Réf. : Loi du 26 juillet 2005, n° 2005-845, de sauvegarde des entreprises (N° Lexbase : L0828HDZ)
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le 07 Octobre 2010
1 - Jeune, 20 ans seulement, mais plus assez belle pour être encore à la mode ! Alors, il faut la répudier cette loi sur les procédures collectives.
La réforme des procédures collectives est-elle un effet de mode ? Est-ce une nécessité ? La question mérite d'être posée, lorsque l'on sait les attentes énormes qu'avait suscitées la loi du 25 janvier 1985 (loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises N° Lexbase : L7852AGW) et qu'on veut bien les comparer aux résultats forts modestes obtenus. Suffit-il d'une loi pour changer les mentalités françaises, traduisant magnifiquement la politique de l'autruche des chefs d'entreprises, qui croient toujours au miracle et hésitent en conséquence à saisir les tribunaux quand il est encore temps ? La réponse ne nous appartient évidemment pas, mais en tout cas le pari du législateur, avec la loi de sauvegarde des entreprises, est que les chefs d'entreprises se placent au plus tôt sous la protection de la justice.
Cette loi a été adoptée en commission mixte paritaire le 13 juillet 2005.
Le Conseil constitutionnel a été saisi d'un recours par l'opposition parlementaire, sur deux articles. Le premier intéresse le privilège de la conciliation et le non -respect du principe d'égalité qu'il aurait renfermé. Le Conseil a statué par décision du 22 juillet et a rejeté ce motif de non constitutionnalité en reprenant les arguments qui avaient été développés pour rejeter le recours formé par l'opposition parlementaire de l'époque à propos du droit de priorité de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985. Un second argument de non constitutionnalité était trouvé dans le cantonnement de la responsabilité pour soutien abusif, présenté comme un principe d'irresponsabilité contraire aux règles françaises. Le Conseil a également rejeté le recours en faisant observer, d'une part, qu'il n'y avait pas un principe d'irresponsabilité, mais plus exactement une responsabilité encadrée et que, d'autre part, "le législateur a cherché à clarifier le cadre juridique de la mise en jeu de cette responsabilité ; que cette clarification est de nature à lever un obstacle à l'octroi des apports financiers nécessaires à la pérennité des entreprises en difficulté ; qu'elle satisfait ainsi à un objectif d'intérêt général suffisant".
Aussi, la loi de sauvegarde des entreprises vient-elle d'être promulguée au Journal officiel du 27 juillet 2005 (loi n° 2005-845, du 26 juillet 2005).
Le mûrissement de cette loi a été très long : sept ans entre les premiers documents préparatoires de la Chancellerie et le vote de la commission mixte paritaire. Le travail accompli par la Chancellerie a été particulièrement important et a été doublé d'un énorme travail parlementaire, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Qu'on en juge par le volume des rapports Xavier de Roux au nom de la Commission des lois de l'Assemblée nationale et Jean-Jacques Hyest au nom de la Commission des lois du Sénat.
2 - La loi du 25 janvier 1985 était politiquement très marquée par la recherche du redressement judiciaire à tout prix. Les sacrifices imposés aux créanciers ont été majeurs. La loi du 10 juin 1994 (loi n° 94-475, 10 juin 1994, relative à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises N° Lexbase : L9127AG7) a tenté un rééquilibrage en faveur des créanciers. La loi de sauvegarde des entreprises, pour sa part, constitue une évolution importante de la législation, allant dans le sens de l'histoire européenne, voire mondiale, sans afficher pour autant de caractère démagogique. De prime abord, c'est une loi d'équilibre, entre intérêts antagonistes, ce qui ne peut que mériter un accueil favorable. Les emprunts à la législation américaine sont évidents, et spécialement le chapitre 11, qui consacre la possibilité pour l'entreprise de se placer sous la sauvegarde de la justice, sans être en état de cessation des paiements. Il importe d'ailleurs de remarquer le titre de la loi dite de "sauvegarde des entreprises".
Les objectifs fondamentaux de la législation du 25 janvier 1985 ne sont pas pour autant remis en cause. Il s'agit toujours du sauvetage de l'entreprise et des emplois (1). Mais la méthode change. Il est question d'agir au plus vite, au besoin en ouvrant une véritable procédure collective la procédure de sauvegarde sans état de cessation des paiements. A cet égard, relevons immédiatement la bienveillance du législateur à l'égard de celui qui jouera le jeu de l'anticipation. Le législateur a délibérément choisi la carte de la discrimination entre le bon débiteur, celui qui anticipe, et le mauvais, celui qui subit la procédure collective classique avec état de cessation des paiements.
3 - Prenant acte de ce qu'il y aurait un droit à la faillite pour tous -un nouveau droit de l'homme ?-, le législateur étend les procédures anciennes et celles qu'il crée à toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, ce qui inclut les professionnels libéraux. Pour ces derniers, l'ordre professionnel ou l'autorité professionnelle éventuels dont ils dépendent, seront étroitement associés à la procédure, en étant convoqués, voire entendus. L'ordre ou l'autorité professionnel sera contrôleur d'office, sans avoir besoin d'être désigné.
4 - Traduction, s'il en était encore besoin, que les procédures collectives sont l'affaire de tous, et non pas seulement du débiteur et de ses créanciers, le rôle du ministère public est une nouvelle fois accru. Dans le même temps, le rôle du tribunal recule. Nombre de saisines d'office sont supprimées, notamment, celles relatives au déclenchement des sanctions. L'idée est ici de respecter l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du citoyen (N° Lexbase : L7558AIR) et le droit au respect d'un procès équitable qu'il renferme (2), évidemment inconciliables avec des saisines d'office dans le domaine des sanctions, renfermant le vice rédhibitoire de partialité du juge. Dans cette même logique, la loi nouvelle interdit également au juge-commissaire de participer à la juridiction de jugement dans le domaine des sanctions.
5 - L'une des autres idées forces de la législation nouvelle est de multiplier les procédures pour permettre de trouver celle qui est la plus adaptée à la situation du débiteur. C'est pourquoi la cessation des paiements cesse d'être le critère de distinction entre traitement amiable et traitement judiciaire (3).
6 - Le texte, tout en consacrant législativement l'extension de la procédure sur le fondement de la confusion des patrimoines ou de la fictivité, s'emploie à supprimer toutes les fausses extensions, qu'il s'agisse de l'extension de la procédure atteignant une personne morale à ses membres ou associées indéfiniment responsables du passif, du redressement ou de la liquidation judiciaire à titre personnel pour inexécution de la condamnation à combler le passif ou pour fautes spécialement déterminées. Cette extension est remplacée par une action en contribution aux dettes sociales, qui devient parallèle à l'action en comblement de passif, en ayant, cependant, des effets plus énergiques.
7 - L'article 192 de la loi prévoit son entrée en vigueur le premier janvier 2006. L'article 193, d'une manière classique en termes de dispositions transitoires d'une législation sur les procédures collectives indique que, par principe, la loi ne sera pas applicable aux procédures en cours lors de son entrée en vigueur. La législation antérieure régira seule, par principe, les procédures ouvertes avant l'entrée de la loi de sauvegarde des entreprises. Des exceptions sont toutefois prévues, spécialement en matière de sanctions.
8 - Formellement, les textes sont codifiés au sein du livre VI du Code de commerce, en six titres.
9 - Pour présenter les principales nouveautés induites par le texte, nous allons d'abord envisager les diverses procédures (1ère partie), puis, de manière transversale, indiquer le sort réservé aux créanciers (2ème partie) et, enfin, envisager les modifications en matière de sanctions (3ème partie).
Première partie : Les diverses procédures
10 - Partant du constat que les procédures collectives sont trop tardivement ouvertes, le législateur abandonne la cessation des paiements comme critère de déclenchement des procédures collectives. La procédure de conciliation (I) -nouvelle appellation du règlement amiable- peut être ouverte alors qu'il y a cessation des paiements. Au contraire, une véritable procédure collective peut être ouverte sans état de cessation des paiements : la sauvegarde (II). Le redressement judiciaire est peu affecté par la réforme (III). Enfin, la liquidation judiciaire (IV) est dédoublée en régime général et en régime simplifié.
