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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication
Le 30 Décembre 2016
Un premier salon dédié, en novembre dernier, en fut le point d'orgue, regroupant 23 acteurs du secteur, sous l'égide ou le patronat, on ne sait, d'"Open Law, le droit ouvert", projet de cocréation destiné à mettre en valeur le droit ouvert, accompagner globalement l'ouverture des données juridiques et stimuler l'innovation collaborative autour des données juridiques ouvertes.
Sur Wikipedia, la Legal Technology, fait référence à l'usage de la technologie et de logiciels pour offrir des services juridiques. Selon Régis de Boisé, fondateur de "Le BonBail", le terme désigne les technologies qui permettent l'automatisation d'un service juridique, que ce soit au niveau du support (le document), du processus (la procédure) ou de la relation avec les professionnels du droit.
L'originalité du modèle tient au fait qu'il ne constitue pas, en principe, une "ubérisation" du droit, comme on a pu le lire ici ou là. Ces services automatisés s'adressent aussi bien aux justiciables directement, qu'aux professionnels du droit (et du chiffre).
De fait, la LegalTech intervient essentiellement sur la gestion d'affaire, la facturation et la comptabilité ; le stockage et la génération de documents ; la communication de pièces électroniques lors de procédures judiciaires ou gouvernementales ; la recherche de documents juridiques, enfin. En la matière, on est donc assez loin d'une vulgarisation du droit, permettant de s'adresser aux justiciables directement et de répondre à une antienne commune : le coût important que constituerait le recours à un professionnel.
C'est pourquoi, dès lors, plusieurs startups se sont, elles, engouffrées dans la mise à disposition d'outils permettant aux particuliers et entreprises de faire leurs formalités juridiques par elles-mêmes sans passer par un avocat ; dans l'analyse de contrats et de données ; bref dans l'automatisation de la rédaction juridique.
Seulement n'est pas Rocket Lawyer qui veut... et l'arrivée du géant américain, à grand renfort de joint-venture avec un éditeur séculaire français, n'est pas faite pour ravir les âmes les plus pluralistes en matière de libéralisation du droit. En clair, la LegalTech pouvait revêtir quelque attrait de nouveauté, de modernisme, d'évolution bien équilibrée entre startups et professionnels juridiques au sein du marché du droit, pour autant que toutes ces jeunes pousses se développaient à armes égales en France et que l'interprofessionnalité capitalistique, à peine éclose, devenait efficiente... On peut donc craindre une récupération, ici ou là, de ces jeunes pousses pour prospérer chez la Quintinie, ou presque !
Ceci étant dit, quelques millions d'euros levés plus tard... la grande révolution algorithmique du droit peine à se montrer...
Ou plutôt, cette révolution que nous promettaient des startups pleines d'entrain et bardées de promesses en bandoulière a bien lieu : mais quand elle n'est pas orchestrée par les acteurs traditionnels du service juridique et documentaire, elle est fomentée par les institutions tout ce qu'il y a de plus feutrées, elles-mêmes.
Des exemples ? Ma foi : lorsqu'il s'est agi de mettre en relation les justiciables et les avocats, le Conseil national des barreaux a publié SA plateforme (avocat.fr) qui, à n'en pas douter, ramassera, à terme, la mise de ce marché singulier. Il n'y pas de place pour plusieurs acteurs, tout juste une oligarchie, si tant est que tous aient accès aux mêmes informations centralisées... que le CNB (CQFD).
Sur la gestion d'affaire, la facturation et la comptabilité ? Une poignée d'acteurs là aussi se partage un marché en expansion certes, mais verrouillé par des difficultés d'interopérabilité. Le changement de logiciel de gestion de cabinet... ce n'est pas pour maintenant ; d'autant que les opérateurs historiques assurés de leur compétence métier se renouvellent en proposant, du cloud, des services complémentaires de gestion de contrats et des services documentaires en relation directe avec leurs missions (maisons) principales.
La communication de pièces électroniques lors de procédures judiciaires ou gouvernementales ? Ici, nous sommes plus près de la SSII que de la LegalTech à proprement parler : le tout étant d'entrer dans le cahier des charges d'un e-barreau ou autre RPVA ! Toujours sous une égide institutionnelle.
Last but not least, la LegalTech documentaire et de rédaction d'actes sauvera-t-elle le modèle ?
Il faut toujours avoir à l'esprit :
1 - que l'algorithme juridique n'est jamais aussi pertinent que lorsqu'il assoit ses calculs sur le Big Data certes, mais conjugué à des ressources documentaires propres, originales ;
2 - que l'originalité et donc la valeur ajoutée ne sont jamais dans l'automatisation mais dans l'interprétation ;
3 - que l'interprétation déterminée et éditoriale conditionne la confiance et que la promesse d'une sécurité juridique sans confiance... cela n'existe pas.
Ceci étant posé, à la manière d'un théorème pythagoricien, force est de constater que seuls les éditeurs juridiques cumulent intégration du Big Data et sourcing spécifique ou original ; seuls les éditeurs juridiques cumulent pertinence de la recherche sur la base d'arborescences métiers et interprétation doctrinale de qualité ; seuls les éditeurs juridiques cumulent bibliothèques d'actes ou clausiers et mises à jour régulières teintées d'une pratique professionnelle indispensable. Le besoin d'actes juridiques dépasse de loin les scenarii aujourd'hui proposés par la LegalTech aussi bluffante soit-elle lorsqu'on y adjoint un langage naturel, pourtant programmé. Répondre finalement à quelques cas d'espèce bien pensés suffit-il pour parler de révolution structurelle dans la manière de prodiguer un conseil et de rédiger un acte ? Et, je n'évoque pas la responsabilité du rédacteur (l'algorithme ou le consommateur-justiciable ?) quant à la validité et à l'efficacité de l'acte digitalo-reconstitué.
J'affirme que les éditeurs juridiques sont de fait les acteurs principaux du Big Data juridique ; à l'image de Lexbase qui, cette année encore, n'a pas démérité en intégrant des dizaines de milliers de nouveaux jugements de premières instances, des dizaines de milliers de décisions étrangères, les décisions des juridictions publiques financières, comme prochainement des données INPI.
Que faire de cette quantité astronomique de données ? La donnée fait-elle la connaissance ? Mieux, son accès est-il synonyme de "compétence métier" ? Quelle efficacité opérationnelle pour ces millions de données juridiques ?
J'affirme que les éditeurs sont de fait les plus à même de conduire le smart knowledge de demain : d'abord, toujours et encore, parce qu'ils révèlent en leur sein et collaborent avec des centaines de professionnels juridiques, de gens de métier ; qu'ils ont l'expérience client indispensable à la conduite d'un tel projet pour "transformer les données non-structurées et les informations contingentes du Big Data d'aujourd'hui en connaissances opérationnelles structurées et réticulées -c'est-à-dire mises en qualité cognitive et en action opérationnelle au sein de compétences métier matures et partagées-" (Patrick Serrafero, Professeur associé à l'Ecole Centrale de Lyon).
Car, il est un élément fondamental qui conditionne le succès de l'algorithmisation du droit, on l'a dit : la confiance. Certaines voix (cf. Supralegem) n'ont pas tort de réclamer l'ouverture du code source des startups de la LegalTech ; car enfin, lorsqu'un professionnel du droit prodigue un conseil, adopte une stratégie procédurale ou juridique, il s'appuie sur une interprétation déterminée, celle d'un éditeur, d'un professeur, d'une expérience reconnue, voire du juge lorsqu'il en identifie la continuité judiciaire... et non du seul déterminisme statistique, même si "lire c'est toujours interpréter" enseigne Henry Miller. L'opacité algorithmique, quasi-inhérente à la LegalTech, puisque c'est le coeur de la valeur ajoutée de ces startups, ne résisterait pas à une telle exigence de transparence. Et que penser de ces startups documentaires qui basent leur modèle d'expansion sur... une API qui adapte, finalement, un moteur de recherche certes ultra-rapide, mais disponible pour tout un chacun sur le marché ?
Au contraire, la valeur ajoutée d'un éditeur juridique réside toujours et encore dans son collège doctrinal, dans sa capacité interprétative subjective, dans ses serviciels métiers ; c'est la base de la confiance entre le professionnel du droit et l'éditeur, comme il en va du client justiciable envers le professionnel juridique.
"Le droit est la plus puissante des écoles de l'imagination. Jamais poète n'a interprété la nature aussi librement qu'un juriste la réalité": c'est la clé de l'inventivité juridique ou procédurale pour Giraudoux. L'algorithmisation se base exclusivement sur la réalité, quand la doctrine entend l'orienter, voire la réinventer.
