La lettre juridique n°203 du 23 février 2006 : Fiscalité des entreprises

[Textes] Les dernières mesures fiscales en faveur de la culture

Réf. : Loi de finances pour 2006, n° 2005-1719, du 30 décembre 2005, art. 109 et 166 (N° Lexbase : L6429HET) et loi de finances rectificative pour 2005, n° 2005-1720, du 30 décembre 2005, art. 45, 50 et 68 (N° Lexbase : L6430HEU)

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par Ludovic Julié, Avocat au Barreau de Paris, Chargé d'enseignement à l'Université d'Evry-Val-d'Essonne

le 07 Octobre 2010

La loi de finances rectificative pour 2005 (n° 2005-1720, du 30 décembre 2005 N° Lexbase : L6430HEU) et la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 N° Lexbase : L6429HET) modifient et instaurent de nouvelles mesures fiscales en faveur de la culture. Le grand gagnant est, à nouveau, le cinéma, auquel il convient, aujourd'hui, d'ajouter l'audiovisuel : le crédit d'impôt cinéma a été aménagé et le financement fiscal du Compte de Soutien à l'Industrie des Programmes audiovisuels (Cosip) se trouve amélioré par l'instauration d'un taux de taxe plus élevé concernant les films pornographiques et d'incitation à la violence. L'administration fiscale n'a pas tardé à réagir pour commenter les nouvelles dispositions applicables au crédit d'impôt à compter du 1er janvier 2006 (instruction du 27 janvier 2006, BOI n° 4 A-1-06 N° Lexbase : X5698ADE). Pour autant, la création contemporaine n'a pas été oubliée par la loi de finances rectificative pour 2005, qui instaure, également, un crédit d'impôt pour les entreprises exerçant des métiers d'art et un abattement de 50 % sur les bénéfices des auteurs d'oeuvres d'art. Enfin, le marché de l'art français se voit, aussi, fiscalement aidé par une réforme de la taxe sur la vente d'objet précieux. La culture a, ainsi, fait l'objet d'une attention toute particulière dans les aménagements et créations de nouveaux dispositifs fiscaux d'aide applicables dès ce début d'année. 1. Le crédit d'impôt pour dépenses de production d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles

L'article 88-I,1°, de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311, du 30 décembre 2003 N° Lexbase : L6348DM3) a instauré un crédit d'impôt cinéma permettant aux entreprises de production cinématographique de se faire rembourser sous forme de crédit d'impôt 20 % de leurs dépenses de production et post-production d'oeuvres cinématographiques agréées ou audiovisuelles. Notons que l'instruction du 24 septembre 2004 (BOI n° 4 A-7-04 N° Lexbase : X3941ACX) commente les précédentes conditions d'application du crédit d'impôt.

Seules les entreprises titulaires d'une autorisation d'exercice délivrée par le Directeur général du Centre de la cinématographie sont concernées par le crédit d'impôt. Elles doivent, également, avoir la qualité de producteur délégué, ce qui a pour conséquence d'écarter les sociétés de financement de l'industrie cinématographique et de l'audiovisuel (SOFICA) du bénéfice du mécanisme, ainsi que les chaînes de télévision.

Sont concernées par le crédit d'impôt les oeuvres cinématographiques audiovisuelles, qu'elles soient de fiction, documentaires ou d'animation de longue durée. Les courts métrage étaient, ainsi, exclus et désormais, également, les oeuvres pornographiques ou d'incitation à la violence, celles utilisables à des fins publicitaires, les émissions et, plus généralement, les programme ne comportant aucune création originale. Les conditions de nationalité et de réalisation en France restent les mêmes. Les dépenses définies au III du nouvel article 220 sexies du CGI comprennent les rémunérations versées aux auteurs et interprètes, les salaires des techniciens et ouvriers, ainsi que les dépenses techniques.

