Lexbase Fiscal n°880 du 7 octobre 2021

Lexbase Fiscal - Édition n°880

Douanes

[Brèves] PLF 2022 : les mesures concernant les douanes

Réf. : Projet de loi de finances pour 2022, n° 4482

Lecture: 4 min

N8943BYU

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par Marie-Claire Sgarra

Le 06 Octobre 2021

Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, et Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des Comptes publics, ont présenté le 22 septembre le projet de loi de finances pour 2022.

Pour les mesures douanières, on notera :

📌 Renforcement des incitations fiscales à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports

Le texte renforce les incitations fiscales relatives à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports au 1er janvier 2023, en cohérence avec les objectifs européens et nationaux.

À cette fin, il fait évoluer les paramètres de la taxe incitative relative à l’incorporation d’énergie renouvelable dans les transports (TIRUERT).

Ainsi, il augmente les niveaux d’incorporation que les redevables doivent atteindre pour éviter l’imposition à cette taxe, qui sont portés à 9,5 % pour les essences et à 8,6 % pour les gazoles.

Il augmente les niveaux minima d’incorporation des biocarburants avancés introduits par la loi de finances pour 2021, fixés à 1 % pour les essences et 0,2 % pour les gazoles.

Dans le prolongement de la prise en compte de l’hydrogène utilisé pour les besoins du raffinage introduite au sein de la TIRUERT par la loi de finances pour 2021 à compter du 1er janvier 2023, le texte précise et renforce les modalités de prise en compte de l’hydrogène d’origine renouvelable tout au long de la chaîne de production de l’énergie :

  • s’agissant de l’hydrogène utilisé pour l’alimentation des piles à combustible des moteurs électriques, le bénéfice de l’avantage fiscal et du double compte lui sont étendus ;
  • s’agissant de l’hydrogène utilisé comme produit intermédiaire dans la chaîne de production, il est précisé qu’il ouvre droit, en tant que tel, à l’avantage fiscal et qu’il est également compté double. L’hydrogène d’origine renouvelable et les produits intermédiaires qui en sont issus, comme le méthanol ou l’éther éthyle tertiobutyle (ETBE), seront ainsi systématiquement favorisés par rapport aux produits d’origine fossile alors que tel n’est pas toujours le cas. En effet, certains biocarburants sont aujourd’hui, en application du droit européen, réputés 100 % renouvelables alors mêmes qu’il est recouru, pour leur production, à des produits d’origine fossile et ils sont donc traités favorablement au titre de la TIRUERT.

📌 Transposition de la décision (UE) n° 2021-991 du 7 juin 2021, relative au régime de l'octroi de mer

Le texte transcrit en droit interne le renouvellement de la décision d’autorisation du régime de taxation différenciée à l’octroi de mer adoptée par le Conseil le 7 juin 2021, qui permet la poursuite de ce dispositif jusqu’au 31 décembre 2027. En effet, dès lors qu’il favorise la production locale, ce dispositif doit être autorisé et réévalué régulièrement par le Conseil de l’Union européenne.

La loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer (N° Lexbase : L8976D7L) est ainsi modifiée sur trois points :

  • le seuil d’assujettissement à l’octroi de mer est relevé de 300 000 euros à 550 000 euros de chiffre d’affaires ;
  • la référence à la décision du Conseil permet, par un système de renvoi, de rendre applicables en droit national les listes des produits ayant obtenu un différentiel ;
  • le nombre de listes de produits pouvant bénéficier d’un différentiel de taxation à l’octroi de mer passe de trois à deux.

📌 Mesures relatives au recouvrement forcé des créances publiques et au transfert du stock des créances impayées de la direction générale des douanes et droits indirects à la DGFiP

Le texte comprend quatre mesures nouvelles d’harmonisation juridique du recouvrement forcé des créances publiques :

  • l’extension de l’hypothèque légale du Trésor à toutes les créances publiques, dans un objectif de lisibilité et de simplification de l’action des comptables publics ;
  • l’unification à droit constant des textes relatifs au privilège du Trésor, afin de le rendre plus intelligible pour les redevables et les professionnels du droit sans affecter les intérêts des autres créanciers privilégiés ;
  • la dématérialisation des saisies administratives à tiers détenteurs, procédure déjà applicable à toutes les créances publiques, pratiquées auprès des employeurs ;
  • la mise en place, dans le cadre du surendettement des particuliers, d’un traitement uniforme des dettes sociales et des dettes fiscales dans un contexte de lutte contre tout type de fraude. Il s’agit d'aligner les conditions d’effacement, de remise et de rééchelonnement des dettes fiscales avec celles prévues pour les dettes sociales, lorsque ces dettes sont d’origine frauduleuse ou sanctionnent des inobservations graves et répétées aux obligations fiscales, ou des comportements gravement fautifs.

 

newsid:478943

Fiscalité des particuliers

[Brèves] Revenus fonciers : la déductibilité des travaux n’est pas garantie !

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 28 septembre 2021, n° 439145, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A6506474)

Lecture: 3 min

N9029BY3

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par Marie-Claire Sgarra

Le 06 Octobre 2021

Doivent être regardés comme des travaux de reconstruction ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, ou qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros œuvre, ainsi que les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et, comme des travaux d'agrandissement, ceux qui ont pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants.

Les faits :

  • les requérants ont demandé à l'administration fiscale que le montant des travaux qu'ils ont réalisés, en 2008, sur un ensemble immobilier composé d'un bâtiment sur rue de deux étages avec combles et d'un bâtiment d'un étage sur cour, soient pris en compte en déduction de leurs revenus fonciers
  • après rejet de leurs réclamations, ils ont saisi le tribunal administratif de Toulouse qui a accueilli leur demande en tant qu'elle portait sur le bâtiment sur cour et rejeté le surplus de leurs conclusions.
  • la cour administrative d'appel de Bordeaux a fait droit à l'appel formé par les requérants contre ce jugement (CAA Bordeaux, 30 décembre 2019, n° 18BX00381 N° Lexbase : A85193AR).

🔎 Principe (CGI, art. 31 N° Lexbase : L6563L79). Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent pour les propriétés urbaines :

  • les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire
  • les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement.