C'est pourquoi, demain, les éditeurs juridiques, comme Lexbase, marieront subtilement leurs ouvrages interprétatifs, traditionnels ou pratiques, à des dataviz, qui la durée des contentieux, qui les affaires rendues dans le même sens, qui les affaires rendues sur tel fondement, qui le moyen juridique le plus invoqué, qui le montant de l'indemnité d'un préjudice quelconque, qui le calcul des indemnités de rupture (ça c'est déjà fait sur Lexbase). Des data visualisations qui ne seront pertinentes que pour autant que l'on pourra mettre les résultats algorithmiques en perspective avec la connaissance métier et la réflexion doctrinale.
Hier des résumés sur la portée juridique d'une décision de justice, l'élaboration d'une chaîne du contentieux complète : l'intelligibilité et la lisibilité de la jurisprudence est en marche... Demain, toute la thématisation profonde des fonds Lexbase permettra l'hypertextualisation poussée au maximum... en n'omettant pas de donner du sens à ce que l'on lit, pour décider mieux et vite.
J'affirme que tous les éditeurs juridiques ont pris le train, quand ils n'ont pas été la locomotive -finalement, Lexbase fut la première LegalTech disruptive, fin des années 90, en proposant des bases de données sur internet aux grandes heures du papier et en misant sur le développement informationnel de la jurisprudence sur fond d'hégémonie des codes législatifs et réglementaires-, non seulement parce qu'ils en ont les ressorts, mais d'autant plus qu'ils en ont les moyens structurels, humains et financiers.
De la même manière que les éditions Lamy, avec le Bulletin des Transports, sont nées au service de la Ligue commerciale et industrielle pour l'amélioration des conditions de travail et de transport par chemin de fer, la "pragmatique sanction" des éditeurs juridiques du XXIème siècle sera de sacrifier, d'abord au Big Data -l'ouverture des bases de données éditoriales Dalloz au grand public est un premier pas remarquable ; la publication d'une conciergerie multi-servicielle peut, elle, laisser plus perplexe-, puis au smart knowledge ou algorithmisation éditoriale, pour relever les défis de la modernisation du marché documentaire juridique... chemin que Lexbase a d'ores et déjà choisi d'emprunter tout en consolidant sa base doctrinale ; la publication récente d'une édition spéciale "J21" et d'une encyclopédie en droit rural en sont encore un témoignage évident.
"Il faut être absolument moderne", versifiait Rimbaud.
Alors, que la fête commence !
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Réf. : Cass. civ. 1, 14 décembre 2016, n° 15-27.349, F-P+B (N° Lexbase : A2178SXX)
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Le 30 Décembre 2016
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par Hervé Haxaire, ancien Bâtonnier, Avocat à la cour d'appel, Président de l'Ecole régionale des avocats du Grand Est (ERAGE), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition professions
Le 30 Décembre 2016
La représentation est rendue obligatoire devant les chambres sociales des cours d'appel.
L'idée était bonne. Mais de quelle représentation obligatoire est-il question, et selon quelle procédure ?
Le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail instaure, d'une part, la représentation obligatoire devant la chambre sociale de la cour d'appel en cas d'appel d'une décision du conseil des prud'hommes, d'autre part, et à peine d'irrecevabilité relevée d'office, la remise des actes de procédure par voie électronique à la juridiction, c'est-à-dire la mise en oeuvre de la procédure avec représentation obligatoire.
Faut-il comprendre que nous serions en présence d'une réforme simplificatrice instituant, au niveau des cours d'appel, une représentation obligatoire par avocat comparable à celle qui fut instituée au profit des avocats aux Conseils devant la Chambre sociale de la Cour de cassation par le décret n° 2004-836 du 20 août 2004, portant modification de la procédure civile (N° Lexbase : L0896GTD) ?
Si l'on se réfère au rapport d'activité de la Chambre sociale de la Cour de cassation pour l'année 2005, et alors que le décret n° 2004-836 du 20 août 2004, portant modification de la procédure civile (N° Lexbase : L0896GTD) applicable au 1er janvier 2005 n'avait pas encore pu produire tous ses effets pour cette année 2005 (en raison de la poursuite des dossiers en cours selon la procédure antérieure sans représentation obligatoire), l'entrée en vigueur de cette réforme a eu pour effets d'entraîner une diminution du nombre des pourvois (30 %), une diminution de la durée moyenne de traitement des procédures terminées par un arrêt, et une augmentation du nombre des arrêts rendus (16,5 % par rapport à l'année précédente).
Nous pourrions, mais ce serait un autre débat, nous interroger sur l'opportunité d'une réforme qui a éloigné le justiciable de son juge, fût-il suprême, par l'instauration d'un filtre autant procédural que financier.
Il reste que d'un point de vue purement statistique, la réforme instituant la représentation obligatoire par un avocat aux Conseils devant la Chambre sociale de la Cour de cassation a apporté la démonstration que l'avocat pouvait tout à la fois, déconseiller des recours voués à l'échec, et se révéler un facilitateur du travail des magistrats.
Dès lors, il n'était pas incongru de penser que la réforme de la représentation devant les chambres sociales des cours d'appel, issue du décret du 20 mai 2016, aurait pu être calquée sur celle instituée par le décret du 20 août 2004, relative à la Chambre sociale de la Cour de cassation.
Pourquoi faire simple lorsque l'on peut faire compliqué ?
L'article 28 du décret du 20 mai 2016 dispose que : "A défaut d'être représentées par la personne mentionnée au 2° de l'article R. 1453-2 (N° Lexbase : L2640K8B), les parties sont tenues de constituer avocat".
La personne mentionnée à l'article R. 1453-2 du Code du travail étant le défenseur syndical.
On ne peut mieux dire que la représentation par avocat a, au moins sur un plan formel, un caractère subsidiaire par rapport à la représentation par un défenseur syndical. Il faut, cependant, s'étonner que, dans la matière du droit du travail profondément réformée par le recours autoritaire à l'article 49.3 de la Constitution, les pouvoirs publics consacrent ainsi, et néanmoins, le rôle éminent des syndicats dans la justice prud'homale en appel. Sauf à penser que cette consécration serait en réalité une compensation à un dialogue social tellement vanté et pourtant tellement malmené ?
Le représentant d'une partie, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.
Le défenseur syndical apparaît comme un acteur nouveau dans la procédure prud'homale, lequel ne doit pas être confondu avec le délégué syndical qui, dans les procédures introduites avant le 1er août 2016, avait qualité pour représenter ou assister les parties devant le conseil de prud'hommes et devant la chambre sociale de la cour d'appel.
L'article D. 1453-2-1 (N° Lexbase : L3783K9Y), créé par le décret n° 2016-975 du 18 juillet 2016 (N° Lexbase : L3694K9P), dispose que le défenseur syndical doit être inscrit sur une liste établie par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, sur proposition des organisations d'employeurs et de salariés mentionnées à l'article L. 1453-4 du Code du travail (N° Lexbase : L5961KGU).
Ces dernières désignent des défenseurs syndicaux au niveau régional en fonction de leur expérience des relations professionnelles et de leurs connaissances du droit social.
Le défenseur syndical exerce ses fonctions à titre gratuit. Il est radié d'office de la liste par le préfet de région en cas de défaut d'exercice de sa fonction à titre gratuit (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-6 N° Lexbase : L3788K98).
Les défenseurs syndicaux sont inscrits sur la liste de la région de leur domicile ou du lieu d'exercice de leur activité professionnelle.
Ainsi, cette liste des défenseurs syndicaux est arrêtée dans chaque région par le préfet de région et publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de région (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-3 N° Lexbase : L3785K93).
L'inscription sur cette liste permet l'exercice de la fonction de défenseur syndical dans le ressort des cours d'appel de la région (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-4 N° Lexbase : L3786K94), sauf l'hypothèse où le défenseur syndical a assisté ou représenté la partie appelante ou intimée en première instance, puisque le défenseur syndical pourra alors continuer à assister ou représenter celle-ci devant une cour d'appel qui a son siège dans une autre région (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-4 N° Lexbase : L3786K94).
Nous pouvons supposer que le fait qu'un défenseur syndical accomplisse des actes de procédure, dont au premier chef la déclaration d'appel, sans être régulièrement inscrit sur la liste des défenseurs syndicaux au jour de leur accomplissement, ou sans être titulaire d'un pouvoir de représentation ayant date certaine (ce qui supposerait qu'il en soit justifié concomitamment à l'acte d'appel ou à l'acte de constitution), entraînera la nullité de ces actes.
La consultation du recueil des actes administratifs de la préfecture de région pourrait à cet égard constituer une mesure de précaution utile pour toute partie à la procédure d'appel.
