Si la perte pour l'avenir des rémunérations que l'associé unique d'une société aurait pu percevoir en tant que dirigeant social est à l'origine d'un préjudice distinct qui lui est personnel, la dépréciation du fonds de commerce consécutive à la mise en liquidation judiciaire de la société n'est qu'une fraction du préjudice collectif subi par l'ensemble des créanciers du fait de l'amoindrissement ou de la disparition du patrimoine social, de sorte que seul le liquidateur à la liquidation judiciaire de la société a qualité pour en demander réparation. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 3 février 2016 (Cass. civ. 1, 3 février 2016, n° 14-25.695, F-P+B
N° Lexbase : A3231PKU). En l'espèce, une banque a consenti à une société, dirigée par son associé unique, un prêt destiné à l'acquisition d'un fonds de commerce, dont le remboursement devait être garanti par une assurance couvrant les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie et arrêt de travail sur la tête de l'associé. Celui-ci, qui avait sollicité son admission à l'assurance de groupe souscrite par la banque, a demandé, au mois de février 2002, la prise en charge des échéances de remboursement du prêt, au titre d'un arrêt de travail pour maladie. S'étant vu opposer une exception de non-assurance, prise de ce qu'il n'avait pas accepté, dans les délais impartis, la proposition d'assurance que l'assureur de groupe lui avait adressée pour accord, l'associé a, conjointement avec la société, assigné en responsabilité la banque et le notaire rédacteur de l'acte de prêt. Après que la société et son associé unique eurent été successivement mis en liquidation judiciaire, leur liquidateur commun a repris l'instance, pour demander, d'une part, l'allocation d'une indemnité réparatrice égale à l'insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la société et, d'autre part, l'indemnisation des préjudices personnels subis par l'associé en tant que dirigeant de la société et caution solidaire de ses engagements envers la banque. Cette dernière ayant été condamnée (CA Nancy, 16 juin 2014, n° 12/01572
N° Lexbase : A5598MRR) à payer au liquidateur à la liquidation judiciaire de l'associé une certaine somme en réparation des pertes de rémunérations consécutives au redressement puis à la liquidation judiciaires de la société que celui-ci dirigeait et une autre somme en compensation de la dépréciation du fonds de commerce appartenant à la société dont il était l'unique associé, elle s'est pourvue en cassation. La Haute juridiction, énonçant la solution précitée, censure donc l'arrêt d'appel, mais seulement en ce qu'il condamne la banque à verser au liquidateur de l'associé unique une certaine somme en réparation de la dépréciation du fonds de commerce. En effet, seul le liquidateur de la société pouvait agir pour une telle demande (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté"
N° Lexbase : E3984EU4 et
N° Lexbase : E3976EUS).
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