I - Procédure de conciliation
11 - La conciliation est le nouveau nom de la procédure de règlement amiable, laquelle demeure cependant efficace pour les agriculteurs.
La procédure de conciliation bénéficiera aux personnes qui "éprouvent une difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible et ne se trouvent pas en cessation de paiements, depuis plus de 45 jours". Ainsi, la conciliation peut-elle être ouverte plus tôt que le règlement amiable. Il suffit que la difficulté soit prévisible, alors que cette difficulté devait être avérée dans le règlement amiable. La notion de difficulté prévisible intègre la notion de besoins ne pouvant être couverts par un financement adapté, qui est utilisée en matière de règlement amiable (4). La prévisibilité des difficultés du débiteur pourra ressortir d'éléments factuels que le président de tribunal appréciera au cas par cas, lors de sa décision statuant sur l'ouverture.
Inversement, la conciliation pourra profiter à des personnes qui sont déjà en état de cessation de paiements, dès lors que cet état n'est pas caractérisé depuis plus de 45 jours. La procédure de conciliation a ainsi vocation à se substituer, pendant un laps de temps non négligeable, au redressement judiciaire (5).
Le débiteur, qui se trouve en état de cessation de paiements depuis moins de 45 jours a ainsi le choix de la procédure : conciliation, redressement ou liquidation judiciaire, mais non la sauvegarde.
La demande d'ouverture de la conciliation, présentée au président du tribunal de commerce pour les commerçants ou artisans, dans les autres cas, au président du tribunal de grande instance, est à l'initiative exclusive du chef d'entreprise.
Le président du tribunal ouvrira la procédure de conciliation ou, s'il constate qu'il y a état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours, refusera d'ouvrir la procédure de conciliation et renverra l'affaire devant le tribunal, qui pourra ouvrir d'office la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, mais non la procédure de sauvegarde.
Aucun recours juridictionnel n'est recevable sur la décision d'ouverture de la conciliation (6).
12 - Toute personne appelée à la procédure de conciliation ou qui, par ses fonctions, en a connaissance, est tenue à la confidentialité, laquelle remplaçant le secret professionnel du règlement amiable pénalement répréhensible. La violation de l'obligation de confidentialité ne trouvera sa réparation que sur le terrain de la responsabilité civile (7).
13 - La mission du conciliateur durera au maximum quatre mois, au lieu des trois mois du droit positif. Sa mission pourra, en outre, être renouvelée pour un mois, sur décision motivée du président du tribunal. Sa mission prend fin de plein droit au terme de la conciliation, c'est-à-dire du constat de l'accord, de l'homologation de la conciliation ou de la décision constatant l'échec de la conciliation.
Le contenu de la mission reste identique : il s'agit de favoriser la conclusion d'un accord avec les principaux créanciers (C. com., art. L. 611-7). En outre, les cocontractants habituels du débiteur sont, le cas échéant, invités à l'accord, alors même qu'ils ne seraient pas créanciers.
La procédure de conciliation permettra d'obtenir de la part des organismes fiscaux et sociaux des remises de dettes, dans les mêmes conditions que pour la sauvegarde.
14 - La procédure de conciliation n'est pas une véritable procédure collective de paiement. L'une des règles classiques de cette dernière, à savoir l'arrêt des poursuites individuelles et des voies d'exécution, n'existe pas ici. La réforme supprime la facultative suspension provisoire des poursuites du règlement amiable.
Aucune interdiction des paiements n'est posée pendant la recherche de l'accord de conciliation. En revanche, est maintenue la règle selon laquelle les créanciers ne peuvent plus, une fois l'ordonnance de conciliation intervenue, prendre des sûretés en garantie des créances incluses dans l'accord.
15 - Pour tenir compte de l'éventualité des poursuites exercées par un créancier pendant la recherche de l'accord de conciliation, la loi prévoit la possibilité pour le conciliateur de solliciter du président du tribunal les délais de grâce de l'article 1244-1 du Code civil (N° Lexbase : L1358ABW), et plus généralement le dispositif des articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil. Les mesures ordonnées par le juge obligeront celui-ci à statuer à l'occasion de chacune des poursuites intentées par l'un des créanciers et n'ont donc pas d'effet collectif (8).
