Réf. : Décret n° 2021-61, du 25 janvier 2021, pris pour l'application de l'article L. 10-0 AC du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L9372LZ7)
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par Virginie Pradel, Fiscaliste
Le 14 Avril 2021
Le décret n° 2021-61, du 25 janvier 2021, a créé l’article R. 10-0 AC-1 du LPF (N° Lexbase : L9916LZB) pour l’application de l’article L. 10-0 AC du LPF relatif à l’autorisation donnée par le Gouvernement à l’administration fiscale d’indemniser les personnes étrangères aux administrations publiques qui lui ont fourni des renseignements ayant conduit à la découverte de certains manquements à la législation fiscale. Cet article a vocation à faire le point sur la pratique controversée de l’indemnisation des aviseurs fiscaux.
Une pratique ancienne, officialisée il y a peu
Pour rappel, l’indemnisation des aviseurs fiscaux constitue une pratique ancienne dont on trouve déjà des traces à l’époque de l’Empire romain. L’administration fiscale française a, pendant longtemps, eu recours à cette pratique opaque et dépourvue de base juridique sérieuse, jusqu’à ce que cette dernière soit officiellement abandonnée par Nicolas Sarkozy en 2004.
Quelques années plus tard, la reconsidération politique de cette pratique a donné lieu à de mémorables volte-face de Michel Sapin, lequel a tout d’abord annoncé en décembre 2015 son intention de reconnaître officiellement cette pratique… avant de se raviser face à l’émoi suscité dans l’opinion publique… puis de revenir à sa position initiale à la suite du scandale des « Panama papers » survenu en avril 2016.
L’article 109 de la loi de finances pour 2017 (loi n° 2016-1917, du 29 décembre 2016, de finances pour 2017 N° Lexbase : L0759LC4, introduit discrètement par voie d’amendement) a permis au Gouvernement d’autoriser l’administration fiscale à indemniser les personnes étrangères aux administrations publiques qui lui fournissent des renseignements ayant conduit à la découverte de manquements à certaines règles et obligations déclaratives fiscales.
Une pratique progressivement étendue par le législateur français
L’article 175 de la loi de finances pour 2020 (loi n° 2019-1479, du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 N° Lexbase : L5870LUX) a codifié ce dispositif à l’article L. 10-0 AC du LPF et l’a sensiblement étendu.
Cet article a tout d’abord étendu le champ de ce dispositif à la TVA. Sont visés, sans limitation de durée, les renseignements concernant les opérations de fraude à la TVA dans le cadre des transactions nationales et internationales.
Par ailleurs, cet article a prévu, à titre expérimental et pour une durée de deux ans, une généralisation de l’indemnisation des aviseurs fiscaux pour les informations relatives à tout autre agissement, manquement ou manœuvre susceptible d’être sanctionné par les pénalités fiscales suivantes :
Cette généralisation s’applique lorsque le montant des droits éludés excède 100 000 euros.
Le décret n° 2021-61, du 25 janvier 2021 a codifié à l’article R. 10-0 AC-1 du LPF l’autorisation du Gouvernement précitée et l’a étendu aux manquements aux règles de la TVA. Il a également permis à l’administration fiscale de procéder à l’expérimentation précitée. Le décret n° 2017-601 (N° Lexbase : L8394LDA) pris pour l’application de l’article 109 de la loi de finances pour 2017 est par conséquent abrogé. Ce décret n° 2021-61 du 25 janvier 2021 est entré en vigueur le lendemain de sa publication, soit le 28 janvier 2021.
Une pratique existant dans d’autres pans du droit français
La délation rémunérée a d’ores et déjà été institutionnalisée dans différents pans de notre droit afin de faciliter le travail des services administratifs. Les services de police et de gendarmerie peuvent ainsi, depuis la loi Perben II de 2004 (loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité N° Lexbase : L1768DP8), officiellement rétribuer les aviseurs qui leur ont fourni des renseignements ayant amené directement soit la découverte de crimes ou de délits, soit l’identification des auteurs de crimes ou de délits. Les rétributions allouées ne sont toutefois pas encadrées. En matière de douanes, la rémunération des aviseurs existe également.
Du reste, l’administration fiscale pouvait, avant 2018, profiter sans réserve et gratuitement des informations fournies par des aviseurs rétribués par d’autres États. L’hypocrisie de cette position a été brillamment résumée par Jean Arthuis, ancien ministre de l’Économie : « En somme, nous refusons de payer pour obtenir des renseignements, mais si un autre État paie ces renseignements et nous en fait profiter gratuitement, cela nous va… ».
Une pratique existant dans d’autres pays
L’indemnisation des aviseurs fiscaux a été mise en œuvre dans plusieurs États (une dizaine selon le rapport d’information du 5 juin 2019 relatif aux aviseurs fiscaux), parmi lesquels on trouve le Royaume-Uni, les États-Unis, le Canada, la Belgique, le Danemark, l’Inde, l’Allemagne et la Corée du Sud.
S’agissant de l’organisation de cette pratique, certains États ont mis en place des portails internet dédiés comme le Royaume-Uni ou des formulaires de dénonciation disponible sur le site du fisc comme les États-Unis. D’autres, comme la Corée du Sud, sont allés plus loin (probablement un peu trop) en créant des académies spécialement dédiées à la formation d’aviseurs professionnels. L’usage des dernières techniques d’espionnage (enregistreurs camouflés dans les sacs à main ou microcaméras déguisées en boutons de chemise) y est, entre autres, enseigné.
Celle-ci peut s’avérer très rentable, en particulier aux États-Unis où les aviseurs peuvent se voir allouer une prime pouvant représenter jusqu’à 30 % des sommes récupérées par le fisc. À titre d’exemple, l’ex-gestionnaire de fortune, Bradley Birkenfeld a récemment reçu une super prime de 104 millions de dollars en récompense de ses révélations sur les pratiques indélicates de la banque UBS. Au Canada, la rémunération peut s’élever jusqu’à 15 % du montant de la fraude.
