Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-17.172, F-P+B (N° Lexbase : A9663KEM)
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Le 13 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 3, 29 mai 2013, n° 12-17.715, FS-P+B (N° Lexbase : A9549KEE)
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Le 06 Juin 2013
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par Jean-Robert Bouyeure, Avocat honoraire à la cour d'appel de Paris
Le 06 Juin 2013
"Deux observations en préalable ; la première est que depuis l'adoption de la loi de 1965, pour les travaux sur les parties communes, relevant d'une majorité qualifiée, les majorités nécessaires ont été abaissées à plusieurs reprises.
Je vous rappelle, par exemple, qu'en matière de travaux d'amélioration, on est d'abord passé des trois-quarts des voix de l'ensemble des copropriétaires aux deux-tiers des voix de l'ensemble des copropriétaires. Et puis, on a admis ultérieurement que les travaux pouvaient en seconde lecture être décidés aux deux-tiers des voix des seuls copropriétaires présents ou représentés. Voilà un premier exemple de cet abaissement de majorité.
Le deuxième exemple concerne les travaux de surélévation, qui, dans la plupart des cas, peuvent maintenant se décider à l'article 25, la cession du droit de surélever plus exactement.
Troisième exemple, tout à fait significatif de cette démarche du législateur, de nombreux travaux qui constituent objectivement des travaux d'amélioration ont été, si j'ose dire, déclassés et il est admis qu'ils peuvent maintenant être décidés soit par l'article 25, soit par l'article 24. Il y a de très nombreux exemples et vous me permettrez pour gagner du temps de ne pas vous les rappeler, vous les connaissez parfaitement.
Force est de constater que le législateur a ainsi entendu non seulement faciliter les décisions en matière de travaux, mais les encourager et même inciter les copropriétaires.
Est-ce que le législateur, dans le cadre de la problématique des travaux d'économies d'énergie et de réduction des gaz à effet de serre qui vont devenir effectivement très importants et particulièrement opportuns, va franchir une nouvelle étape qui va consister à ajouter une nouvelle catégorie de travaux à ceux qui seront rendus obligatoires ? La question est posée et se pose avec beaucoup d'acuité.
Nous ne sommes pas là seulement dans les remarques d'ordre juridique, nous touchons à la politique, au sens large du terme, qu'il s'agisse de la politique en matière d'économie d'énergie ou qu'il s'agisse plus globalement de l'économie générale du pays que l'exécution de travaux très importants ne pourrait bien sûr qu'améliorer.
Ma seconde observation est un corollaire de la première. Il y a une véritable inflation des différentes catégories de travaux. En 1965, il y avait cinq grandes catégories de travaux : les travaux de conservation et d'entretien, les travaux rendus obligatoires, ceux d'amélioration, les travaux de surélévation et de construction de nouvelles parties privatives et les travaux de reconstruction.
Aujourd'hui, si j'ai bien compté, je ne suis pas absolument certain du caractère exhaustif de ce chiffre, il y a 14 catégories de travaux différentes, c'est-à-dire 9 de plus qu'en 1965, travaux d'économie d'énergie, travaux d'accessibilité aux handicapés, travaux de mise aux normes des logements, etc..
Ces travaux du syndicat sont normalement exécutés sur les parties communes, mais il arrive que les travaux, à l'initiative du syndicat, doivent également porter sur les parties privatives, ce qui ne va pas sans poser de nombreux problèmes auxquels je ferai référence à la fin de mon exposé.
Je voudrais dans une première partie étudier un certain nombre de problèmes communs à l'ensemble des travaux du syndicat. Dans une seconde partie j'ai choisi d'étudier spécifiquement trois catégories particulières de travaux en faisant pour chacune d'entre elles quelques observations, ce sont les travaux d'amélioration, les travaux communs impliquant une intervention sur les parties privatives et les travaux d'intérêt collectif sur partie privative.
1. Quelques problèmes communs à l'ensemble des travaux
Tout à fait arbitrairement, quatre thèmes communs à l'ensemble des travaux :
1- La qualification juridique des travaux et les problèmes que pose une telle qualification ;
2- Les décisions de l'assemblée générale en matière de travaux ;
3- Le coût et le financement des travaux ;
4- Une question qui pose souvent des problèmes, qui suscite beaucoup d'irritation, les honoraires du syndic sur les travaux.
1.1. La qualification juridique des travaux
D'une telle qualification dépend un certain nombre de conséquences et la première, la plus importante d'entre elles, étant la majorité applicable. Force est de constater que parfois on peut hésiter, à juste titre, entre des qualifications juridiques différentes. Est-ce que tels travaux sont des travaux de conservation d'entretien relevant de l'article 24 (N° Lexbase : L4824AH7) ? Est-ce que ce sont des travaux d'amélioration relevant de l'article 26 (N° Lexbase : L4826AH9) ?
Il arrive aussi que des travaux relèvent tout à la fois des deux catégories, or bien évidemment c'est une seule et même majorité qui devra s'appliquer lors de la prise de décision de l'assemblée.
A propos de ce problème de qualification, deux questions : qui fixe cette qualification et donc qui fixe la majorité applicable ? Selon quels critères ? C'est le bon sens en ce qui concerne la majorité applicable c'est la loi.
Oui mais que se passe-t-il si on a un doute quant à l'interprétation de la loi ? Je dirais très prudemment -j'ai été avocat pendant des décennies- qu'en aval c'est le tribunal qui dira in fine quelle était la qualification juridique et donc la majorité applicable.
Oui, mais que se passe-t-il en amont lorsque la décision de l'assemblée est prise ? C'est à l'assemblée de choisir la majorité à laquelle elle va décider d'exécuter des travaux et je dirais qu'elle le fait sous sa responsabilité.
Oui mais voilà, il y a en pratique une façon de procéder qui est génératrice, qui doit être génératrice de difficultés, c'est qu'en général la majorité applicable aux travaux soumis à l'assemblé est indiquée dans l'ordre du jour, elle est indiquée dans la convocation.
Première constatation, c'est une pratique qui n'est pas obligatoire. Il y a quelques décisions de jurisprudence de juridictions du fond qui disent qu'elle n'est ni obligatoire, ni nécessaire, mais elle est extrêmement fréquente.
Que se passe- t-il s'il y a un hiatus, si une erreur est commise à un stade quelconque de la prise de décision ? Je vous présenterai deux propositions : je dirais que la décision prise par l'assemblée est régulière si elle est conforme à la majorité prévue par la loi, même si ce n'est pas celle prévue dans la convocation, mais au moment même où je formule cette proposition je me demande si elle et toujours exacte, car ne faut-il pas réserver la possibilité pour les défaillants, en ce cas, de soutenir qu'ils ont été trompés par la mention d'une majorité erronée dans la convocation ? Je pose la question, je n'ai pas une réponse absolument certaine.
La décision prise conformément à la majorité légale sera parfaitement irrégulière même si elle est conforme à la majorité indiquée dans la convocation, dès lors que cette majorité n'est pas la bonne sur le plan de l'application de la loi.
Deuxième question, quel est le critère de la distinction ? Lorsque vous avez des travaux qui relèvent, qui pourraient relever de qualifications juridiques différentes, quel critère faut-il retenir ? J'en vois deux personnellement.
- Le premier, je pourrais le qualifier, de façon un peu imprudente, de critère de prévalence de la majorité la plus faible.
Il me semble que si les travaux, en application de la loi, relèvent de la majorité ordinaire, et aussi d'une majorité plus forte, qu'ils peuvent être pris valablement à la majorité ordinaire, article 24.
Je prends un exemple, ce sont les travaux de ravalement. Lorsque les travaux de ravalement sont nécessaires pour la bonne conservation d'un immeuble, ils peuvent se référer à l'article 24 ; oui mais les travaux de ravalement en question peuvent avoir fait l'objet d'une injonction administrative et par conséquent relever aussi des travaux rendus obligatoires de l'article 25 (N° Lexbase : L4825AH8). Il me semble dans ce cas, il y a un arrêt ancien de la Cour de cassation qui l'a jugé, que c'est la qualification la plus faible qui doit être retenue, des travaux de ravalement nécessaires pour le bon entretien de l'immeuble sont votés à l'article 24, même si par ailleurs ils sont rendus obligatoires.
- Le second critère est celui classique de la distinction entre l'accessoire et le principal.
Il faut rechercher quel est l'élément principal. Vous savez à ce sujet qu'il y a une jurisprudence selon laquelle lorsqu'on refait, parce que c'est nécessaire, en raison de sa vétusté, un élément d'équipement, même si les travaux de réfection ou de remplacement apportent une amélioration significative, les travaux relèvent de l'article 24, dès lors que la réfection est nécessaire pour une bonne conservation et un bon entretien de l'immeuble. Cela a été jugé notamment pour le remplacement de l'ascenseur.
2.2. Les décisions de l'assemblée générale
Je pose tout d'abord l'affirmation globale selon laquelle tous les travaux dans la copropriété doivent faire l'objet d'une décision d'assemblée générale, tous, sauf une catégorie ou plus exactement ou sous-catégorie, ce sont les travaux de maintenance et de menues réparations, qui rentrent dans le cadre du budget prévisionnel et que le syndic peut exécuter sans décision spécifique de l'assemblée générale.
Ces travaux sont définis à l'article 45 du décret. Je n'ai pas la certitude absolue que la délibération donnée à l'article 45 soit de nature à éliminer toute discussion possible éventuelle.
S'agissant des décisions d'assemblée, la première démarche à faire me semble-t-il est de rechercher quelle est l'assemblée compétente. La réponse est normale, c'est que l'assemblée compétente est l'assemblée générale de l'ensemble de la copropriété, mais parfois, la décision relève d'une assemblée spéciale ou relève d'un vote spécialisé en assemblée générale.
Il y a le cas d'un syndicat secondaire, évidemment pas de difficulté, mais il y a aussi le cas où les travaux n'affectent que les parties communes spéciales qualifiées comme telles par le règlement de copropriété. En ce cas, même si l'existence d'assemblée spéciale n'est pas prévue au règlement de copropriété, dès lors que la décision à prendre relève de parties communes spéciales, seule l'assemblée composée des copropriétaires ayant des droits indivis dans la partie commune spéciale en question pourra prendre la décision.
Enfin il y a un vote spécialisé dans le cadre de ce qui est prévu à l'article 24 de la loi, le cas où le règlement de copropriété prévoit une répartition spéciale des charges pour certains travaux d'entretien, et prévoit de ce fait et en même temps, un vote spécialisé pour les dépenses correspondantes.
C'est une disposition contractuelle qui, à condition que les deux choses soient prévues, répartition des charges et vote spécialisé, doit être respectée, mais attention nous savons à la lumière de la jurisprudence de la Cour de cassation que la spécialisation des votes n'est possible que pour des travaux éligibles à l'article 24 et non pas pour les travaux relevant d'une majorité supérieure.
Deuxième remarque, s'agissant des assemblées, les assemblées successives : il arrive fréquemment que la décision en matière de travaux soit prise par des assemblées successives, car il est très difficile au cours d'une seule et même assemblée de prendre la décision de principe et d'arrêter les modalités, donc plusieurs assemblées successives se tiennent à propos des mêmes travaux.
La jurisprudence de la Cour de cassation est formelle : si une majorité qualifiée est nécessaire pour travaux en question, cette majorité devra être obtenue lors des différentes assemblées successives et non pas seulement lors de la première d'entre elles.
Troisième observation concernant les assemblées générales, c'est la délégation au conseil syndical. Je disais, il y a un instant, qu'il est souvent difficile en assemblée de prendre une décision totale concernant des travaux et il est extrêmement pratique de déléguer au conseil syndical le choix de l'entreprise, le choix de certaines modalités d'exécution. Attention, c'est une source permanente de difficultés et d'irrégularités pour deux raisons.
La délégation au conseil syndical doit être expressément portée à l'ordre du jour. Or force et de constater que c'est souvent une initiative qui est prise en cours d'assemblée, si ce n'est pas prévu à l'ordre du jour l'irrégularité est certaine. Et puis attention, la délégation au conseil syndical n'est possible que pour des décisions relevant de l'article 24, elle ne l'est pas pour les décisions relevant d'une majorité qualifiée.
Quatrième observation concernant les assemblées générales c'est le caractère immédiatement exécutoire des décisions de l'assemblée. Ce caractère immédiatement exécutoire dont on sait à la lumière d'un arrêt de la Cour de cassation qu'il doit s'entendre à la minute même où la décision est prise, ce caractère immédiatement exécutoire s'applique parfaitement en matière de travaux.
Toutefois, pour les travaux relevant des articles 25 et 26, la loi donne un caractère suspensif au délai de l'article 42 ; donc pour ces travaux et sauf pour urgence, le délai de l'article 42 est suspensif d'exécution, mais ce qui est assez curieux c'est que dès que ce délai est terminé, l'exécution peut être entreprise même s'il y a un recours en annulation.
1.3. Le coût et le financement des travaux
Je me limiterai aux observations suivantes.
- La première et peut-être la plus importante d'entre elles est que le montant des travaux, qui doit être fixé par l'assemblée, doit être respecté.
Il y a des syndics de copropriété dans cette salle et j'attire leur attention sur la responsabilité qui est susceptible de peser sur eux si, faisant exécuter des travaux décidés par l'assemblée, ils acceptent ou laissent s'effectuer un dépassement du montant des travaux.
Monsieur le Président Terrier vous a parlé ce matin d'un arrêt portant sur un dépassement qui était de l'ordre de 7 000 euros, mais moi j'ai vu personnellement et je me réfère à un arrêt rendu il n'y a pas très longtemps par la chambre que préside M. Jacomet, où le dépassement était de 700 000 euros !
En l'absence de ratification de ce dépassement par l'assemblée générale, cette somme a été laissée à la charge du syndic ! Attention !
Ne venons pas rechercher si les travaux en dépassement non approuvé ont été profitables ou non au syndicat, ce n'est pas la question posée. Il n'y a pas en la matière application de la notion d'enrichissement sans cause. Pas du tout. Il s'agit de l'application des règles de la copropriété et des règles du mandat.
Si le syndic a laissé s'exécuter des travaux pour un montant en dépassement de celui voté par l'assemblée, sa responsabilité peut être recherchée et la conséquence est que le montant de ce dépassement pourra être mis à sa charge.
- Deuxième point, l'exigibilité des appels de fonds : je rappelle simplement que cette exigibilité est une notion extrêmement importante en cas de mutation pour savoir qui du vendeur ou de l'acquéreur est tenu de participer au montant des travaux.
- Troisième point, les emprunts du syndicat : la pratique, depuis un certain nombre d'années, a créé deux sortes d'emprunt, premièrement les emprunts individuels groupés qui sont parfois gérés par le syndic pour lequel il intervient et des emprunts collectifs du syndicat, étant précisé qu'en pratique il y a souvent une confusion entre les deux catégories.
Nous avons aujourd'hui un texte du 22 mars 2012 (loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, art. 103 N° Lexbase : L5099ISN), qui est venu consacrer et règlementer l'emprunt au titre du syndicat, cet emprunt pouvant suivant les circonstances -c'est évidemment essentiel- être limité aux seuls copropriétaires qui en font la demande.
Malheureusement ce texte extrêmement important et intéressant ne deviendra applicable que lorsque le décret d'application sera promulgué [ndlr : le décret a été publié depuis au Journal officiel du 13 mars 2013, décret n° 2013-205 du 11 mars 2013, relatif à l'emprunt collectif de copropriété N° Lexbase : L3465IWA].
1.4. Les honoraires du syndic
J'en viens au quatrième point commun à l'ensemble des travaux, les honoraires du syndic, qui sont sources d'irritations et de difficultés.
Premièrement, les travaux d'entretien courant compris dans le budget traditionnel ne peuvent donner lieu à honoraires spécifiques du syndic.
Deuxièmement, les travaux hors budget peuvent faire l'objet d'un honoraire spécifique, mais cet honoraire doit faire l'objet d'une décision expresse de l'assemblée et cela depuis la loi "Boutin" du 25 mars 2009 (loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion N° Lexbase : L0743IDU).
Il en résulte que les mentions figurant dans le contrat du syndic prévoyant la rémunération du syndic en cas de travaux sont dépourvues de toute valeur juridique puisque c'est l'assemblée, et elle-seule, qui doit se prononcer.
Mais la question s'est posée de savoir si ces mentions du contrat de syndic n'étaient pas valables, en tout cas opportunes pour l'information préalable des copropriétaires.
La commission des clauses abusives s'est penchée sur la question et, dans une recommandation n° 2011-01, a rendu à cet égard un avis particulièrement dépourvu d'artifice et particulièrement net.
Considérant, dit la commission, "qu'un nombre très important de contrats indiquent, dans le cas de travaux autres que ceux d'entretien et de maintenance, que la rémunération du syndic sera constituée par un montant minimum ou un pourcentage du montant des travaux, alors que la loi prévoit en ce cas que les honoraires du syndic sont votés lors de l'assemblée générale ; que ces clauses laissent croire que dans ce cas la rémunération du syndic peut être fixée par avance dans le contrat au lieu d'être votée en assemblée générale ; que ces clauses ont illicites au regard du texte susvisé et, maintenues dans un contrat, abusives".
La profession de syndic est assez bien organisée, pour la majorité d'entre eux, et ayant pris connaissance de cette recommandation, a modifié en pratique le contrat type de syndic. Je crois qu'on maintient toujours une prévision de rémunération, mais il est indiqué expressément dans les contrats que c'est simplement indicatif et que la décision appartient à l'assemblée générale. Voilà ces quelques thèmes communs à l'ensemble des travaux.
2. Quelques observations concernant trois catégories de travaux
Voici quelques observations concernant trois catégories d'entre eux et tout d'abord les travaux d'amélioration.
2.1. Les travaux d'amélioration
Les travaux d'amélioration au sens strict sont ceux qui relèvent de la double majorité de l'article 26 et, bien évidemment, compte tenu de ce que je vous ai dit tout à l'heure, leur domaine s'est réduit comme peau de chagrin puisqu'on a sorti de cette catégorie un certain nombre de travaux pour les soumettre à l'article 24 ou l'article 25.
Ces travaux d'amélioration de l'article 26, c'est la raison pour laquelle j'ai souhaité vous en dire quelques mots, présentent des particularités spécifiques qui sont parfois mal appréhendées, mais attention ces particularités ne s'appliquent qu'à ce qui reste du domaine des travaux relevant de l'article 26, les travaux d'amélioration qui en sont sortis ne sont plus soumis à ces particularités auxquelles je vais maintenant me référer.
Première particularité, le montant des travaux d'amélioration ne se répartit pas comme l'ensemble des charges, mais en fonction des avantages qui en résulteront pour chacun des copropriétaires.
Il s'agit donc, vous le savez d'une répartition qui s'apprécie in concreto et non in abstracto, donc en matière de répartition des charges entraînées par les éléments d'équipement.
C'est assez curieux que 48 ans après que ce texte de l'article 30 (N° Lexbase : L4837AHM) auquel je viens de faire référence ait été promulgué, il soit encore aussi mal connu et aussi mal appliqué en pratique. Pourquoi ? Parce qu'on voit les assemblées générales saisies de la question "vote des travaux d'amélioration".
On est très content de voter des travaux d'amélioration, mais on ne vote pas la répartition en fonction de critères prévus à l'article 30. Il en résulte que la décision d'effectuer des travaux peut être annulée puisqu'on n'a pas prévu la répartition.
Mais il en résulte surtout et aussi, même si personne ne demande l'annulation, que la décision d'effectuer les travaux d'amélioration est un coup d'épée dans l'eau car le syndic ne peut pas demander aux copropriétaires de ne pas lancer les appels de fonds correspondants, car il n'y a pas de répartition qui leur soit applicable.
Je voulais donc attirer votre attention sur ce point.
Deuxième particularité des travaux d'amélioration, c'est la participation différée.
Vous savez que les copropriétaires qui n'ont pas donné leur accord aux travaux, peuvent demander à payer sur dix ans. Très bien, ce sont des dispositions également très incitatives, mais on se posait la question de savoir pendant quel délai les copropriétaires n'ayant pas donné leur accord aux travaux pouvaient exciper d'elle telle possibilité.
La réponse est donnée par la loi du 22 mars 2012. Force est de constater une nouvelle fois que la ligne Maginot juridique qu'on veut édifier ne va pas jusqu'à la mer.
Que dit cette loi ? Elle dit que les copropriétaires qui veulent bénéficier de la participation différée doivent faire connaître cette demande au syndic dans les deux mois de la notification du procès-verbal. Seulement il y a un problème, c'est que le PV n'est pas notifié à ceux qui se sont abstenus. Or ceux qui se sont abstenus ont le droit de demander la participation différée, ils ne seront eux soumis à aucun délai.
Troisième spécificité des travaux d'amélioration : si les travaux sont somptuaires et qualifiés comme tels par un tribunal éventuellement saisi, ces travaux sont inopposables aux copropriétaires qui ont exercé un recours sur ce fondement.
Je vous précise -c'est la raison pour laquelle j'en parle- que selon un arrêt de la Cour de cassation, en la matière -et c'est une exception au principe général- le recours est suspensif.
Un copropriétaire qui exerce un recours pour faire juger que les travaux sont somptuaires n'est pas tenu d'en acquitter le montant.
2.2. Les travaux communs nécessitant un accès aux parties privatives
Deuxième catégorie de travaux sur lesquels je voulais attirer votre attention, les travaux communs nécessitant un accès aux parties privatives.
Il y a un texte, qui est l'article 9 de la loi (N° Lexbase : L4861AHI), qui prévoit que si les circonstances l'exigent et à condition que la jouissance des parties privatives ne soit pas altérée, etc., le syndicat peut obtenir la possibilité d'exécuter des travaux communs à l'intérieur des parties privatives.
Vous savez que le texte de l'article 9 ne prévoit cette possibilité que pour les travaux relevant des articles 25 et 26. Tout le monde est d'accord pour considérer que même pour des travaux relevant des articles 24, il est possible lorsque les circonstances l'exigent d'obtenir l'accès aux parties privatives. Nous sommes ici dans le cadre des pouvoirs habituels du juge des référés.
Il y a en la matière une difficulté et c'est sur cette difficulté que je souhaiterais attirer votre attention. Quid de la prise en charge du coût de la dépose et de la repose des aménagements privatifs concernés par les travaux communs ?
Il arrive en effet fréquemment que pour exécuter des travaux communs, pour accéder aux parties communes, il faille déposer des aménagements privatifs pour ensuite les reposer. Qui a la charge du coût de cette dépose et de cette repose ?
Il faut distinguer entre des aménagements intérieurs et des aménagements en terrasse.
Aménagements intérieurs : le fait générateur de la dépose et de la repose des aménagements c'est l'exécution de travaux communs, donc dette dépose et cette repose ne constituant que l'accessoire aux travaux communs, le coût financier doit être compris dans l'enveloppe commune, dans l'enveloppe collective des travaux, mais selon la jurisprudence de la Cour de cassation -et je vise notamment un arrêt du 17 juin 2009 (Cass. civ. 3, 17 juin 2009, n° 08-16.144, FS-D N° Lexbase : A3044EIL)- le coût de ces travaux doit rester à la charge du copropriétaire concerné, si les travaux privatifs, si les aménagement privatifs ont été exécutés en violation du règlement de copropriété ou en violation des statuts de la copropriété. C'est une décision de bon sens qu'on ne peut qu'approuver.
Aménagements en terrasse : la jurisprudence fait la distinction suivante. La dépose et la repose des aménagements en terrasse sont à la charge du syndicat si ces aménagements sont prévus au règlement de copropriété. Dans le cas contraire, ils sont à la charge du copropriétaire bénéficiant du droit à la jouissance exclusive de la terrasse.
S'agissant de la dépose et de la repose du revêtement superficiel de la terrasse, du carrelage en cas de réfection de l'étanchéité, un arrêt de la Cour de cassation du 29 décembre 2006 décide qu'il incombe aux copropriétaires concernés.
