Lecture: 2 min
N9304BSE
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Vincent Téchené, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition affaires
Sous la Direction de Deen Gibirila, Professeur à la Faculté de droit et science politique, Université Toulouse I Capitole
Le 15 Décembre 2011
Propriété intellectuelle. Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de retrouver, cette semaine, la chronique en droit de la propriété intellectuelle de Nathalie Martial-Braz, Professeur à l'Université de Franche-Comté (lire N° Lexbase : N9275BSC). Le dernier semestre de l'année 2011 est avant tout marqué par une intense activité de la Cour de justice de l'Union européenne tant en matière de droit d'auteur qu'en matière de brevet qui démontre l'influence qu'elle exerce dans le processus d'harmonisation du droit de la propriété intellectuelle actuellement à l'oeuvre. Union, Harmonisation et Exception, un triptyque qui pourrait être à l'image des deux importantes décisions rendue par la Cour de justice de l'Union européenne ces dernières semaines : celle, d'abord, du 1er décembre 2011 (CJUE, 1er décembre 2011, aff. C-145/10), dans laquelle les juges de Luxembourg retiennent en substance que si la photographie d'un portrait bénéficie de la même protection que celle conférée par le droit d'auteur à toute autre oeuvre, les médias peuvent publier une telle photographie sans le consentement de son auteur si la publication, dans le cadre d'une enquête criminelle, a pour objet d'aider la police à retrouver une personne disparue ; celle, ensuite, du 18 octobre 2011 (CJUE, 18 octobre 2011, aff. C-34/10), dans laquelle la CJUE nous livre, en matière d'exclusion de la brevetabilité des embryons à des fins de recherche scientifique, une interprétation stricte des exceptions au nom du respect de l'ordre publique et du principe de dignité humaine. |
Sociétés. Qui ne se souvient de la phrase cynique que Michel Audiard plaçait dans la bouche de Jean Gabin dans Le gentleman d'Epsom : "il y a deux expédients à n'utiliser qu'en dernière instance : le cyanure ou la loyauté". Si le cyanure semble banni des solutions propres à résoudre les conflits au sein des sociétés, la loyauté, qu'elle soit présentée comme un devoir ou une obligation, semble prendre une emprise croissante en droit des affaires, depuis que son intérêt avait été mis en lumière à l'occasion de l'arrêt "Vilgrain" (Cass. com., 27 février 1996, n° 94-11.241, publié). En témoigne notamment l'arrêt rendu le par la Chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com. 15 novembre 2011, n° 10-15.049, F-P+B) et sur lequel nous vous invitons à lire, cette semaine, les observation de Jean-Baptiste Lenhof, Maître de conférences à l'ENS - Cachan Antenne de Bretagne, Membre du centre de droit financier de l'Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne). Cette décision aura, certes, les honneurs du Bulletin mais sa motivation laisse pressentir qu'il recevra la plus large audience en doctrine. Au delà des faits de l'espèce, caractérisés par leur banalité, c'est, en effet, surtout le fondement retenu par le juge, ici, l'article L. 223-22 du Code de commerce, qui invite à s'interroger sur l'intérêt d'une inflexion potentielle, bien qu'encore hypothétique, de l'assise textuelle de la jurisprudence en matière de loyauté. Lire Réflexions sur l'obligation de loyauté dans les SARL (N° Lexbase : N9269BS4). |
Les éditions juridiques Lexbase vous souhaitent d'agréables fêtes de fin d'année et vous retrouvent le jeudi 5 janvier 2012 pour de nouvelles publications.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429304
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-24.353, FS-P+B (N° Lexbase : A1999H4S)
Lecture: 2 min
N9281BSK
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 05 Janvier 2012
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429281
Lecture: 22 min
N9312BSP
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Anne-Lise Lonné-Clément, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition privée
Le 16 Décembre 2011
Pour présenter l'ensemble des obligations et précautions documentaires à respecter lors de la rédaction du bail commercial, Maître Alain Confino a choisi de synthétiser ces informations extrêmement nombreuses dans le cadre d'une série de cinq tableaux (1).
Ces tableaux constituent ainsi une synthèse :
- des informations documentaires impératives dictées par des textes applicables aux baux de locaux à usage commercial (tableaux 1 et 2) ;
- de celles qui sont conseillées même si elles ne sont imposées que par des réglementations applicables à d'autres types de conventions (tableaux 3 et 4) ;
- et enfin de celles qui sont impératives pour les baux de locaux à usage mixte commercial et d'habitation, voire pour les baux mixtes professionnels et d'habitation qui ont pu faire l'objet d'une extension volontaire du statut des baux commerciaux (tableau 5).
La lecture de ces tableaux appelle différentes remarques.
Les informations concernées sont susceptibles d'être applicables à tous les baux : ceux qui sont soumis au statut des baux commerciaux, que ce soit par nature (locations principales comme sous-locations) ou par extension, mais aussi ceux qui y échappent par la volonté des parties (baux dérogatoires) ou en raison de l'absence de l'une au moins des conditions de soumission édictées par les articles L. 145-1 (N° Lexbase : L2327IBS) et suivants du Code de commerce.
Certaines informations sont impératives pour tout bail commercial (BC), soit parce que la loi l'énonce expressément, soit parce que la réglementation applicable à la matière concernée impose au bailleur, en tant que propriétaire (ces obligations ne concernent, donc, que dans une moindre mesure le locataire principal vis-à-vis de son sous-locataire), de satisfaire à certaines règles de prudence et de protection de la santé des occupants de son immeuble, dont l'inobservation peut même engager sa responsabilité pénale.
D'autres sont simplement conseillées au bailleur s'il veut réduire, autant qu'il est possible, les risques de sanctions civiles de droit commun, ces précautions trouvant essentiellement leur source dans les obligations documentaires applicables en matière de vente d'immeuble (CCH, art. L. 271-4 N° Lexbase : L7960IMR), et dans la jurisprudence.
Enfin, certaines informations ont encore un caractère impératif en présence de baux mixtes (BM). Il en est ainsi des baux à usage commercial et d'habitation. On peut encore évoquer l'hypothèse -exceptionnelle- de baux mixtes professionnels et d'habitation (relevant des dispositions de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 N° Lexbase : L8461AGH) qui feraient l'objet d'une adoption volontaire du statut des baux commerciaux.
Les obligations et précautions documentaires se distinguent aussi par leur objet. Le tableau décrit le contenu de l'information à fournir par le bailleur et/ou le document à remettre au preneur lorsque l'information consiste en la communication d'un diagnostic établi par un professionnel.
Sont précisées également les modalités selon lesquelles le bailleur communiquera l'information concernée (intégration au contrat par voie d'annexe ou de stipulation expresse, remise séparée au preneur ou tout autre mode permettant de se ménager la preuve de la réception de l'information).
S'agissant du moment de la communication, la loi précise parfois, selon les cas, que l'information doit être donnée lors de la conclusion du bail, lors de son renouvellement ou même parfois en cours de bail. Toutefois, compte tenu de l'imprécision de bien des textes à cet égard, la prudence devrait conduire le bailleur à délivrer l'information requise dès qu'il en a connaissance. Dans le silence ou l'imprécision des textes, nous recommandons par exemple d'attacher aux actes de renouvellement les annexes requises pour la conclusion d'un bail (ainsi, par exemple, l'état des risques naturels et technologiques majeurs).
Quant aux informations non impératives, le moment auquel le bailleur aura intérêt à les fournir sera apprécié par lui en fonction des risques qu'il encourt et de l'importance des informations dont il a connaissance et que le preneur n'est pas censé avoir reçues.
Lorsque le bailleur est soumis à une obligation documentaire particulière en raison de certaines caractéristiques de l'immeuble loué, la mention des immeubles concernés, figurant dans le tableau, doit être comprise comme délimitant le champ d'application des dispositions légales correspondantes.
Les précautions documentaires conseillées concernent principalement les immeubles sur lesquels portent les obligations d'information édictées par l'article L. 271-4 du Code de la construction et de l'habitation en matière de vente.
Enfin, les obligations documentaires sont susceptibles d'entraîner des sanctions, civiles et pénales, détaillées dans le tableau. Il convient à cet égard d'avoir à l'esprit que si les textes prévoient des sanctions spéciales, la mise en oeuvre des sanctions générales de droit commun peut toujours être envisagée à titre complémentaire ou même principal.
Ainsi la responsabilité pénale du bailleur (renvoi 2) est-elle susceptible d'être engagée, notamment sur le fondement de l'article 121-3 du Code pénal (N° Lexbase : L2053AMY), dans l'hypothèse où il aurait méconnu une obligation particulière de sécurité imposée par une disposition législative ou réglementaire.
Les défauts ou insuffisances d'information imputables au bailleur sont également de nature à l'exposer à des sanctions civiles (renvoi 1) sur le fondement des articles 1719-1° du Code civil (N° Lexbase : L8079IDL obligation de délivrance conforme), 1721 du même code (N° Lexbase : L1843ABU garantie des vices cachés), 6 de la loi du 6 juillet 1989 en matière de bail mixte (N° Lexbase : L3389A9E délivrance d'un logement décent), ou sur un ou plusieurs des fondements généraux des articles 1110 (N° Lexbase : L1198ABY), 1116 (N° Lexbase : L1204AB9), 1142 (N° Lexbase : L1242ABM), 1144 (N° Lexbase : L1244ABP), 1147 (N° Lexbase : L1248ABT), 1184 (N° Lexbase : L1286ABA), et 1382 (N° Lexbase : L1488ABQ) du Code civil, ou encore sur celui de l'obligation de sécurité dégagée par la jurisprudence.
Gilles Hittinger-Roux a présenté ses observations en trois temps.
Inventaire des clauses exonératoires de responsabilité présentes dans les baux commerciaux
Tout d'abord, dès le préambule du contrat, un premier dispositif rappelle que le preneur, préalablement à la signature du bail, a apprécié personnellement la qualité du site -ce qui revient à rappeler que le locataire est un professionnel, par opposition à un consommateur-. Peut-être conviendrait-il de repenser cette clause lorsque sa signature intervient deux ans avant la livraison du local, dans le cadre d'un site nouvellement créé, lorsque la zone commerciale attendue n'existe pas. Autrement dit, il convient de le replacer dans son situ.
Gilles Hittinger-Roux relève, ensuite, la clause prévoyant que le preneur déclare contracter en acceptant les aléas économiques. Si cela peut paraître logique que le bailleur puisse se protéger en énonçant que, dans l'hypothèse où il y a des aléas économiques, sa responsabilité ne puisse pas être engagée, la clause devient plus litigieuse, lorsqu'il est ajouté que le bailleur pourra prendre toute initiative pour aménager et réaliser des travaux selon l'évolution positive ou négative de la zone. Force est de constater que ce n'est pas l'imprévision, mais les travaux réalisés par le bailleur qui sont susceptibles de modifier les flux. Il convient alors de s'interroger sur la nature des possibilités pour le bailleur de réaliser lesdits travaux.
Le troisième dispositif concerne la possibilité pour le bailleur de s'exonérer de son obligation de délivrance ou de jouissance paisible. On constate que ce type de clauses, et notamment les clauses "charges", prévoit que le bailleur aura toute faculté de pouvoir modifier la zone, de pouvoir réaliser des agencements, des agrandissements ou toute sorte de modification. Se pose alors la question de savoir si le preneur peut invoquer les dispositions des articles 1719 (N° Lexbase : L8079IDL) et 1723 (N° Lexbase : L1845ABX) du Code civil, autrement dit de savoir si ces dispositions sont d'ordre public.
Rappel du droit commun de la responsabilité
Il convient, tout d'abord, de rappeler le principe de la liberté contractuelle. A priori, le contrat est librement négocié ; même s'il s'agit, le plus fréquemment, d'un contrat d'adhésion, en tous les cas, le preneur agit en tant que professionnel. Par conséquent, les renonciations sont tout à fait possibles.
La limite posée par la jurisprudence au principe de la liberté contractuelle consiste toutefois à vérifier l'absence de manquement à l'obligation essentielle du contrat (Cass. com., 22 octobre 1996, n° 93-18.632 N° Lexbase : A2343ABE). Mais depuis 2005, la clause limitative de responsabilité ne peut être mise en échec que si le créancier établit le dol ou la faute lourde du débiteur, même en cas de l'exécution d'une obligation essentielle du contrat (Cass. mixte, 22 avril 2005 n° 02-18.326 N° Lexbase : A0025DIR ; Cass. com., 21 février 2006 n° 04-20.139 N° Lexbase : A1807DNA). Il convient alors de distinguer les clauses exonératoires de responsabilité, d'une part, et l'obligation au contrat, d'autre part.
Application en matière de baux commerciaux
Dans le cadre du bail commercial, deux jurisprudences principales sont à considérer.
Tout d'abord, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 11 mai 1995 (Cass. civ. 3, 11 mai 1995, n° 93-16.719 N° Lexbase : A4316CRB), a précisé que le bailleur d'un local commercial est débiteur de l'obligation de délivrance et de jouissance paisible régie par l'article 1719 du Code civil (N° Lexbase : L8079IDL), sans être tenu à des obligations plus étendues que celles d'un "bailleur ordinaire".
De même, dans un arrêt du 13 juin 2001, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que le bailleur n'est tenu vis-à-vis du locataire d'aucune autre obligation que celle de délivrance, d'entretien et de jouissance paisible de la chose louée et notamment pas d'une obligation d'un maintien d'un environnement commercial favorable (Cass. civ. 3, 13 juin 2001, n° 99-17.985 N° Lexbase : A6104ATA, Bull. civ. III, n° 78).
Cela étant, dans un contexte où les droits d'entrée ainsi que les loyers versés dans le cadre des centres et galeries atteignent des montants considérables, il convient de se demander si le preneur n'est pas légitimement en mesure d'exiger d'un environnement commercial. En d'autres termes, Gilles Hittinger-Roux nous invite à rechercher la cause du contrat -à savoir la recherche d'un environnement commercial favorable-, et non pas seulement lors de la conclusion du contrat, mais tout au long de son exécution, sachant qu'il faut en effet considérer que les parties se situent dans le cadre d'un contrat successif.
