qu'il introduirait que par les utiles précisions apportées à la recevabilité de l'action d'un créancier d'une société civile immobilière contre les associés de cette dernière.
D'une façon bien classique d'abord, la Cour de cassation réaffirme que la poursuite de l'associé d'une société civile présuppose que le créancier établisse l'insuffisance du patrimoine social pour le désintéresser (Cass. civ. 3, 6 janvier 1999, n° 97-10.645, Société Alain Chevalier Conseil c/ M. Travert et autres, publié N° Lexbase : A2757CG9, Bull. civ. III, n° 5 ; Petites affiches, 11 mars 1999, n° 50, p. 5 ; Bull. Joly 1999, n° 94, 455, note P. Le Cannu). Il a déjà été jugé que le fait que la société civile ait été déclarée en liquidation judiciaire est insuffisant à caractériser l'insuffisance du patrimoine social pour payer la dette (Cass. civ. 3, 18 juillet 2001, n° 00-11.798, M. Alain Lizé c/ Société Sogefimur, Act. proc. coll. 2001/15, n° 192, obs. J. Vallansan). La solution est logique, puisque la liquidation judiciaire connaît deux formes de clôture : pour insuffisance d'actif, mais aussi pour extinction du passif. Même si la seconde variété de clôture ne correspond statistiquement qu'à 2 % des hypothèses, elle ne peut être exclue ab initio, c'est-à-dire dès le prononcé de la liquidation judiciaire.
Si donc le prononcé de la liquidation judiciaire ne peut suffire à rendre recevable la poursuite par le créancier social de l'associé de la société civile, le créancier n'a, toutefois, pas l'obligation d'attendre la clôture, ce que précise ici la Cour de cassation. Indiquons que, s'il le fait, sa poursuite contre l'associé demeure possible, l'interdiction de principe pour un créancier antérieur de reprendre son droit de poursuites individuelles contre le débiteur étant strictement personnelles à ce dernier. Elle profite donc pas à l'associé d'une société civile immobilière, pas plus qu'elle ne profiterait à une caution ou un codébiteur.
Entre l'ouverture de la liquidation judiciaire et sa clôture, il existe toute une gamme de situations pouvant se présenter. Ce qui importe, pour le créancier, est qu'il établisse d'une manière indiscutable que l'actif social sera insuffisant pour le payer. L'actif d'une société civile immobilière, le plus souvent, n'est constitué que d'un immeuble. Le créancier versera aux débats une expertise établissant que la vente de l'immeuble ne lui permettra pas d'être payée. Il ne sera pas exigé, en revanche, du créancier social qu'il établisse que tout l'actif a déjà été réalisé. Certes, il est fait état, dans la présente espèce, du fait que le créancier ne justifiait pas qu'il n'existait plus d'actif à réaliser. Mais, en réalité, cet élément n'est pas nécessaire. Ce qui importe fondamentalement, comme il est relevé en l'espèce, est "qu'aucun document ne permet de justifier de l'insuffisance du patrimoine social pour couvrir la créance dont le paiement est sollicité".
Ainsi, pour que le créancier social puisse poursuivre l'associé d'une société civile immobilière, il faut, mais il suffit, qu'il démontre que la réalisation des actifs de la société civile immobilière ne permettra pas d'assurer le paiement de sa créance. La loi de sauvegarde n'a strictement rien changé aux données de cette question.
P.-M. Le Corre
Aux termes de l'article L. 624-3, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L3982HB4), "l'action [en comblement de passif] se prescrit par trois ans à compter du jugement qui arrête le plan de redressement ou, à défaut, du jugement qui prononce la liquidation judiciaire". Pour sa part, l'article 642 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2907ADZ) prévoit que "tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures. Le délai qui expliquerait normalement un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, et proroger jusqu'au premier jour ouvrable suivant". Comment coordonner ces deux dispositions ? Plus précisément, la prorogation du délai expirant un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé est-elle applicable à l'assignation en comblement de passif ? C'est à cette question que répond, dans l'arrêt rapporté, la Cour de cassation, dans un arrêt de sa Chambre commerciale, appelé à la plus grande diffusion possible.
En l'espèce, le liquidateur d'une société avait assigné, le 25 juin 2001, le dirigeant de celle-ci placé en liquidation judiciaire le 24 juin 1998. Trois ans et un jour s'étaient donc écoulés entre le jugement de liquidation judiciaire de la société débitrice et la délivrance de l'assignation en comblement de passif à son dirigeant. Le liquidateur a tenté de plaider que le délai de l'action en comblement de passif était prorogé jusqu'au 25 juin 2001 car le 24 juin 2001 était un dimanche. Il a été suivi en cela par la cour d'appel. La Cour de cassation va censurer, par un arrêt délibérément de principe, en ces termes la décision de la cour d'appel : "attendu que, selon le premier de ces textes (C. civ., art. 2261 N° Lexbase : L2547ABX), la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli ; que l'article 642 du Nouveau Code de procédure civile ne s'applique pas au délai de prescription prévu par le second (C. com., art. L. 624-3)".