2.3. Les travaux d'intérêt collectif sur parties privatives
Je terminerai par les travaux d'intérêt collectif sur parties privatives. Il peut être de l'intérêt du syndicat d'effectuer des travaux sur les parties privatives et j'envisage cet intérêt dans les deux cas principaux qui se présentent.
Il convient parfois d'effectuer des travaux sur parties privatives pour la sauvegarde de l'harmonie de la façade et de l'aspect esthétique de l'immeuble et ce pour éviter un effet d'hétérogénéité fâcheux donc le côté esthétique.
Deuxième hypothèse, c'est la réalisation de travaux d'économie d'énergie ou de réduction de gaz à effet de serre, ces travaux impliquant fréquemment que les parties privatives soient affectées.
Or, dès lors qu'il s'agit des parties privatives, le syndicat ne peut pas valablement décider d'effectuer les travaux. En présence de cette difficulté, le législateur l'a prévu, mais malheureusement, on peut le regretter, il ne l'a fait que pour les travaux d'économie d'énergie et de réduction des gaz à effet de serre tels que prévus par la loi "Grenelle II" (loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, portant engagement national pour l'environnement N° Lexbase : L7066IMN).
Cette loi a inséré dans l'article 25 g de la loi de 1965 qui donne à l'assemblée générale la possibilité, aux conditions de l'article 25, de se pencher sur l'exécution de tels travaux.
Cette loi donne à l'assemblée la possibilité d'intervenir et je cite le texte : "ces travaux peuvent comprendre des travaux d'intérêt collectif réalisés sur parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné".
Donc travaux d'intérêt collectif, c'est une nouvelle évolution, sur partie privative exécutés sur décision du syndicat, et la loi dit : "pour la réalisation des travaux d'intérêt collectif réalisés sur les parties privatives, le syndicat exerce les pouvoirs du maître d'ouvrage jusqu'à la réception des travaux".
Cela paraissait assez clair, mais est intervenu le décret d'application du 3 décembre 2012 (décret n° 2012-1342 du 3 décembre 2012 N° Lexbase : L5590IUL). Que dit ce décret ? Je cite : "dès lors que de tels travaux sont votés, les copropriétaires concernés sont tenus de les réaliser dans un délai raisonnable".
Voyons, la loi dit que le syndicat est maître d'ouvrage. On peut donc en déduire que c'est lui qui doit exécuter ces travaux. Le texte du décret dit "les copropriétaires concernés doivent exécuter dans un délai raisonnable".
Quand il y a une difficulté, il faut toujours s'adresser aux plus hautes autorités pour tenter de la résoudre et Monsieur le conseiller Capoulade dont je salue la présence dans ces lieux a bien voulu sur cette question préparer un commentaire de ce décret dont je ne dévoile aucun secret en disant qu'il sera publié dans un prochain numéro de la revue "Administrer" et que dit Monsieur Capoulade sur cette question ?
Je cite "cette disposition pourrait [c'est très prudent] paraître en contradiction avec l'alinéa qui charge le syndicat de la maîtrise d'ouvrage", ce qui est logique s'agissant de travaux communs. "Sans doute [dit M. Capoulade], faut-il entendre l'expression les copropriétaires concernés' comme correspondant à la collectivité des copropriétaires, c'est-à-dire le syndicat". Je ferme la citation.
Voilà un avis qui me paraît extrêmement intéressant, que je livre, avec l'autorité qui s'attache à celui qui en est l'auteur.
Je poursuis, car nous n'en avons pas terminé avec ce décret du 3 décembre. Le syndicat des copropriétaires procède à la réception des travaux en présence des copropriétaires concernés.
En cas de réserve, le syndic de copropriété assure le suivi et la réception des travaux destinés à permettre la levée des réserves.
J'ouvre aussi une parenthèse, je me permets de vous indiquer que lorsqu'il y a une quarantaine d'années, dans les années 1970, je me produisais devant la 6ème ou 7ème chambre du tribunal, ou devant la 19ème chambre de la cour, pour plaider dans une affaire de construction, je m'attachais vraiment, avec beaucoup d'humilité, à bien respecter la distinction entre la réception provisoire des travaux et la réception définitive. C'était quelque chose d'extrêmement important. Heureusement, cette distinction a été supprimée par la loi de janvier 1978. On ne parle plus de réception provisoire ni de réception définitive. Je referme la parenthèse et je poursuis mon décret du 3 décembre.
"Après réception définitive des travaux, le syndic de copropriété adresse aux copropriétaires concernés les pièces et documents concernant le dossier".
En conclusion, je dirai que la question principale, me semble-t-il aujourd'hui, pour les années à venir, et s'agissant des travaux en copropriété sera celui du financement. On vous en a parlé. C'est un problème infiniment fondamental, car le montant des sommes représenté par les travaux qui seront nécessaires en matière d'économie d'énergie sera considérable. Il faudra bien trouver des solutions.
Mais les instruments juridiques vont eux-mêmes changer. On annonce d'ailleurs d'ores et déjà une modification de la loi du 10 juillet 1965 par une loi cadre à intervenir.
En matière de travaux dans la copropriété il y a donc de beaux jours à prévoir pour les juristes".
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par Franck Terrier, Président de la troisième chambre civile de la Cour de cassation
Le 06 Juin 2013
"M. Jacomet m'a demandé d'évoquer quelques décisions récentes de la troisième chambre civile. Je vais me conformer scrupuleusement à cette directive du Président Jacomet, ce qui veut dire que vous ne devez pas attendre de moi un exposé de l'état du droit applicable en matière de travaux réalisés dans la copropriété avec les principes et doctrines articulés dans un ordre logique d'où découlent des sous-principes, d'où découlent des règles de conduite.
Je vais mettre l'accent sur certaines problématiques qui ont été soumises à la Cour de cassation au cours des derniers mois. J'espère ces problématiques illustratives, je crains d'être horriblement technique et je vous prie de m'en excuser, mais la matière me semble-t-il le veut inéluctablement.
D'abord un mot sur le contentieux, parce qu'on a la chance d'avoir une étude récente, relativement récente du Ministère de la Justice sur le contentieux de la copropriété. Elle est d'octobre 2010, vous la connaissez sans doute.
Elle porte sur la période 1990/2009 et elle traduit, elle révèle le fait que les deux tiers de ce contentieux se rapportent à des charges impayées, c'est-à-dire qu'un tiers seulement au mieux de ce contentieux évoque des problématiques liées au fonctionnement des institutions de la copropriété, les deux tiers sont des actions en recouvrement de charge.
On apprend aussi que la moitié de ce contentieux est en Ile de France-Paris, un quart en Région PACA, le reste dispersé et que, d'une année sur l'autre, les variables, tendanciellement, sont relativement stables.
J'ai noté par exemple que dans l'annuaire statistique de la justice civile pour 2012, ce sont les données 2010, nous avons en premier ressort 31 358 affaires nouvelles et en appel 26 050 affaires nouvelles, mais j'insiste sur le chiffre de 23 802, qui sont les affaires soumises aux tribunaux d'instance ou aux Juges de proximité, c'est-à-dire les affaires de recouvrement de charges pour l'essentiel. C'est donc l'aspect massif de ce contentieux.
Pour ce qui concerne la troisième chambre civile de la Cour de cassation, nous rendons entre 100 et 130 arrêts par an, entre 5 et 7 % du contentieux de la troisième chambre civile ; une vingtaine d'arrêts sont publiés chaque année.
Je vais commencer par évoquer un arrêt qui peut paraître surprenant à première vue, mais qui traduit bien le rôle et la conception que le législateur a de certaines institutions de la copropriété.
C'est un arrêt du 11 janvier 2012 (Cass. civ. 3, 11 janvier 2012, n° 10-24.413, FS-P+B N° Lexbase : A5279IAR) qui, je le dis très vite, mais je vais revenir dessus, fait valoir le principe selon lequel, dans toute copropriété, il existe nécessairement de droit un syndicat, même si formellement ce syndicat n'a pas été créé et les copropriétaires, les propriétaires ne peuvent se substituer à ce syndicat même s'il est virtuel.
Dans cette affaire, il s'agissait d'une toute petite copropriété, deux maisons, un terrain partie commune et pour éviter un effondrement ou je ne sais quel dommage, l'un des propriétaires avait réalisé des travaux ; et se conformant au simple bon sens il a cru pouvoir demander à l'autre propriétaire sa participation à ces travaux.
L'autre propriétaire, mieux avisé, a élevé devant le juge une fin de non-recevoir, prise de ce que la demande en paiement de travaux portant sur les parties communes ne pouvait pas être dirigée contre lui, mais contre le syndicat qui n'existait pas.
Cette défense n'a pas eu de succès devant les juges du fond, qui ont répondu que le syndicat n'existant pas, la demande pouvait être effectivement valablement dirigée contre l'autre propriétaire, donc la fin de non-recevoir devait être écartée.
Nous avons cassé cet arrêt de la cour d'appel en faisant valoir que se déduit de l'article 14 de la loi de 1965, qui définit le rôle du syndicat, qu'un syndicat existe nécessairement, même s'il n'a pas été créé dès lors qu'il existe un état descriptif de division par lots et des parties communes.
Dès lors que cette situation-là est constatée, un syndicat existe nécessairement et seul ce syndicat pouvait faire l'objet d'une action en paiement de la part d'un propriétaire qui avait réalisé les travaux sur les parties communes.
Nous avons donc édicté la règle, c'est un arrêt publié, que le syndicat devait être l'objet de l'action de ce propriétaire et les fins de non-recevoir en fait étaient bien établies.
Evidemment, le fait qu'il s'agisse d'une toute petite copropriété, deux copropriétaires qui n'ont pas trouvé nécessaire de constituer formellement le syndicat pouvait avoir une influence sur la solution du litige ; je comprends parfaitement les Juges du fond d'avoir statué de cette manière-là, mais nous avons pensé que la solution de principe ne pouvait pas dépendre de considérations de cette nature.
Donc le syndicat au commencement de la copropriété est le syndicat et toujours le syndicat, même virtuellement, même s'il n'existe pas en réalité.
J'évoquerai un deuxième arrêt qui portait sur le syndic, l'organe comme vous le savez exécutif de la copropriété qui est chargé par la loi d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde, à son entretien et, en cas d'urgence, de faire procéder de sa propre initiative aux travaux nécessaires à la sauvegarde de cet immeuble.
Un arrêt du 7 février 2012 (Cass. civ. 3, 7 février 2012, n° 11-11.051, F-D N° Lexbase : A3656ICE) est revenu sur la question de la responsabilité du syndic à l'égard des propriétaires de l'immeuble. Ce n'est pas une décision publiée, mais seulement diffusée, mais qui traduit bien, me semble-t-il, certains équilibres de pouvoir qui doivent s'établir au sein d'une copropriété.
En l'espèce, l'assemblée générale de la copropriété avait voté des travaux de réfection d'ascenseur, peu importe, pour un certain montant. Je vous indique le montant pour que vous puissiez bien voir les données du problème, les travaux votés étaient d'un montant de 23 100 euros.
Le syndic réalise ces travaux pour un montant de 33 570 euros. L'un des copropriétaires, tout à fait fâché de devoir débourser plus qu'il n'avait envisagé, attaque en responsabilité civile -l'article 1382- le syndic pour faute, pour n'avoir pas conduit les travaux dans les limites qui étaient assignées par le syndicat.
C'est une action qui a été portée devant le juge de proximité et le juge de proximité a débouté ce copropriétaire en retenant que le montant total des travaux engagés par le syndic devait être acquitté par l'ensemble des copropriétaires et qu'un seul copropriétaire agissant seul ne pouvait exiger, à titre personnel, la différence entre le montant voté et le montant des travaux effectivement réalisés.
Le pourvoi contre cette décision du juge de proximité se fondait sur l'article 18 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4813AHQ), donc le rôle du syndic et l'article 1382.
Nous avons cassé cette décision, en retenant que le juge du fond devait examiner tous les éléments de la faute et non pas rejeter, par une considération de principe, le fait lui-même dommageable, le lien de dommage et le lien de causalité entre la faute et ce dommage.
C'est une application d'une doctrine qui est relativement maintenant ancienne et en tout cas bien établie selon laquelle un copropriétaire peut toujours rechercher la responsabilité du syndic pour faute dès lors que les éléments de cette faute sont caractérisés.
Un autre problème que l'on rencontre très souvent c'est un problème surgi dans une copropriété à la suite de travaux en particulier, lorsque ces travaux ont provoqué des désordres, qu'une action judiciaire s'impose ; c'est la question de l'habilitation du syndic pour agir en justice.
Je me réfère à un arrêt du 9 mai 2012 (Cass. civ. 3, 9 mai 2012, n° 11-10.293, FS-P+B N° Lexbase : A1278ILW) dont la doctrine a pensé, à juste titre à mon avis, qu'il visait à assouplir les prescriptions un peu formalistes qui existaient en doctrine. Je précise seulement que ce mouvement d'assouplissement est déjà relativement ancien, remonte à plusieurs années, nous ne l'avons pas initié, mais seulement confirmé.
Dans cette affaire, c'est tout à fait simple, la copropriété avait réalisé des travaux de réfection de la façade de l'immeuble, des désordres ont été constatés et l'assemblée générale avait habilité le syndic à agir en justice.
La cour d'appel avait déclaré irrecevable cette action compte tenu de l'imprécision qui entachait, selon les juges, l'habilitation par l'assemblée générale.
Le texte applicable c'est l'article 55 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5562IG4) "le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale" et toute la question est de savoir quel degré de précision doit revêtir cette habilitation par l'assemblée générale, étant entendu que l'article 55 du décret de 1967 est d'ordre public, que son objet est de protéger le syndicat et la jurisprudence veille, d'une part, à protéger effectivement les intérêts du syndicat des copropriétaires, mais, d'autre part, n'élève pas à une action judiciaire des obstacles trop formalistes.
Et, dans un certain nombre de décisions de ces dernières années, la jurisprudence a été assouplie, par exemple, il n'est plus exigé que l'identité des personnes qui font l'objet de la procédure soit spécifiée dans la décision de l'assemblée générale de la copropriété. Il suffit que les entrepreneurs dont la responsabilité est recherchée soient suffisamment identifiables, de même pour les assureurs.
L'objet de la demande doit être clairement spécifié, mais pas nécessairement très détaillé et dans une décision, dès 1994, la Cour de cassation a jugé qu'une autorisation donnée pour engager une procédure va aussi pour poursuivre l'action en délivrant de nouvelles assignations, par exemple à l'encontre d'autres participants, à l'acte de construire.
Dans l'affaire qui nous était soumise, ce qui posait problème, alors que les entreprises visées étaient désignées, selon le juge du fond, c'est qu'habilitation était donnée au syndic pour poursuivre les malfaçons sévissant sur la façade.
A une certaine époque, nous aurions effectivement considéré que cette mention était insuffisamment précise. Aujourd'hui nous pensons, et en tous cas cet arrêt du 9 mai 2012 l'établit, que c'est d'une précision suffisante, d'autant que, et j'insiste peut être là-dessus, était précisée l'identité des entreprises visées par l'action.
Néanmoins si on reprend cette jurisprudence sur les années, telle qu'elle a été énoncée et qu'elle aboutit à cet arrêt de mai 2012, il y a effectivement un assouplissement des conditions formalistes mises à l'habilitation du syndic pour agir en justice.
Maintenant, j'en viens à une question qui tient à la gouvernance de la copropriété, à la décision que doit prendre l'assemblée générale de réaliser des travaux. C'est un arrêt qui a été, je crois, beaucoup commenté.
C'est un autre arrêt du 9 mai 2012 (Cass. civ. 3, 9 mai 2012, n° 11-16.226, FS-P+B N° Lexbase : A1425ILD) qui se rapporte à une décision d'une copropriété de transformer un système collectif d'alimentation en eau chaude en système individuel.
Vous savez que la loi nous conduit à distinguer certains types de travaux compte tenu de leurs caractéristiques et définit les conditions de majorité pour prendre ces décisions.
Les travaux conservatoires relèvent de la majorité simple des voix exprimées ; les travaux qui sont rendus obligatoires par une prescription d'hygiène ou de sécurité relèvent de la majorité des voix de tous les copropriétaires, majorité renforcée de premier degré, si je puis dire ; des décisions qui sont relatives à des travaux portant transformation, addition, amélioration, relèvent de la majorité renforcée, c'est-à-dire des deux tiers des voix des membres du syndicat.
En aucune sorte de majorité, seulement l'unanimité permet de prendre une décision affectant les parties privatives ou les modalités de jouissance de ces parties privatives.
C'était bien le problème qui se posait dans cette affaire-là, puisque la suppression du système collectif d'alimentation d'eau chaude conduisait inévitablement à installer, dans chaque appartement et donc affectait chaque lot privatif, un système de cumulus, d'alimentation individuelle en eau chaude.
Dans cette affaire, la question était de savoir si on était donc en présence de travaux d'amélioration, relevant de la majorité qualifiée ou super qualifiée de l'article 26. C'était effectivement le vote qui avait eu lieu de copropriété, un vote à la majorité qualifiée de l'article 26 ou si on était en présence de travaux affectant les parties privatives donc relevant de l'unanimité.
Certains copropriétaires mécontents avaient assigné le syndicat faisant valoir que seule l'unanimité du syndicat des copropriétaires permettait de réaliser des travaux de cette nature, compte tenu de ce qu'ils impactaient les parties privatives.
Là encore, une jurisprudence sur la notion d'amélioration, une jurisprudence relativement ancienne, elle a peut-être une vingtaine d'années, a conduit à des assouplissements progressifs, compte tenu de l'intérêt des travaux.
On est là en prise avec les impératifs majeurs, qui s'imposent aux copropriétés d'édicter des normes de consommation plus avantageuses, de protection contre le froid, etc.
Dans cette affaire, la cour d'appel a considéré dans un arrêt extrêmement motivé, en relevant techniquement et de manière très détaillée tous les avantages qui s'attachaient à la décision prise, que ces travaux étaient une amélioration relevant de la majorité de l'article 26 et que l'impact sur les parties privatives était suffisamment réduit pour que cela n'empêche pas cette majorité de l'article 26 de se prononcer en faveur de ces travaux.
On est vraiment à la limite puisqu'il y a bien un impact sur les parties privatives, mais la cour d'appel avait considéré que la suppression d'un service collectif pouvait être qualifiée d'amélioration, compte tenu de la vétusté de l'installation, compte tenu de la rationalité économique qui conduisait à abandonner ce système en faveur d'un système individuel et on était bien, à mon sens, dans la ligne de la jurisprudence qui émerge depuis une vingtaine d'années.
On est aussi dans le sens de l'évolution législative en matière de suppression de service commun. Le législateur a dû intervenir pour la question de la suppression de la loge de concierge, qui vise à écarter l'unanimité pour permettre à la copropriété de vivre et de fonctionner, de renforcer donc le système majoritaire et les économies, la nécessité de procéder à des économies d'énergie conduit à cette évolution.
En dehors de ces travaux que j'ai évoqués, il y a les travaux urgents. Les travaux urgents relèvent du syndic aux termes de l'article 18, alinéa 2, de la loi de 1965.
La loi définit les travaux urgents comme les travaux nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble et ce texte doit être complété par un décret de 1967, article 37 (N° Lexbase : L5532IGY), qui prescrit que lorsque le syndic réalise des travaux urgents, il doit convoquer immédiatement une assemblée générale.
Par un arrêt du 20 septembre 2011 (Cass. civ. 3, 20 septembre 2011, n° 10-30.794, F-D N° Lexbase : A9545HXS), nous avons abordé cette question dans une affaire où les copropriétaires contestaient le caractère urgent de certains travaux qu'ils étaient contraints de financer.
Il y avait deux problèmes : est-ce que les travaux réalisés par le syndic de sa propre initiative sans décision de l'assemblée générale du syndicat étaient effectivement des travaux urgents ; et est-ce que la prescription réglementaire de convoquer immédiatement l'assemblée générale avait été en l'espèce respectée ?
Le tribunal de grande instance, puis la cour d'appel avaient considéré qu'effectivement c'était le cas. La cour d'appel avait retenu que les travaux qui étaient nécessités par des infiltrations massives et répétées dans les parties communes étaient effectivement justifiés par la nécessité de la conservation de l'immeuble.
L'arrêt parlait de la conservation de l'immeuble alors que la loi parle de la sauvegarde de l'immeuble. Nous avons considéré que c'était à peu près équivalent et, en tout cas, que dans l'esprit de la cour d'appel c'était bien des travaux de sauvegarde de l'immeuble et que cette condition-là se trouvait remplie.
En revanche, la question de la communication de l'information de l'assemblée générale était problématique, puisque les travaux avaient été réalisés entre le 17 et le 21 janvier 2005 et que l'assemblée générale avait ratifié les travaux le 25 novembre 2006, pratiquement deux ans plus tard.
Le décret parle d'une information immédiate et donc le syndic n'avait pas, en l'espèce, rempli son obligation réglementaire, à l'inverser de ce que pensait la cour d'appel et donc nous avons dû casser dans cette affaire.
Mais l'enseignement qu'on peut en tirer, me semble-t-il, c'est une certaine souplesse dans la qualification de l'urgence des travaux. On ne s'attachera pas au sens des mots "sauvegarde", "conservation de l'immeuble". Il faut que ce soit des travaux urgents, mais en revanche, l'information immédiate des copropriétaires ce n'est pas compliqué à réaliser et donc le syndic n'est pas légitime à attendre deux ans pour cette information.
J'en viens maintenant à la question de la responsabilité du syndicat pour les vices de construction, c'est aussi un grand classique qui se rapporte à l'article 14 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4807AHI) (Cass. civ. 3, 12 septembre 2012, n° 11-10.421, FS-P+B N° Lexbase : A7443ISH).
En l'espèce, une humidité importante s'était révélée dans les sous-sols parties communes de l'immeuble et affectait une partie privative d'un copropriétaire qui donc avait assigné le syndicat sur le fondement de l'article 14, en réparation de son préjudice.
Selon ce texte, le syndicat est responsable des dommages causés au propriétaire pour tout vice de construction ou tout défaut d'entretien. Nous avons appliqué cette règle.
Je l'évoque parce que c'est une responsabilité une peu originale par rapport à celle d'un constructeur. Elle peut être engagée à l'égard des tiers, à l'inverse de la responsabilité d'un constructeur et cette responsabilité est encourue pendant les 10 ans à compter de la survenance du vice et non pas à compter de la réception des travaux.
C'est donc une responsabilité, celle du syndicat, qui est plus sévère que celle pour vice de construction, plus sévère que celle du constructeur et la jurisprudence l'applique strictement.
Nous veillons à ce que cette responsabilité du syndicat pour vice de construction soit appliquée strictement.
En l'espèce, la cour d'appel avait retenu que les désordres avaient bien pour origine les parties communes, mais que dans la mesure où les responsables de ces désordres avaient été identifiés et condamnés, il appartenait au propriétaire de présenter, pendant la procédure diligentée par le syndic, sa demande en réparation contre ces constructeurs.
Nous avons cassé puisque dès lors que le juge du fond établit que les désordres proviennent d'un vice des parties communes et qu'il n'y a pas de faute de la victime ou d'un tiers, le syndicat est responsable et c'est une responsabilité sans faute qui doit être engagée sur la base de cette double constatation.
Autre question que nous avons abordée dans un arrêt du 19 septembre 2012 (Cass. civ. 3, 19 septembre 2012, n° 11-21.631, FS-P+B N° Lexbase : A2591IT7) qui se rapporte à la responsabilité, cette fois inverse, c'est-à-dire celle d'un copropriétaire pour des travaux qui affectent les parties communes, situation un peu inverse de la précédente.
En l'espèce, c'est encore aussi une situation que l'on rencontre assez fréquemment ; un propriétaire effectue des travaux qui affectent les parties communes mais sans l'autorisation de l'assemblée générale du syndicat et lorsqu'il demande la ratification de ces travaux, cette ratification lui est refusée en assemblée générale.