Ainsi que l'a rappelé Bertrand Raclet, l'article 1755 du Code civil (N° Lexbase : L1888ABK) précise qu'"aucune des réparations réputées locatives n'est à la charge des locataires quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure". Ce texte étant supplétif de volonté, la jurisprudence retient que le transfert au preneur de la charge des réparations liées à la vétusté ne peut résulter que d'une clause expresse contenue dans le bail.
L'intervenant est revenu sur trois arrêts récents qui adoptent le même raisonnement.
Dans une première espèce ayant donné lieu à un arrêt rendu le 13 septembre 2011 (Cass. civ. 3, 13 septembre 2011, n° 10-21.027, F-D N° Lexbase : A7482HXE), le bail stipulait que le bailleur n'était tenu "que des grosses réparations définies à l'article 606 du Code civil (N° Lexbase : L3193ABU) et que les désordres relatifs à l'installation électrique, au chauffage, à la plomberie, au plancher, à l'escalier de la cave aux plafonds et aux étagères de stockage ne relevaient pas de l'obligation des grosses réparations à la charge du bailleur". La cour d'appel avait retenu que, les locaux ayant été pris en l'état, le bailleur avait satisfait à son obligation de délivrance. L'arrêt est censuré, au visa de l'article 1755 du Code civil (N° Lexbase : L1888ABK), par la Cour suprême qui estime que, dès lors que les juges du fond n'avaient pas relevé de clause expresse du bail mettant à la charge du preneur les travaux rendus nécessaires par la vétusté, ils auraient dû rechercher si les réparations invoquées n'étaient pas, au moins pour partie, occasionnées par la vétusté.
Il est donc très clairement demandé aux juges du fond de vérifier s'il existe, ou non, dans le bail une clause expresse transférant les effets de la vétusté sur le locataire ; en l'absence d'une telle clause, il leur est demandé de qualifier les travaux dont s'agit, pour permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle.
Dans un deuxième arrêt du 5 avril 2011 (Cass. civ. 3, 5 avril 2011, n° 10-14.877, F-D N° Lexbase : A3436HNL), l'affaire portait sur la réparation, relativement importante, des ascenseurs de l'immeuble. Le bail prévoyait que "toutes les charges relatives à la gestion à l'entretien et aux réparations de l'immeuble à l'exception des travaux relevant expressément de l'article 606 du Code civil" incombaient au preneur. La cour d'appel avait estimé que les travaux de réparation de l'ascenseur étaient donc à la charge du locataire au vu du bail. Selon la même logique, et également au visa de l'article 1755 du Code civil, la Cour de cassation retient qu'"en statuant ainsi, sans relever de clause expresse du bail mettant à la charge du preneur les travaux rendus nécessaires par la vétusté alors qu'elle avait retenu que les réparations des ascenseurs résultaient de leur vétusté, la cour d'appel a violé le texte susvisé".
Enfin, dans un arrêt du 27 septembre 2011, c'est la vétusté de l'installation électrique qui était en cause. S'agissant des conditions locatives, le bail mettait à la charge du preneur le parfait état des réparations locatives et de menu entretien visées à l'article 1754 du Code civil (N° Lexbase : L1887ABI), et prévoyait qu'il supporterait en outre celles de gros entretien visées à l'article 606, alinéa 3, du Code civil. La cour d'appel avait jugé que l'installation électrique n'entrait pas dans les réparations à la charge du bailleur. Là encore, l'arrêt est censuré selon le même raisonnement, mais cette fois, au visa de l'article 1719 du Code civil, relatif à l'obligation de délivrance : "en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'installation électrique des locaux loués était vétuste et sans relever de clause du bail mettant à la charge du preneur les travaux rendus nécessaires par la vétusté, la cour d'appel a violé le texte susvisé".
Au vu de cette jurisprudence, Bertrand Raclet propose un certain nombre de recommandations pour la rédaction du bail.
Pour mettre à la charge du locataire les réparations liées à la vétusté, il convient donc de stipuler dans le bail une clause expresse prévoyant le transfert de la charge de la vétusté, et de veiller à prévoir une bonne définition des travaux. On peut prévoir, en outre, que les travaux relevant de l'article 606 du Code civil, sont également à la charge du preneur. Quant aux travaux de mises aux normes, il est également nécessaire d'insérer une clause expresse en ce sens.
Ces clauses peuvent être cumulées. En effet, le fait d'avoir transféré sur le locataire les réparations relevant de l'article 606 du Code civil n'implique pas qu'il ait la charge de la vétusté. Inversement, si les travaux liés à la vétusté sont mis à la charge du preneur, et non les travaux structurels, le preneur n'en sera pas redevable. En effet, les travaux structurels n'entrent pas dans la définition de la vétusté.
A noter que la clause du bail prévoyant que les locaux sont pris en l'état ne permet pas de transférer au preneur la charge de la vétusté. De même, la clause indiquant que le preneur est tenu de restituer les locaux en parfait état d'entretien et de réparation n'implique pas la prise en compte de la vétusté.
Maître Bertrand Raclet est également revenu sur un certain nombre d'arrêts récents relatifs aux droits au renouvellement du sous-locataire et du locataire principal, dans les hypothèses d'adoption volontaire du statut des baux commerciaux, dans le cadre de sous-location totale des locaux.
Deux arrêts rendus par la Cour de cassation le 4 mai 2011 délivrent des enseignements complémentaires.
- Cass. civ. 3, 4 mai 2011, n° 09-72.550, FS-P+B (N° Lexbase : A2542HQ9)
En l'espèce, il s'agissait de consentir un bail pour un établissement d'enseignement de formation. Le futur exploitant n'ayant pas la surface financière permettant de prendre à bail directement, un locataire principal avait été inséré entre le propriétaire et le futur exploitant, qui répondait aux conditions financières exigées par le bailleur.
Le contrat prévoyait l'autorisation de la sous-location totale ; il était également stipulé que le bailleur renonçait à l'action en réajustement du loyer ; enfin, une clause prévoyait que les locaux devraient être maintenus en état permanent effectif d'exploitation, soit par le locataire principal, soit par le sous-locataire.
Le contrat de sous-location conclu entre le sous-locataire et le locataire principal avait omis de faire concourir le propriétaire à l'acte.
En fin de bail, le bailleur a refusé au locataire le renouvellement, faisant valoir l'absence d'exploitation des locaux, et donc l'absence de fonds de commerce. Le locataire ne pouvait alors prétendre ni au droit au renouvellement, ni au droit à l'indemnité d'éviction.
Le congé invoquait un motif grave et légitime, à savoir que le bailleur n'avait pas été convié à concourir à l'acte de sous-location, ce qui constitue une infraction ne nécessitant pas de mise en demeure préalable.
La cour d'appel de Paris, dans un arrêt du 9 septembre 2009 (CA Paris, 16ème ch., sect. A, 9 septembre 2009, n° 08/00655 N° Lexbase : A4388EQL), avait estimé qu'il y avait eu adoption volontaire du statut des baux commerciaux au profit du locataire principal ; quant au sous-locataire, les éléments du dossier démontraient, selon les juges, un agrément tacite.
Dans son arrêt rendu le 4 mai 2011, la Cour de cassation s'est prononcée sur deux éléments.
S'agissant de l'agrément tacite du sous-locataire, l'article L. 445-31 du Code de commerce (N° Lexbase : L5760AI8), prévoit une formalité de concours, destinée à informer le bailleur des conditions de la sous-location. Il faut rappeler, à cet égard, que la Cour de cassation a précisé que l'obtention d'une autorisation du bailleur est également exigée lors du renouvellement de la sous-location (Cass. civ. 3, 28 octobre 2009, n° 08-18.736, FS-P+B N° Lexbase : A6095EMP).
En l'espèce, la Cour de cassation a admis l'agrément tacite du sous-locataire, estimant que la sous-location était inhérente au contrat. Dès lors que le bailleur principal savait, dès la conclusion du bail initial, que les locaux avaient vocation à être sous-loués en totalité, que les clauses du bail prenaient en compte cette situation et que des relations directes entre le bailleur principal et le sous-locataire se sont poursuivies au cours des baux successifs (pour l'exécution de travaux ou de contrôles de la commission de sécurité), le Haute juridiction considère que le bailleur avait tacitement agréé cette sous-location.
Concernant le locataire principal, il faut savoir que l'adoption volontaire du statut des baux commerciaux doit résulter d'une volonté claire et non équivoque ; elle doit donc être exprimée par écrit dans le contrat.
La Cour de cassation, en l'espèce, a relevé notamment la clause de l'occupation personnelle des locaux de l'exploitation des locaux, qui pouvait être soit celle du locataire principal, soit celle du sous-locataire ; elle en déduit que les parties n'avaient pas fait de l'occupation personnelle par le locataire une condition d'application du statut des baux commerciaux : "dès lors que la bailleresse savait que les locaux donnés à bail avaient vocation à être sous-loués dans leur totalité et que le bail stipulait que les locaux devaient être maintenus constamment utilisés soit par le preneur lui-même, soit par ses sous-locataires, la cour d'appel a pu en déduire que les parties avaient entendu soumettre le bail au statut des baux commerciaux sans faire de l'exploitation des lieux par le locataire principal une condition nécessaire à son application". Le locataire principal pouvait donc faire valoir son droit à une indemnité d'éviction.
La question sous-jacente posée par cet arrêt est celle de la sous-location totale qui peut donner lieu au paiement d'une double indemnité : une pour le locataire principal résultant de l'adoption volontaire du statut des baux commerciaux ; une autre pour le sous-locataire résultant de l'agrément tacite.
- Cass. civ. 3, 4 mai 2011, n° 10-16.231, FS-D (N° Lexbase : A2577HQI)
En l'espèce, il s'agissait d'un antiquaire brocanteur qui était autorisé par le bail à sous-louer des stands, partiellement ou totalement. Le bail prévoyait la renonciation du bailleur au droit de réajustement du loyer.
En fin de bail, le bailleur a délivré un congé d'annulation, à défaut d'exploitation personnelle du local. Le locataire principal soutenait qu'il était propriétaire d'un fonds de commerce de sous-location de stands, et qu'il bénéficiait de l'adoption volontaire du statut.
Mais la Cour de cassation retient que les stipulations relatives à la sous-location dont le seul but est de déroger au principe d'interdiction des sous-locations ne modifient pas l'obligation faite au preneur d'exploiter le fonds de commerce pour bénéficier d'un droit au renouvellement.
Au vu de ces deux arrêts du 4 mai 2011, Bertrand Raclet a livré quelques recommandations pour la rédaction des clauses de sous-location.
Du point de vue du locataire, il convient, tout d'abord, de prévoir une clause générale d'autorisation de sous-location totale, ce en évitant d'identifier des sous-locataires potentiels. Par ailleurs, la prudence peut conduire à suggérer au bailleur une dispense de la formalité du concours, et de prévoir simplement l'envoi de l'acte dans le délai d'un mois suivant sa signature.
Il convient de prévoir l'adoption volontaire du statut des baux commerciaux pour le locataire principal ; en outre, il est important de préciser que la condition manquante pour l'application du statut, est celle de l'occupation personnelle, et ainsi, qu'en l'absence d'occupation personnelle ou d'exploitation d'un fonds, les parties décident néanmoins que le locataire principal, par adoption volontaire, aura droit au renouvellement de son bail ; on peut également prévoir que le bailleur renonce à invoquer, pour ce motif, l'article L. 145-8 (N° Lexbase : L2248IBU) à l'encontre du locataire principal.
Bertrand Raclet propose, enfin, de régler le sort de l'action en réajustement du loyer, ce qui peut s'envisager de plusieurs manières, y compris par le partage entre le bailleur et le locataire principal du surcoût du loyer.
- Cass. civ. 3, 19 janvier 2011, n° 09-72.040, FS-D (N° Lexbase : A2889GQ3)
L'arrêt rendu le 19 janvier 2011 apporte quelques précisions s'agissant du droit direct au renouvellement du sous-locataire en cas d'indivisibilité matérielle des locaux.
Pour rappel, aux termes de l'article L. 145-32, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L5760AI8), à l'expiration du bail principal, le propriétaire n'est tenu au renouvellement que s'il a, expressément ou tacitement, autorisé ou agréé la sous-location et si, en cas de sous-location partielle, les lieux faisant l'objet du bail principal ne forment pas un tout indivisible matériellement ou dans la commune intention des parties.
Dans cette affaire, le bail prévoyait une désignation contractuelle banale ; aucune indivisibilité n'était stipulée. La cour d'appel n'avait pas voulu reconnaître le droit direct au renouvellement en considérant que la division des locaux n'était pas prévue, qu'il y avait simplement une désignation de ces locaux et que l'acceptation tacite par le bailleur de la présence d'un sous-locataire dans une partie des lieux loués n'était pas suffisante pour modifier la désignation des biens loués en créant des lots séparés soumis à un régime locatif distinct. La Cour de cassation censure la décision en rappelant qu'en l'absence d'indivisibilité conventionnelle, les juges du fond devaient rechercher si les locaux n'étaient pas matériellement divisibles.
- Cass. civ. 3, 8 décembre 2010, n° 09-70.784, FS-P+B (N° Lexbase : A9170GML)
L'arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 8 décembre 2010 apporte certaines précisions concernant les impacts de la sous-location au regard du déplafonnement. Il ressort de cet arrêt que l'intérêt que présente une modification des facteurs locaux de commercialité doit être apprécié au regard de la ou des activité(s) commerciale(s) exercée(s) dans les locaux loués, sans qu'il y ait lieu d'exclure de cet examen l'activité d'un sous-locataire.
Maître Alain Confino, est revenu sur l'arrêt rendu le 14 septembre 2011 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 3, 14 septembre 2011, n° 10-30.825, FS-P+B+R N° Lexbase : A7545HXQ).
