Lexbase Affaires n°331 du 21 mars 2013

Lexbase Affaires - Édition n°331

Affaires

[Manifestations à venir] Les préjudices commerciaux des entreprises : analyses concrètes des principales difficultés d'évaluation

Lecture: 1 min

N6231BTX

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Le 21 Mars 2013

L'Association française des juristes d'entreprises (AFJE) et les Avocats conseils d'entreprises (ACE) organisent, le 3 avril 2013, une conférence ayant pour thème "Les préjudices commerciaux des entreprises : analyses concrètes des principales difficultés d'évaluation"
  • Date

Mercredi 3 avril 2013
8h30-13h00

  • Lieu

Auditorium Allianz
87, rue de Richelieu
75002 Paris
M° Richelieu-Drouot (lignes 8 et 9)

  • Programme

8h30 : Accueil

8h45 : Début des travaux - Ouverture
- Yves Gérard : Conseiller doyen à la Chambre commerciale de la Cour de cassation
- Hervé Delannoy : Président de l'AFJE
- Emmanuel Raskin : Avocat au barreau de Paris, Président de la commission procédure de l'ACE

Débats présidés par Hervé Delannoy et Emmanuel Raskin

9h15 - Identification et qualification des postes du préjudice
- Détermination du rôle de l'expert par le juge : Yves Gérard, Conseiller doyen à la Chambre commerciale de la Cour de cassation
- La frontière entre la technique et le droit : Identification des postes : Alain Martin, Expert près la cour d'appel et la Cour de cassation et expert-comptable
- Questions/réponses

10h15/10h30 : Pause café

10h30 - Préjudices du bilan
- Evaluation de l'indemnisation non limitée contractuellement : un intervenant d'Allianz
- Pertes d'actifs, de chiffre d'affaire, atteinte à l'actif, atteinte aux résultats : Didier Kling, Président d'honneur du Conseil national des commissaires aux comptes, Vice-président trésorier de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris
- Coût du litige hors frais irrépétibles et dépens
- Perte et influence sur le cours de bourse : un intervenant d'Accuracy

11h30 - Préjudices hors bilan : image, confiance, moral, crédit...

- Hubert Bitan, Expert spécialisé en informatique
- Cédric Berto, Avocat au barreau de Paris, Président de la commission droit économique de l'ACE

Comment les magistrats accueillent-ils les demandes en ces domaines ? : Yves Lelièvre, Président du tribunal de commerce de Nanterre

12h30 - Questions/réponses

13h - Clôture

  • Frais d'inscription

- Adhérents ACE et AFJE : 70 euros
- Non adhérents : 100 euros
- Moins de 35 ans : 40 euros

Règlement par chèque à l'ordre de l'ACE - 5, rue Saint Philippe du Roule - 75008 Paris

  • Contact/Renseignements

ACE : 01 47 66 30 07
ace@avocats-conseils.org association@afje.org
www.avocats-conseils.org

AFJE : 01 42 61 53 59
association@afje.org
www.afje.org

Ces travaux sont validés au titre de la formation professionnelle continue pour 4 heures.
N° de formateur : 11.75.38899.75

newsid:436231

Bancaire

[Textes] La transposition de la Directive "monnaie électronique 2" par la loi du 28 janvier 2013 : enfin un statut pour la monnaie électronique ? - Partie I : l'extension de la définition et du champ d'application de la monnaie électronique

Réf. : Loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (N° Lexbase : L0938IWN)

Lecture: 20 min

N6251BTP

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par Christelle Mazza, avocat au barreau de Paris, Armide Avocats

Le 21 Mars 2013

L'économie et les échanges sont régulés par des opérations de paiement. Tous les acteurs de ce système, particuliers ou entreprises, utilisent chaque jour la monnaie comme instrument de ces échanges qui ponctuent la production et l'existence même d'un système économique et commercial. Doucement mais sûrement, l'économie évolue avec le développement des nouvelles technologies et peu à peu, l'échange traditionnel parti du troc, transitant par les espèces puis par la passation d'écriture, voit se développer la dématérialisation du sonnant et trébuchant. C'est cette révolution attendue, relativement silencieuse mais certaine que vient marquer la transposition de la Directive "monnaie électronique 2" (Directive 2009/110/CE 16 septembre 2009, concernant l'accès à l'activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements N° Lexbase : L8543IE7) dans le droit français par la loi du 28 janvier 2013. Après presque deux années de retard dont le Sénat précise, non sans argutie politique dans son rapport, que "le précédent Gouvernement a fait preuve d'un singulier manque d'anticipation" (rapport n° 247 (2012-2013) de M. Richard Yung, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 décembre 2012), après menace de la Commission européenne fin avril 2012 de saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour défaut de transposition et exposition à de lourdes sanctions financières, le droit français vient de créer un statut pour les établissements de monnaie électronique et une nouvelle définition de la monnaie électronique. Décryptage en deux parties : cette première partie consacrée à l'extension de la définition et du champ d'application de la monnaie électronique, la seconde partie ayant trait à la création d'un statut autonome pour les établissements de monnaie électronique (lire N° Lexbase : N6252BTQ).

I - La monnaie électronique envisagée comme nouvel instrument de monnaie scripturale

L'opération de paiement est définie à l'article L. 133-3 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4786IEY) comme l'action consistant à verser, transférer, ou retirer des fonds, indépendamment de toute obligation sous-jacente entre le payeur et le bénéficiaire. L'opération de paiement se fait par la monnaie qui en France est l'euro (C. mon. fin., art. L. 111-1 N° Lexbase : L9700DYW). La monnaie est un instrument de référence permettant de fixer un prix aux biens et services échangés, par le biais de l'opération de paiement, dans un système économique donné.

La monnaie se subdivise en deux catégories, unités de valeur : la monnaie fiduciaire (les pièces métalliques -C. mon. fin., art. L. 121-1 et s. [LXB= L2611HWM]- et les billets de banque -C. mon. fin., art. L. 121-1 N° Lexbase : L9722DYQ et s.-), dont il est intéressant de rappeler qu'elle est protégée par le droit d'auteur (C. mon. fin., art. L. 123-1 N° Lexbase : L3109G9Z) et la monnaie scripturale (le chèque -C. mon. fin., art. L. 131-1 N° Lexbase : L3316HIN et s.-, la lettre de change et le billet à ordre -C. mon. fin., art. L. 132-1 N° Lexbase : L4784IEW et s.- et les "autre instruments de paiement" dont le virement et le prélèvement, dits opérations de paiement associées à un compte de paiement -C. mon. fin., art. L. 314-1, 3° N° Lexbase : L4861IER).

Ainsi, afin de matérialiser le paiement, le payeur utilisera un instrument de paiement qui sera matériel (les espèces) ou dématérialisé (monnaie scripturale). Parmi cette classification classique des instruments de paiement s'est insérée la monnaie électronique.

Créée en 2000 par la Directive "monnaie électronique 1" (Directive 2000/46 du 18 septembre 2000 N° Lexbase : L8033AU3), quelques mois après la Directive "commerce électronique" (Directive 2000/31 du 8 juin 2000 N° Lexbase : L8018AUI), la monnaie électronique constitue un instrument de paiement issu de la pratique des échanges dématérialisés (cf. nos obs., Etablissements de paiement et monnaie électronique : panorama 2012 des paiements dématérialisés, Lexbase Hebdo n° 290 du 29 mars 2012 - édition affaires N° Lexbase : N0995BTZ).

Définie à l'origine comme "substitut électronique des pièces et billets de banque, qui est stocké sur un support électronique tel qu'une carte à puce ou une mémoire d'ordinateur et qui est généralement destiné à effectuer des paiements électroniques de montant limités", la monnaie électronique devait se substituer aux espèces par le biais d'un stockage dématérialisé sur un support électronique (puce).

Introduite en droit français en 2003 (arrêté du 10 janvier 2003, portant homologation du règlement 2002-13 du 21 novembre 2002 du Comité de la réglementation bancaire et financière N° Lexbase : L1919A9X), la monnaie électronique n'a pas connu le succès escompté, notamment au regard de la faiblesse des montants possibles pour chaque transaction (30 euros) ou de stockage maximum (150 euros). Par ailleurs, les établissements de monnaie électronique (EME) étaient des établissement de crédit limitant leur activité à l'émission, la mise à disposition ou la gestion de monnaie électronique ce qui a rendu le statut propre d'EME très contraignant, ne leur permettant pas d'avoir la totalité des prérogatives des établissements de crédit tout en devant faire valoir le même régime prudentiel. Il n'en existait en France que trois en 2010.

La monnaie électronique n'est donc pas, terminologiquement parlant, une nouvelle sorte de monnaie qui créerait une troisième catégorie de monnaie, mais un nouvel instrument de paiement scriptural permettant de réaliser une opération de paiement, dit aussi service de paiement.

Entre 2000 et 2013, l'économie numérique a littéralement explosé au point de devenir l'un des canaux privilégiés des échanges économiques : l'introduction d'instruments de paiement adaptés répondant par ailleurs aux exigences de sécurité des instruments traditionnels s'est en conséquence rendue de plus en plus nécessaire, et ce alors que depuis 2000, la technologie de la puce est très largement mise en concurrence.

Par la Directive du 16 septembre 2009, l'Union européenne a analysé les failles du marché et établi la Directive "monnaie électronique 2" créant un véritable statut autonome pour les établissements de monnaie électronique, et revoyant une grande partie des freins qui avaient paralysé le développement de l'économie numérique. L'analyse des considérants de la Directive 2009/110/CE et des travaux parlementaires permet de comprendre la nécessité de la révision de la Directive 2000/46 en ce que notamment "certaines de ses dispositions ont été jugées préjudiciables à l'émergence d'un véritable marché unique des services de monnaie électronique et au développement de services conviviaux de ce type" (considérant 2), tout en poursuivant la volonté de créer "un cadre juridique clair destiné à renforcer le marché intérieur" et à "garantir un niveau adéquat de surveillance prudentielle". (considérant 1)

II - Les apports de la Directive "monnaie électronique 2"

A - Une nouvelle définition de la monnaie électronique (article 2)

La monnaie électronique se définit avant tout comme un pré-paiement et permet un stockage de monnaie dite "traditionnelle" sur un autre support. Il n'y a donc pas au sens propre création de monnaie mais émission d'un instrument dématérialisé de la monnaie traditionnelle permettant de faciliter les transactions dans une économie numérique de plus en plus sectorielle. La monnaie électronique, c'est aussi et surtout le marché de la carte et de la fidélisation du consommateur dans un réseau.

La définition introduite par la Directive du 16 septembre 2009 a ajouté comme support à la monnaie électronique "toute forme magnétique" afin d'anticiper sur les innovations technologiques, là où la Directive de 2000 ne prévoyait que le stockage sous forme électronique.

En outre, la "DME 2" insère une référence expresse à l'opération de paiement telle que définie dans la Directive "services de paiement" 2007/64/CE (N° Lexbase : L5478H3B) et reprise in extenso dans le Code monétaire et financier, élargissant et précisant considérablement le champ d'application de la monnaie électronique. Destinée à remplacer la monnaie fiduciaire par une extension de la monnaie scripturale, la monnaie électronique doit permettre de se substituer aux instruments traditionnels de paiement pour chaque opération de paiement.

La Directive s'est attachée à prévoir une définition claire et neutre permettant une adaptation dans le temps à tout type de support ou d'échange dématérialisé. La monnaie électronique comprend donc :
- des unités stockées sur un dispositif de paiement que le détenteur a en sa possession ;
- des unités stockées à distance sur un serveur et gérées par le détenteur de monnaie électronique, par l'intermédiaire d'un compte spécifique de monnaie électronique.

Il s'agira dans le premier cas, par exemple, d'une carte pré-payée avec puce, permettant d'acheter dans un commerce ou sur internet, et dans le second cas d'un compte Paypal ou similaire, permettant d'effectuer des achats d'e-commerce mais également de cartes pré-payées sans puce, gérées par un serveur dit "compte technique". Ce support ou ce compte virtuel vient se superposer au système bancaire classique des cartes bancaires ou du paiement par ordre passé via la plate-forme dématérialisée de son établissement de crédit et l'utilisation des codes et systèmes d'authentification d'une carte bancaire y afférente.

L'introduction de la forme magnétique permet ainsi de garantir un régime juridique clair aux innovations technologiques traditionnellement matérialisées par la puce électronique : plus que la monnaie électronique, c'est la reconnaissance du secteur des cartes pré-payées.

B - Une clarification des exemptions (articles 1 et 9)

La définition de la monnaie électronique se comprend également à la lumière des exemptions listées de façon exhaustive. Ainsi, certains cas de dématérialisation de la monnaie sont exclus du champ d'application de la Directive.

L'article 8 de la Directive de 2000 prévoyait déjà 3 types d'exemption :
- le montant total des engagements financiers d'une activité commerciale liés à la monnaie électronique ne dépasse pas normalement 5 millions d'euros et jamais 6 millions d'euros ;
- la monnaie électronique reste d'usage "interne" à un groupe et n'est acceptée comme moyen de paiement que par des filiales de l'établissement pour des fonctions opérationnelles ou accessoires ;
- la monnaie électronique n'est acceptée comme moyen de paiement que par un nombre limité d'entreprises soit parce qu'elles se situent dans les mêmes locaux ou une zone locale restreinte, soit parce qu'il existe une relation étroite financière ou commerciale avec l'établissement émetteur.

En outre, la capacité de chargement ne pouvait excéder 150 euros.

L'article 9 de la "DME 2" vient considérablement préciser le champ d'application de la première hypothèse en fixant un plafond de 5 millions d'euros et en laissant à chaque Etat la liberté de fixer le plafond de stockage maximum ainsi que les règles de surveillance prudentielle et d'historique des volumes.

Les deux autres hypothèses sont de nouveau prévues, cette fois par renvoi à la Directive "services de paiement" : selon l'article 3 k, sont de la monnaie électronique mais ne tombent pas sous le champ d'application de la "DME 2" les chèques papier et notamment les chèques de voyage ou les titres de service. Le considérant 5 de la "DME 2" précise ainsi qu'il s'agira par exemple d'un chèque cadeau utilisable dans un magasin donné ou une chaîne de magasins donnée, une carte d'enseigne, carte d'essence, carte de membre, carte de transport, carte ou chèque de titre-repas ou titres de services (et ce afin d'encourager le recours à ces instruments pour atteindre les objectifs fixés dans la législation sociale, lorsque ces titres sont régis par un régime juridique spécifique).

Sur ce point, la problématique des tickets-restaurants reste sous étroite surveillance de la Commission. En effet, ces titres permettent de plus en plus de régler différents achats notamment alimentaires, sans restriction évidente à une chaîne de distribution. La Directive précise ainsi que "l'exclusion du champ d'application de la présente Directive devrait cesser si un tel instrument à portée spécifique devient un instrument à portée générale", ce qui se comprend aisément au regard du régime prudentiel imposé aux EME et aux entorses prévisibles à la concurrence. La nuance peut être fragile, à la lecture des textes, entre un réseau clairement défini dans l'espace ou le volume, et un secteur, par exemple toutes les entreprises de l'alimentaire seulement.

Enfin une troisième hypothèse est insérée, prévue à l'article 3 l) de la Directive "services de paiement" : lorsque les opérations de paiement sont exécutées au moyen d'un appareil de télécommunication ou d'un autre dispositif numérique ou informatique, lorsque les biens ou les services achetés sont livrés et doivent être utilisés au moyen de ces supports, à condition que l'opérateur du système n'agisse pas uniquement en qualité d'intermédiaire entre l'utilisateur du service de paiement et le fournisseur de biens et services.

Il s'agira ainsi d'une plus-value apportée par l'opérateur comme système d'accès, de recherche ou de distribution via un téléphone mobile ou un ordinateur.

