La lettre juridique n°981 du 11 avril 2024 : Marchés publics

[Brèves] Contrat de bail ou d'achat d'un bien immobilier devant faire l'objet de travaux à la charge du cocontractant : requalification en marché de travaux

Réf. : CE, 2e-7e ch. réunies, 3 avril 2024, n° 472476, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A64072ZC

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par Yann Le Foll

le 11 Avril 2024

► Le contrat par lequel un pouvoir adjudicateur prend à bail ou acquiert des biens immobiliers qui doivent faire l'objet de travaux à la charge de son cocontractant constitue un marché de travaux lorsqu'il résulte des stipulations du contrat qu'il exerce une influence déterminante sur la conception des ouvrages.

Faits. Le centre hospitalier Alpes-Isère a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le contrat de bail en l'état futur d'achèvement qu'il a conclu avec une société civile immobilière. Le tribunal a rejeté cette demande et son jugement a été annulé en appel (CAA Marseille, 6e ch., 27 février 2023, n° 21MA04312 N° Lexbase : A28909G7).

Principe. Le contrat par lequel un pouvoir adjudicateur prend à bail ou acquiert des biens immobiliers qui doivent faire l'objet de travaux à la charge de son cocontractant, constitue un marché de travaux au sens des articles 4 et 5 de l'ordonnance n° 2015-899, du 23 juillet 2015, relative aux marchés publics N° Lexbase : L9077KBS, repris respectivement aux articles L. 1111-1 N° Lexbase : L4504LRA et L. 1111-2 N° Lexbase : L3878LR3 du Code de la commande publique, lorsqu'il résulte des stipulations du contrat qu'il exerce une influence déterminante sur la conception des ouvrages.

Tel est le cas lorsqu'il est établi que cette influence est exercée sur la structure architecturale de ce bâtiment, telle que sa dimension, ses murs extérieurs et ses murs porteurs. Les demandes de l'acheteur concernant les aménagements intérieurs ne peuvent être considérées comme démontrant une influence déterminante que si elles se distinguent du fait de leur spécificité ou de leur ampleur (sur les indices pouvant avoir eu une influence décisive du pouvoir adjudicateur sur la réalisation du bâtiment, v. CJUE, 22 avril 2021, aff. C-537/19, Commission européenne c/ République d'Autriche N° Lexbase : A32394QZ).

Décision CE. Ayant appliqué ce principe pour estimer que ce contrat, dénommé par les parties « bail en l'état futur d'achèvement », constituait bien un marché public de travaux dès lors que l'ouvrage répondait aux besoins exprimés par le centre hospitalier (correspondant ainsi à la définition du marché prévue à l'article L. 1111-1 du Code de la commande publique), estimant nécessairement qu'il avait exercé une influence déterminante sur la conception de cet ouvrage, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

Décision CE (suite). En vertu du contrat en litige, les travaux d'aménagement du bâtiment A et de construction du bâtiment C étaient rémunérés par le centre hospitalier, non par le versement immédiat d'un prix, mais par le versement de loyers ainsi que de « surloyers ». C’est à bon droit que la cour a considéré qu'une telle clause prévoyant ces versements, qui constituaient des paiements différés, était prohibée dans les marchés publics passés par les établissements publics de santé, en application des dispositions de l'article 60 de l'ordonnance du 23 juillet 2015.

Elle a donc pu en déduire que cette clause de paiement différé était indivisible du reste du contrat, et qu'eu égard à la nature de cette clause, le contenu du contrat présentait un caractère illicite (en effet, un contrat administratif est illicite en raison de ce que son objet même est contraire à la loi, CE, 9 novembre 2018, n° 420654 et n° 420663, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6422YK3) et qu'un tel vice était de nature à justifier son annulation (recours « Béziers 1 », CE ass., 28 décembre 2009, n° 304802 N° Lexbase : A0493EQC).

À ce sujet. Lire A. M. Smolinska, Systématisation des pouvoirs de l’administration face à une clause contractuelle illicite, Lexbase Public, avril 2023, n° 704 N° Lexbase : N5109BZA.

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