Les textes en cause dans cet arrêt sont les articles L. 145-34 du Code de commerce (N° Lexbase : L3108IQ8), d'une part, qui pose le principe du plafonnement et prévoit une exception lorsqu'il existe une modification notable intervenue au cours du bail pour l'un des éléments concourant à la valeur locative ; et d'autre part, l'article R. 145-6 (N° Lexbase : L0044HZN) qui définit les facteurs locaux de commercialité. Ce dernier article précise que "les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l'intérêt que présente, pour le commerce considéré, l'importance de la ville, du quartier, ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l'attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l'emplacement pour l'activité considérée, et des modifications que ces éléments subissent d'une manière durable ou provisoire".
Ainsi que le souligne Maître Confino, ce texte définit deux types de critères pour déterminer la commercialité : un critère matériel, d'une part, consistant en une liste d'éléments qui sont des facteurs exogènes au fonds de commerce, et un critère qualitatif, d'autre part, qui est celui de l'appréciation du lien entre ces éléments extérieurs au fonds et l'activité. Mais, force est de constater que l'article L. 145-34, qui subordonne la possibilité de déplafonnement à une modification notable des facteurs locaux de commercialité, ne précise nullement le sens, positif ou négatif, d'une telle modification.
Dans le silence des textes, les juges ont été amenés à rechercher s'il convenait d'ajouter à l'article L. 145-34 un critère qualitatif. Autrement dit, la question est de savoir si, pour permettre un déplafonnement, la modification des facteurs locaux de commercialité doit nécessairement avoir une incidence favorable à l'égard du fonds, ou si cette incidence peut aussi être défavorable.
C'est sur ce point que se prononce l'arrêt du 14 septembre 2011, dans le cadre de la cassation d'un arrêt rendu par la cour d'appel de Rennes le 28 avril 2010 (CA Rennes, 7ème ch., 28 avril 2010, n° 08/05638 N° Lexbase : A0922EXG). La Cour suprême retient, très clairement, qu'"une modification notable des facteurs locaux de commercialité ne peut constituer un motif de déplafonnement des nouveaux loyers qu'autant qu'elle est de nature à avoir une incidence favorable sur l'activité commerciale exercée par le preneur".
On peut, toutefois, se demander si cette décision est constitutive d'une solution nouvelle de la part de la troisième chambre civile de la Cour de cassation.
Pour leur part, les magistrats de la cour d'appel de Rennes avaient relevé que la jurisprudence n'était pas du tout fixée dans le sens que la modification doit avoir bénéficié au locataire. Les juges se référaient même à un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, le 13 juillet 1999, retenant une solution contraire (Cass. civ. 3, 13 juillet 1999, n° 97-18.295 N° Lexbase : A8130AG9). La Cour de cassation avait, en effet, censuré une cour d'appel qui avait refusé le déplafonnement en l'absence de preuve d'une modification favorable des éléments de la valeur locative, au motif qu'"en statuant ainsi alors qu'elle avait constaté que la baisse de population, alléguée par le locataire et reconnue par la bailleresse, constituait, s'agissait d'un commerce de proximité, une modification notable d'un facteur local de commercialité". La cour d'appel de Rennes ajoutait, d'ailleurs, que, "depuis lors, cette jurisprudence, nouvelle, n'a pas été remise en cause".
Mais, selon Maître Confino, les juges rennais ignoraient vraisemblablement une série d'arrêts rendus par la Cour de cassation, retenant une formule selon laquelle : "une modification ne peut être prise en compte quand elle s'applique aux facteurs locaux de commercialité, que pour autant qu'elle présente un intérêt pour le commerce considéré". Or, si l'on se réfère au dictionnaire, la notion d'intérêt est liée à celle d'avantage, et revêt indiscutablement un sens positif.
Il semble que la confusion soit tirée de l'article R. 145-6 qui, dans sa définition des facteurs locaux de commercialité emploie le terme "intérêt" à deux reprises. Les juges auraient ainsi fait remonter cette notion d'intérêt à l'article L. 145-34. Autrement dit, d'un élément positif qui définit la valeur locative, ils ont créé une condition supplémentaire au déplafonnement, en retenant que la modification notable des facteurs locaux de commercialité devait présenter un "intérêt" pour le locataire.
Certains arrêts ont même retenu des expressions plus marquées pour exprimer la positivité du critère, telles que "accroissement de clientèle ayant bénéficié à l'activité", "évolution des facteurs locaux de commercialité favorables à l'activité", ou encore "évolution ayant bénéficié au commerce". En tout état de cause, force est de constater que ces différentes décisions tendent à considérer que la modification notable des facteurs locaux de commercialité doit avoir un effet positif sur l'activité du locataire pour permettre le déplafonnement.
L'arrêt du 14 septembre 2011 constitue ainsi une décision d'importance, à plusieurs égards. Tout d'abord, elle apporte une clarification terminologique en adoptant le terme d'"incidence favorable", plutôt que celui d'"intérêt". Ensuite, en indiquant que la modification doit être "de nature à avoir une incidence favorable", elle apporte un élément novateur dans le sens où la seule potentialité de "l'incidence favorable" peut désormais être prise en compte. L'expression employée ajoute ainsi à l'admission de la modification une condition qui pourra être appréciée in abstracto -alors, par ailleurs, que la justification d'un rapport entre la modification et le commerce considéré continuera d'être recherchée in concreto-.
En conclusion, Maître Confino considère, à la lumière de l'arrêt du 14 septembre 2011, que le bailleur qui cherche à écarter la règle du plafonnement sur le fondement d'une évolution des facteurs locaux de commercialité doit désormais rapporter la preuve (i) de l'existence d'une modification de ces facteurs (ii) ayant un caractère notable, (iii) survenue au cours du bail expiré et (iv) de nature à avoir une incidence favorable (v) sur le commerce considéré.
Le mondant de l'indemnité d'éviction peut être calculé selon trois méthodes : la méthode par comparaison, la méthode comptable et la méthode du chiffre d'affaires.
Gilles Hittinger-Roux est revenu sur la méthode du chiffre d'affaires. Cette méthode ancienne, basée sur des barèmes fiscaux, amène à retenir une évaluation de l'indemnité comprise entre 30 et 70 % du chiffre d'affaires. Maître Hittinger-Roux a souligné les limites de cette méthode d'évaluation, dans le contexte fortement concurrentiel actuel, et qui conduit à des incohérences, notamment au regard de la faiblesse des indemnités d'éviction en comparaison aux indemnités d'expropriation qui peuvent être octroyées pour des fonds similaires. Il conviendrait, selon lui, de repenser totalement cette méthode.
(1) Tableaux publiés à l'AJDI, décembre 2011, p. 858 et s..
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429312
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-25.689, F-P+B (N° Lexbase : A1984H4A)
Lecture: 2 min
N9322BS3
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 20 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429322
Réf. : Cass. civ. 3, 7 décembre 2011, n° 10-26.726, FS-P+B (N° Lexbase : A1828H4H)
Lecture: 1 min
N9323BS4
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 16 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429323
Réf. : CA Paris, Pôle 4, 2ème ch., 31 août 2011, n° 10/10826 (N° Lexbase : A4025HXD)
Lecture: 2 min
N9260BSR
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429260
Réf. : Arrêté du 21 novembre 2011, portant homologation d'une modification du règlement général de l'AMF (N° Lexbase : L3366IR4) ; arrêté du 21 novembre 2011, portant homologation d'une modification du règlement général de l'AMF (N° Lexbase : L3367IR7)
Lecture: 1 min
N9261BSS
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429261
Réf. : AMF, décision du 28 octobre 2011, sanction (N° Lexbase : L3713IRX)
Lecture: 1 min
N9262BST
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429262
Réf. : AMF, communiqué de presse du 9 décembre 2011
Lecture: 1 min
N9263BSU
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 14 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429263
Réf. : Décret n° 2011-1772 du 5 décembre 2011, relatif aux magasins généraux (N° Lexbase : L3559IRA)
Lecture: 1 min
N9239BSY
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 14 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429239
Réf. : CJUE, 8 décembre 2011, trois arrêts, aff. C-272/09 P (N° Lexbase : A1679H4X) ; C-386/10 P (N° Lexbase : A1682H43) et C-389/10 P (N° Lexbase : A1683H44)
Lecture: 2 min
N9250BSE
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 27 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429250
Lecture: 14 min
N9267BSZ
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis et Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences à l'Université du Sud-Toulon-Var
Le 15 Décembre 2011
Comme en témoigne la pratique, la route de l'admission de la créance au passif du débiteur en difficulté peut être longue et ponctuée de nombreuses étapes : les expertises, les multiples renvois avant plaidoiries, l'exercice de voies de recours en sont les principales. Dans ces conditions, il est fréquent que la décision définitive d'admission de la créance au passif intervienne plusieurs mois, voire plusieurs années, après l'arrêté du plan de continuation (sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985 N° Lexbase : L4126BMR), de sauvegarde ou de redressement (sous l'empire de la loi du 26 juillet 2005 N° Lexbase : L5150HGT). En conséquence, les premiers dividendes du plan auront déjà été versés à certains créanciers, alors que la créance d'autres créanciers n'aura pas encore été admise au passif. Une importante question intéresse alors ces créanciers qui prendront "le train en marche", une fois leur créance admise : si l'admission définitive de la créance intervient alors qu'un ou plusieurs dividendes du plan ont déjà été versés, y aura-t-il lieu au paiement de tous les dividendes arriérés et, dans l'affirmative, à quelle date ? Telle est la question à laquelle répond la Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt, appelé à la publication au Bulletin, rendu le 22 novembre 2011.
En l'espèce, une société avait été placée en redressement judiciaire en mai 2005. A l'issue de la période d'observation, un plan de continuation avait été arrêté, lequel prévoyait le paiement de la totalité du passif "tel qu'il sera définitivement admis" en dix annuités, la première étant payable le 31 décembre 2007. A l'ouverture de la procédure collective, la trésorerie d'Alès avait déclaré une créance qui avait fait l'objet d'une contestation. Ce n'est que par un arrêt rendu le 17 juin 2010 que la cour d'appel de Nîmes devait définitivement fixer le montant de l'admission au passif (CA Nîmes, 2ème ch., sect. B, 17 juin 2010, n° 08/04298 N° Lexbase : A8282E7U). La décision des juges d'appel avait, en outre, précisé que le paiement des trois premières annuités -dont le paiement était prévu par le plan les 31 décembre 2007, 2008 et 2009-, d'un montant respectif de 5 %, 5 % et 7 % de la créance, devrait être effectué lorsque l'arrêt d'appel serait signifié.
Le débiteur et le représentant des créanciers s'étaient pourvus en cassation, en faisant grief à l'arrêt de la cour d'appel d'avoir prévu le paiement des dividendes arriérés. Au soutien de leur pourvoi, ils soutenaient que l'admission définitive de la créance n'ouvrirait pas droit aux créanciers à participer à la répartition des échéances du plan antérieures à cette admission, mais leur permettrait seulement de participer à la répartition des échéances postérieures.
La Chambre commerciale rejette le pourvoi dans les termes suivants : "attendu qu'ayant relevé que le jugement du 19 décembre 2006 [le jugement arrêtant le plan] prévoyait un paiement intégral de chaque créance chirographaire définitivement admise en dix échéances à compter du 31 décembre 2007, la cour d'appel qui a ordonné l'admission de la créance du trésorier au passif de [la société débitrice...] a, à bon droit et sans méconnaître l'autorité de chose jugée attachée à ce jugement, dit que le paiement des annuités échues devra être effectuée lorsque l'arrêt sera signifié".
La position adoptée par la Chambre commerciale est limpide : si la créance a été contestée et si l'admission définitive de la créance intervient alors qu'un ou plusieurs dividendes du plan ont déjà été versés, il y a place au paiement de tous les dividendes arriérés, sitôt effectuée la notification de l'ordonnance du juge-commissaire ou, en cas d'appel, de la signification de la décision d'admission de la créance au passif.
C'est la première fois, à notre connaissance, que les Hauts magistrats se prononcent sur cette question, pourtant d'une grande importance pratique et dont la problématique a, sans nul doute, dû se présenter à de multiples reprises. La réponse apportée doit être approuvée sans réserve.
En effet, au regard des textes, on ne peut que constater une totale déconnection entre l'absence d'admission définitive des créances et la propension à participer au plan, ce qui ne cadre pas avec l'idée qu'il ne pourrait y avoir de régularisation des dividendes arriérés après admission définitive de la créance. Cette autonomie des procédures d'élaboration du plan, d'un côté, de vérification et d'admission des créances, d'un autre côté, peut être observée à plusieurs titres.
D'abord, en période d'observation, les créanciers antérieurs sont consultés, peu important que leur qualité de créancier n'ait pas encore été établie par une décision judiciaire. Cette consultation ne préjuge évidemment pas de leur admission comme cela résulte de l'article L. 626-21, alinéa 1er, du Code de commerce (N° Lexbase : L2323IND ; C. com., art. L. 621-79, al. 1er N° Lexbase : L6931AIK, sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985) qui dispose que "l'inscription d'une créance au plan et l'octroi de délais ou remises par le créancier ne préjuge pas l'admission définitive de la créance au passif". Le créancier ne peut donc pas, du seul fait qu'il a été consulté, prétendre à une reconnaissance de dette. Ce n'est que dans la mesure de son admission ultérieure au passif que les droits du créancier consulté devront être pris en compte pour son règlement effectif dans le cadre du plan.
On remarquera encore que le créancier qui n'a pas encore été définitivement admis au passif peut toucher, à titre provisionnel, des dividendes. L'article L. 626-21, alinéa 2, prévoit que si le mandataire judiciaire a proposé l'admission d'une créance non contestée, le versement de dividendes peut intervenir, à titre provisionnel, sitôt la décision arrêtant le plan devenue définitive, à condition que ce paiement provisionnel soit prévu par celle-ci. Si le créancier perçoit, dans le cadre de ces dividendes provisionnels, plus que ce à quoi il a droit compte tenu, ultérieurement, de son admission ou non au passif, il y a bien évidemment lieu à répétition de l'indu (1). Il est logique qu'en sens inverse, le créancier puisse bénéficier du paiement des dividendes arriérés lorsque la créance contestée est définitivement admise postérieurement au paiement de certains dividendes.
