L'annulation des décisions prises par la commission administrative chargée de déterminer les types de support éligibles à la rémunération pour copie privée et les taux de cette rémunération ne saurait priver les titulaires du droit de reproduction d'une compensation équitable due au titre des copies licites réalisées à partir des supports d'enregistrement mis en circulation. Il appartient, dès lors, au juge judiciaire de procéder à l'évaluation de cette compensation, perçue pour le compte des ayants-droit par Copie France et calculée sur la base du critère du préjudice causé à ceux-ci par l'introduction de l'exception de copie privée. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 17 mars 2016 (Cass. civ. 1, 17 mars 2016, n° 15-10.895, FS-P+B+I
N° Lexbase : A6436Q7I). En l'espèce, une société a procédé, auprès des sociétés de gestion collective concernées, aux déclarations de sorties de stocks des cartes mémoires non dédiées et des téléphones mobiles multimédia qu'elle a mis en circulation sur le territoire national de mai à décembre 2008. Sur la base de ces déclarations, Copie France a émis des notes de débit en application des décisions n° 8 du 9 juillet 2007 et n° 10 du 27 février 2008 de la commission instituée par l'article L. 311-5 du Code de la propriété intellectuelle (
N° Lexbase : L4193IRQ). Contestant la légalité de ces décisions, la société redevable des droits a saisi la juridiction judiciaire aux fins de voir juger que les sommes ainsi réclamées n'étaient pas dues et, subsidiairement, surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction administrative. Le Conseil d'Etat a, notamment, annulé les décisions n° 8 et n° 10 (CE 9° et 10° s-s-r., 17 décembre 2010, deux arrêts, n° 310195
N° Lexbase : A6637GN7 et n° 315832
N° Lexbase : A6654GNR). La cour d'appel a, certes, constaté que les factures litigieuses étaient privées de fondement juridique et ordonné la restitution, par la société Copie France, des sommes déjà payées, mais a aussi fixé à une certaine somme l'indemnité due au titre de la rémunération pour copie privée. Saisie d'un pourvoi, la Cour de cassation, énonçant la solution précitée, confirme l'arrêt d'appel. En effet, elle relève qu'il résulte de l'article L. 311-1 du Code de la propriété intellectuelle (
N° Lexbase : L4189IRL), qui doit être interprété à la lumière de la Directive 2001/29 du 22 mai 2001 (
N° Lexbase : L8089AU7), que les titulaires d'un droit exclusif de reproduction doivent recevoir une compensation équitable destinée à les indemniser du préjudice que l'application de l'exception de copie privée leur cause. En outre, la CJUE a dit pour droit que l'Etat membre qui avait introduit une telle exception dans son droit national avait, à cet égard, une obligation de résultat, en ce sens qu'il était tenu d'assurer une perception effective de ladite compensation (CJUE, 16 juin 2011, aff. C-462/09
N° Lexbase : A6408HTI et CJUE, 11 juillet 2013, aff. C-521/11
N° Lexbase : A6205KIN).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable