Réf. : Loi n° 2005-882 du 2 août 2005, en faveur des petites et moyennes entreprises (N° Lexbase : L0750HBE)
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par Marie-Laurence Boulanger, Avocate associée au sein du cabinet Fromont, Briens et associés
Olivier Bach, Avocat au sein du cabinet Fromont, Briens et associés
le 07 Octobre 2010
La durée des mandats de l'ensemble des représentants du personnel est portée de 2 à 4 ans.
Ces dispositions s'appliquent à la durée des mandats des membres élus du comité d'entreprise et aux délégués du personnel ainsi qu'aux mandats des membres élus du comité d'établissement, du comité central et aux représentants désignés au comité de groupe.
Néanmoins, un accord de branche, un accord de groupe ou un accord d'entreprise peut fixer une durée du mandat comprise entre 2 et 4 ans.
Ces dispositions s'appliquent à compter des élections intervenant après le 3 août 2005. En d'autres termes, ces nouvelles dispositions n'ont pas d'effet sur les mandats en cours à la date de publication de la loi, lesquels expireront donc à l'issue de leur durée de 2 ans.
L'article 96 de la même loi impose à l'employeur d'organiser des élections partielles des délégués du personnel :
- si un collège électoral n'est plus représenté ;
- si le nombre de délégués titulaires est réduit de moitié ou plus ;
- à l'exception de l'hypothèse où ces évènements interviendraient moins de 6 mois avant le terme du mandat des délégués du personnel.
Cette mesure, rendue nécessaire du fait du doublement de la durée des mandats, n'existait jusqu'à présent que pour les membres élus du comité d'entreprise et non pour les délégués du personnel.
2. Extension du forfait en jours à certains salariés non cadres (article 95 de la loi)
L'accord collectif prévoyant la conclusion de convention individuelle de forfait en jours pour les cadres autonomes peut, désormais, préciser que ces conventions seront applicables à certains salariés non cadres.
Il est à noter que l'ordonnance ne fait pas référence à la seule catégorie de salariés non cadres itinérants, ce qui ouvre de larges possibilités pour l'avenir.
En effet, il semble opportun de rappeler que jusqu'à l'adoption de cette ordonnance, les conventions de forfait en jours étaient exclusivement réservées aux cadres dits "autonomes" et coexistaient avec un principe de convention de forfait en heures sur l'année, pour les salariés itinérants non cadres.
L'ordonnance prévoit donc désormais, à l'égard de tous salariés non cadres (et pas seulement itinérants), des dispositions flexibles, en termes d'organisation du temps de travail.
Ces salariés, qui devront individuellement donner leur accord par écrit, sont ceux dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.
Dans sa décision du 29 juillet 2005 faisant suite au recours dirigé contre la loi en faveur des PME, le Conseil constitutionnel a estimé, concernant cette possibilité d'extension à certains salariés non cadres des dispositions relatives au forfait en jours, que le législateur pourrait "étendre à certains salariés non cadres le régime des conventions de forfait en jours défini par la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 (N° Lexbase : L0988AH3) relative à la réduction négociée du temps de travail, sous réserve de ne pas priver de garanties légales les exigences constitutionnelles relatives au droit à la santé et au droit au repos de ces salariés".
Or, le Conseil constitutionnel a jugé que ces garanties légales résultent de l'ensemble des conditions posées par le législateur concernant le recours au forfait jours pour des personnels non cadres :
- la conclusion de ces conventions de forfait en jours doit être prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou par un accord d'entreprise, lequel détermine notamment les catégories de salariés concernées ;
- ces conventions de forfait en jours ne pourront être conclues avec des salariés non cadres que s'ils disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur travail et si la durée de leur temps de travail ne peut être prédéterminée ;
- ces salariés doivent bénéficier du repos quotidien de 11 heures et du repos hebdomadaire de 35 heures prévus par le Code du travail ;
- le nombre de jours travaillés ne peut dépasser le plafond de 218 jours par an.
Le Conseil constitutionnel a précisé, enfin, que le législateur pouvait "laisser aux employeurs et aux salariés ou à leurs organisations représentatives le soin de préciser, notamment par la voie de la négociation collective, les modalités concrètes d'application des normes qu'il édicte".
En d'autres termes, la loi peut donc renvoyer les modalités d'application du forfait en jours pour les salariés non cadres, aux accords collectifs de branche ou d'entreprise.
3. Travail à temps partagé (articles 22 et 23 de la loi)
La loi crée neuf nouveaux articles du Code du travail (articles L. 124-24 N° Lexbase : L7801HBK à L. 124-32 N° Lexbase : L7806HBQ), dont l'objectif principal est de confier à une nouvelle catégorie d'entreprises la possibilité de mettre à disposition d'entreprises clientes, du personnel qualifié.
