Réf. : Cass. civ. 1, 20 mai 2020, n° 19-13.461, F-P+B (N° Lexbase : A05623MR)
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N3456BYN
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par Jérôme Lasserre Capdeville
Le 27 Mai 2020
► Est sans effet sur la qualification professionnelle d’un crédit la circonstance qu’un co-emprunteur est étranger à l’activité pour les besoins de laquelle il a été consenti.
Tel est l’enseignement d’un arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 20 mai 2020 (Cass. civ. 1, 20 mai 2020, n° 19-13.461, F-P+B N° Lexbase : A05623MR).
Depuis la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile (N° Lexbase : L9102H3I), l’article L. 137-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L7231IA3), devenu depuis l’article L. 218-2 (N° Lexbase : L1585K7T), prévoit une prescription biennale pour les actions engagées par les professionnels, « pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs ».
La jurisprudence a logiquement considéré que les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des établissements de crédit constituaient des services financiers fournis par des professionnels et relevaient par conséquent de ce délai de prescription de deux ans (Cass. civ. 1, 28 novembre 2012, n° 11-26.508, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6412IXR ; lire N° Lexbase : N4727BTA ; Cass. civ. 1, 9 avril 2014, n° 12-27.614, F-D N° Lexbase : A0974MKB).
A l’inverse, la prescription biennale ne saurait s’appliquer lorsque les prêts concernés sont destinés à financer une activité professionnelle, fût-elle accessoire. Il en va, par exemple, ainsi en présence de crédits destinés à financer l’acquisition de lots en copropriété voués à être loués. Une jurisprudence s’est ainsi développée à l’égard des loueurs en meublé professionnels (LMP), inscrits en ce sens au registre du commerce et des sociétés (Cass. civ. 1, 14 avril 2016, n° 15-14.567, F-D N° Lexbase : A6960RIM ; Cass. civ. 1, 25 janvier 2017, n° 16-10.105, F-P+B N° Lexbase : A5429TAC, lire les obs. de K. Rodriguez N° Lexbase : N7208BWU ; Cass. civ. 1, 1er mars 2017, n° 16-10.703, F-D N° Lexbase : A1022UTZ ; Cass. civ. 1, 6 décembre 2017, n° 16-23.629, F-D N° Lexbase : A1167W7D).
La jurisprudence est amenée à préciser, à intervalle régulier, le régime juridique de l’ancien article L. 137-2 du Code de la consommation (désormais L. 218-2).
L’arrêt du 20 mai 2020 en témoigne.
L’affaire. La banque A. avait consenti un prêt professionnel à M. et Mme M.. Par la suite, elle leur avait également consenti une ouverture de crédit par découvert en compte. Or, se prévalant d’une créance au titre de ces actes, la banque avait engagé une procédure aux fins de saisie des rémunérations de Mme M.. Cette dernière avait alors soulevé la prescription de la demande en application de l’article L. 137-2 du Code de la consommation.
La cour d’appel de Dijon ayant déclaré la demande de la banque irrecevable, car prescrite, cette dernière avait formé un pourvoi en cassation.
La décision. La Haute juridiction donne ici raison à l’établissement prêteur et casse l’arrêt rendu par la cour d’appel.
Elle commence par rappeler qu’aux termes de l’article L. 137-2, devenu L. 218-2, du Code de la consommation, l’action des professionnels, pour les biens ou les services qu’ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans et qu’il en résulte que cette prescription ne s’applique pas aux actions fondées sur un prêt consenti pour les besoins d’une activité professionnelle.
Elle observe ensuite que pour déclarer prescrite la demande de la banque, après avoir constaté que les différents crédits avaient été conclus pour les besoins de l’activité professionnelle de M. M., viticulteur, et que Mme M. était étrangère à cette activité, la cour d’appel avait retenu que celle-ci, intervenue aux actes en tant que consommateur, pouvait se prévaloir des dispositions prévues par l’article L. 137-2, devenu L. 218-2, du Code de la consommation.