La rémunération légale des aviseurs est toutefois exclue dans plusieurs États. Certains d’entre eux utilisent ainsi les informations transmises par les aviseurs, sans les indemniser (Autriche, Espagne, Canada pour les fraudes domestiques, Grèce, Portugal, Slovaquie).
La rémunération des aviseurs fiscaux
La rémunération des aviseurs fiscaux est encadrée et limitée. Il est prévu que la rémunération de l’aviseur ne puisse pas dépasser un million d’euros par affaire. Ce plafond a toutefois été vivement critiqué dans deux rapports parlementaires successifs.
Pour mémoire, un premier rapport d’information du 5 juin 2019 relatif aux aviseurs fiscaux a proposé de supprimer le plafond de rémunération en indiquant que ce dernier « n’est pas souhaitable ». En effet, le Parlement a souhaité mettre en place un dispositif puissant, apte à recueillir des éléments sur des fraudes à fort enjeu financier. En limitant l’indemnité à un million d’euros, l’administration limite fortement l’attractivité du dispositif, et ainsi l’importance des informations apportées et des dossiers traités ».
Un second rapport d’information du 25 septembre 2019 relatif au bilan de la lutte contre les montages transfrontaliers a formulé une recommandation similaire visant à « débattre de la possibilité de laisser le directeur général des finances publiques fixer le montant de l’indemnité allouée à un aviseur fiscal, sur proposition du directeur de la direction nationale d’enquêtes fiscales, par référence aux montants estimés des impôts éludés, mais sans plafond, afin de la rendre plus incitative ».
Dans une interview au journal « Le Figaro », l’ancien ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a confirmé que le gouvernement soutenait les amendements déposés par la députée socialiste Christine Pires Beaune, rapporteure du premier rapport susmentionné. Ces derniers visent à supprimer le plafond de leur rémunération maximale, qui ne peut aujourd’hui dépasser le million d’euros. Selon le ministre, certains aviseurs potentiels estiment que le chèque proposé ne vaudrait pas le risque qu’ils prennent en venant voir le fisc. Le ministre a ainsi indiqué que leur récompense et un nouveau plafond, plus élevé, seront fixés par voie réglementaire.
La volonté de rémunérer davantage les aviseurs fiscaux soulève plusieurs questions. Si tout d’abord le plafond actuel d’un million d’euros peut être vu comme visant à indemniser les aviseurs fiscaux pour les risques encourus ou les conséquences matérielles subies, quelle est la justification d’une rémunération substantiellement plus élevée ? Ne risque-t-on pas de créer un véritable appel d’air pour des aviseurs fiscaux très intéressés ? Comment justifier la différence de traitement conséquente entre, d’une part, des lanceurs d’alertes non rémunérés, et d’autre part, des aviseurs fiscaux surpayés au regard du service effectué ?
Jurisprudence relative à la rémunération des aviseurs fiscaux
Le tribunal administratif de Montreuil a rendu en 2020 (TA Montreuil, 5 mars 2020, n° 1808248) la première décision de justice relative à ce nouveau dispositif. Dans cette affaire, un informateur avait transmis à l’administration fiscale par un courrier daté du 4 novembre 2017 des informations relatives à la découverte d’une fraude fiscale qu’aurait commise un tiers. Il a sollicité dans ce courrier une indemnisation dans le cadre du dispositif créé par l’article 109 de la loi 2016-1917, du 29 décembre 2016. L’administration fiscale a refusé cette indemnisation et rejeté le recours gracieux formé par l’informateur, soutenant notamment que les renseignements transmis n’avaient pas permis la découverte d’un manquement puisque ceux-ci l’ont été par courrier reçu le 22 novembre 2017 alors que de telles informations étaient disponibles dans deux articles antérieurs parus dans la presse et datés des 5 et 11 avril 2017. Toutefois, les renseignements fournis par l’informateur constituaient des renseignements d’une nature distincte de ceux parus dans la presse, dans la mesure où ils étaient constitués de douze pages d’argumentation précise et circonstanciée, complétés par des annexes justificatives comportant un acte de donation, des organigrammes et un rapport de gestion.
Le tribunal administratif de Montreuil a jugé qu’il pas nécessaire que l’aviseur n’informe que l’administration fiscale. Comme dans l’affaire en cause, ce dernier peut informer également, voire auparavant, la presse ainsi que la justice, sous réserve qu’il apporte à l’administration fiscale des renseignements qu’elle n’a pas déjà en sa possession.
Du reste, le tribunal administratif de Montreuil a précisé que la décision administrative de refus d’indemniser un aviseur en matière de fraude fiscale pouvait faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Compte tenu du pouvoir d’appréciation laissé à l’administration fiscale et de la nature de l’indemnisation en cause (qui ne répond pas à un droit à indemnisation), le juge administratif ne peut se livrer qu’à un contrôle minimum restreint à l’erreur manifeste d’appréciation, ce qui n’exclut pas un contrôle de l’erreur de droit.
Au cas particulier, les décisions rejetant la demande de rémunération formée par l’informateur étant entachées d’une erreur de droit, le juge administratif les a annulées et a enjoint à l’administration fiscale de réexaminer la demande.
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Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 156 (N° Lexbase : L3002LZ9)
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N6349BYS
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par Marie-Claire Sgarra
Le 03 Février 2021
► L’article 156 de la loi de finances pour 2021 rétablit l’enregistrement obligatoire des testaments authentiques.
🔎 La loi de finances 2020 a supprimé, à compter du 1er janvier 2020 (loi n° 2019-1479, du 28 décembre 2019, de finances pour 2020 N° Lexbase : L5870LUX), la formalité obligatoire d’enregistrement pour les testaments déposés chez les notaires ou reçus par eux et le droit fixe de 125 euros applicable à l’enregistrement de ces testaments.
