Le principe de l'égalité des armes s'oppose à ce que l'employeur utilise son pouvoir disciplinaire pour imposer au salarié les conditions de règlement du procès qui les oppose devant la juridiction prud'homale. Telle est la solution retenue par la Chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 9 octobre 2013 (Cass. soc., 9 octobre 2013, n° 12-17.882, FS-P+B+R
N° Lexbase : A6852KMQ).
Dans cette affaire, un salarié, M. P., titulaire de plusieurs CDD successifs, a saisi la juridiction prud'homale aux fins de la requalification de ses contrats en CDI. Le conseil de prud'hommes a fait droit à cette demande et a fixé le salaire mensuel de référence à 1 417 euros. L'employeur lui a alors adressé, par l'intermédiaire de son avocat, une proposition de contrat de travail établie sur la base de trente-six heures par mois pour un salaire de 523 euros. Le salarié a écrit à son employeur pour l'informer de son entière disponibilité pour occuper son poste. Le lendemain, le conseil de M. P. a indiqué à l'employeur que le contrat de travail devait mentionner un salaire brut de 1 417 euros pour soixante-six heures de travail par mois. L'employeur a répondu à cette contre-proposition, mais le salarié a formé appel contre le jugement du CPH, peu avant que son conseil adresse à son employeur un nouveau projet de contrat. Après, ses nombreux refus, le salarié a été licencié en raison d'atermoiements délibérés afin d'éviter que le jugement du CPH puisse être exécuté et de son refus de reprendre le travail en application des conditions du contrat de travail établi par l'employeur et d'une attitude de déloyauté et de mauvaise foi. Le salarié a alors sollicité judiciairement la nullité de son licenciement. Les juges du fond l'ont débouté de sa demande au motif que jugement du CPH avait prononcé la requalification de la relation de travail, sans précisément en ordonner la poursuite qui ne lui était pas demandée par le salarié.
Au visa de l'article 6 § 1 de la CESDH (
N° Lexbase : L7558AIR), la Cour de cassation censure la décision de la cour d'appel, considérant que celle-ci a violé les termes de l'article susvisé, alors qu'elle avait constaté que l'employeur avait utilisé son pouvoir de licencier afin d'imposer au salarié sa propre solution dans le litige qui les opposait relativement à l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes (sur la protection des droits fondamentaux des salariés, cf. l’Ouvrage "Droit du travail
N° Lexbase : E2757ETB).
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