Le propriétaire qui a réalisé les travaux agit en annulation pour abus de majorité de cette résolution d'assemblée générale qui lui refuse la ratification des travaux.
En l'espèce, le juge avait annulé la décision de refuser la ratification des travaux et il a rejeté de ce fait, presque logiquement pourrait-on dire, mais pas juridiquement, la demande conventionnelle du syndicat visant à la remise des lieux en l'état.
C'était une demande du syndicat que la cour d'appel a considéré mal fondée dès lors qu'il y avait eu abus de majorité dans le refus de ratification.
Il y a toute une jurisprudence sur ces questions-là, mais nous avons rappelé -je n'ai pas le temps de l'évoquer ici- deux principes. L'annulation de la décision de refus d'autoriser les travaux ne vaut pas autorisation de ces travaux. Ce n'est pas parce que cette décision est annulée par le juge que les travaux sont autorisés. Et, d'autre part, aucune autorisation judiciaire de travaux ne peut être accordée si ces travaux ont été exécutés sans autorisation de l'assemblée générale avant que le juge ne statue. En fait, c'est une solution assez constante, les deux principes n'avaient pas, à ma connaissance, sauf erreur de ma part, été énoncés de manière aussi formelle.
J'évoquais la question de la logique. On se demande ensuite ce qui se passe, puisque le juge a constaté qu'il y avait abus de majorité dans le refus de ratifier les travaux, mais la demande de remise en état des lieux présentée par le syndicat est de droit.
Je pense qu'on est là dans certains des problèmes qu'on évoque quelquefois dans la loi sur la copropriété qui pose les principes de fonctionnement presque démocratiques extrêmement précis du syndicat de l'assemblée générale, des institutions de la copropriété, dont découlent des comportements et des doctrines qui, quelquefois, appliqués à des situations de fait, sont sans solution.
En l'espèce, si on peut définir une perspective dans cette copropriété c'est soit un accord transactionnel, soit l'écoulement du délai de dix ans pour que les travaux deviennent incontestables.
J'ai encore deux décisions à mentionner. D'abord, une décision du 19 décembre 2012 (Cass. civ. 3, 19 décembre 2012, n° 11-17.178, FP-P+B N° Lexbase : A1533IZS). La question posée était de savoir si lorsque des travaux doivent être réalisés dans la copropriété, qu'un appel de fonds est organisé, que les copropriétaires versent leur quote-part à ces travaux et qu'ensuite l'assurance indemnise la copropriété à charge de la répartition de cette indemnité, qui bénéficie de cette indemnisation lorsque le bien a été cédé entre-temps, entre l'appel de fonds et le versement par la compagnie d'assurance de l'indemnité ?
Le texte applicable est l'article 6.2 du décret de 1967 qui édicte, notamment dans son troisième paragraphe, le trop ou moins perçu sur provision révélé par l'approbation des comptes et porté au crédit ou au débit du compte de celui qui est copropriétaire lors de l'approbation des comptes.
Logiquement ce serait le copropriétaire présent dans la copropriété au moment de l'approbation des comptes qui devrait percevoir la quote-part de l'indemnité d'assurance alors que ce n'est pas lui qui a lancé les fonds pour les travaux.
On a refusé en fait de suivre ou de prendre toutes les conséquences à notre compte de ce texte, nous avons considéré que le dispositif de l'article 6.2 du décret de 1967 (N° Lexbase : L5568IGC) ne se rapportait pas en réalité à des situations de ce genre.
Nous avons considéré qu'on devait tenir compte du fait que la garantie du sinistre en fait était due au moment du sinistre et que le copropriétaire qui avait avancé les fonds n'avait pas à pâtir du fait que la compagnie d'assurance avait mis un long moment avant de donner sa garantie.
En l'espèce, il y avait eu un procès et que par conséquent c'est bien le propriétaire qui a avancé les fonds qui doit, même s'il a quitté les lieux, même s'il n'est plus propriétaire au moment de l'approbation des comptes de la copropriété, percevoir la quote-part du versement de la compagnie d'assurance. Je rappelle quand même qu'il peut s'agir de sommes relativement importantes, si le dommage est considérable.
Le dernier arrêt que je voudrais évoquer se rapporte à la question très actuelle d'une copropriété en difficulté. C'est un arrêt du 23 janvier 2013 (Cass. civ. 3, 23 janvier 2013, n° 09-13.398, FS-P+B N° Lexbase : A8868I3T) ; on sait que c'est un problème massif, selon un rapport de janvier 2012, 15 % des copropriétés seraient concernées par cette question-là.
C'est une affaire qui se passe en outre-mer et qui était un peu particulière, qui a surgi lorsque certains copropriétaires ont demandé aux juges la désignation d'un administrateur provisoire sur le fondement de l'article 29-1 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4832AHG). En l'espèce, il s'agissait d'une copropriété qui était affectée de désordres tellement graves qu'il n'y avait plus d'autre solution que la destruction.
L'indemnisation de l'assureur avait été versée aux copropriétaires, répartie entre les copropriétaires et les copropriétaires s'étaient opposés très gravement, irréductiblement, sur la question de savoir s'il fallait démolir-reconstruire ou simplement abandonner les lieux, mettre en vente et s'en aller.
L'assemblée générale a décidé de ne pas reconstruire, mais de mettre en vente l'immeuble et certains copropriétaires mécontents, très hostiles à cette décision ont saisi le Président du tribunal de grande instance pour la désignation d'un administrateur provisoire.
Le Président du tribunal a fait droit à cette demande, a désigné effectivement un administrateur provisoire, mais d'autres copropriétaires ont demandé au Président du tribunal la rétractation de cette ordonnance, le Président a confirmé la mission de l'administrateur provisoire.
Il y avait deux problèmes, un de procédure et l'autre de fond.
Le problème de fond c'était de savoir si les conditions étaient bien remplies pour la désignation d'un administrateur provisoire de la copropriété. Le texte prévoit que deux conditions alternatives doivent être l'une ou l'autre constatées, soit l'équilibre financier du syndicat gravement compromis, soit l'impossibilité de pourvoir à la conservation de l'immeuble. Ce sont deux critères opératoires.
En l'espèce, il y avait quelque chose de paradoxal, ce n'était pas la possibilité de pourvoir à la conservation de l'immeuble, c'était la possibilité de le détruire. On était évidemment complètement à fond inversé par rapport aux règles légales, mais la loi ne peut pas tout prévoir évidemment.
Ce que nous avons retenu et ce que le juge avait retenu d'ailleurs et ce que nous avons approuvé c'est qu'en réalité ce que la loi évoque c'est l'impossibilité structurelle des institutions de la copropriété de mener à bien ces missions. On était bien dans une situation de ce genre où le syndicat ne pouvait pas mener à bien sa mission, c'est-à-dire ce qui paraissait absolument indispensable, c'est-à-dire la démolition de l'immeuble.
Et donc, nous avons considéré qu'il ne convenait pas d'appliquer littéralement l'article 29-1 de la loi de 1965, mais d'appliquer dans son esprit, en l'interprétant logiquement, selon l'objet qui a été recherché par le législateur.
Le second grief est intéressant parce qu'il met en lumière le rôle du procureur de la République, en matière d'entreprise en difficulté. Le décret de 1967 prévoit que la demande de désignation d'un administrateur provisoire pour une copropriété en difficulté doit être communiquée au procureur de la République, à peine de nullité de la désignation.
Le procureur de la République a pour mission d'intervenir, le cas échéant, devant le juge, mais aussi de prévenir le Préfet, le maire, pour que des dispositions puissent être prises le cas échéant sur le rapport de l'administrateur provisoire.
En l'espèce, il y avait deux requêtes, l'une qui avait été tout de suite retirée parce qu'il y avait un vice de forme. Cette requête avait été notifiée au procureur de la République par son auteur, mais la requête qui saisissait effectivement le juge n'avait pas été notifiée.
Si on avait appliqué strictement les textes, en particulier l'article 428 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6532H73) qui dit que la communication au procureur de la République, sauf disposition contraire, est faite à la diligence du juge, nous aurions dû casser pour l'application des textes qui prévoit la nullité de cette désignation si le procureur de la République ne s'est pas vu notifier la demande.
Mais, nous avons fait prévaloir une interprétation plus libérale, en considérant et en approuvant la décision du juge et de la cour d'appel, selon laquelle le procureur de la République était bien destinataire des informations, pas par le juge, mais par l'auteur de la requête des informations qui figuraient sur les difficultés de la copropriété.
Finalement, il importait peu que ce soit une requête qui avait été retirée ou que la requête qui saisissait le juge soit notifiée au procureur de la République.
Il n'y a pas de formalisme réellement à observer sur cette question-là, l'essentiel étant que le Procureur de la République soit informé, puisse prendre les dispositions qui relèvent de ses attributions.
J'ai évoqué neuf arrêts, je pense qu'ils ne traduisent pas l'état du droit de la copropriété aujourd'hui, ils traduisent quelques problématiques qui nous ont été soumises.
Je pense que ce que nous nous efforçons de faire c'est premièrement les directives que nous nous assignons à nous-mêmes, quitte à quelquefois nous en écarter lorsque c'est nécessaire, c'est renforcer les institutions de la copropriété.
Les institutions de la copropriété doivent vivre et en particulier l'assemblée générale, dans ses modes de convocation, etc. Nous tentons d'écarter, quand cela est possible, quand le décret et la loi le permettent, le formalisme excessif qui, quelquefois, est édicté, donc consolider les assemblées générales et d'autre part, dans un domaine où beaucoup d'acteurs professionnels suivent la jurisprudence, d'assurer stabilité et visibilité à ces règles de manière à ce que là encore les copropriétés puissent vivre en toute sécurité".
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par Michel Simonnot, Architecte DPLG, Expert judiciaire près de la cour d'appel de Paris et Jean-Marc Albert, Avocat à la cour d'appel de Paris
Le 06 Juin 2013
I - Intervention de Michel Simonnot, Architecte DPLG, Expert judiciaire près de la cour d'appel de Paris
"Il m'a donc été demandé de traiter le contexte des travaux lors de la direction du chantier concernant les travaux en copropriété.
Evidemment ce sujet est tellement vaste que je ne pourrai qu'effleurer à partir de quelques cas concrets des principaux domaines où se croisent les problèmes techniques, les problèmes juridiques qui sont bien d'ailleurs l'objet de notre association Justice Construction.
Il convient tout d'abord de distinguer les travaux concernant les parties communes et ceux concernant les parties privatives.
1. Les parties privatives
Concernant ces parties privatives, il convient de rappeler que le syndic et éventuellement l'architecte conseil du syndicat des propriétaires ont un droit de regard sur ces travaux même si, en général, les règlements de copropriété autorisent un copropriétaire à réaliser dans son appartement tous les travaux qu'il juge utiles ou nécessaires, sous réserve que ces travaux ne nuisent pas à la copropriété.
Il n'empêche qu'il convient de vérifier leur incidence qui n'est pas toujours évidente pour un particulier a priori ignorant en la matière.
Tout d'abord, il est absolument indispensable que soit dressé un constat contradictoire des appartements avoisinants, soit par un huissier de justice, soit par l'architecte conseil du syndicat des propriétaires car ces travaux peuvent avoir une incidence importante sur les avoisinants.
Il y a souvent le problème des cloisons qu'on supprime sans précaution alors que très souvent dans les immeubles anciens ces cloisons sont en charge suite à des affaissements de plancher ou divers travaux qui ont été exécutés au cours des temps.
Autre exemple, très souvent les propriétaires modifient l'emplacement des pièces humides et des pièces sèches, alors qu'en général dans les immeubles les salles de bains sont à l'aplomb à tous les niveaux ainsi que la cuisine. Dès lors qu'on change l'affectation de certaines pièces, il peut y avoir des problèmes importants, notamment d'acoustique.
Autre exemple : des plafonds dégarnis pour laisser les poutres apparentes, alors que ces poutres n'ont jamais été faites pour être apparentes. Le nombre de désordres qui en découlent, notamment la suppression des plafonds peut avoir une incidence sur la résistance de ces planchers, ainsi qu'il peut y avoir également des incidences sur les nuisances sonores, parce qu'il n'y a plus du tout d'isolation acoustique assurée par les anciens plafonds, notamment dans les immeubles anciens. Il y a des plafonds très souvent de plâtre fixé sur le Bacula d'une épaisseur très souvent de cinq centimètres donc qui assure une très bonne isolation thermique.
Autre exemple également des chambres de service transformées en studio d'où acrobatie de plomberie pour rejoindre les collecteurs d'eaux usées situés très souvent à l'autre bout de l'immeuble.
On a vu évidemment des propriétaires déverser des eaux usées dans les chéneaux, ce qui est une catastrophe, et j'ai vu pire encore, des eaux usées rejetées dans les collecteurs d'eau ménagère qui sont réservés aux cuisines, excusez-moi, j'ai vu de visu des matières fécales remonter dans les éviers, ce qui n'est pas très agréable.
Pour en terminer sur les parties privatives, il convient de mettre en garde également les copropriétaires sur certains architectes d'intérieur, qui n'ont pas les mêmes règles déontologiques que les architectes. N'importe qui peut se dire architecte d'intérieur.
La plupart du temps, ces architectes d'intérieur ont leurs entreprises, donc se servent doublement d'une part en honoraires, d'autre part sur les entreprises, ce qui est tout à fait contraire aux règles déontologiques des architectes et ce qui pose un préjudice vis-à-vis de la profession.
2. Les parties communes
Il convient de distinguer les travaux d'urgence et les travaux faisant l'objet d'un vote de l'assemblée générale des copropriétaires.
2.1. Les travaux faisant l'objet d'un vote de l'assemblée générale
Il convient de rappeler qu'il est du devoir du syndic de recommander lors du vote des travaux l'intervention d'un architecte. Le syndic n'a aucune compétence pour assurer la maîtrise d'oeuvre des travaux.
A défaut le syndic va tenir le rôle du maître d'oeuvre, mais quelle qualification a-t-il pour remplir cette mission ?
Il y a également l'exemple du syndic qui est également architecte. Je ne pense pas que ce soit très souhaitable pour l'indépendance de cette deuxième casquette d'architecte.
Le syndic devra également demander aux copropriétaires quelles sont les entreprises qu'ils désirent consulter. En effet, très souvent lors d'une assemblée de copropriétaires, l'architecte, conseil du syndicat, se fait doubler par un copropriétaire qui, au dernier moment d'une assemblée, va présenter des devis.
Evidemment, il s'est servi des devis qui ont été joints à la convocation et a trouvé tartempion pour trouver une entreprise moins chère. C'est trop facile. Le syndic doit demander au cours de l'Assemblée quelles sont les entreprises qu'ils veulent consulter.
Egalement il y a le problème de l'architecte, conseil du syndicat des propriétaires, qui se trouve dans une situation très difficile pour recommander certains travaux, notamment une couverture.
A partir de quand une couverture doit-elle être rénovée ?
On va accuser l'architecte d'être au pourcentage et de pousser à la dépense, donc c'est très délicat pour l'architecte conseil.
Vient ensuite le problème de financement des travaux. Il y a le respect des deux mois légaux après l'envoi du compte rendu de l'assemblée générale, mais quid du financement lorsqu'un copropriétaire est défaillant en cours de travaux ?
Ce problème de financement est encore plus ardu lorsqu'il s'agit de travaux urgents.
2.2. Les travaux urgents
Quelles sont les obligations du syndic lorsque qu'il y a péril en la demeure ? Comment se financeront ces travaux ?
C'est pour cela qu'il est important de prévoir dans le budget d'un syndicat de copropriétaires d'une part le montant des travaux que peut engager le conseil syndical, et d'autre part le montant des travaux que peut engager le syndic lui-même sans recourir à une assemblée générale.
Dans les autres cas ils doivent convoquer une assemblée générale extraordinaire.
Enfin en guise de conclusion, il serait bon que tout immeuble fasse l'objet d'un audit de l'architecte conseil du syndicat des copropriétaires pour établir par ordre d'urgence les travaux nécessaires à la bonne conservation de l'immeuble, ainsi qu'un cahier des charges pour les travaux d'entretien courant.
Là, j'ai d'autres exemples à évoquer, c'est le contrôle des canalisations d'assainissement qui sont souvent enterrées dans le sous-sol. J'ai eu le cas de conséquences dramatiques parce que ces canalisations fuyaient et cela attaquait les fondations de l'immeuble, par la création de fontis.
Est-ce que ces fontis étaient consécutifs aux fuites ou est-ce ces fuites qui étaient consécutives aux fontis ? C'est l'histoire de l'oeuf et de la poule. Il est important de vérifier les canalisations d'assainissement pour éviter des travaux très importants.
Nonobstant le problème que posent souvent les règlements de copropriété en raison de leur manque de précision sur les obligations de chacun. On prend souvent l'exemple du plancher. Qu'est-ce qu'on entend par plancher ? Est-ce que c'est le gros oeuvre entre deux niveaux ou simplement le parquet ? Là-dessus il y a de mauvaises interprétations évidemment qui peuvent être très néfastes.
Je terminerai par un problème personnel. Je suis privé de cheminée depuis le début de l'hiver alors que je m'en sers depuis 30 ans. Un copropriétaire s'est plaint de ce que le conduit de fuyard était enfumé, d'après le règlement de copropriété les conduits de fumée sont partis communes en ce sens que les gaines et coffres sont indiqués parmi les parties communes.
C'est en contradiction avec un autre article du même règlement qui stipule que sont parties communes les parties qui ne sont pas affectées à l'usage exclusif d'un copropriétaire déterminé donc contraction dans ce même règlement.
S'ensuit un problème important puisque le chemisage de ce conduit se monte à 4 000 euros -le chemisage est important c'est ce qui explique le montant important de ces travaux-.
A partir de ces quelques exemples j'espère que j'ai pu poser quelques problèmes que Maître Albert va peut-être reprendre sur le plan juridique".
II - Intervention de Maître Jean-Marc Albert, Avocat à la cour d'appel de Paris
"La réflexion concernant le contexte des travaux et l'organisation du chantier que vient d'ouvrir M. Simonnot, expert judiciaire, architecte doté d'une grande expérience, fait apparaître immédiatement la nécessité d'intervenants, d'acteurs qualifiés afin de préparer et de mettre en oeuvre des travaux qui seront choisis et qui doivent être déterminés.
Avec l'expérience, il apparaît en effet que ce sont seules les analyses préalables, les diagnostics, toutes les précisions techniques relatives aux travaux, à leur nature, à leur importance, à leur nécessité ou pas, à leur coût, à leur délai qui vont permettre de déterminer la qualification juridique puis les conditions de leur réalisation.
C'est donc ici souligner immédiatement le rôle des professionnels qualifiés que sont outre le syndic de copropriété, l'architecte, mais les bureaux d'études qui vont être chargés d'éclairer ceux qui décideront et qui paieront, les copropriétaires.
D'où l'intérêt d'évoquer et ce sera mon cheminement, d'une part, quelles sont les sources des travaux dans une copropriété, et, d'autre part, les moyens pour les exécuter.
1. Les sources des divers travaux
C'est un raisonnement que j'ai adopté, il vaut ce qu'il vaut, c'est ma classification, je la présente telle quelle. J'ai voulu distinguer, d'une part, les travaux imposés et, d'autre part, les travaux proposés. On verra les travaux demandés.
1.1. Les travaux imposés à une copropriété
Evidemment ils impactent les parties communes comme cela a déjà été évoqué, ceci peut également, subséquemment impacter les parties privatives.
1.1.1. Les travaux imposés par les règlements ou autorités administratives
A titre d'exemples, je survole les travaux imposés :
- ce seront les mises aux normes des ascenseurs ;
- les travaux d'économie d'énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui seront le prolongement des lois "Grenelle", notamment de la loi "Grenelle II" (loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 N° Lexbase : L7066IMN), mais je laisserai le prochain intervenant développer cet aspect ;
- ce seront les canalisations en plomb qui vont être supprimées, ces opérations de repérage de l'amiante ;
- ce pourra être également le ravalement qui est imposé par le maire ;
- et cela a été évoqué également, dans un futur proche, ce seront les règles qui résultent de la loi "PMR", loi relative aux personnes à mobilité réduite (loi n° 2005-102 N° Lexbase : L5228G7R), c'est-à-dire toutes les mesures qui vont devoir s'appliquer pour les handicapés.
1.1.2. Les travaux imposés par l'urgence
Il a été rappelé tout à l'heure qu'au terme de l'article 18 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4813AHQ), il s'agit des travaux qui sont nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble. Citons à titre d'exemple les canalisations qui fuient, un défaut d'étanchéité d'une terrasse ou des premières mesures à prendre après un incendie et toutes les règles qui interviennent pour l'exécution de ces travaux seront évoquées plus tard dans cette journée.
1.1.3. Les travaux imposés par les obligations du syndic de pourvoir à la conservation, à la garde et à l'entretien de l'immeuble
J'ai classé dans cette catégorie tout ce qui me paraît imposé par les obligations du syndic en application de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, qui impose au syndic de pourvoir à la conservation, à la garde et à l'entretien de l'immeuble.
En effet, le syndic doit surveiller l'immeuble et initier les travaux nécessaires. Citons, à titre d'exemple, le ravalement qui n'est pas imposé par l'administration, mais qui est nécessaire à l'entretien de l'immeuble. Ce sont les travaux de maintenance de l'ascenseur, les peintures d'une cage d'escalier, les travaux de plomberie.
Je l'ai vu récemment également, ce sont des travaux qui, là, impactent les parties privatives. Pour des raisons de sécurité il faut changer tous les gardes corps d'un immeuble. Enfin, j'ai classé, là aussi arbitrairement, dans cette catégorie, les décisions de faire réaliser un diagnostic ou un audit d'un immeuble par un architecte.
Je voudrais ici évoquer dans le cadre de cette mission du syndic certains compagnons de route du syndic qui sont des documents qui me paraissent absolument nécessaires, que l'on ne voit pas toujours, aussi je voudrais les citer à titre d'information :
- Le carnet d'entretien
Je rappelle que le carnet d'entretien a été instauré par la loi de 2000, la loi "SRU" (loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2001 N° Lexbase : L9087ARY). Cette disposition se trouve intégrée aujourd'hui dans l'article 18, alinéa 1, tiret 3, de la loi de 1965, au terme duquel le syndic est chargé d'établir et de tenir à jour un carnet d'entretien de l'immeuble. Le contenu de ce carnet d'entretien peut être élargi par l'assemblée générale, mais strictement, la loi est fixée par le décret du 30 mai 2001 (décret n° 2001-477 N° Lexbase : L4868IPY), décret d'application de la loi "SRU".
Dans les éléments que doit contenir ce carnet d'entretien on trouve des éléments intéressants pour un syndic et pour les divers intervenants : l'année de la réalisation des travaux importants avec l'identité du locateur d'ouvrage, la référence des contrats d'assurance dommage ouvrage, les contrats d'entretien et de maintenance des équipements connus, l'échéancier du programme pluriannuel de travaux qui peut être décidé par l'assemblée générale, qui prévoit les travaux et l'étalement de leur financement.
- Le diagnostic technique
Il s'agit d'un document obligatoire qui est préalable à la mise en copropriété d'un immeuble construit depuis plus de 15 ans. Il s'agit de l'article 111-6-2 du Code de la construction d'habitation (N° Lexbase : L8934ASP). Certes, le voeu de la loi était de donner une information pour renseigner l'acquéreur. Il n'en demeure pas moins qu'à mon sens, avec le carnet d'entretien, ils sont des documents très utiles pour le syndic.
Je voudrais aussi évoquer deux autres compagnons de route du syndic. Il s'agit des DOE et des DIUO
- Le dossier des ouvrages exécutés (DOE)
Le DOE, dossier des ouvrages exécutés, doit être fourni au maître d'ouvrage par les constructeurs, le maître d'oeuvre, après construction de l'immeuble ou après de gros travaux. L'intérêt du DOE c'est évidemment d'avoir la réalité des travaux exécutés dont on sait qu'ils ne sont pas toujours strictement conformes aux travaux conçus.