16 - Faute de réglementation particulière, l'ouverture de la procédure de conciliation ne produit aucun effet sur les garants du débiteur. Les créanciers peuvent donc librement les poursuivre.
17 - L'échec du règlement amiable n'a qu'une seule cause : l'absence d'accord entre le débiteur et ses principaux créanciers. La solution demeure. Mais, la législation nouvelle prévoit une autre cause d'échec de la conciliation : l'absence d'homologation de l'accord de conciliation.
L'échec de la procédure de conciliation conduit le tribunal à se saisir d'office aux fins d'ouverture d'un redressement judiciaire, si le débiteur est en état de cessation des paiements (C. com., art. L. 631-4, al. 2). Si les conditions de la liquidation judiciaire immédiate sont réunies, le débiteur, dans les huit jours de la notification de la décision refusant l'homologation de l'accord de conciliation, doit saisir le tribunal aux fins d'ouverture d'une liquidation judiciaire (C. com., art. L. 640-4, al. 2).
Si le débiteur ne respecte pas les engagements inclus dans l'accord homologué, il y a possibilité, pour le tribunal saisi par une partie à l'accord, selon l'article L. 611-10, alinéa 5, du Code de commerce, de prononcer la résolution de l'accord et la déchéance de tous les délais de paiement. L'inexécution de la procédure de conciliation n'est plus un cas autonome d'ouverture de la procédure, sans caractérisation de l'état de cessation des paiements.
18 - Pour le surplus, le régime diffère selon que l'accord de conciliation sera ou non homologué. Le projet de loi prévoyait une homologation obligatoire de l'accord de conciliation. Les discussions parlementaires ont insisté sur la nécessité de conserver un caractère confidentiel à la procédure de conciliation. C'est pourquoi une technique alternative a été proposée avec un amendement adopté à l'Assemblée nationale (9). Le débiteur choisira de faire homologuer (B) ou non (A) l'accord de conciliation.
A - La conciliation avec accord constaté
19 - L'accord qui n'est pas homologué sera simplement constaté par le président du tribunal, qui devra être saisi à cet effet par une requête conjointe du débiteur et des créanciers signataires de l'accord. Un contrôle formel sera institué sur, d'une part, l'existence d'un accord intervenu entre les parties, sans possibilité d'en examiner le contenu, et, d'autre part, l'existence d'une déclaration du débiteur certifiant qu'il ne se trouve pas en état de cessation des paiements ou que, par la signature de l'accord, il ne se trouve plus en état de cessation des paiements (10).
L'intervention du juge a pour effet de donner force exécutoire à l'accord (11), ce qui dispensera le créancier, en cas d'inexécution de l'accord, de saisir le tribunal pour faire constater l'inexécution.
B - La conciliation homologuée
20 - La saisine aux fins d'homologation de l'accord de conciliation n'appartient qu'au débiteur. En pratique, il y sera incité par ses partenaires contractuels, et spécialement les établissements de crédit, qui auraient consenti des concours nouveaux. Ils ont alors, en effet, besoin de sécuriser l'accord (12). La demande est présentée par requête au tribunal et non plus à son président.
21 - L'homologation par le tribunal de l'accord est soumise à trois conditions cumulatives de fond. Tout d'abord, le débiteur ne doit pas être en état de cessation des paiements ou l'accord conclu doit y mettre fin. Ensuite, l'homologation par le tribunal de l'accord repose sur le constat que les termes de l'accord sont de nature à assurer la pérennité de l'activité de l'entreprise. Enfin, l'homologation de l'accord est subordonnée au constat que les intérêts des créanciers non parties à l'accord sont sauvegardés.
22 - Parce que le jugement homologuant l'accord de conciliation produit des effets importants, spécialement par la création d'un privilège nouveau (13) (v. infra n ° 34), est prévue une publicité obligatoire du jugement homologuant l'accord de conciliation, mais l'accord de conciliation lui-même ne sera pas publié et restera donc confidentiel (14).