⚖️ Solution du Conseil d’Etat. « Pour écarter la qualification de travaux d'agrandissement s'agissant de l'aménagement des combles de l'immeuble sur rue, la cour administrative d'appel s'est uniquement fondée sur la circonstance que la hauteur sous combles était supérieure ou égale à 1,80 m avant les travaux pour en déduire que les combles devaient être regardés comme habitables avant les travaux. En statuant ainsi, sans rechercher si, au-delà de cette question de hauteur, les requérants établissaient que les combles étaient antérieurement pourvus d'aménagements les rendant habitables, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ».

Jurisprudences relatives à la déductibilité des travaux

  • CE 8° ch., 29 mai 2019, n° 421237, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A1441ZDQ) : distinction entre travaux d’amélioration et travaux de reconstruction

Ici, un propriétaire a effectué des travaux de démolition de cloisons, de réfection des planchers et des sols, de modification des ouvertures extérieures, de redistribution des surfaces et de construction d’une mezzanine. Il a déduit ces travaux de ses revenus fonciers au titre des travaux d’amélioration.

Le CE avait confirmé la position de l’administration fiscale qui avait déterminé que les travaux en cause, du fait de leur importance, devaient être assimilés à une reconstruction de l’immeuble, « dont le montant n’était par suite pas susceptible d’être pris en compte pour la détermination des revenus fonciers du requérant ».

  • CE 9° ch., 11 février 2021, n° 431595, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A82704GE) : changement d’usage d’un immeuble

En l’espèce, une SCI a acquis un ensemble immobilier composé d'une maison de maître et d'une dépendance, auparavant loué à une association pour y accueillir des enfants. La société a effectué des travaux afin de réaliser onze appartements dans la maison principale et un douzième dans la dépendance.

Le CE avait jugé que les travaux en litige n'ont pas affecté de manière importante le gros œuvre et ne sont pas d'une ampleur suffisante pour être qualifiés de travaux de reconstruction. En omettant de se prononcer sur le caractère dissociable des travaux réalisés dans la dépendance alors qu'elle y était invitée, la cour a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation.

 

 

 

newsid:479029

Fiscalité immobilière

[Jurisprudence] Exonération de la taxe de 3 % (imprimé n° 2746-SD)

Réf. : CA Aix-en-Provence, 31 août 2021, n° 18/18483 (N° Lexbase : A022843T)

Lecture: 10 min

N8958BYG

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par Franck Laffaille, Professeur de droit public (IDPS) - Université de Paris XIII

Le 04 Octobre 2021


Mots-clés : immeubles • taxe 3 % • imprimé n° 2746-SD

Cette décision de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 31 août 2021 a trait à l’application de l’article 990 E du CGI (N° Lexbase : L1479IZS) ; plus précisément, il est question de l’exonération de la taxe de 3 % sur la valeur vénale des immeubles détenus en France. Cette taxe concerne toute entité juridique française ou étrangère (disposant ou non de la personnalité morale) possédant (directement ou indirectement) des immeubles en France (ou titulaires de droits réels portant sur ces biens). La taxe est égale à 3 % de la valeur vénale des biens et droits immobiliers au 1er janvier de l’année d’imposition.


 

Certaines exonérations sont prévues par le législateur. La requérante estime pouvoir bénéficier d’une exonération : la taxe n’est pas applicable aux entités juridiques dont le siège est situé en France, dans un État de l’UE ou dans un pays ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale ou dans un État ayant conclu avec la France un traité leur permettant de bénéficier du même traitement que les entités ayant leur siège en France (CGI, art. 990 E 3°). Cette exonération est accordée au prorata du nombre d’actions, parts ou autres droits détenus au 1er janvier par des actionnaires, associés ou autres membres dont l’identité et l’adresse auront été déclarées sur le formulaire n° 2746. L’entité juridique qui souscrit ce formulaire est dispensée de déclarer les actionnaires, associés ou autres membres qui détiennent moins de 1 % des actions, parts ou autres droits. Dispense de déclaration il y a encore en présence de biens ou droits immobiliers dont la valeur vénale est inférieure aux seuils fixés au a) du 3° de l’article 990 E du CGI (100 000 euros ou 5 % de la valeur vénale du bien) dans l’hypothèse d’une détention directe ou indirecte d’une pluralité de biens immobiliers. 

Certaines exonérations ne nécessitent pas la souscription du formulaire n° 2746 tandis que d’autres nécessitent, au contraire, une telle souscription. La société requérante entre dans ce second schéma. Société de droit britannique qui détient 99,98 % des parts d’une SCI (laquelle est propriétaire de biens immobiliers), elle adresse la déclaration n° 2746 au titre de l’année 2015 à la direction des résidents de l’étranger et des services généraux ; copie est adressée au SIE de Cannes (les biens immobiliers ont été acquis à Cannes au prix de 350000 euros). L’administration fiscale procède à un rappel de la taxe, assorti de l’intérêt de retard (taux de 0,40 %) et de la majoration de 10 % (sur le fondement de l’article 1728-1 du CGI N° Lexbase : L9389LH9). 

Contentieux. La requête de la société est rejetée par le TGI de Grasse en date du 24 octobre 2018. La preuve du dépôt de la déclaration revient au contribuable. Or, dans le cas présent, le TGI estime que les pièces produites ne sont pas probantes puisque fait défaut un avis de réception d’un courrier recommandé ou d’un avis de réception signé par l’administration. Certes, la société fournit – en 2015 – certains renseignements ; pour autant, cela ne saurait lui permettre de bénéficier de l’exonération. Aucune régularisation n’est en effet possible dès lors qu’elle a fait l’objet d’une mise en demeure en septembre 2010 au titre des années 2008, 2009, 2010. L’argumentation de la société – arguant qu’elle a souscrit la déclaration dans les délais, que la charge de la preuve incombe à l’administration, qu’elle a souscrit chaque année une déclaration de résultats modèle 2065 – ne convainc pas le juge. La société n’est pas réputée avoir exécuté de manière satisfaisante ses obligations déclaratives. 

Après avoir rappelé que l’exonération au paiement de la taxe de 3 % est d’interprétation stricte, la cour d’appel d’Aix-en-Provence souligne que la société n’a pas respecté l’engagement inhérent à l’article 990 3-d du CGI : à savoir « communiquer chaque année à l’administration fiscale la consistance des immeubles possédés au 1er janvier ainsi que l’identité, l’adresse des actionnaires et le nombre des actions détenues par chacun ». Or, obligation il y avait de procéder à la déclaration, et ce avant le 16 mai de chaque année, en l’adressant au service des impôts des entreprises du lieu de situation de l’immeuble. 