Or, pour la Cour de cassation, en statuant ainsi, alors qu’est sans effet sur la qualification professionnelle d’un crédit la circonstance qu’un co-emprunteur est étranger à l’activité pour les besoins de laquelle il a été consenti, la cour d’appel a violé l’article précité.
Cette décision démontre, à son tour, que la Haute juridiction souhaite maintenir le champ d’application du délai de prescription de deux ans envisagé par l’article L. 218-2 dans des limites strictes. La qualité exacte des co-emprunteurs importe peu ; la finalité professionnelle doit nécessairement primer et, partant, légitimer l’exclusion du délai de prescription raccourci.
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Réf. : CE référé, 22 mai 2020, n° 440216, 440317 (N° Lexbase : A08523MI)
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N3473BYB
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par Laïla Bedja
Le 29 Mai 2020
► Les dispositions de l’article L. 3131-16 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L8571LWD) habilitent, durant l’état d’urgence sanitaire et dans les circonscriptions territoriales où il est déclaré, le ministre chargé de la santé à prescrire toute mesure réglementaire nécessaire pour adapter, de façon temporaire, l’organisation et le fonctionnement du dispositif de santé pour répondre à la situation sanitaire causée par la catastrophe mentionnée à l’article L. 3131-12 (N° Lexbase : L5643LWW), y compris en matière de médicaments ;
► le médecin ou la sage-femme conventionné prescrivant une interruption volontaire de grossesse par voie médicamenteuse, que ce soit au cours d’une consultation classique ou d’une téléconsultation, doit informer la femme sur les mesures à prendre en cas de survenance d'effets secondaires, lui prescrire un traitement analgésique approprié et l’informer de ce qu’en cas de toute difficulté, elle peut se rendre à tout moment dans un établissement de santé conventionné dont il lui remet les coordonnées ; en outre, le protocole validé par la Haute autorité de santé pour les interruptions volontaires de grossesse par voie médicamenteuse pratiquées au-delà de la cinquième semaine de grossesse et jusqu’à la septième semaine de grossesse est conforme aux principales recommandations nationales et internationales émises par les sociétés savantes de gynécologues et d’obstétriciens et qu’elles sont dans plusieurs pays mises en œuvre en dehors d’un établissement de santé.
C’est par ces motifs que le Conseil d’Etat a rejeté la requête de plusieurs associations dans une ordonnance de référé rendue le 22 mai 2020 (CE référé, 22 mai 2020, n° 440216, 440317 N° Lexbase : A08523MI).
Le recours. Les associations Alliance Vita, Juristes pour l’enfance et Pharmac’éthique ont demandé au Conseil d’État de suspendre l’arrêté du 14 avril 2020 du ministre chargé de la Santé (N° Lexbase : L6787LWB). Cet arrêté permet, durant l’état d’urgence sanitaire, de réaliser une interruption volontaire de grossesse (IVG) par voie médicamenteuse, à domicile et par téléconsultation, et ce, jusqu’à 7 semaines de grossesse.
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Réf. : Cass. civ. 1, 13 mai 2020, n° 19-50.025, F-P+B (N° Lexbase : A05313MM)
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N3414BY4
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par Marie Le Guerroué
Le 27 Mai 2020
► L'action négatoire de nationalité régie par l’article 29-3 du Code civil (N° Lexbase : L2701ABN) n'est soumise à aucune prescription.
Telle est la précision apportée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 13 mai 2020 (Cass. civ. 1, 13 mai 2020, n° 19-50.025, F-P+B N° Lexbase : A05313MM ; v., déjà, Cass. civ. 1, 22 juin 2004, n° 02-10.105, F-D N° Lexbase : A7966DCZ).
Faits et procédure. La défenderesse s'était vue délivrer un certificat de nationalité française, comme étant née au Cameroun d'un père français. Soutenant que ce certificat avait été délivré au vu d'un acte de naissance apocryphe, le ministère public l'avait assignée, par acte du 22 décembre 2015, devant le tribunal de grande instance pour voir prononcer l'annulation de ce certificat, et constater son extranéité.