La dualité du plafond faisant la différence entre oeuvres de fiction et d'animation ayant été supprimée, le crédit d'impôt est plafonné par oeuvre à un million d'euros pour les oeuvres cinématographiques. Concernant les oeuvres audiovisuelles, le crédit d'impôt ne peut, dorénavant, excéder 1 150 euros par minute produite et livrée pour une oeuvre de fiction ou documentaire et 1 200 euros par minute produite et livrée pour une oeuvre d'animation.

Par ailleurs, le montant du crédit d'impôt est plafonné en fonction de la part d'aide publique reçue pour la production du film. Ainsi, le crédit d'impôt, considéré à ce titre comme une aide publique, ne peut avoir pour effet de porter à plus de 50 % du montant du budget de production le montant des aides publiques. Ce taux est porté à 60 % pour les productions difficiles à petits budgets qui n'ont pas encore été définies par décret.

A partir du 1er janvier 2006, le crédit d'impôt est utilisable à compter, non plus de la délivrance de l'agrément provisoire, mais de la date de réception par le Directeur général du Centre national de la cinématographie de la demande de délivrance d'agrément provisoire, c'est-à-dire le plus tôt possible dans la phase de production du film, sachant que le tournage peut durer très longtemps. Ainsi, l'entreprise pourra, dès ce moment, imputer le crédit d'impôt sur le montant de l'impôt sur les sociétés à régler et demander immédiatement le remboursement de l'excédent du crédit d'impôt le cas échant. La part du crédit d'impôt utilisé devra être restituée, si l'agrément provisoire n'a pas été reçu dans les six mois suivant la réception de la demande.

2. La taxe sur les ventes et location de vidéo

La taxe sur les ventes et location en France de vidéogrammes destinées à l'usage privé du public a été instaurée le 1er juillet 1993 . Son taux de 2 % est resté inchangé et, aujourd'hui, l'article 166 de la loi de finances pour 2006 instaure une dualité de taux : un nouveau taux de 10 % sera applicable à compter du 1er janvier 2007 sur toutes les ventes et location de vidéogrammes à caractère violent ou pornographique.

L'augmentation du taux concernant uniquement la violence et la pornographie reprend l'idée du financement moralisateur du CNC. Le produit de la taxe vient, en effet, alimenter le COSIP, tout comme celui de la taxe sur les films sauvages et le prélèvement spécial sur les bénéfices concernant, également, la pornographie. Pourtant, ces deux impositions étaient tombées en désuétude du fait de la disparition de films cinématographiques de ce type. A compter du 1er janvier 2007, la pornographie sur vidéogramme viendra alimenter le COSIP de façon cinq fois plus importante que les autres films.

3. Le crédit d'impôt sur les métiers d'art

L'article 45 de la loi de finances rectificative pour 2005 instaure un nouveau crédit d'impôt pour les entreprises, dont les charges de personnels exerçant un métier d'art représentent plus de 30 % de la masse salariale totale, les entreprises portant le label "entreprise du patrimoine vivant" (ce label est défini par l'article 23 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises N° Lexbase : L7582HEK), ainsi que celles des secteurs de l'horlogerie, bijouterie, joaillerie, orfèvrerie, lunetterie, arts de la table, jouet, instruments et ameublement.

Les dépenses prises en compte sont les salaires et charges afférents uniquement aux salariés chargés de la conception de nouveaux produits et de la réalisation de prototypes. Ont été associées les autres dépenses correspondant à cette activité de création fixées forfaitairement à 75 % des dépenses précédentes, les dotations ou amortissement directement affectées à la conception de nouveaux produits ou la réalisation de prototypes, les rémunérations des intervenants créatifs externes (styliste ou bureaux de style), les frais de dépôts des dessins et modèles et, enfin, les frais de défense de ces dépôts, mais uniquement dans la limite de 60 000 euros pour cette dernière catégorie.