Bien que le défenseur syndical ne puisse pas être rémunéré, il n'en reste pas moins un mandataire. A ce titre, il est susceptible d'engager sa responsabilité civile professionnelle.
Les dispositions du décret du 18 juillet 2016 n'instaurent à son égard aucune obligation de justifier de la souscription d'une assurance au titre de son activité de mandataire, ce qui laisse présager que naîtront des contentieux en cas de sinistres, et des situations bien difficiles pour une partie dont le représentant ne sera pas assuré, ou pour le défenseur s'il a un quelconque patrimoine.
Ainsi donc vont coexister, devant les chambres sociales des cours d'appel, deux types de représentants obligatoires, le défenseur syndical et l'avocat, soumis l'un et l'autre aux mêmes dispositions du Code de procédure civile, mais seul l'avocat étant astreint à justifier de la souscription d'une assurance au titre de sa responsabilité civile professionnelle et au titre des maniements de fonds, et seul astreint à des règles déontologiques.
Les règles de la confidentialité des échanges entre avocats ne s'appliqueront pas davantage aux échanges entre l'avocat et le défenseur syndical, ce qui ne sera pas de nature à favoriser des pourparlers. Certes, la situation était la même lorsque les parties se défendaient elles-mêmes ou étaient représentées par un délégué syndical. Mais le propre d'une réforme n'est-il pas d'introduire des progrès ?
En somme, deux types de représentants devant la cour d'appel ayant des droits et des obligations différents.
S'agit-il là des seules différences qui existeront entre ces deux représentants des parties devant les chambres sociales des cours d'appel ?
Pourquoi faire simple lorsque l'on peut faire compliqué ?
L'article 30 du décret du 20 mai 2016 institue des règles différentes selon que le représentant d'une partie est avocat ou défenseur syndical.
Au titre VI du livre II du Code de procédure civile, après l'article 930-1 (N° Lexbase : L0362ITL), il est inséré un article 930-2 (N° Lexbase : L2619K8I) ainsi rédigé : "Les dispositions de l'article 930-1 ne sont pas applicables au défenseur syndical. Les actes de procédure effectués par le défenseur syndical peuvent être établis sur support papier et remis au greffe. Dans ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué".
Rappelons que l'article 930-1 du Code de procédure civile, applicable aux seuls avocats, dispose que : "A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique. Lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe. En ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué. Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l'expéditeur. Un arrêté du Garde des Sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique".
Vont donc, non seulement coexister mais bien pire, s'enchevêtrer, des règles procédurales différentes selon qu'une ou plusieurs parties seront représentées par un avocat et/ou par un défenseur syndical : communication électronique pour l'avocat et communication papier pour le défenseur syndical dans leurs rapports avec la juridiction, communication électronique dans les rapports entre avocats, mais communication électronique et communication papier dans les rapports entre l'avocat et le défenseur syndical, et dans les rapports entre avocats exerçant dans les ressorts de cours d'appel différentes.
Cette complexification est-elle purement anecdotique ? Hélas non.
L'article 29 du décret du 20 mai 2016, modifiant l'article R. 1461-2 du Code du travail, dispose que la procédure devant la chambre sociale de la cour d'appel est désormais une procédure avec représentation obligatoire.
Sont donc applicables, depuis le 1er août 2016 au procès prud'homal en appel, les dispositions des articles 899 (N° Lexbase : L0369ITT) à 930 du Code de procédure civile, dont notamment celles des articles 908 (N° Lexbase : L0390IGK), 909 (N° Lexbase : L0163IPQ) et 910 (N° Lexbase : L0412IGD) instituant, à peine de caducité de l'appel ou d'irrecevabilité des conclusions, les délais impératifs de trois et deux mois.
Il apparaît là que la complexité nouvelle des notifications d'actes entre avocats appartenant à des barreaux situés dans des cours d'appel différentes, ou entre avocats et défenseurs syndicaux, va imposer le respect de règles différentes selon les cas de figure envisagés :
- lorsque l'appelant et l'intimé seront représentés l'un et l'autre par un avocat du ressort de la même cour, il n'y aura pas de difficulté. L'un et l'autre pourront conclure au plus tard le dernier jour du délai des articles 908 à 910 par la voie de la communication électronique (le RPVA), aussi bien avec la cour qu'avec l'avocat adverse ;
- lorsque l'avocat aura pour contradicteur un défenseur syndical, ou un avocat du ressort d'une autre cour (sauf l'hypothèse où ce dernier aura mandaté un avocat "postulant" devant la cour saisie du litige), les actes devront être signifiés entre eux par acte d'huissier, en ce y compris le bordereau de pièces. Ce qui ne dispensera pas l'avocat du ressort de la cour saisie du litige de remettre les actes de procédure à la juridiction, à peine d'irrecevabilité, par la voie électronique.
Dans ceux bien sûr édictés par les articles 908 à 910 précités, c'est-à-dire trois mois pour le représentant de l'appelant à compter de la déclaration d'appel, deux mois pour le représentant de l'intimé à compter de la notification des conclusions de l'appelant, et deux mois au représentant de l'appelant en cas d'appel incident ou d'appel provoqué.
Mais ATTENTION : si la communication électronique permet en toutes matières à l'avocat de conclure devant la cour, le cas échéant, le dernier jour des délais précités puisque la juridiction comme le représentant de la partie adverse reçoivent cette communication en temps réel, tel n'est pas le cas en matière sociale.
La signification des actes de procédure par voie d'huissier devra intervenir au plus tard le dernier jour des délais des articles 908 à 910.
Les délais seront donc ceux des articles du Code de procédure civile... diminués du temps nécessaire à la signification des actes par huissier.
Rappelons encore que l'article 902 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0377IT7), auquel il est renvoyé pour un examen plus complet, impose au représentant de l'appelant d'assigner l'intimé, qui n'a pas constitué un représentant devant la cour, dans le délai d'un mois à compter de l'avis adressé par le greffe, à peine de caducité de l'appel.
A ce stade de notre réflexion, une pensée s'impose pour les justiciables qui perdront leur procès en appel pour une simple question de procédure, sans examen au fond de leur cause, lorsque par malchance pour eux, ils ne seront pas représentés l'un et l'autre par un avocat du ressort de la même cour communiquant entre eux par la voie électronique. Ayons également une pensée pour les justiciables dont le représentant ne sera pas soumis à une obligation d'assurance.
Nous avons rappelé que la définition même de la postulation était la représentation obligatoire par avocat.
Qu'advient-il lorsqu'un décret institue une exception à la règle de la postulation dans une procédure avec représentation obligatoire ? Un grand désordre.
Peu importent la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dite loi "Macron", et le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, ainsi que les dispositions du Code de procédure civile relatives à la postulation. Ne nous embarrassons pas de ce concept antédiluvien de la hiérarchie des normes alors que, nous l'avons vu, le décret du 20 mai 2016 nous propulse dans le monde du futur, de la modernité, et de la simplification.
La réponse à la question nous est donnée par le "ministère de la Justice" (cf. la fiche d'information technique diffusée par le Conseil national des barreaux le 27 juillet 2016 - page 5) : "Le ministère de la Justice a considéré que le régime de la postulation territoriale n'était pas applicable devant les cours d'appel statuant en matière prud'homale, y compris en Alsace-Moselle, dans la mesure notamment où il échappe au monopole général d'assistance et de représentation par avocat puisque 'le défenseur syndical peut exercer des fonctions d'assistance ou de représentation devant les conseils de prud'hommes et les Cours d'appel en matière prud'homale' (C. trav., nouvel art. L. 1453-4 N° Lexbase : L5961KGU - loi du 6 août 2015, art. 258)".
Aux lecteurs qui resteraient frileusement attachés à la notion de hiérarchie des normes, nous ne pouvons que leur conseiller de s'interroger sur la valeur respective d'un avis du "ministère de la Justice" et celles de la loi et du décret.
Selon que vous serez moderne ou ancien, vous pourrez donc considérer, ou non, que dans une procédure avec représentation obligatoire, l'avocat qui représente une partie devant la chambre sociale d'une cour d'appel en étant soumis à toutes les règles de cette procédure avec représentation obligatoire postule ou non.
En page 4 de la fiche d'information en date du 27 juillet 2016, le Conseil national des barreaux écrit, sous le titre "Le cas particulier de l'Alsace-Moselle" : "Le ministère de la Justice a considéré que l'article 8 de la loi du 20 février 1922 sur l'exercice de la profession d'avocat et la discipline des barreaux en Alsace et en Lorraine, qui instaure un régime spécifique de postulation devant les cours d'appel de Metz et Colmar, n'a pas été abrogé par l'article 51 de la loi du 6 août 2015, dite loi 'Macron'".