Ce secteur est également sous haute surveillance européenne en ce que les opérateurs téléphoniques proposent de plus en plus l'achat de services via la facture globale de télécommunications comme la location de films, les sonneries par sms...Tant que l'usage en est fait de façon interne et que le service est utilisable à travers le canal d'achat, ces opérations de paiement ne seront pas considérées comme entrant dans le champ d'application de la Directive.

La captation sectorielle par la monnaie électronique en fait un instrument très porteur pour toutes les entreprises offrant un terminal de paiement ou une fidélisation par carte, par exemple, de sorte que le marché de la monnaie électronique devient aussi hétérogène qu'il existe de grandes enseignes. La notion de réseau fermé est en conséquence essentielle pour préserver de toute entorse à la concurrence. Ce système d'exception permet néanmoins de développer et faciliter les échanges économiques sectorisés, sans avoir à répondre d'un régime prudentiel encore très lourd. Il met en exergue l'activité à titre principal d'émission de monnaie électronique, d'une part, et celle accessoire à une activité commerciale classique qui peut s'en trouver plus attractive et facilitée, d'autre part.

Cette hétérogénéité peut néanmoins trouver des limites pratiques, le consommateur préférant un usage traditionnel d'une seule carte bancaire plutôt que de dizaines de cartes de fidélité liées à chaque réseau de consommation. C'est certainement la politique tarifaire qui fera une différence à terme, bien que sur ce point, les réseaux devant s'appuyer sur un établissement de crédit ou de monnaie électronique, doivent reverser des commissions liées aux transactions, qui réduisent ainsi leur marge de bénéfice. Il convient en conséquence de bien distinguer la carte de paiement, type crédit à la consommation, de la carte pré-payée, support de monnaie dématérialisée, s'apparentant davantage au chèque-cadeau.

C - L'émission en contrepartie d'une obligation de remboursement, comme facteur de confiance et sécurisation du pré-paiement (article 11)

A la différence d'un établissement de crédit, l'établissement de monnaie électronique ne peut recevoir de fonds du public et en disposer. De ce fait, les EME bénéficient d'un régime prudentiel aligné sur celui des établissements de paiement, partant moins contraignant que les banques. En contrepartie et afin de garantir la confiance du consommateur, l'émission de monnaie électronique est assortie d'une obligation renforcée de remboursement :
- à valeur nominale, c'est-à-dire à hauteur du même montant que celui qui a été versé pour créditer le support dématérialisé ou le compte ;
- à tout moment, sans possibilité de convenir d'un seuil minimal de remboursement ;
- à titre gratuit.

Afin de garantir une concurrence équitable entre établissements de crédit et établissements de monnaie électronique, ces dispositions visent à sécuriser la protection des fonds des détenteurs de monnaie électronique.

Néanmoins, le contrat conclu entre l'émetteur et le détenteur peut prévoir des frais de remboursement, à condition qu'ils soient clairement précisés, que le remboursement constitue un défraiement proportionné et déterminé en fonction des coûts, sous réserve de la législation nationale en matière fiscale ou sociale. Ces informations constituent l'information pré-contractuelle du consommateur.

En outre, le remboursement ne peut être sollicité que dans trois conditions alternatives :
- il est demandé avant l'expiration du contrat ;
- le contrat spécifie une date d'expiration et le détenteur a mis fin au contrat avant cette date ;
- le remboursement est demandé plus d'un an après la date d'expiration du contrat.

Ces dispositions ont particulièrement intéressé les professionnels du chèque-cadeau ou du coffret cadeau, qui tomberaient sous le coup de l'application de la Directive : la plupart des consommateurs n'utilisent pas le bon cadeau qui leur a été offert, souvent valable une année, ce qui constitue pour les commerçants partenaires et pour le distributeur une trésorerie non négligeable. Une obligation de remboursement, qui n'est cependant pas prescrite, modifierait particulièrement le business-model de ces industries. C'est tout l'intérêt, pour ces industries, de rester exclues du champ d'application de la directive.

A noter que dans la loi de transposition, il est renvoyé à un décret qui fixera la liste exhaustive des titres spéciaux ne relevant pas de la "DME 2", ces titres échappant en conséquence à l'obligation de remboursement prescrite par la "DME 2" et le Code monétaire et financier. L'industrie du chèque papier dématérialisé est, en conséquence, en attente de ce décret qui pourrait fortement modifier l'économie de leurs activités.

L'article 4 de la "DME 1" était extrêmement succinct et prévoyait un montant minimal de remboursement ne pouvant être supérieur à 10 euros et des modalités précises de remboursement, en espèces ou par virement. Il convient en conséquence de saluer ces dispositions en ce qu'elles protègent davantage le consommateur ; elles s'alignent sur le droit de la consommation général en matière de services de paiement.

D - La création d'une procédure de réclamation et de recours extrajudiciaire en vue du règlement des litiges liés aux opérations de paiement par monnaie électronique

Sur ce point, la "DME 2" renvoie une fois encore à la Directive "services de paiement" (DSP) et permet un alignement des régimes. La "DSP" (titre IV, chapitre 5) renvoie les Etats membres à mettre en place des procédures permettant aux détenteurs de monnaie électronique de soumettre des réclamations aux autorités compétentes formellement désignées en cas de violation des dispositions légales et contractuelles. Ce régime doit être assorti de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives. Chaque Etat a l'obligation de communiquer à la Commission le texte des règles prescrites.

III - La transposition en droit français

La Directive européenne nécessite une transposition dans le droit national, chaque Etat étant libre, pour un certain nombre de dispositions seulement, d'adapter les prescriptions européennes aux spécificités de son droit interne. Ainsi, l'analyse de la transposition par le droit français de la Directive permet notamment de mettre en exergue les spécificités du droit bancaire tel que nous l'envisageons dans notre culture économique et juridique.

La lecture de la loi du 28 janvier 2013 est ardue en ce qu'elle constitue une modification alinéa par alinéa de certains articles du Code monétaire et financier ainsi que de quelques dispositions du Code de commerce, du Code de la consommation et du Livre des procédures fiscales. Elle concerne d'ailleurs la transposition d'une autre Directive, dite "Omnibus I" (Directive 2010/78/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 N° Lexbase : L0389IP4) relative aux compétences des autorités européennes de supervision (titre II), la mise en cohérence du Code monétaire et financier avec certains aspects du droit européen en matière financière (titre III) et des dispositions relatives à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique (titre IV).

C'est une première partie, substantielle, qui modifie le Code monétaire et financier, pour ce qui concerne la nouvelle définition de la monnaie électronique sous les thématiques suivantes :
- la monnaie fiduciaire ;
- la monnaie scripturale ;
- la définition de la monnaie électronique et l'instauration d'un régime contractuel protecteur du consommateur ;
- l'alignement du régime de règlement des litiges des EME avec celui des établissements de crédit et de paiement.

La logique française dans le plan même de la loi n'est pas la même que celle de la Directive européenne en ce qu'elle suit chronologiquement les dispositions du Code monétaire et financier. La légistique française continue de stigmatiser les différents intervenants du secteur, marquant un monopole bancaire historique.

A - Un seuil maximal de paiement des transactions

Les premières dispositions de la loi de transposition concernent les modifications du Code monétaire et financier dans sa partie "monnaie fiduciaire", section "interdiction du paiement en espèces de certaines créances". Est ainsi ajouté le moyen tiré de la monnaie électronique : c'est l'une des seules références dans la transposition de la Directive à un montant maximal de paiement par monnaie électronique qui sera fixé par décret, probablement aligné sur celui du montant en espèces.

L'établissement de monnaie électronique pourra effectuer le paiement des salaires par un virement dans le cadre de ses prérogatives liées à la fourniture de services de paiement. A noter que cette prérogative échappe aux établissements de paiement.

B - Monnaie scripturale : monopole bancaire du chèque et section nouvelle liée au remboursement de la monnaie électronique

Dans un premier temps, le Code monétaire et financier rappelle que l'émission de chèque reste une prérogative bancaire et maintient la désignation terminologique de l'établissement de crédit comme "le banquier", marquant une distinction avec les deux autres catégories d'établissement, sortes de "sous-ensembles" que sont les EME et les EP. Ainsi, si l'établissement de monnaie électronique peut encaisser des chèques, il ne peut en émettre, et ne peut en aucun cas les encaisser aux fins d'émission de monnaie électronique, sauf à en être lui-même bénéficiaire (C. mon. fin., art. L. 131-4 N° Lexbase : L9360HDZ). Cette disposition est assortie d'une sanction limitant la responsabilité du préjudice à concurrence du montant du chèque, donc globalement, peu dissuasive.

Le nouvel article L. 131-85 (N° Lexbase : L1274IW4) permet aux établissements de monnaie électronique d'être destinataires des informations liées aux incidents de paiement inscrits à la Banque de France et d'utiliser ces mêmes informations comme moyen de contrôle sur les détenteurs de la monnaie électronique qu'ils émettent.

Dans un deuxième temps, le Code monétaire et financier crée une douzième section intitulée "Modalités de remboursement de la monnaie électronique" dans le chapitre III ("Les règles applicables aux autres instruments de paiement") du titre III ("Instruments de monnaie scripturale). Comme la "DME 2", le Code monétaire et financier instaure un principe de remboursement immédiat, gratuit, à simple demande, assorti des exceptions listées dans la Directive (C. mon. fin., art. L. 133-31 N° Lexbase : L1260IWL). L'article L. 133-36 (N° Lexbase : L1257IWH) prévoit les modalités de remboursement, en espèces ou par virement, comme le prévoyait la "DME 1". L'article L. 133-37 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1258IWI) prévoit la possibilité d'adopter des dispositions contractuelles contraires si le détenteur est un professionnel.

Enfin dans une troisième partie, le Code élargit les prérogatives de la Banque de France dans sa mission de surveillance des établissements dits bancaires (C. mon. fin., art. L. 141-6 N° Lexbase : L1151IWK) et permet désormais aux EME de détenir des comptes à la Banque de France (C. mon. fin., art. L. 141-8 N° Lexbase : L1150IWI)

C - Une transcription fidèle de la définition et du régime de la monnaie électronique par l'insertion d'un régime protecteur du consommateur

L'article L. 315-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1154IWN) reprend désormais la définition européenne de la monnaie électronique comme "valeur monétaire qui est stockée sous une forme électronique, y compris magnétique, représentant une créance sur l'émetteur, qui est émise contre la remise de fonds aux fins d'opérations de paiement définies à l'article L. 133-3 (N° Lexbase : L4786IEY) et qui est acceptée par une personne physique ou morale autre que l'émetteur de monnaie électronique".

Chaque unité de monnaie électronique dite unité de valeur constitue une créance incorporée dans un titre. Cette créance fonde le droit à remboursement par unité de valeur, que le pré-paiement soit équivalent à des euros ou des unités virtuelles (C. mon. fin., art. L. 315-2 N° Lexbase : L1071IWL). Quel que soit le processus de dématérialisation, en euros ou en unités, sa valeur doit rester nominale et implique un droit à remboursement de même valeur (C. mon. fin., art. L. 315-3 [LXB= L1072IWM]).

Si la définition stricto sensu reprend le même concept d'évolution technologique que la Directive, la création des deux articles suivants renforce la protection du consommateur et prévient des dérives éventuelles liées à l'émission de monnaie électronique : le pré-paiement dit rester gratuit, sauf exceptions contractuelles clairement définies. Cet instrument de protection particulièrement fort vise à encadrer l'activité d'émission et la confiance du consommateur alors que l'EME est soumis à des exigences de fonds propres moindres que celles des établissements de crédit et qu'il ne dispose pas des fonds reçus du public. Ainsi, l'article L. 315-4 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1073IWN), nouvellement créé, précise que les fonds déposés en contrepartie de monnaie électronique ne peuvent pas recevoir de rémunération quelle qu'elle soit (intérêts ou autres avantages) de sorte que l'opération de pré-paiement ou stockage doit rester neutre pour l'EME et pour le consommateur.

Ces précisions confirment ainsi la distinction, si besoin était, entre les opérations de banque traditionnelles de réception des fonds du public et de rémunération des comptes, de celle des EME qui émettent la monnaie par un simple "échange" entre de la monnaie fiduciaire et/ou scripturale, contre un nouveau support de stockage.

Les nouveaux articles créés par la loi de transposition sous la section 3 "Obligations contractuelles" (C. mon. fin., art. L. 315-5 N° Lexbase : L1077IWS à L. 315-8) reprennent les obligations édictées par la Directive sur l'information précontractuelle liée au remboursement des unités de monnaie électronique, le contrat devant clairement indiquer la méthode de calcul d'éventuels frais de retenue. Ces dispositions viennent s'ajouter à la nouvelle section 12 introduite au Code monétaire et financier, mettant l'accent sur la volonté du législateur d'encadrer clairement l'activité d'émission de monnaie électronique. Ce régime de protection est, par ailleurs, renforcé par l'alignement du système de règlement des litiges liés aux opérations de paiement par la monnaie électronique avec celui adopté pour les établissements de crédit et de paiement.

D - L'alignement du régime de prévention et de règlement des litiges des EME avec celui des établissements de crédit et des établissement de paiement

L'article L. 316-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1078IWT) étend la possibilité d'une médiation gratuite aux établissements de paiement dans leurs litiges avec les personnes physiques. De même, la procédure de contrôle des infractions aux dispositions du Code de la consommation par des agents de la Banque de France est étendue aux établissements de monnaie électronique au regard des dispositions propres liées à leurs obligations contractuelles et notamment le principe du remboursement.

En outre, ce mécanisme de contrôle prévoit davantage de supervision notamment en ce qui concerne par principe le champ d'intervention des agents de la Banque de France sur la prohibition des ententes sur les prix (C. consom., art. L. 113-1 N° Lexbase : L0333ICC), la prohibition de vente de produits ou services donnant droit à une prime (C. consom., art. L. 121-35 N° Lexbase : L3086IQD, dont le pendant est la prohibition de la rémunération ou des avantages liés au pré-paiement telle que fixée au nouvel article L. 315-4 du Code monétaire et financier N° Lexbase : L1073IWN) ou la vente liée à un volume prédéterminé (C. consom., art. L. 122-1 N° Lexbase : L1288IWM).

Ainsi sont applicables aux établissements de monnaie électronique :
- l'interdiction de la vente ou offre de produits groupés lorsque cette vente peut être dissociable (C. mon. fin., art. L. 312-1-2 N° Lexbase : L4779IEQ) ;
- l'obligation de signer un contrat-cadre en l'absence de convention de compte de dépôt (C. mon. fin., art. L. 314-12 N° Lexbase : L4739IEA) ;
- l'obligation d'information pré-contractuelle (C. mon. fin., art. L. 314-13 N° Lexbase : L4778IEP) ;
- les obligations contractuelles propres aux EME tirées des articles L. 315-6 (N° Lexbase : L1074IWP) à L. 315-8 du Code monétaire et financier.

Le contrat est, en conséquence, érigé en instrument protecteur entre les EME et les consommateurs, utilisateurs non professionnels.

Enfin, autre création de la loi de transposition qui, par une seule phrase vient considérablement aligner les régimes avec ceux des établissements de crédit et de paiement, l'article L. 133-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1273IW3) dispose désormais en son IV que la totalité du chapitre III, "règles applicables aux autres instruments de paiement", s'applique à l'émission et à la gestion de la monnaie électronique, à savoir notamment :
- la définition du donneur d'ordre au paiement dans l'opération de paiement (C. mon. fin., art. L. 133-3 N° Lexbase : L4786IEY) ;
- les dispositifs de sécurité et d'authentification (C. mon. fin., art. L. 133-4 N° Lexbase : L4785IEX et L. 133-15 N° Lexbase : L4859IEP) ;
- le régime applicable aux autorisations de paiement (C. mon. fin., art. L. 133-6 N° Lexbase : L4700IES et notamment le consentement et la révocation de l'ordre ;
- les conditions d'exécution d'une opération de paiement (C. mon. fin., art. L. 133-1).