Avant cette suppression, les testaments déposés chez un notaire ou reçus par eux, étaient enregistrés dans les 3 mois du décès du testateur, à la diligence des héritiers, donataires, légataires ou exécuteurs testamentaires.
À la suite de cette suppression, l’administration fiscale, en adoptant une interprétation stricte, a considéré que les testaments authentiques étaient désormais soumis à l’enregistrement dans le délai de droit commun, dans le mois de leur rédaction (CGI, art 635 N° Lexbase : L7307LU8). Cet enregistrement devait s’effectuer au droit fixe de 125 euros des actes innomés prévu à l’article 680 du CGI (N° Lexbase : L4356IXM) (BOI-ENR-DG-40-10-40 N° Lexbase : X5286ALD).
Cette interprétation avait pour effet l’enregistrement d’un acte « imparfait » qui ne produira peut-être jamais d’effet, le testament ne produisant ses effets et ne devenant définitif qu’avec le décès du testateur.
📌 La loi de finances pour 2021 rétablit l’enregistrement obligatoire de testaments authentiques dans un délai de trois à compter de la date du décès du testateur.
👉 Est ajouté à l’article 636 du Code général des impôts (N° Lexbase : L6235LUH) un alinéa ainsi rédigé : « Les testaments reçus par les notaires doivent être enregistrés dans un délai de trois mois à compter de la date du décès du testateur ».
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newsid:476349
Réf. : Loi n° 2020-1721, du 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 19 (N° Lexbase : L3002LZ9)
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N6410BY3
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par Marie-Claire Sgarra
Le 09 Février 2021
► Le nouvel article 19 de la loi de finances pour 2021 prévoit que les abandons de créance à caractère commercial sont désormais déductibles et ce, de plein droit lorsqu’ils sont effectués en application d’un accord de conciliation.
Par principe, les abandons de créances sont pour une entreprise un acte d’appauvrissement sans contrepartie, raison pour laquelle l’abandon est considéré comme anormal et non déductible.
Ainsi, ces abandons de créances constituent des charges déductibles s’ils sont considérés comme un acte normal de gestion, lorsqu’ils sont accordés à des entreprises bénéficiant d’un plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire.
Les procédures de conciliation n’étaient pas visées par ce dispositif.
👉 À compter du 1er janvier 2021, la déductibilité s’applique également aux abandons de créances à caractère commercial est étendue aux procédures de conciliation.
Cette nouveauté est issue du contexte de crise sanitaire et économique liée au coronavirus.
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 3 février 2021, n° 429004, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A50354E9)
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N6394BYH
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par Marie-Claire Sgarra
Le 09 Février 2021
► Si les constructions neuves affectées à l'habitation principale dont l'acquisition est financée à plus de 50 % au moyen de prêts aidés par l'État bénéficient en principe d’une l'exonération, cette dernière ne s'applique pas aux logements dont le financement a été partiellement assuré au moyen de l'avance remboursable ne portant pas intérêt, alors même que ce financement aurait été assuré, pour un montant supérieur à 50 % du coût de l'opération, par un ou plusieurs prêts aidés par l'État.
Les faits :
⇒ la requérante a acquis en 2015 un logement lui servant d'habitation principale grâce à un apport personnel, à un prêt ne portant pas intérêt correspondant à 26 % du financement et à un prêt à l'accession sociale correspondant à 54 % de celui-ci ;
⇒ elle a demandé, par réclamation à l'administration fiscale le bénéfice de l'exonération de TFPB prévue par l'article 1384 A du Code général des impôts (N° Lexbase : L7553LXZ) pour ce logement au titre de 2016 ;
le tribunal administratif de Versailles accorde l’exonération à la requérante.
Solution du Conseil d’État :
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newsid:476394
Réf. : CE 10° et 9° ch.-r., 3 février 2021, n° 429882, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A50374EB)
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N6393BYG
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par Marie-Claire Sgarra
Le 10 Février 2021
► Les revenus issus de détournement de fonds, imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, constituent des revenus du patrimoine au sens et pour l'application de l'article L. 136-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L8450LQZ), relatif à la contribution sociale généralisée.
Les faits :
⇒ à la suite d'une vérification de comptabilité, la requérante a été assujettie à des cotisations supplémentaires d’IR et de CSG, de CRDS et de prélèvement social majoré de ses contributions additionnelles pour les années 2008 à 2011 à raison des revenus tirés d'une activité de détournement de fonds, imposés dans la catégorie des BNC ;
⇒ la cour administrative d'appel de Nantes (CAA Nantes, 18 février 2019, n° 17NT02068 N° Lexbase : A8925ZHZ) a prononcé la décharge partielle des suppléments d'impôt sur le revenu en litige ainsi que la décharge totale des suppléments de contributions sociales et réformé le jugement du tribunal administratif de Rennes (TA Rennes, 10 mai 2017, n° 1405199 N° Lexbase : A2284ZL8).
Solution du Conseil d’État. En jugeant que les revenus détournés par la requérante constituaient des revenus d'activité et de remplacement que, dès lors, l'administration fiscale ne pouvait imposer la contribuable à des cotisations supplémentaires de contributions sociales assises sur les revenus du patrimoine au sens de l'article L. 136-6 du Code de la Sécurité sociale, la cour a commis une erreur de droit.
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newsid:476393
Réf. : Arrêté du 3 février 2021, portant modification de l'arrêté du 6 juillet 2017, modifié pris en application du II de l'article 223 quinquies C du Code général des impôts (N° Lexbase : L0670L39)
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N6396BYK
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par Marie-Claire Sgarra
Le 10 Février 2021
► L’arrêté du 3 février 2021, n° NOR : ECOE2100179A, publié au Journal officiel du 5 février 2021, actualise la liste des États et territoires mentionnée à l'article 223 quinquies C du Code général des impôts (N° Lexbase : L2943KWW).