Notons incidemment que, nonobstant l'avis du ministère de la Justice, la loi du 20 février 1922 s'applique en Alsace et en Moselle, et non en Alsace et en Lorraine.
La question qui reste posée, malgré l'avis du ministère de la Justice, est celle de savoir si l'avocat alsacien ou l'avocat mosellan postulait et postule, y compris, devant la chambre sociale des cours d'appel de Metz ou de Colmar en vertu de la loi de 1922, abrogée ou non par la loi "Macron".
Dans un arrêt en date du 21 octobre 2016 (CE 6° ch., 21 octobre 2016, n° 401741 N° Lexbase : A7048R9W), le Conseil d'Etat, saisi notamment d'une demande d'annulation pour excès de pouvoir des articles 28, 29 et 30 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, a rejeté cette demande au motif en particulier que : "[...] les articles 28, 29 et 30 du décret attaqué ont pour objet, à compter du 1er août 2016, de rendre obligatoire en appel la représentation des parties par tout avocat ou par un défenseur syndical ; qu'elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'étendre, à compter de cette date, les règles de postulation prévues respectivement par l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 et par l'article 8 de la loi du 20 février 1922 aux procédures d'appel devant la chambre sociale de la cour d'appel d'un jugement d'un conseil de prud'hommes".
Le Conseil d'Etat a donc rendu une décision sensiblement différente de l'avis du ministère de la Justice, tel que rapporté par le Conseil national des barreaux dans sa fiche d'information du 27 juillet 2016. Ce qui nous conduit à considérer que ceux que nous appelons "les anciens", c'est à dire ceux qui privilégient l'analyse de la loi et du décret à l'avis du "ministère de la Justice", ont sans doute raison de faire preuve d'un tel conservatisme.
Ce qui nous amène à conseiller aux avocats peu familiarisés avec la procédure d'appel, soit de s'en pénétrer par une étude approfondie, soit de faire preuve de la plus grande prudence.
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Réf. : Cass. civ. 1, 14 décembre 2016, n° 16-12.686, F-P+B (N° Lexbase : A2314SXY)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 15 décembre 2016, n° 389141, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A2382SXI)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : Cass. crim., 13 décembre 2016, deux arrêts, n° 16-82.176, FS-P+B+I (N° Lexbase : A2357SXL) et n° 16-84.794, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A2298SXE)
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Le 21 Janvier 2017
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Réf. : Cons. const., décision n° 2016-581 QPC du 5 octobre 2016 (N° Lexbase : A8087R4B) ; Cass. civ. 3, 24 novembre 2016, n° 15-20.971, F-D (N° Lexbase : A3558SLD) ; Cass. civ. 3, 24 novembre 2016, n°15-25.118, F-D (N° Lexbase : A3653SLU)
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par Pierre Tifine, Professeur à l'Université de Lorraine (UFR Droit, économie et administration de Metz), directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique, directeur adjoint de l'IRENEE
Le 30 Décembre 2016
Le Conseil constitutionnel est amené à trancher une question prioritaire de constitutionnalité concernant les articles L. 314-1 (N° Lexbase : L7428AC4) et L. 314-2 (N° Lexbase : L8177I4M) du Code de l'urbanisme, ainsi que l'article L. 521-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L8434HE4), qui mettent à la charge du bénéficiaire d'une opération d'aménagement une obligation de relogement des occupants des immeubles affectés par cette opération.
A l'origine, cette obligation de relogement avait été introduite par la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985, relative à la définition et à la mise en oeuvre de principes d'aménagement (N° Lexbase : L1060IRP) (1). Elle fait partie d'un ensemble de mesures protectrices des occupants, pouvant également être constituées par un droit au maintien dans les lieux, un droit à la réintégration ainsi qu'un droit de priorité ou de préférence concernant l'attribution de certains logements visés par les articles L. 423-1 (N° Lexbase : L8028I44) à L. 423-4 du Code de l'expropriation.
Le déclenchement de ces mécanismes, particulièrement de l'obligation de relogement, suppose que l'éviction de l'occupant soit liée à une opération d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L8581K9P). On rappellera que, selon ces dispositions, sont concernées les actions ou opérations d'aménagement qui "ont pour objet de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité et l'habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturel". Il faut aussi relever que les dispositions des articles L. 314-1 et suivants du Code de l'urbanisme s'appliquent également à l'hypothèse où l'acquisition de biens par la voie de la préemption est réalisée dans le cadre d'une opération d'aménagement.
Dans cette dernière hypothèse, au titre de l'article L. 314-1 du Code de l'urbanisme, c'est "la personne publique qui a pris l'initiative de la réalisation de l'une des opérations d'aménagement définies dans le présent livre ou qui bénéficie d'une expropriation" qui est tenue d'obligations vis-à-vis de l'occupant. Si les personnes publiques sont directement concernées par ces dispositions, les obligations visées par cet article peuvent également incomber à une personne privée propriétaire d'un immeuble acquis par la voie du droit de préemption urbain ou inclus dans une zone d'aménagement différé lorsque l'exécution des travaux nécessite l'évacuation des locaux par les occupants (2). De même, dans le cadre de la conclusion d'une concession ou d'une convention d'aménagement, les obligations incombant normalement à la personne publique peuvent être transférées à la personne privée cocontractante.
En application de l'article L. 521-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L8434HE4), auquel renvoie l'article L. 314-1 du Code de l'urbanisme, l'occupant bénéficiant d'une obligation de relogement est "le titulaire d'un droit réel conférant l'usage, le locataire, le sous-locataire ou l'occupant de bonne foi des locaux à usage d'habitation et de locaux d'hébergement constituant son habitation principale".
L'application effective de ces textes pose des difficultés dès lors que l'occupant de l'immeuble est un étranger en situation irrégulière. En effet, l'article R. 441-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L5982I83) prévoit que seules "les personnes physiques séjournant régulièrement sur le territoire français dans des conditions de permanence définies par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'immigration, du ministre chargé des affaires sociales et du ministre chargé du logement" peuvent se voir attribuer un logement social. Quant au relogement dans des logements privés, il est rendu difficile en raison des garanties habituellement demandées par les propriétaires privés. La seule solution envisageable dans ce cas consiste à recourir aux dispositions relatives à l'hébergement d'urgence, en application de l'article L. 345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L9049IZ8), qui reconnaît que "toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence". Mais puisqu'il s'agit d'hébergement temporaire, ces dispositions sont en contradiction avec celles des articles L. 314-1 et L. 314-2 du Code de l'urbanisme qui imposent des solutions pérennes.
S'agissant précisément de l'occupant de bonne foi visé par l'article L. 314-1, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la bonne foi doit être exclusivement appréciée du point de vue des rapports entre cet occupant et le propriétaire. Pour la Cour suprême, l'obligation de relogement relève de "l'ordre public social" et elle "s'applique de la manière la plus large pour tous les occupants de bonne foi". Le fait que l'occupant soit un étranger en situation irrégulière n'a donc aucune conséquence sur l'application des dispositions relatives à l'obligation de relogement (3).
C'est cette interprétation des textes par la Cour de cassation qui fait l'objet de la question prioritaire de constitutionnalité soumise au Conseil constitutionnel. En l'espèce, une société publique locale d'aménagement avait conclu en juillet 2010 un traité de concession avec la Ville de Paris. Elle avait ensuite acquis, en janvier 2016, un hôtel meublé occupé notamment par cinq personnes de nationalité étrangère dépourvues de titre de séjour.
La société considère que les dispositions combinées des articles L. 314-1, L. 314-2 du Code de l'urbanisme et de l'article L. 521-1 du Code de la construction et de l'habitation portent une atteinte disproportionnée au droit de propriété garanti par les articles 2 (N° Lexbase : L1366A9H) et 17 (N° Lexbase : L1364A9E) de la Déclaration de 1789. Plus spécialement, elle estime que l'obligation de relogement des occupants en situation irrégulière, telle qu'elle est exigée par la jurisprudence de la Cour de cassation, est impossible à mettre en oeuvre puisque l'article R. 411-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L7781ABS) réserve l'accès aux logements HLM aux français et aux étrangers en situation régulière. En outre, si le relogement devait se faire dans le secteur privé, le bailleur s'exposerait à des poursuites pénales conformément à l'article L. 622-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L8951IU3) punissant le délit d'aide au séjour irrégulier.
La question de la conformité des dispositions susvisées à l'article 17 de la déclaration de 1789 est rapidement écartée, dès lors que l'obligation de relogement qu'elles prévoient n'entraîne aucune privation de propriété.