Cet arsenal de mécanismes de protection de l'ordre de paiement semble relativement important au regard de l'usage traditionnel de la monnaie électronique, notamment pour de faibles montants. En élargissant considérablement le champ d'application de la monnaie électronique, lui octroyant un statut autonome et sans limitation apparente de montant tant de stockage que de paiement, le législateur a aligné les mécanismes de contrôle sur celui des autres instruments de paiement dans une mouvance générale liée à la migration SEPA allant bien au-delà des prescriptions européennes. Ce type d'obligation risque de constituer un frein pratique pour les EME qui cibleraient les supports stockant de faibles montants, destinés à se substituer aux espèces. La pratique nous éclairera sur les éventuelles tolérances institutionnelles afin de ne pas freiner l'émergence de ces nouveaux acteurs d'autant que le secteur reste dans l'attente des décrets d'application de la loi de transposition.

Une fois encore, au même titre que les freins liés à la transposition de la Directive "services de paiement" créant les établissements de paiement par l'ordonnance du 15 juillet 2009, un régime très protecteur semble avoir été favorisé au détriment des contraintes du marché, conférant aux seuls établissements de crédit ou leurs émanations, les possibilités logistiques d'un tel mécanisme prudentiel.

La loi de transposition s'est néanmoins particulièrement attardée sur le nouveau régime des établissements de monnaie électronique, créant un statut autonome alors que jusqu'à maintenant, ils n'étaient que des établissements de crédit limitant leur activité à l'émission et à la gestion de monnaie électronique.

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Bancaire

[Textes] La transposition de la Directive "monnaie électronique 2" par la loi du 28 janvier 2013 : enfin un statut pour la monnaie électronique ? - Partie II : la création d'un statut autonome pour les établissements de monnaie électronique

Réf. : Loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013, portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière (N° Lexbase : L0938IWN)

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N6252BTQ

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par Christelle Mazza, avocat au barreau de Paris, Armide Avocats

Le 21 Mars 2013

L'économie et les échanges sont régulés par des opérations de paiement. Tous les acteurs de ce système, particuliers ou entreprises, utilisent chaque jour la monnaie comme instrument de ces échanges qui ponctuent la production et l'existence même d'un système économique et commercial. Doucement mais sûrement, l'économie évolue avec le développement des nouvelles technologies et peu à peu, l'échange traditionnel parti du troc, transitant par les espèces puis par la passation d'écriture, voit se développer la dématérialisation du sonnant et trébuchant. C'est cette révolution attendue, relativement silencieuse mais certaine que vient marquer la transposition de la Directive "monnaie électronique 2" (Directive 2009/110/CE 16 septembre 2009, concernant l'accès à l'activité des établissements de monnaie électronique et son exercice ainsi que la surveillance prudentielle de ces établissements N° Lexbase : L8543IE7) dans le droit français par la loi du 28 janvier 2013. Après presque deux années de retard dont le Sénat précise, non sans argutie politique dans son rapport, que "le précédent Gouvernement a fait preuve d'un singulier manque d'anticipation" (rapport n° 247 (2012-2013) de M. Richard Yung, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 décembre 2012), après menace de la Commission européenne fin avril 2012 de saisir la Cour de justice de l'Union européenne pour défaut de transposition et exposition à de lourdes sanctions financières, le droit français vient de créer un statut pour les établissements de monnaie électronique et une nouvelle définition de la monnaie électronique. Décryptage en deux parties : la première partie était consacrée à l'extension de la définition et du champ d'application de la monnaie électronique (lire N° Lexbase : N6251BTP), cette seconde partie ayant trait à la création d'un statut autonome pour les établissements de monnaie électronique. I - Les apports de la Directive "monnaie électronique 2"

L'élaboration de la "DME 2" et sa transposition en droit français ne peuvent s'envisager sans la lecture de la Directive "service de paiement" qui a considérablement modifié le droit applicable aux instruments de paiement, dans le cadre plus large de la migration SEPA (cf., nos obs., L'avenir des moyens de paiement en France et la migration SEPA, Lexbase Hebdo n° 304 du 12 juillet 2012 - édition affaires N° Lexbase : N2868BTE).

D'ailleurs, la "DME2" renvoie très largement à l'arsenal juridique élaboré par la Directive "services de paiement", transposée par voie d'ordonnance en droit français en 2009 (ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009, relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement et portant création des établissements de paiement N° Lexbase : L4658IEA), qui a créé le statut nouveau des établissements de paiement. Presque quatre ans plus tard et avec le retard qu'on lui connaît, la loi de transposition vient créer un troisième établissement bancaire qui vient s'insérer entre l'établissement de crédit et l'établissement de paiement.

Si ce nouveau statut a le mérite de clarifier l'ordonnancement des établissements et le régime prudentiel afférent, en fonction du degré d'activités mises en oeuvre, l'ensemble bancaire devient hétérogène alors que dans la pratique, les exigences prudentielles demeurent très lourdes, en contradiction avec une ouverture à la concurrence de l'offre de services de paiement. Peut-être que ce statut intermédiaire permettra une plus grande souplesse à l'octroi de l'agrément des établissements de paiement ou au contraire fera tomber ce statut en désuétude : les EME pouvant offrir les mêmes services que les EP, qui peut le plus, peut le moins.

La "DME 2" définit en son article 1er la liste des émetteurs de monnaie électronique de droit :
- les établissements de crédit ;
- les établissements de monnaie électronique agréés en tant que tels ;
- les offices de chèques postaux ;
- la BCE et les banques centrales nationales ;
- les Etats membres ou leurs autorités régionales ou locales lorsqu'ils agissent en qualité d'autorité publique. Au regard de la recrudescence des services dématérialisés mis en place par les collectivités au service des usagers, cette définition mérite un développement particulier et devrait ouvrir la voie à des services à forte valeur ajoutée en conformité avec les innovations technologiques. Cela n'a pas été repris néanmoins par le Code monétaire et financier.

La "DME 1" définissait les EME de façon négative, comme n'étant pas des établissements de crédit au sens de la Directive 2000/12/CE du 20 mars 2000 (concernant l'activité des établissements de crédit et son exercice, refondue par la Directive 2006/48/CE du 14 juin 2006 N° Lexbase : L1385HKI), et de façon positive, comme une entreprise qui émet des moyens de paiement sous la forme de monnaie électronique. Néanmoins, l'article 1 § 4 précisait que les Etats membres interdisent aux personnes ou entreprises qui ne sont pas des établissements de crédit d'exercer, à titre professionnel, l'activité d'émission de monnaie électronique. Ainsi, l'EME ne pouvait qu'être l'émanation d'une banque et ne disposait pas d'une véritable autonomie concurrentielle. L'article 2 faisait une référence expresse, pour les EME, aux Directives bancaires applicables aux établissements de crédit. C'est ce qui explique que la "DME 1" était une Directive assez succincte en ce que le régime prudentiel était peu ou prou le même que celui des établissements de crédit.

La seule distinction entre les établissements de crédit et les établissements de monnaie électronique concernait la réception des fonds qui pour les seconds ne pouvait constituer des dépôts et devait faire l'objet d'un échange immédiat contre de la monnaie électronique (article 2 § 3)

Désormais et afin de lui conférer un statut propre, l'EME est défini comme "une personne morale qui a obtenu, en vertu du titre II, un agrément l'autorisant à émettre de la monnaie électronique". Un nouveau titre II régit les conditions de l'accès à l'activité d'EME et son régime prudentiel propre.

A - Le régime de la demande et de l'octroi de l'agrément calqué sur celui des établissements de paiement

C'est par référence expresse à la Directive "services de paiement" que la "DME 2" prévoit le régime de constitution des établissements de monnaie électronique.

Ainsi, les exigences retenues pour le dossier de constitution de la demande d'agrément sont les mêmes que pour les établissements de paiement (DSP, art. 5) et comprennent ainsi :
- le programme d'activités ;
- un plan d'affaires et notamment un calcul budgétaire prévisionnel sur trois ans ;
- la preuve du dépôt du capital initial ;
- un descriptif de gouvernement d'entreprise et des mécanismes de contrôle interne sur la gestion des risques et la lutte contre le blanchiment d'argent ;
- une description de l'organisation structurelle et notamment le recours à des agents et succursales ;
- l'identité des personnes détenant une participation dans la société, ainsi que celle des dirigeants et responsables de la gestion ;
- l'identité des contrôleurs légaux et cabinets d'audit ;
- les statuts de l'EME et l'adresse de son siège.

L'article 10 de la "DSP" prévoit les conditions d'octroi de l'agrément et notamment :
- l'exigence d'obtenir l'agrément avant tout début d'activité ;
- la conformité du dossier de demande avec les exigences de l'article 5 précité et la possibilité pour les autorités de contrôle d'interroger la banque centrale nationale ou toute autre autorité publique concernée ;
- l'obligation de disposer d'un solide gouvernement d'entreprise et notamment d'une structure organisationnelle claire avec un partage transparent des responsabilités ;
- le respect de la qualité des actionnaires et de l'actionnariat conforme aux exigences de gestion saine et prudente ;
- l'absence de toute entrave à la mission de contrôle des autorités compétentes, notamment par le biais de relations avec des Etats tiers ou des personnes morales tierces.

Le délai d'examen de la demande d'agrément est également de trois mois (art. 11 "DSP)", le refus devant être motivé.

De même, la "DME 2" se réfère encore à la "DSP" pour régir :
- les conditions de retrait de l'agrément ("DSP", art. 12) ;
- la création d'un registre enregistrant l'immatriculation des EME et de leurs agents et succursales ("DSP", art. 13) ;
- les conditions de maintien de l'agrément et l'obligation d'informer les autorités compétentes de toute modification substantielle ("DSP", art. 14 - dispositions renforcées à l'article 3 "DME 2") ;
- l'application des Directives et Règlements sur les normes comptables internationales et l'obligation d'avoir recours à des cabinets d'audit et commissaires aux comptes ("DSP", art. 15).

Au titre des autres exigences, la "DME 2" reprend le régime des établissements de paiement et notamment :
- la désignation des autorités compétentes chargées de l'agrément et du contrôle prudentiel ("DSP", art. 20) qui seront en conséquence les mêmes pour les trois catégories d'établissements ;
- les modalités de contrôles des EME par les autorités compétentes désignées, par exemple des pouvoirs d'inspection et d'audit sur place, la possibilité de se faire communiquer tous documents et d'émettre des avis, consultations, dispositions administratives contraignantes ou des mesures de sanction comme la suspension ou le retrait de l'agrément (article 21 DSP) ;
- le respect du secret professionnel strict afin de protéger le droit des particuliers et des entreprises ("DSP", art. 22) ;
- la possibilité d'exercer un recours contre toute décision défavorable ou carence des autorités de contrôle ("DSP", art. 23), ce point méritant toute attention en ce que la Directive oblige les autorités de contrôle à statuer dans une limite de temps prédéfinie de trois mois, la décision de refus d'agrément faisant grief et étant susceptible de recours. En pratique, ce type de recours est extrêmement rare pour des raisons essentiellement politiques et commerciales ;
- les échanges d'information entre les Etats membres et autorités compétentes (article 24 DSP) ;
- le régime de la liberté d'établissement dans un autre Etat membre dit aussi "passeport européen" ("DSP", art. 25).

Ainsi, la Directive "monnaie électronique 2" n'innove pas sur le régime de la monnaie électronique quant au fond mais confère à ces établissements un même statut propre et autonome garantissant un agrément cette fois distinct de celui des établissements de crédit auxquels il n'est plus fait référence expresse.

A noter que la "DME 2" a pris soin de reprendre les dispositions relatives aux changements de contrôle (article 2) en complément des références expresses à la "DSP" afin de souligner l'importance des garanties que l'établissement doit apporter en matière de gestion saine et prudente et de transparence dans sa gouvernance.

1° - Des exigences en capital initial et fonds propres moins lourdes mais seulement en apparence

Jusqu'à la "DME2", les établissements de monnaie électronique devaient, pour se constituer justifier :
- d'un capital initial constitué des parts souscrites par les associés ou d'autres apporteurs dans son capital propre (Directive 86/635/CE du 8 décembre 1986, art. 22 N° Lexbase : L9724AUP), dans la mesure où il a été versé, auquel est ajouté le compte des prime d'émission, à l'exclusion des actions préférentielles cumulatives ("DME 1", art. 34) ;
- de fonds propres constitués par les réserves au sens de l'article 23 de la Directive 86/635/CE précitée et les résultats reportés par affectation du résultat final.

Le capital initial ne pouvait être inférieur à 1 million d'euros et les fonds propres devaient être à tout moment égaux ou supérieurs à un montant de 2 % du plus élevé des deux montants suivants :
- le montant courant ou
- le montant moyen, au cours des six mois qui précèdent, du total des engagements financiers liés à la monnaie électronique en circulation.

En outre, les établissements de paiement devaient justifier de placements limités d'un montant au moins égal à leurs engagements financiers liés à la monnaie électronique en circulation et uniquement dans les actifs limitativement énumérés à l'article 5 de la "DME 1", et ce afin de couvrir les risques du marché.

Cet arsenal très lourd et contraignant a naturellement freiné la création des établissements de monnaie électronique.

La "DME2" assouplit considérablement les exigences en fonds propres et capital initial.

Ainsi, le capital initial exigé passe d'un million à 350 000 euros ("DME 2", art. 4).

Les fonds propres sont définis de façon identique, avec une référence à la nouvelle Directive refondue 2006/48/CE du 14 juin 2006 (N° Lexbase : L1385HKI) et doivent :
- être calculés selon l'une des trois méthodes préconisées par la directive services de paiement (DSP, art. 8 § 1 et 61) pour les activités de service de paiement des établissements de monnaie électronique ;
- être calculés selon une quatrième méthode édictée à l'article 5 § 3 de la "DME 2" pour l'activité d'émission de monnaie électronique, reprenant le seuil de 2 % minimum de la moyenne de la monnaie électronique en circulation.

Ainsi, si le régime paraît calqué sur celui des établissements de paiement, c'est surtout parce que l'établissement de monnaie électronique peut être d'abord un établissement de paiement qui pourra en supplément émettre de la monnaie électronique : pour ce type d'activité, les exigences en matière de fonds propres sont restées quasi identiques que dans la "DME 1" ce qui ne doit pas cacher des exigences prudentielles relativement élevées.

Dans ces circonstances, l'article 5 § 5 de la "DME 2" précise ainsi que les autorités compétentes peuvent, sur la base d'une évaluation des process de gestion des risques, des bases de données concernant les risques de pertes et des dispositifs de contrôle interne de l'établissement de monnaie électronique, exiger que l'établissement de paiement détienne un montant de fonds propres pouvant être jusqu'à 20 % supérieur au montant qui résulterait de l'application de la méthode A, B ou C dans le cadre de l'offre de services de paiement, de même pour la méthode D liée à l'activité d'émission de monnaie électronique. Aussi la diminution du capital social initial ne doit pas cacher les exigences maintenues en fonds propres qui peuvent être très élevées.

L'article 5 § 6 prévient ainsi de toute manipulation possible d'éléments éligibles pour le calcul de fonds propres et ce afin de garantir une parfaite effectivité aux méthodes de calcul. En revanche, le paragraphe suivant dispense éventuellement de ces contraintes si le mécanisme de surveillance et d'agrément de l'établissement de monnaie électronique est intégré dans celui d'un établissement de crédit (article 5 § 7).

De même, l'article 7 de la "DME2" prévoit un dispositif précis d'obligation de protection des fonds reçus en échange de la monnaie électronique émise.