Pour rappel, l'article 223 quinquies C du CGI rend obligatoire le dépôt d'une déclaration pays par pays par les multinationales réalisant un chiffre d'affaires mondial consolidé supérieur ou égal à 750 millions d’euros.
L'introduction de cette nouvelle obligation déclarative (formulaire n° 2258-SD) s'inscrit dans le projet international de lutte contre l'érosion des bases de l'impôt sur les sociétés et les transferts de bénéfices.
Les entités détenues ou contrôlées par une personne morale établie dans un État ou territoire figurant sur la liste mentionnée au II de cet article sont dispensées de cette obligation.
👉 Cette liste désigne les États membres de l'Union européenne et les autres États ou territoires qui ont adopté une réglementation rendant obligatoire la souscription d'une déclaration pays par pays similaire à celle figurant au 1 du I de cet article, qui ont conclu avec la France un accord permettant d'échanger de façon automatique les informations y figurant, et qui respectent les obligations résultant de ce dernier.
Cette liste est mise à jour pour tenir compte de l'évolution de la législation des partenaires de la France et de la prise d'effet des instruments internationaux utiles à l'échange de renseignements.
Sont ajoutés à la suite de cette nouvelle actualisation les pays suivants :
Le texte est entré en vigueur le 6 février 2021.
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newsid:476396
Réf. : Loi n° 2021-68, du 27 janvier 2021, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 20 mars 2018 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et la fortune (N° Lexbase : L9800LZY)
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N6401BYQ
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par Marie-Claire Sgarra
Le 10 Février 2021
► La loi n° 2021-68, du 27 janvier 2021, autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 20 mars 2018 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg, en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et la fortune, a été publié au Journal officiel du 28 janvier 2021.
Pour rappel, le 10 octobre 2019, le ministre des Finances, Pierre Gramegna, et le ministre français de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, ont signé à Luxembourg un avenant amendant la nouvelle convention conclue le 20 mars 2018 entre le Luxembourg et la France en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune (N° Lexbase : L1333LWB).
Sous l’ancienne convention, les travailleurs frontaliers résidant en France et exerçant leur activité au Luxembourg sont exonérés de l'impôt français en vertu de la convention en vigueur (méthode de l'exonération progressive).
La nouvelle convention, dans sa formulation initiale, aurait conduit à l’imposition de ces revenus professionnels en France, sous réserve de la déduction de l’impôt déjà payé au Luxembourg par l’imputation d’un crédit d’impôt.
L’avenant abandonne la méthode dite du crédit d’impôt réel pour la remplacer par la méthode dite du crédit d’impôt fictif, c’est-à-dire un crédit d'impôt égal à l'impôt français correspondant à ce revenu à condition que les revenus soient effectivement soumis à l’impôt luxembourgeois.
Avec cet avenant la France revient donc à la situation antérieure en réintroduisant la méthode de l’exemption pour éliminer la double imposition des revenus d’occupation salariée notamment.
Les revenus d’activité sont imposés dans l’État où se déroule l’activité.
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newsid:476401
Réf. : CE 10° et 9° ch.-r., 5 février 2021, n° 430594, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A02544GI)
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N6454BYP
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par Marie-Claire Sgarra
Le 10 Février 2021
► Le juge de cassation exerce un contrôle de qualification juridique sur la notion de bénéficiaire effectif des redevances payées pour l'usage ou la concession de l'usage d'un droit d'auteur sur une œuvre littéraire, artistique ou scientifique, au sens du 1 de l'article 13 de la convention franco-britannique du 19 juin 2008 (N° Lexbase : E0467EUT).
Les faits :
⇒ une société de droit britannique, domiciliée à Londres, exerce une activité de collecte et de gestion des droits d'utilisation, de diffusion et de distribution des œuvres, notamment musicales, dont les membres sont les auteurs, compositeurs ou interprètes,
⇒ elle conclut avec la SACEM un accord de représentation réciproque aux termes duquel cette dernière société recouvre et lui reverse les redevances correspondant à l'utilisation, en France, des œuvres des artistes qu'elle représente,
⇒ la SACEM a opéré au titre des années 2013 et 2014 une retenue à la source sur le montant des redevances ainsi collectées par elle,
l'administration fiscale n'a que partiellement fait droit à la demande de la société britannique tendant à la restitution, sur le fondement de la convention fiscale franco-britannique, de cette retenue à la source,
⇒ le tribunal administratif de Montreuil, par deux jugements, a fait droit à la demande de la société britannique tendant à la restitution du reliquat de la retenue à la source litigieuse (TA Montreuil, 3 avril 2018, n° 1702789 N° Lexbase : A5459ZHN),
⇒ la cour administrative d'appel de Versailles rejetant les appels contre ces deux jugements (CAA Versailles, 18 juin 2019, n° 18VE01822 N° Lexbase : A3292ZGZ).
Les éléments de l’affaire :
✔ les artistes membres de la société britannique lui cèdent les droits qu'ils détiennent sur leurs œuvres,
✔ si le conseil d'administration de la société détermine l'affectation des revenus tirés de l'exploitation de ces œuvres, ces revenus doivent néanmoins, en principe, être répartis entre les membres de la société après déduction des frais y compris à caractère social justifié.
✔ les redevances redistribuées sont alors comptabilisées en charges déductibles dans les écritures comptables de la société et imposées entre les mains de ses membres et non de la société,
✔ si une partie des redevances collectées par la société est affectée par le conseil d'administration de la société, soit à des œuvres charitables ou des dons aux membres ou aux employés, soit à des fonds de réserve, à l'entretien des biens de la société ou à toute autre fin que le conseil estime nécessaire ou propice aux intérêts de la société, l'essentiel de ces redevances est, chaque année, en pratique, reversée aux membres de la société.