Quant à la dévolution de la preuve, elle échoit au contribuable. L’administration opère des rectifications suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 (N° Lexbase : L0638IH4) à L. 61 A (N° Lexbase : L2413DAM) lorsqu’elle constate une insuffisance, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts ou de l’article L. 2333-55-2 du CGCT (N° Lexbase : L8124I4N). Une distinction est opérée en vertu de l’article L. 55 du LPF (N° Lexbase : L5685IEB) : à l’administration échoit la charge de la preuve « du seul bien-fondé de son redressement, notamment par rapport aux évaluations qu’elle propose ». Il ne lui revient pas de supporter le fardeau probatoire quant au respect des dates de l’envoi de la déclaration ; ledit fardeau probatoire pèse sur le contribuable. Il revient à la société de démontrer qu’elle a bien adressé le document en temps utiles au bon destinataire ; il lui appartient de procéder à la déclaration – avant le 16 mai de chaque année – selon le modèle n° 2746.

Or, dans le cas présent, la requérante ne démontre pas la réalité de l’envoi qu’elle prétend avoir réalisé. Certes, elle produit une photocopie de la déclaration mais cela n’emporte pas démonstration que l’original a bien été adressé, dans les délais requis, à l’administration fiscale. La société est ainsi réputée ne pas avoir satisfait aux exigences imposés par les textes aux fins de bénéficier de l’exonération demandée. La position du juge quant à son comportement carentiel est renforcé par les éléments suivants : 

  • la société a été mise en demeure de régulariser sa situation, 
  • elle a adressé copie de sa déclaration de résultats de l’exercice clôturé au 31 mai 2014 et une copie de la déclaration n° 2746, 
  • l’administration lui a demandé – en vain - le justificatif de l’envoi de cette déclaration, tout en rappelant qu’il ne s’agissait pas de la première infraction. 

Autant d’éléments à l’appui du caractère raisonnable des prétentions de l’administration. 

La société invoque la réponse ministérielle « Loncle » du 13 mars 2000 qui pose une « mesure de tolérance » : le contribuable pouvant bénéficier de l’exonération mais n’ayant pas souscrit la déclaration n° 2746 doit être mis en demeure de régulariser sa situation dans les trente jours. Si l’obligation est remplie dans ce délai, la taxe n’est pas exigée et aucune sanction n’est appliquée. La Réponse ministérielle précise que la « mesure de tolérance ne s’applique qu’à la première demande de régularisation et pour l’ensemble des années non prescrites » . En d’autres termes, la mesure possède un « caractère exceptionnel ». Dans le cas présent, la cour d’appel rappelle que la société a déjà bénéficié d’une mesure de tolérance, en septembre 2010 et pour les années 2008, 2009, 2010. Elle ne peut donc pas se prévaloir de la mesure de tolérance visée dans la réponse ministérielle du 13 mars 2000. 

La société invoque la décision de la cour d’appel de Paris du 6 novembre 2017 (CA Paris, 6 novembre 2017, n° 15/15981 N° Lexbase : A8385WXT). L’administration soutient, là aussi, qu’une société (la Société Luppa) a déjà bénéficié d’une mesure de tolérance et que cela la prive de toute possibilité de régulariser sa situation. L’administration se fonde sur la réponse ministérielle « Loncle »(QE n° 39372 de M. Loncle François, JOANQ 27 décembre 1999 p. 7348, min. éco., réponse publ. 13 mars 2000 p. 1638, 11ème législature (N° Lexbase : L9057D7L). Selon la cour d’appel de Paris, s’il existe des sanctions applicables pour le dépôt tardif de la déclaration n° 2746, il s’agit seulement de celles visées aux articles 1727 (N° Lexbase : L6953LL4) et 1728 (N° Lexbase : L9389LH9) du CGI : à savoir un intérêt de retard et une majoration du montant des droits mis à la charge du contribuable, et non le paiement de la taxe elle-même. La société Luppa n’étant pas redevable de la taxe de 3 %, elle ne doit pas en effectuer le paiement ni verser un quelconque intérêt de retard. La cour d’appel d’Aix-en-Provence n’opère aucune lecture de l’arrêt de la cour d’appel de Paris, nonobstant l’invocation de cette jurisprudence par la requérante. 

La société se prévaut du régime visé au BOI-PAT-TPC-20-20 (N° Lexbase : X4508ALK). Le moyen n’est pas accueilli par la cour d’appel. Tout d’abord, on ne saurait déduire des termes de cette doctrine que sont concernées les sociétés autres que celles visées, notamment les sociétés étrangères. Quant à la déclaration 2065 – invoquée par la société en ce qu’elle permettrait de satisfaire aux obligations déclaratives exigées – elle n’est pas opérante dans le cas présent : elle ne comporte aucun élément relatif à la consistance et à la valeur vénale de l’immeuble. 

Enfin, la société ne peut invoquer l’existence d’une disproportion en l’espèce, au regard du but poursuivi par les dispositions relatives à la taxe : à savoir, la lutte contre la fraude fiscale. Ce dernier propos de la cour d’appel appelait, semble-t-il, de plus amples explications. Il est par trop aisé d’invoquer, au profit de l’administration fiscale, la notion générique de lutte contre la fraude fiscale. Certes, la lutte contre la fraude fiscale est un objectif de valeur constitutionnelle, au même titre que la lutte contre l’évasion fiscale et la lutte contre l’optimisation fiscale. Reste qu’il est des généricités dangereuses pour le contribuable, surtout lorsque l’on connaît les perplexités juridiques entourant la notion d’OVC (objectif de valeur constitutionnelle). Puisqu’il est question de constitutionnalité, attardons-nous sur la décision du Conseil constitutionnel du 16 septembre 2011 (Cons. const., décision n° 2011-165 QPC, du 16-09-2011 N° Lexbase : A7449HX8), mentionnée par la requérante. Le Conseil avait été saisi d’une QPC relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 2° et 3° de l’article 990 E du CGI. Les dispositions déférées avaient été déclarées conformes à la Constitution nonobstant les différences de traitement instituées par la loi ; le législateur est réputé avoir mis en œuvre - avec des critères objectifs et rationnels – l’OVC de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Quand bien même cette QPC de 2011 est invoquée par la requérante, elle ne lui est guère utile en défense de ses prétentions ; la cour d’appel de Paris se contente de la mentionner sans opérer un quelconque développement. 