La solution posée par cet arrêt, si elle cadre parfaitement avec cette déconnection existant entre l'adoption du plan, le règlement du créancier et son admission définitive, présente en outre le mérite d'éviter que le débiteur, par l'intermédiaire du mandataire judiciaire, soit tenté, à des fins dilatoires, de contester ou d'exercer des voies de recours aux fins de différer la décision d'admission de la créance afin que celle-ci intervienne le plus tardivement possible et donc après le paiement des premiers dividendes du plan. Le créancier n'a pas à être pénalisé par des lenteurs procédurales conduisant à une admission tardive de sa créance. Doivent ainsi être dissipées toutes les inquiétudes du créancier qui ne serait admis qu'après le règlement de certains dividendes du plan. Il pourra rattraper le retard pris au jour de la notification ou de la signification de la décision d'admission de la créance au passif, en obtenant le paiement de tous les dividendes arriérés.
Il apparaît que cette décision, dont l'importance est soulignée par sa publication au Bulletin, est de principe. Ainsi, même s'il est conseillé au créancier de solliciter du juge qui admettra sa créance qu'il mentionne, dans sa décision, la possibilité d'obtenir le paiement des dividendes arriérés, il n'apparaît pas discutable que, nonobstant l'absence de toute précision en ce sens, le créancier pourra exiger la paiement de ces dividendes arriérés.
Notons que la situation du créancier qui a déclaré sa créance dans les délais et qui est admis alors que certains dividendes du plan ont d'ores et déjà été réglés, doit être distinguée de celle du créancier relevé de la forclusion. Certes, par principe, le créancier qui est relevé de forclusion, peut être admis dans les répartitions et les dividendes comme les créanciers ayant déclaré dans les délais. Cependant, si des distributions sont déjà intervenues au jour de sa demande, le créancier doit, pour reprendre l'expression d'un auteur, "en faire son deuil" (2), dans la mesure où l'article L. 622-26, alinéa 1er, du Code de commerce (N° Lexbase : L2534IEL) prévoit que les créanciers relevés de forclusion "ne peuvent alors concourir que pour les distributions postérieures à leur demande". Cependant, en pratique, il y a fort à parier que leur demande sera antérieure au versement du premier dividende dans la mesure où la demande en relevé de forclusion doit désormais être effectuée dans un délai relativement court : celui de six mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC (3), délai porté à un an pour les créanciers placés dans l'impossibilité de connaître l'existence de leur créance avant l'expiration de ce délai de six mois (C. com., art. L. 622-26, al. 3). Il n'en demeure pas moins que ce n'est que dans cette seule hypothèse, et parce qu'un texte spécial le prévoit, qu'un créancier pourtant finalement admis -en l'occurrence, le créancier relevé de forclusion- est susceptible d'être privé du droit de bénéficier de tous les dividendes prévus dans le cadre du plan. Un tel texte est restrictif de droit et mérite, à ce titre, une interprétation restrictive. Il est exclu de l'étendre à des hypothèses voisines, comme celle sur laquelle nous raisonnons. Par conséquent, à défaut de texte spécial en ce sens, il est radicalement inconcevable de priver un créancier diligent (c'est-à-dire qui a déclaré sa créance dans les délais), mais finalement admis après le paiement de certains dividendes du plan, de la possibilité de prétendre, lorsque la décision définitive d'admission lui aura été notifiée, au paiement des dividendes arriérés.
Emmanuelle Le Corre-Broly, Maître de conférences à l'Université du Sud-Toulon-Var, Directrice du Master 2 Droit de la banque et de la société financière
Les règles de l'administration contrôlée en période d'observation d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire et celles du dessaisissement dans la liquidation judiciaire exercent une influence sur la conduite des procédures et la dénonciation des actes de procédure. La saisie-attribution n'échappe pas à la règle lorsque le débiteur est le saisi.
La difficulté ne peut en réalité se poser que lorsque la saisie n'a pas joué avant le jugement d'ouverture de la procédure lorsqu'elle concerne une créance antérieure, soumise à la discipline collective, et plus spécialement à la règle de l'arrêt des voies d'exécution.
L'article L. 622-21, II du Code de commerce (N° Lexbase : L3741HB8), dans la rédaction que lui donne la loi de sauvegarde des entreprises (loi n° 2005-845 N° Lexbase : L5150HGT), n'a pas pour objet de remettre en cause les situations acquises. De même que les actions résolutoires ayant joué au jour du jugement d'ouverture ne seront pas remises en cause, les voies d'exécution terminées à cette date ne seront pas affectées par la règle de l'arrêt des voies d'exécution. Une saisie-attribution a joué au jour du jugement d'ouverture si, au plus tard la veille de cet événement, la saisie a été signifiée au tiers saisi. La rétroactivité de celui-ci à zéro heure de sa date conduit en effet à considérer que la saisie pratiquée le jour du jugement d'ouverture est effectuée après jugement (4), même si le contraire a aussi été jugé (5).
La saisie-attribution produit un effet attributif immédiat au profit du saisissant à concurrence de la créance saisie disponible entre les mains du tiers, et ne peut en conséquence plus être remise en cause, si à la date du jugement d'ouverture, l'acte de saisie a été signifié au tiers saisi (6). La créance, qui a fait l'objet d'une saisie-attribution effectuée avant le jugement d'ouverture et qui a produit ses effets, est définitivement sortie du patrimoine du débiteur saisi et est entrée, par l'effet de la saisie-attribution, dans celui du créancier. Elle n'a donc pas à être déclarée (7).
Il importera peu que la dénonciation n'ait pas été effectuée au débiteur saisi, à cette date (8), cette mesure n'étant pas considérée comme une voie d'exécution (9).
Si la saisie a joué au jour du jugement, parce qu'elle a été signifiée au tiers saisi au plus tard la veille, elle doit être dénoncée dans les huit jours. Ce délai de huitaine est la source de certaines difficultés, si la date du jugement d'ouverture est comprise à l'intérieur de ce délai.
Deux situations sont alors à distinguer.
Dans une première situation, qui a fait l'objet d'arrêts de la Cour de cassation, la dénonciation au tiers saisi, dans le délai de huitaine, n'a pas été faite avant le jugement d'ouverture, et plus exactement au plus tard la veille du jugement d'ouverture. En ce cas, il faut observer les règles d'assistance et de représentation du débiteur, pour savoir à qui la saisie doit être dénoncée.
Dans la procédure de sauvegarde, en présence d'un administrateur, la dénonciation s'imposait à cet organe, quelle que soit sa mission, sous l'empire de la loi de sauvegarde des entreprises, dans sa rédaction d'origine. La solution manquait assurément de logique. Plus justement, depuis l'ordonnance du 18 décembre 2008 (ordonnance n° 2008-1345, portant réforme du droit des entreprises en difficulté N° Lexbase : L2777ICT), la dénonciation à l'administrateur ne s'impose que s'il a une mission d'assistance (C. com., art. L. 622-23 N° Lexbase : L3488IC8). En ce cas, la dénonciation doit être faite, d'une part, au débiteur et, d'autre part, à son administrateur. Si ce dernier n'a qu'une mission de surveillance, la dénonciation au débiteur est suffisante, nonobstant l'ouverture de sa sauvegarde. La solution est la même, en l'absence d'administrateur. L'absence de dénonciation au débiteur dans le délai entraînera caducité de la saisie (10).
Dans la procédure de redressement judiciaire, à défaut d'administrateur, la dénonciation doit être effectuée entre les mains du débiteur. En présence d'un administrateur, la dénonciation à cet organe s'impose, de manière systématique. Si l'administrateur a une mission d'assistance, la solution dégagée pour la procédure de sauvegarde est applicable en redressement judiciaire. Si l'administrateur a une mission d'administration, il représente le débiteur. En ce cas, la dénonciation s'impose au seul administrateur (C. com., art. L. 631-14, al. 5 N° Lexbase : L2453IEL).
La situation est comparable en liquidation judiciaire. Du fait des règles du dessaisissement, la dénonciation s'impose au liquidateur.
Une hésitation est permise lorsqu'un administrateur est en fonction en liquidation judiciaire.
L'administrateur judiciaire, nommé en liquidation judiciaire pour administrer l'entreprise, devient le chef d'entreprise intérimaire, comme cela est le cas en période d'observation ; il prend l'une des trois fonctions d'un liquidateur classique : celle de représentation des droits patrimoniaux du débiteur.
La signification des actes et des décisions de justice intéressant le patrimoine du débiteur doit intervenir entre les mains de l'administrateur judiciaire. Les saisies-attributions pratiquées par des créanciers postérieurs méritants -créanciers de l'article L. 622-17 (N° Lexbase : L3493ICD) ou de l'article L. 641-13 du Code de commerce (N° Lexbase : L3405IC4)-, doivent être dénoncées à l'administrateur judiciaire. De la même façon, la dénonciation après jugement d'ouverture d'une saisie pratiquée avant le jugement d'ouverture doit intervenir entre les mains de l'administrateur judiciaire nommé en liquidation pour assurer la poursuite provisoire de l'activité.
L'absence de dénonciation à l'organe compétent, dans le délai de huit jours, de la saisie pratiquée emportera sa caducité (11). Précisons toutefois que le tiers saisi qui n'a pas qualité pour se prévaloir de cette absence de dénonciation (12). La Cour de cassation n'admet pas que le délai de dénonciation se trouve interrompu par l'effet du jugement d'ouverture (13).
Précisons, en outre, que, dans la procédure de sauvegarde et de redressement, indépendamment de la désignation d'un administrateur judiciaire et quelle que soit sa mission, la dénonciation au mandataire judiciaire s'impose. Cependant, le délai de huitaine posé par la législation des voies d'exécution n'intéresse, nous semble-t-il, que le débiteur, son assistant ou son représentant. La dénonciation n'a donc pas, à notre sens, à être faite, à peine de caducité, au mandataire judiciaire, dans le délai de huitaine. Cependant, tant qu'elle ne sera pas intervenue, la saisie sera inopposable à la procédure collective.
Dans une seconde situation, la saisie a été dénoncée avant l'ouverture de la procédure collective. Cela n'est possible qu'entre les mains du débiteur. La question qui se pose alors, et qui est au coeur de l'arrêt commenté, est de savoir si une nouvelle dénonciation s'impose à l'organe ayant qualité à recevoir les dénonciations de saisies, dans le délai de huitaine, sauf caducité de la saisie-attribution pratiquée.
A cette question, censurant la décision des juges du fond, la Cour de cassation répond qu'une nouvelle dénonciation n'est pas exigée, alors que la saisie-attribution avait été dénoncée dans le délai légal au débiteur à la tête de ses biens.
La solution est sans surprise. Dès lors qu'au jour de la dénonciation, cette dernière a valablement été effectuée à une personne ayant qualité pour la recevoir, une nouvelle dénonciation est inutile.
Cela ne signifie pas que l'organe assistant ou représentant le débiteur soit désarmé. En effet, si la dénonciation est faite, comme le prévoit la loi dans le délai de huitaine de la signification de la saisie, et si à l'intérieur du délai de huitaine survient le jugement d'ouverture, cela signifie que l'administrateur judiciaire qui assiste ou représente le débiteur, ou, en cas de liquidation judiciaire, le liquidateur qui représente le débiteur, ne peut bénéficier d'un délai complet pour contester la saisie devant le juge de l'exécution.
La Cour de cassation a déjà été confrontée à cette problématique. Elle admet l'interruption du délai de contestation si, pendant son cours, survient la liquidation (14). La solution est la même si, pendant le cours du délai, un jugement de sauvegarde ou de redressement, dans lequel un administrateur, ayant reçu une mission d'assistance (en sauvegarde ou en redressement judiciaire) ou d'administration (en redressement judiciaire), a été nommé.
Comme le précise, dans l'arrêt rapporté, la Cour de cassation, l'absence de dénonciation à l'organe assistant ou représentant le débiteur ne s'impose pas à peine de caducité. En revanche, si l'administrateur a des moyens à invoquer pour contester la saisie, il le pourra, faute pour cette dernière d'être à l'abri d'un recours. Seule une nouvelle dénonciation, qui n'est pas enfermée dans le délai de huitaine de la signification au tiers saisi (15), permettra de rendre définitive la saisie en la mettant à l'abri d'un recours.
Ainsi, une chose est d'admettre que l'efficacité de la saisie ne nécessite pas une nouvelle dénonciation à l'organe assistant ou représentant le débiteur. Une autre chose est de considérer que la saisie puisse devenir définitive par l'écoulement du délai de contestation. Efficace, la saisie le sera. Définitive, la saisie ne le sera qu'au prix d'une nouvelle dénonciation.
Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université de Nice Sophia Antipolis, Directeur du Master 2 Droit des difficultés d'entreprises
(1) CA Paris, 3ème ch., sect. B, 8 novembre 2007, n° 06/20420 (N° Lexbase : A5248D3R).
(2) P.-M. Le Corre, Droit et pratique des procédures collectives, Dalloz Action, 6ème éd., 2012/2013, n° 665.57.
(3) Ce délai était, sous l'empire de la législation antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises, d'un an, et de façon peu orthodoxe par rapport à l'exigence du droit au procès équitable posé par l'article 6 § 1 de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), courait à compter du jugement d'ouverture, évènement inconnu des créanciers.
(4) TGI Marmande, Jex, 24 septembre 1993, Rev. huissiers, 1994, 653 ; CA Montpellier, 2ème ch., sect. B, 20 avril 2004, RD banc. et fin., 2005/2, p. 28, n° 59, note F.-X. Lucas ; adde, P. Canet, Les voies d'exécution issues de la loi du 9 juillet 1991 face au redressement et à la liquidation judiciaires, Rev. proc. coll., 1995, 265, spéc. p. 268.
(5) CA Caen, 1ère ch., sect. civ., 29 avril 1997, Rev. proc. coll., 1997, 417, obs. Cadiou.