S'agissant de la conformité de ces dispositions à l'article 2 du même texte, qui reconnaît "la propriété", il résulte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel que "les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi" (4). Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a déjà eu l'occasion de juger que "la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle" (5).
Ainsi, en adoptant les dispositions contestées, "le législateur a entendu protéger les occupants évincés et compenser la perte définitive de leur habitation du fait de l'action de la puissance publique". En conséquence, il convient de considérer que "l'obligation de relogement, en cas d'éviction définitive, met en oeuvre l'objectif de valeur constitutionnelle que constitue la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent". Certes, il existe des difficultés pratiques non négligeables dans les hypothèses où les occupants qui peuvent bénéficier de l'obligation de relogement sont des étrangers en situation irrégulière, mais pour le Conseil constitutionnel, "celles-ci ne sauraient être retenues pour l'examen de la constitutionnalité des dispositions contestées". Enfin, les juges soulignent que le fait de reloger dans le cadre et les conditions déterminées par l'article L. 314-2 du code de l'urbanisme ne saurait caractériser une infraction pénale. En conséquence, l'obligation de relogement prévue par ces dispositions ne saurait exposer à des poursuites pénales pour délit d'aide au séjour irrégulier. Les dispositions litigieuses sont ainsi déclarées conformes à la Constitution.
Dans un arrêt du 24 novembre 2016, la Cour de cassation apporte d'intéressantes précisions concernant la mise en oeuvre du droit de rétrocession prévu par l'article L. 12-6 du Code de l'expropriation alors en vigueur (N° Lexbase : L2915HLK) (6). En application de cet article, "si les immeubles expropriés en application du présent code n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, à moins que ne soit requise une nouvelle déclaration d'utilité publique".
Toutefois, l'exercice du droit de rétrocession se heurte à des obstacles qui ne se limitent pas à l'hypothèse où l'autorité compétente requiert une nouvelle déclaration d'utilité publique (7). En particulier, si la condition d'affectation à l'objet défini dans la déclaration d'utilité publique implique la réalisation, dans le délai de cinq ans, des opérations matérielles qui adaptent l'immeuble exproprié à sa destination d'utilité publique, le fait que ces opérations ne soient pas achevées constitue néanmoins un obstacle à l'exercice de ce droit. Certes, il est nécessaire que ces travaux soient suffisamment significatifs de la volonté de l'expropriant de donner à l'immeuble l'affectation prévue. Il a ainsi été jugé que la simple implantation de poteaux de football sur un terrain exproprié pour accueillir un stade est insuffisante, et cela d'autant plus qu'elle ne constitue pas un obstacle à la poursuite de l'exploitation agricole de la parcelle concernée (8). Il en va de même lorsque la parcelle a fait l'objet de simples opérations juridiques ou administratives, sans que des travaux aient débuté (9).
Une difficulté particulière se présente lorsque la déclaration d'utilité publique fixe à l'immeuble plusieurs destinations et qu'il n'a fait l'objet que d'une affectation partielle. Dans cette hypothèse, le Conseil d'Etat a pu considérer que la demande de rétrocession n'est pas recevable (10). De la même façon, il a été jugé que la réalisation d'un parking sur une partie d'un terrain exproprié en vue de la réalisation d'un groupe scolaire fait obstacle à une demande de rétrocession dès lors que ce parking est nécessaire au bon fonctionnement de l'école (11).
L'arrêt commenté apporte des précisions utiles sur cette question en rapportant la question de l'affectation partielle du bien à celle de la superficie de ce bien. En l'espèce, la déclaration d'utilité publique, en date du 2 mars 1992, avait pour objet la réalisation d'une retenue collinaire. L'état parcellaire précisait que la surface totale de la parcelle objet du litige est de 224 250 m², dont 10 822 m² avec emprise et 213 428 m² hors emprise. A la date où été formée la demande de rétrocession, la retenue collinaire dont font état à la fois la déclaration d'utilité publique et l'ordonnance d'expropriation a bien été effectuée. Toutefois, les requérants soutiennent que cette retenue n'occupe qu'environ 1 000 m² sur les 10 822 m² expropriés. Ainsi seuls moins de 10 % de la parcelle expropriée ont été réellement affectés à l'opération déclarée d'utilité publique. Or, il apparaît que le surplus de cette parcelle a fait l'objet d'un bail à construction au profit d'une société d'aménagement pour l'édification d'un ensemble de logements sociaux. Il était donc incontestable que même si l'objectif de la déclaration d'utilité publique avait été réalisé, la commune avait profité de l'expropriation pour réaliser sur la quasi-totalité de la parcelle une opération immobilière correspondant à un autre objectif.
La Cour de cassation considère que dans une telle hypothèse, l'affectation partielle du bien à sa destination ne constitue pas un obstacle à l'exercice du droit de rétrocession. Dès lors que le projet déclaré d'utilité publique n'occupait qu'un dixième de la surface du terrain exproprié et qu'un ensemble immobilier avait été édifié sur le surplus, le droit de rétrocession doit pouvoir être exercé sur ce surplus.
Si le juge de l'expropriation doit se placer au jour du jugement d'indemnisation pour apprécier l'état du marché et évaluer les biens, l'article L. 322-2 du Code de l'expropriation (N° Lexbase : L7994I4T) précise qu'est "seul pris en considération l'usage effectif des immeubles et droits réels immobiliers un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L. 1 (N° Lexbase : L7928I4E) ou, dans le cas prévu à l'article L. 122-4 (N° Lexbase : L7940I4T), un an avant la déclaration d'utilité publique ou, dans le cas des projets ou programmes soumis au débat public prévu par l'article L. 121-8 du Code de l'environnement (N° Lexbase : L6557I7Y) ou par l'article 3 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010, relative au Grand Paris (N° Lexbase : L4020IMT), au jour de la mise à disposition du public du dossier de ce débat". Le recours à la notion "d'usage effectif" vise à purger l'évaluation des hausses spéculatives que peut provoquer la perspective d'un changement d'utilisation de l'immeuble. C'est pour cela que le législateur à choisi de geler l'usage du bien à une date, dite date de référence, où le projet est présumé ne pas être connu.
Des règles particulières sont toutefois prévues dans le cas où l'immeuble exproprié est soumis à certaines réglementations d'urbanisme, particulièrement lorsqu'il s'agit d'un bien soumis au droit de préemption. Dans ce cas, ce sont les règles spécifiques visées par l'article L. 213-6 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L8208I4R), qui renvoie lui-même à l'article L. 213-4 a) du même code (N° Lexbase : L8209I4S), qui s'appliquent. Selon ces dispositions la date de référence est celle à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes rendant public, approuvant, révisant ou modifiant le plan d'occupation des sols ou approuvant, modifiant ou révisant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien (12).
En l'espèce, pour dire que les parcelles litigieuses étaient soumises au droit de préemption urbain et fixer la date de référence conformément aux dispositions de l'article L. 213-4 du code de l'urbanisme, la cour d'appel de Rennes avait retenu que le droit de préemption avait été instauré sur les zones d'urbanisation futures de la commune le 4 juin 1987.
Elle avait écarté le moyen soulevé par la requérante tiré du caractère non exécutoire de la décision instaurant un droit de préemption. Elle avait, en effet, relevé que le droit de préemption urbain avait été instauré le 4 juin 1987 sur les zones d'urbanisation future du précédent plan d'occupation des sols et qu'en conséquence ce droit existait déjà avant la révision du document d'urbanisme, le 31 janvier 2007. La délibération du même jour n'avait fait que le reprendre sur ce point.
Toutefois, les juges du fond avaient omis de constater que les biens expropriés étaient situés dans une zone d'urbanisation future délimitée par le précédent document d'urbanisme et donc effectivement soumis au droit de préemption urbain avant le 31 janvier 2007. Ainsi, la cour d'appel avait-elle privé sa décision de base légale au regard des articles L. 213-4 et L. 213-6 du Code de l'urbanisme et de l'article L. 322-2 du Code de l'expropriation.
(1) JO 19 juillet 1985.
(2) C. urb., art. L. 213-10 (N° Lexbase : L7392ACR).
(3) Cass. civ. 3, 4 novembre 2009, n° 08-17.381, FS-P+B (N° Lexbase : A8108EMA), Bull. civ. III, 2009, n° 243, JCP éd. G, 2010, doctr. 741, n° 41, obs. M. Huyghe ; Cass. civ. 3, 12 septembre 2012, n° 11-18.073, FS-P+B (N° Lexbase : A7491ISA), Constr. Urb., 2012, comm. 161, obs. X. Couton.
(4) V. notamment Cons. const., décision n° 2010-60 QPC du 12 novembre 2010 (N° Lexbase : A4179GGU) ; Cons. const., décision n° 2011-118 QPC du 8 avril 2011 (N° Lexbase : A5888HMZ).