Solution du Conseil d’État.
👉 En déduisant de l'ensemble de ces éléments, que la société britannique, qui a pour objet de collecter et de gérer les revenus perçus par ses membres, devait être regardée comme le « bénéficiaire effectif », au sens des stipulations de la convention fiscale franco-britannique, de la part des redevances collectées pour elle en France par la SACEM et reversées à ses membres, la cour administrative d'appel de Versailles a inexactement qualifié les faits de l'espèce.
S'agissant de la notion d'établissement stable. Le Conseil d’État a jugé dans un arrêt du 31 juillet 2009 (CE 3° et 8° ssr., 31 juillet 2009, n° 296471, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1243EKA) que :
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 3 février 2021, n° 434120, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A50454EL)
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N6390BYC
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par Marie-Claire Sgarra
Le 11 Février 2021
► La seule circonstance qu'un immeuble fasse, ultérieurement à son achèvement et alors qu'il est soumis à ce titre à la taxe foncière sur les propriétés bâties, l'objet de travaux qui, sans emporter sa démolition complète ou porter une atteinte à son gros œuvre, le rendent inutilisable au 1er janvier de l'année d'imposition, ne suffit pas à lui faire perdre son caractère de propriété bâtie pour l'application de l'article 1380 du Code général des impôts (N° Lexbase : L9812HLY).
Les faits :
⇒ une société est propriétaire d'un ensemble immobilier qui abritait un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes avant de faire l'objet à partir de 2016 de travaux en vue de le transformer en logements ;
⇒ elle a contesté son assujettissement pour 2017 à la TFBP en raison des travaux s'y déroulant ;
⇒ le tribunal d’Orléans rejette sa demande de décharge de l’imposition contestée.
Principes :
Solution du Conseil d’État. La démolition en cours, qui n'est pas totale, n'a pas au 1er janvier de l'année d'imposition, affecté le gros œuvre d'une manière telle qu'elle rendrait le bâtiment dans son ensemble impropre à toute utilisation.
Cette solution apparait comme restrictive. En effet pour échapper à la TFPB lorsque sont entrepris d’importants travaux, ces derniers doivent en plus de rendre l’immeuble impropre à toute utilisation, porter en partie sur le gros œuvre.
Taxe foncière et notion d’immeuble impropre à toute utilisation : rappel de la jurisprudence du Conseil d’État. ✔ Le Conseil d’État a précisé les conditions d’exonération de taxe foncière en cas de restructuration lourde d’un immeuble dans un arrêt du 16 février 2015 (CE 8° et 3° ssr., 16 février 2015, n° 369862, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0273NC4). Ainsi « un immeuble qui fait l’objet de travaux nécessitant une démolition qui, sans être totale, affecte son gros œuvre d’une manière telle qu’elle le rend dans son ensemble impropre à toute utilisation ne peut plus être regardé, jusqu’à l’achèvement des travaux, comme une propriété bâtie assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties ». ✔ Dans un arrêt du même jour, le Conseil d’État s’est prononcé de manière identique en jugeant qu’un immeuble, devenu impropre à toute utilisation dans son ensemble car « délabré et en ruine en raison d’importantes dégradations qu’il avait subies », ne constitue pas une propriété bâtie assujettie à la TFPB (CE 3° et 8° ssr., 16 février 2015, n° 364676, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0265NCS). ✔ De même pour un immeuble devenu impropre à toute utilisation en raison d’importantes dégradations subies à la suite d’un incendie (CE 9° ch., 29 mai 2017, n° 369577, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A5478WEM). |
En pratique : 👉 tous ces arrêts montrent une forme de résistance de l’administration face aux demandes d’exonération de TFPB sur les propriétés bâties fondées sur l’état de l’immeuble ; 👉 il est essentiel de pouvoir justifier de l’état de l’immeuble au 1er janvier de chacune des années au cours desquelles les travaux demeurent en cours ; 👉 il convient d’apprécier au cas par cas si un immeuble est rendu, ou non, impropre à toute utilisation. |
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Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 3 février 2021, n° 431014, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A50404EE)
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par Marie-Claire Sgarra
Le 10 Février 2021
► Le Conseil d’État est revenu, dans un arrêt du 3 février 2021, sur les modalités d’exonération de TFPB des bâtiments servant aux exploitations rurales détenus par une société d’intérêt collectif agricole.
Les faits :
⇒ une société d'intérêt collectif agricole (SICA) exploite des installations de stockage, de réception, de manutention et d'expédition de céréales ;
⇒ à l'issue de la vérification de sa comptabilité intervenue en 2009, l'administration fiscale a remis en cause la méthode d'évaluation prévue à l'article 1498 du Code général des impôts (N° Lexbase : L8596LHT), pour l'évaluation de la valeur locative de certains de ses biens passibles de TFPB ;
⇒ le tribunal administratif de Poitiers, a fait droit à la demande présentée par la SICA et a prononcé la réduction des impositions supplémentaires de taxe foncière auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2013.
Solution du Conseil d’État :
Ici :
✔ la société SICA est propriétaire de cellules, au sein de trois silos verticaux, représentant une capacité de stockage de 144 500 tonnes pour l'un et 20 000 tonnes pour les deux autres, ainsi que de matériels et outillages utilisés pour la réception, le pesage, le stockage, la manutention et le chargement des céréales sur les navires, dont notamment deux portiques de chargement, des fosses et un pont bascule ;
✔ le matériel affecté à ces activités était inscrit au bilan de la société au 31 décembre 2009 pour un montant total de 11 635 186 euros, alors que la valeur des constructions s'élevait à la somme de 15 496 338 euros ;
✔ ainsi, les installations en cause comprennent des moyens techniques importants. Eu égard à leurs conditions d'utilisation, ces matériels et installations techniques jouent un rôle prépondérant dans l'activité exercée dans l'établissement.