Examen du moyen. Le ministère public faisait grief à l'arrêt rendu par la cour d‘appel de Nancy (CA Nancy, 5 mars 2019, n° 18/00889 N° Lexbase : A5075YZY), de déclarer son action prescrite, alors " que l'action négatoire de nationalité française régie par l'article 29-3, alinéa 2, du Code civil n'est soumise à aucune prescription ; qu'en décidant que lorsqu'une personne s'est vu délivrer un certificat de nationalité française, l'action du ministère public qui conteste cette nationalité se prescrit dans le délai de cinq ans prévu à l'article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC), la cour d'appel a violé les textes susvisés. "
Réponse de la Cour. La cour d'appel déduit de l’article 29-3 du Code civil que l'action négatoire de nationalité régie par ce texte n'est soumise à aucune prescription. Or, pour déclarer irrecevable l'action du ministère public, l'arrêt d’appel retient, d'abord, que le Code civil ne dispose pas que l'action négatoire de nationalité est imprescriptible, et qu'il y a lieu, dès lors, de se référer au délai de droit commun de la prescription qui était de trente ans avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 (N° Lexbase : L9102H3I), et a été ramené à cinq ans par cette loi. Il relève, ensuite, que le ministère de la Justice ayant été informé, par lettre du 18 octobre 2004, par les autorités consulaires françaises au Cameroun, du caractère apocryphe de l'acte de naissance de la défenderesse, le délai de prescription a couru à compter de cette date et que, l'action ayant été introduite le 22 décembre 2015, la prescription est acquise.
Cassation. Elle estime qu’en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
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Réf. : Cons. const., décision n° 2020-842 QPC du 28 mai 2020 (N° Lexbase : A22913MS)
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N3492BYY
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par Marie-Claire Sgarra
Le 29 Mai 2020
► Les dispositions réservant la déductibilité aux seules contributions aux charges du mariage dont le versement résulte d’une décision de justice sont non conformes à la Constitution.
Telle est la solution retenue par le Conseil constitutionnel dans une décision du 28 mai 2020 (Cons. const., décision n° 2020-842 QPC du 28 mai 2020 N° Lexbase : A22913MS).
Pour rappel, chacun des époux est tenu de contribuer aux charges du mariage selon ses facultés même si les époux vivent séparés de fait (C. civ., art. 214 N° Lexbase : L2382ABT).
Le Conseil d’Etat a jugé que présentait un caractère sérieux, au regard du principe d'égalité devant la loi et du principe d’égalité devant les charges publiques, la question de la constitutionnalité des dispositions de l’article 156 du Code général des impôts (N° Lexbase : L9160LNL) en ce qu'elles subordonnent, pour la détermination du revenu net annuel soumis à l'impôt sur le revenu, la déduction de la contribution aux charges du mariage à ce que son versement résulte d'une décision de justice, excluant tout autre cas (CE 9° et 10° ch.-r., 28 février 2020, n° 436454, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A93013GL).
Pour le Conseil constitutionnel, la décision de justice rendue a pour objet soit de contraindre un des époux à s'acquitter de son obligation de contribuer aux charges du mariage, soit d'homologuer la convention par laquelle les époux se sont accordés sur le montant et les modalités de cette contribution. Ainsi, une telle décision de justice n'a ni pour objet ni nécessairement pour effet de garantir l'absence de toute optimisation fiscale. D'autre part, le simple fait qu'un contribuable s'acquitte spontanément de son obligation légale sans y avoir été contraint par une décision de justice ne permet pas de caractériser une telle optimisation.
Dès lors, la différence de traitement contestée n'est justifiée ni par une différence de situation au regard de la lutte contre l'optimisation fiscale ni par une autre différence de situation en rapport avec l'objet de la loi. Elle n'est pas non plus justifiée par un motif d'intérêt général.