Le taux du crédit d'impôt est de 10 % du montant de ces dépenses pour toutes les entreprises visées, sauf pour celle bénéficiant du label "entreprise du patrimoine vivant" qui bénéficient d'un taux de 15 %. Le crédit d'impôt s'impute, soit sur l'impôt sur le revenu des personnes associées, soit sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été engagées. L'unique plafond, en dehors de celui correspondant aux seules dépenses de défense de dépôt, est celui imposé par le Règlement européen n° 69/2001 du 12 janvier 2001 relatif aux articles 87 et 88 du Traité CE sur les aides de minimis (N° Lexbase : L1592DPN). Ce nouveau crédit d'impôt ne comporte pas de limite, contrairement au crédit d'impôt cinéma, dont l'excédent non utilisé fera l'objet d'une restitution.

4. L'abattement de 50 % pour les auteurs d'oeuvres d'art

L'article 50 de la loi de finances rectificative pour 2005 instaure un nouveau mécanisme en faveur de la création plastique contemporaine. Annoncé par le ministre de la Culture et de la Communication lors de sa visite à la Foire internationale d'art contemporain (Fiac) en 2005, un abattement sur les bénéfices des auteurs d'oeuvres d'art est mis en place à compter du 1er janvier 2006, mais uniquement pour les cinq premières années d'activités de l'artiste.

Cet abattement de 50 % s'applique sur les revenus issus de la cession des oeuvres d'art définies par l'article 297 A du CGI et de la cession des droits d'auteurs. Sont considérées comme oeuvres d'art les réalisations correspondant à des oeuvres graphiques entièrement exécutées à la main par l'artiste ou, si ce sont des gravures, estampes et lithographies originales tirées en nombre limité. Ce nombre est fixé à huit (auquel il convient d'ajouter quatre épreuves d'artiste) pour l'art statuaire, les tapisseries ou textiles muraux faits à la main et émaux sur cuivre et à trente pour les photographies. Quant à la céramique, chaque pièce doit rester unique.

Les oeuvres pornographiques et d'incitation à la violence sont, à nouveau, exclues du mécanisme. Mais, en dehors de cette dernière limite, d'autres, moins justifiées, ont été mise en place. En effet, l'abattement est plafonné à 50 000 euros par an et, surtout, il ne peut pas jouer concurremment avec l'étalement prévu à l'article 100 bis du CGI , qui permet de calculer l'assiette des revenus d'une année en fonction d'une moyenne calculée en référence avec les revenus des années précédentes. Il conviendra, donc, à l'artiste de faire un calcul, afin de voir si l'abattement est plus intéressant pour lui ou si l'étalement semble plus avantageux. Mais, comme l'option d'étalement est valable pour plusieurs années, il semble que l'abattement soit plus sûr en termes de réduction de l'assiette imposable, surtout si les revenus de l'artiste sont de plus en plus élevés au cours des années suivantes.

5. La réforme de la taxe forfaitaire sur les objets précieux

L'article 68 de la loi de finances rectificative pour 2005 réforme la taxe forfaitaire sur les ventes de métaux précieux, de bijoux, d'objets d'art, de collection ou d'antiquité pour améliorer l'attractivité du marché de l'art français vis-à-vis des non-résidents. Les cessions d'objets d'art réalisées en France et les exportations par des contribuables non-résidents sont exonérées à la simple condition d'apporter la preuve d'une importation précédente ou d'une acquisition en France. Les procédures sont simplifiées grâce à un allègement du circuit déclaratif et de paiement, notamment lorsqu'un intermédiaire participe à la transaction. Ainsi, la déclaration se fait plus tardivement que dans le régime précédent ou peut se faire directement auprès de la recette de douanes.

Par ailleurs, il reste toujours possible d'opter pour le régime de la plus-value, à condition de justifier la date et le prix d'acquisition, ainsi que la possession du bien depuis plus de douze ans.

En dehors de ces précisions, le régime reste identique au précédent, notamment concernant le taux et les seuils applicables qui restent inchangés.

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