👉 Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les immobilisations en litige revêtaient un caractère industriel et, par suite, a retenu la méthode d'évaluation définie à l'article 1499 du Code général des impôts (N° Lexbase : L0268HMU).
Cf. le BOFiP annoté (N° Lexbase : X7888ALQ).
Société agricoles et exonération de taxe foncière, rappel de la jurisprudence du Conseil d’État. ✔ Le Conseil d’État est venu préciser que « l’exonération de taxe foncière prévue au a du 6° de l’article 1382 précité du CGI, laquelle concerne les bâtiments servant aux exploitations rurales, les dispositions du b du même article ont entendu donner à la notion d’usage agricole qu’elles mentionnent une signification visant les opérations qui sont réalisées habituellement par les agriculteurs eux-mêmes et qui ne présentent pas un caractère industriel ; que, pour l’application de ces dispositions, ne présentent pas un caractère industriel les opérations réalisées par une société coopérative agricole avec des moyens techniques qui n’excèdent pas les besoins collectifs de ses adhérents, quelle que soit l’importance de ces moyens » (CE 8° et 3° ssr., 31 décembre 2008, n° 292723, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0531EII). ✔ Le même jour, le Conseil d’État a jugé que « produisait, au 1er janvier des trois années litigieuses, du fromage de Cantal, de la crème et du sérum à partir du lait de vache collecté auprès de ses adhérents ; que cette activité est de celles qui peuvent être réalisées habituellement par les agriculteurs eux-mêmes ; que si les bâtiments en cause sont équipés de moyens techniques nécessaires pour l’élaboration des produits laitiers, tels que des citernes et des moules, il ne résulte pas de l’instruction que ces moyens techniques excéderaient les besoins collectifs de ses adhérents ; que, par suite, les bâtiments dans lesquels la société requérante exerce cette activité doivent être regardés comme affectés à un usage agricole et entrent, dès lors, dans le champ de l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties » (CE 8° et 3° ssr., 31 décembre 2008, n° 308998, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1307EP4). |
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Réf. : CE, 10° et 9° ch.-r., 22 décembre 2020, n° 428890, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A07464BA)
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par Laurent Domingo, Rapporteur public au Conseil d’État
Le 16 Février 2021
Un courrier, adressé à la direction générale des finances publiques, par lequel le mandataire liquidateur d'une société conteste, sur le fondement de l'article R. 624-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L6267I3I), la créance fiscale déclarée par le comptable au motif, d'une part, que cette créance aurait été prescrite et, d'autre part, que la valeur de la saisie immobilière effectuée par les services fiscaux n'aurait pas été déduite de son montant, doit être regardé comme une contestation relative au recouvrement au sens de l'article L. 281 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L8564LHN), alors même qu'il s'inscrit dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire.
Telle est la solution retenue par le Conseil d’État dans un arrêt du 22 décembre 2020.
Lexbase Fiscal vous propose les conclusions du Rapporteur public, Laurent Domingo.
Le pourvoi de Me Vincent de C., mandataire liquidateur de la SARL Plein Soleil, pose une question d’articulation entre les règles de la liquidation judiciaire et celles du recouvrement des créances fiscales.
Cette société Plein Soleil a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 27 février 2009 du tribunal de commerce de Gap. Après publication du jugement, le comptable des impôts, par un acte du 6 avril 2009 pris pour l’application de l’article L. 622-24 du Code de commerce (N° Lexbase : L8803LQ4) auquel renvoie l’article L. 641-3 (N° Lexbase : L8808LQB), a déclaré auprès de Me de C. la créance du Trésor public, d’un montant de 177 382 euros correspondant à des rappels de TVA. Deux ans plus tard, le 21 avril 2011, Me de C. a contesté cette créance, en soulevant la prescription de l’action en recouvrement et en discutant de sa quotité. Le comptable des impôts a maintenu sa position, dès le 4 mai 2011, et le différend a été porté devant le juge-commissaire, lequel, par une ordonnance du 17 octobre 2012, s’est déclaré incompétent pour en connaître, renvoyant les parties devant le juge fiscal compétent, en l’espèce le tribunal administratif de Marseille.
Il a eu raison, au regard de la ligne de partage des compétences entre le juge de la procédure collective, compétent pour connaître des contestations relatives à la mise en œuvre des règles propres à la procédure collective, et le juge du recouvrement, compétent pour connaître des contestations qui portent sur l’existence de l’obligation de payer, le montant de la dette et l’exigibilité de la somme réclamée (v. T. confl., 13 avril 2015, MM. C. c/ Ministère des Finances et des Compte Publics, n° 3988 N° Lexbase : A9546NGN, RJF, 2005, n° 627, Dr. fisc. n° 25/2015 comm. 421, concl. B. Dacosta ; CE, 9° et 10° ch.-r., 19 juin 2019, n° 412794 et n° 415883, mentionnés aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8062ZEC ; ce même partage de compétence s’applique lorsque les créances déclarées par le comptable public ne sont pas admises, v. CE, 9° et 10° ch.-r., 20 novembre 2017, n° 396637, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7461WZD).
Par un jugement du 11 juillet 2014, le tribunal administratif de Marseille a déchargé la société de l’obligation de payer la créance en litige, au motif de la prescription de l’action en recouvrement. En appel, la cour administrative d’appel de Marseille [1], par un arrêt du 22 janvier 2019, a infirmé cette solution et remis à la charge de la société l’obligation de payer sa dette fiscale, en jugeant que le liquidateur judiciaire n’avait pas formé de réclamation préalable avant d’introduire son recours contentieux.
Pour ce faire, la cour a jugé que la lettre du 21 avril 2011 par laquelle Me de C. a avisé le comptable de ce qu’il contestait la créance pour son montant et au motif de la prescription ne pouvait être regardée comme une contestation relative au recouvrement au sens de l’article L. 281 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L8564LHN). Elle a seulement regardé cette lettre comme une réponse du liquidateur dans le cadre de la procédure de vérification des créances, prise sur le fondement de l’article R. 624‑1 du Code de commerce, applicable en vertu de l’article R. 641-28 (N° Lexbase : L1056HZ7).