(5) Cons. const., décision n° 94-359 DC du 19 janvier 1995 (N° Lexbase : A8323ACA).
(6) Dispositions actuellement codifiées aux articles L. 421-1 (N° Lexbase : L8022I4U) et suivants du Code de l'expropriation.
(7) Sur la conformité de ces dispositions à la Constitution, voir Cons. const., décision n° 2012-292 QPC du 15 février 2003 (N° Lexbase : A9638I74), Prat-Audemar, RD rur., 2013, comm. 103, note P. Tifine.
(8) CE, 26 mai 1976, n° 97797, Commune de Perrignier.
(9) CE, 16 décembre 1960, Ville de Brest, RPDA, 1961, n° 26.
(10) CE, 7 novembre 1969, AJDA, 1970, p. 167, note A. Homont.
(11) Cass. civ. 3, 11 mars 1992, n° 90-17.442 (N° Lexbase : A3158CRE), Ann. loyers, 1993, p. 44.
(12) Sur l'application des ces dispositions, voir par ex. Cass. civ. 3, 10 juillet 2002, n° 01-70.229, FS-P+B+I+R (N° Lexbase : A0931AZI), Bull. civ. III, 2002, n° 166, AJDI, 2002, p. 871, note R. Hostiou, JCP éd. G, 2002, IV, 2560, Defrénois, 2003, art. 13-14, p. 935, note S. Pérignon, JCP éd. G, 2002, II, 10196, note A. Bernard ; Cass. civ. 3, 11 octobre 2006, n° 05-13.053, n° 05-13.595, FS-P+B (N° Lexbase : A7768DR7), Bull. civ. III, 2006, n° 197, AJDA, 2006, p. 2301 ; Cass. civ. 3, 10 mai 2007, n° 05-20.623, FS-P+B (N° Lexbase : A1099DWM), Bull. civ. III, 2007, n° 76, AJDI, 2008, p. 135, note A. Lévy ; Cass. civ. 3, 28 janvier 2009, n° 08-10.333, FS-P+B (N° Lexbase : A9610ECW), RD imm., 2009, p. 223 et p. 348, obs. C. Morel.
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Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 15 décembre 2016, n° 401716, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A2413SXN)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : CE 8° et 3° ch.-r., 15 décembre 2016, n° 404270, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A2422SXY)
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Le 03 Janvier 2017
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Réf. : CE 4° et 5° ch.-r., 16 décembre 2016, n° 383111, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A2375SXA)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, de modernisation de la justice du XXIème siècle (N° Lexbase : L1605LB3)
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par Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble, membre de l'Institut universitaire de France, Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Procédure civile"
Le 30 Décembre 2016
Au milieu de nombreuses modifications techniques, nous présentons ici trois modifications importantes de procédure civile issues de la loi. D'abord, le renforcement et l'élargissement des modes alternatifs de règlement des litiges (I) ; ensuite, l'introduction d'un recours permettant le réexamen des décisions civiles en matière d'état des personnes, après une condamnation de la France par la CEDH (II) ; enfin, le déploiement substantiel des actions de groupe spécifiques et la création d'un régime général applicable à la plupart de ces actions (III).
I - Les modes alternatifs de règlement des litiges
La recherche d'une conciliation entre les parties est un processus très ancien qui a été mis en avant par tous les rapports préparatoires à la réforme. Les avantages sont bien connus : obtenir l'accord des parties plutôt que trancher un désaccord, alléger la charge contentieuse des juges, etc.. Les modes alternatifs recensés par le Code de procédure civile sont très nombreux : conciliation et médiation judiciaire ou extrajudiciaire, procédure participative, accord des parties débouchant sur une transaction. Les parties n'ont que l'embarras du choix pour tenter de s'entendre. Pourtant, la pratique de ces modes amiables est très faible, notamment devant le tribunal d'instance et la juridiction de proximité. L'étude d'impact a ainsi fait le constat que les affaires donnant lieu à une tentative de conciliation ne dépassent pas les 2,2 % dans ces juridictions. Devant le TGI, la part des injonctions de médiation ne dépasse pas 1,4 % des affaires (0,3 % devant les cours d'appel). Les procédures participatives sont plus rares encore. En 2013, cinq ont abouti devant les TGI et 39 devant les TI.
Pour renverser cette tendance du "tout contentieux", le législateur a tenté de développer, une nouvelle fois, les modes alternatifs allant parfois jusqu'à les imposer.
A - La conciliation obligatoire devant le tribunal d'instance
Au premier juillet 2017, le tribunal d'instance absorbera le contentieux de la juridiction de proximité, qui va disparaître. En application de la loi du 18 novembre 2016, lorsque ce tribunal est saisi par une déclaration au greffe -c'est-à-dire lorsque le montant du litige n'excède pas 4 000 euros- la saisine doit être précédée d'une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice (6). Cette procédure est imposée à peine d'irrecevabilité que le juge peut prononcer d'office. Toutefois, le recours au conciliateur de justice n'est pas le seul mode alternatif ouvert aux adversaires. Les parties sont dispensées de saisir un conciliateur de justice si elles ont déjà tenté de trouver un accord. Elles peuvent alors justifier de toute diligence entreprise en vue de parvenir à cet accord ou en demander l'homologation. Dès lors, toute tentative de résolution amiable satisfait aux conditions de saisine du TI par déclaration au greffe. Par ailleurs, la loi prévoit une dérogation lorsque l'absence de recours à la conciliation est justifiée par un motif légitime. La jurisprudence devra éclairer cette notion qui pourrait être invoquée fréquemment devant les juges d'instance.
B - Extension du champ de la procédure participative
Instituée en 2010 et mise en oeuvre dans le Code de procédure civile à la suite du décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012, relatif à la résolution amiable des différends (N° Lexbase : L8264IRI), la procédure participative n'a rencontré aucun succès auprès des avocats. On peut avancer des hypothèses pour expliquer cet échec. Cette procédure d'origine américaine ne correspond pas à la culture française. D'abord, la procédure participative institue une procédure avant la saisine du juge et elle la confie aux avocats. La figure intermédiaire du juge est effacée. Ensuite, la procédure participative n'est pas secrète. Tous les actes réalisés ou échangés durant cette phase amiable peuvent être réutilisés devant le juge, dans une instance contentieuse. La rupture avec la tradition des modes de résolution amiable, protégés par le secret, s'avère dissuasive. Enfin, même si certains barreaux ont créé des formations dédiées, les avocats ne sont pas rompus à l'exercice qui consiste, dans une même procédure, à négocier et mettre l'affaire en l'état, en échangeant notamment des conclusions et pièces. De fait, l'opportunité d'utiliser cette nouvelle voie amiable a été délaissée.
Pour stimuler son utilisation, le législateur a étendu son champ d'application dans deux directions. D'une part, la convention de procédure participative peut, désormais, être conclue après la saisine du juge. D'autre part, cette convention peut être utilisée dans le but de mettre en état le litige. Dans cette perspective, l'article 2062 du Code civil (N° Lexbase : L2429LBL) est réécrit pour définir plus largement le contrat nommé que constitue la convention de procédure participative (7).
La réforme est ici tout à fait mineure et on peut sérieusement douter de son impact sur la pratique. Le législateur s'est fondé sur l'idée que la convention de procédure participative a plus de chance d'être conclue une foi le juge saisi. L'avenir permettra de vérifier cette idée, mais il apparaît tout de même que la conclusion d'une telle convention constitue un retour en arrière pour les parties qui ont saisi le juge. Si, pour le demandeur, l'exercice de l'action en justice peut avoir pour but d'exercer une pression sur l'adversaire, il est douteux que le défendeur y voie une occasion de conclure un accord avec son contradicteur. Quant à l'idée d'utiliser la convention de procédure participative pour mettre l'affaire en état d'être jugée, là encore, on peut douter de l'efficacité d'un tel processus qui alourdira la charge des parties. On ne voit pas réellement l'intérêt pour les avocats de s'imposer par convention des obligations supplémentaires (des délais notamment) pour mettre en état l'affaire. Selon nous, l'échec de la procédure participative est surtout affaire de culture.
La modification légale de la procédure participative appelle des modifications réglementaires, qui auront pour but de définir le régime spécifique de la procédure participative après la saisine d'un juge. L'entrée en vigueur de ce dispositif est donc reportée.
C - Toilettage de la transaction
La transaction est un contrat nommé qui était déjà défini dans le Code civil de 1804. Le législateur a modernisé son régime en le nettoyant de dispositions surabondantes ou mal écrites et en consacrant les principales évolutions de la jurisprudence.
