L'action en réparation de propos dénigrant l'activité de sociétés d'assurance, jetant le discrédit sur leurs produits en incitant une partie de leur clientèle à s'en détourner, relève de la responsabilité civile de droit commun sur le fondement de l'article 1382 du Code civil (
N° Lexbase : L1488ABQ) et non de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 (
N° Lexbase : L7589AIW) (Cass. civ. 1, 27 novembre 2013, n° 12-24.651, FS-P+B+I
N° Lexbase : A2233KQR ; cf. l’Ouvrage "Droit de la responsabilité" N° Lexbase : E4090EY7). En l'espèce, M. A. qui, agent général des sociétés A. depuis le 1er janvier 1991, en charge de deux agences depuis le 29 juin 2006, avait manifesté l'intention de démissionner de ses fonctions à compter du 31 mars 2009 pour en transmettre l'exercice à ses deux fils, qu'il employait comme collaborateurs, avait, après que ses mandantes eurent refusé d'agréer la candidature de ses enfants, revendiqué le maintien de ses mandats ; les sociétés d'assurances tenant sa démission pour définitive et souhaitant confier la gestion des portefeuilles à d'autres intermédiaires, avaient interrompu les connexions informatiques de ses agences à compter du 1er avril 2009, situation que l'agent général avait dénoncée au moyen d'un "blog", d'affiches ou d'articles de presse et de lettres circulaires adressées à la clientèle. Déplorant cette publicité négative, les sociétés A. lui avaient notifié sa révocation avec effet immédiat, le 30 avril 2009. Assignées en dommages-intérêts pour révocation abusive ainsi qu'en paiement des indemnités compensatrices de fin de mandat, les sociétés A. avaient opposé à M. A. la déchéance du droit à l'indemnité compensatrice dans la branche I., sollicitant, à titre reconventionnel, la réparation de faits de concurrence déloyale et de dénigrement, ainsi que le paiement du solde débiteur des comptes de fin de gestion des deux agences. Pour exclure de la réparation des faits de dénigrement commis par M. A. les conséquences dommageables des propos relatés par les quotidiens locaux, la cour d'appel avait retenu que ces faits s'analysant en un abus de la liberté d'expression commis par voie de presse, ne relevaient pas de la responsabilité civile de droit commun et ne pouvaient être réparés sur le fondement de l'article 1382 du Code civil. A tort, selon la Cour de cassation, qui rappelle que la liberté d'expression est un droit dont l'exercice revêt un caractère abusif dans les cas spécialement déterminés par la loi. Selon la Haute juridiction, en statuant ainsi, quand elle avait relevé que ces mêmes propos dénigrant l'activité des sociétés A., avaient jeté le discrédit sur leurs produits en incitant une partie de leur clientèle à s'en détourner, ce dont il résultait un abus spécifique de la liberté d'expression, la cour d'appel avait violé l'article 10 de la CESDH (
N° Lexbase : L4743AQQ), ensemble l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, le premier par refus d'application, le second par fausse application.
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