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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris
le 07 Octobre 2010
Le statut des baux commerciaux n'est, en principe, applicable qu'au bail consenti sur un immeuble dans lequel est exploité un commerce. La destination que les parties souhaitent donner à un local n'est pas toujours libre en raison de l'existence de règles d'urbanisme, notamment, celles relatives à l'interdiction du changement d'usage des locaux d'habitation (article L. 631-7 N° Lexbase : L6472G9L et ss. du Code de la construction et de l'habitation). Il est rappelé que le changement d'affectation prohibé est sanctionné par la nullité de la convention contraire et que, dans cette hypothèse, le bailleur, en vertu de son obligation de délivrance, pourrait voir sa responsabilité contractuelle engagée. Il appartient également aux rédacteurs d'acte d'être vigilant sur ce point.
Cette police du changement de l'affectation des locaux à usage d'habitation a récemment fait l'objet d'une réforme par l'ordonnance du 8 juin 2005. Cette réforme a fait l'objet d'un commentaire dans la revue Lexbase Hebdo - édition affaires. Notons que l'arrêté préfectoral portant application à Paris des nouveaux articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l'habitation a été récemment publié (arrêté préfectoral n° 2005-335-4 du 1er décembre 2005 portant application à Paris des dispositions des articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l'habitation).
(Sur ce sujet, lire J. Prigent, La réforme de la police du changement d'affectation des immeubles, Lexbase Hebdo n° 176 du 14 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6601AIC (1ère partie) et Lexbase Hebdo n° 177 du 21 juillet 2005 - édition affaires N° Lexbase : N6686AIH (2nde partie)).
Le fait qu'une clause déroge au statut des baux commerciaux en conférant un caractère précaire au droit concédé à l'occupant ne suffit pas à lui seul à la qualifier de clause exorbitante du droit commun.
Le statut des baux commerciaux peut s'appliquer à la convention conclue par l'Administration sur son domaine privé dès lors qu'elle entre dans son champ d'application (Cass. civ. 3, 30 janvier 2002, n° 00-17.342, FS-P+B N° Lexbase : A8905AX4). Toutefois, lorsque la convention peut être qualifiée de contrat administratif, l'application du statut doit être écartée (Cass. civ. 3, 31 octobre 2000, n° 98-21.195, Mme Dominique de la Varde et autres c/ Commune de Touques, prise en la personne de son maire en exercice N° Lexbase : A9369AT8). Le critère de qualification du contrat administratif réside dans l'existence de clauses exorbitantes du droit commun (Cass. civ. 1, 3 juin 1969, n° 66-12.454, Mas c/ Société Agathoise de spectacles N° Lexbase : A2927AUX). La Cour de cassation précise, dans cet arrêt du 9 février 2005, que la clause conférant un caractère précaire au droit de l'occupant ne suffit pas à elle seule à permettre de la qualifier d'exorbitante du droit commun et à qualifier le contrat de droit administratif. La solution doit être approuvée dans la mesure où les règles de répartition des compétences entre l'ordre judiciaire et administratif sont d'ordre public et que la solution contraire permettrait à l'Administration d'écarter en toute hypothèse l'application du statut des baux commerciaux dont certaines règles sont également d'ordre public.
La nullité du contrat de location-gérance consenti par le loueur qui ne justifie pas de deux années d'exploitation du fonds fait obstacle à ce que le locataire-gérant demande la requalification de ce contrat en bail commercial.
Le statut des baux commerciaux n'est pas applicable au contrat de location-gérance (voir encore, récemment, Cass. com., 12 avril 2005, n° 02-13.605, Mme Mireille Massiani, agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. Gianati c/ M. Giovanni Gianati N° Lexbase : A8586DHH). Ce dernier n'entre, en effet, pas dans le champ d'application du statut dans la mesure où la chose donnée à bail n'est pas un immeuble dans lequel est exploité un fonds de commerce mais le fonds de commerce lui-même. Il arrive, cependant, que le contrat de location-gérance masque en réalité un véritable bail commercial, notamment, lorsque aucune clientèle n'est mise à la disposition du prétendu locataire-gérant. Dans ce cas, le juge donne à la convention sa véritable qualification et le preneur peut prétendre au bénéfice des dispositions du statut des baux commerciaux (Cass. civ. 3, 30 janvier 2002, n° 00-17.342, FS-P+B N° Lexbase : A8905AX4).
