Réf. : CJUE, 4 octobre 2024, aff. C-548/21, CG N° Lexbase : A0502584
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par Pauline Le Guen
le 21 Octobre 2024
► La CJUE valide l’accès par des policiers aux données contenues dans un téléphone, quand bien même l’enquête ne concernerait pas la criminalité grave, afin d’éviter l’impunité ; elle insiste toutefois sur la nécessité de subordonner la mesure à une autorisation préalable par une juridiction ou une entité administrative indépendante.
Rappel des faits et de la procédure. Lors d’un contrôle en matière de stupéfiants, des agents douaniers autrichiens ont saisi un colis contenant quatre-vingt-cinq grammes de cannabis. Dans le cadre de l’enquête de police, des agents ont effectué une perquisition au domicile du destinataire du colis. Après son refus de donner l’accès aux données de connexion de son téléphone, les enquêteurs ont saisi l’appareil, sans autorisation. Ils ont par la suite tenté, toujours sans autorisation, de déverrouiller le téléphone. Par la suite, l’intéressé a introduit un recours devant la juridiction de renvoi afin de contester la légalité de la saisie du téléphone. Il a eu connaissance par la suite des tentatives d’exploitation de son appareil.
Questions posées à la Cour. La juridiction de renvoi cherche à savoir si, au regard de la Directive « vie privée et communication électronique » N° Lexbase : L6515A43, un accès complet et non contrôlé à l’ensemble des données du téléphone portable constitue une ingérence tellement grave qu’il doit être limité à la lutte contre la criminalité grave. Par ailleurs, elle s’interroge sur le fait de savoir si ladite Directive s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle la police peut se procurer un accès complet et non contrôlé à l’ensemble des données contenues dans un téléphone au cours d’une enquête pénale sans autorisation et si une telle réglementation serait compatible avec le droit à un recours juridictionnel effectif.
Appréciation de la Cour. La Cour de justice de l'Union européenne constate que l’accès à l’ensemble des données d’un téléphone peut constituer une ingérence grave dans les droits fondamentaux de la personne et que la gravité de l’infraction constitue l’un des paramètres centraux à prendre en compte lors de l’examen de la proportionnalité d’une telle ingérence. Néanmoins, considérer que seule la lutte contre la criminalité grave est susceptible de justifier l’accès à ces données reviendrait à limiter indûment les pouvoirs d’enquête des autorités compétentes, ce dont il résulterait un accroissement du risque d’impunité pour les infractions pénales. En revanche, une telle ingérence doit être prévue par la loi et il appartient dès lors au législateur national de définir les éléments, la nature ou les catégories d’infractions concernées. Par ailleurs, la Cour précise qu’un tel accès doit être subordonné à un contrôle préalable par une juridiction ou une entité administrative indépendante, sauf urgence. Enfin, elle souligne que la personne concernée doit être informée des motifs sur lesquels repose l’autorisation dès que la communication de cette information n’est plus susceptible de compromettre l’enquête.
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