D'une part, la loi introduit une précision relative aux "concessions réciproques" qui constituent, selon la Cour de cassation, une condition de validité de la transaction (8). La définition du contrat à l'article 2044 du Code civil (N° Lexbase : L2431LBN) est ainsi étoffée (9).
D'autre part, l'effet de la transaction est formellement modifié. L'article 2052 (N° Lexbase : L2297ABP), qui disposait que "les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort", prévoit désormais que "la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet". Sur le fond, cette modification du texte ne change rien. L'autorité de la chose jugée constitue bien la fin de non-recevoir qui fait obstacle à l'exercice d'une action ayant le même objet entre les parties. Le législateur ne s'explique pas réellement sur les raisons de cette modification. L'objectif de clarification vise surtout, à notre sens, à effacer l'expression "autorité de la chose jugée" qui doit être attachée à une décision de justice.
Il n'en reste pas moins que, sans le dire, et même sans l'avoir vu, le législateur a confirmé ici une dérogation à l'article 1210 du Code civil (N° Lexbase : L0928KZE) qui prohibe les engagements perpétuels. En interdisant aux parties d'exercer une action en justice, la transaction possède un effet définitif qui les contraint à respecter l'accord ad vitam aeternam.
D - Ouverture de l'arbitrage aux non-professionnels
La convention d'arbitrage fait l'objet de quelques modifications formelles. Ainsi, le compromis et la clause compromissoires sont désormais regroupés dans un titre du Code civil intitulé "de la convention d'arbitrage" (10). Ces deux types de convention étaient réservés aux relations entre professionnels. Désormais, l'article 2061 du Code civil (N° Lexbase : L2433LBQ) dispose que "lorsque l'une des parties n'a pas contracté dans le cadre de son activité professionnelle, la clause ne peut lui être opposée". La formule n'est pas claire, mais la lecture des travaux parlementaire permet d'en comprendre le sens. Si un particulier souhaite confier son litige à un professionnel, il peut faire valoir la clause compromissoire introduite dans son contrat. En revanche, le professionnel ne peut opposer cette clause au non-professionnel si ce dernier en refuse l'application. Le particulier dispose finalement d'une option entre la juridiction arbitrale et la juridiction judiciaire (cf. D. Vidal, Justice du XXIème siècle : l'impact de l'article 11 alinéa 3 de la loi de modernisation de la Justice du XXIème sur le domaine de l'arbitrage, Lexbase éd. privé, 2016, n° 681 N° Lexbase : N5777BWU).
II - Le réexamen des décisions civiles en matière d'état des personnes
Depuis la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000, renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes (N° Lexbase : L0618AIQ), la procédure pénale connaît une voie de recours spécifique qui consiste dans la possibilité de faire réexaminer une condamnation pénale, à la suite d'un arrêt rendu par la CEDH. Cette procédure est aujourd'hui proche de celle du recours en révision (11). Certains plaideurs avaient tenté d'étendre le domaine de cette voie de recours à la matière civile, mais ils avaient rencontré une opposition frontale de la Cour de cassation (12), le Conseil d'Etat s'étant montré plus accueillant (13).
La loi du 18 novembre 2016 duplique la procédure de réexamen des décisions en procédure civile, mais elle en réduit considérablement le champ, puisque ce réexamen ne peut avoir lieu que pour les décisions civiles définitives rendues en matière d'état des personnes. On peut supposer que cette restriction fait référence au contentieux civil des personnes (changement de sexe par exemple), mais également à une partie du contentieux familial (celui de la filiation). Ce dispositif doit entrer en vigueur après la publication d'un décret d'application et au plus tard six mois après la promulgation de la loi. Il s'appliquera de façon rétroactive et tiendra donc compte des condamnations prononcées par la CEDH avant son entrée en vigueur.
En application du nouveau régime, le réexamen d'une décision civile définitive relative à l'état des personnes peut intervenir après une condamnation de la France par la CEDH ; dès lors que la violation constatée par la Cour européenne, "par sa nature et sa gravité", entraîne, pour la personne, des conséquences dommageables auxquelles la satisfaction équitable accordée en application de l'article 41 de la CESDH (N° Lexbase : L4777AQY) ne pourrait mettre un terme (14). Le recours doit être porté devant une juridiction spécifique -la Cour de réexamen- qui est distincte de la juridiction compétente en matière pénale. Cette juridiction est composée de treize magistrats issus de toutes les chambres de la Cour de cassation et présidée par le doyen des présidents de chambres. Les magistrats, qui ont déjà connu l'affaire avant les décisions de la CEDH, ne peuvent siéger. Le délai de recours est d'un an à compter de la décision de la CEDH. La qualité pour agir est étendue, puisque le recours peut être exercé, non seulement par la partie intéressée, mais également -en cas de décès de celle-ci- par un conjoint, partenaire pacsé, concubin, par un descendant ou par un légataire universel ou à titre universel.
La décision peut prendre plusieurs formes. Si la demande est manifestement irrecevable, le président le rejette par une ordonnance motivée insusceptible de recours. Si le recours est simplement mal fondé, c'est à la Cour qu'il appartient de le rejeter. Si la demande est fondée, la décision de la Cour présente encore des variations selon que le requérant sollicite l'annulation d'une décision ou le réexamen de son pourvoi en cassation. Dans le premier cas, la décision de la juridiction du fond qui a été prise en violation de la CEDH est annulée. La Cour de réexamen renvoie le requérant devant une autre juridiction du même ordre et de même degré. Dans le second cas, la Cour renvoie le requérant devant l'Assemblée plénière de la Cour de cassation pour que cette dernière examine son pourvoi.
III - Le déploiement de l'action de groupe
L'action de groupe est née en droit français à l'issue d'une très longue gestation à travers le prisme du droit de la consommation (15). C'est la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, relative à la consommation (N° Lexbase : L7504IZX) qui, la première, a intégré cette action particulière dans notre système juridique (16). En 2016, ce régime a été étendu et adapté à l'action de groupe en matière de santé (17).
La loi "J21" déploie le mécanisme de l'action de groupe de deux façons. D'une part, elle en étend le champ d'application en créant de nouvelles actions spéciales en matière de discrimination, en matière environnementale, et en matière de protection de données à caractère personnel. D'autre part, elle crée un régime général de l'action de groupe, tant devant le juge judiciaire que devant le juge administratif.
A - Organisation générale des différentes actions de groupes
Le droit applicable aux actions de groupe se scinde donc aujourd'hui en plusieurs ensembles.
L'intention du législateur a été précisément de distinguer l'action de groupe en droit de la consommation et le régime général des autres actions. La première est destinée à régler des contentieux de masse dont les préjudices sont facilement identifiables, répétitifs et souvent de faible montant. Dans ce contexte, l'action de groupe vise à permettre aux justiciables d'obtenir collectivement ce qu'ils n'obtiendraient pas individuellement. Dans les autres domaines (santé, environnement, discriminations), les actions individuelles sont très développées et l'action de groupe ne vise pas à s'y substituer. L'objectif législatif consiste plutôt à faciliter la preuve des faits et "rationaliser le contentieux" (20). Pour cette raison, le régime général de l'action de groupe, s'il s'inspire de l'action en droit de la consommation, s'en distingue également sur de nombreux points.
Les nouvelles dispositions instituant le régime général et les actions spéciales s'appliquent aux actions dont le fait générateur est postérieur à l'entrée en vigueur de la loi.
B - Régime général de l'action de groupe
Si l'action de groupe est "introduite et régie" selon les règles du Code de procédure civile (21), la loi définit un régime général qui demeure extérieur à ce code (22). Pour assister les parties dans l'exercice de cette action, l'avocat doit donc jongler entre plusieurs textes : les règles de procédure civile, le droit commun de l'action de groupe inscrit dans la loi, et enfin, les règles propres à chaque action à rechercher dans des textes spéciaux.
Le cadre commun n'ouvre pas un droit généralisé à l'exercice d'une action de groupe. L'article 60 de la loi établit une liste limitative d'actions qui peuvent être exercées. Ce cadre commun n'a donc vocation à s'appliquer que si une action spéciale est ouverte. Sous cette réserve, l'action de groupe est définie de façon très générale par l'article 62, alinéa 1 : "Lorsque plusieurs personnes placées dans une situation similaire subissent un dommage causé par une même personne, ayant pour cause commune un manquement de même nature à ses obligations légales ou contractuelles, une action de groupe peut être exercée en justice au vu des cas individuels présentés par le demandeur".
L'alinéa 2 du même article précise que l'action peut être intentée soit en cessation du manquement, soit pour obtenir réparation du préjudice consécutif à ce manquement (action en responsabilité), soit poursuivre ces deux finalités.