Ce nouveau dispositif emprunte de nombreuses règles préexistantes relatives au travail temporaire.
La loi rappelle qu'une entreprise de travail à temps partagé est destinée à mettre à disposition d'entreprises clientes du personnel qualifié qu'elles ne peuvent recruter elles-même en raison de leur taille ou de leurs moyens.
Pour chaque mise à disposition individuelle de salariés, un contrat est signé entre l'entreprise de travail à temps partagé et l'entreprise cliente. Ce contrat doit préciser le contenu, la durée estimée de la mission, la classification, ainsi que les caractéristiques particulières du poste de travail, des fonctions occupées et du montant de la rémunération y afférent.
Toute clause tendant à interdire l'embauchage par l'entreprise cliente à l'issue de la mission sera interdite.
Un contrat de travail à durée indéterminée sera signé entre le salarié mis à disposition et l'entreprise de travail à temps partagé. Sera insérée au contrat une clause de rapatriement du salarié, à la charge de la société de travail à temps partagé, dans le cas où la mise à disposition s'effectuerait hors du territoire métropolitain.
La rémunération versée au salarié mis à disposition ne pourra être inférieure à celle du salarié du niveau de qualification identique ou équivalent occupant le même poste ou les mêmes fonctions dans l'entreprise cliente. Les entreprises de travail temporaire pourront exercer l'activité de travail à temps partagé sans que cela ne contrevienne à la notion d'exclusivité à laquelle elles sont tenues.
Au même titre que pour ce qui est exigé dans le travail temporaire, l'entreprise à temps partagé sera tenue de justifier d'une garantie financière suffisante et ce, dans un souci de sécurité juridique accrue.
4. Groupement d'employeurs (article 20 de la loi)
Les dispositions des articles L. 127-1 et suivants du Code du travail (N° Lexbase : L7689HBE) sont modifiées.
L'article 20 de la loi prévoit la possibilité pour les groupements d'employeurs de se constituer en sociétés coopératives, élargit leurs champs de compétences, et aménage des conditions de fonctionnement des groupements d'employeurs multi-sectoriels.
S'agissant des missions dévolues aux groupements, l'article 20-1 de la loi modifie donc l'article L. 127-1 alinéa 1er du Code du travail afin d'élargir leurs compétences, au-delà de la seule mise à disposition de salariés, notamment par l'aide et le conseil qu'ils peuvent prodiguer à destination de leurs membres, en matière d'emploi et de gestion des ressources humaines.
Enfin, l'article 20-3 de la loi rétablit dans le Code du travail l'article L. 127-8 (N° Lexbase : L7699HBR), qui vise à autoriser la conclusion d'accords collectifs de travail portant sur la polyvalence, la mobilité et le travail à temps partagé des salariés desdits groupements. Il s'agit là de la création d'un nouveau niveau de négociation affichant clairement la volonté actuelle du législateur de privilégier le dialogue social, à son office.
5. Détachement transnational de travailleurs (article 89 de la loi)
Un nouveau chapitre du Code du travail, consacré au détachement transnational des travailleurs, est prévu aux articles L. 342-1 (N° Lexbase : L7847HBA) à L. 342-6 (N° Lexbase : L7852HBG) du Code du travail.
Ces dispositions s'appliquent à l'égard des salariés exerçant pendant une durée limitée une activité sur le territoire national pour le compte d'un employeur exerçant son activité hors de France.
Les employeurs sont alors soumis aux dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d'activité, établies en France, en matière de législation du travail, pour ce qui concerne un certain nombre de dispositions limitativement énumérées par les nouvelles dispositions légales :
- libertés individuelles et collectives dans la relation de travail, exercice du droit de grève ;
- durée du travail, repos compensateurs, jours fériés, congés annuels payés, congés pour évènements familiaux, congés de maternité, congés de paternité, conditions d'assujettissement aux caisses de congés et intempéries ;
- salaire minimum et paiement du salaire, y compris les majorations pour les heures supplémentaires ;
- conditions de mise à disposition et garanties dues aux travailleurs par les entreprises exerçant une activité de travail temporaire ;
- règles relatives à la sécurité, la santé, l'hygiène au travail et la surveillance médicale ;
- discrimination et égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, protection de la maternité, âge d'admission au travail, emploi des enfants, durée du travail et travail de nuit des jeunes travailleurs ;
- travail illégal.
Ces dispositions s'appliquent à partir de la publication d'un décret et, en tout état de cause, au plus tard le 1er janvier 2007.