Le pourvoi y voit une erreur de droit et une erreur de qualification juridique des faits. Ces moyens nous apparaissent fondés.
En premier lieu, la déclaration des créances fiscales par le comptable des impôts vaut acte de poursuite. Vous l’avez jugé dans des états antérieurs de la législation sur la liquidation (CE, Contentieux, 5 décembre 1979, n° 1777, Société Technique des appareils centrifuges industriels N° Lexbase : A2257AKS, RJF, 2/80, n° 173, Droit fiscal 1980, n° 9, comm. 484 ; CE Contentieux, 20 mars 1991, n° 76959, Texier N° Lexbase : A9329AQL, RJF, 1991, n° 684, Droit fiscal, 1991, n° 50, comm. 2449, concl. Ph. Martin). Cette jurisprudence est toujours valable dans l’état actuel du droit des procédures collectives. La cour de cassation l’a jugé (Cass. com., 8 mars 1994, Florent, n° 695, RJF, 1/95, n° 109), vous l’avez implicitement mais nécessairement admis en jugeant que la déclaration de créance est interruptive de la prescription (19 juin 2019, M. D., préc.) et c’est ce du reste ce qu’indique dorénavant explicitement l’article L. 622-25-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L7238IZ4) (« La déclaration de créance interrompt la prescription jusqu'à la clôture de la procédure ; elle dispense de toute mise en demeure et vaut acte de poursuites »), issu de l’article 28 de l’ordonnance n° 2014-236, du 12 mars 2014, portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives, applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er juillet 2014.
En second lieu, l’acte par lequel le liquidateur « discute » – c’est la terminologie du code de commerce – la créance déclarée par le comptable des impôts constitue une réclamation au sens des articles L. 281 (N° Lexbase : L8564LHN) et R*281-1 (N° Lexbase : L7998LM8) du LPF dès lors qu’elle se fonde sur l’un des motifs d’opposition relevant du juge fiscal que sont l'obligation au paiement, le montant de la dette et l'exigibilité de la somme réclamée. Vous l’avez déjà admis à propos de la lettre par laquelle un syndic à la liquidation de biens conteste la production par l'administration entre ses mains d'une créance fiscale au motif qu’elle incluait, à tort selon le demandeur, des pénalités (CE, 7° et 9° ssr., 30 octobre 1989, n° 70753, Gillibert N° Lexbase : A1447AQN, RJF, 1/1990, n° 96, Droit fiscal 1991, n° 50, comm. 2450). Dans le cadre de la clarification opérée par le Tribunal des conflits par la décision précitée « Martini » du 13 avril 2015, selon laquelle le juge fiscal du recouvrement est compétent dans la mesure où la contestation n’est pas relative à la mise en œuvre des règles propres à la procédure collective, mais intéresse celles du recouvrement de l’impôt, cette solution doit être confirmée. Elle doit l’être alors même que le liquidateur, comme en l’espèce, formule sa contestation sur le fondement des dispositions du code de commerce qui lui reconnaissent cette faculté, soit les articles L. 622-27 (N° Lexbase : L7291IZ3) et R. 624-1 (N° Lexbase : L6267I3I). Ces dispositions ne sont néanmoins pas opposables au comptable public, qui n’est soumis qu’au LPF pour répondre à la réclamation dont il est ainsi saisi. Notamment, si le code de commerce impartit au débiteur un délai de 30 jours pour répondre au liquidateur judiciaire, c’est bien le délai de deux mois de l’article R. 281-4 du LPF qui s’applique à la réponse du comptable public.
L’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille, qui s’est fondé sur les dispositions du code de commerce appliquées par le liquidateur pour en déduire qu’il n’avait pas formé une réclamation au sens de l’article R. 281-1 du LPF est donc entaché tout à la fois d’une erreur de droit et d’une erreur de qualification juridique des faits. La solution de l’arrêt, qui revient à considérer que la lettre du liquidateur relève de la procédure de liquidation et non de celle du recouvrement de la créance fiscale est au demeurant contradictoire avec la reconnaissance, par laquelle cet arrêt commence, de la compétence du juge administratif de l’impôt pour connaître du litige.
Nous vous proposons donc de casser cet arrêt et de renvoyer l’affaire à la cour administrative d’appel de Marseille, qui pourra, si les pièces du dossier le lui permettent après renvoi, s’interroger sur l’application du délai raisonnable de contestation, applicable à la réclamation en matière de recouvrement en vertu de votre décision de « Section Min. c/ Amar » (CE, Contentieux, 31 mars 2017, n° 389842, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0457UT4, rec. p. 105, RJF, 2016 n° 616 concl. B. Bohnert C616, chron. A. Iljic).
Lire en ce sens, sur cet arrêt, T. Massart, Le principe de sécurité juridique dans le butoir, Lexbase Fiscal, mai 2017, n° 697 (N° Lexbase : N8042BWR). |
Par ces moyens nous concluons annulation de l’arrêt, au renvoi de l’affaire devant la CAA de Marseille et à ce que l’État verse une somme de 3 000 euros à Me de C. au titre des frais exposés.
[1] Qui vous avez initialement transmis le dossier (CAA Marseille, 26 mai 2016, n° 14MA04115 N° Lexbase : A2819RRT), y voyant à tort un litige né d’un renvoi préjudiciel de l’autorité judiciaire, alors qu’il s’agit d’un contentieux de recouvrement relevant de la compétence du juge administratif. Vous lui avez donc renvoyé ce qui était bien un appel et non un pourvoi en cassation (CE 10° ch., 14 décembre 2016, n° 400265, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A2732SSY).
