Réf. : Cass. civ. 3, 25 avril 2024, n° 24-10.256, FS-B, QPC N° Lexbase : A9172289
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 13 Mai 2024
► L’annulation d’une autorisation d’exploitation est sans incidence sur le permis de construire ;
En cas d’annulation du permis de construire, la démolition exige la preuve d’un préjudice en lien avec la violation de la règle d’urbanisme.
Les associations de protection des animaux, de la flore, du patrimoine et autres font montre d’une audace qui n’a d’égal que leur imagination pour trouver des fondements aux demandes de démolition des parcs éoliens formées, même en présence de permis de construire dument délivré. L’arrêt rapporté en est une nouvelle illustration.
En l’espèce, par arrêté, un préfet a délivré à une société un permis de construire pour édifier sept aérogénérateurs et un poste de distribution. La société a déposé sa déclaration d’ouverture de chantier régulièrement ainsi que son attestation d’achèvement des travaux et de leur conformité avec le permis de construire. Aux termes d’un arrêt rendu le 26 janvier 2017, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé le permis en raison de l’insuffisance d’étude d’impact. Le 27 juillet 2018, deux associations assignent la société en démolition du parc éolien sur le fondement de l’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L5016LUC et en dommages et intérêts.
La société assignée demande de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité. L’article L. 480-13 précité, qui permet la démolition d’une construction édifiée dans certaines zones conformément à un permis de construire, ultérieurement annulé, ne porte-t-il pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété ?
L’annulation d’une autorisation délivrée au titre d’une législation est, en tant que telle, sans incidence directe sur l’autorisation délivrée au titre d’une législation distincte (CE 1re-6e s.-sect. réunies., 22 septembre 2014, n° 367889 N° Lexbase : A2964MX3).
La condamnation à démolir susceptible d’être prononcée par le juge judiciaire sur le fondement de l’article L. 480-13, n’est pas subordonnée à la seule condition que le permis de construire délivré ait été annulé mais exige du demandeur à l’action qu’il démontre avoir subi un préjudice personnel en lien de causalité directe avec la violation de la règle d’urbanisme méconnue (Cass. civ. 3, 23 novembre 1982, n° 81-14817 N° Lexbase : A7604CIH ; Cass. civ. 3, 11 janvier 2023, n° 21-19.778, FS-B N° Lexbase : A645687A).
La Haute juridiction ajoute qu’il relève de l’office du juge judiciaire, saisi d’une demande de démolition sur le fondement de ce texte, de vérifier si à la date à laquelle il statue, la règle d’urbanisme dont la méconnaissance a justifié l’annulation du permis de construire est toujours opposable au pétitionnaire et, le cas échéant, s’il n’a pas régularisé la situation au regard de celles qui lui sont désormais applicables.
Il peut, en effet, paraître excessif de solliciter la démolition d’une construction conforme à son permis mais irrégulière. La question n’est pas nouvelle et fréquemment invoquée (pour un exemple récent, v. Cass. civ. 3, 11 janvier 2023, n° 21-19.778, FS-B N° Lexbase : A645687A).
Pour le reste, il est bien acquis que le fait que l’Administration délivre un permis ou qu’elle ne conteste pas le certificat de conformité ne dégage pas le constructeur de sa responsabilité en cas d’infraction aux règles d’urbanisme (pour exemple, v. Cass. crim., 6 novembre 2012, n° 11-89.036{"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 7357014, "corpus": "sources"}, "_target": "_blank", "_class": "color-sources", "_title": "Cass. crim., 06-11-2012, n\u00b0 11-89.036, F-D, Rejet", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: A5622IYU"}}).
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