Le refus de l’exonération émanant de l’administration est ainsi validé par la cour d’appel. Celle-ci ajoute que le refus de concéder cette exonération – consécutif au dépôt tardif de la déclaration n° 2746 - ne saurait s’analyser en une sanction. Il s’agit de « la seule perte du bénéfice d’une exonération fiscale ». Une telle perte n’est pas réputée porter atteinte au principe d’égalité de traitement : le bénéfice de l’exonération est accordé – ou non – en fonction de situations qui ne sont point identiques. À situation différente, régime juridique différent. 

newsid:478958

Fiscalité internationale

[Brèves] Renforcement de la transparence pour les grandes multinationales : adoption en première lecture de la Directive concernant les déclarations pays par pays

Réf. : Conseil de l’UE, communiqué de presse, 28 septembre 2021

Lecture: 1 min

N8969BYT

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par Marie-Claire Sgarra

Le 12 Octobre 2021

Le Conseil de l’Union européenne a adopté le 28 septembre 2021, sa position en première lecture sur la proposition de Directive concernant la communication, par certaines entreprises et succursales, d'informations relatives à l'impôt sur les bénéfices, généralement appelée « Directive concernant les déclarations pays par pays » (DPPP), ouvrant ainsi la voie à son adoption définitive.

📌 Que prévoit la Directive ? La Directive DPPP a pour objectif de renforcer la transparence des grandes entreprises multinationales :

  • elle imposera à certaines entreprises multinationales dont le chiffre d'affaires est supérieur à 750 millions d'euros de communiquer publiquement, dans une déclaration spécifique, les impôts sur les bénéfices qu'elles paient ; pour la première fois, les entreprises multinationales non européennes actives dans l'UE via des filiales et succursales devront aussi se conformer aux mêmes obligations de déclaration que les entreprises multinationales de l'UE ;
  • la déclaration sera faite dans un délai de douze mois à compter de la date de clôture du bilan de l'exercice financier en question ;
  • la proposition de Directive précise également à qui incombe la responsabilité de veiller au respect de l'obligation de déclaration.

⏲️ L'étape suivante avant que la Directive ne puisse entrer en vigueur est l'approbation formelle de l'accord provisoire par le Parlement européen. La Directive entrera en vigueur le 20ème jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne. Les États membres disposeront d'un délai de 18 mois à compter de l'entrée en vigueur de la Directive pour la transposer dans leur droit national.

 

 

newsid:478969

Fiscalité internationale

[Brèves] Nouvelle jurisprudence en matière d'établissement stable

Réf. : CAA Nantes, 9 septembre 2021, n° 19NT04286 (N° Lexbase : A4195447)

Lecture: 2 min

N9003BY4

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par Denis Fontaine-Besset et Arnauld Spiner, Avocats, GFD-Avocats

Le 07 Octobre 2021

Dans une décision du 9 septembre 2021, la cour administrative d’appel de Nantes a jugé que la mise à disposition de personnel pouvait caractériser l’existence d’un établissement stable en France d’une société étrangère.

Dans cet arrêt, Bouygues TP avait engagé une société chypriote comme sous-traitant dans le cadre de la construction du réacteur pressurisé européen (EPR) de Flamanville. La société chypriote avait eu recours à des travailleurs polonais qui intervenaient en France pour son compte.

Le juge de l’impôt a considéré que la société chypriote disposait de représentants permanents en France, caractérisant un établissement stable en France (installation fixe d’affaires), sur la base des éléments suivants :

  • la représentante légale de la société chypriote :

- signait les contrats de mission du personnel en France ;

- fournissait les bulletins de paie ;

- signait divers documents justificatifs transmis à l'administration française ;

  • les contrats-cadres de mise à disposition de personnel sur le site de Flamanville avaient été conclus et signés en France ;
  • de nombreux contrats et factures établies par la société chypriote étaient conservés en France ;
  • plusieurs personnes situées en France, habilitées par la société chypriote en tant que responsables de chantiers (chef d’équipe, chef de chantier et coordinateur administratif) :

- accueillaient les travailleurs ;

- recherchaient les moyens de locomotion pour les travailleurs ;

- procédaient à l’enregistrement hebdomadaire des heures effectives de travail pour chaque travailleur intérimaire et à la tenue à jour du registre des pointages ;

  • démarchaient des entreprises françaises.

Ces éléments illustrent le fait que le juge de l’impôt peut reconnaître l’existence d’un établissement stable d’une société étrangère lorsque :

  • les équipes mises à disposition en France sont contrôlées en France par des personnes représentant la société étrangère ; et
  • les relations contractuelles avec son client français sont initiées et gérées depuis la France.
À la lumière de cette décision, susceptible de recours en cassation, dans l’hypothèse où une société met à disposition des collaborateurs dans un pays autre que celui de son siège, il convient de vérifier si les modalités de cette mise à disposition sont susceptibles de caractériser un établissement stable de la société étrangère dans l’état de mise à disposition de ces personnels.

 

 

newsid:479003

Fiscalité internationale

[Brèves] Prolongation des accords fiscaux pour les frontaliers en télétravail jusqu'au 31 décembre 2021 conclus avec l’Allemagne, la Suisse, la Belgique, le Luxembourg et l’Italie

Réf. : MINEFI, communiqué de presse, 29 septembre 2021

Lecture: 2 min

N8939BYQ

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par Marie-Claire Sgarra

Le 01 Octobre 2021

Le Gouvernement a précisé, par un communiqué de presse en date du 29 septembre 2021, que les accords amiables concernant l'imposition des travailleurs frontaliers et transfrontaliers, conclus avec l’Allemagne, la Belgique, l’Italie, le Luxembourg et la Suisse dans le contexte de la lutte contre la propagation du Covid-19, qui devaient s’arrêter au 30 septembre 2021, continueront de s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2021.