(6) Cass. com., 13 octobre 1998, n° 96-14.295, publié (N° Lexbase : A5719ACS), Bull. civ. IV, n° 237, Gaz. Pal., 1999, n° 245, p. 17, note M. Veron, D. Affaires, 1998, 2018, obs. A. Lienhard, Rev. proc. coll., 1999, 106, n° 18, obs. Canet ; Cass. com., 19 juin 2007, n° 06-12.916, F-D (N° Lexbase : A8736DWH), Gaz. proc. coll., 2007/4, p. 44, note I. Rohart-Messager.
(7) Cass. com., 3 mai 2011, n° 10-16.155, F-D (N° Lexbase : A2514HQ8), Gaz. pal., 9 juillet 2011, n° 189, p. 27, note Ph. Roussel Galle ; BJE, septembre/octobre 2011, comm. 118, p. 254, note M. Laroche.
(8) TGI Laval, Jex, 2 avril 1996 et TGI Laval, Jex, 23 avril 1996, D., 1997, jur. 43, note J. Prévault.
(9) TGI Lyon, Jex, 23 avril 1996, D., 1997, jur. 43, note J. Prévault.
(10) Cass. com. 13 octobre 1998, n° 96-14.295, préc. et note préc..
(11) Cass. com., 19 février 2002, n° 98-22.727, FS-P (N° Lexbase : A0220AYS), Bull. civ. IV, n° 37, D., 2002, AJ 1070, obs. V. Avena-Robardet, Act. proc. coll., 2002/6, n° 77, RD banc. et fin., 2002/3, p. 135, n° 105, obs. F.-X. Lucas, RD banc. et fin., 2002/3, p. 138, n° 109, obs. J.-M. Delleci, RJ com., 2002, n° 1604, obs. J.-L. Courtier ; Cass. com., 20 octobre 2009, n° 08-16.629, F-D, Rev. proc. coll. 2010/2, comm. 82, p. 72, note G. Berthelot ; CA Rennes, 1ère ch., sect. B, 16 mai 2002, n° 00/07127 (N° Lexbase : A9256DN7), RD banc. et fin., 2002/4, n° 146, obs. F.-X. Lucas.
(12) Cass. com., 10 juin 2008, n° 06-13.054, F-D (N° Lexbase : A0513D9U), RTDCiv., 2008, 555, n° 9, obs. R. Perrot ; CA Aix-en-Provence, 15ème ch., sect. A, 30 avril 2010, n° 08/22605 (N° Lexbase : A7462EZE).
(13) Cass. com., 4 mars 2003, n° 00-13.020, FS-P+B (N° Lexbase : A3568A7B), Bull. civ. IV, n° 34 ; D., 2003, AJ 907, obs. A. Lienhard ; Act. proc. coll., 2003/8, n° 104 ; D., 2003, somm. 1623, obs. F.-X. Lucas ; JCP éd. E, 2003, chron. 1396, p. 1576, n° 17, obs. Ph. Pétel ; JCP éd. E 2003, jur. 708, p. 814, note Ch. Delattre ; RD banc. et fin., 2003/3, n° 118, p. 170, obs. Delecci ; Procédures, juillet 2003, p. 10, n° 167, note R. Perrot ; Gaz. Pal., 5-6 septembre 2003, somm. 7, note Denner ; P.-M. Le Corre, La dénonciation au liquidateur d'une saisie-attribution ayant joué au jour du jugement d'ouverture, Lexbase Hebdo n° 66 du 10 avril 2003 - édition affaires (N° Lexbase : N6797AAY).
(14) Com. 19 janv. 1999, n° 96-18.256, n° 96-18.256, publié, Bull. civ. IV, n° 17 ; LPA, 9 mars 1999, n° 48, p. 8, note P. M. ; LPA, 1999, n° 94, p. 26, note F. Derrida ; D. Affaires, 1999, 478 ; JCP éd.E, 1999, chron. 815, n° 13, obs. P. P. ; RJ com., 2000, n° 1548, p. 29, note J.-L. Courtier ; D., 1999, jur. 245, note F. Derrida ; Defrénois, 2000, n° 1, p. 45, obs. J.-P. Sénéchal.
(15) Ph. Théry, L'incidence d'une procédure collective sur les procédures civiles d'exécution, Dr. et proc., 2002/3, p. 140, spéc. p. 144.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429267
Réf. : Décret n° 2011-1836 du 7 décembre 2011, relatif aux radiations d'office du registre du commerce et des sociétés en matière de plans de sauvegarde et de redressement (N° Lexbase : L3612IR9)
Lecture: 1 min
N9199BSI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429199
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-24.885, F-P+B (N° Lexbase : A2011H4A)
Lecture: 2 min
N9216BS7
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429216
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-25.571, F-P+B (N° Lexbase : A1860H4N)
Lecture: 1 min
N9218BS9
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 17 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429218
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-19.959, FS-P+B (N° Lexbase : A1911H4K)
Lecture: 1 min
N9227BSK
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 30 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429227
Réf. : Cass. civ. 2, 8 décembre 2011, n° 10-24.420, FS-P+B (N° Lexbase : A1972H4S)
Lecture: 2 min
N9232BSQ
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 22 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429232
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-24.968, F-P+B (N° Lexbase : A1952H43)
Lecture: 2 min
N9235BST
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 23 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429235
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-24.968, F-P+B (N° Lexbase : A1952H43)
Lecture: 2 min
N9236BSU
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429236
Réf. : Cass. civ. 3, 7 décembre 2011, n° 10-30.695, FS-P+B (N° Lexbase : A1932H4C)
Lecture: 2 min
N9277BSE
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429277
Lecture: 19 min
N9275BSC
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Nathalie Martial-Braz, Professeur à l'Université de Franche-Comté
Le 15 Décembre 2011
Le droit d'auteur se niche parfois bien loin des sentiers pour lesquels il a été pensé... Si tout auteur d'une oeuvre littéraire ou artistique quelconque a bien évidemment droit à la protection du seul fait de la création, il est des revendications qui bien que juridiquement fondées n'en semblent pas moins, sinon choquantes, tout au moins, inopportunes.
Mais au-delà des faits et des sentiments que peuvent inspirer la revendication d'un droit d'auteur dans de telles circonstances, la solution rendue le 1er décembre 2011 par la Cour de justice est des plus instructive (1). Elle s'inscrit, peu ou prou, dans une démarche de "petits pas" que semble avoir initiée la Cour de justice pour parvenir à une harmonisation de fait du droit d'auteur.
Il est néanmoins difficile de ne pas rappeler le contexte factuel qui permet d'offrir à la Cour l'opportunité d'une nouvelle avancée dans cette perspective d'harmonisation, et ce en dépit de la notoriété de ces faits. En l'espèce, une jeune fille Natasha K. avait été enlevée à l'âge de 10 ans puis séquestrée pendant huit ans. A la suite de son enlèvement, en 1998, les autorités de sécurité compétentes ont diffusé un avis de recherche illustré par des portraits de la jeune fille réalisés dans son école maternelle par Mme P., photographe indépendante. Lorsque la jeune fille a pris la fuite en 2006, et avant toute apparition publique de cette dernière, de nombreux médias autrichiens et allemands ont reproduit les photographies sans indiquer le nom de son auteur ou avec une indication erronée. Par ailleurs, certains de ces médias ont également diffusé un portrait-robot de la jeune fille élaboré par traitement informatique à partir des photographies litigieuses.
L'affaire ayant été très médiatisée, la photographe a assigné le 10 avril 2007 devant les juridictions autrichiennes les médias concernés afin qu'ils soient condamnés à cesser de reproduire et/ou de distribuer, sans son consentement et sans l'indication de son nom en qualité d'auteur, tant lesdites photographies que le portrait-robot. Conjointement, l'auteur a également demandé à ce que ces médias soient condamnés à une reddition des comptes, à un versement d'une rémunération appropriée pour la diffusion desdites photographies et à une indemnisation pour le préjudice subi. Parallèlement, une procédure en référé a été introduite, qui a été définitivement tranchée par la Cour suprême autrichienne le 26 août 2009.
La Cour a jugé que les médias en cause, en application des dispositions nationales, n'avaient pas besoin de recueillir le consentement de Mme P. pour publier le portrait-robot qui ne constituait nullement une adaptation de l'oeuvre originale de l'auteur, mais une libre utilisation de celle-ci. Pour cette juridiction, la qualification d'adaptation ou de libre utilisation se déduit de l'activité créatrice s'exprimant dans l'oeuvre initiale. Pour les juges autrichiens, plus le niveau d'activité créatrice est élevé, moins il est possible d'admettre une libre utilisation. Ils ont alors jugé que, s'agissant de photographies de portrait, le créateur n'a que des possibilités réduites de création artistique originale. En conséquence, il a été décidé que la portée de la protection conférée par le droit d'auteur à cette photographie est restreinte. A l'égard du portrait-robot, il a en outre été décidé qu'il constituait une oeuvre nouvelle, autonome et, partant, protégée par un droit d'auteur indépendant.
Fort de cette décision, la juridiction autrichienne saisie des demandes au fond a décidé de surseoir à statuer et de poser quatre questions préjudicielles à la Cour de justice de l'Union européenne portant notamment sur l'interprétation de l'article 5 § 3 sous d) et e) et 5, de la Directive 2001/29 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001, sur l'harmonisation du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information (N° Lexbase : L8089AU7). En substance, ces questions ont pour but de déterminer, d'une part, dans quelle mesure les photographies litigieuses peuvent revêtir la qualification d'oeuvre originale au sens du droit de l'Union et, partant, être protégées par un droit d'auteur (1°) et, d'autre part, de déterminer le champ des exceptions au droit d'auteur afin de savoir si la publication des photographies litigieuses peut être réalisée sans le consentement de leur auteur (2°).
1°) La qualification d'oeuvre couverte par un droit d'auteur d'une photographie de portrait
Il semble évidemment logique que la première question sur laquelle il convient de s'attarder porte sur la qualification d'oeuvre littéraire ou artistique des photographies litigieuses. En dépit du fait qu'il s'agisse de la dernière question préjudicielle posée à la Cour, celle-ci fait l'objet d'un traitement prioritaire, et la Cour saisie donc ici une nouvelle occasion de se prononcer sur la qualification d'oeuvre originale et ainsi de définir des frontières communes et harmonisées du droit d'auteur. Toutefois, la Cour travestie les intentions de la juridiction autrichienne pour laquelle les doutes ne portaient que sur la singularité du droit d'auteur conféré à des oeuvres photographiques de portrait, et plus généralement des photographies réalistes, pour lesquelles la création artistique peut sembler réduite au point de diminuer l'étendue de la protection conférée par le droit.
La Cour de justice n'en est effectivement pas à sa première ébauche, et il faut reconnaître aux juges de Luxembourg un sens aigu de l'opportunité qui les poussent à faire feu de tout bois lorsqu'il est question de définir le droit d'auteur et les oeuvres qu'il protège. Ainsi qu'il a fort bien été dit dans ces colonnes (2), la Cour n'hésite plus à outrepasser les limites de sa compétence pour harmoniser à "marche forcée" (3) une matière laissée par principe à la liberté des Etats. La Cour se prononce en effet, ici encore (4), sur la nature de l'oeuvre littéraire ou artistique et sur la définition de l'originalité que doit revêtir cette oeuvre. La Cour fait expressément référence aux précédentes décisions dans lesquelles elle s'est prononcée sur ces questions attestant d'une identité de démarche en l'espèce. Elle rappelle dès lors que le droit d'auteur "n'est susceptible de s'appliquer que par rapport à un objet, telle une photographie, qui est original en ce sens qu'il est une création intellectuelle propre à son auteur" (5). Elle en déduit, par conséquent, que constitue une oeuvre originale celle pour laquelle l'auteur "a pu exprimer ses capacités créatives lors de la réalisation de l'oeuvre en effectuant des choix libres et créatifs" (6). Or elle souligne qu'une photographie de portrait peut permettre à l'auteur une telle expression créative, et, partant, peut être une oeuvre originale conférant à son titulaire un droit d'auteur conformément à l'article 6 de la Directive 93/98 (7). Il faut toutefois souligner que ce qui semble être a priori dans les termes de la Cour (8) une définition appliquée de l'originalité requise pour qualifier le droit d'auteur, paraît in fine constituer une condition distincte et partant supplémentaire. En effet, dans sa réponse la Cour souligne "qu'une photographie de portrait est susceptible [...] d'être protégée par le droit d'auteur, à condition, [...], qu'elle soit une création intellectuelle de l'auteur reflétant la personnalité de ce dernier et [nous soulignons] se manifestant par les choix libres et créatifs de celui-ci lors de la réalisation de cette photographie" (9). Faut-il gloser l'utilisation de la conjonction de coordination "et" pour en déduire qu'il s'agit de deux conditions distinctes ou peut-on considérer, en dépit de la lettre de la décision que la seule condition de la qualification d'oeuvre littéraire ou artistique réside dans l'originalité ? Originalité qui se traduit par le fait que la personnalité de l'auteur se reflète dans son oeuvre ce qui se déduit des choix libres et créatifs du photographe lorsqu'ils existent. De l'interprétation qui est adoptée dépend bien évidemment l'appréciation qui peut être faite du droit d'auteur harmonisé par la Cour de justice de l'Union européenne.
Dès lors qu'est admis le principe selon lequel le droit d'auteur peut couvrir une photographie de portrait, la Cour se devait de répondre (enfin !) à la question posée par les juridictions autrichiennes relativement à l'étendue et à la portée du droit d'auteur ainsi reconnu. Celles-ci ont en effet consulté la Cour pour savoir si l'on peut admettre un droit d'auteur de moindre portée eu égard au moindre investissement artistique de l'auteur. La réponse est, fort heureusement et évidemment, négative. La Cour souligne en effet, en des termes très généraux, qu'"aucun élément dans la Directive 2001/29 ou dans une autre directive applicable en la matière ne permet de considérer que l'étendue d'une telle protection serait tributaire d'éventuelles différences dans les possibilités de création artistiques, lors de la réalisation de diverses catégories d'oeuvres" (10). L'inverse impliquerait que les juges se fassent également critiques d'art et portent un jugement, nécessairement subjectif, sur l'oeuvre litigieuse, là où le contrôle ne doit porter que sur son aspect original. Une telle rigueur est heureuse tant l'abîme qu'aurait ouvert une reconnaissance d'un droit d'auteur singulier fondé sur une appréciation du caractère artistique de la création aurait été profond. On n'ose imaginer le sort des créations d'art appliqué si le droit d'auteur plein et entier ne devait être réservé qu'aux beaux-arts.