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Réf. : CJUE, 23 avril 2020, aff. C-401/18 (N° Lexbase : A96053KX)
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N3383BYX
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par Marie-Claire Sgarra
Le 27 Mai 2020
►La Directive TVA doit être interprétée en ce sens qu’un assujetti qui effectue un transport intracommunautaire unique de biens sous le régime de suspension des droits d’accise, avec l’intention d’acquérir ces biens aux fins de son activité économique une fois ceux-ci mis en libre pratique dans l’Etat membre de destination, obtient le pouvoir de disposer desdits biens comme un propriétaire, au sens de cette disposition, à condition qu’il ait la possibilité de prendre des décisions de nature à affecter la situation juridique des mêmes biens, parmi lesquelles, notamment, la décision de les vendre ;
►La circonstance que cet assujetti avait d’emblée l’intention d’acquérir ces biens, aux fins de son activité économique une fois ceux-ci mis en libre pratique dans l’Etat membre de destination, constitue une circonstance qui doit être prise en compte par la juridiction nationale dans le cadre de son appréciation globale de toutes les circonstances particulières du cas d’espèce dont elle est saisie en vue de déterminer celle des acquisitions successives à laquelle ledit transport intracommunautaire doit être imputé ;
►Le droit de l’Union s’oppose à ce qu’une juridiction nationale, confrontée à une disposition de droit fiscal national, ayant transposé une disposition de la Directive 2006/112, qui se prête à plusieurs interprétations, retienne l’interprétation la plus favorable à l’assujetti, en s’appuyant sur le principe constitutionnel national in dubio mitius, même après que la Cour aurait jugé qu’une telle interprétation est incompatible avec le droit de l’Union.
Telle est la solution retenue par la CJUE dans un arrêt du 23 avril 2020 (CJUE, 23 avril 2020, aff. C-401/18 N° Lexbase : A96053KX).
En l’espèce, une société établie en République tchèque opère dans le secteur du transport routier. Elle est également propriétaire d’un certain nombre de stations-service de distribution de carburants. L’administration fiscale tchèque a constaté que la société, durant les périodes comprises, d’une part, entre les mois de novembre 2010 et de mai 2013 ainsi que, d’autre part, entre les mois de juillet et d’août 2013, avait assuré, par ses propres moyens et à ses propres frais, le transport de carburants depuis plusieurs Etats membres, à savoir l’Autriche, l’Allemagne, la Slovaquie et la Slovénie, à destination de la République tchèque et a agi également en tant qu’acquéreur final de ces carburants, à l’issue d’une chaîne d’opérations d’achat et de revente successives.
La société a fait valoir auprès de l’administration fiscale tchèque que les acquisitions des carburants qu’elle a réalisées en République tchèque constituaient des acquisitions internes. En revanche, cette administration fiscale a considéré qu’il s’agissait d’acquisitions intracommunautaires. Cette même administration a considéré que le lieu des acquisitions effectuées par la société était situé non pas en République tchèque, mais dans les Etats membres où se trouvaient les carburants au moment de leur chargement par cette société en vue de leur transport, à ses propres frais et par ses propres moyens, à destination de la République tchèque, aux fins de sa propre activité économique. L’administration fiscale tchèque a donc refusé à la société le droit de déduire la TVA sur lesdites acquisitions et lui a infligé une amende.
La société a introduit des recours contre ces avis de redressement devant la direction des finances qui par une première décision, annulé les avis de redressement portant sur la période comprise entre les mois de juillet et d’août 2013. Par une deuxième décision, la direction des finances a confirmé les avis de redressement relatifs à la période comprise entre les mois de février 2011 et de février 2013. Par une troisième décision, cette autorité a modifié les avis de redressement relatifs à la période comprise entre les mois de novembre 2010 et de janvier 2011 ainsi qu’à la période comprise entre les mois de mars et de mai 2013. Un recours est introduit contre la deuxième et la troisième décision. La société introduit un recours contre les deuxième et troisième décisions. La cour régionale de Prague décide de surseoir à statuer.
L’assujetti acquiert-il le « pouvoir de disposer d’un bien comme un propriétaire », au sens de la Directive TVA, s’il achète le bien auprès d’un autre assujetti directement pour un acquéreur concret en vue de réaliser sa commande antérieure, s’il ne dispose pas lui-même physiquement du bien puisque, à la suite de la conclusion du contrat de vente, son acquéreur consent à ce qu’il assure le transport de ce bien depuis le lieu d’origine et qu’il se contente de faciliter à l’acquéreur l’accès aux biens par l’intermédiaire de ses fournisseurs et qu’il transmet les informations nécessaires à la prise en charge dudit bien, son bénéfice dans la transaction étant constitué de la différence entre le prix d’achat et le prix de vente du même bien, sans que soit facturé dans le cadre de la chaîne le prix de son transport ?