- Le dossier des interventions ultérieures sur l'ouvrage (DIUO)
Le DIUO émane d'un personnage sur lequel je reviendrai parce qu'il me paraît extrêmement important à rappeler en ce qui concerne son intervention. Le DIUO c'est donc le dossier des interventions ultérieures sur l'ouvrage. C'est un document qui est établi par le coordonnateur SPS, celui qui est chargé de la santé, de la sécurité, de la protection des travailleurs sur le chantier. Ce document me paraît intéressant dans la mesure où il comprend tous les plans, les notes techniques, toutes les informations relatives à la recherche des matériaux amiante et autres. Surtout c'est un texte du Code du travail, parce que tout ce qui se rapporte au coordonnateur SPS se trouve dans le Code du travail. Il y a un article R. 4532-97 du Code du travail (N° Lexbase : L9674H98) qui prévoit que ce DIUO doit être joint aux actes notariés établis à chaque mutation d'ouvrage et dans le cas d'une copropriété, un exemplaire du dossier est étalement remis au syndic de l'immeuble.
Voici donc ce que j'ai classé dans la catégorie des travaux imposés.
1.2. Les travaux proposés par le syndicat des copropriétaires ou qui font l'objet d'une demande d'autorisation
1.2.1. Les travaux dits d'amélioration
On peut parler d'une installation d'antenne, d'un réseau TV, d'une installation d'un nouvel ascenseur ou d'un ascenseur plus confortable, de l'installation d'une chaudière plus performante. On a évoqué tout à l'heure le changement de système de chauffage collectif en chauffage individuel. Ce peut être un ravalement qui n'est pas imposé par l'administration mais qui dépasse l'entretien courant.
1.2.2. Les travaux de sécurisation de l'accès à l'immeuble ou imposés, tels un interphone, un digicode, etc..
Ce type de travaux peut présenter des difficultés, en particulier quand l'assemblée générale des copropriétaires décide la fermeture totale de l'immeuble en permanence ; là, se pose la question de la compatibilité avec l'exercice d'une activité commerciale ou professionnelle, compatibilité qui est d'ailleurs prévue à l'article 26 e de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4826AH9).
Je veux évoquer un litige qui est actuellement pendant devant la huitième chambre du présent tribunal. Il s'agit d'un médecin gynécologue obstétricienne qui demande l'annulation d'une assemblée générale ayant voté à une majorité renforcée la fermeture totale et permanente de l'immeuble avec installation d'un digicode et d'interphone, entraînant l'obligation pour ce médecin qui n'a pas de secrétaire médicale d'interrompre l'examen éventuel et délicat d'une patiente pour aller ouvrir.
1.2.3. Les travaux de surélévation, de construction de nouveaux bâtiments, qui sont des travaux qui peuvent être proposés dans une copropriété.
1.3. Les travaux qui sont envisagés par le copropriétaire
Comme il s'agit d'une intervention dans le cadre de cette journée, je ne rentrerai pas dans le détail. Je rappellerai simplement qu'un copropriétaire peut faire ce qu'il veut dans son lot, tout ce qui est purement privatif, mais évidemment dès lors qu'il s'agit d'affecter les parties communes, voire entraîner une gêne aux autre copropriétaires, il faut une autorisation préalable. Ceci a été rappelé tout à l'heure.
A titre d'exemples, il y a les percements dans un mur porteur, ceux pour réunir deux lots d'une dalle ou d'un plancher, le changement de radiateurs lorsque qu'il s'agit d'un chauffage collectif, celui d'une fenêtre... En fait, tous les travaux qui vont être susceptibles d'affecter l'immeuble, de constituer une gêne pour les autres copropriétaires je le rappelle.
Je voudrais m'attarder sur deux cas qu'on a eu l'occasion de constater à la faveur de diverses affaires judiciaires : le cas du revêtement de sol, soit un copropriétaire qui retire la moquette pour y mettre du parquet ; le cas de la suppression d'une cloison pouvant considérer que cette cloison peut être retirée sans précaution alors que, comme M. Simonnot l'a rappelé tout à l'heure, les architectes le savent bien, une cloison dans le temps peut devenir porteuse avec les effets de tassement d'immeuble, etc..
Voilà donc le contexte dans lequel les travaux se présentent dans une copropriété. Avant leur exécution, évidemment, ces travaux devront être votés par l'assemblée générale des copropriétaires qui va en déterminer le coût, le financement, etc..
Cela m'amène à une deuxième partie de mon intervention.
2. Les acteurs et les moyens qui vont intervenir en vue de l'organisation du chantier
2.1. La préparation et le choix des travaux
C'est important ici de rappeler la nécessité de définir techniquement et précisément les travaux. En premier lieu, cela va de soi, mais je souhaite le rappeler et insister, les copropriétaires qui vont décider et payer ces travaux doivent les accepter ou les refuser d'une manière parfaitement éclairée.
Pour être éclairé, indépendamment de l'intervention du syndic, on voit ainsi l'intérêt de l'intervention de maîtres d'oeuvre compétents, architecte ou bureau d'études spécialisé, pour tout ce qui peut concerner des spécificités techniques.
Mais, on verra souvent que c'est un audit, un diagnostic établi par l'architecte, déterminant l'état de l'immeuble et les travaux à envisager, qui seront la base qui permettra de réfléchir sur les travaux à envisager.
J'indique aussi parce que ce n'est pas toujours le cas, il est bon de rappeler qu'un copropriétaire qui veut obtenir une autorisation de travaux a largement intérêt à se faire assister d'un maître d'oeuvre pour présenter un projet bien ficelé devant l'assemblée.
La nécessité d'être précis c'est que les copropriétaires, pour la plupart, sont des profanes et on voit bien que les travaux ne sont pas toujours simples, à savoir des travaux doivent être impérativement effectués immédiatement alors que d'autres peuvent attendre.
Il y a parfois plusieurs méthodes, il existe des variantes et c'est ce qu'il faut expliquer aux copropriétaires. Ceci est fait par le syndic mais, la plupart du temps, le maître d'oeuvre, souvent l'architecte qui a préparé ces travaux, est fort heureusement présent à l'assemblée générale des copropriétaires pour expliquer ce dont il s'agit.
Cela mérite explication, je voudrais illustrer mon propos par la question qu'on trouve souvent en copropriété, qui est celle des ravalements de façade. Rappelons qu'il existe deux types de ravalement, le ravalement purement esthétique, qui mêle de l'enduit et de la peinture, et le ravalement avec une fonction d'étanchéité, qui peut entraîner piochage des enduits, reprise du support et application de produits adaptés.
Cela a des conséquences. Evidemment en ce qui concerne le ravalement esthétique, il est attirant pour les copropriétaires parce qu'il est moins cher ; toutefois, ce ravalement sera limité dans le temps, et surtout ne constituera pas l'ouvrage, cette notion qui entraîne l'application éventuelle de la garantie décennale.
Le ravalement d'étanchéité en revanche, plus cher certes, entraîne une pérennité des travaux et constituera lui un ouvrage qui entraînera l'application de la garantie décennale sous réserve que les conditions de son application soient réunies.
En indiquant cela, je ne fais que rappeler la jurisprudence consacrée en ce domaine depuis les arrêts du 3 mai 1990 (Cass. civ. 3, 3 mai 1990, n° 88-19.642 N° Lexbase : A4042AH8) et du 4 avril 2002 (Cass. civ. 3, 4 avril 2002, n° 00-13.890, FS-D N° Lexbase : A4279AY7) de la troisième chambre civile de la Cour de cassation, qui a retenu qu'un ravalement est un ouvrage dès lors que les travaux réalisés concourent à l'étanchéité du bâtiment, étanchéité étant différente d'imperméabilisation.
Cette hypothèse aussi est intéressante dans la mesure où la question se pose souvent : est-ce qu'il faut conclure une assurance dommage ouvrage ? Je rappelle ici très rapidement que dès lors que les travaux peuvent entraîner la garantie décennale des constructeurs, l'assurance dommage ouvrage s'impose et qu'elle est toujours obligatoire.
En revanche, évidemment, elle n'a vocation à s'appliquer que lorsqu'il s'agira de dommages de nature décennale et donc, par conséquent, ne doit être souscrite que lorsqu'on peut envisager des dommages de cette nature.
Ce n'est pas toujours le cas, ce n'est pas évident pour le syndic, et je ne sais pas si j'ai le temps, mais je vais citer très rapidement un extrait d'un jugement qui a été rendu le 15 janvier 2013 par la sixième chambre de ce tribunal où précisément la question de la nature du ravalement se posait et de ses conséquences au regard des constructeurs et de leurs assureurs.
Le tribunal relève qu'il s'agit d'un ravalement accompagné de travaux de menuiserie et de plomberie et ensuite pour arriver à la qualification il dit ceci : "en outre, il ressort du rapport d'expertise que tant le maître d'oeuvre que l'entreprise avaient décelé la présence importante d'humidité dans la façade dès l'installation des échafaudages. Dans ce contexte, les travaux de piochage réalisés ont bel et bien consisté à réhabilité l'ensemble des façades en les vidant de leur humidité, les laissant sécher avant de procéder au ravalement proprement dit. Le ravalement litigieux doit donc être considéré comme un ouvrage à part entière".
Le problème c'est qu'évidemment la question de la préparation du diagnostic est importante, mais les travaux avaient commencés sans qu'on envisage un piochage de cette nature. Ce n'est qu'au cours des travaux qu'on l'a envisagé, d'où la difficulté pour le syndic de savoir à l'avance si on va rentrer dans le cadre d'une garantie décennale ou non.
Une petite astuce, un petit conseil qui se fait souvent, il suffit de conclure conventionnellement l'application de la garantie décennale avec les intervenants, ceci se fait de manière générale, notamment lorsqu'il s'agit de travaux de climatisation, de travaux d'aménagement qui représentent un enjeu financier.
J'ai une autre illustration, je ne sais pas si j'ai le temps Monsieur le Président, mais je vais essayer de la placer rapidement. Une illustration de la difficulté parfois qu'ont les copropriétaires pour accorder ou non une autorisation.
Il s'agit là d'un copropriétaire qui est un opérateur de télécommunication, qui répand dans Paris la fibre optique. Il ne s'agit pas ici d'un sujet se rapportant à l'installation de la fibre optique dans un immeuble, mais il s'agit d'un opérateur qui cherchait un local pour abriter l'arrivée de tous les câbles dans plusieurs arrondissements de Paris qui contenaient la fibre optique et il cherchait donc ce local pour pouvoir y installer cela.
Dans une copropriété, cet opérateur achète un local, l'immeuble est à destination d'habitation, de commerce et de bureaux et le local qui est acheté est un local à destination de bureau.
L'opérateur présente un premier projet à la copropriété en demandant à être autorisé non pas en soi à installer ce réseau de raccordement qu'on appelle -il le présente comme cela- NRO, noeud de raccordement optique, mais il demande l'autorisation de faire des percements pour pourvoir passer précisément ces câbles et les faire arriver dans ce local, local dans lequel il fallait installer des armoires diverses pour accueillir ces fibres optiques.
Les copropriétaires voient arriver cette installation avec inquiétude. Il devait y avoir des batteries diverses et autres, et on leur dit : "voilà, on voudrait installer ce NRO". Les copropriétaires demandent à l'opérateur de revoir sa copie, de donner des éléments complémentaires et de revenir lui présenter ce projet. Il n'y a donc pas de vote de résolution, il y a un vote qui décide de surseoir à décider.
L'opérateur retravaille son projet et sentant qu'effectivement il y a une difficulté puisque le local est à usage de bureau alors que ce que l'on présente est quand même extrêmement technique, il va cette fois-ci présenter un projet quasi identique, mais il va en changer la dénomination. Cela ne s'appellera plus NRO, mais un bureau de contrôle des boxes des fibres optiques et il y rajoute pour une partie un service après-vente, en disant : "vous voyez, ce sont des bureaux".
Les copropriétaires sont toujours extrêmement inquiets et pas satisfaits de cette présentation et concomitamment à la deuxième assemblée générale où le projet est présenté il est à nouveau décidé de surseoir à décider cette autorisation, la copropriété initie un référé, saisit le juge en désignation d'un expert afin de savoir ce qu'est ce projet et ce qu'on va rentrer dans la destination de bureau ou autres.
L'expertise judiciaire va se dérouler et concomitamment d'ailleurs, l'opérateur qui n'est pas satisfait va attaquer l'assemblée générale en disant : "une première fois vous n'avez pas voulu décider, une deuxième fois vous ne décidez pas, donc je considère que votre deuxième assemblée est un refus déguisé et donc je demande à l'autorisation judiciaire de faire ces travaux".
L'expert judiciaire fait son travail et va conclure en disant que le projet lui-même est essentiellement un projet de raccordement de ces fibres optiques qui est qualifié, parce qu'il y aura une demande auprès de la mairie de Paris, de Cinaspic, définition du Code de la construction et de l'habitation qui correspond à des constructions et installations nécessaires au service public ou d'intérêt collectif.
L'expert outrepassant peut-être un peu sa mission dira : "pour moi, ce ne sont pas des bureaux" et dira en revanche pour l'autre partie : "les services après-vente sont effectivement des bureaux".
Le tribunal est donc saisi, mais nous n'aurons pas la réponse au fond puisqu'en réalité, dans un jugement récent, le tribunal a considéré que l'action de l'opérateur était irrecevable dans la mesure où la latitude de la copropriété qui, avant de décider, avait été jusqu'à demander la désignation d'un expert judiciaire, le tribunal a considéré que c'était une décision parfaitement légitime, et que, par conséquent, il n'y avait pas de refus déguisé, et qu'il n'y avait donc pas eu de décision de refus de l'assemblée générale. Par conséquent, la demande d'autorisation était irrecevable puisque le préalable c'est qu'il y ait un refus.
Voilà donc pour illustrer mon propos, la difficulté parfois de décider pour des copropriétaires.
2.2. L'exécution des travaux
Celle-ci va évidemment au préalable entraîner des mesures fondamentales, à savoir d'abord pour l'assemblée générale le choix des intervenants. Il va de soi pour moi que dès qu'il s'agit de travaux importants, l'assemblée générale des copropriétaires doit désigner et doit décider de l'intervention d'un maître d'oeuvre qui, au-delà de la conception, devra assurer la direction des travaux, de façon à ce que ceux-ci soient exécutés conformément aux règles de l'art et conformément aux décisions de l'assemblée générale.
La question du choix de l'entreprise et du montant des devis se présente ensuite. Je rappelle qu'il y a des obligations dans la loi de 1965 qui font qu'au-delà d'un certain montant, qui est d'ailleurs décidé par l'assemblée générale, plusieurs devis doivent être présentés aux copropriétaires, mais comme l'a dit M. Simonnot, il y a parfois certaines dérives en ce domaine.
Je pense pour moi que l'intervention d'un maître d'oeuvre, d'un architecte qui conçoit le projet avec un cahier des charges, puis qui procède à un appel d'offres, qui ensuite va faire un résultat de cet appel d'offres et qui va venir devant les copropriétaires pour leur dire : "il y a trois entreprises, je vous conseille de prendre celle-ci qui ne sera pas forcément la moins chère, mais qui paraitra peut-être la plus qualifiée pour faire ces travaux" est à mon sens la meilleure situation pour un choix éclairé des copropriétaires.
L'exécution des travaux fait apparaître évidemment le rôle fondamental du syndic, dont on rappellera qu'au terme de l'article 18 de la loi de 1965, est chargé d'assurer l'exécution des délibérations de l'assemblée générale. C'est donc le syndic qui sera l'interlocuteur de l'architecte et des entreprises et personne d'autre. Il aura donc le rôle de maître d'ouvrage, devra signer les marchés, être présent aux réunions de chantiers, exercer et effectuer la réception.
En amont, pour commencer les travaux, le syndic devra tout mettre en oeuvre pour que les fonds soient disponibles quand il le faut. Il devra donc procéder aux appels de fonds et je ne fais qu'évoquer ici le fait que, comme les travaux coûtent cher, les copropriétaires ont toujours la possibilité, mais le syndic aussi maintenant, soit parce que c'est obligatoire soit parce que c'est bienvenu, de faire organiser le financement de ces travaux.
Si ce financement repose sur plusieurs années, cela peut être dans le cadre d'un plan pluriannuel de travaux ; il existe aussi le fonds spécial qui peut être constitué pour la réalisation de ces travaux.
Avant la réalisation des travaux donc, et je reviens sur ce qui a été évoqué tout à l'heure, il y a des mesures préalables qui sont fondamentales parce qu'on est dans un site occupé, que dans certains cas il va falloir passer chez les copropriétaires... Le syndic devra prévenir, prendre toutes les mesures nécessaires, parfois établir un constat préalable pour éviter toutes difficultés ultérieures.
Malheureusement il peut être parfois obligatoire d'avoir recours au juge parce que le propriétaire refuse par exemple d'enlever son vélo sur une terrasse ou un balcon, ou fait de la résistance. C'est le juge, dans ce cas-là, qui pourra prendre des mesures avec condamnation sous astreinte pour que ces travaux puissent être réalisés.
2.3. Les acteurs des travaux
Je passerai rapidement sur ce point puisqu'il a été abordé précédemment. Au-delà de l'architecte il y a classiquement ceux qui interviennent, l'entreprise, éventuellement un contrôleur technique, surtout s'il s'agit par exemple d'un ascenseur, des bureaux d'études spécialisés, chacun ayant une obligation, obligation qui résulte de son marché, etc..
Je terminerai en mettant en lumière cet intervenant qui me paraît fondamental parce qu'il est chargé précisément de veiller à la sécurité de la santé des travailleurs et les gros travaux dans une copropriété peuvent être source très facilement d'accidents ou autres. Il s'agit du coordonnateur de sécurité et de santé au travail, soit le coordonnateur SPS. Je voudrais rappeler cet article L. 4532-2 du Code du travail (N° Lexbase : L1665H9K) qui prévoit, et c'est pénalement sanctionné, que le maître d'ouvrage doit désigner un coordonnateur SPS dès la conception de l'ouvrage pour tout chantier de bâtiment où sont appelés à intervenir plusieurs travailleurs indépendants ou entreprises, entreprises sous- traitantes incluses.
La jurisprudence de la Cour de cassation prévoit :
- premièrement, que la dérogation de la prendre un coordonnateur SPS qui est prévu pour les particuliers n'est pas applicable à un syndicat des copropriétaires, c'est un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 11 juillet 2001 (Cass. civ. 3, 11 juillet 2001, n° 00-11.984 N° Lexbase : A2357AUT) ;
- deuxièmement, la Cour de cassation à l'occasion d'une affaire pénale a souligné que l'obligation d'un coordonnateur SPS s'impose dès lors qu'il existe au moins une entreprise et un travailleur indépendant, c'est-à-dire qu'il suffit d'une entreprise et pas seulement une coactivité entre plusieurs entreprises, et l'intervention d'un architecte ou d'un bureau d'études, un ingénieur, un travailleur indépendant pour que le coordonnateur SPS soit obligatoire.
Je rappelle que l'article L. 4744-4 du Code du travail (N° Lexbase : L2000H9X) prévoit une amende de 9 000 euros pour un maître d'ouvrage qui ne désigne pas le coordonnateur ou qui ne lui donne pas l'autorité et les moyens indispensables à l'exercice de sa mission et, qu'en cas de récidive, c'est un emprisonnement d'un an et une amende de 15 000 euros qui sont encourus, outre les peines complémentaires qui peuvent aller jusqu'à l'interdiction d'exercer pendant 5 ans.
Pour terminer sur le coordonnateur SPS, je rappelle que jusqu'à 760 000 euros le maître d'oeuvre peut être désigné comme coordonnateur SPS, mais il doit en avoir les compétences et la formation. Au-delà de ce montant, le coordonnateur doit être une personne physique différente.
Pour conclure on s'aperçoit à l'examen de ces éléments qu'il s'agit de situations extrêmement diverses qui exigent des compétences techniques pour que les copropriétaires décident de manière éclairée.
L'important contentieux évoqué tout à l'heure résulte fréquemment d'imprécisions matérielles ou financières faute d'une préparation suffisante. Gageons que ce colloque participera à une amélioration dans l'organisation de ces travaux".
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par Jean-Luc Bouguier, Chargé de Mission Surveillance de la Sinistralité à la M.A.F.
Le 06 Juin 2013
"Je vais tenter d'expliquer que le problème de la rénovation énergétique dans les copropriétés n'est pas tant un problème technique qu'un problème économique.
Si on fait un panorama en France de l'état des copropriétés, on aboutit à plusieurs constats.
Le premier c'est qu'en ce qui concerne l'immeuble lui-même, le bâti, en France, on a un bâti qui est assez ancien pour ce qui est des copropriétés, puisqu'environ 55 à 65 % des immeubles sont des immeubles qui datent de plus de 30 ans.
La part des immeubles récents postérieurs à 1975 représente à peu près 20-25 %, 30 % dans le meilleur des cas dans certaines villes.
Le deuxième constat c'est qu'il s'agit d'un bâti qui est un bâti de petits volumes. 85 % des immeubles en copropriété, des immeubles collectifs en France sont des immeubles qui font du R + 4. A titre anecdotique, il n'y a que 2 % d'IGH (immeuble de grande hauteur) sur le sol français.
Quant aux copropriétés des vastes ensembles que l'on a pu connaître en construction dans les années 1960, je pense à Parly II, à Grigny II, qui sont les deux plus grosses copropriétés en France mais aussi d'Europe, avec 18 000 et 17 000 habitants ce sont des exemples qui n'ont pas été suivis d'effet après les années 1970.
On a donc un habitat de petite taille, de petits immeubles et des immeubles assez anciens qui datent des 30 Glorieuses en vérité. Ces immeubles des 30 Glorieuses sont aussi les plus consommateurs, puisqu'ils consomment à eux seuls plus de 50 % de l'énergie consacrée au chauffage, à l'eau chaude sanitaire en France.
Enfin, lorsque l'on passe à un examen plus approfondi de la vie en copropriété, donc du profil socio-économique des habitants, des occupants, on s'aperçoit que la France en copropriété c'est d'abord surtout des locataires.
On est en moyenne à 55 % d'occupants locataires dans les copropriétés françaises.
On peut également s'apercevoir que le profil de ces occupants est un profil mono cellulaire, ce sont des gens vivant seul ou en couple, on est à deux tiers d'occupants en couples ou en célibataires dans ces copropriétés.
A l'inverse le nombre de familles avec deux enfants représente environ 20 % des occupants, donc des petits logements aussi. Cela signifie qu'il y a aussi des petits logements.
Enfin c'est un habitat qui est diversifié dans la succession des générations. J'entends par là qu'on a un clivage qui s'opère entre les locataires qui sont plutôt des gens jeunes, 74 % d'entre eux ont moins de 40 ans, et puis les gens qui sont actifs, pour l'essentiel et des gens qui sont surtout très mobiles. 60 % d'entre eux je crois sont en location moins de 4 ans, donc cela tourne extrêmement vite sur le marché de la location.
A l'inverse les copropriétaires eux ont évidemment une durée d'occupation plus longue. 40 % d'entre eux occupent depuis plus de 12 ans leur logement. Ils en sont propriétaires depuis plus de 12 ans et ce sont des gens qui sont plus sédentaires et souvent plus âgés, puisqu'on a une forte proportion de retraités parmi les copropriétaires occupants, environ 40 %.
Voilà le constat que l'on peut dresser de la copropriété en France.
Si on s'intéresse maintenant à l'aspect solvabilité de la copropriété, c'est le point le plus important, le point principal de mon intervention, on s'aperçoit qu'on va avoir des difficultés à mettre en oeuvre la rénovation énergétique des bâtiments à cause effectivement de cette solvabilité, d'abord parce que les revenus par ménage dans la copropriété ne sont pas des revenus excessifs.