Si la photographie de portrait peut être une oeuvre originale, ce qu'il appartiendra aux juridictions nationales de déterminer, le droit d'auteur qu'elle confère à son créateur doit donc être entier. Il ne saurait exister un droit d'auteur inférieur. Reste que la plénitude du droit d'auteur peut toujours être remise en cause par les exceptions qui sont admises à l'article 5 de la Directive 2001/29 sur l'interprétation duquel la Cour de Justice avait également à se prononcer.
2°) Le domaine des exceptions au droit d'auteur : la reproduction d'oeuvres dans le cadre d'une enquête criminelle
Le domaine d'application et l'étendue des exceptions au droit d'auteur sont ensuite au coeur de cette décision à l'instar des préoccupations du juge (11) comme du législateur de l'Union européenne (12). Cet intérêt ne doit pas tromper, ce sont en effet les lacunes des dispositions existantes et l'importante marge d'appréciation laissée aux Etats pour déterminer ces exceptions qui engendrent les difficultés contemporaines d'interprétation et incitent à appeler de ses voeux une réforme, au moins sur cette question des exceptions au droit d'auteur (13). La Directive 2001/29 prévoit en effet toute une série d'exceptions au droit patrimonial de l'auteur et plus spécialement au droit de reproduction et au droit de communication au public. Ces exceptions et limitations permettent pas conséquent à des tiers de reproduire ou de communiquer au public une oeuvre sans le consentement de son auteur. Ces exceptions exorbitantes limitativement énumérées par l'article 5 de la Directive 2001/29, peuvent être, à la discrétion des Etats, transposées dans les législations de chacun des Etats membres. La liberté des Etats est toutefois encadrée par le triple test prévu à l'article 5 § 5, qui soumet l'instauration des exceptions à la triple condition que l'exception soit spécialement prévue, qu'elle ne porte pas atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre et qu'elle ne cause pas un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit d'auteur. La législation autrichienne a admis dans son droit interne les exceptions posées par l'article 5 § 3 sous d) et e). En vertu de ces dispositions, il peut être fait exception au droit d'auteur, d'une part, lorsqu'il s'agit de courtes citations, mais la source, y compris le nom de l'auteur, doit être indiquée et, d'autre part, "lorsqu'il s'agit d'une utilisation à des fins de sécurité publique ou pour assurer le bon déroulement de procédures administratives, parlementaires ou judiciaires, ou pour assurer une couverture adéquate desdites procédures". En l'espèce, les médias ayant diffusé les photographies litigieuses ont invoqué ces exceptions et notamment l'utilisation à des fins de sécurité publique pour justifier la reproduction des oeuvres en cause sans le consentement de leur auteur. La Cour de justice devait donc déterminer en substance si l'utilisation à des fins de sécurité publique pouvait être valablement invoquée pour justifier la diffusion de photographies d'une victime d'une infraction par un organe de presse, sans avis de recherche des autorités. Le texte ne précisant pas le contexte dans lequel l'intérêt public peut être invoqué, et bien que les Etats disposent à cet égard d'une grande marge d'appréciation, l'interprétation de la Cour s'avère particulièrement précieuse. Tout d'abord, relativement à l'exception de sécurité publique, la Cour entend la notion de "sécurité publique" restrictivement et souligne au préalable qu'un média ne saurait s'attribuer la protection de la sécurité publique (14). Par principe, "un média [...], ne peut pas utiliser, de sa propre initiative, une oeuvre protégée par le droit d'auteur en invoquant un objectif de sécurité publique" (15). Par exception toutefois, un tel média peut collaborer "ponctuellement à la réalisation d'un tel objectif en publiant une photographie d'une personne recherchée". Mais cette exception est évidemment d'interprétation stricte et la Cour soumet celle-ci à une double condition. Elle juge en effet qu'il doit être exigé que cette initiative "d'une part, s'insère dans le contexte d'un décision prise ou d'une action menée par les autorités nationales compétentes et visant à assurer la sécurité publique et d'autre part, soit prise en accord et en coordination avec lesdites autorités, afin d'éviter le risque d'aller à l'encontre des mesures prises par ces dernières, sans qu'un appel concret, actuel et exprès, émanant des autorités de sécurité, à publier à des fins d'enquête une photographie soit pour autant nécessaire" (16). La Cour se prononce ensuite sur l'appréciation de la mention des sources dans le cadre de l'exception de courte citation. Sur cette limitation, la Cour de justice se fait plus souple. Elle décide que, là encore par principe, cette exception doit être interprétée dans le sens ou son application est "subordonnée à l'obligation que la source y compris le nom de l'auteur ou de l'artiste interprète, de l'oeuvre ou de l'autre objet protégé cités soit indiquée". Il peut toutefois être fait exception à ce principe lorsque, dans le cadre d'une utilisation de l'oeuvre dans un but d'intérêt public, le nom de l'auteur n'a pas été indiqué, la citation qui en est faite par d'autres par la suite est conforme à l'obligation prescrite par l'article 5 § 3 sous d) lorsqu'est seulement indiquée la source à l'exclusion du nom de l'auteur.
Il est à noter que le droit français est également concerné par cette décision. En dépit du fait que l'article L. 122-5 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L8877IQT), qui énumère de manière exhaustive les limitations et exceptions qui peuvent être portées aux droit patrimoniaux de l'auteur, ne prévoit pas une telle disposition, l'exception d'intérêt public ou de sécurité publique est néanmoins présente dans notre droit interne. En effet, il est prévu à l'article L. 331-4 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L1776H38), dans des termes plus généraux encore que ceux de l'article L. 122-5, que "les droits mentionnés dans la première partie du présent code ne peuvent faire échec aux actes nécessaires à l'accomplissement d'une procédure parlementaire de contrôle, juridictionnelle ou administrative prévue par la loi, ou entrepris à des fins de sécurité publique". Or cette disposition pourrait justifier une exception plus large que celle envisagée par l'article 5 de la Directive 2001/29 dès lors que les droits auxquels des limitations peuvent être portées, à suivre la lettre de l'article L. 331-4 du Code de la propriété intellectuelle, sont tant les droits patrimoniaux de l'auteur que ses droits moraux. L'interprétation faite par la CJUE de l'intérêt public doit donc, par analogie, être retenue pour interpréter l'article L. 331-4 du Code de la propriété intellectuelle.
Par ces multiples aspects, la décision rendue le 1er décembre 2011 par la Cour de justice de l'Union européenne ne manquera pas d'intéresser les observateurs avertis de la construction du droit d'auteur au sein du droit de l'Union européenne, qui sans être (encore ?) unifié tend de plus en plus, et cette décision y contribue pleinement, à être profondément harmonisé.
L'arrêt rendu le 18 octobre 2011 par la CJUE (17) était attendu tant par les spécialistes du droit de la bioéthique que par les observateurs du droit de la propriété intellectuelle. En effet à l'occasion d'une procédure préjudicielle introduite par une juridiction allemande à l'occasion d'une procédure d'annulation d'un brevet portant sur des cellules précurseurs obtenues à partir de cellules souches embryonnaires humaines et sur des procédés pour la production de ces cellules précurseurs, la Cour de justice dispose enfin d'une opportunité de donner une définition de l'embryon humain et, ce faisant, de préciser le champ de la brevetabilité d'inventions qui impliquent pour leur obtention une manipulation desdits embryons. C'est naturellement sur le second aspect de cette décision que nous nous attarderons plus spécifiquement. Trois questions préjudicielles ont été posées à la Cour de justice de l'Union européenne aux fins de d'interprétation de l'article 6 § 2 sous c) de la Directive 98/44/CE du 6 juillet 1998, relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques (N° Lexbase : L9982AUA). La solution rendue, particulièrement attendue, est essentielle dans la mesure où les Etats membres ne disposent d'aucune marge d'interprétation (18) relativement à cette disposition reprise dans notre droit interne à l'article L. 611-18 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L6893GTH).
A la première question relative à la notion d'embryon humain au sens de la Directive 98/44, la Cour décide que constitue "un embryon humain [...] tout ovule humain non fécondé dans lequel le noyau d'une cellule humaine mature a été implanté et tout ovule humain non fécondé qui, par voie de parthénogenèse, a été induit à se diviser et à se développer".
Les deux autres questions étaient relatives aux conditions de brevetabilité d'une invention impliquant un embryon humain. Plus précisément, la Cour de justice devait, d'une part, déterminer l'interprétation du champ de l'exclusion de brevetabilité des "utilisations d'embryons humains à des fins industrielles ou commerciales" et ce faisant définir cette notion (1°). Il était, d'autre part, requis de la Cour qu'elle se prononce sur la possibilité d'admettre la brevetabilité d'une invention dont l'enseignement technique revendiqué ne fait pas apparaître une telle utilisation des embryons humains. La brevetabilité peut-elle être admise lorsqu'en dépit des revendications, une telle utilisation apparaît comme une condition essentielle de la mise en oeuvre de l'invention à double titre, soit tout d'abord parce que le brevet porte sur un produit dont la production requiert la destruction préalable d'embryons humains, soit, ensuite, parce que le brevet porte sur un procédé pour lequel un tel produit est nécessaire comme matériau de départ (2°) ?
1°) La notion d'utilisation à des fins industrielles et commerciales : la recherche scientifique objet d'utilisation industrielle et commerciale
En l'espèce le brevet allemand avait été déposé dans une perspective de recherche scientifique afin de trouver des palliatifs à la transplantation de cellules cérébrales dans le système nerveux pour permettre le traitement de nombreuses maladies neurologiques. Afin de décider s'il convient d'annuler un tel brevet, il est nécessaire de déterminer si la recherche scientifique constitue une "utilisation à des fins industrielles et commerciales", au sens de l'article 6 § 2 sous c) de la Directive 98/44, et doit dès lors être exclu du champ de la brevetabilité. Il faut, avant tout, bien circonscrire le domaine de la réponse apportée par la Cour de justice : elle n'entend, en effet, en aucun cas se prononcer sur la réglementation de la recherche scientifique sur des embryons humains. La seule question que tranche ici la Cour est celle de la brevetabilité d'une telle recherche.
Après avoir rappelé que toute invention doit pouvoir, pour être brevetée, faire l'objet d'une application industrielle, la Cour déduit de la nature même du brevet que la recherche scientifique sur des embryons humains ne peut se distinguer d'une utilisation à des fins industrielles et commerciales. Le brevet confère en effet un monopole d'exploitation à des fins industrielles et commerciales à son titulaire, ce que souligne négativement le quatorzième considérant de la Directive. Or, si le but de la recherche scientifique peut évidemment être étranger à de telles fins, force est d'admettre que les droits qui seront reconnus au titulaire du brevet n'auront d'autres finalités que de permettre une telle exploitation. En outre, le législateur européen avait pris le soin de souligner que les hypothèses envisagées, exclusives de brevetabilité, ne sont données qu'à titre d'exemplarité et partant de manière non exhaustive. Par ailleurs, il faut souligner que le législateur a envisagé une exception à cette exclusion de brevetabilité dans le cas où l'invention a "un objectif thérapeutique ou de diagnostic qui s'appliquent à l'embryon humain et lui sont utiles" (19). A contrario, si un tel objectif n'est pas manifesté par l'invention, il ne peut y avoir d'autre conclusion que celle retenue par la Cour de justice et par laquelle elle décide que l'exclusion de brevetabilité relative à l'utilisation d'embryons humains à des fins industrielles et commerciales englobe également l'utilisation de tels embryons à des fins de recherche scientifique.
Si la solution semble juridiquement incontestable, elle est également conforme aux impératifs de protection d'ordre public que le législateur de l'Union européenne a entendu ménager lors de l'élaboration des règles relatives à la brevetabilité du vivant (20). En effet, il est souligné à de multiples reprises qu'il ne saurait y avoir de protection par le brevet lorsque celle-ci risque de heurter l'ordre public. Il est ainsi rappelé un tel impératif à de multiples reprises dans les considérants de la Directive 98/44 (21). Or, celui-ci pourrait être atteint dans l'hypothèse d'une utilisation d'embryons humains si les droits conférés au titulaire du brevet lui assure un monopole d'exploitation à des fins industrielles ou commerciales sur une invention pour laquelle des manipulations ont été faites sur des embryons humains (22).
Enfin, cette décision doit être approuvée en opportunité dans un souci d'harmonisation du droit des brevets notamment au sein de l'Union européenne. En effet, la Grande Chambre des recours de l'Office européen des brevets s'est déjà prononcée sur une telle question dans un arrêt rendu le 25 novembre 2008 (23). A l'occasion de cette décision, elle a statué en faveur de l'exclusion du champ de la brevetabilité des utilisations d'embryons humains à des fins de recherche scientifique. A l'époque, le risque de contradiction avec une interprétation divergente de la part de la Cour de justice avait été soulevé par les plaignants qui avaient invoqué, sans fondement toutefois, la nécessité pour la Grande Chambre des recours de saisir la Cour de justice d'une question préjudicielle. Cette requête avait été rejetée au motif de l'indépendance des ordres juridiques entre l'Organisation européenne des brevets et l'ordre communautaire. Ce risque était pourtant réel et aurait été peu opportun. En effet, le brevet européen ne concerne pas le strict cadre de l'Union européenne qui n'est d'ailleurs pas, en tant que telle, signataire de la Convention de Munich. Toutefois, les vingt-sept Etats membres de l'Union sont individuellement signataires de ladite convention. Il n'aurait donc pas été souhaitable que des interprétations divergentes puissent être admises selon que le brevet est ou non obtenu à l'issue de la procédure consacrée par la Convention de Munich. Il est heureux, en définitive, que les brevets nationaux des Etats membres soient soumis aux mêmes exceptions que le brevet européen et que les utilisations d'embryons humains ne puissent entrer dans le champ de la brevetabilité que dans des circonstances semblables, exclusivement à des fins de diagnostic ou thérapeutique.