Depuis le début de la crise sanitaire, des accords amiables ont été conclus avec l’Allemagne, la Belgique, l’Italie et la Suisse afin que les personnes bénéficiant des régimes spécifiques d’imposition prévus pour les travailleurs résidant et travaillant dans les zones frontalières (« régimes frontaliers ») puissent continuer à en bénéficier même si elles sont conduites à demeurer chez elles pendant la crise sanitaire liée à la Covid-19.

Ces accords concernent également les travailleurs transfrontaliers non éligibles au bénéfice de ces régimes frontaliers d’imposition. Ils prévoient que les jours travaillés à domicile du fait des recommandations et consignes sanitaires liées à l’épidémie de Covid-19 pourront, sur option, être considérés comme des jours travaillés dans l’Etat où ils exercent habituellement leur activité et donc y demeurer imposables.

S’agissant du Luxembourg, la convention fiscale du 20 mars 2018 prévoit que les travailleurs résidents de France peuvent télétravailler depuis leur domicile au profit de leur employeur luxembourgeois tout en demeurant imposables au Luxembourg, dans la limite de 29 jours par an.

L’accord amiable entre la France et le Luxembourg en date du 16 juillet 2020 est venu préciser que l’épidémie de Covid-19 constitue un cas de force majeure en dehors de la volonté de l’employeur et du travailleur et que la période couverte par les accords amiables n’est pas prise en compte pour le calcul du décompte des 29 jours.

La France et ces cinq Etats sont convenus que ces accords continueront de s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2021.

 

newsid:478939

Fiscalité internationale

[Brèves] Nouvelle convention fiscale France-Luxembourg : l’ancienne convention reste applicable sur certains revenus de source luxembourgeoise

Réf. : MINEFI, communiqué de presse, 1er octobre 2021, n° 1477

Lecture: 3 min

N8966BYQ

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par Marie-Claire Sgarra

Le 05 Octobre 2021

Le Gouvernement a, par voie de communiqué de presse, annoncé que les résidents de France percevant certains revenus de source luxembourgeoise pourront exceptionnellement solliciter, pour l’imposition de leurs revenus 2020 et 2021, l’application des stipulations de l’ancienne convention fiscale relative à l’élimination de la double imposition.

Pour rappel, la nouvelle convention fiscale avec le Luxembourg modifie la méthode d'élimination de la double imposition pour les résidents de France percevant des revenus de source luxembourgeoise. Cette modification concerne :

  • les revenus d’emploi ;
  • mais aussi les rémunérations (traitements et pensions) de source publique ;
  • les pensions de Sécurité sociale ;
  • et les revenus fonciers de source luxembourgeoise.

La nouvelle convention s’est appliquée pour la première fois aux revenus perçus en 2020.

L’ancienne convention évitait la double imposition de ces revenus de source luxembourgeoise par la méthode dite de l’exemption, consistant à retirer à la France tout droit de les imposer. Cette méthode, susceptible de conduire à des situations de double exonération injustifiées, ne fait plus partie de la pratique conventionnelle française et a été remplacée, conformément aux standards de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), par la méthode dite de l’imputation, consistant à éliminer la double imposition par application d’un crédit d’impôt.

La nouvelle convention avec le Luxembourg prévoit ainsi, pour ces revenus, notamment les salaires, que la France accorde un crédit d’impôt égal à l’impôt français. Cela revient à neutraliser tout impôt calculé en France sur ces revenus et évite ainsi que les mêmes revenus soient imposés deux fois. Cette méthode est celle prévue dans un grand nombre de nos conventions en vigueur, par exemple avec le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Suisse, l’Italie et l’Espagne.

Si le principe de l’imposition de ces revenus au Luxembourg, au taux prévu par la législation luxembourgeoise, demeure inchangé, le passage d’une méthode à l’autre peut avoir une incidence sur le taux d’imposition appliqué aux autres revenus perçus en France.

La méthode utilisée dans l'ancienne convention limitait en effet la progressivité de l'impôt appliqué aux revenus imposables en France : sur ce point, la nouvelle convention assure que les revenus de source française des foyers qui perçoivent par ailleurs des revenus de source luxembourgeoise soient imposés au même taux que ceux des foyers qui, à revenus équivalents, ne disposent que de revenus de source française. L’application de la nouvelle convention peut, dès lors, entraîner des augmentations d’impôt par rapport à la situation antérieure.

Afin d’en apprécier précisément l’ampleur pour les contribuables, le Gouvernement procèdera à une évaluation complémentaire de l’impact, pour les frontaliers, du changement de méthode d'élimination de la double imposition prévue par la convention fiscale.

Dans l'attente des résultats de cette évaluation, qui sera présentée au Parlement, les foyers concernés pourront exceptionnellement demander, pour ce qui concerne l’élimination de la double imposition, l’application des stipulations de l’ancienne convention pour les revenus visés perçus en 2020 et 2021.

Une communication interviendra dans les prochains jours pour préciser les modalités de recalcul de l’impôt sur les revenus 2020 pour les foyers percevant à la fois des revenus de source française et des revenus de source luxembourgeoise concernés par ce changement de méthode.

Cette communication précisera les démarches à entreprendre auprès de l’administration fiscale, en privilégiant les procédures dématérialisées et notamment le service de correction en ligne pour leur éviter tout déplacement inutile.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Luxembourg – convention du 20 mars 2018, Présentation de la Convention franco-luxembourgeoise du 20 mars 2018, in Conventions fiscales internationales, Lexbase (N° Lexbase : E63004KK).

 

newsid:478966

Fiscalité locale

[Brèves] Critères d'éligibilité et de versement du prélèvement sur recettes destiné aux communes et EPCI à fiscalité propre : précisions par décret

Réf. : Décret n° 2021-1242, du 28 septembre 2021, pris pour l'application de l'article 79 de la loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 (N° Lexbase : L1397L8A)

Lecture: 4 min

N8965BYP

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par Marie-Claire Sgarra

Le 04 Octobre 2021

Le décret n° 2021-1242, du 28 septembre 2021, publié au Journal officiel du 29 septembre 2021, a pour objet de préciser les critères d'éligibilité et de versement du prélèvement sur recettes destiné aux communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre contributeurs au fonds national de garantie individuelle des ressources prévu au 2.1 de l'article 78 de la loi n° 2009-1673, du 30 décembre 2009, de finances pour 2010.