L'arrêt rapporté, sur le fondement des règles propres à la location-gérance, trace une limite à cette possibilité de requalification. Un fonds de commerce ne peut, en effet, être donné en location-gérance qu'à la condition, en principe, d'avoir fait l'objet d'une exploitation pendant deux années (C. com., art. L. 144-3 N° Lexbase : L3187DYP), cette règle étant sanctionnée par la nullité qui entraîne "à l'égard des contractants la déchéance des droits qu'ils pourraient éventuellement tenir du statut des baux commerciaux" (C. com., art. L. 145-10 N° Lexbase : L5738AID). A défaut, et c'est l'apport de l'arrêt commenté, le locataire-gérant ne pourra prétendre à la requalification de sa convention et à l'application corrélative du statut des baux commerciaux.
(Sur ce sujet, lire Julien Prigent, Des conséquences de la nullité d'un contrat qualifié de location-gérance sur sa requalification en bail commercial, Lexbase Hebdo n° 171 du 9 juin 2005 - édition affaires N° Lexbase : N5260AIN).
Le statut des baux commerciaux ne s'applique pas au bail portant sur un local situé dans l'enceinte d'un autre établissement si l'exploitant du fonds de commerce est soumis à des contraintes incompatibles avec le libre exercice de son activité.
L'application du statut des baux commerciaux au "commerce intégré", c'est-à-dire au commerce exploité dans l'enceinte d'un autre établissement, n'est pas évidente dans la mesure où la question se pose de savoir si, dans ce cas, le locataire dispose d'une véritable clientèle et, partant, d'un fonds de commerce. La Cour de cassation avait précisé que le locataire exploitant un tel commerce pouvait prétendre à l'application du statut dès lors qu'il dispose, d'une part, d'une clientèle propre, sans qu'il soit exigé que cette dernière soit prédominante à celle reçue de l'établissement accueillant son activité (Cass. civ. 3, 19 mars 2003, n° 01-17.679, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A5367A7W) et, d'autre part, d'une autonomie de gestion (voir, par exemple, Cass. civ. 3, 5 avril 1995, n° 93-14.864, Société Union lainière c/ Groupement d'intérêt économique Le Trident N° Lexbase : A7772ABH et Cass. civ. 3, 1er octobre 2003, n° 02-11.239, FS-P+B (N° Lexbase : A6683C9E). L'arrêt rapporté du 19 janvier 2005 confirme ces solutions avec deux nuances cependant. Tout d'abord, à la notion d'autonomie de gestion est substituée celle d'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité. Ensuite, cette décision semble opérer une modification de la charge de la preuve dans la mesure où il appartiendra au bailleur d'apporter la preuve de l'existence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de l'activité.
(Sur ce sujet, lire J. Prigent, L'application du statut des baux commerciaux aux commerces intégrés, Lexbase Hebdo n° 156 du 23 février 2005 - édition affaires N° Lexbase : N4757ABS).
II - La durée du bail commercial
La seule circonstance que la durée du bail est fixée pour une période inférieure à deux ans ne suffit pas à caractériser un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux. En consentant un bail dont les clauses, charges et conditions résultent d'un bail commercial hormis la durée, le bailleur exprime sa volonté de conférer au locataire, non un bail précaire, échappant au statut des baux commerciaux, mais un bail soumis audit statut.