23 - La décision qui refuse l'homologation est, quant à elle, susceptible d'appel.
La décision qui accepte l'homologation est susceptible de tierce opposition, dans les dix jours de la publicité de la décision (C. com., art. L. 611-10, alinéa 2). Elle émanera des créanciers non parties à l'accord.
24 - Une très grande insécurité juridique entoure, en droit positif le règlement amiable. La crédibilisation de la procédure passait nécessairement par l'impossibilité de remonter la date de cessation des paiements à une période antérieure à l'homologation de l'accord. C'est ce que fait le texte de l'article L. 631-8, alinéa 2, pour le redressement judiciaire, rendu applicable en liquidation judiciaire par l'article L. 641-1-IV. Il est, en effet, prévu que la date de cessation des paiements ne pourra être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué l'accord amiable, sauf fraude. Les créanciers seront ainsi assurés de ne pas s'exposer au jeu des nullités de la période suspecte, pour les actes accomplis en phase de recherche de l'accord, mais également, avant la recherche de l'accord. Cela revient à donner à l'homologation l'autorité de la chose jugée sur ce point (15).
25 - Dans la législation du règlement amiable, les créanciers qui consentent des efforts, dans le cadre du règlement amiable, ne sont en rien avantagés par rapport aux autres créanciers. Le texte issu de la réforme, très novateur sur ce point, considère, au contraire, en partant du postulat que l'entreprise bénéficiant d'une procédure de conciliation a nécessairement besoin de fonds nouveaux, qu'il convient d'attirer les créanciers par des avantages. C'est pourquoi un avantage très important est offert aux personnes qui aideront le débiteur à passer le cap difficile. La nature du droit de priorité est précisée par les textes : il s'agit clairement d'un privilège. Ce privilège est accordé aux personnes "qui consentent dans l'accord homologué [...] un nouvel apport en trésorerie au débiteur". Ce texte intéresse évidemment les établissements de crédit, mais il concerne aussi les associés qui consentent des avances en compte courant, et non, en revanche, selon le texte de l'alinéa 3 de l'article L. 611-11, les actionnaires et les associés du débiteur dans le cadre d'une augmentation de capital.
Pour établir une égalité entre les établissements de crédit et les fournisseurs, l'article 611-11 du Code de commerce indique que "dans les mêmes conditions, les personnes qui fournissent, dans l'accord homologué, un nouveau bien ou service en vue d'assurer la poursuite d'activité de l'entreprise et sa pérennité, sont payées pour le prix de ce bien ou de ce service, par privilège". Tous les fournisseurs peuvent donc être concernés, dès lors que la fourniture de biens ou de services est en rapport avec la poursuite de l'activité de l'entreprise.
Le privilège ne sera pas accordé à des créanciers pour garantir des concours antérieurs à l'ouverture de la conciliation. En ce sens, un amendement a été présenté pour éviter tout détournement du texte (16).
L'accord amiable devra prévoir explicitement l'affectation des sommes versées par les apporteurs d'argent frais, pour que puisse être reconnu le privilège de la conciliation (17).
Les bénéficiaires du privilège n'auront l'occasion de l'exercer qu'en cas d'ouverture d'une procédure collective après l'homologation d'un accord de conciliation. Ils seront payés par priorité aux créanciers dont la créance est née avant leur concours, à l'exception du superprivilège des salaires et des frais de justice antérieurs à l'ouverture de la procédure. Le créancier titulaire du privilège de la conciliation, sera contraint, comme tous créanciers antérieurs, à déclarer sa créance. Et, puisqu'il s'agit d'un véritable privilège, en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, le créancier devra déclarer sa créance, en faisant mention du privilège de la conciliation, sauf à s'exposer à en perdre le bénéfice, selon une solution classiquement posée en matière de déclaration de créance.
26 - En cas d'homologation d'un accord de conciliation, il y aura suspension automatique des effets d'une interdiction d'émission de chèque (C. mon. et fin., art. L. 131 -73 N° Lexbase : L3089G9B).
Pierre-Michel Le Corre
Professeur agrégé des Universités
Directeur du Master droit de la banque de la faculté de droit de Toulon
Formateur - Consultant
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