B - Un champ d'activités élargi, en concurrence directe avec les établissements de paiement

Dans la "DME 1", l'établissement de monnaie électronique pouvait seulement :
- émettre des moyens de paiement sous la forme de monnaie électronique ;
- fournir des services financiers et non financiers liés à l'émission de monnaie électronique, émettre et gérer d'autres moyens de paiement à l'exclusion de l'octroi de toute forme de crédit ;
- stocker des données sur le support électronique pour le compte d'autres entreprises ou institutions publiques (art. 1 § 3 a) et § 5).

L'article 6 de la "DME 2" vient renforcer le dispositif en le clarifiant et en étendant le champ des activités pouvant être mises en oeuvre par les établissements de monnaie électronique. Ainsi, un EME peut désormais :
- exercer la même activité que les établissements de paiement dans la fourniture de services de paiement (renvoi express à l'annexe de la Directive 2007/64/CE N° Lexbase : L5478H3B) ;
- octroyer des crédits liés aux services de paiement dans les mêmes conditions que les EP ;
- fournir la prestation de services opérationnels et de services auxiliaires étroitement liés à l'émission de monnaie électronique ou la prestation de services de paiement ;
- gérer des systèmes de paiement (notamment virement et prélèvement) ;
- exercer une autre activité commerciale, comme peuvent le faire les établissements de paiement dits hybrides.

Comme pour les établissements de paiement, en aucun cas les crédits ne peuvent être octroyés sur la base des fonds propres reçus en contrepartie de la monnaie électronique.

Ainsi, l'établissement de monnaie électronique peut aussi être un établissement de paiement mais en aucun cas un établissement de crédit. Au regard des exigences prudentielles quasi similaires et de l'intérêt substantiel de pouvoir émettre de la monnaie électronique au regard des évolutions du marché, ainsi que de la possibilité de recourir à des agents, il est fort probable que le statut d'établissement de paiement perde son intérêt, sauf à alléger les exigences prudentielles ou à en faire une catégorie de " super-agent " des établissements de monnaie électronique.

C - Le recours aux agents pour la distribution et le remboursement de monnaie électronique

Auparavant, il n'existait pas de procédure permettant à des entreprises de distribuer au nom et pour le compte des EME la monnaie électronique, ce qui relevait en droit interne du statut des intermédiaires en opérations de banques. Cette possibilité a été introduite par la Directive "services de paiement" à l'article 17 pour les établissements de paiement et c'est en toute logique qu'elle a été étendue aux établissements de monnaie électronique.

Ainsi, les articles 3 § 4 et 3 § 5 de la "DME 2" font une référence expresse à l'article 17 de la Directive services de paiement qui prévoit le régime applicable aux agents des établissements de paiement, ces agents devant être immatriculés sur un registre spécial par les EME et sous leur responsabilité. La "DME 2" précise ainsi que les EME peuvent distribuer et rembourser la monnaie électronique par l'intermédiaire de personnes physiques ou morales qui agissent pour leur compte mais ne peuvent en aucun cas émettre de monnaie électronique par l'intermédiaire de ces agents. La question se pose en pratique de la possibilité pour les distributeurs de cartes pré-payées, par exemple, de distribuer les cartes chargées au nom et pour le compte de l'émetteur, mais également la distribution de tickets de chargement de ces cartes qui permettent l'émission nouvelle de monnaie électronique. Il semblerait au regard du texte de la directive que cette seconde activité doive relever du monopole de l'EME et ne puisse être conférée à l'agent bien que ce dernier soit habilité à procéder au remboursement des unités stockées. Le droit français sur ce point a légiféré et dispose désormais que le rechargement peut faire partie des prérogatives de l'agent.

D - Le régime des EME exemptés et les activités hors champ de la Directive

Pour certaines catégories d'activités telles qu'étudiées précédemment (cf. nos obs., La transposition de la Directive "monnaie électronique 2" par la loi du 28 janvier 2013 : enfin un statut pour la monnaie électronique ? - Partie I : l'extension de la définition et du champ d'application de la monnaie électronique N° Lexbase : N6251BTP, II, B), les établissements ne seront pas concernés par la "DME 2", bien qu'ayant toutefois la qualification économique d'un établissement de monnaie électronique du fait de la nature de leur activité (notamment le chèque-service). Ces entreprises ne seront pas soumises à la demande d'agrément de l'EME et n'auront pas la qualification juridique d'EME. L'article 1 § 4 et 1 § 6 précise ainsi l'exclusion de l'application des dispositions de la Directive à la monnaie électronique générée par l'usage d'un terminal mobile ou informatique ou dans le cadre d'un réseau fermé, sans préciser d'autre régime déclaratif applicable.

Ensuite, la "DME 2" prévoit un système d'exemption optionnelle où cette fois les établissements seront des EME mais dispensés d'agrément sous deux conditions cumulatives ("DME 2", art. 9) :
- les activités commerciales dans leur ensemble génèrent une moyenne de monnaie électronique en circulation qui ne dépasse pas un plafond fixé en droit interne mais qui en tout état de cause ne peut être supérieur à 5 millions d'euros ;
- aucune des personnes physiques responsables de la gestion ou de l'exercice de l'activité n'a été condamnée pour des infractions liées au blanchiment des capitaux, au financement du terrorisme ou à d'autres délits financiers.

Néanmoins, cette exemption optionnelle est assortie d'un certain nombre d'exigences formelles, notamment l'obligation pour ces établissements de monnaie électronique, à discrétion du choix des Etats membres au moment de la transposition, d'imposer que le montant chargé sur l'instrument de paiement ou sur le compte de paiement du consommateur où est stockée la monnaie électronique ne dépasse pas un certain plafond.

Ces dispositions ont le mérite d'alléger les procédures pour les entreprises souhaitant se positionner sur le marché du micro-paiement, le reste du régime n'englobant a priori aucune restriction quant au montant du stockage ou aux montants faisant l'objet de la transaction.

II -La transposition en droit français

La section 5 de la loi de transposition, la plus substantielle, consacre l'introduction en droit français du statut de l'établissement de monnaie électronique sous un intitulé distinguant :
- les émetteurs de monnaie électronique, (nouveau chapitre V, titre II, livre V du Code monétaire et financier) ;
- et les établissements de monnaie électronique (nouveau chapitre VI, titre II, livre V du Code monétaire et financier).

Le Code monétaire et financier reprend ainsi la distinction européenne entre les établissements émettant de la monnaie électronique de droit, dont la Banque de France, l'institut d'émission des départements d'Outre-mer, le Trésor Public et la Caisse des Dépôts et consignations, lorsqu'ils émettent de la monnaie électronique (C. mon. fin., art. L. 525-2 N° Lexbase : L1081IWX), et l'émission de monnaie électronique par les EME et les établissements de crédit (C. mon. fin., art. L. 525-1 N° Lexbase : L1087IW8).

Cette distinction rappelle que les EME n'ont pas le monopole de l'émission de la monnaie électronique mais leur octroie un statut propre et autonome distinct notamment des établissements de crédit.

Les EME sont expressément exclus, comme les établissements de paiement, du statut d'intermédiaire en opérations de banque (C. mon. fin., art. L. 519-1 [LXB= L1166IW4]) ; en revanche, ils peuvent faire appel à des intermédiaires en opérations de banque (IOB), conformément aux dispositions de l'article L. 519-2 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1165IW3).

A - L'émission et la distribution de monnaie électronique

Le Code monétaire et financier français a repris les activités exclues du champ d'application de la "DME 2"

- Ainsi pour les activités liées à l'émission de titres spéciaux soumis à un régime spécifique, le Code renvoie à une liste exhaustive qui sera fixée par décret et aux termes de laquelle les exploitants ne seront pas considérés comme des EME. Le texte assortit ce régime exclusif d'un mécanisme de contrôle renforcé par la Banque de France, les entreprises devant désormais fournir un rapport annuel à l'autorité de contrôle justifiant de la sécurité des titres spéciaux de paiement dématérialisé qu'elles émettent et gèrent (C. mon. fin., art. L. 525-4 N° Lexbase : L1083IWZ).

- En outre, sont toujours exclues l'émission et la gestion de monnaie électronique dans le cadre des réseaux dits fermés, cette fois cependant à condition que la capacité maximale de chargement du support électronique n'excède pas un montant qui sera fixé par décret (C. mon. fin., art. L. 525-5 N° Lexbase : L1084IW3).

A noter que sur ce point, le Code ne reprend pas la distinction opérée par la "DME 2" quant aux opérations de paiement par l'usage d'un appareil numérique, type téléphone portable ou informatique, alors même que l'article L. 311-4 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4781IES) dispose expressément, pour les services de paiement, cette exclusion formelle.

Cette absence ne devrait néanmoins moins pas être préjudiciable au regard de la compréhension globale des textes mais une certaine ambiguïté demeure quant au régime déclaratif à mettre en place, expressément prévu pour les deux autres hypothèses.

Ainsi, allant au-delà des prescriptions de la "DME 2", le Code monétaire et financier prévoit un régime de déclaration préalable, sauf pour les cas où la monnaie électronique émise est délivrée exclusivement pour l'achat d'un bien ou d'un service dans le cadre d'un accord de franchise commerciale (C. mon. fin., art. L. 525-6 N° Lexbase : L1085IW4). Le délai d'examen de cette déclaration sera fixé par décret, le silence gardé par l'ACP valant acceptation. Cette acceptation tacite est à saluer au regard des délais d'instruction en pratique qui dépassent largement le délai de droit commun de 3 mois d'examen d'une demande d'agrément.

A titre préventif, le Code monétaire et financier prévoit une prohibition de principe de toute publicité mensongère entraînant une confusion, pour ces entreprises, sur la nature de leur statut qui ne saurait être celui d'un établissement de monnaie électronique (C. mon. fin., art. L. 525-7 N° Lexbase : L1086IW7).

C'est l'article L. 525-8 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1093IWE) qui prévoit le recours aux agents sans toutefois les nommer ainsi, n'autorisant, comme la "DME 2", que le recours à l'externalisation pour la mise en circulation de la monnaie électronique, y compris le rechargement (ce que ne prévoyait pas expressément la Directive, sur ce point cette intégration est à saluer) et le remboursement, à l'exclusion implicite de l'émission. L'article L. 525-9 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1088IW9) renvoie à des dispositions règlementaires sur le régime dit de l'externalisation. Comme pour le régime des agents d'établissements de paiement, l'agent d'EME devra prendre soin de spécifier la nature du mandat le liant avec l'EME afin de ne pas créer de confusion de statut, de même l'agent restera sous l'entière responsabilité, vis-à-vis des autorités de contrôle et du consommateur, de l'EME (C. mon. fin., art. L. 525-10 N° Lexbase : L1089IWA à L. 525-12).

Comme pour l'introduction du statut d'établissement de paiement et les arrêtés du 29 octobre 2009, la voie règlementaire nécessaire pour assurer la véritable transposition de la "DME 2" contiendra certainement un large dispositif de règles venant préciser, élargir ou restreindre les dispositions législatives d'ordre très général, en espérant que le délai ne soit pas aussi long que celui de la transposition de la Directive. La transcription dans le Code monétaire et financier très brève et renvoyant aux décrets d'application laisse soupçonner une transposition faite dans l'urgence qui ne devra pas se faire au détriment du marché et du développement sectoriel de la monnaie électronique.

B - Le nouveau statut des établissements de monnaie électronique (EME)

Le Code monétaire et financier consacre un entier nouveau chapitre au régime des établissements de monnaie électronique sous les articles L. 526-1 (N° Lexbase : L1113IW7) et suivants du Code monétaire et financier.

Le champ d'activités des établissements de monnaie électronique est élargi dans les mêmes conditions que celles prévues à la "DME 2", y compris la fourniture de services de paiement et l'octroi de crédit dans les mêmes conditions que les établissements de paiement. Le statut des établissements de monnaie électronique hybrides y est également clairement prévu (C. mon. fin., art. L. 526-3 N° Lexbase : L1095IWH), renvoyant aux dispositions réglementaires spéciales.

La "DME 2" est directement transposée, faisant l'objet de quelques aménagements spéciaux.

Ainsi, l'article L. 526-6 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1098IWL) prévoit que les EME doivent, comme les établissements de paiement, être tenus de s'affilier à un organisme professionnel affilié à l'association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.

L'autorité de contrôle prudentiel (ACP) délivre les agréments. La terminologie de la garantie d'une "gestion saine et prudente" est reprise, là où la Directive mentionnait un véritable régime prudentiel (C. mon. fin., art. L. 526-8 N° Lexbase : L1100IWN). Pour les conditions de capital initial, l'article L. 526-9 (N° Lexbase : L1101IWP) renvoie une nouvelle fois à une fixation par voie réglementaire mais ce montant ne devrait pas être supérieur à 350 000 euros. Il en est de même pour le délai d'examen de la demande d'agrément, qui ne saurait être supérieur à trois mois.

L'article L. 526-19 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1111IW3) prévoit le système des exemptions d'agrément, notamment pour les EME dont le volume de monnaie électronique en circulation n'excède pas un montant qui sera fixé par décret. Cet article fixe, par ailleurs, avec certitude que pour ces établissements exemptés, le montant du stockage des unités de monnaie électronique sera plafonné. Ces établissements devront adresser à l'ACP un rapport périodique sur le respect des conditions leur permettant d'être exemptés.

Une deuxième section envisage les conditions du "passeport européen", à savoir la possibilité pour les EME implantés dans un Etat membre d'ouvrir une filiale en France ou réciproquement, au même titre que les établissements de paiement. L'article L. 526-21 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1119IWD) définit ainsi avec précision les expressions "autorités compétentes", "Etat d'origine", "Etat d'accueil" et "succursale", allant bien au-delà de l'article 3 de la "DME 2" qui renvoie expressément à l'article 25 de la "DSP". En outre, un accent est porté sur le risque lié au blanchiment des capitaux et au financement du terrorisme, l'ACP se réservant le droit de refuser une inscription en cas de soupçons.

La technique du passeport européen est souvent invoquée par les entreprises souhaitant se positionner sur le marché de la monnaie électronique, la France étant particulièrement connue pour appliquer des exigences prudentielles strictes. Le détail de ces définitions rappelle ainsi les limites de la technique au regard de la mission de contrôle de l'ACP.

Une troisième section envisage les dispositions prudentielles applicables aux EME, renvoyant pour l'essentiel à la voie réglementaire (C. mon. fin., art. L. 526-27 N° Lexbase : L1120IWE). Les exigences de fonds propres seront en conséquence fixées prochainement. Il y a lieu d'attendre des exigences relativement lourdes, au regard des dispositions de la "DME2" qui sont déjà en soi particulièrement encadrées. L'article L. 526-32 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L1125IWL) prévoit avec précision les conditions de protection des fonds déposés en vue de leur transformation immédiate en unités de monnaie électronique, et notamment l'ouverture de comptes distincts auprès d'un établissement de crédit, ainsi que la couverture par un contrat d'assurance spéciale. Ces deux contraintes ont déjà fortement handicapé le développement des établissements de paiement : en effet, il n'existe pas de produit d'assurance couvrant spécifiquement ce type d'activités et les établissements de crédit ont parfois refusé le partenariat avec les établissements de paiement pour des raisons stratégiques. Aucun autre système néanmoins permettant, par exemple, l'accès aux chambres de compensation n'a été mis en place.

Enfin, une quatrième et dernière section prévoit les dispositions relatives au secret professionnel, à la comptabilité et au contrôle légal des comptes. A noter que pour les EME hybrides, l'avis de l'ACP sur la désignation du commissaire aux comptes n'est pas requis (C. mon. fin., art. L. 526-39 N° Lexbase : L1131IWS).