La Cour rappelle dans un premier temps que l’acquisition intracommunautaire d’un bien, au sens de l’article 20 de la Directive TVA, est effectuée lorsque le droit de disposer du bien comme un propriétaire a été transmis à l’acquéreur et que le fournisseur établit que ce bien a été expédié ou transporté dans un autre Etat membre et que, à la suite de cette expédition ou de ce transport, il a quitté physiquement le territoire de l’Etat membre de départ.
Le transfert du pouvoir de disposer du bien comme un propriétaire ne se limite pas au transfert opéré dans les formes prévues par le droit national applicable, mais inclut toute opération de transfert d’un bien corporel par une partie qui habilite l’autre partie à en disposer en fait comme si elle était le propriétaire de ce bien. Par ailleurs, le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire n’exige pas que la partie à laquelle ce bien est transféré le détienne physiquement ni que ledit bien soit physiquement transporté vers elle et/ou physiquement reçu par elle. Ainsi, une opération de transport de carburants, c’est-à-dire le déplacement de ces produits d’un premier Etat membre vers un second Etat membre, ne saurait être considérée comme décisive aux fins de déterminer si le pouvoir de disposer d’un bien comme un propriétaire a été transféré, en dehors de toute autre circonstance susceptible de faire présumer qu’un tel transfert a eu lieu à la date de ce transport.
S’agissant d’opérations qui forment une chaîne de plusieurs livraisons successives n’ayant donné lieu qu’à un seul transport intracommunautaire, le transport intracommunautaire ne peut être imputé qu’à une seule de ces livraisons, qui sera, partant, la seule exonérée en application de cette disposition, et que, afin de déterminer la livraison à laquelle le transport intracommunautaire doit être imputé, il convient de procéder à une appréciation globale de toutes les circonstances particulières de l’espèce. Il y a lieu, notamment, de déterminer le moment auquel est intervenu le transfert, au bénéfice de l’acquéreur final, du pouvoir de disposer des biens en cause comme un propriétaire.
Pour déterminer celle des acquisitions en cause au principal à laquelle l’unique transport intracommunautaire doit être imputé et qui doit, partant, seule être qualifiée d’acquisition intracommunautaire, il appartient, conformément à la jurisprudence de la Cour à la juridiction de renvoi de procéder à une appréciation globale de toutes les circonstances particulières de l’affaire au principal. La société a elle-même initié le transport des carburants en payant une facture d’acompte au premier opérateur économique de la chaîne d’opérations d’achat et de revente avant même d’avoir procédé au chargement de ces carburants dans des locaux situés dans les Etats membres de départ, a assuré leur transport avec ses propres véhicules et n’a pas facturé le prix de leur transport. En revanche, dans le cadre de cette appréciation globale, la circonstance que le transport des carburants en cause au principal a été réalisé sous le régime de suspension des droits d’accise ne saurait constituer un élément décisif en vue de déterminer celle des acquisitions en cause au principal à laquelle ledit transport doit être imputé.
Le principe de neutralité de la TVA, ou tout autre principe du droit de l’Union, s’oppose-t-il à l’application du principe constitutionnel de droit interne in dubio mitius, qui, en cas d’ambiguïté d’une règle de droit qui propose objectivement plusieurs interprétations possibles, impose aux autorités publiques de retenir l’interprétation favorable au destinataire de la règle de droit ? L’application de ce principe serait-elle conforme au droit de l’Union à tout le moins si elle est limitée aux situations où les circonstances de fait déterminantes du cas d’espèce sont antérieures à l’interprétation contraignante de la question de droit litigieuse par la Cour, qui a jugé correcte une autre interprétation, moins avantageuse pour le contribuable ?
En appliquant le droit national, la juridiction de renvoi est tenue de prendre en considération l’ensemble des règles de ce droit et de faire application des méthodes d’interprétation reconnues par celui-ci afin de l’interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive TVA, telle qu’interprétée par la Cour, pour atteindre le résultat fixé par celle-ci et de se conformer ainsi à l’article 288 du TFUE.