La solution rendue par la Cour de justice confirme, en outre, la position de l'Office européen des brevets sur le fait que l'exclusion n'est pas limitée aux seules revendications. Il est précisé, dans cet arrêt, à l'instar de celui rendu le 25 novembre 2008, que l'exclusion de la brevetabilité est également applicable lorsque l'enseignement technique revendiqué ne mentionne pas l'utilisation d'embryons humains qui a néanmoins été réalisée pour parvenir à l'invention.
2°) L'indifférence du caractère apparent de l'utilisation des embryons humains dans l'enseignement technique revendiqué
La Cour de justice était enfin tenue de répondre à une ultime question préjudicielle relative à l'étendue de l'exclusion de la brevetabilité. Doit-on entendre limitativement l'exclusion de la brevetabilité ou faut-il admettre qu'un enseignement technique "est exclu de la brevetabilité également dans le cas où l'utilisation d'embryons humains ne fait pas partie de l'enseignement technique revendiqué par le brevet, mais est la condition nécessaire de sa mise en oeuvre, [soit] parce que le brevet porte sur un produit dont la production requiert la destruction préalable d'embryons humains, [soit] parce que le brevet porte sur un procédé pour lequel un tel produit est nécessaire comme matériau de départ ?".
La question se pose légitimement. En effet, les droits intellectuels conférés par le brevet, dont on a vu qu'ils justifient l'exclusion de la brevetabilité lorsque l'utilisation des embryons humains est faite à des fins de recherche scientifique, ne s'étendent que sur les éléments revendiqués dans la demande de brevet. Dès lors, si l'enseignement technique revendiqué ne mentionne pas une telle utilisation, on aurait pu admettre qu'une réponse distincte soit apportée. Pourtant il n'en a pas été ainsi et ceci est conforme à l'esprit des dispositions contenues dans la Directive 98/44 (24). La Cour décide en effet, conformément à la ratio legis de la Directive, que le champ de l'exclusion est général, qu'est ainsi exclue de la brevetabilité l'invention qui requiert la destruction d'embryons humains ou leur utilisation comme matériau, "quel que soit le stade auquel celles-ci interviennent et même si la description de l'enseignement technique revendiqué ne mentionne pas l'utilisation d'embryon humain". La volonté du législateur n'a en effet pas été de condamner exclusivement "la monopolisation par le droit intellectuel de certains usages ou de la source biologique de l'invention" (25), mais bien de sanctionner "l'utilisation nécessaire de l'embryon à la réalisation d'une invention brevetable" (26). La lettre même de la Directive invite d'ailleurs à un tel raisonnement. L'article 5 § 1 prévoit en effet que "le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d'un de ses éléments, y compris la séquence ou la séquence partielle d'un gène, ne peuvent constituer des inventions brevetables", il serait dès lors redondant de n'admettre à l'article 6 § 2 sous c) une lecture similaire à celle déjà retenue dans un article précédent.
En outre, un argument d'efficacité milite également en faveur d'une telle solution. Limiter l'exclusion aux seules revendications ne serait pas un gage suffisant pour s'assurer de la non-utilisation d'embryons humains pour parvenir à l'invention revendiquée. Une rédaction "habile" desdites revendications permettrait en effet de contourner l'interdiction (27).
(1) Sur cet arrêt cf. D., 2011, actu. 2930, obs. J. Daleau.
(2) C. Zolynski, in Chronique de droit de la propriété intellectuelle - Octobre 2011, Exclusivité 0, Harmonisation 1 ! Une étonnante victoire, obs. sous CJUE 4 octobre, 2011, aff. C-403/08 (N° Lexbase : A1573HYW), Lexbase Hebdo n° 270 du 27 octobre 2011 - édition affaires (N° Lexbase : N8450BSR).
(3) V. notamment V.-L. Bénabou, Propriétés intellectuelles, 2009, p. 378 et 2011, p. 209 ; adde, du même auteur, Que reste-t-il au juge national pour dire le droit d'auteur ?, RDTI, 2009/37, p. 71.
(4) CJUE 16 juillet 2009, aff. C-5/08 (N° Lexbase : A9796EIN), Rec. p. 1-6569 ; CJUE 4 octobre 2011, aff. C-403/08 et 429/08, préc., à paraître au Recueil.
(5) Point 87.
(6) Point 89.
(7) L'article 7 de la Directive 93/98 du Conseil du 29 octobre 1993, relative à l'harmonisation de la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins (N° Lexbase : L7789AUZ) dispose que "les photographies qui sont originales en ce sens qu'elles sont une création intellectuelle propre à leur auteur sont protégées conformément à l'article 1er. Aucun critère ne s'applique pour déterminer si elles peuvent bénéficier de la protection [...]".
(8) Points 87 et 89 précités.
(9) Point 99.
(10) Point 97.
(11) V. not. CJUE, 21 octobre 2010, aff. C-467/08 (N° Lexbase : A2205GCN), V-L. Benabou, Copie privée : la Cour de Justice prend en main la notion de compensation équitable ou rien ne change mais tout change, juriscom.net ; La notion de compensation équitable dans l'arrêt Padawan ou quand la CJUE fait main basse sur les notions du droit d'auteur, Légipresse, février 2011, p. 95 ; N. Binctin, La rigueur risquée, CCE, 2011, étude 1 ; Ch. Caron, La rémunération pour copie privée en droit communautaire, CCE, 2011, n° 1, comm. 2 ; CJUE, 16 juin 2011, aff. C 462/09 (N° Lexbase : A6408HTI), V.-L. Benabou, Que reste-t-il de la copie privée, Légipresse, 2011.
(12) V. not. Livre vert de la Commission européenne sur la diffusion en ligne des oeuvres audiovisuelles du 13 juillet 2011 qui aborde notamment la question des exceptions au droit d'auteur et plus largement soulève la question des sources du droit d'auteur au sein de l'Union européenne.
(13) Réforme que le juge européen a d'ores et déjà initiée à travers les arrêts CJUE, 21 octobre 2010, aff. C-467/08, préc. et CJUE, 16 juin 2011, aff. C 462/09, préc., à l'égard de l'exception pour copie privée puisque l'Assemblée nationale vient d'adopter en première lecture le 29 novembre 2011 le projet de loi, relatif à la rémunération pour copie privée. V. not., D. 2011, actu. 2929, obs. J. Daleau ; V. Téchené, Rémunération pour copie privée : adoption du projet de loi par l'Assemblée nationale, Lexbase Hebdo n° 276 du 8 décembre 2011 - édition affaires (N° Lexbase : N9095BSN).
(14) Point 111.
(15) Point 116.
(16) Point 116.
(17) Cf. D., 2011, Act. p. 2596, obs. J. Daleau.
(18) CJCE 16 juin 2005, aff. C-456/03 (N° Lexbase : A6839DI7), Rec. I-10423, point 78, "contrairement à l'art. 6.1 de cette Directive, qui laisse aux autorités administrative et aux juridictions des Etats membres une marge d'appréciation dans la mise en oeuvre de la brevetabilité des inventions dont l'exploitation commerciale serait contraire à l'ordre public et aux bonnes moeurs, le paragraphe 2 du même article ne laisse aux Etats membres aucune marge d'appréciation en ce qui concerne la non-brevetabilité des procédés et utilisations qui y sont énumérés, cette disposition visant expressément à encadrer l'exclusion prévue au paragraphe 1".
(19) Directive 98/44, considérant 42.
(20) Il convient toutefois de noter que la conception de l'ordre public n'est évident pas nécessairement homogène. La conception retenue par la Directive est fortement inspirée de considérations personnalistes, voire religieuses, qui sacralisent l'embryon en tant que personne humaine. Il est en revanche possible de retenir des conceptions plus utilitaristes qui admettent, notamment dans une perspective de recherche scientifique, la création, la manipulation voire la destruction d'embryon humain. Sur ces questions purement éthiques, v. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat, D., 2007, pan. 1102 et s., J.-C. Galloux, Non à l'embryon industriel : le droit européen des brevets au secours de la bioéthique ?, D., 2009, p. 578.
(21) En ce sens, v. considérant 37 "la présente directive se doit d'insister sur le principe selon lequel des inventions dont l'exploitation commerciale serait contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs doivent être exclues de la brevetabilité".
(22) En ce sens, v. considérant 16 "le droit des brevets doit s'exercer dans le respect des principes fondamentaux garantissant la dignité et l'intégrité de l'homme ; qu'il importe de réaffirmer le principe selon lequel le corps humain, dans toutes les phases de sa constitution et de son développement, cellules germinales comprises, ainsi que la simple découverte d'un de ses éléments ou d'un de ses produits, y compris la séquence ou séquence partielle d'un gène humain, ne sont pas brevetables ; que ces principes sont conformes aux critères de brevetabilité prévus par le droit des brevets, critères selon lesquels une simple découverte ne peut faire l'objet d'un brevet" ; considérant 39 : "l'ordre public et les bonnes moeurs correspondent notamment à des principes éthiques ou moraux reconnus dans un Etat membre, dont le respect s'impose tout particulièrement en matière de biotechnologie en raison de la portée potentielle des inventions dans ce domaine et de leur lien inhérent avec la matière vivante ; que ces principes éthiques ou moraux complètent les examens juridiques normaux de la législation sur les brevets, quel que soit le domaine technique de l'invention". V. également, Avis du groupe européen d'éthique des sciences et des nouvelles technologies auprès de la Commission européenne, Les aspects éthiques de la brevetabilité des inventions impliquant des cellules souches humaines, 7 mai 2002.
(23) OEB, gde ch. rec., 25 novembre 2008, décision n° G 0002/06, D., 2008, Pan. 1435, obs. J.-C. Galloux et H. Gaumont-Prat ; J.-C. Galloux, Non à l'embryon industriel : le droit européen des brevets au secours de la bioéthique ?, préc..
(24) En ce sens, v. les travaux préparatoires, COM (95)0661 C4-0063/96 95/350(COD), JOCE C 286, 22 septembre 1997.
(25) J.-C. Galloux, op. cit..
(26) Ibid..
(27) Point 50.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429275
Réf. : Loi n° 2011-1843 du 8 décembre 2011, relative aux certificats d'obtention végétale (N° Lexbase : L3622IRL)
Lecture: 2 min
N9280BSI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429280
Réf. : CA Paris, Pôle 1, 4ème ch., 9 septembre 2011, n° 11/04240 (N° Lexbase : A3191H4X)
Lecture: 2 min
N9259BSQ
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429259
Réf. : Cass. com. 15 novembre 2011, n° 10-15.049, F-P+B (N° Lexbase : A9345HZ7)
Lecture: 12 min
N9269BS4
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Jean-Baptiste Lenhof, Maître de conférences à l'ENS - Cachan Antenne de Bretagne, Membre du centre de droit financier de l'Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne)
Le 31 Janvier 2013
I - L'appréciation de la loyauté sur le fondement des dispositions de l'article L. 223-22 du Code de commerce
Le "devoir" de loyauté des dirigeants, consacré par l'arrêt "Vilgrain" en 1996, emportait appréciation du comportement des dirigeants dans un cadre contractuel ce qui présentait, certes, l'avantage de conférer une trame logique à l'évolution jurisprudentielle, mais pouvait faire douter des fondements juridiques (A) susceptibles de la justifier. La possibilité de donner une autre assise au raisonnement fondant la loyauté du dirigeant semble, avec l'arrêt du 15 novembre 2011, pouvoir être envisagée, en tant que ce dernier vise expressément l'article L. 223-22 du Code de commerce pour prononcer la cassation partielle (B).
A - Le devoir de loyauté dans la jurisprudence issue de l'arrêt "Vilgrain"
Le débat doctrinal qui a suivi l'arrêt "Vilgrain" éclaire sur les incertitudes qu'il a pu susciter. Les faits de l'espèce méritent, d'ailleurs, d'être rappelés, car ils éclairent sur la coloration contractuelle du contentieux, qui n'a pas été sans influencer la logique adoptée par la Chambre commerciale. Dans cette affaire, le dirigeant d'une société avait acquis les titres d'une associée et avait dissimulé à cette dernière qu'il avait chargé une banque d'affaires de rechercher un acquéreur pour ses propres titres et ceux de sa famille, espérant un bénéfice substantiel dans l'opération (l'achat avait été fixé au prix de 5 650 francs -environ 860 euros-, le cessionnaire s'abstenant d'informer la cédante des négociations qu'il avait engagé pour la vente des mêmes actions au prix minimum de 7 000 francs -environ 1 067 euros-).
Poursuivi pour dol, le dirigeant dont la réticence dolosive avait été reconnue par la cour d'appel, verra la décision confirmée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation, au motif qu'il avait "manqué au devoir de loyauté qui s'impose au dirigeant d'une société à l'égard de tout associé". La doctrine, immédiatement (Ph. Malaurie, D., 1996, p. 518 ; J. Mestre, RTDCiv., 1997, p. 114 ; J. Ghestin, JCP éd. G, 1996, II, 2265 ; D. Schmidt et N. Dion, JCP éd. E., 1996, 838, par exemple), avait soulevé des questions relatives aux interprétations possibles de cette décision : ce "devoir" était-il attaché à la qualité de dirigeant ou de cocontractant de l'associée cédante, voire, du cumul de ces deux qualités ? La réponse était d'importance puisque le dirigeant était poursuivi, dans cette espèce, sur un fondement contractuel, de sorte qu'on aurait raisonnablement pu estimer que son statut n'avait fourni au juge qu'un élément d'appréciation de la réticence dolosive. La violation du "devoir" de loyauté, dans ce registre, aurait été matérialisée par le silence conservé sur la situation, silence gardé en méconnaissance du devoir d'information dû aux associés par le dirigeant.