***

En conclusion, bien que la transposition de la "DME 2" ait été très attendue par les marchés, elle reste relativement décevante, d'une part, parce qu'elle est soumise à un arsenal d'application par voie réglementaire qui pourrait freiner le développement de l'activité, d'autre part, parce qu'elle est moins précise que la "DME 2". En revanche, fallait-il en attendre plus ? La monnaie électronique est un enjeu considérable pour le marché dit bancaire : en effet, témoin de la révolution des instruments de paiement, elle soulève des problèmes de traçabilité et de surveillance dont le contrôle semble parfois échapper aux autorités bancaires, dans une économie où les échanges vont de plus en plus vite. L'introduction de nouveaux mécanismes d'authentification comme le 3DSecure pour les cartes bleues n'est pas encore harmonisé au niveau européen que déjà de nouveaux entrants, du fait des révolutions technologiques, ambitionnent de modifier substantiellement le système des opérations de paiement pourtant fortement impacté, dans un sens positif, par la migration SEPA. Il semblerait que le droit s'essouffle de ces révolutions technologiques et que les exigences de prudence priment avant toute mise en oeuvre concrète. La monnaie électronique a certes gagné un statut mais le niveau d'exigences prudentielles reste le même, il se retrouve renforcé de sorte qu'il ne faut pas se leurrer sur la réelle capacité tant financière qu'organisationnelle qu'un établissement doit prouver avant d'obtenir l'agrément. Il persiste en outre une véritable différence culturelle entre la France et l'Angleterre, par exemple, où de nombreux établissements de paiement ont été créés. C'est aussi dans ce secteur novateur que les conceptions du marché et de la banque trouvent leurs limites au niveau de l'harmonisation européenne. Pourtant, cette transposition est un premier pas, dix ans après l'introduction de la monnaie électronique dans notre économie ; après tout, la révolution de l'e-commerce est décennale, le temps permettra peut-être d'assouplir la conception traditionnelle que la France attache encore au chèque et à la carte bancaire. C'est en tous cas à espérer.

newsid:436252

Baux commerciaux

[Brèves] Défaut de pouvoir du juge des loyers commerciaux pour fixer le prix du bail renouvelé comportant un loyer binaire

Réf. : CA Bordeaux, 9 janvier 2013, n° 10/06831 (N° Lexbase : A8885IZ4)

Lecture: 2 min

N6270BTE

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Le 21 Mars 2013

La fixation du loyer renouvelé d'un bail commercial comportant un loyer binaire n'est régie que par la convention des parties et échappe aux règles édictées par les articles L. 145-33 (N° Lexbase : L5761AI9) et suivants du Code de commerce, sauf si les parties ont prévu de s'y soumettre quant à la fixation du prix du loyer de base du bail renouvelé. Or, tel n'est pas le cas en l'espèce. En effet, il résulte du bail que le loyer est de nature composite, comprenant une partie déterminée, le loyer de base, et une partie variable en fonction du chiffre d'affaires du preneur. Le bail prévoit que le loyer de base correspond à l'évaluation faite par les parties de la valeur locative ; il est actualisable à la date de la prise d'effet du bail et indexé chaque année au 1er janvier en fonction de l'évolution exacte de l'indice INSEE du coût de la construction, l'indice de base étant celui du 2ème trimestre 1993, soit 1012. Il est stipulé, en ce qui concerne l'indexation du loyer que la clause d'indexation constitue du chef du bailleur, un motif déterminant sans lequel il n'aurait pas contracté, ce qui est accepté expressément par le preneur et qu'en conséquence, toute impossibilité constatée de faire jouer la clause, hormis le cas de blocage résultant d'un texte légal ou réglementaire, sera une cause de résiliation du bail si le bailleur l'estime nécessaire. Il est, en outre, expressément convenu entre les parties à titre de condition essentielle et déterminante que lors des renouvellements successifs éventuels, le loyer de base ne pourra en aucun cas être inférieur à la valeur locative. Il n'est fait aucune référence dans les clauses relatives au loyer de base, à son indexation et à son évaluation à la valeur locative en cas de renouvellement, aux textes du statut des baux commerciaux en matière de fixation du loyer. Dès lors, le juge des loyers commerciaux n'a que le pouvoir de constater l'accord des parties, y compris sur le loyer de renouvellement, mais, en cas de désaccord, ne dispose d'aucun pouvoir pour fixer en leur lieu et place le prix du bail renouvelé. Telle est la solution énoncée par la cour d'appel de Bordeaux dans un arrêt du 9 janvier 2013 (CA Bordeaux, 9 janvier 2013, n° 10/06831 N° Lexbase : A8885IZ4 ; cf., not., Cass. civ. 3, 7 mars 2001, n° 99-17.055 N° Lexbase : A4735ARS et cf. l’Ouvrage "baux commerciaux" N° Lexbase : E8942AEW).

newsid:436270

Commercial

[Brèves] Compétence matérielle des tribunaux de commerce : date d'appréciation de la nature commerciale d'un acte

Réf. : Cass. com., 12 mars 2013, n° 12-11.765, F-P+B (N° Lexbase : A9772I9S)

Lecture: 1 min

N6264BT8

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Le 26 Mars 2013

Pour déterminer la compétence du tribunal de commerce pour connaître d'une contestation, la nature commerciale de l'acte s'apprécie à la date à laquelle il a été passé, peu important que son auteur ait perdu depuis lors la qualité de commerçant. Tel est le principe énoncé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mars 2013 (Cass. com., 12 mars 2013, n° 12-11.765, F-P+B N° Lexbase : A9772I9S). En l'espèce une ancienne commerçante a assigné plusieurs sociétés devant le tribunal de grande instance en nullité des contrats de location et de financement conclus avec ces dernières. L'une d'elles a soulevé l'incompétence du tribunal au profit du tribunal de commerce. La cour d'appel d'Aix-en-Provence rejette l'exception d'incompétence, retenant qu'ayant été inscrite au registre du commerce et des sociétés à compter du 4 juin 1999, la requérante en a été radiée le 10 mai 2007 et que même si certains contrats ont pu être conclus quand elle avait la qualité de commerçante, elle avait perdu cette qualité au moment où elle a saisi le tribunal (CA Aix-en-Provence, 20 septembre 2011, n° 09/22283 N° Lexbase : A7977H7L). Mais énonçant le principe précité, la Chambre commerciale casse l'arrêt d'appel au visa de l'article L. 721-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L7624HNP).

newsid:436264

Concurrence

[Brèves] Aides d'Etat : la France condamnée pour les déclarations de soutien et l'avance d'actionnaire de l'Etat français en faveur de France Télécom

Réf. : CJUE, 19 mars 2013, aff. jointes C-399/10 P et C-401/10 P (N° Lexbase : A0110KBP)

Lecture: 2 min

N6273BTI

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Le 01 Décembre 2016

Dans un arrêt du 19 mars 2013, la CJUE a infirmé l'arrêt du TPIUE (TPIUE, 21 mai 2010, aff. jointes T-425/04, T-444/04, T-450/04 et T-456/04 N° Lexbase : A4104EXB) qui avait annulé la décision de la Commission qualifiant d'aide d'Etat, les déclarations de soutien et l'avance d'actionnaire de l'Etat français en faveur de France Télécom (CJUE, 19 mars 2013, aff. jointes C-399/10 P et C-401/10 P N° Lexbase : A0110KBP). En substance, elle estime que bien que cette avance n'ait pas été exécutée par France Télécom, elle lui a conféré un avantage octroyé au moyen de ressources étatiques car grevant potentiellement le budget de l'Etat. Pour la Cour, le Tribunal a commis une erreur de droit, en estimant nécessaire d'identifier une diminution du budget étatique ou un risque économique suffisamment concret grevant ce budget, étroitement lié et correspondant à un avantage spécifique découlant soit de l'annonce de soutien de décembre 2002, soit de l'offre d'actionnaire. Il s'ensuit que le Tribunal a requis, à tort, un lien étroit de connexité entre avantage et engagement de ressources d'Etat, le conduisant à exclure d'emblée que ces interventions étatiques puissent, en fonction des liens entre elles et de leurs effets, être regardées comme une seule intervention. En effet, une intervention étatique susceptible, à la fois, de placer les entreprises concernées dans une situation plus favorable que d'autres et de créer un risque suffisamment concret de la réalisation à l'avenir, d'une charge supplémentaire pour l'Etat, peut grever les ressources de celui-ci. Par conséquent, pour constater l'existence d'une aide d'Etat, la Commission doit établir un lien suffisamment direct entre l'avantage accordé au bénéficiaire et une diminution du budget étatique, voire un risque économique suffisamment concret de charges le grevant. En revanche, contrairement à ce qu'a considéré le Tribunal, il n'est pas nécessaire qu'une telle diminution, voire un tel risque, corresponde ou soit équivalent à l'avantage, ni que ce dernier ait pour contrepartie une telle diminution ou un tel risque ni qu'il soit de même nature que l'engagement de ressources d'Etat dont il découle. La Cour relève à cet égard qu'il est manifeste que l'annonce de soutien ne peut être dissociée de l'avance d'actionnaire offerte sous forme de ligne de crédit de 9 milliards d'euros dont l'annonce faisait expressément état. Or, l'avance d'actionnaire, annoncée et notifiée le 4 décembre 2002, a conféré un avantage à France Télécom en lui permettant d'augmenter ses moyens de financement et de rassurer le marché quant à sa capacité de faire face à ses échéances et ce même si France Télécom n'a pas signé le contrat d'avance qui lui a été adressé. Ainsi, cette annonce d'avance d'actionnaire constituait un avantage, octroyé au moyen de ressources d'Etat.

newsid:436273

Entreprises en difficulté

[Chronique] Chronique mensuelle de droit des entreprises en difficulté - Mars 2013

Lecture: 12 min

N6245BTH

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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises et Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences HDR à l'Université de Nice-Sophia-Antipolis, Membre du CERDP

Le 12 Avril 2013

Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de retrouver, cette semaine, la chronique de Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises, et Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences HDR à l'Université de Nice-Sophia-Antipolis, Membre du CERDP, retraçant l'essentiel de l'actualité juridique rendue en matière de procédures collectives. Ce mois-ci, les auteurs ont choisi de s'arrêter sur deux arrêts rendus par la Chambre commerciale de la Cour de cassation. Dans le premier rendu le 19 février 2013, et commenté par le Professeur Le Corre, la Haute juridiction vient préciser le délai d'action en résiliation du bail commercial pendant la liquidation judiciaire, en énonçant très clairement que le point de départ du délai de trois mois avant lequel l'action en résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire ne peut être engagée est soit la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire lorsque celle-ci est prononcée immédiatement, soit celle du jugement d'ouverture de sauvegarde ou de redressement judiciaire en cas de conversion de la procédure de liquidation judiciaire (Cass. com., 19 février 2013, n° 12-13.662, FS-P+B). Dans le second commentaire de cette chronique, Emmanuelle Le Corre-Broly revient, à partir d'un arrêt du 26 février 2013, sur le piège de l'évolution des voies de recours en matière de relevé de forclusion (Cass. com., 26 février 2013, n° 11-19.249, F-D).
  • Délai de l'action en résiliation du bail commercial pendant la liquidation judiciaire (Cass. com., 19 février 2013, n° 12-13.662, FS-P+B N° Lexbase : A4171I8Y)

Les modalités de la résiliation du bail commercial après ouverture d'une procédure collective sont complexes (1). Parmi les difficultés, figurent celles intéressant les délais imposés au bailleur pour introduire son action en résiliation.

Tantôt le législateur impose au bailleur d'agir avant l'expiration d'un certain délai. Plus souvent, il lui commande de n'agir qu'à partir d'un certain délai. Dans certaines situations, les délais doivent en outre se combiner entre eux. On le voit, la question n'est pas simple, alors au surplus qu'il convient encore d'introduire des distinctions selon que l'action a pour fondement une inexécution financière ou une inexécution d'une autre nature. En somme, la règlementation symbolise tout l'esprit français : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Une chose est sûre : le grain à moudre pour les avocats ne manque pas et il est sans doute préférable que ce contentieux bien spécifique soit réservé aux purs spécialistes.

En l'espèce, une société, preneuse à bail commercial, a été mise en redressement judiciaire le 27 septembre 2010, et un mois et demi plus tard, le 8 novembre 2010, a été placée en liquidation judiciaire. Précisons immédiatement que la législation applicable est celle issue de la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005 (loi n° 2005-845 N° Lexbase : L5150HGT), dans la rédaction que lui a donnée l'ordonnance du 18 décembre 2008 (ordonnance n° 2008-1345 N° Lexbase : L2777ICT), cette dernière s'appliquant aux procédures ouvertes à compter du 15 février 2009.

Le 28 décembre 2010, soit très exactement trois mois et un jour après l'ouverture du redressement judiciaire, le bailleur délivre au liquidateur un commandement visant la clause résolutoire pour non paiement des loyers "échus" depuis l'ouverture de la procédure collective. Nonobstant la procédure de résiliation du bail commercial en cours, le juge-commissaire, sur requête du liquidateur, autorise la cession du fonds de commerce, en ce compris le droit au bail. Dix jours plus tard, le juge des référés constate la résiliation du bail. Le liquidateur interjette appel de l'ordonnance du juge des référés en reprochant notamment au premier juge d'avoir méconnu les dispositions de l'article L. 641-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L8859ING), interdisant au bailleur d'introduire une action en résiliation de bail moins de trois mois après le prononcé de la liquidation judiciaire.

La question qui se posait était de savoir si le délai de trois mois, prévu par l'article L 641-12 du Code de commerce, avait pour point de départ exclusif le jugement de liquidation judiciaire ou si, dans l'hypothèse d'une liquidation judiciaire prononcée sur conversion d'un redressement judiciaire, le délai courait à compter du jugement d'ouverture du redressement judiciaire.

Rejetant le pourvoi, la Cour de cassation opte pour la seconde solution, en énonçant que "l'action en résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, prévue à l'article L. 641-12, 3° du Code de commerce, ne peut être engagée avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter du jugement d'ouverture ; le point de départ de ce dernier est soit la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire lorsque celle-ci est prononcée immédiatement, soit celle du jugement d'ouverture de sauvegarde ou de redressement judiciaire en cas de conversion de la procédure de liquidation judiciaire".

La réponse est donc on ne peut plus claire. Elle avait été annoncée en doctrine (2) et ne peut être qu'approuvée.

Au regard des textes, tout d'abord, il faut remarquer que l'article L. 641-12, 3° du Code de commerce énonce que "le bailleur peut également demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, dans les conditions prévues aux troisième à cinquième alinéa de l'article L. 622-14 (N° Lexbase : L8845INW)". En se reportant à l'alinéa 3 de l'article L. 622-14 du Code de commerce, on lit que "lorsque le bailleur demande la résiliation judiciaire ou fait constater la résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu'au terme d'un délai de trois mois à compter du jugement d'ouverture". Il faut donc comprendre que, dans la liquidation judiciaire, le bailleur doit agir au terme d'un délai de trois mois à compter du jugement d'ouverture. Ainsi, si le jugement d'ouverture est une liquidation, judiciaire, le délai de trois mois courra de l'ouverture de celle-ci. Mais si le jugement d'ouverture est une sauvegarde, le délai courra à compter de ce jugement, la solution étant transposable en redressement judiciaire, car l'article L. 622-14, alinéa 3, du Code de commerce est rendu applicable en redressement par l'article L. 631-14, alinéa 1er, du même code (N° Lexbase : L2453IEL).

Au regard de la logique juridique, ensuite, il serait apparu incompréhensible d'obliger le bailleur, qui aurait le cas échéant déjà attendu trois mois en redressement judiciaire, d'attendre encore trois mois en liquidation judiciaire, soit au total six mois pour engager son action en résiliation du bail. Le délai de trois mois est conçu comme un délai d'attente, dont l'objectif est de permettre au preneur à bail, à son administrateur judiciaire ou à son liquidateur, de régulariser les loyers et charges impayés et qui correspondent à une occupation postérieure au jugement d'ouverture. Si la régularisation intervient, la cause de résiliation disparaît.