En matière de location, en matière de revenu des locataires, 37 % des locataires en France sont sous le seuil de pauvreté. Le seuil de pauvreté, je dois le rappeler, c'est un peu moins de 10 000 euros pour un célibataire, et environ 20 000 euros pour un couple avec deux enfants, 37 %.
Du côté des copropriétaires, la situation est un peu meilleure mais pas davantage, puisqu'on a 36 % des copropriétaires occupants qui sont des gens qui sont éligibles aux subventions de l'agence pour l'amélioration de l'habitat, donc des gens avec des revenus modestes ou très modestes. On entend 17 000 euros pour un célibataire et 35 000 euros pour un couple avec deux enfants.
En résumé on a un bon tiers de la population, que ce soit en location ou en copropriétaires occupants, qui sont des gens avec des revenus modestes. Cela entraîne une deuxième série d'observations, c'est que la solvabilité des copropriétés elles-mêmes n'est pas forcément dans certaines zones urbaines les plus réjouissantes.
Le rapport de M. Braye, Président de l'ANAH, qui a été déposé en janvier 2012, tentait de faire un constat, un état des lieux de la solvabilité des syndicats de copropriétaires sur le sol français. On a actuellement, nous dit ce rapport, 5 % de copropriétés réellement, objectivement aujourd'hui, en difficulté ; mais d'après les outils statistiques qui sont mis en oeuvre actuellement par l'ANAH pour essayer de répertorier de manière plus précise l'état de solvabilité des copropriétaires et des copropriétés, on aurait environ 19 % de copropriétés à "surveiller" c'est-à-dire qui sont fragilisées.
A titre d'exemple, on peut donner l'illustration par ce qui s'est passé sur l'ensemble de Grigny II à la fin 2012. Grigny II était depuis l'origine en exploitation de l'eau chaude et du chauffage collectif au gaz avec Cofely. A la fin 2012, le contrat de concession avec Cofely venait à expiration. Cofely n'a pas souhaité le renouveler. Quant à l'appel d'offres aucun des concurrents de Cofely n'a souhaité non plus contracter avec la copropriété de Grigny II qui est en vérité en état de cessation depuis 2009. Ils n'ont pas souhaité contracter pour une raison précise, c'est qu'il y avait 3 600 000 euros d'impayés sur les factures de chauffage et d'eau chaude sanitaire. In extremis, à fin 2012, un accord a été trouvé.
C'est une copropriété qui est donc en grande difficulté, mais qui est aussi -je l'ai dit tout à l'heure- la deuxième plus grosse copropriété de France avec 17 000 habitants. Un accord a été trouvé pour un engagement ferme de 16 mois, moyennant le versement d'une caution par la copropriété d'un million d'euros.
Voilà le constat, non pas de toutes les copropriétés en France, mais de beaucoup d'entre elles. On voit bien que le problème n'est pas tellement un problème technique mais de financement. Comment faire en sorte que les travaux de rénovation énergétique dans les copropriétés soient menés dans des conditions satisfaisantes et à long terme ?
L'élément clé de la loi du 12 juillet 2010 est d'imposer un audit énergétique obligatoire dans toutes les copropriétés de plus de 49 lots et qui sont antérieures à juin 2001. Quand on donne cette définition des copropriétés éligibles à l'audit énergétique obligatoire, on se rend compte que cela va toucher énormément d'immeubles.
Je l'ai rappelé précédemment on a effectivement une grande proportion de ces immeubles qui sont antérieurs aux années 80.
L'audit énergétique obligatoire se mettra en place dans un délai très serré puisque le décret de janvier 2012 (décret n° 2012-111 du 27 janvier 2012 N° Lexbase : L8945IRQ) prévoit qu'avant le 1er janvier 2017 tous les syndics devront proposer au vote à l'assemblée générale le choix d'un diagnostiqueur qui devra établir cet audit énergétique obligatoire.
Comment cet audit énergétique va-t-il se réaliser ? Là aussi le décret de janvier 2012 est extrêmement précis pour une raison simple, c'est qu'on veut éviter de revenir sur ce qui a été fait jusqu'à présent avec les DPE, on veut fiabiliser l'information donnée aux copropriétaires, donc on est très précis dans la rédaction de l'audit énergétique.
Il se déroule de la façon suivante : d'abord par une étude sur dossier de l'immeuble, sur la qualité du bâti, sur son système de chauffage, refroidissement, sur la ventilation, l'éclairage ; le diagnostiqueur va procéder à l'examen de l'ensemble des contrats d'exploitation de maintenance de la copropriété, c'est la première étape.
La deuxième étape va consister à faire un questionnaire. Celui-ci sera remis aux occupants et permettra de cerner quelles sont leurs attentes, quel est aussi leur sentiment vis-à-vis du confort thermique qu'ils ressentent dans leur logement.
Troisième étape, le diagnostiqueur va procéder à certaines visites, non pas de tous les logements, mais par sondages, en vérité, qui seront très utiles pour percevoir quelles sont les modifications qui ont été faites dans les logements. J'entends par là la question des loggias qui sont intégrées dans les balcons et qui sont des parties non chauffées qui viennent donc en plus sur la consommation énergétique. Ces visites permettront de se rendre compte de l'état de vétusté du logement en matière de ventilation, de normes électriques. Elles permettront de ressentir un peu mieux quelle est la préoccupation de l'occupant en matière de confort thermique.
La quatrième étape consiste à dresser le DPE et ensuite à dresser surtout la quantité prévisionnelle des dépenses énergétiques avec, en parallèle, le coût financier que cela représente cette consommation énergétique dans l'état actuel du logement.
Ensuite on attaque le point dur, le point très utile de l'audit énergétique. Cela consiste à faire des préconisations en matière d'utilisation des équipements et surtout à proposer des scénarii de travaux de rénovation énergétique possibles pour la copropriété, pas un seul scénario mais plusieurs en fonction du niveau de l'investissement qu'on souhaite réaliser, qu'on est capable de réaliser pour une copropriété et du gain espérer théorique.
Voilà l'audit énergétique tel qu'il se présentera pour toutes les copropriétés de plus de 49 lots avant le 1er janvier 2017.
Le calendrier serré cela veut dire également que si le rapport d'audit énergétique est remis avant 2017, étant donné qu'on met à peu près entre 2 et 5 ans pour voter des travaux et la suite, cela veut dire que l'ensemble du parc immobilier français sera converti à l'horizon 2020/2025, et vous comprenez là que cela va aller très vite et de manière très massive.
Enfin, il n'y a pas de possibilité de mettre en oeuvre les travaux de rénovation énergétique s'il n'y a pas d'étude sur l'aspect financement, qui est le point central du problème avec le Grenelle. Pour financer de tels travaux, et le rapport de l'audit énergétique va servir à cela, va servir en réalité à présenter à l'assemblée générale, avec l'intervention des diagnostiqueurs lors de l'assemblée, à présenter les propositions de travaux possibles et à les faire voter inévitablement.
Le financement pourra être assuré de plusieurs façons. La première consistera à procéder à des appels de fonds. Le problème des appels de fonds pour des travaux d'une telle ampleur -on parle de 5 000 à 20 000 euros par logement, en vérité on verra que c'est plus proche de 5 000 que de 20 000 euros- c'est quand même une somme.
On peut procéder par appels de fonds de manière très classique. Le problème c'est que l'échelonnement en matière d'appels de fonds se fait sur deux à huit trimestres, ce qui est court pour des travaux de cette ampleur.
La deuxième solution en matière d'appels de fonds consiste à créer un fonds spécial, ce qui se pratique aussi assez couramment. On engage des plans de travaux pluriannuels sur de plus longues périodes, 5 à 10 ans environ et on a surtout recours aux emprunts ; ce sera l'avenir probablement.
Le recours aux emprunts on le connaissait déjà en 2009 ; cela consistait à mandater le syndic en assemblée générale pour négocier au nom de chaque copropriétaire, un emprunt avec une banque. L'inconvénient de cette pratique c'est que d'une part le remboursement était assez court, sur 5 à 7 ans et que d'autre part le principal inconvénient c'est qu'il reposait sur la bonne volonté des copropriétaires. Chaque copropriétaire devait signer l'offre de prêt.
En 2009, est intervenu heureusement l'Eco-PTZ individuel. L'Eco-PTZ présente beaucoup d'avantages et c'est le levier principal pour la mise en place de financements. Il est attribué sans conditions de ressources, il entre dans un volume de prêts, maximum 30 000 euros, qui correspond exactement à ce dont les copropriétaires ont besoin pour financer ces travaux-là. Enfin, il peut se rembourser sur une période plus longue, 10 voire 15 ans si on a plus de trois séries de travaux, puisque l'Eco-PTZ consiste à débloquer un prêt dès lors qu'il y a un bouquet de travaux ; mais, en l'occurrence ce n'est pas un inconvénient puisque systématiquement la régulation énergétique des bâtiments, nous le verrons, passe par la mise en place d'un bouquet de travaux, intervention sur plusieurs lots.
Et puis la loi de finances rectificative pour 2011 (loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 N° Lexbase : L4994IRE) a étendu l'Eco-PTZ aux copropriétés spécifiquement à travers le PTZ collectif et qui, ici, consiste à débloquer un prêt pour la copropriété, c'est le syndicat des copropriétaires qui souscrit au PTZ collectif. Celui-ci permet d'être cumulé aussi avec l'Eco-PTZ individuel, ce qui permet de coupler les travaux à la fois sur les parties communes et sur les parties privatives d'intérêt commun, ce qui est réellement très utile nous le verrons.
Voilà pour le financement. Il ne faut pas oublier également la possibilité d'obtenir des subventions de l'ANAH. La principale subvention de l'ANAH, la subvention de base qui, elle, évidemment est soumise à des conditions de ressources, revenus modestes, très modestes, comme je l'ai exposé précédemment, cette subvention permet effectivement un déblocage à hauteur de 20 à 35 % en fonction des revenus du montant des travaux engagés dans la limite de 20 000 euros hors taxes.
On a également la possibilité d'avoir des aides et des subventions de différentes collectivités publiques, Région, Département, Etat, parfois les villes aussi et la DME peut aussi débloquer sous condition que les travaux qui sont engagés entrent dans le cadre du label BBC rénovation. La DME peut débloquer des subventions également au bénéfice des copropriétaires.
En ce qui concerne maintenant la mise en place de ces travaux les travaux se présentent sous la forme systématiquement -il faut bien le dire- de bouquets, et donc le législateur, avec le décret du 3 décembre 2012 (décret n° 2012-1342 N° Lexbase : L5590IUL) a institutionnalisé ce procédé, cette méthode de rénovation qui consiste à créer un bouquet de travaux.
On intervient sur plusieurs séries de parties communes ou privatives de l'ensemble immobilier et il l'a institutionnalisé au travers de la création de trois articles dans le Code de la construction et de l'habitation : R. 138-1 (N° Lexbase : L5752IUL), R. 138-2 (N° Lexbase : L5753IUM), R. 138-3 (N° Lexbase : L5754IUN). C'est l'article R. 138-2 surtout qui nous intéresse ici, puisqu'il liste précisément les séries de travaux qui entrent dans le cadre des plans pluriannuels de travaux de rénovation énergétique qu'a voulu le législateur. Je ne vais pas les lister ici, on a 9 interventions possibles sur les parties communes, toiture, mur périphérique. On a également des interventions sur la ventilation d'éclairage, il ne faut pas l'oublier et puis on a des séries d'interventions également avec cet article R. 138-2 sur des parties privatives qui sont des parties privatives déclarées d'intérêt commun, en l'occurrence principalement les ouvertures, les fenêtres et aussi le comptage individuel d'eau qui sera aussi une priorité dans l'avenir.
On voit donc très précisément que grâce à ce couplage des travaux votés en une seule fois en assemblée générale, qui touchent à la fois des parties communes, qui seront supportés par la copropriété, et des travaux sur les parties privatives d'intérêt commun qui, eux, seront à la charge de chaque copropriétaire. L'article R. 138-2 nous dit : "mise à la charge dans un délai raisonnable", c'est-à-dire que les copropriétaires devront engager ces travaux qui auront été votés dans un délai raisonnable.
On voit bien qu'il y a là la volonté de coupler cela avec les Eco-PTZ individuels et les Eco- PTZ collectifs. La volonté de coupler l'ensemble de ces travaux en une seule fois se manifeste aussi par le fait que le syndic est le maître d'ouvrage unique pour tous ces travaux-là, le syndic surveille seul, prend seul la direction des travaux avec les architectes et les constructeurs et à la fin de ces travaux, c'est lui qui donne le délai de réception pour ce qui est des parties privatives d'intérêt commun à chaque copropriétaire, qui leur donne également des attestations d'assurance pour ensuite faire fonctionner les garanties.
En ce qui concerne maintenant les exemples concrets, je vais passer rapidement sur le label BBC rénovation, parce que le temps va me manquer. Sachez simplement que la grande initiative de l'arrêté de septembre 2009, cela a été de dupliquer ce qui a été fait avec le Grenelle de l'Environnement pour les travaux neufs, les travaux sur les immeubles neufs à l'ancien, à l'existant.
Jusqu'à 2009, il n'y avait pas réellement de normes en matière de performance énergétique. On avait ce qu'on appelait la RT globale depuis 2007, mais la RT globale ne prenait en compte que les dépenses énergétiques en matière de chauffage et d'eau chaude sanitaire, pas la dépense énergétique globale de l'habitation, et puis par ailleurs, la RT globale s'appliquait à assez peu de rénovations d'une grande superficie.
L'arrêté de septembre 2009 copie ce qui se faisait déjà de manière conventionnelle à travers les labels énergies et a mis en place le label BBC rénovation qui est le principal label, qui sera utile pour les travaux de rénovation dans les copropriétés. C'est un label qui prescrit un seuil de performance à 80 kilos watt/heure d'énergie primaire du mètre carré par an, donc en gros un facteur 4 puisque la moyenne des consommations pours bâtiments existants c'est de 100, 150 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré par an.
Evidemment comme pour le neuf, comme pour la RT 2012, on a un élément de pondération qui dépend d'une part des zones géographiques, on a 8 zones géographiques en France et trois niveaux d'acétimétrie, 0/400 mètres, 400/800 mètres d'altitude et plus de 800 m d'altitude.
Ces indices de pondérations font en sorte qu'en France, concrètement sur des travaux de rénovation énergétique, on va varier de 64 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré par an de consommation - par exemple pour la Corse, pour le sud-est de la France -, à des valeurs de l'ordre de 112 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré et par an pour des zones en haute montagne, les Alpes ou les Pyrénées, les Hautes Pyrénées.
On a également, nous dit l'arrêté de septembre 2009, un label qui est une sorte de label dégradé qui s'appelle le HP2 rénovation, qui ne présente pas concrètement beaucoup d'intérêt parce que les valeurs sont des valeurs assez élevées. On est à 150 kilos watt/heure d'énergie primaire du mètre carré par an, qui sont des valeurs, on le verra, très facilement atteignables en matière de rénovation.
Le label HP2 n'aura pas un grand avenir à mon sens, c'est surtout le label rénovation qui sera la norme en matière de rénovation énergétique retenez-le.
- Le premier exemple se passe à côté de Chartres.
Il s'agit d'une résidence des années 1962 qui s'appelle les Acacias et qui avait une consommation d'énergie primaire, nous dit le diagnostic effectué en 2006, d'environ 200 kilos watt/heure du mètre carré par an. C'est une copropriété typique des années 60, très mal isolée avec un chauffage collectif, qui est occupée par 67% de copropriétaires. C'est très important pour la réussite des votations de travaux. Plus on a de copropriétaires occupants et plus on a de chance que les travaux soient adoptés sans difficulté. Les propriétaires qui sont bailleurs sont moins motivés pour mettre en place des travaux de rénovation énergétique. C'est plus difficile, plus lourd.
Pour cette copropriété, les travaux ont consisté à mettre tout simplement en place de la rénovation de la toiture terrasse, avec un isolant de 11 cm en polystyrène extrudé. On a également isolé les parois en béton avec 11 cm de polystyrène extrudé là aussi.
Pour les rénovations énergétiques à venir, je préfère vous prévenir qu'il faut aimer le polystyrène, c'est le matériau de base qui sera employé pour l'isolation j'en ai peur !
On a également procédé au changement -c'est un grand classique- des fenêtres par du double vitrage avec isolation renforcée des volets et dès la première année la copropriété a obtenu 40% d'économie d'énergie sur ses dépenses de chauffage, le retour sur investissement est assez rapide finalement.
- Le deuxième exemple que je peux citer qui est plus intéressant parce que plus difficile, c'est une résidence qui s'appelle "les bords de Sèvre", qui est une résidence qui est à Nantes en Loire-Atlantique.
Là, il s'agissait de rénover une tour de 15 étages qui affichait une consommation d'énergie primaire pas mauvaise, 150 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré par an, ce qui est plutôt bon pour un bâtiment des années 70, 1971 en l'occurrence.
Les travaux ont consisté très classiquement d'abord à améliorer le système d'isolation en toiture terrasse comme d'habitude, également à rénover et à changer les fenêtres, les ouvertures, ce qui a été plus compliqué parce que, sur les balcons, des loggias avaient été intégrées par les copropriétaires au fil des années et cela représentait quand même 34 % du montant des travaux engagés.
Il y avait un million d'euros hors taxes de travaux engagés sur cette rénovation et 34 % de cette somme étaient affectés au changement des fenêtres. Finalement, très peu pour la toiture terrasse qui est pourtant un des points de déperdition thermique les plus importants parce que la chaleur s'évacue principalement par les ouvertures et par le toit, que ce soit pour les maisons individuelles ou pour un immeuble, cela ne change pas grand-chose.
Et puis on a également l'isolation classique aussi des voiles béton avec là aussi du polystyrène extrudé et du polyuréthane.
Au final, on a abouti à une consommation d'énergie primaire qui est très intéressante puisqu'on est tombé à 50 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré par an et là on est en dessous du label BBC rénovation.
Ce qui est intéressant c'est d'étudier là aussi quelle est la modification des dépenses pour une copropriété. Avant les travaux, le chauffage représentait 50 % de la dépense énergétique pour cette copropriété-là. L'eau chaude sanitaire 25 %. Après les travaux on a toujours 25 % d'eau chaude sanitaire, en revanche au niveau du chauffage on tombe à 10 % et 10 % c'est le même niveau de dépenses énergétiques que la ventilation de l'éclairage du bâtiment.
Vous voyez que le gain est immédiat, il est très rapide et le retour sur investissement est assez important ; donc les travaux de rénovation énergétiques, ce n'est pas un pis-aller, ce n'est pas une chimère, c'est réellement intéressant pour les copropriétés.
- Le troisième exemple que je souhaite donner se situe dans le 12ème arrondissement de Paris.
Les travaux, je crois, sont toujours en cours, il s'agit de la Fontaine d'Aligre qui est un immeuble, là-aussi une barre qui illustre parfaitement l'architecture des années 70, une barre de 10 étages avec 80% de surface vitrée.
Un des gros avantages du vote en assemblée générale des travaux de rénovation, cela a été la présence majoritaire, écrasante des copropriétaires occupants. Je crois qu'on était à plus de 80 % de copropriétaires occupants sur cette résidence. C'est très important encore une fois pour l'acceptation de ce financement-là.
On était donc à 236 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré et par an, et l'objectif, je pense qu'il sera atteint parce qu'il est réaliste, est de 127 kilos watt/heure d'énergie primaire par mètre carré et par an, avec classiquement isolation du pignon, changement des doubles vitrages et isolation de la toiture terrasse.
Le coût moyen de ces travaux sur ces trois résidences oscille entre 5 000 et 7 000 euros par logement ; principalement d'ailleurs les copropriétaires ont eu recours au financement par l'intervention de l'Eco-PTZ individuel à l'époque.
Il ne faut pas oublier que l'Etat et les régions ont un intérêt particulier à financer les études et les diagnostics. En l'occurrence pour la Fontaine d'Aligre, je crois que c'est 70 % du montant de l'audit énergétique qui a été financé par les collectivités et notamment par la ville de Paris. A bon entendeur, si vous avez des audits énergétiques à réaliser dans les prochaines années, c'est toujours intéressant d'avoir cette information-là".
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par Patrick Baudouin, Avocat à la cour d'appel de Paris
Le 06 Juin 2013
"Pour les travaux à l'initiative du copropriétaire, je pense qu'il y a deux points principaux qui peuvent être étudiés, l'un étant d'ailleurs plus riche et plus important que l'autre. On commencera par le plus rapide, le premier, ce sont les travaux effectués par les copropriétaires sur leur partie privative et le deuxième, ce sont les travaux effectués par les copropriétaires sur les parties communes.
1. Les travaux effectués par les copropriétaires sur leur partie privative
Le principe c'est celui de la libre exécution ; comme tout principe, il a quelques limites. Le principe c'est celui de la libre exécution, ce sont les dispositions que vous connaissez de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4861AHI) qui prévoient que chaque copropriétaire use et jouit librement de ses parties privatives.
Dans la mesure où les travaux ne concernent que les parties privatives sans affecter les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, le principe c'est que les copropriétaires sont totalement libres de réaliser les travaux.
Il en découle que des clauses de règlement de copropriété, certains règlements de copropriété un peu anciens, qui posent des conditions ou précisent des modalités spécifiques pour l'exécution de ce type de travaux, doivent être réputées non écrites sur le fondement de l'article 43 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4850AH4), dès lors que ces dispositions entraînent une restriction non justifiée aux droits des copropriétaires.
Il en résulte qu'un copropriétaire peut par exemple, en principe, pratiquer une ouverture dans une cloison partie privative, cloison non porteuse ou même concéder à la suppression de cette cloison. On verra qu'il peut quand même y avoir un petit bémol même sur ce sujet.
Donc le principe est simple. Les limites aux principes : elles ne sont pas considérables, mais il faut les évoquer tout de même et il convient d'être vigilant dans certaines circonstances, pour le copropriétaire qui souhaite exécuter des travaux dans ses parties privatives.
En effet, certains travaux en partie privative peuvent avoir des incidences sur l'immeuble au sens large. Justement on évoquait les cloisons à l'instant, il peut en aller ainsi dans le cas de travaux de suppression d'une cloison qui, au fil du temps, et on voit cela assez fréquemment à Paris, dans un certain nombre d'immeubles où des cloisons qui, au départ, n'étaient pas porteuses, au fil du temps le sont devenues ; donc le copropriétaire qui entreprend des travaux de suppression des cloisons de cette nature risque d'affecter la solidité de l'immeuble et risque aussi de voir sa responsabilité engagée si, du fait de ces travaux, il en vient à occasionner des désordres dans les appartements situés aux étages inférieurs ou supérieurs, et en particulier des fissures. Il y a jurisprudence d'ailleurs assez nombreuse là-dessus.
On peut citer un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 24 septembre 2003 (Cass. civ. 3, 24 septembre 2003, n° 01-17.733, FS-D N° Lexbase : A6283C9L) qui est paru dans la revue "Administrer" de juin 2004, en page 52.
Dans ce cas, il pourra être prudent de soumettre malgré tout le projet de travaux à l'avis de l'architecte de l'immeuble, même si le règlement de copropriété ne contient pas de clause spécifique de cette nature.
Autrement dit, la liberté du copropriétaire d'exécuter des travaux en partie privative trouve sa limite par rapport à deux critères essentiels en matière de copropriété, deux critères qu'on retrouve dans beaucoup d'autres domaines du droit de la copropriété.
Je pensais par exemple à la destination des parties privatives ; d'une part, le copropriétaire ne doit pas porter atteinte à la destination de l'immeuble, c'est une constante et, d'autre part, et c'est en l'espèce le point principal, il convient de ne pas porter atteinte aux droits des autres copropriétaires. Quand le copropriétaire exécute des travaux en partie privative, il doit aussi se soucier des incidences qui peuvent survenir pour d'autres copropriétaires.