Précisons que la solution posée sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises conserve son actualité depuis cette loi, sous réserve que, désormais, l'article L. 651-2, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L3792HB3) prévoit que l'action se prescrit dans le même délai "à compter du jugement qui prononce la liquidation judiciaire ou la résolution du plan".
La Cour de cassation refuse ainsi de considérer que l'allongement de l'article 642 du Nouveau Code de procédure civile s'applique au délai de prescription de l'action en comblement de passif. La solution est justifiée par l'énoncé d'un principe général selon lequel l'article 642 du Nouveau Code de procédure civile ne s'applique pas au délai de prescription de l'action.
Cet arrêt est important. Certes, la solution selon laquelle les articles 640 et suivants du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2905ADX) ne s'appliquent pas aux délais de prescription, mais seulement aux délais de procédure, n'est pas nouvelle. Elle a été clairement posée en doctrine ( Th. Le Bars, Dies ad quo et dies ad quem, JCP éd. E 2000, I, 258). Mais c'est la première fois qu'elle est posée avec autant de netteté par la Cour de cassation. On remarquera, en effet, que, jusqu'alors, la solution n'était qu'implicite, la Cour de cassation n'appliquant pas les articles 640 et suivants aux délais de prescription sans affirmer le principe.
Les délais de procédure sont ceux pendant l'écoulement desquels l'intéressé doit agir. En notre matière, il en est ainsi, par exemple, des délais de déclaration de créance. Il n'est dès lors pas étonnant de voir la Cour de cassation affirmer que l'article 642 du Nouveau Code de procédure civile s'applique aux délais de déclaration de créance, de sorte que si le délai de déclaration de créance expire un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le créancier pourra encore déclarer sa créance le premier jour ouvrable suivant (Cass. com., 17 février 1998, n° 95-18.686, M. Soinne, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Bessard c/ Société Batinorest et autres N° Lexbase : A2412ACC, JCP éd. E, 1998, pan. 587, D. Affaires 1998, p. 429).
Au contraire, les délais de prescription sont ceux à l'expiration desquels l'intéressé ne pourra plus agir. L'on voit, en l'espèce, la Cour de cassation viser l'article 2261 du Code civil, texte selon lequel "[la prescription] est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli".
Cette distinction est, certes, conceptuellement intéressante. Il n'en demeure pas moins qu'elle renferme une large part d'artifice. Pour s'en convaincre, il suffit de raisonner sur le délai qui nous intéresse en l'espèce. Si l'article L. 624-3 du Code de commerce, au lieu de poser la règle sous forme de délai de prescription l'énonce à la manière d'un délai de procédure pour que la solution change. Ainsi, l'article L. 624-3 du Code de commerce aurait-il tout aussi bien pu disposer "le tribunal doit être saisi de l'action en comblement de passif dans le délai trois ans à compter du prononcé du jugement de liquidation judiciaire". En ce cas, l'article 642 du Nouveau Code de procédure civile aurait été, à notre sens, applicable. N'est-ce pas un peu subtil, au regard de la nécessaire intelligibilité du droit ?
P.-M. Le Corre
La continuation du bail des locaux professionnels en cas de redressement ou de liquidation judiciaire du preneur obéit, dans ses grandes lignes, aux règles générales de continuation des contrats en cours. La solution ne fait guère de difficulté, du moins sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises. La loi du 26 juillet 2005, au contraire, a déjà fait couler de l'encre sur le point de savoir si le mécanisme de l'option sur la continuation des contrats en cours est applicable au bail des locaux professionnels (Sur la question, v. B. Saintourens, Le régime du bail commercial après la réforme des procédures collectives, Loyers et copropriété, 2005/10, n° 11, p. 7, sp. p. 8). En tout cas, sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises, l'attention la plus grande est portée sur les mécanismes de résiliation du bail commercial. Un dispositif particulier est posé en liquidation judiciaire, qui doit cependant être combiné avec celui existant en redressement judiciaire. La décision rapportée illustre l'une de ces difficultés.