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Réf. : CA Paris, 6, 29 janvier 2021, n° 19/09480 (N° Lexbase : A08894EN) ; CA Paris, 6, 29 janvier 2021, n° 19/10162 (N° Lexbase : A04364EU)
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par Pierre Pradeau, Olivier Galerneau et Maxime Mahtout, Avocats, EY Société d'avocats
Le 10 Février 2021
Mots-clés : contribution sociale de solidarité des sociétés • C3S • TVA • assiette • transferts de stocks intracommunautaires
Par deux arrêts en date du 29 janvier 2021, la cour d’appel de Paris a tiré les conséquences de la décision « Lubrizol » rendue par la CJUE en date du 14 juin 2018 [1] relative aux règles d’imposition à la C3S en jugeant que ne sont pas à prendre en compte dans l’assiette de cette Contribution les transferts de biens intra-communautaires.
Pour rappel, l’assiette de la C3S est assise sur le chiffre d’affaires global déclaré à l'administration fiscale, calculé hors taxe sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées [2].
En pratique, l’assiette de la C3S est constituée par le chiffre d’affaires entrant dans le champ d’application des taxes sur le chiffre d’affaires, c'est-à-dire l’addition des sommes imposables à la TVA, ou de celles qui, tout en étant dans son champ d’application, en sont exonérées :
Les transferts de biens intra-communautaires même s’ils sont assimilés à des livraisons intra-communautaires de biens pour les besoins de la TVA (CGI, art. 256 bis-II-2° N° Lexbase : L6261LUG), ne constituent pas en tant que tels du chiffre d’affaires.
C’est dans ce contexte que le contentieux s’est noué devant la Cour de cassation [3] et porté par voie de question préjudicielle devant la CJUE [4] qui a dit pour droit que :
« Les articles 28 (N° Lexbase : L2595IPS) et 30 TFUE (N° Lexbase : L2618IPN) doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation d’un État membre prévoyant que l’assiette de contributions perçues sur le chiffre d’affaires annuel des sociétés, pour autant que ce dernier atteint ou dépasse un certain montant, soit calculée en tenant compte de la valeur représentative des biens transférés par un assujetti ou pour son compte, pour les besoins de son entreprise, de cet État membre vers un autre État membre de l’Union européenne, cette valeur étant prise en compte dès ledit transfert, alors que, lorsque les mêmes biens sont transférés par l’assujetti ou pour son compte, pour les besoins de son entreprise, sur le territoire de l’État membre concerné, leur valeur n’est prise en compte dans ladite assiette que lors de leur vente ultérieure, à la condition :
Autrement dit, la prise en compte des transferts de biens intracommunautaire dans l’assiette de la C3S n’a pas pour effet de qualifier la contribution de taxe d’effet équivalent [5] si les trois conditions décrites ci-dessus sont cumulativement réunies.
Dans cette affaire, c’est l’absence de la deuxième condition posée par la CJUE qui a conduit la Cour d’appel de Paris à exclure les transferts de biens intracommunautaires de l’assiette de la C3S.
En l’espèce, afin de trancher le litige dont elle est saisie, la Cour d’appel de Paris décline sa décision en réponse aux arguments développés par l’URSSAF :
Il résulte en effet de la décision précitée de la CJUE, et comme les sociétés requérantes le soutenaient, que le terme régularisation doit s’entendre, notamment, comme le mécanisme permettant de soustraire à l’assiette de la C3S la valeur des biens qui n’ont pas fait l’objet d’une vente après leur transfert dans un autre État membre de l’Union Européenne ou la valeur de ceux qui y ont été transférés dans le seul but d’y faire l’objet d’un travail à façon, sans avoir à déposer une demande de remboursement.
Ainsi, la cour d’appel de Paris relève que la procédure de remboursement de la C3S prévue par l’article L. 243-6 du CSS (N° Lexbase : L1300I7B) n’équivaut pas à mécanisme de régularisation permettant une déduction complémentaire tel que le permettent les déclarations CA3 en ligne 3C et 7B, dans la mesure où les sommes régularisées au titre de ces lignes n’incluent pas celles relatives aux transferts intracommunautaires de biens.
En conséquence, elle en conclut que la prise en compte des transferts de biens dans l’assiette de la C3S n’est pas conforme au droit de l’Union Européenne.
Ces deux décisions permettront à l’ensemble des opérateurs redevables de la C3S de procéder à des retraitements de leurs déclarations passées et futures.
Il conviendra dans le cadre des réclamations contentieuses, d’avoir une analyse fine des flux des opérateurs afin de déterminer le montant de la Contribution acquitté à tort à réclamer aux services de recouvrement de la C3S.
Précisons qu’en pratique d’autres opérations doivent être exclues de la base d’imposition de la Contribution. L’assiette de la C3S devra dont désormais faire l’objet d’une analyse en dentelle.
Enfin, rappelons que conformément au Code de la sécurité sociale, ces réclamations peuvent être déposée dans les trois années qui suivent le paiement effectif de la taxe.
[1] CJUE, 14 juin 2018, aff. C-39/17, Lubrizol France SAS (N° Lexbase : A9143XQP).
[2] CSS, art. L. 137-32 (N° Lexbase : L8716LKZ) et art. L.137-33 (N° Lexbase : L8717LK3).
[3] Cass. civ 2, 19 janvier 2017, n° 15-26.723, FS-D (N° Lexbase : A7167S9C).
[4] CJUE, 14 juin 2018, aff. C-39/17 précité.
[5] Les articles 28 et 30 du traité de fonctionnement de l’Union Européenne prohibent l’instauration de taxes contraires au principe de libre circulation des marchandises, dès lors que la suppression des droits de douanes entre les États membres de l’UE est applicable depuis le 1er juillet 1968.
[6] Mécanisme pleinement applicable à la C3S et prévu à l’article L.243-6 du CSS.
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