On pourrait multiplier les exemples, notamment en jurisprudence. On citera, par exemple, le remplacement d'une moquette par un parquet, le copropriétaire décide de remplacer la moquette par un parquet sauf que cela peut avoir des répercussions au niveau de l'isolation phonique à l'égard des voisins.
Dans ce cas, certaines décisions considèrent, dans des cas d'espèce, que le copropriétaire qui donc a affaibli la qualité acoustique par rapport à ses voisins se trouve être responsable (Cass. civ. 3, 15 janvier 2003, n° 01-14.472, FS-P+B N° Lexbase : A6781A4W) c'est un arrêt qui est paru au bulletin civil III, n° 4.
Il pourra en aller de même de la modification de la disposition d'un appartement, en cas de création d'une pièce humide là où il existait auparavant une pièces sèche, c'est-à-dire que vous avez des appartements qui sont disposés d'une certaine manière, il y a des salles à manger, des salons, des chambres et puis un copropriétaire va modifier la disposition, il va placer sa salle de bains là où auparavant il y avait le salon, la cuisine là où il y avait la salle à manger... Cela peut générer des désagréments acoustiques ou olfactifs et le copropriétaire, malgré la liberté qui lui est reconnue, peut voir sa responsabilité engagée. Il y a là-dessus un arrêt de la Cour de cassation du 17 janvier 1996 (Cass. civ. 3, 17 janvier 1996, n° 94-12.715 N° Lexbase : A5853CUC), paru dans la Revue des loyers 1996, page 404.
On pourrait évoquer beaucoup d'autres travaux de climatisation, par exemple l'installation d'une climatisation, des canalisations qu'on va modifier et qui pourront d'ailleurs toucher aussi aux parties communes.
Voilà en résumé pour cette première partie, la plus simple, qui concerne donc les travaux effectuées par les copropriétaires sur les parties privatives.
2. Les travaux effectués par les copropriétaires sur les parties communes
Deuxième volet, beaucoup plus riche en contentieux et en difficultés, les travaux effectués par les copropriétaires sur les parties communes, touchant les parties communes.
Là, comme vous le savez, il y a deux dispositions essentielles de la loi de 1965, l'article 25 b (N° Lexbase : L4825AH8), l'article 30, alinéa 4 (N° Lexbase : L4837AHM).
L'article 25 b prévoit la nécessité, l'obligation d'une autorisation d'assemblée générale, lorsqu'un ou plusieurs copropriétaires entendent effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble.
Quant à l'article 30, alinéa 4 de la même loi, il prévoit qu'en cas de refus de l'assemblée générale des copropriétaires, le copropriétaire qui n'a pas obtenu d'autorisation peut solliciter du tribunal l'autorisation judiciaire d'exécuter les travaux. Il faut dire que là il existe un contentieux abondant, même considérable. Je n'aborderai que rapidement l'aspect purement contentieux d'autorisation judiciaire parce que je pense que Madame Denise Jaffuel sera amenée à vous en parler tout à l'heure, donc je m'attarderai plutôt sur l'assemblée elle-même, et l'article 25 b plutôt que l'article 30 alinéa 4.
2.1. L'article 25 b de la loi du 10 juillet 1965 : l'autorisation donnée par l'assemblée générale aux copropriétaires d'effectuer des travaux touchant les parties communes
2.1.1. Quels sont les travaux qui relèvent de l'article 25 b ?
Le législateur a posé quatre conditions pour rentrer dans le cadre de l'article 25 b. Il faut qu'il s'agisse de travaux :
- qui affectent les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble ;
- exécutés par un ou plusieurs copropriétaires ;
- exécutés aux frais exclusifs des copropriétaires ;
- qui doivent, nous dit le texte, être conformes à la destination de l'immeuble.
Voici les critères pour que les travaux relèvent de cet accord à obtenir de l'assemblée générale des copropriétaires.
Quelques observations en lien avec ces définitions, je m'empresse de dire que c'est possible de survoler, mais impossible d'approfondir complètement le sujet tant il y a de jurisprudences et de contentieux sur ces questions. On abordera simplement quelques points.
2.1.1.1. Quelques exemples de travaux affectant les parties communes
L'ouverture d'un mur porteur, la création d'une trémie pour rattacher deux niveaux entre eux par un escalier intérieur, l'installation d'un ascenseur qui est, à elle seule, une mine de difficultés et aussi de conflits...
2.1.1.2. Les travaux affectant l'aspect extérieur
Il s'agit par exemple des travaux qui touchent en général aux façades de l'immeuble, l'ouverture d'une fenêtre, la pose de stores, la question aussi des enseignes. Vous voyez qu'il y a matière encore une fois, beaucoup plus étoffée que les quelques exemples.
2.1.1.3. Les travaux sur parties communes faisant l'objet d'une jouissance exclusive
Quid maintenant des travaux sur parties communes lorsque ces parties communes font l'objet d'une jouissance exclusive ?
Ce sera le cas des terrasses, des loggias, des jardins à jouissance exclusive. Est que dans ce cas du fait de la jouissance exclusive, il y a une différence ? Est-ce qu'on est soumis aux mêmes règles ?
Oui, on reste soumis au même principe, même lorsque le copropriétaire est titulaire de la jouissance exclusive de cette partie commune que sera par exemple la terrasse ou le jardin, parce que cela reste une partie commune et dès lors que cela reste une partie commune, le copropriétaire doit suivre la voie qu'il est incité à prendre, résultant de l'article 25 b.
2.1.1.4. Distinction entre les travaux qui relèvent de l'article 25 b, des travaux relevant de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965
Autre question, plus embarrassante, qui donne lieu à des appréciations parfois délicates, il s'agit de la distinction entre les travaux qui relèvent de l'article 25 b, donc les travaux eux-mêmes, des travaux qui peuvent devenir relevant de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965.
Il s'agira là de travaux qui sont des travaux toujours de parties communes, mais qui se traduisent aussi par une emprise sur les parties communes ou par un accroissement de parties privatives, du fait des travaux exécutés.
Emprise sur les parties communes : il faut bien cerner la notion de travaux qui affectent les parties communes pour la différencier de la notion d'appropriation de parties communes relevant de l'article 26. C'est d'autant plus essentiel que quand vous êtes purement sur des travaux touchant, affectant l'aspect extérieur de l'immeuble, vous pouvez saisir le juge en cas de refus, alors que si vous êtes sur le terrain de l'article 26, parce qu'il y a une emprise sur partie commune, vous n'avez pas cette possibilité d'en référer au juge pour qu'il vous donne l'autorisation judiciaire.
Là, l'examen de la jurisprudence montre que plutôt que de s'attacher à des critères quantitatifs de surface, c'est-à-dire savoir si l'emprise c'est 2 mètres carrés, 10 mètres carrés..., elle s'attache plutôt à un critère de finalité. Je vais illustrer cela du propos notamment avec les ascenseurs.
Si la partie commune affectée par les travaux concerne son usage de partie commune, elle reste bien partie commune ou, si l'élément réalisé, avant qu'elle puisse s'intégrer dans les parties communes, il faut considérer qu'il n'y a pas appropriation de parties communes.
En revanche, si la partie commune affectée se trouve soustraite à sa destination de partie commune, se trouve en quelque sorte privatisée complètement ou si son usage se trouve complètement transformé, il faut considérer qu'on se situe dans l'hypothèse d'une appropriation des parties communes ou de modification du règlement de copropriété, ce qui d'une manière ou d'une autre nécessite un vote à la majorité de l'article 26.
Un exemple simple, il y en a bien d'autres : un copropriétaire va demander une autorisation de pose d'une porte, en réalité pour s'approprier quelques mètres carrés d'un couloir commun, qui ne fera que desservir son ou ses locaux. Donc il va faire une demande d'autorisation pour la pose d'une porte. Si en réalité cette demande formulée sous le biais du travail de pose d'une porte implique une appropriation du couloir partie commune, cela relève de la majorité de l'article 26. C'est ce que dit la Cour de cassation dans un arrêt ancien, mais c'est une jurisprudence qui, je crois, n'a jamais été démentie (Cass. civ. 3, 19 décembre 1978, n° 77-13.266 N° Lexbase : A2459CXD), parue au Dalloz 1979, page 443.
Cela étant la distinction n'est pas toujours évidente.
Si on prend le cas de l'installation de l'ascenseur la jurisprudence est assez constante et elle admet que cette installation relève de l'article 25 b en tant que travaux affectant les parties communes, même si l'ascenseur, ce qui est évidemment toujours le cas, ou à peu près, a une emprise.
Pour installer un ascenseur aux frais de certains copropriétaires en parties communes, il y a forcément une emprise en partie commune, surtout si la machinerie d'ascenseur se trouve en partie basse, sauf à racheter parfois une cave qui peut être une partie privative qui sera utilisée, mais il y a une emprise. Dans ce cas, la jurisprudence considère qu'on est quand même dans le cadre de l'article 25 b. Pourquoi ?
Parce que sinon il serait pratiquement impossible sauf accord, ce ne serait pas impossible, mais cela rendrait encore plus difficile l'installation d'ascenseur puisque cela nécessiterait systématiquement le recours à la majorité de l'article 26.
Néanmoins, c'est tout de même intéressant, puisqu'on peut très bien avoir un ascenseur installé à la demande, à l'extrême limite -généralement il y a plusieurs copropriétaires- mais il peut être installé à la demande d'un seul copropriétaire, c'est un détournement de partie commune incontestable au profit de ce copropriétaire. Malgré tout on admet cette majorité article 25 b. L'arrêt de la Cour de cassation est assez intéressant (Cass. civ. 3, 10 octobre 2006, n° 05-17.565, F-D N° Lexbase : A7850DR8) paru dans la revue Administrer de janvier 2007, page 60.
Le problème va se trouver non seulement sur ces questions de travaux affectant les parties communes avec emprise, mais aussi sur une notion plus large qui pourrait être la notion d'une sorte de construction, l'édification d'une construction sur une partie commune, sur un balcon, sur une terrasse ou sur une cour à jouissance privative.
Là, c'est extraordinaire, parce que quand les demandes sont formulées par les pétitionnaires, par les copropriétaires demandeurs, il y a une grande variété d'imagination pour soumettre la demande à l'assemblée des copropriétaires, quand il s'agit en fait d'édifier la possibilité d'une construction permettant d'avoir quelques mètres carrés supplémentaires. On vous fera une demande pour une véranda, une serre, un abri, un jardin d'hiver...
Ce sera parfois le cas, mais dans d'autres cela dissimule des réalités un peu plus consistantes. Le problème se pose assez souvent quand il s'agit de fermer un balcon ou une terrasse, ou carrément d'implanter une construction de jardin.
Le critère retenu par la jurisprudence pour retenir l'application de l'article 25 b et non l'article 26 sera celui de la construction légère et démontable, et encore sous certains nuances, tout ce qui vous est dit n'est pas catégorique et parfois il faut lire un peu entre les lignes les décisions prises par les diverses juridictions, mais la dominante c'est quand même cela.
Si la construction est légère démontable on admettra que cela peut relever de l'article 25 b. Il y a un arrêt de la Cour de cassation, troisième chambre civile, 9 mars 2005 (Cass. civ. 3, 9 mars 2005, n° 03-12.596, FP-P+B N° Lexbase : A2553DHZ), paru dans la revue Loyer copropriété, 2005, commentaire n° 10.
A l'inverse, si la construction présente des caractéristiques plus solides, à plus forte raison si c'est vraiment une construction en dur, on considérera qu'elle relève de la majorité de l'article 26. Là aussi, Cour de cassation, troisième chambre civile, 4 novembre 2004 (Cass. civ. 3, 4 novembre 2004, n° 03-11.741, FS-P+B N° Lexbase : A7664DD9), paru dans la revue Administrer de mars 2005 avec observation de M. Bouillon.
Voilà donc quelques remarques sur cette difficulté à appréhender parfois l'application de l'article 25 b ou de l'article 26.
2.1.1.5. La conformité à la destination de l'immeuble
Dernier point sur ces travaux, la conformité à la destination de l'immeuble qui est aussi une des conditions que pose l'article 25 b, conformité à la destination de l'immeuble. Pour entrer dans le champ de l'article 25 b, les travaux doivent respecter la destination de l'immeuble.
C'est évidemment une notion très vaste et qui va faire l'objet, là comme souvent, d'une appréciation au cas par cas, d'où la difficulté de tracer des lignes directrices extrêmement claires sur cette notion de destination de l'immeuble.
En pratique, lorsqu'il s'agit de travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur, la notion de destination de l'immeuble va plutôt se référer à ce qu'est l'aspect, l'esthétique de l'immeuble, ce qu'est l'harmonie de l'immeuble. Il y aura donc une prise en compte par les magistrats, par les tribunaux de l'intérêt architectural et du maintien de l'harmonie architecturale de l'immeuble sur le plan esthétique.
Il y a là-dessus toute une jurisprudence en matière d'installation d'ascenseur. Généralement, les copropriétaires des étages les plus élevés sont les principaux demandeurs à l'installation des ascenseurs et ceux des étages inférieurs les plus réfractaires.
Dans Paris, dans certains quartiers, je pense en particulier aux 6ème et 7ème arrondissements, il y a de nombreuses demandes d'installation d'ascenseurs avec des copropriétaires qui vont s'opposer en disant "c'est un immeuble classé, qui a une valeur importante en terme de patrimoine, il y a un superbe escalier, une très belle entrée, vous allez installer un ascenseur qui va dénaturer l'esthétique ou l'harmonie de l'immeuble" ; c'est plutôt sur ce plan que se situera le plus souvent la notion d'appréciation de la destination de l'immeuble, entendue dans un sens très large.
Il y a plusieurs décisions, en particulier de la cour d'appel de Paris venant dire : "effectivement si c'est un immeuble qui présente des caractéristiques architecturales particulièrement remarquables, et même parfois à peine très remarquables, mais quand même importantes, on vous dira qu'on ne peut pas installer l'ascenseur, hormis l'unanimité".
De même, la jurisprudence étend un peu cette notion de destination pour dire qu'il ne doit pas y avoir de modification notable des conditions de jouissance des parties communes pour les autres copropriétaires.
On a des exemples de demandes de prolongation d'un escalier principal pour accéder au dernier niveau qui n'est pas desservi en l'état par l'escalier principal ou demande de prolongation de l'ascenseur également. On prendra en compte à la fois la destination de l'immeuble, les droits des autres copropriétaires, les atteintes à leurs modalités de jouissance, tout ceci rentrera dans le cadre de l'appréciation qui pourra être faite en cas de contestation devant les tribunaux d'un refus d'autorisation.
2.1.2. L'autorisation des travaux par l'assemblée générale
Maintenant, deuxième aspect sur ces travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble l'autorisation à proprement parler de l'assemblée générale. Là quelques observations :
Premièrement, en complément de ce que je vous indiquais, qui touche aux conditions de fond qui sont posées par l'article 25 b, il y a aussi des conditions de forme qui seront respectées par le copropriétaire qui entend solliciter l'autorisation.
Pour ceci, il faudra qu'il fasse sa demande auprès du syndic bien sûr, qu'il accompagne cette demande, d'une part, d'un projet de résolution (décret du 17 mars 1967, art. 11, 7° N° Lexbase : L5497IGP) et, d'autre part, depuis un décret du 20 avril 2010 (décret n° 2010-391 N° Lexbase : L9918IGG) qui a modifié le décret de 1967, d'un document précisant, je cite : "l'implantation et la consistance des travaux", autrement dit c'est maintenant l'article 10, alinéa 2, du décret de 1967 modifié par le décret de 2010, donc obligation de bien informer les copropriétaires sur la nature, l'implantation et la consistance des travaux, en complément des conditions de fond que nous avons vues précédemment.
Deuxièmement, l'assemblée générale se prononcera à la majorité de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965, c'est-à-dire une majorité de voix de l'ensemble des membres du syndicat des copropriétaires. Si vous avez 1000 millièmes, il faut 501 millièmes sous la réserve de la possibilité aussi d'une autorisation donnée à la majorité de l'article 25-1, c'est-à-dire que si en première lecture vous avez plus du tiers des voix des copropriétaires composant le syndicat à s'être prononcé en faveur de l'autorisation, il pourra y avoir un vote en deuxième lecture, à la majorité simple de l'article 24. Voilà pour les conditions de majorité.
Troisième point sur l'autorisation de l'assemblée ; celle-ci est en droit de donner son autorisation sous certaines conditions, et en général c'est le cas ; le mieux pour le copropriétaire qui formule une demande auprès de l'assemblée, c'est déjà, dans sa demande, de préciser les conditions auxquelles il est prêt à se soumettre.
Par exemples souscrire une assurance si les travaux portent sur le gros oeuvre, souscrire une assurance dommage ouvrage, garantir la possibilité de contrôle par l'architecte de la copropriété, s'engager à contracter avec des entreprises qualifiées, etc.; éventuellement verser une indemnité pour la gêne occasionnée au syndicat des copropriétaires, donc toute une série de choses qui peuvent relever des pouvoirs de l'assemblée générale.
Voilà pour l'essentiel.
2.2. L'article 30, alinéa 4 de la loi du 10 juillet 1965 : l'autorisation judiciaire d'effectuer certains travaux
Quelques dernières observations qui feront la transition avec l'exposé que vous fera Madame Jaffuel tout à l'heure, puisque cela touche à la fois le déroulement en quelque sorte de l'assemblée générale et donc l'autorisation donnée et aussi la possibilité ensuite de ce recours judiciaire sur le fondement de l'article 30, alinéa 4.
En effet, pour que le juge puisse être valablement saisi, sur le fondement de l'article 30, alinéa 4, il faut que l'assemblée générale dans son déroulement réponde à certaines conditions.
Quelles sont ces conditions pour qu'ensuite il puisse y avoir valablement une contestation et conditions aussi pour que le copropriétaire, parce qu'il y a un double aspect dans le contentieux judiciaire, qui a formulé la demande, puisse lui-même se mettre autant que possible, s'il obtient l'autorisation, à l'abri d'une contestation d'autres copropriétaires qui viendraient dire que son autorisation n'a pas été obtenue dans des conditions régulières ?
Par exemple, on évoquait les conditions de forme, si le copropriétaire obtient une autorisation alors qu'il n'a pas soumis aux copropriétaires un document sur la consistance exacte de ses travaux ; eh bien même ayant obtenu l'autorisation, un autre copropriétaire peut saisir le tribunal d'une demande d'annulation en disant que cette autorisation n'a pas été donnée dans les conditions légales.
D'où l'intérêt de bien respecter les conditions, aussi bien dans la perspective d'un recours d'un autre copropriétaire, si l'autorisation n'est donnée que dans la perspective pour le copropriétaire qui se verrait refuser l'autorisation d'une saisine du tribunal.
Premièrement la demande doit émaner du copropriétaire et non pas, parce que souvent en matière de travaux qui touchent à des lots commerciaux, vous aurez une demande qui sera faite par exemple pour modification de vitrine ou pour une création de trémie, au profit du locataire, au profit de l'exploitant, mais même si c'est au profit de l'exploitant, c'est le copropriétaire qui doit formuler la demande car c'est lui qui est titulaire, qui est membre du syndicat et la loi dit que c'est le copropriétaire qui doit formuler la demande.
De même ce copropriétaire doit être titulaire de droits indivis au regard de la partie commune qui va être concernée.
Ce sont des cas un peu limites, mais qui peuvent se présenter lorsque vous avez dans un immeuble à la fois partie commune générale et partie commune spéciale. Si la demande touche une partie commune spéciale du type un élément d'équipement spécial comme un ascenseur, il faut que le copropriétaire puisse justifier de droits indivis sur la partie commune concernée.
Ensuite, la demande ne peut être formée que pour des travaux relevant de l'article 25 b, on l'a déjà évoqué.
Ensuite il est impératif que l'assemblée ait refusé la demande d'autorisation pour qu'on saisisse le tribunal en cas de refus. Il faut qu'il y ait un refus express ; si l'assemblée s'est contentée de dire "on ne vote pas" ou de reporter à une assemblée ultérieure, ce n'est pas suffisant pour le copropriétaire pour lui permettre de saisir le tribunal, sauf si l'assemblée a des atermoiements, qui, en réalité, équivalent à un refus, et ce dans des conditions un peu abusives.
Les travaux doivent par ailleurs constituer une amélioration. On a vu la destination mais en plus, là, les travaux doivent constituer une amélioration. C'est ce que dit l'article 30 alinéa 4, mais cette amélioration sera interprétée comme amélioration au profit du copropriétaire, c'est-à-dire qu'il suffit que l'autorisation qu'il demande porte sur des travaux qui lui profiteront, et que ce ne soit pas une amélioration par rapport à l'ensemble des copropriétaires.
Enfin, on l'a vu, les travaux doivent être conformes à la destination de l'immeuble.
Dernier point, je pense que Mme Jaffuel y reviendra, mais ce n'est peut-être pas mauvais de le dire deux fois, c'est que pour que le juge puisse être saisi d'une demande d'autorisation judiciaire, il est indispensable que les travaux n'aient pas été réalisés et même qu'ils n'aient pas été entamés, car si le copropriétaire, qui n'a pas obtenu d'autorisation par hypothèse et qui s'est heurté à un refus de l'assemblée générale, saisit le tribunal pour demander une autorisation, mais qu'il est passé outre à l'absence d'autorisation, refus de l'assemblée, et qu'il a commencé à exécuter les travaux, à plus forte raison s'il les a entièrement réalisés, il ne peut plus obtenir du tribunal l'autorisation judiciaire, les juridictions considérant à juste titre qu'elles se trouveraient placées devant le fait accompli et qu'elles n'auraient plus la possibilité d'assortir une autorisation de conditions qu'elles sont éventuellement en droit de demander.
Voilà pour ces aspects liés à l'assemblée générale des copropriétaires. En guise de conclusion, quid de l'absence justement d'autorisation pour un copropriétaire lorsqu'il exécute des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble ?
Il faut savoir que la sanction est lourde pour lui et qu'elle est assez constante, quasiment automatique. Lorsque le copropriétaire exécute des travaux qui touchent l'aspect extérieur de l'immeuble ou qui affectent les parties communes sans autorisation ni de l'assemblée, ni judiciaire, le syndicat des copropriétaires et même tout copropriétaire au titre de la jouissance de son lot peut poursuivre en justice la démolition et la remise en état.
C'est une action qui peut être faite y compris en référé, par voie de référé, et généralement, j'ai quelques expériences dans le domaine, le juge des référés fait droit à ce type de demande.
C'est une sanction qui peut tomber en plus assez vite sous astreinte, sachant toutefois que l action doit être intentée dans le délai de 10 ans, à compter de la réalisation des travaux, qui est prévu à l'article 42, alinéa 1, de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4849AH3), puisqu'il s'agit d'une action personnelle entre le syndicat et un copropriétaire ou entre des copropriétaires selon le demandeur.
Il y a un dernier point, mais je ne vais peut-être pas l'aborder, éventuellement vous pourrez me poser des questions parce que je ne voudrais pas abuser de mon temps de parole par rapport aux autres intervenants, qui est la possibilité -on quitte là ce que nous venons de voir c'est-à-dire les points que j'envisageais, qui est peut-être moins important, bien qu'il soulève aujourd'hui diverses questions- pour le copropriétaire d'exercer son droit de surélever ou de construire lorsqu'il tire son droit de son titre de propriété, voire du règlement de copropriété ou lorsqu'il obtient une cession de droit de surélever ou du droit de construire sur le sol commun.
Là c'est bien le copropriétaire qui entreprendra aussi des travaux de surélévation ou de construction mais dans un tout autre registre. Ce sont les articles, soit 35 (N° Lexbase : L4841AHR), soit 37 (N° Lexbase : L4843AHT) de la loi du 10 juillet 1965".