6. Apprentissage (articles 78, 83, 84 et 85 de la loi)
Jusqu'à présent, les apprentis de moins de 18 ans ne pouvaient en aucun cas travailler les dimanches et jours de fêtes. La nouvelle loi apporte des assouplissements à ces principes.
- L'article L. 221-3 du Code du travail (N° Lexbase : L7720HBK) relatif à l'interdiction du travail dominical pour les apprentis mineurs est modifié afin de prévoir des dérogations à cette règle, dans les secteurs pour lesquels les caractéristiques particulières de l'activité le justifient et dont la liste sera fixée par décret.
Aux termes des articles L. 221-9 (N° Lexbase : L5884ACW) et L. 221-16 (N° Lexbase : L5891AC8) du Code du travail, il est probable que cette liste fera figurer les 14 catégories d'établissements d'ores et déjà autorisés à accorder aujourd'hui aux apprentis un repos hebdomadaire par roulement.
- Les apprentis mineurs pourront, également, travailler les jours fériés légaux dans les secteurs pour lesquels, encore une fois, les caractéristiques particulières de l'emploi de l'activité le justifient. Une liste doit également être fixée par décret au Conseil d'Etat.
A noter qu'une convention ou une accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement, pourrait définir les conditions d'application de cette dérogation au chômage d'un jour férié, sous réserve du bénéfice impératif des dispositions relatives au repos hebdomadaire.
L'article 85 prévoit qu'en cas de rupture du contrat d'apprentissage, fondée sur l'obtention du diplôme ou du titre de l'enseignement technologique préparé, le contrat d'apprentissage peut prendre fin à l'initiative du salarié avant le terme fixé initialement à la condition d'en avoir informé l'employeur par écrit, au minimum 2 mois auparavant.
Cette dernière condition de délai n'existait pas dans les dispositions antérieures du Code du travail : elles accordent une flexibilité certaine à l'apprenti.
L'exonération des cotisations sociales patronales liées au contrat d'apprentissage reste aujourd'hui acquise jusqu'à la fin du contrat d'apprentissage.
La disposition introduite par la loi de finance pour 2005 (loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, de finances pour 2005 N° Lexbase : L5203GUA), qui limitait cette exonération jusqu'à l'obtention du diplôme, est désormais supprimée.
Ainsi, le dispositif qui visait à limiter dans le temps la prise en charge par l'Etat des cotisations sociales patronales et qui aurait dû être effectif au 1er janvier 2005 n'a, en définitive, jamais été mis en place.
Dans les entreprises attachées à des chambres consulaires, un médiateur pourra être sollicité par l'apprenti, sa famille, son ou ses employeurs, pour résoudre les litiges naissant de l'exécution ou de la résiliation du contrat.
La nouvelle loi introduit une exonération de la taxe sur les salaires pour les rémunérations qui serons versées aux enseignants des centres de formation d'apprentis, applicable à compter du 1er janvier 2006.
7. Lutte contre le travail illégal (article 86)
Aux termes de l'article 86 de la loi, destiné à assurer la répression du travail illégal, les agents de contrôle pourront se communiquer tout renseignement et tout document utile à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le travail illégal.
Sont agents de contrôle : les officiers et agents de police judiciaire, les agents de la direction générale des impôts et de la direction générale des douanes, les agents agréés à cet effet et assermentés des organismes de Sécurité sociale et des caisses de mutualité sociale agricole, les inspecteurs du travail, les contrôleurs du travail et fonctionnaires de contrôle assimilés au sens de l'article L. 611-10 (N° Lexbase : L6652ACD), les officiers et les agents assermentés des affaires maritimes, les fonctionnaires des corps techniques de l'aviation civile commissionnés à cet effet et assermentés ainsi que les fonctionnaires ou agents de l'Etat chargés du contrôle des transports terrestres placés sous l'autorité du ministre chargé des transports.
Les agents de la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes seront habilités à leur transmettre tout renseignement et document nécessaire à cette mission.
A partir du moment où l'autorité compétente aura eu connaissance d'une infraction constitutive de travail illégal, elle pourra, en appréciant la gravité des faits qu'elle aura constatés, refuser d'accorder pendant une durée maximale de 5 ans les aides publiques à l'emploi et à la formation professionnelle à la personne physique ou morale qui aura fait l'objet de la verbalisation.
La nature des aides et subventions concernées sera fixée par décret.
Le législateur entend donc aujourd'hui renforcer le dispositif répressif attaché au travail illégal. Pour ce faire, il renforce la coordination des opérations administratives de constatation de ce type d'infractions et crée de nouvelles sanctions financières, pouvant être lourdes de conséquences pour certaines structures.
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