Pour rappel, l’article 79 de la loi de finances pour 2021 (loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021 N° Lexbase : L3002LZ9) prévoyait que :

Le 2.1 de l'article 78 de la loi n° 2009-1673, du 30 décembre 2009, de finances pour 2010, est complété par un VIII ainsi rédigé :

« VIII.-A.-À compter de 2021, il est institué un prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit des communes et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre contributeurs au Fonds national de garantie individuelle des ressources.

« Pour être éligibles à ce prélèvement sur recettes, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale doivent réunir les conditions suivantes :

« 1° Avoir constaté, entre 2012 et l'année précédant la contribution au fonds, une perte de bases de cotisation foncière des entreprises supérieure à 70 % ;

« 2° Acquitter un prélèvement au titre du Fonds national de garantie individuelle des ressources représentant plus de 2 % des recettes réelles de fonctionnement de leur budget principal, telles que constatées au 1er janvier de l'année de répartition dans les derniers comptes de gestion disponibles.

« B.-Le montant attribué aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre éligibles est égal, chaque année, à un tiers de leur prélèvement au titre du Fonds national de garantie individuelle des ressources de 2020.

« C.-a. Lorsqu'une commune ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre bénéficie des mécanismes de compensation prévus aux I, II et II bis du 3 du présent article et du fonds de compensation mentionné au III de l'article 79 de la loi n° 2018-1317, du 28 décembre 2018, de finances pour 2019, il ne peut être éligible au prélèvement sur recettes qu'à compter de la quatrième année suivant celle au cours de laquelle il a perçu pour la première fois l'un des mécanismes de compensation précités.

« b. Lorsqu'une commune est membre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre bénéficiant des mécanismes de compensation prévus aux I, II et II bis du 3 du présent article et du fonds de compensation mentionné au III de l'article 79 de la loi n° 2018-1317, du 28 décembre 2018, précitée, elle ne peut être éligible au prélèvement sur recettes qu'à compter de la quatrième année suivant celle au cours de laquelle l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre a perçu pour la première fois l'un des mécanismes de compensation précités.

« c. Lorsqu'une commune ou un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre bénéficie d'un des mécanismes de compensation prévus aux I, II et II bis du 3, le montant du prélèvement sur recettes qui lui est attribué ne peut pas être supérieur à la différence entre, d'une part, la perte de recettes calculée pour le bénéfice de ces compensations et, d'autre part, le montant perçu au titre de ces mécanismes de compensation.

« D.-Les pertes de bases de cotisation foncière des entreprises liées au rattachement d'une commune à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou au changement de périmètre ou de régime fiscal d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ne sont pas prises en compte dans le calcul de l'éligibilité de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ».

Le présent décret est pris pour l'application de l'article 79 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

Le texte est entré en vigueur le 30 septembre 2021.

 

 

 

newsid:478965

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Holding mixte et déductibilité de la TVA ayant grevé des dépenses engendrées pour obtenir l'exécution d'une cession de titres à caractère purement patrimonial

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 28 septembre 2021, n° 440987, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6508478)

Lecture: 6 min

N8964BYN

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par Marie-Claire Sgarra

Le 08 Octobre 2021

Le Conseil d’État s’est prononcé, le 28 septembre 2021, sur la déductibilité de la TVA dans le cadre d'une opération patrimoniale mettant en cause une holding mixte.

Les faits :

  • une holding mixte a exposé des frais d'avocat et d'instance à l'occasion d’un litige qui s'est élevé entre les parties au sujet du versement d'une partie des dividendes à hauteur de 400 000 euros et de l'exécution de la promesse de rachat des titres d’une société tierce ;
  • à la suite d'une vérification de comptabilité de la holding, l'administration a remis en cause la déduction de la TVA ayant grevé ces frais d'avocat et d'instance ;
  • le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la société holding tendant à la décharge des rappels de TVA ;
  • la cour administrative d'appel de Nancy, sur appel de la société holding, a annulé ce jugement et prononcé la décharge des droits et pénalités en litige (CAA Nancy, 8 avril 2020, n° 18NC03242 N° Lexbase : A87783KC).

🔎 Principe : la TVA qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe à la valeur ajoutée applicable à cette opération (CGI, art. 271 N° Lexbase : L8605LZQ).

👉 L'existence d'un lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est, en principe, nécessaire pour qu'un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée soit reconnu à l'assujetti et pour déterminer l'étendue d'un tel droit.

👉 Le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'acquisition de biens ou de services en amont suppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction.

👉 En l'absence d'un tel lien, un assujetti est toutefois fondé à déduire la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des biens et services lorsque les dépenses liées à l'acquisition de ces biens et services font partie de ses frais généraux et sont, en tant que telles, des éléments constitutifs du prix des biens produits ou des services fournis par cet assujetti.

Au cas particulier de l’espèce

⚖️ Jugement de la cour administrative d’appel de Nancy : la CAA, après avoir constaté que la société exerçait une activité de holding mixte, a jugé

  • d'une part que la cession par cette société des titres de la société tierce avait le caractère d'une opération purement patrimoniale ;
  • d'autre part que cette société établissait que les frais d'avocat et d'instance qu'elle avait engagés en vue d'obtenir en justice le paiement du solde du prix de cette cession n'avaient pas été incorporés dans ce prix.

La société était donc en droit de déduire la TVA ayant grevé ces dépenses et, ce, dès lors qu’il résulte des éléments apportés ainsi que de la chronologie des opérations que ces frais n’ont pas été compris dans le prix de cession des titres

⚖️ Réponse du Conseil d’État. Dans le cas où ces dépenses se rattachent à une opération à caractère purement patrimonial, qui n'entre pas dans le champ de la TVA, ce qui implique qu'elles ne présentent pas un lien direct et immédiat avec l'ensemble de l'activité économique de la holding mixte assujettie à cette taxe, la taxe qui a grevé ces frais d'avocat et d'instance n'est pas déductible, indépendamment de la circonstance qu'ils n'ont pas été incorporés dans le prix de cession des titres.

« Si la société Saint-Exupéry Holding soutient que les dépenses d'avocat et d'instance engagées en vue d'obtenir en justice le paiement du solde du prix de la cession des titres de la société Westwings avaient pour objet la préservation des actifs nécessaires à la réalisation de son objet social, consistant en la fourniture de prestations de services au profit de ses filiales et de tiers, il ne résulte pas de l'instruction qu'au-delà de son statut de propriétaire de titres, elle se serait immiscée dans la gestion des sociétés Westwings et Metland et leur aurait fourni des prestations de services soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ».