Il importe de noter que le bailleur ne peut fonder sa demande de constat de la résiliation que sur le défaut de paiement de loyers et charges "afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture". Cette notion ne peut être réduite à celle le plus communément employée par les praticiens, comme cela était d'ailleurs le cas en l'espèce, de loyers et charges "échus après l'ouverture de la procédure collective". Il convient en effet ici de raisonner non en fonction de l'exigibilité des loyers et charges, mais uniquement en fonction de la date de naissance de ces loyers et charges. Il faut donc s'interroger sur leur fait générateur et se demander s'ils sont nés après le jugement d'ouverture. Il n'en sera ainsi que si ces loyers et charges se rapportent à une occupation postérieure au jugement d'ouverture. Le fait générateur de la créance de loyers est en effet trouvé dans la jouissance procurée, expression équivalente à celle d'occupation. A chaque période de jouissance, correspondent un loyer et des charges. Peu importe donc que les loyers et charges soient échus après le jugement d'ouverture s'ils couvrent une période antérieure audit jugement. Ils ne pourront justifier la résiliation du bail entreprise après le jugement d'ouverture, la règle de l'arrêt des poursuites individuelles n'étant pas ici écartée.

A cet égard, il ne faut pas se méprendre sur la lettre de l'article L. 641-12, 3° du Code de commerce, qui vise le "défaut de paiement de loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire". Cette lettre est à la vérité inexacte.

Elle est fausse en ce qu'elle laisse accréditer l'idée que, en liquidation judiciaire, seules des causes postérieures à la liquidation judiciaire pourraient fonder la résiliation. Or, il n'en est rien. Le bailleur pourra tout aussi bien s'emparer de causes financières postérieures au jugement d'ouverture de la sauvegarde ou du redressement judiciaire, pour fonder, en liquidation judiciaire, la résiliation de son bail. Ainsi, même si le liquidateur paie scrupuleusement ce qu'il doit es qualités au bailleur, cela sera insuffisant pour éviter la résiliation du bail, les inexécutions financières de la période d'observation n'étant pas purgées par la conversion en liquidation judiciaire.

Il faut ici se garder de raisonner, pour les causes financières de la période d'observation, comme s'il s'agissait de causes financières antérieures au jugement d'ouverture. La logique juridique est toute différente.

Pour les premières, les règles applicables aux créances postérieures méritantes obligeant à payer à l'échéance doivent trouver application. Observons au demeurant qu'elles sont plus favorables au locataire que celles régissant la continuation des contrats en cours, puisque, à prendre ces dernières à la lettre, le preneur à bail qui continue le contrat devrait payer "au comptant". Il serait peut-être temps de faire le ménage dans ces dispositions déjà anciennes, qui comportent depuis le début les mêmes approximations, en soumettant les contrats à exécution successive, tel le bail, à la règle du paiement au comptant, autrement dit obligeant le locataire, à les suivre à la lettre, à payer d'avance tous les termes du bail. Avec cela, il est sûr de ne pas se redresser !

Pour les secondes, c'est-à-dire les causes financières antérieures, d'autres règles impératives s'appliquent : celles de la discipline collective, qui interdisent au bailleur de recevoir, après jugement d'ouverture, paiement de loyers et charges nés avant ledit jugement et qui prohibent toute résiliation de contrat, après jugement d'ouverture, fondée sur le défaut de paiement de créances antérieures, en application de la règle de l'arrêt des poursuites individuelles.

Terminons en indiquant que la réglementation du délai d'action, qualifié de délai d'attente, ne concerne que la résiliation ayant pour fondement les causes financières. Si la demande de constat de la résiliation repose sur une inexécution non financière, la règle est toute différente. Il faut alors appliquer l'article L. 641-12, 2° du Code de commerce. Il n'est plus question de délai d'attente, mais au contraire, d'un délai buttoir de trois mois qui court exclusivement à compter de la publicité du jugement de liquidation judiciaire, qu'il s'agisse du jugement d'ouverture ou du jugement de conversion. Passé ce délai, l'action sera irrecevable.

Mais ce délai butoir n'existe que pour des causes antérieures au jugement d'ouverture. A contrario, il faut donc décider que le délai ne régit pas l'action tendant à faire prononcer ou constater la résiliation du bail ayant pour fondement des causes non financières postérieures au jugement d'ouverture.

Observons, pour se montrer encore critique sur la rédaction de l'ensemble des textes régissant la résiliation du bail des locaux professionnels en liquidation judiciaire, que l'interprète a été obligé, pour assurer une cohérence entre les textes, d'ajouter dans le 2° de l'article L. 641-12 l'expression "non financières" entre les mots "causes" et "antérieures".

Cher lecteur, vous avez dû relire deux fois, et peut-être avez vous attrapé mal à la tête. Ce n'est pas de notre faute. Législateur, s'il vous plaît, un petit effort...

Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises

  • Le piège de l'évolution des voies de recours en matière de relevé de forclusion (Cass. com., 26 février 2013, n° 11-19.249, F-D N° Lexbase : A8825I8D)

Les modifications répétées des textes sont sources d'erreurs de la part des praticiens qui ont parfois peine à intégrer parfaitement le contenu des réformes successives. Il en est notamment ainsi en matière de voies de recours exercées dans le cadre du droit des entreprises en difficulté, comme en témoigne un récent arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation.

En l'espèce, régie par les dispositions antérieures à la loi du 26 juillet 2005, un créancier avait formé opposition à l'ordonnance du juge-commissaire n'ayant pas fait droit à sa requête en relevé de forclusion. Le tribunal avait alors rendu un jugement rejetant le recours, ce qui avait conduit le créancier à former pourvoi à l'encontre du jugement.

Par un arrêt du 26 février 2013, la Chambre commerciale déclare irrecevable le pourvoi au motif qu'un recours contre le jugement pouvait être formé devant la cour d'appel en application de l'article L. 621-46, alinéa 3, ancien du Code de commerce (N° Lexbase : L6898AIC), applicable aux procédures ouvertes antérieurement au 1er janvier 2006, date d'entrée en vigueur de la loi de sauvegarde des entreprises.

A la décharge du créancier, qui a commis une erreur en portant son recours devant la Cour de cassation et non la cour d'appel, il faut relever que plusieurs modifications législatives touchant aux voies de recours ouvertes en matière de relevé de forclusion sont intervenues, conduisant à troubler quelque peu l'esprit des plaideurs. En effet, sous l'impulsion d'un législateur amateur de tango argentin, les voies de recours ouvertes aux parties sur les décisions statuant en matière de relevé de forclusion ont fait l'objet de trois modifications comparables.

Sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985 (loi n° 85-98 N° Lexbase : L7852AGW), dans sa rédaction initiale, aucune précision n'était apportée par les textes au sujet de la voie de recours ouverte à l'encontre des ordonnances statuant sur une requête en relevé de forclusion. Faute de précision, était alors recevable la voie de recours "classique" sur les ordonnances du juge-commissaire, c'est-à-dire le recours porté devant le tribunal et dénommé en pratique l'opposition. L'appel s'avérait donc irrecevable sur l'ordonnance du juge-commissaire statuant sur le relevé de forclusion.

Des difficultés se présentaient cependant, en pratique, dans l'hypothèse où le juge-commissaire, dans une seule et même ordonnance, relevait à la fois le créancier de la forclusion et admettait sa créance (3). En effet, la voie de recours sur l'ordonnance admettant la créance était (et demeure aujourd'hui encore) l'appel, cependant que la voie de recours sur le relevé de forclusion était l'opposition. Cette mixité de la décision avait conduit la jurisprudence à décider, sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985, que l'ordonnance par laquelle le juge-commissaire relève le créancier de la forclusion et admet sa créance au passif est susceptible d'appel pour le tout devant la cour d'appel (4).

Dans un premier temps, le législateur du 10 juin 1994 (loi n° 94-475 N° Lexbase : L9127AG7) a aplani la difficulté. En effet, pour les procédures ouvertes entre le 1er octobre 1994 (date d'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1994) et le 1er janvier 2006 (date d'entrée en vigueur de la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005), une uniformisation a été instaurée par le législateur en matière de voie de recours sur les décisions du juge-commissaire relatives à la vérification des créances. En effet, l'ancien article L. 621-46, alinéa 3, du Code de commerce prévoyait que les ordonnances statuant en matière de relevé de forclusion de même que celles statuant en matière d'admission de la créance au passif étaient susceptibles de la même voie de recours ouverte aux parties : l'appel. Plus aucun recours ne pouvait donc être porté devant le tribunal sur l'ordonnance statuant sur la demande en relevé de forclusion. En conséquence, il avait été jugé qu'était entaché de nullité le jugement du tribunal ayant déclaré recevable l'opposition. L'excès de pouvoir du tribunal qui s'était prononcé malgré son incompétence ouvrait alors, à l'encontre du jugement, la voie de l'appel nullité (5). C'est cette solution que rappelle la Chambre commerciale dans son arrêt du 26 février 2013 en déclarant irrecevable le pourvoi formé à l'encontre du jugement rendu sur opposition à l'ordonnance statuant en matière de relevé de forclusion, au motif qu'un recours (l'appel nullité) pouvait être formé devant la cour d'appel.

Cette solution, qui résulte de l'article L. 621-46, alinéa 3, ancien, du Code de commerce, n'est applicable qu'aux procédures ouvertes antérieurement au 1er janvier 2006 car la question des voies de recours en matière de décisions statuant sur le relevé de forclusion a, à nouveau, fait l'objet une modification.

En effet, la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, n'apporte plus de précision particulière concernant la voie de recours ouverte sur l'ordonnance statuant sur le relevé de forclusion. Dans le silence du législateur, il faut s'en rapporter au droit commun des voies de recours sur les ordonnances du juge-commissaire. Puisque, par principe, "les ordonnances peuvent faire l'objet d'un recours devant le tribunal" (C. com., art. R. 621-21, al. 4 N° Lexbase : L0867HZ7), appelé en pratique opposition, la voie de recours sur l'ordonnance du juge-commissaire statuant en matière de relevé de forclusion est désormais l'opposition (6), laquelle sera portée devant le tribunal. Elle doit être exercée par les parties dans le délai de 10 jours à compter de la notification qui leur est faite de l'ordonnance. Pour sa part, le jugement du tribunal qui statuera sur l'opposition sera susceptible d'appel, lequel devra également être formé dans le délai de 10 jours.

En matière d'admission des créances, est en revanche maintenu le principe selon lequel la voie de recours à l'encontre de la décision d'admission au passif est l'appel (C. com., art. L 624-7 N° Lexbase : L3805HBK). En conséquence, la difficulté qui se présentait sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985 non réformée se pose ici dans les mêmes termes : quelle serait la voie de recours devant être exercée à l'encontre d'une ordonnance du juge-commissaire qui, tout à la fois, statuerait sur le relevé de la forclusion et sur l'admission de la créance ? Est-ce la voie de recours ouverte à l'encontre de l'ordonnance statuant sur l'admission de la créance (l'appel), ou la voie de recours ouverte sur l'ordonnance statuant en matière de relever de forclusion (l'opposition)? Très logiquement, dans la droite ligne de la jurisprudence rendue sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985 non réformée, la doctrine considère que l'appel contre cette ordonnance mixte semble recevable (7).

Force est de constater qu'en matière de voies de recours, le législateur du droit des entreprises en difficulté aurait pu faire plus simple...

Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences HDR à l'Université de Nice-Sophia-Antipolis, Membre du CERDP


(1) Sur une étude de la question, nos obs., Questions-réponses sur la résiliation du bail commercial après l'ouverture d'une procédure collective, Gaz. Pal., 18 janvier 2013, n° 18, Technique p. 43.
(2) F. Auque, Le nouveau droit de l'entreprise en difficulté : le cas particulier du bailleur, Rev. proc. coll., 2006/4, p. 341 et s., sp. p. 344 ; nos obs., Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz action, 6ème éd., 2012/2013, n° 433.29.
(3) Ce qui ne devrait pas se faire, en théorie, car cela court-circuite la procédure de vérification des créances.
(4) Cass. com., 27 octobre 1998, n° 95-14.182 (N° Lexbase : A2246AZ9), Act. proc. coll., 1998/13, n° 183.
(5) Cass. com., 28 nov. 2000, n° 97-20.718, publié (N° Lexbase : A9322AHQ), Bull. civ. IV, n° 186; D., 2001, AJ 127, obs. Lienhard ; JCP éd. E, 2001, pan. 157.
(6) En ce sens P.-M. Le Corre, préc. note 2 ; A. Lienhard, Procédures collectives, Litec, 4ème éd., n° 101.51; J. Vallansan ET alii, Difficultés des entreprises - Commentaire article par article du livre VI du Code de commerce, Litec, 6ème éd., p. 162; J. Vallens, Lamy droit commercial, éd 2012, n° 3470; F. Pérochon, Entreprises en difficulté, 9ème éd., LGDJ, n° 1371 ; S. Becqué-Ickowicz, De l'entreprise au cours de la période d'observation, LPA n° sp., 8 février 2006, n° 28, p. 39 et s., sp. p. 62 ; A. Jacquemont, Procédures collectives, Litec, 7ème éd., n° 560 ; J.-P. Réméry, L'appel dans la loi de sauvegarde, JCP éd. E, 2008, I, 103, p. 13 et s., sp. p. 14, n° 14. Contra : C. Saint-Alary-Houin, Droit des entreprises en difficulté, Domat, 7ème éd., n° 720.
(7) P.-M. Le Corre, préc., n° 665.61.

newsid:436245

Entreprises en difficulté

[Brèves] Non éligibilité au traitement préférentiel de la créance de loyer d'habitation du débiteur, échue postérieurement au jugement d'ouverture

Réf. : Cass. com., 12 mars 2013, n° 11-24.365, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6604I9H)

Lecture: 1 min

N6260BTZ

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Le 21 Mars 2013

La créance de loyer d'habitation du débiteur, échue postérieurement au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de ce dernier, n'est pas une créance née pour les besoins du déroulement de la procédure. Tel est le principe énoncé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mars 2013 (Cass. com., 12 mars 2013, n° 11-24.365, FS-P+B+I N° Lexbase : A6604I9H). En l'espèce, un bailleur a donné à bail des locaux à usage d'habitation suivant contrat du 3 mai 2009. Le preneur a été mis en liquidation judiciaire le 25 juin 2009 avec poursuite d'activité jusqu'au 3 juillet 2009. Le bailleur a alors assigné le débiteur en paiement de loyers échus depuis le mois de juillet 2009. Le tribunal d'instance de Montreuil-sur-mer a condamné le liquidateur au paiement des loyers réclamés, le jugement retenant que la créance locative est née pour les besoins du déroulement de la procédure. Mais énonçant le principe précité, la Cour de cassation casse le jugement des juges Montreuillois au visa de l'article L. 641-13, I du Code de commerce (N° Lexbase : L3405IC4 ; cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E0390EUY).

newsid:436260

Entreprises en difficulté

[Brèves] Formalisme de la demande en revendication

Réf. : Cass. com., 12 mars 2013, n° 11-24.729, FS-P+B (N° Lexbase : A9689I9Q)