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Réf. : Cass. soc., 1er avril 2020, n° 18-16.889, FS-P+B (N° Lexbase : A06483MX)
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N3482BYM
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par Charlotte Moronval
Le 27 Mai 2020
► Les dispositions du Code du travail, qui imposent à l'employeur, avant tout reclassement d'un salarié déclaré médicalement inapte à son emploi, de recueillir l'avis des délégués du personnel sur les conclusions du médecin du travail et sur les propositions d'emploi destinées au salarié, ne sont pas applicables à la société La Poste.
Ainsi statue la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 1er avril 2020 (Cass. soc., 1er avril 2020, n° 18-16.889, FS-P+B N° Lexbase : A06483MX).
Dans les faits. Un salarié de La Poste est déclaré inapte à son poste par le médecin de travail à l’issue de deux examens après avoir été placé en arrêt de travail à la suite d’un accident du travail. Il est par la suite licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La position de la cour d’appel. Pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur au paiement de dommages-intérêts à ce titre, la cour d’appel (CA Douai, 30 mars 2018, n° 17/00967 N° Lexbase : A6627XY4) retient que l'article 31 de la loi du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du service public de la poste n'exclut pas l'application des dispositions du code du travail qui imposent à l'employeur, avant tout reclassement d'un salarié déclaré médicalement inapte à son emploi, de recueillir l'avis des délégués du personnel sur les conclusions du médecin du travail et sur les propositions d'emploi destinées au salarié. La cour d’appel précise qu’aux termes de l’article 8 de la convention commune La Poste France Telecom, les commissions consultatives paritaires existantes sont, dans l’attente de la parution du décret prévu à l’article 7, compétentes pour connaître des cas des personnels relevant de la convention, que l’article 68 de la convention prévoit que lorsque le licenciement est envisagé pour insuffisance professionnelle après la période d’essai, pour inaptitude physique ou pour toute sanction disciplinaire autre que l’avertissement ou le blâme, la commission est obligatoirement consultée. Il en déduit que les dispositions des articles L. 1226-10 (N° Lexbase : L8707LGL) et suivants du Code du travail s'appliquent bien à la société La Poste, les délégués du personnel étant remplacés dans leur rôle par la commission consultative paritaire, instance propre à cette société, et qu’en l’espèce l’employeur a bien soumis le cas du salarié à une commission consultative paritaire, en premier lieu au sujet du reclassement et en second lieu du licenciement mais que cette consultation est intervenue à chaque fois a posteriori.
La solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel. En statuant comme elle l’a fait, alors qu’en vertu de l’article 31 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, les dispositions du code du travail relatives aux délégués du personnel ne sont pas applicables à la société La Poste, et que l'article 68 de la convention commune La Poste France Telecom qui précise les cas et conditions dans lesquels la commission consultative paritaire doit être consultée en cas de licenciement détermine seul les conditions d'intervention de cette commission, la cour d'appel a violé l'article 31 de la loi du 2 juillet 1990 et l'article 68, alinéa 1er, de la convention commune La Poste France Telecom.
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newsid:473482
Réf. : Arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d'appel (N° Lexbase : L1630LXN)
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N3491BYX
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par Alexandra Martinez-Ohayon
Le 03 Juin 2020
► Un arrêté du 20 mai 2020 (N° Lexbase : L1630LXN) a été publié au Journal officiel du 21 mai 2020, portant sur la communication par voie électronique en matière civile devant la cour d’appel.
Le texte prévoit notamment :
Dans son premier article, l’abrogation de deux arrêtés est prévue : le premier du 5 mai 2010 (N° Lexbase : L3316IKZ), relatif à la communication par voie électronique dans les procédures sans représentation obligatoire devant les cours d'appel et le second du 30 mars 2011 (N° Lexbase : L9025IPX), relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel.