L'article L. 145-5 du Code de commerce (N° Lexbase : L5733AI8) offre aux parties la possibilité, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, de déroger aux dispositions du statut des baux commerciaux, à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans. La Cour de cassation avait, semble-t-il, jugé que la seule durée du contrat inférieure à deux années permettait de le qualifier de bail dérogatoire et de faire obstacle à l'application du statut (Cass. civ. 3, 8 novembre 1972, n° 71-13.008, Boudes c/ Choisy N° Lexbase : A6812AGE).
L'arrêt rapporté adopte une solution contraire très claire : la seule durée ne suffit pas à caractériser l'existence d'un bail dérogatoire. Il appartient donc aux parties, et à leurs rédacteurs, qui entendent conclure un tel bail, de spécifier expressément leur intention.
III - La résiliation du bail commercial
1 - La clause résolutoire
NB : aux termes de l'article L. 145-41 du Code de commerce (N° Lexbase : L5769AII), "toute clause insérée dans [un bail commercial] prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai".
La Cour de cassation a rappelé que la nécessité de la délivrance d'un commandement préalable, même lorsque l'infraction est instantanée, en l'espèce, l'absence d'intervention du bailleur à l'acte de cession.
Lorsque le mandat est délivré à la requête du bailleur représenté par le mandataire, il faudra être vigilant sur l'existence, voire l'étendue, des pouvoirs de ce dernier. Il a été jugé, en effet, qu'un tel commandement est nul et que cette nullité peut être invoquée par le locataire, lorsque le mandat de gestion conféré à l'administrateur de biens est nul. Dans cet arrêt, la nullité du mandat, que la Cour de cassation qualifie d'ordre public, trouvait son origine dans l'application des dispositions de l'article 7 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (N° Lexbase : L7549AIG) qui dispose que "sont nulles les promesses et les conventions de toute nature relatives aux opérations visées à l'article 1er [de la loi du 2 janvier 1970 N° Lexbase : L7537AIY qui ne comportent pas une limitation de leurs effets dans le temps". Le mandat, d'une durée initiale de un an, prévoyait en effet son renouvellement tacite pour la même période, sans limitation de durée.
NB : l'alinéa 2 de l'article L. 145-41 du Code de commerce reconnaît au juge la faculté de suspendre les effets de la clause résolutoire qui ne jouera pas si le débiteur se libère dans les conditions fixées par le juge.
Il a été rappelé que le juge, saisi d'une demande de délai avec suspension des effets de la clause résolutoire, dispose d'un pouvoir discrétionnaire d'appréciation pour refuser de suspendre les effets d'une telle clause.
Si la solution ne faisait guère de doute, notamment par une interprétation a contrario de la dernière phrase de l'article L. 145-41 du Code de commerce, la Cour de cassation a expressément posé la règle selon laquelle le juge doit subordonner les délais accordés et la suspension des effets de la clause résolutoire au règlement des causes du commandement préalable au jeu de la clause résolutoire du bail commercial.
2 - La fin du bail commercial en cas de procédure collective
La loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises modifie les règles applicables au sort du bail commercial en cours à l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de l'un des contractants, notamment, à l'égard du preneur. Cette réforme, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2006, suscite de nombreuses incertitudes.
(Sur ce sujet, lire J. Prigent, Réforme des procédures collectives : le sort du bail commercial en cours au jour de l'ouverture de la procédure, Lexbase Hebdo n° 181 du 15 septembre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N8462AIA).
La Cour de cassation a affirmé qu'en présence de copreneurs, la seule volonté d'un locataire de résilier le bail ne pouvait suffire à mettre fin au contrat à l'égard des autres copreneurs.
Les circonstances dans lesquelles cette décision a été rendue sont particulières dans la mesure où la résiliation du bail résultait de l'initiative du liquidateur de la société qui était colocataire du bail. Néanmoins, la solution devrait avoir une portée générale et devrait également trouver à s'appliquer en présence d'un congé qui, à proprement parler, n'entraîne pas la résiliation du bail mais la cessation de ce dernier à sa date d'effet. La Haute cour, dans l'espèce rapportée, réserve néanmoins la possibilité aux parties de prévoir une stipulation expresse contraire au bail.