💡 S'agissant de dépenses pour la réalisation d'opérations de cessions de titres, le Conseil d’État (CE 3° et 8° ssr., 23 décembre 2010, n° 307698, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6971GNI) avait distingué deux types de dépenses de frais de cession :

  • les dépenses exposées en vue de préparer la cession ;
  • les dépenses inhérentes à la transaction elle-même.

Les dépenses préparatoires (honoraires d’études et de conseils portant sur l’opportunité de la cession, frais d’audit, frais de valorisation des titres, etc.) sont réputées faire partie des frais généraux sauf si l'administration établit, soit que l’opération a revêtu un caractère patrimonial dès lors que le produit de la cession a été distribué, soit que, en l'absence d'éléments contraires produits par la société (par exemple, le contrat de cession), ces dépenses ont été incorporées dans le prix de cession des titres. Il est précisé que lorsque l’opération de cession envisagée n’aboutit pas, les dépenses préparatoires constituent, en tout état de cause, des frais généraux.

Les dépenses inhérentes (frais de courtage, commissions bancaires, honoraires d’intermédiation, frais de rédaction d’acte, etc.) sont présumées non déductibles, dès lors qu'elles présentent un lien direct et immédiat avec l'opération de cession de titres n'ouvrant pas droit à déduction, sauf si, compte tenu de la nature des titres cédés (selon que les titres sont ou non cotés) ou par tous éléments probants, tels que sa comptabilité analytique ou le contrat de cession, la holding établit que les dépenses en cause n'ont pas été incorporées dans le prix de cession.

Cf le BOFiP annoté BOI-TVA-DED-20-10-20 (N° Lexbase : X7625ALY).

 

newsid:478964

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Jurisprudence] L’application du régime de la TVA sur la marge en matière de TVA immobilière – un régime enfin examiné par le juge de la CJUE

Réf. : CJUE, 30 septembre 2021, aff. C-299/20, Icade Promotion SAS (N° Lexbase : A776147L)

Lecture: 10 min

N8987BYI

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par Pierre Pradeau - Olivier Galerneau et Maxime Mahtout, Avocats, EY Société d'avocats

Le 05 Octobre 2021


Mots-clés : TVA • TVA sur marge • Directive TVA

La CJUE a donné des précisions, dans un arrêt du 30 septembre 2021, sur l'application du régime de la TVA sur marge en matière de TVA immobilière.


 

I. TVA sur la marge : un régime dont le champ d’application est source de nombreux contentieux

Les conditions d’application du régime de la TVA sur la marge ont fait l’objet de nombreux litiges entre l’administration et les contribuables et ont récemment donnés lieu à de nombreuses jurisprudences du Conseil d’État.

Le régime de la marge est prévu par l’article 392 de la Directive TVA. Il prévoit que « les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat ».

Cet article a été transposé en droit français à l’article 268 du CGI (N° Lexbase : L4910IQW) qui dispose que le régime de la TVA sur la marge est applicable si l’acquisition d’un immeuble par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la TVA.

Dans ses commentaires sur ce texte, l’administration fiscale a exigé pour sa part une condition d’identité entre le bien acquis et le bien cédé pour l’application de ce régime. Cette exigence a notamment donné lieu à des réponses ministérielles datant de 2016, dans lesquelles il est précisé que le régime de TVA sur la marge est conditionné, outre que l’acquisition de l’immeuble n’ait pas ouvert droit à déduction, à ce que le bien acquis et revendu ait des caractéristiques physiques identiques (par exemple réponse « De La Raudière », QE n° 94061 de Mme Laure de La Raudière, JOANQ 15 mars 2016, réponse publ. 30 août 2016 p. 7769, 14ème législature N° Lexbase : L0979LAI).

Plus récemment, l’administration a précisé, dans deux réponses ministérielles (réponse « Vogel », QE n° 04171 de M. Jean Pierre Vogel, JO Sénat 29 mars 2018, réponse publ. 17 mai 2018 p. 2361, 15ème législature N° Lexbase : L2363LL4, réponse « Falorni » QE n° 1835 de M. Olivier Falorni, JOANQ 10 octobre 2017 , réponse publ. 24 septembre 2019 p. 8300, 15ème législature N° Lexbase : L7384LTN), que si l’identité juridique du bien lors de son acquisition et de sa cession doit être identique, tel n’est pas le cas pour l’identité physique.

Aussi, l’administration a admis que le régime de TVA sur la marge peut trouver à s’appliquer pour un terrain à bâtir ou un immeuble faisant l’objet d’une revente par lot, dès lors que chacun de ces lots a une qualification juridique identique à celle qu’avait le bien lors de son acquisition.

Pour sa part, le Conseil d’État a été saisi et a jugé, dans un arrêt du 27 mars 2020 « Promialp » (CE 3° et 8° ch.-r., 27-mars 2020, n° 428234, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A42573KU[1]  que « les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti, quand le bâtiment qui y était édifié a fait l’objet d’une démolition de la part de l’acheteur revendeur ».

Le Conseil d’État a exclu du régime de la TVA sur la marge les reventes de biens qui ne répondent pas à la même qualification juridique que celle de leur acquisition. Ainsi, pour les faits jugés dans l’affaire « Promialp », la revente de terrains à bâtir issue d’une opération de démolition d’un immeuble ne peut relever du régime de TVA sur la marge même si l’acquisition de cet immeuble n’avait pas été soumise à la TVA (et donc n’avait nécessairement pas ouvert droit à déduction de la TVA).

Plus récemment, le Conseil d’État s’est prononcé sur l’application du régime de la TVA sur la marge concernant un marchand de bien qui avait acquis un immeuble bâti et son terrain d’assiette (CE 8° ch., 1er juillet 2020, n° 431641, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A29763QB ; CAA Marseille, 18 février 2021, 20MA02162 N° Lexbase : A62484HU, sur renvoi du Conseil d’État). 

En l’espèce, la société RGMB, qui exerce une activité de marchand de biens, avait acquis en juillet 2012 un ensemble immobilier constitué d'un terrain sur lequel était implantée une maison d'habitation.