Le second article fixe, quant à lui, son application, énonçant que les envois, remises et notifications mentionnés à l’article 748-1 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0378IG4) devront répondre aux garanties fixées par ce nouvel arrêté, et ce dans le cadre des procédures avec ou sans représentation obligatoire devant la cour d’appel ou son premier président.
Les articles 3 à 8 constituent le chapitre I, portent sur les conditions de forme des actes de procédure remis par la voie électronique :
Les articles 9 à 11 constituant le chapitre II, portent sur le système de communication électronique mis à disposition des juridictions et du ministère public :
Les articles 12 à 15, constituant le chapitre III, portent sur la sécurité des moyens d’accès des avocats au système de communication électronique mis à leur disposition, et donc du réseau privé virtuel avocat (RPVA).
Les articles restants portent essentiellement sur l’identification des parties à la communication électronique, et sa fiabilité, ainsi que la sécurité des transmissions.
Ce nouvel arrêté est entré en vigueur le jour de sa publication, le 21 mai 2020, à l’exception des dispositions de l’article 2, en ce qu’elles portent sur la transmission des actes de procédure au premier président près de la cour d’appel, qui rentreront en vigueur à compter du 1er septembre 2020.
Informations pratiques : · dans les procédures avec représentation obligatoire, il n’y a pas de changement, donc la pratique reste identique à celle qui était imposée par l’arrêté précédent du 30 mars 2011 ; · dans les procédures d’appel sans représentation obligatoire, l’arrêté du 5 mai 2010, ne concernait que la déclaration d’appel et l’acte de constitution, à présent, tous les actes de procédure peuvent être transmis par la voie électronique, cela reste une possibilité et non une obligation ; · à compter du 1er septembre 2020, la nouveauté énoncée par cet arrêté est la communication électronique devant le premier président, en attendant il faut recourir au papier ; · ce texte ne s’applique pas de manière rétroactive donc la prudence est de mise. |
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Réf. : Cass. civ. 2, 28 mai 2020, n° 19-14.010, F-P+B+I (N° Lexbase : A22873MN)
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N3494BY3
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par Laïla Bedja
Le 03 Juin 2020
► Au regard de l’article L. 162-1-14, II, devenu L. 114-17-1, II, du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4969LUL), la pénalité qu’il prévoit est due, notamment, pour toute inobservation des règles du Code de la Sécurité sociale, du Code rural et de la pêche maritime ou du Code de l’action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d’une prestation en nature ou en espèces par l’organisme local d’assurance maladie ;
cette pénalité n’est pas subordonnée à l’intention frauduleuse de l’assuré.
Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 28 mai 2020 (Cass. civ. 2, 28 mai 2020, n° 19-14.010, F-P+B+I N° Lexbase : A22873MN).
Les faits. Une assurée, salariée auprès de deux employeurs différents, a continué de travailler auprès d’un premier employeur alors qu’elle percevait des indemnités journalières au titre d’un arrêt de travail concernant le second employeur. La caisse primaire d’assurance maladie lui a alors infligé une pénalité financière de 500 euros que cette dernière a contesté.
Le jugement. Le tribunal des affaires de Sécurité sociale, pour annuler la pénalité, a constaté que l’assurée ne contestait pas avoir travaillé auprès de l’un de ses deux employeurs alors qu’elle se trouvait en arrêt maladie, mais relève qu’étant salariée, elle n’était pas rompue à la gestion des arrêts maladie et qu’elle se trouvait dans un cas particulier, dans la mesure où elle travaillait pour deux employeurs. Au regard des emplois exercés et du niveau d’études de l’assurée, ne lui permettant pas d’avoir les connaissances particulières en matière de Sécurité sociale, les juges en ont déduit que si l’assurée a commis une erreur, aucun élément du dossier ne permet de démontrer qu’elle aurait agi avec une intention frauduleuse.
La cassation du jugement. Les Hauts magistrats n’iront pas dans ce sens. Rappelant la règle précitée, ils cassent et annulent le jugement rendu par le tribunal des affaires de Sécurité sociale de Chambéry pour violation des articles L. 162-1-14, II, devenu L. 114-17-1, II, et L. 323-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4972LUP), ce dernier dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 (N° Lexbase : L9761INT), applicable au litige.
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