L'article L. 621-28 du Code de commerce (N° Lexbase : L6880AIN) dispose que le contrat en cours au jour du jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire est résilié de plein droit après une mise en demeure adressée à l'administrateur restée infructueuse plus de un mois sans réponse. En présence d'une liquidation judiciaire, l'article L. 622-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L7007AID) reconnaît au liquidateur la faculté d'exiger la continuation des contrats en cours dans les conditions de l'article L. 621-28 précité. La question s'est posée de savoir si le refus de l'organe compétent de continuer un contrat en cours, notamment un bail commercial, peut entraîner également la résiliation de plein droit de ce dernier ou si cet effet devait être réservé à l'hypothèse où une mise en demeure préalable d'avoir à opter lui avait été notifiée. La Cour de cassation s'était prononcée en faveur de la première solution en affirmant "qu'en l'absence de mise en demeure par le cocontractant, la renonciation de l'administrateur à la poursuite du contrat n'entraîne pas la résiliation de plein droit de la convention à son initiative mais confère au seul cocontractant le droit de la faire prononcer en justice" (Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-13.542, FS-P+B+I N° Lexbase : A2479DCS).
L'arrêt rapporté du 5 juillet 2005 réitère la solution, en des termes similaires, dans une hypothèse où le débiteur était en liquidation judiciaire. Cette décision est également intéressante en ce que le débiteur était le bailleur et non le preneur, l'application des règles relatives à la continuation des contrats en cours dans une telle configuration étant discutée. Il faut toutefois relever que ce point n'a pas fait, dans cette décision, l'objet d'un débat (sur ces points, voir J. Prigent, Les effets de l'ouverture d'une procédure collective sur le sort du bail commercial en cours, Revue des loyers 2005, n° 861/216).
IV - Le loyer du bail commercial
1 - La clause d'indexation
Il n'est pas rare que les parties stipulent, lors de la conclusion d'un bail commercial, une clause d'indexation automatique du loyer. La validité des clauses d'indexation est soumise à certaines conditions prévues aux articles L. 112-1 (N° Lexbase : L9702DYY) et L. 112-2 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3375APP). Ainsi, aux termes du second de ces textes, "dans les dispositions [...] conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n'ayant pas de relation directe avec l'objet du statut ou de la convention ou avec l'activité de l'une des parties. Est réputée en relation directe avec l'objet d'une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l'indice national du coût de la construction publié par l'Institut national des statistiques et des études économiques". Le premier proscrit la "prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision".
La Cour de cassation a, cette année, dans un arrêt en date du 18 octobre 2005, précisé que la clause qui prévoit une monnaie de paiement étrangère équivaut à une indexation dont la référence n'a aucune relation avec l'une ou l'autre des parties. Elle avait consacré un an auparavant une solution analogue en affirmant que "la stipulation du bail fixant le prix du loyer en dollars n'[ayant] été prévue que comme unité de compte, cette stipulation, en visant à garantir un prix par référence à une monnaie étrangère, constituait une indexation sans rapport avec l'objet du contrat et qu'il s'agissait d'une indexation déguisée prohibée par l'article L. 112-2 du Code monétaire et financier/I>" (Cass. civ. 2, 21 octobre 2004, n° 02-21.664, FS-D N° Lexbase : A6428DDG). Elle pose, désormais, clairement, dans l'arrêt du 18 octobre 2005, que la monnaie de paiement doit être nécessairement le franc ou l'euro.
Elle précise, enfin, la sanction de la stipulation d'une clause d'indexation prohibée : la clause est nulle et la somme versée par le preneur, en application de la clause d'indexation doit être restituée. Il avait déjà été jugé que la nullité d'une telle clause ne pouvait entraîner la nullité du bail en son entier, sous peine de faire échec au droit au renouvellement du locataire (Cass. civ. 3, 9 juillet 1973, n° 72-12.660, Pecquet c/ Plan Cadran N° Lexbase : A6917AGB).