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par Michel Vassiliades, syndic expert judiciaire près la cour d'appel de Paris
Le 06 Juin 2013
"La notion d'urgence est définie ainsi :
- dans le dictionnaire, ce sont des travaux à réaliser sans délai et qui ne peuvent être différés ;
- dans le Code de la copropriété, nous avons deux articles principaux ; l'article 14 de la loi de 1965 (N° Lexbase : L4807AHI), qui dit que le syndicat des copropriétaires, qui est une personne civile, est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers et a pour responsabilité la conservation de l'immeuble ; c'est la partie la plus intéressante, conservation de l'immeuble ; il faut retenir ce terme de l'article 14 car nous avons un deuxième terme dans l'article 18, alinéa 2, de la même loi (N° Lexbase : L4813AHQ), qui concerne le syndic qui est le mandataire du syndicat des copropriétaires et qui donc, au final, sera celui qui agit dans le cadre de ces travaux urgents. Cet article 18-2 dit que : "en cas d'urgence le syndic doit de lui-même agir immédiatement".
Donc, si c'est cela la définition, je ne pense pas qu'on soit très avancé, car il faut savoir quels sont les travaux qui relèvent de cette urgence ; dans ce cas-là ce qui est à cibler ce sont les travaux.
C'est ce que nous allons tenter de faire dans une première partie, la notion de travaux urgents et les obligations de syndic à travers les textes et la jurisprudence. Dans la deuxième partie nous tenterons de dégager les possibilités de la mise en jeu et de la responsabilité du syndic.
1. La notion de travaux urgents et les obligations du syndic
1.1. La notion de travaux urgents
La notion de travaux urgents, commençons par essayer de les définir.
Je vous propose de reprendre le code et d'aller voir l'article 45 du décret (décret n° 67-223 du 17 mars 1967, art. 45 N° Lexbase : L5549IGM), qui ne nécessite pas de décisions d'assemblée générale, qui sont les fameux travaux dont on vous a parlé ce matin d'entretien courant et qui sont à l'initiative du syndic puisque c est normalement du quotidien.
Ce type de travaux va jusqu'au changement de pompe de chaudière par exemple, autrement dit ce n'est pas une question de coût, c'est une question de répétition, de travaux récurrents.
Une fois que nous avons perçu cette définition de l'article 45 du décret, nous revenons vers l'article 44 (N° Lexbase : L5547IGK) qui nous dit que les travaux exceptionnels sont exceptionnels parce qu'ils nécessitent une décision de l'assemblée générale. Vous savez que nous sommes dans un système démocratique en copropriété et que tout passe par l'assemblée générale. Le syndic ne peut rien faire sans une décision d'assemblée générale, à l'exception de ce que nous verrons tout à l'heure probablement.
Le texte de l'article 18-2 utilise un terme -je ne sais pas si je vous l'ai déjà dit- qui est le mot "sauvegarde", c'est-à-dire que le syndic doit agir dans l'urgence pour la sauvegarde de l'immeuble. Dans l'article 14, on nous dit que le syndicat assure la conservation de l'immeuble, le syndic, lui, doit agir pour la sauvegarde, ce sont deux notions.
Monsieur le Président Terrier, de la troisième chambre civile nous a cité ce matin un arrêt qui est très important, et que j'avais relevé, du 20 septembre 2011 de la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 20 septembre 2011, n° 10-30.794, F-D N° Lexbase : A9545HXS) qui a reproché à la cour d'appel d'avoir utilisé le terme de conservation au lieu de sauvegarde, mais n'avait pas sanctionné spécialement ce fait là ; la sanction portait plutôt sur une mauvaise information ou une absence d'information des copropriétaires, mais il y a aussi dans cet arrêt une sanction pour une absence de convocation d'assemblée générale. Nous verrons ces obligations dans un moment.
Pour essayer de cibler, toujours pour ces travaux, je vous propose de regarder rapidement la jurisprudence la plus récente que j'ai pu relever, à travers ces exemples, pour vous donner une idée de ce qui peut relever de l'urgence et nous verrons tout à l'heure peut-être qu'il y a des travaux qui ne relèvent pas de l'urgence.
On vous en a dit un mot ce matin également, toujours pour cet arrêt de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 7 février 2012, n° 11-11.051, F-D N° Lexbase : A3656ICE), du dépassement de budget. On vous a parlé des ascenseurs qui avaient été votés en assemblée générale. Le syndic avait fait des travaux pour 23 000 euros et en avait dépensé 33 000, cet arrêt disait qu'il n'y avait pas de notion d'urgence.
Mais dans les travaux d'urgence que j'ai pu relever, à titre d'exemple, nous avons des défauts d'étanchéité toiture-terrasse. Dans toute ma carrière, des procédures en malfaçon pour des problèmes d'étanchéité il y en a eues. C'est un arrêt de la cour d'appel de Toulouse, du 9 juillet 2012 (CA Toulouse, 9 juillet 2012, n° 11/02160 N° Lexbase : A6372IQ3).
Un arrêt de la Cour de cassation du 10 janvier 2012 (Cass. civ. 3, 10 janvier 2012, n° 10-26.207, F-D N° Lexbase : A8048IAC) sanctionnait : des travaux de canalisations fuyardes passant en cave ; la réparation de balcons déclarés dangereux pour la sécurité des copropriétaires, des personnes accédant dans la copropriété ou qui y résidaient ; des infiltrations dans les appartements par fissures de façades traversantes.
Des réparations de canalisations d'eaux pluviales ayant causé 38 sinistres dégâts des eaux. C'est un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 1er février 2010 (CA Versailles, 4ème ch., 1er février 2010, n° 08/06579 N° Lexbase : A2032EW8).
Des travaux nécessaires à la consolidation des structures d'un immeuble qui avait fait l'objet de plusieurs arrêtés municipaux de péril. C'est un arrêt de la Cour de cassation du 6 février 2002 (Cass. civ. 3, 6 février 2002, n° 00-17.324, FS-P+B N° Lexbase : A9282AX3).
Les souches de cheminées menaçant ruine.
Le remplacement d'une chaudière qui tombe en panne ou qui est hors service définitivement en plein hiver et autre exemple, réparation du collecteur d'égouts.
Donc les responsabilités du mandataire, le syndic relève, je vous le disais, dans ce cas de figure, le principe de sauvegarde, mais auparavant je voudrais vous rappeler que le responsable ou le coresponsable vis-à-vis des tiers c'est le syndicat des copropriétaires, car il a pour objet, ne l'oublions pas, la conservation et l'administration des parties communes.
N'oubliez pas également que ces travaux urgents concernent les parties communes ou les services collectifs puisque les structures sont généralement parties communes, toujours, et les services collectifs également.
1.2. L'intervention du syndic en cas d'urgence
Les missions du syndic qui l'engagent relèvent de l'article 18 de la loi puisqu'il doit prendre une initiative pour faire exécuter, dit le texte, tous les travaux nécessaires à la sauvegarde. Comment se déroule cette intervention du syndic ?
Sur le terrain, je vais vous en donner le descriptif. L'ordre chronologique de son action dans ce cas de figure :
- il part de la mise en sécurité de l'immeuble immédiatement ;
- il informe tous les copropriétaires -c'est une obligation dont à a parlé tout à l'heure à propos d'un autre texte- par tout moyen, à savoir affichage ou lettre circulaire, le législateur n'a pas précisé comment informer les copropriétaires, donc la jurisprudence dit " par tout moyen, affichage ou lettre " ;
- il convoque immédiatement une assemblée générale. Là aussi, il n'est pas tenu de respecter les délais de l'article 9 du décret de 1967 ; c'est-à-dire les 21 jours retenus ou le délai qui pourrait être inscrit dans un règlement de copropriété ; donc il n'a pas de délai à respecter ; il convoque une assemblée générale sans joindre le devis qu'il a fait établir dans les plus brefs délais puisqu'il ne l'a pas au jour où il convoque et il peut -la jurisprudence l'autorise- le présenter à l'assemblée générale qu'il a convoquée ;
- enfin, un élément important, on vous a dit ce matin que les travaux à l'article 24 pouvaient relever du mandat donné au conseil syndical. Cela a été dit, c'est une bonne chose à remarquer, car ces travaux-là urgents se votent à l'article 24. Je le dis parce que dans ma conclusion je ferai allusion à quelque chose.
Voilà comment se passe la convocation de l'assemblée générale dans l'urgence pour des travaux qui menacent l'immeuble ou le service collectif.
Pour continuer sur ce que doit faire le syndic dans l'urgence, évidemment pour ces travaux, il lui faut de l'argent ; donc il est autorisé par un article 37, paragraphe 2 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5532IGY) à lancer immédiatement un appel de fonds, après avoir pris l'avis du conseil syndical.
Cet appel de fonds ne pourra dépasser le tiers du montant du devis estimatif et pour le reste il sera obligé d'attendre l'assemblée générale qu'il doit convoquer pour poursuivre les demandes auprès des copropriétaires.
Une fois que nous avons cadré ce que doit faire le syndic dans le cadre d'une situation d'urgence et après vous avoir indiqué qu'il a un pouvoir d'initiative, mais encadré, voyons comment on peut mettre et qui peut mettre sa responsabilité en jeu et pour quel motif.
2. La responsabilité du syndic au titre des travaux urgents
2.1. Les erreurs du syndic
Ce que sanctionne la jurisprudence, ce sont des erreurs du syndic souvent et je vais vous les citer. Elles sont regroupées en trois familles qui sont :
- le défaut d'action ou action tardive du syndic ;
- le défaut d'urgence ;
- le défaut de convocation d'une assemblée générale immédiate.
2.1.1. Le défaut d'action ou action tardive
La cour d'appel de Toulouse (CA Toulouse, 9 juillet 2012, n° 11/02160, préc.) a sanctionné un syndic qui n'avait fait preuve ni de l'efficacité, ni de la célérité qui s'imposaient pour remédier aux défauts d'étanchéité d'une toiture terrasse, donc efficacité, célérité.
La cour d'appel de Versailles (CA Versailles, 28 mars 2011, n° 09/09630 N° Lexbase : A7709HMH) a sanctionné un syndic qui n'a pas fait réparer une colonne d'eaux usées, ce qui a occasionné énormément de dégâts dans un appartement.
Un arrêt de la cour d'appel de Paris du 6 juillet 2006 (CA Paris, 23ème ch., sect. B, 6 juillet 2006, n° 120936 N° Lexbase : A6736DRW) a sanctionné un syndic qui, à la suite d'un incendie dans un parking, n'a réparé la porte de parking qu'un an après.
En revanche, un arrêt de la Cour de cassation du 6 février 2002 (Cass. civ. 3, 6 février 2002, n° 00-17.324, FS-P+B, préc.), intéressant, a cassé un arrêt de la cour d'appel d'Aix qui avait condamné un syndic pour ne pas avoir réalisé des travaux urgents constatés par un expert judiciaire, sans retenir que l'assemblée générale, informée par l'expert judiciaire, avait refusé l'exécution de ces travaux urgents. Donc l'inaction du syndic dans ce cas de figure n'a pas été sanctionnée évidemment.
2.1.2. Le défaut d'urgence
Il y a aussi une erreur d'appréciation du syndic sur l'urgence. Deux exemples :
Un arrêt de la Cour de cassation du 7 février 2012 (Cass. civ. 3, 7 février 2012, n° 11-11.051, F-D, préc.) sanctionne un syndic qui fait réaliser des travaux, on vous en a parlé, sur des ascenseurs dans le cadre de l'urgence, alors même que l'assemblée générale qui avait voté ces travaux n'avait jamais fait allusion à l'urgence.
Un autre arrêt de la Cour de cassation a indiqué que la souscription pour Grigny II -les parisiens savent ce qu'est Grigny II- ce n'est pas un motif valable pour utiliser la notion d'urgence.
Mais les sanctions les plus répétitives et les plus constantes, avec une jurisprudence de plusieurs années, c'est le défaut de convocation d'une assemblée générale obligatoire de par l'article 37 du décret.
2.1.3. Le défaut de convocation d'une assemblée générale immédiate
Et là, on revient, si vous le voulez bien, sur cet arrêt du 20 septembre 2011 de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 20 septembre 2011, n° 10-30.794, F-D, préc.), car il s'agissait de travaux réparatoires ; le syndic les avait réalisés. C'était réparatoire pour des infiltrations et des refoulements des eaux pluviales. Il les avait réalisés et les copropriétaires n'avaient rien payé dans la mesure où les assurances avaient pris en charge ces travaux.
Il avait fait l'erreur de ne faire ratifier ces travaux que deux ans après. C'est à cette occasion -c'est une sanction, les copropriétaires n'ayant rien payé malgré cela-, que le syndic a été sanctionné en raison de son défaut de convocation.
C'est dans ce même arrêt que la Cour de cassation a reproché à la cour d'appel de Montpellier d'avoir accepté la réalisation des travaux d'urgence sur la base de la conservation de l'immeuble au lieu de rechercher s'ils étaient nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble.
M. Terrier nous a dit ce matin que l'ère du temps de la troisième chambre civile de la Cour de cassation était pour ne pas compliquer les choses, pour adoucir les rigueurs juridiques des analyses de la Cour et que ce n'était pas trop grave d'avoir utilisé le terme de conservation au lieu de sauvegarde.
Un arrêt de la Cour de cassation du 17 janvier 2007 (Cass. civ. 3, 17 janvier 2007, n° 05-17.119, FS-P+B+I N° Lexbase : A5718DTX) a cassé un jugement du tribunal de Neuilly du 13 avril 2005 qui n'avait pas sanctionné le défaut de convocation d'une assemblée générale pour des travaux réalisés en urgence. Le tribunal d'instance de Neuilly avait considéré que faire ratifier ces travaux lors d'une assemblée approuvant les comptes était suffisant. La Cour de cassation ne l'a pas accepté.
Elle n'accepte pas non plus de considérer qu'informer les copropriétaires était suffisant. C'est un arrêt du 20 janvier 1999 (Cass. civ. 3, 20 janvier 1999, n° 97-16.735 N° Lexbase : A2276CI7) sur un jugement du tribunal d'instance de Sannois du 30 mai 1996.
Même si on ne fait qu'une partie des obligations c'est sanctionné. La Cour de cassation sanctionne, mais comment dans ce cas-là faire valider ces travaux urgents a posteriori ? Comment couvrir cette erreur ?
La solution : j'ai recherché des indices, je vais vous les donner.
Le tribunal de Sannois, lui, avait considéré qu'on pouvait poursuivre, parce que les conséquences de ces arrêts de la Cour de cassation sont très importantes.
Le copropriétaire poursuivi pour des impayés de sa quote-part sur ces travaux ne peut plus être poursuivi et le problème, on en a parlé ce matin, je crois que c'est vous Maître qui avez parlé de 700 000 euros, c'est qui va payer les quotes-parts qui ne sont pas payées par les copropriétaires défaillants au motif qu'ils utilisent un argument juridique efficace puisque la Cour de cassation a cassé ?
On ne sait pas comment couvrir puisqu'on ne peut pas le faire a posteriori, l'approbation de ces travaux. Que faire ? Je voudrais à ce moment de l'exposé vous dire pourquoi les syndics ne font pas forcément cette assemblée générale obligatoire. J'ose espérer qu'ils le connaissent tous, mais il n'y a que deux possibilités, soit le syndic est ignorant des obligations légales ou est négligeant, soit le syndic sous la pression du conseil syndical ne convoque pas cette assemblée générale.
Le premier cas de figure on l'élimine et on en vient au second, qui est la pression des copropriétaires sur le syndic. Nous sommes dans le cas de figure de travaux urgents et les textes nous disent qu'il faut les convoquer, il faut convoquer l'assemblée générale.
Que pensez-vous que l'assemblée générale des copropriétaires va faire, va aller voter ? L'assemblée générale va voter les travaux, c'est convoquer sous huit jours par exemple. Elle n'a pas le choix de l'entreprise, parce qu'en général si c'est la chaudière qui est hors service et qu'on a 0 degré on ne va pas dire : "je vais tergiverser", on répare ; donc, on vote sur un devis, les travaux sont déjà commencés.
Quel est l'intérêt, pensent les copropriétaires en général, dans la mesure où pour certaines copropriétés importantes, quand on a 100, 150 lots, la convocation de l'assemblée générale peut aller entre 5 et 10 % du coût de ces travaux. C'est uniquement cela qui motive les copropriétaires, lorsqu'ils disent au syndic : "attendez, le Conseil syndical vous couvre, pas question de convoquer l'assemblée générale parce que cela va nous faire 3-4 à 5 000 euros. Il y en a pour 20 000 euros de travaux, on ne va pas en rajouter, donc on vous couvrira et on verra cela à l'assemblée générale prochaine, pour l'approbation des comptes, on fera le tout en même temps".
Pourquoi est-ce que le syndic le fait ? Le syndic pense à son mandat, c'est clair, et donc il se dit qu'il s'il se met le conseil syndical à dos, il aura gaspillé un peu d'argent, on va le lui reprocher et par conséquent le renouvellement de son mandat sera tendu.
Je recommande aux syndics de ne pas faiblir, d'essayer de convaincre les conseils syndicaux, mais ce n'est pas gagné, de la nécessité de convoquer l'assemblée générale, compte tenu d'une jurisprudence constante et du fait qu'ils auront peut-être, le renouvellement de leur mandat, mais probablement cherchera-t-on à leur faire supporter des coûts inattendus qui ne leur auront pas profité bien entendu, puisque les travaux ont profité aux copropriétaires et non aux syndics, donc quittons un instant le plan juridique et voyons le côté moral, je vous laisse réfléchir là-dessus...
Il y a des erreurs du syndic sur l'appréciation de l'urgence. On a parlé des ascenseurs vétustes votés qui dépassent un budget, il s'abrite derrière l'urgence, parce qu'on ne va pas arrêter le chantier, on ne va pas convoquer une assemblée générale puisque celle-ci a voté des travaux -certes, on les dépasse- et le conseil syndical très certainement -on n'a pas le fin mot de l'histoire derrière cette affaire- a cautionné le syndic.
2.2. L'absence de responsabilité du syndic qui ne réalise pas les travaux d'urgence
Il y a un cas où le syndic ne fait pas d'erreur en ne réalisant pas les travaux d'urgence et qui ne relève pas du non-respect des obligations des textes. C'est le cas des infiltrations -je prends l'exemple le plus courant- en toiture-terrasse dans le cadre d'une décennale.
Lorsque l'immeuble a moins de 10 ans, il est évident que le syndic, bien que ce soit des travaux urgents, il pleut dans le séjour du copropriétaire sous toiture, il y a un seau au milieu du séjour -j'ai eu ce cas de figure- il n'est pas question de réparer cette toiture, puisqu'en expertise judiciaire il faut que .... Vous connaissez la musique tous et là, il est dans l'eau pendant 4-5 ou 7 ans, le record a été 9 ans.
Il y avait 3 500 mètres carrés de terrasses à refaire. Il n'y en avait que 2 ou 3 qui avaient des seaux et pendant 9 ou 10 ans ils ont subi... Que peuvent faire ces personnes qui rencontrent un grave préjudice ? Réclamer le dédommagement de ce préjudice, et là on est tranquille, ce ne sera pas à la charge du syndic, là-dessus on est clair, mais dans le cadre de la procédure. Encore faut-il qu'on ne puisse pas reprocher au syndic de ne pas avoir tenté de trouver une réparation amiable par la mise en jeu de l'assurance dommage ouvrage, car c'est une obligation qu'il ne faut pas oublier.
2.3. La mise en oeuvre de la responsabilité du syndic
Sur quelles bases y a-t-il responsabilité du syndic ? En général sur le fondement de l'article 1992 du Code civil (N° Lexbase : L2215ABN), mais je rappelle également que ce matin on a parlé de la faute quasi délictuelle du syndic, on l'assigne directement, mais généralement en copropriété il faut assigner le syndicat des copropriétaires puisque c'est lui qui doit la conservation de l'immeuble, c'est son objet et le syndic qui est le mandataire du syndicat des copropriétaires.
Un arrêt de la Cour de cassation du 2 octobre 2012 (Cass. civ. 3, 2 octobre 2012, n° 11-24.200, F-D N° Lexbase : A9759ITM), les références sont sur le texte, mais je ne sais pas comment nous publierons ces articles, a résumé parfaitement la procédure engagée pour la mise en cause de la responsabilité du syndic.
Le syndicat des copropriétaires et même sans faute de sa part est responsable à l'égard des copropriétaires des fautes commises par le syndic de copropriété et son mandataire dans l'exercice de ses fonction-là ; la Cour de cassation fait référence aux articles 1382 (N° Lexbase : L1488ABQ) et 1998 (N° Lexbase : L2221ABU) du Code civil. C'est l'article qui dit ceci : "le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire conformément au pouvoir qui lui a été donné. Il n'est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement".
Voilà comment mettre en jeu la responsabilité des syndics. N'y a-t-il que les copropriétaires qui puissent utiliser les erreurs du syndic ? Il y a aussi les tiers extérieurs, en ce sens que le syndic dans l'urgence passe l'ordre de travaux et omet de préciser qu'il le fait au nom du syndicat des copropriétaires. Nous avons un arrêt de la Cour de cassation du 23 septembre 2009 (Cass. civ. 3, 23 septembre 2009, n° 08-18.282, FS-D N° Lexbase : A3466ELX) qui dit que le syndic qui ne déclare pas, lors de la passation d'un marché de travaux, agir en qualité de mandataire du syndicat de copropriétaires, le syndic de copropriété s'engage personnellement à l'égard de l'entrepreneur et peut se voir actionner en paiement.
Le syndic est donc toujours responsable, le syndic doit être prudent, le syndic doit savoir résister à la pression des copropriétaires, du conseil syndical en particulier et je voudrais, à titre de conclusion, vous faire des propositions.
Conclusion
Gardez en mémoire que je ne cautionne pas l'idée que puisque le syndic a fait l'erreur, puisqu'on ne sait pas comment couvrir la non convocation de l'assemblée générale et que le copropriétaire débiteur c'est un trou dans la caisse, on pense au syndic et à ses assureurs.
Je dis "oubliez", je suis contre évidemment ! Le syndic ne peut pas être là pour faire marcher ses assurances ; C'est ce qui vient le plus souvent, c'est l'expérience du terrain, à l'esprit des copropriétaires, "vous avez une assurance, faites-la marcher, etc.".
Je fais trois propositions pour essayer de trouver un palliatif à cette rigueur législative.
Puisque nous savons que nous n'avons pas le choix, lorsqu'on convoque l'assemblée générale à chaud, les copropriétaires votent les travaux sur un seul devis ; ils n'ont pas le choix puisqu'il n'y a plus de chauffage, c'est cela ou alors... Pourquoi ne pas adopter une position médiane, à savoir que le conseil syndical serait informé et confirmerait l'urgence ?
En cas de divergence avec le syndic, et seulement dans ce cas, ce dernier convoquerait immédiatement l'assemblée générale afin de faire entériner ces travaux. Ce serait évidemment avec une limite, en cas de discordance, sinon ces travaux appuyés par le conseil syndical seraient approuvés los de l'assemblée Générale qui approuve les comptes.
Il faudrait simplement nuancer cette proposition sur le montant des travaux ; on vous a dit ce matin 700 000 euros par exemple, mais des travaux à 150 000 ou 200 000 euros, évidemment, nécessitent une assemblée générale ! Il faudrait plafonner cette proposition pour des travaux qui sont exceptionnels, urgents, mais qui n'atteignent pas des chiffres colossaux.
J'ai eu ce cas de figure sur 5 étages des colonnes à changer immédiatement, le laboratoire du rez-de-chaussée était inondé. On a fait des recherches, les pompiers sont intervenus, les policiers aussi parce qu'un des copropriétaires sur la colonne n'ouvrait pas, bref, cela nous a coûté 38 000 euros.
Il se trouve, et c'est la deuxième proposition que je vous fais, que c'est une copropriété de 330 logements et j'avais fait voter en assemblée générale, je ne sais pas si c'est très solide juridiquement, une délégation au conseil syndical d'autoriser le syndic à réaliser dans le cadre de l'urgence à due concurrence de 40 000 euros.