Lecture: 1 min

N6261BT3

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Le 26 Mars 2013

Une lettre qui n'invitait pas son destinataire à se prononcer sur le droit de propriété de la bailleresse sur le bien, ne vaut pas demande en revendication. Tel est le principe énoncé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mars 2013 (Cass. com., 12 mars 2013, n° 11-24.729, FS-P+B N° Lexbase : A9689I9Q). En l'espèce, une société (la débitrice) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 16 juin 2009 et 13 avril 2010. Le 17 juillet 2009, la bailleresse a demandé à la débitrice de prendre position sur la poursuite du contrat de location d'un chariot élévateur puis, après avoir vainement revendiqué ce bien le 28 avril 2010, a présenté au juge-commissaire une requête en revendication. Par jugement du 26 novembre 2010, le tribunal a infirmé l'ordonnance ayant accueilli cette requête pour tardiveté de la demande. La cour d'appel de Besançon infirme ce jugement (CA Besançon, 27 juillet 2011, n° 10/03007 N° Lexbase : A1176HXT). Pour ce faire, après avoir énoncé que rien n'interdit à celui qui revendique de le faire en même temps que, le cas échéant, il interroge le débiteur sur la poursuite du contrat afférent au bien en cause, la cour d'appel retient que la lettre du 17 juillet 2009, outre qu'elle demandait de prendre position sur la poursuite du contrat en cours, rappelait que la résiliation entraînerait l'obligation de restitution immédiate du matériel loué, et qu'elle a été communiquée, à la même date, au mandataire judiciaire avec la même observation, de sorte que cette lettre devait s'analyser en une demande de revendication susceptible d'acquiescement. Mais énonçant le principe précité, la Cour régulatrice casse l'arrêt d'appel au visa des articles L. 624-9 (N° Lexbase : L3492ICC) et R. 624-13 (N° Lexbase : L0913HZT) du Code de commerce, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 (N° Lexbase : L2777ICT) et du décret du 12 février 2009 (N° Lexbase : L9187ICA ; cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E8363EPG).

newsid:436261

Entreprises en difficulté

[Brèves] Ouverture d'une procédure collective en Italie et compétence du juge des ordres français dans la distribution du prix de vente de l'immeuble du débiteur situé en France

Réf. : Cass. com., 12 mars 2013, n° 11-27.748, F-P+B (N° Lexbase : A9678I9C)

Lecture: 2 min

N6263BT7

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Le 28 Mars 2013

La répartition entre créanciers hypothécaires et privilégiés du produit de la vente judiciaire forcée d'un immeuble relève, en droit international privé commun, de la compétence des juridictions de l'Etat sur le territoire duquel s'est déroulée l'adjudication, en raison des liens étroits qui unissent la procédure de distribution à celle de vente, y compris lorsque celle-ci porte sur des actifs immobiliers dépendant d'une procédure collective ouverte à l'étranger, dont la réalisation doit suivre les formes imposées par la loi du lieu de leur situation. Par ailleurs, il résulte des règles de conflit de lois énoncées à l'article 24 de la Convention franco-italienne du 3 juin 1930, sur l'exécution des jugements en matière civile et commerciale, que, si l'actif de faillite est réparti entre créanciers conformément à la loi du pays où la faillite a été déclarée et si cette loi fixe également les règles relatives à l'admission des créances, c'est à la loi du lieu de situation des immeubles qu'il appartient de régir les privilèges et droits de préférence dont ceux-ci sont grevés. Aussi, la cour d'appel, qui n'a pas dit que la loi française s'appliquerait pour vérifier l'opposabilité à la procédure collective des droits des créanciers titulaires d'hypothèques et privilèges immobiliers, en a exactement déduit que la loi italienne devait déterminer l'admission de ces créanciers, tandis que les difficultés relatives à leur concours et à leur classement dans la procédure d'ordre devaient être tranchées par application de la loi française. Tel sont les principes énoncés par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 12 mars 2013 (Cass. com., 12 mars 2013, n° 11-27.748, F-P+B N° Lexbase : A9678I9C). En l'espèce deux époux (les débiteurs) ont été mis en faillite par des jugements du tribunal de Livourne (Italie) des 4 juin et 5 juillet 1996, revêtus de l'exequatur par décision du 25 juin 1998. Deux banques ont, par des commandements aux fins de saisie immobilière publiés après l'exequatur, poursuivi la vente de biens immobiliers appartenant aux débiteurs et situés à Nice, les syndics reprenant ces poursuites. A la suite de l'adjudication, des procédures d'ordre ont été ouvertes par le juge chargé des ordres du TGI de Nice, dont la compétence avait été retenue sur le fondement du Règlement n° 44/2001 (N° Lexbase : L7541A8S) par des arrêts cassés (Cass. com., 9 décembre 2008, deux arrêts, n° 07-18.597, F-D N° Lexbase : A7159EBR et n° 07-18.598 N° Lexbase : A7160EBS), en raison d'une application faite d'office de ce texte, mais sans avoir invité les parties à présenter leurs observations. Sur renvoi, la cour d'appel d'Aix-en-Provence ayant confirmé à nouveau la compétence du juge des ordres du TGI de Nice (CA Aix-en-Provence, 15ème ch., sect. B, 24 février 2011, deux arrêts, n° 10/00079 N° Lexbase : A2466G3Q et n° 10/00085 N° Lexbase : A2467G3R), les syndics ont formé un pourvoi en cassation que la Cour régulatrice rejette en énonçant les principes de solution précités.

newsid:436263

Entreprises en difficulté

[Brèves] Transmission d'une QPC sur la sanction, prévue par l'ancien article L. 621-46 du Code de commerce, de l'extinction de la créance non-déclarée dans les délais

Réf. : CA Paris, Pôle 5, 9ème ch., 21 février 2013, n° 12/22364 (N° Lexbase : A4765I8Y)

Lecture: 1 min

N6272BTH

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Le 21 Mars 2013

La sanction, prévue par l'ancien article L. 621-46 du Code de commerce (N° Lexbase : L6898AIC), de l'extinction de la créance du créancier établi en France ne l'ayant pas déclarée dans les délais et n'ayant pas été relevé de forclusion, en ce qu'elle a pour effet de priver de tout droit au titre de cette créance, tant à l'encontre de son débiteur qu'au regard des garanties qu'il a pu exiger, est-elle conforme à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (N° Lexbase : L1364A9E) ? Telle est la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour d'appel de Paris à la Cour de cassation, dans un arrêt du 21 février 2013 (CA Paris, Pôle 5, 9ème ch., 21 février 2013, n° 12/22364 N° Lexbase : A4765I8Y). La cour estime que, bien qu'aujourd'hui abrogé, l'article L 621-46 du code de commerce est applicable à la cause, la liquidation judiciaire, dont il est en l'espèce question ayant été ouverte antérieurement au 1er janvier 2006. En outre il n'apparaît pas que le Conseil constitutionnel ait antérieurement statué sur cette disposition législative et, pour les juges, la critique de la conformité l'article L. 621-46 du Code de commerce, emportant extinction du droit de créance du créancier défaillant, avec le droit inviolable et sacré proclamé par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789, faisant partie du bloc de constitutionnalité de la Constitution en vigueur, apparaît sérieuse et justifie la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation. On relèvera que le requérant faisait notamment valoir que l'atteinte au droit de propriété ne peut être remise en cause que pour des motifs d'intérêt général et à la condition que l'atteinte soit proportionnée avec l'objectif suivi. Or, selon lui, la préservation du patrimoine du débiteur pouvant être atteinte sans la sanction de l'extinction de la créance à l'instar du droit actuel ne prévoyant que la simple inopposabilité.

newsid:436272

Internet

[Panorama] Panorama d'actualité en droit des nouvelles technologies du cabinet FERAL-SCHUHL / SAINTE-MARIE, société d'avocats - Mars 2013

Lecture: 11 min

N6235BT4

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Le 21 Mars 2013

Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de retrouver, cette semaine, le panorama d'actualité en droit des nouvelles technologies réalisé par le cabinet d'avocats FERAL-SCHUHL / SAINTE-MARIE. Ce cabinet, fondé par des avocats spécialistes dans les technologies, se concentre sur la négociation et la contractualisation de projets innovants et technologiques, sur la gestion des droits de propriété intellectuelle et sur la médiation, l'arbitrage ou les contentieux associés. Composé de 15 avocats et juristes spécialisés, le cabinet FERAL-SCHUHL / SAINTE-MARIE, leader dans le secteur des technologies de l'information et de la communication, sélectionne donc, tous les mois, l'essentiel de l'actualité du droit des NTIC. Au programme de ce panorama on retrouvera, notamment, deux arrêts de la Cour de cassation sur les acteurs de l'internet : dans le premier en date du 29 janvier 2013, la Chambre commerciale casse l'arrêt d'appel ayant retenu la responsabilité de Google pour concurrence déloyale et publicité trompeuse dans le cadre de son service Adwords ; dans le second, la première chambre civile confirme, le 19 février 2013, qu'un site internet d'enchères par voie électronique en vue de la vente est un courtier et n'est donc pas soumis à la réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques. Les auteurs de ce panorama ont également sélectionné un arrêt important en matière de cybersurveillance, par lequel la Chambre sociale consacre, le 12 février 2013, la présomption de caractère professionnel de la clé USB connectée à un ordinateur professionnel. On relèvera également, concernant le commerce électronique, deux décisions, l'une de la cour d'appel de Paris qui, après avoir posé une question préjudicielle à la CJUE conclut à l'illicéité d'une clause prohibant la vente en ligne, et l'autre, rendue le 14 février 2013 par le Conseil d'Etat qui se prononce sur la vente de médicaments non soumis à prescription sur internet. I - Acteurs de l'internet
  • Google Adwords : cassation de l'arrêt ayant retenu la responsabilité de Google (Cass. com., 29 janvier 2013, n° 11-21.011, F-D N° Lexbase : A6208I4P)

Une société se plaignait de voir apparaître la publicité de son concurrent lorsqu'on renseignait son nom sur le moteur de recherche Google. La cour d'appel de Paris avait fait suite à ses demandes en retenant la responsabilité de Google et de l'entreprise concurrente pour concurrence déloyale et publicité trompeuse. Dans un arrêt du 29 janvier 2013, la Cour de cassation a cassé cet arrêt au motif qu'il n'était pas répondu aux conclusions de la défenderesse relatives à la qualité d'hébergeur de Google. La Haute juridiction relève, en outre, que la cour d'appel avait condamné l'annonceur pour concurrence déloyale sans "relever les circonstances caractérisant un risque de confusion" et pour publicité trompeuse en se déterminant par "des motifs impropres à caractériser une publicité fausse ou de nature à induire en erreur".

  • Refus de communication des données d'identification par un FAI (TGI Paris, ch. requêtes, ord. 30 janvier 2013)

Dans une ordonnance du 30 janvier 2013, le président du TGI de Paris a condamné un fournisseur d'accès internet (FAI) pour ne pas avoir fourni les données d'identification correspondant à une adresse IP contrefaisante. Le FAI, pour justifier son refus, arguait qu'il ne pouvait dévoiler ces informations que pour la recherche, la constatation et la poursuite d'infractions pénales (C. postes et com. électr., art. L. 34-1 N° Lexbase : L0097IRZ). Le président a fait prévaloir la "LCEN" (loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique N° Lexbase : L2600DZC) selon laquelle les FAI ont une obligation de conservation et de communication de ces données sur demande de l'autorité judiciaire, cette obligation ne se limitant pas aux infractions pénales.

  • Google doit communiquer les informations sur l'auteur d'un détournement de revenus publicitaires (T. com. Paris, 1er février 2013, aff. n° 2012075972 N° Lexbase : A2714I8Z)

Un site internet ayant subi le piratage de ses espaces publicitaires avait demandé à Google la communication d'informations sur les titulaires des comptes Google Adsense dont provenaient les publicités pirates. Une première ordonnance avait enjoint à Google de fournir ces informations, ordonnance restée non exécutée. Dans une seconde ordonnance du 1er février 2013, le Président du TGI de Paris a ordonné sous astreinte que Google communique non seulement l'identité et la nationalité du titulaire du compte frauduleux, mais également ses coordonnées bancaires, le montant des versements effectués à son profit ainsi que tous les courriers adressés par Google à cette personne.

  • Enchères en ligne : pas d'agrément nécessaire pour le courtier (Cass. civ. 1, 19 février 2013, n° 11-23.287, FS-P+B+I N° Lexbase : A2375I8H)

Dans un arrêt du 19 février 2013, la Cour de cassation a confirmé l'arrêt d'appel ayant retenu qu'un site internet d'enchères par voie électronique en vue de la vente de véhicules d'occasion n'était pas soumis "à la réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques". La cour d'appel avait à juste titre retenu qu'il s'agissait d'"un intermédiaire qui mettait en relation vendeurs et acheteurs et définissait une procédure pour parvenir à la vente sans pour autant la conclure, et que son rôle restait celui de courtier" et qu'en outre, "le bien mis en vente n'était pas adjugé à l'issue des enchères et que le dernier enchérisseur restait libre de ne pas contracter" (CA Versailles, 3ème ch., 16 juin 2011, n° 10/00707 N° Lexbase : A8956HTU). Dans cette affaire, le Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques avait engagé une action pour que soit interdite la poursuite de l'activité exercée sans agrément.

II - Cybercriminalité

  • Plan de cybersécurité de l'UE (Commission européenne, communiqué IP/13/94 du 7 février 2013)

Le 7 février 2013, la Commission européenne a publié sa stratégie en matière de cybersécurité et une proposition de Directive concernant la sécurité des réseaux et de l'information. L'objectif de cette stratégie est d'assurer un environnement numérique sûr, tout en favorisant et protégeant les droits fondamentaux de l'UE. La proposition de Directive prévoit notamment un mécanisme de coopération entre la Commission et les Etats membres et l'instauration par ces derniers d'autorités nationales compétentes.

III - Commerce électronique

  • Illicéité d'une clause prohibant la vente en ligne (CA Paris, Pôle 5, 5ème ch., 31 janvier 2013, n° 2008/23812 N° Lexbase : A5184I4R)

A la suite de l'arrêt de la CJUE du 13 octobre 2011 (CJUE, 13 octobre 2011, aff. C-439/09 N° Lexbase : A7357HY7) rendu sur question préjudicielle (CA Paris, Pôle 5, 7ème ch., 29 octobre 2009, n° 2008/23812 N° Lexbase : A7894EMC), la cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 31 janvier 2013, a jugé que constituait une restriction injustifiée de concurrence l'insertion, dans un contrat de distribution de produits cosmétiques et d'hygiène corporelle, d'une clause prévoyant que les ventes devaient être exclusivement réalisées dans un espace physique avec la présence obligatoire d'un diplômé en pharmacie. Cette clause avait pour effet d'interdire aux distributeurs la vente en ligne.

  • Vente de médicaments non soumis à prescription sur internet (CE référé, 14 février 2013, n° 365459, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1122I83)

Le Conseil d'Etat a été saisi en référé de la légalité des articles L. 5125-34 (N° Lexbase : L7279IU7) et L. 5125-36 (N° Lexbase : L7281IU9) du Code de la santé publique. Le premier article prévoyait que seuls certains médicaments non soumis à prescription pouvaient être délivrés sur internet alors que le droit de l'Union européenne n'opère pas une telle distinction. Dans une ordonnance du 14 février 2013, le juge a considéré que cette disposition était "propre à créer un doute sérieux quant à sa légalité" et en a ordonné la suspension. En revanche, concernant le second article qui soumet à une autorisation administrative la création des sites internet de commerce de médicament, le juge a rejeté la demande de suspension au motif qu'"aucun des moyens soulevés n'est propre à créer un doute sérieux quant à leur légalité".

  • Fiscalité du livre numérique : décision de saisine de la CJUE par la Commission européenne (Commission européenne, communiqué du 21 février 2013)

Dans un communiqué du 21 février 2013, la Commission a annoncé sa décision de saisir la CJUE d'un recours contre la France et le Luxembourg en raison de l'application d'un taux réduit de TVA aux livres numériques. En effet, la Directive "TVA" (Directive (CE) 2006/112 du Conseil CONSEIL du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée N° Lexbase : L7664HTZ) exclut l'application d'un taux réduit aux services fournis par voie électronique. Selon la Commission, "le non-respect de cette législation par la France et le Luxembourg génère de graves distorsions de concurrence au détriment des opérateurs des autres Etats membres de l'Union".

