Le Quotidien du 22 octobre 2024 : Propriété

[Brèves] Acte de notoriété acquisitive : office du juge quant à l’appréciation de la preuve de la possession

Réf. : Cass. civ. 3, 10 octobre 2024, n° 23-17.458, FS-B N° Lexbase : A441159A

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N0676B3G

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par Melvyn Jourdan

le 21 Octobre 2024

Si l'existence d'un acte notarié constatant une usucapion ne peut, par elle-même, établir celle-ci, il appartient au juge d'apprécier la valeur probante des témoignages y relatés quant à l'existence d'actes matériels de nature à caractériser la possession invoquée.

Faits et procédure. Des acquéreurs ont acquis une parcelle par acte notarié du 13 décembre 2010. Le 8 juin 2016 a été dressé par notaire un acte de notoriété acquisitive désignant d’autres possesseurs comme propriétaires de la parcelle voisine.

Une commune a assigné ces derniers aux fins de voir annuler l’acte de notoriété et juger qu'elle est propriétaire de cette parcelle par application de l'article 713 du Code civil N° Lexbase : L4762MBY. La cour d’appel a considéré que les possesseurs ne rapportaient pas la preuve d’une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire pendant plus de trente ans (CA Grenoble, 4 avril 2023, n° 21/01393 N° Lexbase : A69689NE). Ils ont formé un pourvoi en cassation.

Solution. Au visa des articles 2261 N° Lexbase : L7210IAB et 2272 N° Lexbase : L7195IAQ du Code civil, la troisième chambre civile rappelle qu’aux termes du premier de ces textes, pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire et qu’aux termes du second, le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.

Elle ajoute qu’il incombe à celui qui invoque le bénéfice de la prescription acquisitive de rapporter la preuve d'actes matériels de possession exercés pendant la durée prévue par le second de ces textes et revêtant les caractères exigés par le premier.

Si l'existence d'un acte notarié constatant une usucapion ne peut, par elle-même, établir celle-ci (déjà en ce sens, v. Cass. civ. 3, 19 novembre 2014, n° 13-24.372 N° Lexbase : A9334M34), il appartient au juge d'apprécier la valeur probante des témoignages relatés dans cet acte quant à l'existence d'actes matériels de nature à caractériser la possession invoquée.

Pour annuler l'acte de notoriété du 8 juin 2016 et juger que la commune est propriétaire de la parcelle cadastrée, la cour d’appel retient que cet acte n'est confirmé par aucun autre élément, les autres pièces produites aux débats par les acquéreurs étant insuffisantes à établir une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaires pendant plus de trente ans. Selon la Haute juridiction, en se déterminant ainsi, sans analyser, comme il le lui était demandé, les témoignages contenus dans l'acte de notoriété du 8 juin 2016, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Le juge apprécie souverainement la réunion des conditions de la prescription acquisitive. S’il appartient aux possesseurs de rapporter la preuve d'actes matériels de possession et que l'existence d'un acte notarié acquisitive est insuffisante à établir une possession dans les conditions légales de la prescription acquisitive, il appartient toutefois au juge d’analyser si les témoignages contenus dans celui-ci ne permettent pas de rapporter une telle preuve. Issu de la pratique notariale, l’acte de notoriété acquisitive doit donc être établi avec précaution, notamment en ce qui concerne les témoignages recueillis.

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