Lorsque l'incident a eu lieu, j'ai mis en demeure par écrit le conseil syndical de me dire sous 48 heures s'il utilisait cette délégation pour m'autoriser à réaliser ces travaux ou je convoquais l'assemblée générale. 330 copropriétaires à convoquer en recommandé AR...
Le conseil syndical a cautionné ces travaux, comme on avait une petite réserve, on a fait ces travaux qui ont été validés à l'assemblée générale suivante.
La deuxième proposition c'est donc une délégation au conseil syndical, donnée en assemblée générale, car n'oubliez pas que nous sommes dans une démocratie, l'assemblée générale a le pouvoir souverain.
La troisième proposition concerne les copropriétés de 20 lots principaux. Le syndic devrait récolter l'accord unanime des copropriétaires par écrit dans un délai de 10 jours, passé ce délai la règle générale s'appliquerait.
Je ne l'ai pas inventé, je l'ai tiré de la loi belge sur la copropriété, pour un autre cas de figure, mais j'ai trouvé que c'était astucieux.
En conclusion, je dis que le législateur qui est très prolixe dans le Code de la copropriété -voilà le Code la copropriété édition 2013, ce sont les deux éditions- je pense qu'il faudrait en supprimer 20 %, mais cela étant dit, il devrait essayer de trouver une solution pour oublier la solution de faire payer le syndic. Il a fait une faute, il faut la sanctionner, mais certainement pas en le mettant en dépôt de bilan, ce qui pourrait être le cas".
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par Denise Jaffuel, Conseiller à la cour d'appel de Paris
Le 06 Juin 2013
"La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L5536AG7) a institué un statut de la propriété immobilière raffiné et un peu abstrait, au terme duquel chaque copropriétaire a la propriété exclusive des parties privatives comprises dans son lot, lequel lot comprend nécessairement une quote-part des parties communes dont il est propriétaire indivis avec les autres copropriétaires ou certains d'entre eux s'il existe des parties communes spéciales.
Le juge saisi d'un litige de copropriété devra veiller au respect du droit de propriété de chacun des copropriétaires sur ses parties privatives, tel que défini par l'article 544 du Code civil (N° Lexbase : L3118AB4) qui est de valeur constitutionnelle et reconnue par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, même dans les rapports de droit privé.
Pour ce qui concerne les parties communes, la loi de 1965 a prévu que les décisions se prennent en assemblée générale, selon un mécanisme de démocratie directe.
Le juge devra veiller à respecter la souveraineté de l'assemblée ; respect du droit de propriété et respect de la souveraineté de l'assemblée sont deux notions essentielles, quelquefois un peu oubliées dans les débats passionnels qui opposent les parties au litige qui voudraient amener le juge soit à sacrifier le droit de propriété de l'un au nom de l'intérêt collectif de tous, soit à annuler des décisions de l'assemblée générale au seul motif qu'elles seraient inopportunes.
Certes, dans les années 2000, le législateur a donné aux juges des pouvoirs exorbitants du droit commun, tel que déposséder l'assemblée générale de son pouvoir de décision, transmis à un administrateur provisoire, ou encore ordonner la scission de la copropriété, mais le juge ne peut exercer lesdits pouvoirs que dans le cas particulier des copropriétés en difficulté.
En dehors du cas des copropriétés en difficulté, le législateur a expressément prévu dans les articles 30 (N° Lexbase : L4837AHM) et 34 (N° Lexbase : L4840AHQ) de la loi, l'intervention judiciaire dans le cadre des travaux d amélioration en donnant au juge une marge d'opportunité et presque un pouvoir d'administration, puisqu'il peut autoriser les travaux refusés par l'assemblée générale -nous l'avons vu- et/ou dispenser un copropriétaire de participer aux dépenses d'amélioration jugées somptuaires. On en a parlé ce matin.
Le législateur permet aussi au juge, dans l'article 43 de la loi (N° Lexbase : L4850AH4), de réputer non écrites certaines clauses du règlement de copropriété et si lesdites clauses concernent la répartition des charges de procéder à leur nouvelle répartition.
La jurisprudence, quant à elle, a posé les bases du contrôle du juge dans le respect du droit de propriété de la souveraineté de l'assemblée générale et des dispositions impératives de la loi de 1965 et de son décret d'application.
Ainsi le juge peut-il contrôler notamment la régularité formelle de la convocation et de la tenue de l'assemblée générale, gage que la démocratie directe s'est exercée dans des conditions royales, l'abus de majorité dans la prise des décisions ou le caractère d'urgence pour la réalisation des travaux à l'initiative du syndic qui ne peut être ni de commodité, ni de convenance.
C'est en ayant en tête ces éléments qu'il convient d'examiner l'office du juge à l'occasion des travaux de copropriété qui varie, selon qu'il est saisi d'une contestation par un copropriétaire de travaux décidés par assemblée générale, d'une action du syndicat à l'encontre du syndic ou plus généralement de l'ancien syndic pour des travaux commandés à l'initiative de ce dernier au titre de l'urgence, d'une action en responsabilité du syndicat sur le fondement notamment de l'article 14 de la loi (N° Lexbase : L4807AHI) pour vice de construction ou défaut d'entretien des parties communes, ou encore de l'action d'un copropriétaire demandant au juge l'autorisation d'effectuer, à ses frais, des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble que l'assemblée générale a refusés.
Donc, j'ai organisé en 4 situations l'office du juge afin de voir comment cet office varie selon la situation où l'on se trouve.
1. Les travaux décidés par le syndicat des copropriétaires et contestés par l'un d'eux
Analysons d'abord les travaux décidés par le syndicat des copropriétaires et contestés par l'un d'eux.
Le juge dans ce cas a le pouvoir de contrôler, si une partie le lui demande, si les travaux contestés ont été décidés à la majorité requise. Je rappelle, article 24 (N° Lexbase : L4824AH7) pour les travaux de conservation et d'entretien, article 25 (N° Lexbase : L4825AH8) pour les travaux obligatoires, 26 (N° Lexbase : L4826AH9) pour ceux d'amélioration, et si la résolution en répartit le coût conformément à l'article 10 de la loi (N° Lexbase : L4803AHD), selon qu'il porte sur des parties communes ou sur des éléments communs ou encore de l'article 30 (N° Lexbase : L4837AHM) pour les travaux d'amélioration et conformément à la répartition des charges stipulée au règlement de copropriété.
Le juge a également le pouvoir de vérifier si les documents prévus à l'article 11 du décret du 17 mars 1967 (N° Lexbase : L5497IGP), notamment plusieurs devis pour l exercice de la concurrence ou un document reprenant les conditions essentielles des contrats proposés, ont bien été notifiés aux copropriétaires au plus tard en même temps que l'ordre du jour, afin de s'assurer que ceux-ci ont eu les informations nécessaires pour se prononcer par un vote éclairé et délibérer en connaissance de cause.
Si l'une des conditions précitées n'est pas remplie, le juge annulera la résolution, mais le juge n'a pas le pouvoir d'apprécier la décision corrélée en opportunité, c'est-à-dire qu'il ne peut pas l'annuler au motif, par exemple, que des travaux de peinture décidés sur la porte d'entrée ne serviraient à rien parce qu'il faudrait préalablement refaire la porte.
J'ai aussi en tête une situation qui montre bien que le justiciable ne comprend pas toujours que le juge va vérifier la régularité, la forme, mais pas l'opportunité. Il s'agissait d'un immeuble dans Paris, un immeuble ancien qui avait été racheté par un marchand de biens, mais qui avait fait très peu de travaux et le règlement de copropriété donnait beaucoup de liberté à chacun pour organiser ses parties privatives.
Alors que les premiers travaux avaient été faits, il y avait eu quelques désordres dans l immeuble. Les copropriétaires étaient assez prudents et lorsqu'un copropriétaire est venu demander l'autorisation d'abattre une cloison, l'assemblée générale lui a dit "oui, mais il serait souhaitable que vous mettiez un IPN".
Le copropriétaire est allé devant le tribunal pour contester la résolution qui mettait cette condition à l'autorisation de travaux et parallèlement il est allé en référé pour demander la désignation d'un expert. Celui-ci a été désigné, il est venu sur place et a dit que, compte tenu des travaux que comptait faire le copropriétaire il n'y avait pas besoin de poser un IPN. Le copropriétaire est revenu devant le juge qui était saisi de sa contestation de résolution et il a dit "vous voyez, il faut annuler cette résolution, parce que je n'avais pas besoin de mettre un IPN" et il demandait au juge non pas de considérer, par exemple, que les copropriétaires auraient commis un abus de majorité en imposant une condition qui n'était pas nécessaire ; il demandait au juge de dire la vérité, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas besoin de cet IPN et en conséquence d'annuler la résolution.
La cour qui a été saisie de ce dossier n'a pas annulé la résolution parce que, en opportunité, le juge n'a pas à contrôler l'opportunité de la décision, sauf le cas échéant, s'il y avait un abus de majorité, mais fallait-il encore le soulever. C'est un exemple classique où le copropriétaire était sûr de son bon droit, il n'a pas obtenu satisfaction dans le contentieux de l'assemblée générale.
En opportunité, le juge n'a pas le pouvoir d'apprécier les décisions prises. Le juge ne peut pas non plus, si la résolution querellée ayant donné lieu à un seul vote comporte plusieurs points, en annuler certains et en valider d'autres. La seule chose que puisse faire le juge c'est soit annuler toute la résolution, soit valider l'ensemble de la résolution.
Enfin, le juge ne peut pas substituer sa décision à celle qu'il annule. Il appartient à l'assemblée, seule, dans sa souveraineté de tirer les conséquences de la résolution annulée.
2. Les travaux à l'initiative du syndic au titre de l'urgence
Monsieur Vassiliades nous en a parlé longuement, je vais résumer.
Deux points sont soumis au juge. Premièrement, l'urgence, est-ce que les travaux faits par le syndic sans décision de l'assemblée générale correspondent bien à l'urgence ? Et deuxièmement, article 37 du décret (N° Lexbase : L5532IGY), est-ce que le syndic a informé les copropriétaires et convoqué immédiatement une assemblée générale ?
Les cas d'urgence s'apprécient in concreto, sous les critères de sauvegarde de l'immeuble et si les travaux auxquels le syndic a fait procéder étaient indispensables pour parer à l'urgence. L'urgence est caractérisée si tout retard dans la réalisation des travaux compromet très gravement l'état de l'immeuble.
C'est par exemple l'éclatement d'une canalisation d'eau ou encore, on en a eu beaucoup en 1999, les toitures emportées lors de la tempête. Il est évident que c'est le cas même de l'urgence, mais quels travaux le syndic doit-il faire dans l'urgence ? Premièrement bâcher : il est incontestable et la jurisprudence est constante, que les travaux conservatoires relèvent de l'urgence.
Ce qui est un peu plus difficile à déterminer, ce sont les travaux de nature plus substantielle que l'urgence, par exemple la consolidation d'un mur ou le remplacement partiel d'une climatisation relèvent encore des travaux d'urgence que le syndic peut faire dans le cadre des initiatives qu'il peut prendre.
La jurisprudence sur ce point-là n'est pas trop rigoriste et tient compte de la situation in concreto. Cela me paraissait, lorsque j'étais encore au tribunal, connaissant la réglementation, simple.
On a les situations d'urgence, l'éclatement de la canalisation, la tempête qui emporte le toit... Il faut surtout que le syndic fasse quelque chose, donc il bâche, il fait arrêter l'inondation ; quand il va un peu plus loin, on apprécie si on est encore dans le cadre de l'urgence.
Le tribunal avait été saisi d'une situation qui sortait un peu de l'ordinaire ; je ne sais pas si vous vous souvenez, il y a eu une année où il y a eu quelques décès par légionellose. Il se trouvait que dans un immeuble cossu qui était surtout occupé par des copropriétaires retraités, à l'occasion d'un contrôle de l'eau, -on était en période des fêtes de noël- il y a eu un doute, peut-être y avait-il des légionnelles. Le syndic va faire faire, dans le cadre de ce qu'il considérait être l'urgence, quelques examens, quelques analyses supplémentaires. Les analyses confirment la ou des légionnelles, je ne sais pas très bien la formule technique.
Le syndic fait faire des travaux assez coûteux pour répondre à ce qu'il considérait une situation d'urgence puisque, selon lui, la santé des occupants était en péril. Il laisse passer les fêtes, les travaux sont faits, et deux mois et demi après il convoque une assemblée générale et les copropriétaires refusent de valider les travaux qui ont été faits. Non seulement ils refusent de valider mais en plus ils demandent en référé la désignation d'un expert. On rentre dans une expertise coûteuse, beaucoup plus que les travaux qui avaient été faits par le syndic, et lorsque l'expert rend son rapport il dit : "en fait, il y avait de la légionnelle, mais ce n'était pas dangereux". Les choses qui ont été trouvées n'étaient pas dangereuses pour la santé des occupants.
Là-dessus le syndicat engage la responsabilité du syndic pour demander paiement des travaux, mais surtout paiement de l'expertise. Il s'agissait surtout du coût de l'expertise ! La question était : "est-ce qu'on est dans un cas d'urgence ?", étant entendu que le syndic n'est pas un spécialiste, ni de la qualité des eaux, ni de la santé publique, qu'il s'était entouré d'un minimum d'informations et de mémoire parce que, ce dont je suis sûre, c'est qu'il n'y a pas eu appel de la décision rendue par le tribunal, donc les parties ont dû s'en satisfaire, mais le tribunal avait considéré qu'il n'y avait pas faute du syndic au niveau de la prise de décision de trouver une réponse à quelque chose qui pouvait être grave.
En revanche, il avait commis une faute parce qu'il n'avait pas convoqué immédiatement l'assemblée générale et puis, je ne me souviens plus dans quel sens le tribunal avait traité le problème de savoir qui devait supporter les frais de l'expertise qui était le point central finalement de la discussion.
C'est pour dire que le syndic se trouve quelquefois confronté dans ce cadre de l'initiative d'urgence à des questions qui sortent un peu des cas classiques de la porte de garage qui ne ferme pas, ou de la toiture qui s'envole.
3. Les travaux en réparation d'un vice de construction ou du défaut d'entretien des parties communes
Au terme de l'article 14 de la loi, le syndicat des copropriétaires qui a pour objet la conservation de l'immeuble, c'est-à-dire l'entretien en bon état des parties communes et des éléments d'équipements communs, est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes.
Sur le fondement de cet article 14, notamment dans le contentieux des dégâts des eaux qui est assez abondant en région parisienne et souvent après expertise, le juge condamne le syndicat non seulement à indemniser les préjudices subis par un copropriétaire et/ou son locataire, mais également à faire exécuter le cas échéant sous astreinte les travaux nécessaires pour faire cesser les désordres.
Il appartient alors à l'assemblée générale de voter les travaux prescrits en choisissant l'entreprise qui les exécutera au vu d'un devis ou d'un budget qui servira aux appels de fonds par le syndic.
Il arrive que l'expert dans son rapport préconise la réalisation de travaux de mise aux normes autres que les travaux nécessaires à la réparation des désordres. Dans la mesure où ces travaux de mise aux normes ne sont pas nécessaires à la cessation des désordres, le juge n'a pas à les ordonner, ce qui n'empêche pas l'assemblée générale des copropriétaires informée par le rapport d'expertise, de décider de faire exécuter ces travaux si elle le souhaite.
L'office du juge est identique si l'action est fondée sur les articles 1382 (N° Lexbase : L1488ABQ) ou 1384 (N° Lexbase : L1490ABS) du Code civil ou encore si elle est fondée sur le trouble anormal de voisinage qu'il s'agisse d'un dégât des eaux, de désordres acoustiques ou autres.
4. Les travaux autorisés malgré le refus du syndicat des copropriétaires
Je remercie Maître Baudoin de m'avoir laissé un peu de matière sur ce sujet.
Lorsque l'assemblée générale a refusé d'autoriser un ou plusieurs copropriétaires à effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, l'article 30, alinéa 4 (N° Lexbase : L4837AHM), donne au juge le pouvoir d'autoriser les travaux aux conditions qu'il fixe.
Pour autoriser les travaux, il n'y a pas lieu pour le juge d'annuler la décision de refus, ni de dire qu'elle est abusive, le refus préalable de l'assemblée constituant une condition de recevabilité de la demande d'autorisation judiciaire de travaux.
Il arrive que, pensant bien faire, le copropriétaire demande au juge dans la même action d'annuler la décision de refus et de l'autoriser en conséquence à réaliser les travaux ou plus souvent à titre principal d'annuler la décision de refus et à titre subsidiaire d'autoriser les travaux.
Or, d'une part, le copropriétaire n'a pas à demander en justice l'annulation de la décision du refus, puis l'autorisation judiciaire, car si le juge annulait la décision de l'assemblée générale, il ne pourrait pas examiner l'autorisation demandée, puisque le refus préalable serait anéanti par l'annulation prononcée.
D'autre part, la saisie du juge supposant un refus définitif de l'assemblée générale, la question se pose de savoir si le copropriétaire peut valablement saisir le tribunal dans le délai de deux mois de l'article 42 (N° Lexbase : L4849AH3) pour demander à titre principal l'annulation de la décision de refus et à titre subsidiaire l'autorisation de travaux, car, dans cette hypothèse, la contestation de la décision de refus empêche celle-ci de devenir définitive ; c'est une question qui se pose.
J'en conclus que demander trop peut s'avérer en l'espèce contre-productif. Il est préférable que le plaideur choisisse avec l'aide de son conseil avant d'introduire l'action, s'il souhaite voir annulée la décision de refus de l'assemblée générale ou demander l'autorisation judiciaire de travaux.
Autre point important, le juge ne peut jamais autoriser a posteriori les travaux entrepris par le copropriétaire de sa propre autorité affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble.
Si la demande lui en est faite, le juge doit ordonner la démolition de ces travaux irréguliers. En revanche, dans le cadre de son pouvoir souverain, l'assemblée générale peut ratifier de tels travaux. Le juge doit vérifier que les travaux envisagés sont conformes à la destination de l'immeuble et qu'ils constituent une amélioration sans qu'il soit nécessaire que cette amélioration bénéficie à l'ensemble des copropriétaires.
Par exemple, si un copropriétaire du rez-de-chaussée demande l'autorisation d'ériger jusqu'en toiture un conduit d'extraction des gaz brûlés pour les besoins d'un commerce, le juge refusera l'autorisation si la destination de l'immeuble est exclusivement à usage d'habitation.
Dans le cas contraire, le juge ne pourra pas refuser l'autorisation au motif que l'amélioration ne bénéficierait qu'au seul copropriétaire demandeur.
Certains auteurs en doctrine considèrent que le juge du fond possède en la matière un très large pouvoir d'appréciation, car il lui appartient de dire si les travaux envisagés constituent une amélioration et s'ils sont conformes à la destination de l'immeuble, ce point relevant également de son appréciation. Ils en déduisent que sous couvert d'une telle appréciation, le juge peut se livrer à un véritable examen de l'opportunité des travaux.
Cette approche est exacte mais en réalité dans le cadre de l'opportunité le juge va vérifier in concerto non seulement que le demandeur produit un projet abouti des travaux envisagés, que ceux-ci constituent une amélioration et qu'ils sont conformes à la destination de l'immeuble, mais également le cas échéant, après avoir ordonné une mesure d'instruction, il va vérifier que lesdits travaux projetés ne portent pas atteinte aux droits des autres copropriétaires.
Maître Baudoin parlait tout à l'heure d'un ascenseur ; pour l'ascenseur, le juge vérifiera, en général il ne va pas se déplacer sur place, il pourrait le faire, mais il n'a pas trop le temps, donc il enverra un technicien qu'il désigne pour s'assurer que si l'ascenseur empiète sur les escaliers, on pourra quand même descendre un malade sur un brancard, ou par exemple si on doit réduire les dimensions de la porte qui descend à la cave, que la dimension de la porte restante est suffisante pour l'utilisation que les autres propriétaires font des caves.
Donc cette opportunité laissée au juge c'est pour lui permettre d'apprécier in concreto la situation. J'ajoute qu'il arrive qu'entre le moment où l'assemblée refuse les travaux et le moment où le justiciable est devant le juge, il a pu demander l'avis d'un technicien pour corriger les points sur lesquels l'assemblée générale avait indiqué qu'elle conditionnait son refus ou qu'elle justifiait son refus.
Dans ces cas-là, la jurisprudence considère que le copropriétaire n'a pas besoin de retourner devant l'assemblée générale, en disant "j'ai légèrement modifié l'endroit où je vais faire passer ma cheminée", et le juge peut aussi, puisque s'il autorise les travaux c'est aux conditions qu'il fixe lui-même, dire où passerait par exemple la cheminée d'évacuation des gaz brûlés.
Si les travaux portent sur l'aspect extérieur de l'immeuble, le juge vérifiera qu'ils ne portent pas atteinte à l'harmonie ou à l'esthétique de l'immeuble, la décision sera motivée sur ces points.
En général, s'il accorde l'autorisation de travaux, le juge indique, même si on ne le lui demande pas, que ceux-ci seront réalisés sous le contrôle de l'architecte de la copropriété.
En conclusion, je dirai de manière non exhaustive, que ce sont les éléments qui m'apparaissent caractériser l'office du juge à l'occasion des travaux de copropriété et que lorsqu'il peut exercer son office pleinement le juge est heureux.
Je ne sais pas si vous avez vu, mais tout au long de l'entretien je vous ai dit "si on le lui demande", parce qu'en fait, on est en matière de procédure civile et que le juge ne peut pas faire comme on le faisait, et quelquefois c'est vrai que le juge aimerait bien se reporter dans le temps ancien, du temps où les juges parlaient en latin aux plaideurs et où le juge pouvait dire aux plaideurs "dami factum dabo tibi ius", c'est-à-dire "donne-moi le fait, je te donnerai le droit".
Le juge on l'imagine dans un geste auguste récupère les documents, il les met dans le sac, "l'affaire est dans le sac" et puis il suspend le sac au mur, le temps du délibéré.
On n'en est pas là. Aujourd'hui on a des règles de procédure civile et le juge va trancher un litige dans le cadre que fixent les parties, donc le juge doit répondre aux moyens qui sont invoqués par les parties et s'il veut soulever un moyen d'office, parce que ce moyen lui paraît être indispensable à la solution du litige, il faudra qu'il prononce la réouverture des débats pour que les parties s'expliquent sur ces points.
Cela pour vous dire que quand je dis "le juge peut, si on le lui demande", c'est que si on ne le lui demande pas et que ce n'est pas indispensable à la solution du litige, le juge se contentera de répondre aux moyens qui lui sont soumis".
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Réf. : Circulaire du 29 mai 2013, de présentation de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe (N° Lexbase : L9609IWS)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-15.001, FS-P+B (N° Lexbase : A9583KEN)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : CA Paris, Pôle 3, 2ème ch., 22 mai 2013, n° 12/10231 (N° Lexbase : A6969KDH)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : CA Agen, 15 mai 2013, n° 12/01359 (N° Lexbase : A3450KD7)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-21.781, F-P+B (N° Lexbase : A9387KEE)
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Le 12 Juin 2013
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Le 07 Juin 2013
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Réf. : Cass. crim., 15 mai 2013, n° 12-85.586, F-P+B (N° Lexbase : A9372KET)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-19.101, FS-P+B+I (N° Lexbase : A3722KEL)
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Le 06 Juin 2013
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Le 06 Juin 2013
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Le 01 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 11-25.444, FS-P+B (N° Lexbase : A9620KEZ)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-20.903, FS-P+B+I (N° Lexbase : A3723KEM)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-21.194 FS-P+B+I (N° Lexbase : A3724KEN)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-11.821, F-P+B (N° Lexbase : A9443KEH)
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Le 08 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 3, 29 mai 2013, n° 12-17.077, FS-P+B+R (N° Lexbase : A9409KE9)
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Le 06 Juin 2013
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Réf. : Cass. civ. 3, 29 mai 2013, n° 12-10.070, FS-P+B (N° Lexbase : A9665KEP)
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