Le Quotidien du 29 septembre 2023 : Bancaire

[Brèves] Précisions sur le régime applicable à rupture de crédit à durée indéterminée aux entreprises

Réf. : Cass. com., 20 septembre 2023 , n° 22-15.878, F-B N° Lexbase : A24081HN

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[Brèves] Précisions sur le régime applicable à rupture de crédit à durée indéterminée aux entreprises. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/100033453-breves-precisions-sur-le-regime-applicable-a-rupture-de-credit-a-duree-indeterminee-aux-entreprises
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par Jérôme Lasserre Capdeville

le 27 Septembre 2023

► La notification par une banque, en application de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, de la résiliation d'un concours à durée indéterminée à l'expiration d’un délai de préavis ne le transforme pas en concours à durée déterminée.

De longue date, le législateur craint que la rupture de crédit à durée indéterminée accordé à une entreprise n’aggrave la situation de cette dernière. Il est vrai qu’une rupture trop soudaine d’un concours, précédemment octroyé à une entreprise commençant à connaître des difficultés, pourrait entraîner à court terme l’ouverture d’une procédure collective. Face à de tels dangers, le législateur a décidé de préserver les intérêts de l’entreprise par l’intermédiaire d’un encadrement légal spécifique, en l’occurrence l’article 60 de la loi n° 84-46, du 24 janvier 1984, relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit N° Lexbase : L7223AGM (dite loi « bancaire »), devenu l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L2507IX7.

Ainsi, en vertu de ce texte, le banquier souhaitant rompre un crédit à durée indéterminée à une entreprise devra respecter des règles de forme (notification de la rupture, délai de préavis de 60 jours, voire indication des motifs la rupture en cas de demande de l’entreprise). Or, il n’est pas rare que la Cour de cassation (Cass. com., 30 novembre 2022, n° 21-17.703, F-B N° Lexbase : A54848WZ), comme les juges du fond (CA Paris, 5-6, 7 décembre 2022, n° 21/05295 N° Lexbase : A88138Y3 ; CA Versailles, 22 juin 2023, n° 23/00121 N° Lexbase : A953694X), nous donnent des précisions sur cet encadrement juridique. Tel est à nouveau le cas ici.

Faits et procédure. En l’espèce, le 26 juillet 2006, la banque X. avait consenti à la société Y. une ouverture de crédit en compte courant pour une durée de vingt-quatre mois, à l’expiration de laquelle le contrat avait été tacitement reconduit pour une durée indéterminée.

Le 3 mai 2018, la banque avait notifié à la société que son concours serait résilié à l’expiration du délai de soixante jours prévu à l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier. Puis, le 13 juin 2018, la même banque avait envoyé une seconde lettre à la société Y., par laquelle elle l’informait qu’en application de l'article 16 de la convention initiale, elle prononçait la déchéance du terme en raison du dépassement du plafond du découvert autorisé, et exigeait le paiement des sommes dues dans un délai de huit jours.

Arrêt d’appel. Par une décision du 15 mars 2022, la cour d’appel de Montpellier (CA Montpellier, 15 mars 2022, n° 19/05176 N° Lexbase : A61037Q4) avait considéré que la banque n’avait pas respecté les conditions légales de résiliation d'un concours bancaire, puis prononcé la nullité de la résiliation de l’ouverture de crédit et de la déchéance du terme décidée le 13 juin 2018 et, enfin, rejeté son action en paiement dirigée contre la société et les cautions. L’établissement bancaire avait alors formé un pourvoi en cassation.

Moyen. Il prétendait par ce dernier que, dans le cas où (conformément à l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier) le contrat d’ouverture de crédit renouvelé est interrompu et où le préavis de soixante jours est en cours, cette situation a pour effet de métamorphoser, pour la durée du préavis, le contrat à durée indéterminée en contrat à durée déterminée. Dès lors, la clause du contrat d’origine qui prévoit que le bénéficiaire de l'ouverture de crédit devra rembourser, dans les huit jours d’une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au banquier dispensateur du crédit le montant des sommes dont il est alors redevable envers lui lorsque le compte de l'emprunteur enregistre un découvert non autorisé, devrait être pleinement applicable. En conséquence, en décidant le contraire au motif que la banque « ne peut valablement se prévaloir de son courrier du 13 juin 2018 prononçant la déchéance du terme en application » de l'article 16 de la convention d'ouverture de crédit d'origine, « la seule possibilité de dénonciation d'un découvert à durée indéterminée résidant dans la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 313-12 du code », la cour d’appel aurait violé l’article L. 313-12 précité, mais aussi les articles 1214 N° Lexbase : L0924KZA et 1215 N° Lexbase : L0923KZ9 du Code civil.

Décision. Ce moyen ne parvient cependant pas à convaincre la Haute juridiction. Elle énonce que « la notification par une banque, en application de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, de la résiliation d'un concours à durée indéterminée à l’expiration d'un délai de préavis ne le transforme pas en concours à durée déterminée ». Dès lors, le moyen, qui postule le contraire, n’est pas jugé fondé.

Observations. Cette solution est importante pour la pratique. En effet, si l’on suit la lettre de l’article L. 313-12 du Code monétaire et financier, le crédit à durée indéterminée devrait prendre fin le dernier jour du préavis légal (voire à la date de la réception de la notification en cas d’hypothèses dérogeant au délai de préavis) à minuit.

Or, en pratique, les banques ne sont pas aussi rigoureuses. Beaucoup laissent le concours se poursuivre quelques jours, voire quelques semaines… La décision étudiée devrait donc les pousser à mettre un terme à de telles pratiques !

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