La solution à ces interrogations ne devait toutefois pas tarder. Elle fut ainsi apportée par un arrêt de la Chambre commerciale rendu le 12 mai 2004 (Cass. com., 12 mai 2004, n° 00-15.618, FS-P N° Lexbase : A1887DCU). Il concernait une cession de titres réalisée dans des conditions voisines de celles de l'arrêt "Vilgrain", le juge du droit ayant pu décider, en l'absence de toute convention entre le cédant et le dirigeant, que ce dernier avait "manqué à l'obligation de loyauté qui s'impose au dirigeant de société à l'égard de tout associé en dissimulant aux cédants une information de nature à influer sur leur consentement".
Un auteur avait pu souligner, à ce titre (F.-G. Trébulle, note sous l'arrêt précité, JCP éd. G., 2004, II, 1393), que "le présent arrêt [donnait...] raison à ceux qui tenaient pour l'existence d'une obligation de loyauté du dirigeant attachée à cette seule qualité et indépendante de toute autre circonstance" (op. cit., p. 1498). Ainsi dissocié du contentieux de la réticence dolosive, la loyauté du dirigeant aurait pu faire l'objet, en raison de cette indépendance nouvellement constatée, d'une appréciation en fonction des fonctions statutaires de l'intéressé. Or, si l'arrêt de 2004 suggère, dans son économie, de retenir cette solution, l'examen du visa surplombant l'attendu relatif à la loyauté incite, lui, à plus de précaution. C'est, en effet, sous l'égide de l'article 1382 du Code civil (N° Lexbase : L1488ABQ) que le juge rendra sa décision, ce qui imposera de conclure -temporairement- que la qualité de dirigeant constitue un élément d'appréciation de la faute, mais qu'il ne rattache pas définitivement le devoir de loyauté à un comportement impérativement commandé par le droit des sociétés. En ce sens, l'arrêt 15 novembre 2011 pourrait fournir le pivot d'une évolution attendue.
B - Un visa fondé sur des dispositions de droit des sociétés
L'arrêt du 15 novembre 2011, à l'inverse de ses devanciers, place résolument la recherche de la loyauté du dirigeant sous l'égide de l'article L. 223-22 du Code de commerce qui dispose, dans son premier alinéa, que "les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion". Placé sous ce chapiteau, la motivation du juge du droit nous semble prendre une portée remarquable car elle apparaît procéder d'une volonté de faire échapper le devoir de loyauté au cantonnement contractuel qui avait prévalu jusqu'alors. Cette analyse repose sur deux constats : le premier que, à la lecture des faits de l'espèce, la référence à ce texte ne s'imposait pas nécessairement, le second, que le recours aux dispositions du Code de commerce résulte d'une substitution du fondement juridique invoqué par les auteurs du pourvoi.
Au titre du premier constat, la lecture, même superficielle de l'article L. 223-22 du Code de commerce conduit à relever, en effet, que les hypothèses de responsabilité du gérant sont de trois ordres : violation des textes applicables aux sociétés à responsabilité limitées, violation des statuts et faute de gestion. Or, il semble difficile de rattacher précisément un de ces trois cas d'ouverture de la responsabilité du gérant à l'espèce soumise à la Chambre commerciale : d'abord parce que les agissements du gérant ne s'inscrivent aucunement dans le cadre d'ordre public de la réglementation des SARL, ensuite, parce que, à propos de leur dispositions supplétives, les statuts n'imposaient pas de sujétions supplémentaires au gérant mis en cause et, enfin, parce que, dans le cadre de ce moyen du pourvoi, les seuls actes visés ne concernaient pas la gestion de la SARL proprement dite, mais portaient sur des menées concurrentielles réalisées au sein d'une autre société.
Au titre du second constat, la lecture de la première branche du premier moyen joute aux interrogations qui viennent d'être soulevées. En faisant reposer son pourvoi sur un défaut de base légale, ses auteurs invoquaient l'absence de recherche par la cour d'appel de la responsabilité du dirigeant qui avait mené "de front deux projets parallèles pour deux sociétés différents, sans en informer les associés". Ils rattachaient ce défaut de base légale, plus précisément, au non-respect des dispositions de l'article 1382 du Code civil, mais pas à un texte de droit des sociétés (cf. moyens du pourvoi annexés). On relèvera, en exergue, que le pourvoi mêlait violation du devoir de loyauté et actes de concurrence déloyale (cf. infra) ce qui, au demeurant, se justifie au regard du mélange des genres qui caractérise souvent ces situations (pour un exemple topique, Cass. com. 24 février 1998 n° 96-12638, publié N° Lexbase : A5427ACY, Bull. civ. IV, n° 86 ; JCP éd. E., 1998, p. 1486, note B. Daille-Duclos).
La substitution de motif, opérée à l'occasion de la rédaction de l'arrêt n'en prend que davantage de force, car le juge du droit, écartant la mise en oeuvre de l'article 1382 du Code civil, semble donner un signe quant à l'éventualité d'un basculement du fondement juridique du devoir de loyauté.
II - L'intérêt du devoir de loyauté fondé sur des textes du droit des sociétés
Reste à éclairer sur l'intérêt qu'est susceptible de revêtir l'adoption d'un fondement textuel issu des droits des sociétés pour apprécier le devoir de loyauté. Sans préjuger de l'évolution ultérieure de la jurisprudence, on peut, à la lumière de l'arrêt qui vient d'être rendu, imaginer qu'il peut revêtir deux axes. Le premier permettrait, en l'écartant de l'imprégnation contractuelle qui avait prévalu jusqu'alors, d'adapter ce devoir à la nature de la société et prendre, ainsi, en considération la situation du dirigeant au regard de la forme sociale (A). Le second axe, résultant et complémentaire du premier, permettrait de distinguer nettement les notions de loyauté et de déloyauté, du moins dans les rapports d'un associé avec la société (B).
A - Loyauté et situation du dirigeant face à la forme sociale
L'intérêt de rattacher la méconnaissance du devoir de loyauté à la violation d'une obligation contractuelle, à l'image de l'arrêt "Vilgrain" qui s'appuyait sur son lien avec la réticence dolosive fut, sans nul doute, de permettre d'étayer la démonstration d'un comportement répréhensible du dirigeant par l'utilisation d'un cadre normatif et jurisprudentiel éprouvé. A priori, en effet, la recherche de l'étendue et du contenu de ce devoir particulier, ne saurait être réalisée in abstracto, dans les principes qui gouvernent le droit des sociétés : d'une part, les devoirs de dirigeants varient selon les formes sociales et ils peuvent, d'autre part, muter en fonction de dispositions statutaires, plus ou moins libres selon l'intensité de l'ordre public applicable. A l'extrême, il faudrait considérer que le devoir de loyauté ne saurait être raisonnablement analysé qu'a travers une recherche ad hoc de l'étendue des pouvoirs du dirigeant dans la personne morale visée.
L'idée a indirectement été suggérée par des travaux de la doctrine. A l'apogée du débat sur cette nouvelle notion, Hervé Le Nabasque, en effet, avait pu proposer une analyse de la situation du dirigeant, confronté au respect du principe de loyauté, y voyant "l'obligation [...] de ne pas utiliser leurs pouvoirs ou les informations dont ils sont titulaires dans un intérêt strictement personnel et contrairement à l'intérêt de la société ou de celui des associés" (H. Le Nabasque, Le développement du devoir de loyauté en droit des sociétés, RTDCom., 1999, p. 273). Cette définition toute dédiée à l'efficacité, suggère ainsi, par le rapprochement des termes : intérêts "de la société" et "des associés", de circonscrire le devoir de loyauté à l'aune d'une approche subjective, rendue indispensable par la diversité des cadres juridiques rencontrés.
C'est dans cette perspective que semble se placer le raisonnement du juge du droit. En effet, à la suite de la substitution du fondement de droit des sociétés à celui de l'article 1382 invoqué par les auteurs du pourvoi, il établit que la cour d'appel s'était déterminée par des motifs impropres à exclure "tout manquement [du gérant] à l'obligation de loyauté et de fidélité pesant sur lui ne raison de sa qualité de gérant de la société [...], lui interdisant de négocier, en qualité de gérant d'une autre société, un marché dans la même activité". Le raisonnement est, de la sorte, directement placé sous l'égide de la situation de fait propre à l'activité de la société et de la défense de l'intérêt de cette dernière aussi bien que de ceux de ses associés.
Au delà de cette remarque, on peut s'interroger sur l'opportunité d'un rattachement plus ou moins prononcé de l'exigence de loyauté au respect de l'intérêt social, concept qui pourrait recouper (avec les incertitudes inhérentes aux contours de cette notion) les atteintes à l'intérêt de la société et à ceux des associés, tout en permettant de renvoyer à une appréciation du devoir (ou de l'obligation) de loyauté en rapport avec la forme sociale (pour les enjeux, lire J.-P. Bertrel, Le débat sur la nature de la société, in Droit et vie des affaires - Etudes à la mémoire d'A. Sayag, Litec, 1997, p. 131, spéc. p. 144 ; adde, sur la quête du juste milieu en matière d'intérêt social, J.-P. Bertrel et alii., L'intérêt social, Droit & Patrimoine, avril 1997, p. 45). Mieux encore, les travaux d'autres auteurs incitent à approfondir la réflexion sur ce sujet, en référence aux analyses qu'ils portent sur la jurisprudence en matière de loyauté de l'associé et qui trouvent, pour leur part, un débouché plus précis dans la réponse de la Cour de cassation à la deuxième branche du second moyen.
B - Déloyauté et devoir de loyauté de l'associé vis-à-vis de la société
Dans la seconde branche du second moyen, le juge du droit, tout en confirmant la solution de l'arrêt d'appel, apporte un élément de distinction entre la déloyauté concurrentielle et le devoir de loyauté, distinction nécessaire à l'éclaircissement d'une jurisprudence qui était jusqu'ici encore imprécise (cf. l'arrêt précité Cass. com., 24 février 1998). Dans l'espèce analysée, les auteurs du pourvoi prétendaient, s'appuyant sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil, que l'associé, "tenu d'un devoir de loyauté, ne peut entreprendre, sans en informer les autres associés, un projet pour le compte d'une autre société, fût-il distinct, qui vient en concurrence avec celui présenté par la société". La réponse de la Chambre commerciale sera, sur ce point, particulièrement précise : limitant sa motivation à la situation de l'associé d'une société à responsabilité limitée, elle établira que "sauf stipulation contraire [...ce dernier n'est] tenu ni de s'abstenir d'exercer une activité concurrente de celle de la société ni d'informer celle-ci d'une telle activité et doit seulement s'abstenir d'actes de concurrence déloyaux". La cause serait ainsi entendue, tout le moins dans la SARL. L'associé, sauf stipulation d'une clause de non-concurrence, peut librement exercer toute activité concurrente, sans en informer la société. La limite fixée par le juge, de ne pas se livrer à une concurrence déloyale, semble davantage liée au souci de répondre au moyen du pourvoi plutôt que d'être attachée au principe d'information de l'associé, tant il répond mal à la logique déployée par la Chambre commerciale.
Il apparaît, en effet, que l'examen des deux branches du premier moyen par la Cour de cassation permet de dégager une distinction qui jusqu'alors n'était pas si évidente. Au titre de la première branche, il est établi, d'abord, que, l'associé d'une SARL est libre de concurrencer la société et n'est pas tenu d'informer cette dernière. En vertu de la seconde, il ressort que le gérant d'une SARL, en tant que dirigeant serait tenu d'une "obligation" de loyauté (et l'on peut s'interroger sur la portée de l'utilisation de ce terme, de préférence, à celle de "devoir") et de fidélité lui interdisant de la concurrencer.
Là également, la Chambre commerciale semble avoir fait sienne une opinion de la doctrine qui s'était interrogée sur l'existence d'une obligation implicite de non-concurrence de l'associé, variant selon le type de société : "l'exigence de loyauté n'a pas la même intensité selon le type de société. Elle est à son maximum dans les sociétés de personnes, quand elle se combine avec un fort intuitu personae. Elle atteint donc un degré suffisant dans la société en nom collectif [...]. La Cour de cassation a cependant reconnu l'existence d'une obligation de non concurrence à la charge d'un associé de SARL, envers la société [...]. Le cas est exceptionnel [...]. A notre avis, dans les société par actions, l'obligation de non-concurrence ne pèse que sur les dirigeants". (P. Le Cannu, B. Dondero, Droit des sociétés, Montchrestien, 3ème éd., n° 165).
L'éclairage que nous donne l'arrêt du 15 novembre 2011, semblerait confirmer cette analyse : l'obligation (puisque ce terme est consacré) de loyauté dans les SARL ne pèserait que sur le gérant, mais non sur les associés. La lecture de la décision imposant une clause de non-concurrence à un associé de SARL (P. Le Cannu, B. Dondero, op. cit., loc. cit.) renforce cette impression. Dans cette espèce, la cassation avait été prononcée au visa de l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2694AD7), pour défaut de réponse à conclusion, sans qu'il soit véritablement établi par le juge du droit que l'associé était tenu de ne pas concurrencer la société. (Cass. com. 6 mai 1991, n° 89-13.780 N° Lexbase : A2642ABH ; D., 1991, p. 609, note A. Viandier). Le commentateur de l'arrêt, le souligne, au demeurant : "en face de cette décision la prudence est de mise. L'arrêt pose le problème de l'obligation de non concurrence des associés, mais il n'y apporte pas de solution".
L'arrêt commenté appelle, sans nul doute, sinon la même prudence, du moins la circonspection. Il fournit l'occasion d'amorcer une avancée potentielle de la jurisprudence, mais exclusivement dans les limites déterminées par le renvoi devant la cour d'appel (autrement composée), le juge du fait s'étant déterminé, selon l'attendu de cassation : "par des motifs impropres à exclure tout manquement [du gérant] à l'obligation de loyauté et de fidélité pesant sur lui en raison de sa qualité de gérant".
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429269
Réf. : Cass. com., 6 décembre 2011, n° 10-23.466, FS-P+B (N° Lexbase : A1855H4H)
Lecture: 1 min
N9230BSN
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 03 Janvier 2012
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429230
Réf. : Cass. civ. 1, 7 décembre 2011, n° 10-30.919, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1627H4Z)
Lecture: 2 min
N9195BSD
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 15 Décembre 2011
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:429195