La condamnation à treize ans d'emprisonnement pour avoir déversé de la peinture sur des statues est manifestement disproportionnée car l'acte n'est pas d'une gravité telle qu'elle légitimait l'infliction d'une peine privative de liberté. Aussi, la restriction générale, automatique et indifférenciée au droit de vote imposée à tous les détenus condamnés purgeant leur peine est incompatible avec l'article 3 du Protocole n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. Telle est la substance de l'arrêt de la CEDH, rendu le 21 octobre 2014 (CEDH, 21 octobre 2014, Req. 9540/07,
disponible en anglais). Dans cette affaire, M. V. fut condamné en 2005, en vertu de la loi sur les infractions commises contre Atatürk pour avoir déversé de la peinture sur plusieurs statues d'Atatürk situées dans des lieux publics, notamment dans deux cours d'école. Il fut condamné à l'origine à vingt-deux ans et six mois d'emprisonnement, mais la peine fut ramenée en appel à treize ans d'emprisonnement. En même temps, les juridictions du fond imposèrent un certain nombre de restrictions à M. V., en particulier, pendant toute la durée de sa peine, on lui retira ses droits de voter, de prendre part à des élections et de diriger des associations. Invoquant en particulier l'article 10 de la CESDH (
N° Lexbase : L4743AQQ), M. V. a saisi la CEDH pour se plaindre de ce qu'il avait été puni pour avoir exprimé ses opinions et soutenait que la punition était excessive par rapport à l'infraction commise. Il alléguait, en outre, que la privation de son droit de vote était contraire à l'article 3 du Protocole n° 1 (droit à des élections libres). La CEDH lui donne raison et condamne la Turquie à lui verser la somme de 26 000 euros en réparation du préjudice moral subi .
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