En l'espèce, M. S. est placé en liquidation judiciaire. Son liquidateur obtient du juge-commissaire une prorogation du délai d'avoir à opter sur la continuation du bail. Pendant cette période, le liquidateur ne paye pas les loyers du bail et le bailleur lui délivre un commandement visant la clause résolutoire. Le juge-commissaire autorise la cession du fonds de commerce. Dans ce contexte, le liquidateur tente d'obtenir la suspension des effets de la clause résolutoire. Les juges du fond vont rejeter sa prétention, pour divers motifs. La question qui se posait était ainsi de savoir si, dans le cadre d'une liquidation judiciaire, après délivrance du commandement de payer, il était possible au président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés d'accorder au liquidateur une suspension des effets de la clause résolutoire. De manière très radicale, la Cour de cassation va rejeter le pourvoi en énonçant que "le juge saisi d'une demande de délais avec suspension des effets de la clause résolutoire dispose d'un pouvoir discrétionnaire pour refuser de suspendre une telle clause en application de l'article L. 145-41, alinéa 2, du Code de commerce".
Ainsi, le dispositif de l'article L. 145-41, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L5769AII), qui autorise les juges saisis d'une demande tendant à faire constater l'acquisition de la clause résolutoire, à accorder les mesures prévues aux articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil (N° Lexbase : L1358ABW), a vocation à s'appliquer même en situation de liquidation judiciaire. Il n'est donc pas dérogé au droit commun, la solution étant logique, faute de texte contraire. Mais, puisqu'il y a lieu d'appliquer le droit commun, il faut immédiatement reconnaître au juge saisi d'une demande de constat de l'acquisition de la clause résolutoire la faculté discrétionnaire d'accorder les délais de grâce. La solution énoncée par la Cour de cassation ne peut donc surprendre.
La seule lecture des textes du droit des procédures collectives permet d'envisager une autre voie pour faire constater l'acquisition de la résiliation du bail des locaux professionnels. En effet, l'article 61-1 du décret du 27 décembre 1985 (N° Lexbase : L5351A4X) prévoit que "le juge-commissaire constate, sur la demande de tout intéressé, la résiliation de plein droit des contrats dans les cas prévus au premier et troisième alinéas de l'article L. 621-28 (N° Lexbase : L6880AIN) et à l'article L. 621-29 du Code de commerce (N° Lexbase : L6881AIP), ainsi que la date de cette résiliation". Ce texte du redressement judiciaire est applicable en liquidation judiciaire, car l'article L. 622-13 du Code de commerce (N° Lexbase : L7008AIE), qui s'intéresse spécifiquement à la résiliation du bail des locaux professionnels en situation de liquidation judiciaire, rend applicables les dispositions de l'article L. 621-29 du Code de commerce. Ainsi, le bailleur peut-il faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement de loyers postérieurs au jugement d'ouverture en saisissant le juge-commissaire par une requête. En ce cas, il n'a pas à faire délivrer au liquidateur le commandement de payer visant la clause résolutoire. Le droit commun des baux commerciaux est alors écarté.
Mais la Chambre commerciale de la Cour de cassation a admis l'option de compétence au profit du bailleur, lequel peut donc utiliser, soit les dispositions spéciales régissant les procédures collectives pour obtenir le constat de la résiliation du bail, c'est-à-dire la saisine du juge-commissaire, soit la voie du droit commun des baux commerciaux, en se soumettant alors à toutes les contraintes de celui-ci.
On remarquera, en l'espèce, que le bailleur avait utilisé la technique du droit commun pour obtenir le constat de l'acquisition de la clause résolutoire, c'est-à-dire la voie du commandement de payer visant la clause résolutoire avec saisine du juge compétent, à savoir le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés. Il y a incontestablement un risque pour le bailleur qui peut voir sa démarche paralysée par l'octroi de délais de grâce. Au contraire, il nous semble que s'il utilise la voie de la saisine du juge-commissaire, les délais de grâce ne peuvent être accordés par ce dernier car il n'est pas, à notre sens, au pouvoir du juge-commissaire d'octroyer de telles mesures. La Cour de cassation a, en tout cas, jugé que le juge-commissaire ne peut, sans excéder ses pouvoirs, accorder au débiteur des délais de grâce pour permettre au liquidateur de vendre le fonds de commerce, l'article L. 145-41 du Code de commerce n'autorisant les délais de grâce que pour régler les causes du commandement de payer visant la clause résolutoire (Cass. civ. 3, 9 mars 2005, n° 02-13.390, Société civile immobilière (SCI) Florence c/ M. Vincent Aussel, FS-P+B N° Lexbase : A2466DHS, Dr. et procédures 2005/4, p. 215, note R.-N. Schütz ; JCP éd. E, 2005, chron. 863, p. 964, n° 37, obs. J. Monéger).
P.-M. Le Corre
Pour la 2ème partie de cet article, lire (N° Lexbase : N5998AKD)
Pierre-Michel Le Corre
Professeur agrégé, Directeur du Master droit de la Banque de la faculté de droit de Toulon
Emmanuelle Le Corre-Broly
Maître de Conférences des Universités
Enseignante du master droit de la Banque de la faculté de droit de Toulon
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