IV - Jeux en ligne

  • Site de jeux et paris en ligne : défaut de conservation des données (CE 4° et 5° s-s-r., 26 novembre 2012, n° 351163, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6316IX9)

Le président de l'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) avait saisi le Conseil d'Etat d'une demande en annulation d'une décision de la Commission des sanctions de l'ARJEL par laquelle cette dernière avait refusé de prononcer une sanction à l'encontre d'un site de jeux en ligne. Par arrêt du 26 novembre 2012, le Conseil d'Etat a rejeté cette requête, considérant que l'obligation pour les sites de jeux en ligne d'archiver en temps réel les données relatives à l'ouverture des comptes et à l'acceptation des CGV par des joueurs ne découlait pas "de dispositions législatives ou réglementaires" au sens de la loi sur les paris en ligne (loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 N° Lexbase : L0282IKN) mais de prescriptions du dossier des exigences techniques établi par l'ARJEL pour la délivrance d'agréments. Par conséquent, un manquement à cette obligation ne pouvait être sanctionné par la Commission des sanctions.

V - Communication

  • Procès civil de presse : la nécessaire qualification du fait incriminé (Ass. plén., 15 février 2013, n° 11-14.637, P+B+R+I N° Lexbase : A0096I83)

Dans un arrêt du 15 février 2013, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation retient que l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, selon lequel la citation directe doit, à peine de nullité, préciser et qualifier le fait incriminé et énoncer le texte de loi applicable, "doit recevoir application devant la juridiction civile". Dans cette affaire, des propos faisant état de pratiques commerciales malhonnêtes imputées à un médecin avaient été diffusés sur un site internet. Le médecin et sa société ont fait assigner l'auteur de ces propos et l'éditeur du site internet du chef de diffamation et d'injures. L'Assemblée plénière met ainsi fin aux divergences entre la cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 1, 3ème ch., 15 février 2011, n° 10/09473 N° Lexbase : A6788HMD) et la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 8 avril 2010, n° 09-14.399, F-P+B+I N° Lexbase : A5573EUX), en décidant "qu'est nulle une assignation retenant pour le même fait la double qualification d'injure et de diffamation".

VI - Droit d'auteur

  • Consultation de l'Hadopi sur l'interopérabilité des mesures techniques de protection (Hadopi, consultation publique du 30 janvier 2013)

Début 2012, l'Hadopi avait été saisie par une association éditant un lecteur multimédia en open source sur la question de savoir si elle pouvait mettre à disposition des utilisateurs un logiciel permettant la lecture des disques Blu-Ray comportant des mesures techniques de protection. Dans le prolongement de cette saisine, le 30 janvier 2013, l'Hadopi a lancé une procédure publique sur l'interprétation de l'article L. 331-32 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3478IEK) selon lequel tout éditeur de logiciel peut saisir l'Hadopi afin d'accéder aux informations essentielles à l'interopérabilité.

  • L'action des sociétés de perception et de répartition des droits soumise à autorisation (Cass. civ. 1, 19 février 2013, n° 11-21.310, FS-P+B+I N° Lexbase : A2374I8G)

Une société de perception et de répartition des droits (SPRD) a poursuivi des producteurs de films pour avoir sonorisé un film avec des musiques sans l'autorisation des ayants-droit. La SPDR se prévalait de ses statuts selon lesquels "elle était en droit d'agir pour la défense des droits de tous les artistes interprètes, indépendamment de leur qualité d'adhérent à cet organisme".Dans son arrêt du 19 février 2013, la Cour de cassation a jugé qu'une SDRP, quels que soient ses statuts, ne pouvait ester en justice pour défendre des droits individuels que si elle avait reçu un pouvoir exprès de l'artiste interprète via son adhésion ou par mandat.

  • Emissions de TV en streaming : communication au public soumise à autorisation (CJUE, 7 mars 2013, aff. C-607/11 N° Lexbase : A2346I9R)

Dans un arrêt du 7 mars 2013, la CJUE a décidé que la retransmission en direct et en streaming d'une émission de télévision déjà accessible gratuitement et en clair sur les chaînes hertziennes constitue une communication au public nécessitant l'autorisation des ayants-droit. Dans cette affaire, des chaînes de télévisions britanniques reprochaient à un site de streaming la diffusion en temps réel de leurs émissions télévisées. La CJUE a jugé que la notion de communication au public devait être interprétée largement pour couvrir ces retransmissions qui doivent donc être autorisées par les ayants-droit.

VII - Cybersurveillance

  • Présomption de caractère professionnel de la clé USB connectée à un ordinateur professionnel (Cass. soc., 12 février 2013, n° 11-28.649, FS-P+B N° Lexbase : A0485I8H)

Dans un arrêt du 12 février 2013, la Cour de cassation a jugé qu'une clé USB est présumée utilisée à des fins professionnelles dès lors qu'elle est connectée à un outil informatique mis à la disposition du salarié par l'employeur pour l'exécution du contrat de travail. Par conséquent, elle retient que "l'employeur peut avoir accès aux fichiers non identifiés comme personnels qu'elle contient, hors la présence du salarié". Dans cette affaire, un salarié avait été licencié pour faute grave pour avoir enregistré sur une clé USB des informations confidentielles sur l'entreprise et des documents personnels de collègues. Les juges ont ainsi cassé l'arrêt d'appel CA (CA Rouen, 25 octobre 2011, n° 10/05380 N° Lexbase : A4033HZE) ayant retenu que la clé USB était personnelle et que l'employeur ne pouvait la consulter hors la présence du salarié.

  • Preuve de l'existence d'un contrat de travail sur Facebook (CA Poitiers, 16 janvier 2013, n° 10/03521 N° Lexbase : A2408I3L)

Dans un arrêt du 16 janvier 2013, la cour d'appel de Poitiers a jugé de l'existence d'un contrat de travail en se fondant sur les messages que l'employeur avait publié sur le mur du compte Facebook de son employé. La cour a considéré que ces messages avaient été obtenus de manière loyale "dès lors qu'ils ont été émis par l'appelante sans restriction de destinataire sur le réseau social et qu'ils pouvaient ainsi être consultés de manière libre par toute personne", ce que l'employeur contestait.

VIII - Propriété intellectuelle

  • Consultation publique sur la proposition de nouvelles règles de concurrence pour les accords de transfert de technologie (Commission européenne, communiqué IP/13/120 du 20 février 2013)

La Commission européenne a lancé, le 20 février 2013, une consultation publique sur sa proposition de nouvelles règles de concurrence pour l'appréciation des accords de transfert de technologie. Ces propositions visent à actualiser le régime en vigueur qui expire le 30 avril 2014, afin de renforcer la "recherche et [...] l'innovation, de faciliter la diffusion de la propriété intellectuelle et de stimuler la concurrence". Les observations doivent être formulées avant le 17 mai 2013.

IX - Données personnelles

  • Action répressive des CNIL européennes contre Google (CNIL, article du 28 février 2013)

Le 26 février 2013, le G29 (rassemblement des CNIL européennes) s'est prononcé en faveur de l'instauration d'un groupe de travail afin de coordonner une action répressive contre Google. En effet, suite à l'instauration de nouvelles règles de confidentialité par Google, le G29 avait formulé des recommandations, notamment sur une meilleure information des personnes, ainsi que sur la durée de conservation des données. La société américaine, qui avait jusqu'au 16 février pour s'y conformer, n'a fourni aucune réponse.

  • Consultation des acteurs publics et privés sur l'Open Data (CNIL, article du 6 mars 2013)

Dans un communiqué de presse du 6 mars 2013, la CNIL a annoncé le lancement d'une consultation des acteurs publics et privés concernés par l'Open Data afin de définir une position collégiale et de construire un Open Data durable. La CNIL définit l'Open Data comme étant "un mouvement visant à généraliser la mise à disposition des internautes d'informations détenues par le secteur public. Il s'agit de rendre ces données accessibles à tous, facilement et gratuitement, afin de favoriser une meilleure information des citoyens".

X - Procédures

  • Examen par l'administration fiscale de fichiers externalisés (Cass. com., 26 février 2013, n° 12-14.772, F-P+B N° Lexbase : A8792I87)

Dans un arrêt du 26 février 2013, la Cour de cassation a jugé que les opérations de visites et saisies par les agents de l'administration fiscale, visées à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L0277IW8), impliquaient "la possibilité d'examiner en ce lieu tous les documents et supports d'information susceptibles d'y être consultés et exploités". Dès lors que les fichiers sont accessibles depuis les locaux visités, même si leur hébergement est externalisé, ils peuvent être examinés par les agents de l'administration.

XI - Concurrence

  • Sanction de Microsoft pour abus de position dominante (Commission européenne, communiqué IP/13/196 du 6 mars 2013)

Dans une décision du 6 mars 2013, la Commission européenne a sanctionné Microsoft pour non-respect de son engagement de permettre aux utilisateurs de Windows de sélectionner facilement leurs navigateurs web. Dans cette affaire, Microsoft avait fait l'objet d'une enquête pour abus de position dominante en raison de la vente liée d'Internet Explorer avec Windows. En 2009, la Commission avait rendu juridiquement contraignant l'engagement de Microsoft et clôturé l'enquête. Ne s'étant pas conformée à cet engagement entre mai 2011 et juillet 2012, Microsoft devra s'acquitter d'une amende de 561 millions d'euros.

FERAL-SCHUHL / SAINTE-MARIE, société d'avocats
www.feral-avocats

newsid:436235

Internet

[Brèves] Règles de confidentialité de Google : le G29 s'engage dans une action répressive et coordonnée

Réf. : CNIL, communiqué du 28 février 2013

Lecture: 1 min

N6265BT9

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Le 20 Mars 2013

Dans un communiqué du 28 février 2013, publié sur son site internet, la CNIL a fait savoir qu'en octobre 2012, le G29 -groupe des CNIL européennes- a souligné les problèmes et manquements posés par les règles de confidentialité de Google au regard de la Directive européenne et a formulé des recommandations afin que ce dernier se mette en conformité. A ce jour, Google n'a pas apporté de réponse précise et opérationnelle à ces demandes allant dans le sens d'une mise en conformité. Réunies en séance plénière du G29 le 26 février 2013, les autorités européennes ont décidé de poursuivre leurs investigations en étroite collaboration et de prendre toutes les mesures nécessaires conformément aux pouvoirs dont elles disposent. Un groupe de travail, piloté par la CNIL, a été mis en place afin de coordonner leur action répressive, laquelle devrait être lancée avant l'été. Ce groupe de travail se réunira dans les prochaines semaines et auditionnera Google.

newsid:436265

Transport

[Brèves] L'application de la Convention de Montréal est exclusive de celle de l'article 1148 du Code civil, pour accorder à un transporteur aérien, en sa qualité de transporteur contractuel, le bénéfice d'une cause d'exonération de responsabilité

Réf. : Cass. civ. 1, 13 mars 2013, n° 09-72.962, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6912I9U)

Lecture: 2 min

N6226BTR

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Le 21 Mars 2013

Aux termes d'un arrêt rendu le 13 mars 2013, la première chambre civile de la Cour de cassation énonce que l'application de la Convention de Montréal (N° Lexbase : L1209IUC) est exclusive de celle de l'article 1148 du Code civil (N° Lexbase : L1249ABU), pour accorder à un transporteur aérien, en sa qualité de transporteur contractuel, le bénéfice d'une cause d'exonération de responsabilité (Cass. civ. 1, 13 mars 2013, n° 09-72.962, FS-P+B+I N° Lexbase : A6912I9U ; cf. l’Ouvrage "Droit de la responsabilité" N° Lexbase : E0496EXN). En l'espèce, en décembre 2004, une banque a confié à la société X l'organisation d'un voyage à Rome, à l'occasion du match de rugby Italie-France, prévu le 19 mars 2005 et dont le coup d'envoi était fixé à 14 heures. Pour organiser ce voyage, la société X s'est adressée à deux agences, l'une en Italie, pour diverses prestations prévues sur place, l'autre en France, dénommée B. voyages, avec laquelle elle a conclu un contrat ayant pour objet l'affrètement d'un aéronef et la fourniture des titres de transport pour quatre-vingt-quatorze passagers. Le jour convenu pour le départ, les passagers n'ayant pu embarquer à l'heure prévue du fait de l'absence de l'aéronef destiné à effectuer le transport et n'ayant pas accepté la proposition de reporter le départ du vol à 16 heures, il a été décidé d'annuler le voyage. La société X a alors assigné la société B. voyages en paiement de diverses sommes à titre de dommages intérêts, sur le double fondement de l'article 1147 du Code civil (N° Lexbase : L1248ABT) et de l'article 19 de la Convention de Varsovie (N° Lexbase : L1210IUD). La société B. voyages s'est alors prévalue des causes d'exonération de responsabilité prévues à l'article 1148 du Code civil et à l'article 20 de la Convention de Varsovie. Pour exonérer la société B. voyages de toute responsabilité, la cour d'appel de Bordeaux relève que l'absence de l'avion à l'heure prévue pour l'embarquement est due à la conjonction de deux circonstances, à savoir, d'une part, la nécessité de reconfigurer en transport de passagers cet aéronef, lequel venait d'effectuer un service de fret de nuit et se trouvait le 18 mars au matin à Rennes, d'autre part, la présence sur l'aéroport parisien d'un épais brouillard ayant empêché le décollage de l'appareil de Rennes à l'heure prévue, ce dernier élément étant constitutif d'un cas de force majeure. L'arrêt sera censuré par la Haute juridiction : "en se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser la réunion des conditions exigées par l'article 19 de la Convention de Montréal, dont l'application est exclusive de celle de l'article 1148 du Code civil, pour accorder à un transporteur aérien, tel que la société B. voyages, en sa qualité de transporteur contractuel, le bénéfice de l'une ou de l'autre des causes d'exonération de responsabilité qui y sont prévues, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé".

newsid:436226

Transport

[Brèves] Modalité du calcul de l'indemnité mise à la charge du transporteur pour perte ou avarie

Réf. : Cass. com., 12 mars 2013, n° 09-12.854, F-P+B (N° Lexbase : A9724I9Z)

Lecture: 2 min

N6258BTX

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Le 26 Mars 2013

Selon les articles 23 et 25 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR (N° Lexbase : L4084IPX), l'indemnité mise à la charge du transporteur pour perte ou avarie doit être calculée d'après la valeur de la marchandise au lieu et à l'époque de la prise en charge. Tel est le principe rappelé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation et dont elle fait application dans un arrêt du 12 mars 2013 (Cass. com., 12 mars 2013, n° 09-12.854, F-P+B N° Lexbase : A9724I9Z). En l'espèce, une société (l'expéditeur) a demandé à un transporteur (le commissionnaire de transport) de procéder au transport entre Vitrolles et Lisbonne d'une cargaison de crevettes surgelées. Le transporteur en a confié le transport à une autre société (le sous-commissionnaire de transport), qui l'a elle-même confié à un troisième intervenant (le voiturier) selon lettre de voiture CMR. A la suite d'un incendie survenu au cours du transport, les marchandises ont été endommagées puis détruites d'office sur instruction de l'administration espagnole. Les assureurs de la marchandise, après avoir payé au commissionnaire de transport le montant des frais d'expertise et du dommage causé à la marchandise selon quittance subrogatoire du 19 avril 2005, ont assigné en remboursement des sommes versées le commissionnaire de transport, son assureur, ainsi que le sous-commissionnaire, qui ont appelé en garantie l'assureur de ce dernier, le voiturier et son assureur. La cour d'appel saisie de ce litige, a condamné le sous-commissionnaire et son assureur, après déduction de la franchise, à payer aux assureurs de la marchandise une certaine somme avec intérêts au taux de la Convention CMR soit 5 %. Pour ce faire, les juges d'appel ont retenu que la valeur de la marchandise à retenir est celle résultant de la facture de vente établie par l'expéditeur et non le prix qu'il a payé pour acquérir les marchandises transportées. Or, énonçant le principe précité, la Cour régulatrice censure la solution des seconds juges : "en statuant par de tels motifs, dont il résultait qu'elle prenait en considération le prix de vente de la marchandise au lieu de leur livraison et au temps de celle-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés [articles 23 et 25 de la CMR]".

newsid:436258

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