2 - La fixation judiciaire du loyer
En cas de désaccord des parties sur le montant du loyer à l'occasion d'une révision ou, le plus souvent, d'un renouvellement, ces dernières peuvent saisir le juge des loyers afin de voir le prix du bail judiciairement fixé. Sous réserve de l'application du plafonnement ou des modalités de fixation du loyer propres à certains locaux, le loyer est alors fixé à la valeur locative, eu égard aux caractéristiques du local, de sa destination, des obligations des parties, des facteurs de commercialité et des prix du marché. (C. com., art. L. 145-33 N° Lexbase : L5761AI9). La Cour de cassation a de nouveau affirmé, dans un arrêt du 6 juillet 2005, que le juge fixant la valeur locative d'un local commercial renouvelé est libre d'adopter le mode de calcul qui lui parait le meilleur (voir, en ce sens, Cass. civ. 3, 16 octobre 1974, n° 73-12.175, Franchi c/ Mayrihnac N° Lexbase : A6996AG9, Cass. civ. 3, 3 juin 2004, n° 03-12.202, M. Jean Claude Navarre c/ Société civile immobilière (SCI) Fraca, FS-P+B N° Lexbase : A5228DCM). En conséquence, toujours selon cette décision et selon les arguments invoqués au moyen, les juges du fonds pouvaient valablement refuser, en présence d'un loyer dit à l'américaine pour lequel le prix du bail initial, supérieur à la valeur locative moyenne des locaux semblables dans le même secteur, incluait partie du droit au bail, de limiter le montant du loyer du bail renouvelé à la valeur locative technique.
Le loyer du bail commercial renouvelé peut être déplafonné en présence d'une modification notable de certains des éléments de la valeur locative (C. com., art. L. 145-34 N° Lexbase : L5762AIA), dont les facteurs locaux de commercialité (décret n° 53-960 du 30 septembre 1953, art. 23-4 N° Lexbase : L3439AHT).
La cour d'appel de Paris a jugé, à ce propos, que la venue d'enseignes de luxe dans le quartier Saint-Germain-des-Prés n'impliquait pas nécessairement un impact sur la commercialité et une modification corrélative des facteurs locaux de commercialité, cette implantation trouvant sa raison d'être dans la volonté d'une enseigne connue d'être présente à cette adresse.
Le statut des baux commerciaux, en protégeant le locataire et le fonds de commerce de ce dernier, restreint nécessairement les droits du bailleur qui, le plus souvent, est également propriétaire du bien objet du bail commercial. La question s'est donc rapidement posée de la compatibilité entre ces restrictions au droit de propriété et l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme (N° Lexbase : L1625AZ9) qui protège ce droit et en limite les atteintes. L'occasion a été donnée à la cour d'appel d'Amiens de procéder au contrôle de conventionnalité de la règle du plafonnement (C. com. art. L. 145-34). En effet, lorsqu'elle n'est pas écartée, elle aboutit à imposer au bailleur un loyer dont le montant est souvent très inférieur à la valeur du marché. Selon les juges amiénois, la règle de plafonnement n'est pas contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen dans la mesure où elle n'est pas d'application obligatoire, puisque les parties peuvent décider d'y déroger. Il est vrai qu'il est désormais acquis que les parties peuvent librement, dès la conclusion du bail initial, fixer les modalités de fixation du loyer du bail renouvelé (Cass. civ. 3, 27 octobre 2004, n° 03-15.769, FS-P+B N° Lexbase : A7412DDU). Il n'est d'ailleurs pas certain que la solution eut été contraire même si la règle était d'ordre public, la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme autorisant les Etats, à certaines conditions, à réglementer l'usage des biens et la Cour européenne des droits de l'homme leur accordant sur ce point une grande marge d'appréciation.
Pour la 2ème partie de cet article, lire (N° Lexbase : N6352AKH)
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