Cet ensemble immobilier avait fait l'objet, après son acquisition, d'une division en neuf parcelles, l'une constituée d'un terrain supportant la construction et les huit autres de terrains nus. Ces neuf parcelles avaient été cédées en six lots sous le régime de la TVA sur la marge.

Le Conseil d’État juge que la cour administrative d'appel avait commis une erreur de droit en jugeant que la société RGMB pouvait prétendre au bénéfice du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge prévu par l'article 268 du CGI au seul motif que l'acquisition du bien cédé n'avait pas ouvert droit à déduction de la taxe et en jugeant que ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre de ce régime la circonstance que les biens cédés comme terrains à bâtir n'avaient pas été acquis comme tels.

Ainsi, dès lors que les terrains vendus comme terrain à bâtir par la société RGMB constituaient une seule et même unité foncière avec un immeuble bâti lors de leur acquisition, unité foncière qualifiée d’immeuble bâti, le critère de l’identité juridique n’était pas rempli et le régime de la TVA sur la marge ne pouvaient donc pas être applicable.

Les conditions d’application du régime de la TVA sur la marge ont fait l’objet de questions préjudicielles portant sur ce que recouvre la notion de biens ayant ouvert droit à déduction de la TVA visé à l’article 392 de la Directive précitée, et sur l’incidence de la réalisation de travaux sur le régime de TVA applicable (CAA Lyon, 18 mars 2021, n° 19LY00501 N° Lexbase : A01154M9 et CE 3° et 8° ch.-r., 25 juin 2020, n° 416727, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A34753PE).

II. Le champ d’application du régime de la TVA sur la marge défini par la CJUE

Dans l’arrêt « Icade » du 30 septembre 2021, la CJUE vient préciser les conditions d’application du régime de la TVA sur la marge.

Dans cette affaire, la société avait acquis des terrains nus auprès de personnes non assujetties à la TVA (tels que des particuliers ou des collectivités locales).

En raison de la qualité de non assujetti à la TVA des vendeurs, ces cessions étaient hors champ d’application de la TVA.

Avant de revendre les terrains acquis, la société Icade avait divisé les terrains en lots et fait réaliser des travaux de viabilisation de telle sorte que les lots revendus étaient qualifiés de terrain à bâtir.

La société a contesté l’application du régime de la TVA sur la marge au titre de la revente des terrains et la Cour a été saisie des deux questions préjudicielles suivantes :

  • Le régime de la TVA sur la marge trouve-t-il à s’appliquer « lorsque les terrains, acquis non bâtis, sont devenus, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l’assujetti, des terrains à bâtir » ;
  • Le régime de la TVA sur la marge s’applique-t-il « lorsque ces terrains ont fait l’objet, entre le moment de leur acquisition et celui de leur revente par l’assujetti, de modifications de leurs caractéristiques telles que leur division en lots ou la réalisation de travaux permettant leur dessert par divers réseaux (voirie, eau potable, électricité, gaz, assainissement, télécommunications) » ?

Concernant la première question, la Cour précise que le régime de la TVA sur la marge est applicable aux livraisons de terrains à bâtir dans deux situations :

  1. lorsque l’acquisition du terrain revendu a été soumise à la TVA et que l’assujetti revendeur n’a pas été en mesure de déduire cette TVA ;
  2. ou, dans l’hypothèse de l’acquisition d’un terrain à bâtir non assujetti à la TVA, si le vendeur initial avait inclus au prix de vente un montant de TVA qu’il n’avait pas été en mesure de déduire.

Ainsi, l’application du régime de la TVA sur la marge devrait désormais être fortement limité et avoir un impact direct pour les marchands de biens.

En effet, lorsque l’acquisition du terrain a été réalisée par l’acheteur-revendeur en exonération de TVA ou se trouvait hors du champ d’application de la TVA, sa revente ne devrait plus pouvoir bénéficier de la TVA sur la marge sauf s’il peut être établi que le vendeur initial n’avait pas pu déduire la TVA au titre de l’acquisition du bien immobilier.  

Concernant la seconde question, la Cour juge que si le régime de la TVA sur la marge est bien conditionné à une qualification juridique identique du bien lors de son acquisition et de sa revente (c’est-à-dire par exemple que le bien acquis était un terrain à bâtir et est revendu en tant que terrain à bâtir), il n’est pas conditionné à une identité physique.

La Cour précise en effet que « si l’article 392 de la Directive TVA se réfère à la « livraison de terrains à bâtir achetés en vue de la revente », il ne saurait être conclu que ces termes interdisent que les terrains aient fait l’objet de transformations par l’assujetti-revendeur, pour autant qu’ils puissent être qualifiés de terrains à bâtir lors de leur revente ».

Autrement dit, un acheteur-revendeur est bien mesure de lotir un terrain sans que cette division parcellaire ne fasse obstacle à l’application du régime de la TVA sur la marge lors de la revente des différents lots.

Il ne pourra en revanche pas appliquer ce régime s’il a acquis un terrain à bâtir et revend un immeuble bâti.

À cet égard, la CJUE n’a pas suivi l’avocat Général qui entendait assimiler la réalisation de travaux de viabilisation à la construction d’un immeuble neuf (conclusions rendues par l’avocat général M. Athanasios Rantos, publiées le 20 mai 2021).

La Cour souligne ainsi que, « les transformations apportées à ce terrain aux fins de son aménagement, qui reste ainsi destiné à être bâti, sont sans incidence sur sa qualification de terrain à bâtir tant que ces aménagements ne peuvent être qualifiées de bâtiments ».

Cette analyse retenue en matière de terrain à bâtir trouve également à s’appliquer aux immeubles construits.

S’agissant des terrains à bâtir, la grille d’analyse retenue par la CJUE conduit à appliquer le régime de la TVA sur la marge lorsque le revendeur n’a pas eu de droit à déduction au sens des deux hypothèses retenues par la Cour (comme précisé ci-dessus), sans que les travaux de viabilisation réalisés sur le terrain ou sa division parcellaire fasse obstacle à ce régime.  

 

[1] Lire en ce sens, D. Falco, TVA sur la marge en matière immobilière : la condition d’identité validée par le Conseil d’État, Lexbase Fiscal, mai 2021, n° 865 (N° Lexbase : N3279BY4).

newsid:478987

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