L'action de groupe se caractérise par une définition limitative de la qualité pour agir. Seules les associations agréées ou déclarées depuis cinq ans, qui comportent dans leurs statuts la défense d'intérêts auxquels il est porté atteinte, peuvent exercer une action de groupe. Cette qualité est élargie dans les relations de travail, puisque les organisations syndicales représentatives peuvent également exercer l'action de groupe (23). Les associations ou organisations qui disposent de la qualité pour agir sont définies dans les dispositions spécifiques prévues pour chaque type d'action. Par exemple, en matière de discrimination, peuvent agir les associations régulièrement déclarées depuis cinq ans au moins intervenant dans la lutte contre les discriminations ou oeuvrant dans le domaine du handicap.
L'action de groupe, exercée sur un fondement de droit privé, relève de la compétence exclusive du tribunal de grande instance. Lorsqu'elle implique l'application du droit administratif, elle est exercée devant le tribunal administratif selon une procédure définie par le Code de justice administrative.
La procédure de l'action de groupe est ensuite déclinée par la loi. Elle se divise de façon très inégalitaire selon que l'action est exercée en cessation du manquement, ou en réparation des préjudices.
Dans le premier cas, la loi se contente de préciser que le juge qui constate un manquement peut enjoindre au défendeur "de cesser ou de faire cesser ledit manquement et de prendre, dans un délai qu'il fixe, toutes les mesures utiles à cette fin, au besoin avec l'aide d'un tiers qu'il désigne". La loi reconnaît ici une action spécifique en cessation de l'illicite.
Dans le second cas, la réparation des préjudices par la voie de l'action de groupe suit une voie particulièrement complexe qui se divise en deux grandes étapes : le jugement sur la responsabilité et la procédure de mise en oeuvre de la réparation.
Le jugement sur la responsabilité doit trancher un très grand nombre de questions liées au caractère collectif de l'action. Il doit statuer d'abord sur la "responsabilité du défendeur". L'expression est ici mal choisie, car la responsabilité dépend tant du fait générateur que de l'existence de dommages et d'un lien de causalité. Or, au stade du jugement, seul le manquement du défendeur peut être mis en évidence avec certitude. Les préjudices subis par le groupe ne sont pas encore établis puisque les membres du groupe ne se sont pas manifestés. La responsabilité est donc constatée sur le seul fondement de "cas typiques" (24) qui sont présentés au juge.
Si le principe de la responsabilité est reconnu par la juridiction, le juge doit ensuite fixer les critères de rattachement au groupe, les préjudices susceptibles d'être réparés, les délais d'adhésion au groupe. Il doit encore définir les mesures de publicité du jugement qui seront à la charge du défendeur pour informer les victimes (après épuisement des recours).
L'exercice de l'action de groupe peut rencontrer des situations très différentes. Lorsque la demande en réparation porte sur des préjudices qui dépendent des caractéristiques de chaque membre du groupe, l'évaluation de ces préjudices doit se faire de façon individualisée. Il en est ainsi des préjudices corporels ou professionnels, qui varient très fortement d'un individu à l'autre, même si le fait générateur de responsabilité est identique. La mise en oeuvre du jugement suit alors une procédure individuelle de réparation des préjudices. A l'inverse, si l'action en responsabilité vise à réparer des préjudices matériels répétitifs, le juge peut décider de recourir à une procédure collective de liquidation des préjudices. La procédure collective est exclue dans certains types d'actions. Par exemple, en matière de discrimination imputable à un employeur, l'article L. 1134-10 du Code du travail (N° Lexbase : L5904LBB) dispose que "lorsque l'action tend à la réparation des préjudices subis, elle s'exerce dans le cadre de la procédure individuelle de réparation".
Lorsqu'aucune procédure collective de liquidation n'a été ordonnée par le juge, il appartient aux personnes qui souhaitent adhérer au groupe de se manifester, soit directement auprès de la personne déclarée responsable, soit auprès de la personne morale qui a exercé l'action (association, syndicat). Dans le second cas, la victime donne mandat à la personne morale de la représenter en justice. Une fois le groupe constitué, la personne déclarée responsable doit faire une proposition d'indemnisation individuelle à chacun des membres du groupe. En cas de litige, une nouvelle action peut être exercée concernant l'évaluation des préjudices individuels. Cette action peut être exercée, soit par chacun des membres du groupe, soit par la personne morale qui a reçu mandat de représenter certains membres en justice.
Dans cette procédure, qui porte uniquement sur le préjudice de chaque membre du groupe et sur le lien de causalité avec le manquement constaté, les victimes ont ainsi fait le choix d'agir à titre individuel ou au contraire de confier l'exercice de leur action à la personne morale demanderesse. A l'égard de ces victimes, le seul intérêt de l'action de groupe consiste à pouvoir bénéficier d'une décision définitive sur le fait générateur de responsabilité. Leur fardeau probatoire est allégé, ainsi que le risque inhérent à toute action en justice.
Lorsque les préjudices sont sériels, le juge peut décider, dans le premier jugement, de mettre en oeuvre une procédure collective de liquidation des préjudices. Cette procédure se déroulera entre les mêmes parties : la personne morale demanderesse et le défendeur dont la responsabilité est déclarée. Le demandeur est alors habilité à négocier avec le défendeur sur l'indemnisation du préjudice subi par chaque membre du groupe. Les préjudices étant sériels, le juge fixe le montant de ces préjudices, ou les critères de calculs permettant d'individualiser les indemnisations. Il détermine également le délai et les modalités de négociation et de paiement.
A partir de ce premier jugement, s'ouvre une procédure en trois temps. D'abord, les personnes intéressées peuvent se joindre au groupe et donner mandat à la personne morale demanderesse à l'action, pour négocier le montant de leur réparation. Ensuite, s'ouvre une période de négociation entre les parties. Enfin, à l'issue de la période accordée par le juge pour négocier, les parties doivent présenter un accord, même partiel, aux fins d'homologation. Cet accord doit avoir été accepté par tous les membres du groupe concerné.
Lorsqu'un accord total a été trouvé, le juge peut décider de l'homologuer ou à l'inverse refuser, si les intérêts des parties et des membres du groupe lui paraissent insuffisamment préservés. Lorsque l'accord présenté au juge est partiel, le juge qui décide de l'homologuer est également saisi aux fins de liquidation des préjudices subsistants.
A défaut d'accord dans le délai d'un an à compte du jour où la décision au fond a acquis force de chose jugée, la procédure collective échoue et chaque membre du groupe doit présenter une demande individuelle au juge en réparation de son préjudice. La mise en oeuvre du premier jugement suit alors la procédure individuelle de réparation des préjudices.
L'action de groupe suspend la prescription des actions individuelles, ce qui permet aux victimes d'attendre le résultat de cette action avant de se déterminer en faveur d'une action individuelle. Par ailleurs, les jugements qui portent, tant sur le principe de la responsabilité, que sur la liquidation des préjudices, n'ont autorité de la chose jugée qu'à l'égard des personnes dont le préjudice a été réparé à l'issue de la procédure. Cela signifie qu'une personne qui n'est pas membre du groupe n'est pas atteinte par l'autorité de la chose jugée. Il en est de même de la personne qui a participé à la procédure, mais qui a refusé la proposition d'indemnisation faite par la personne déclarée responsable. Enfin, les préjudices qui n'ont pas été compris dans le jugement sur la responsabilité peuvent faire l'objet d'une action en réparation distincte de l'action de groupe.
(1) Nos obs., in La Justice du XXIème siècle : rapports, débats et réformes à venir, Lexbase éd. priv., n° 560, 2014 (N° Lexbase : N0942BUG).
(2) Nos obs., in La Justice du XXIème siècle : petits arrangements avec la procédure, Lexbase éd. priv., n° 632, 2015 (N° Lexbase : N9828BUK).
(3) On pense en particulier au projet de créer un tribunal de première instance qui aurait regroupé en sons sein la plupart des juridictions civiles et aurait résolu de nombreuses difficultés liées à la compétence juridictionnelle.
(4) K. Bouleau, P. Didier, Réforme de la justice prud'homale issue de la loi "Macron" : le décret d'application est enfin publié, Lexbase éd. soc., n° 659, 2016 (N° Lexbase : N3222BWA).
(5) Loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016, relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu'au Conseil supérieur de la magistrature (N° Lexbase : L6579K9K). Cf. également l'article 15 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016.
(6) Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, art. 4.
(7) C. civ., art. 2062 : "La convention de procédure participative est une convention par laquelle les parties à un différend s'engagent à oeuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend ou à la mise en état de leur litige".
(8) Cf. par ex. Cass. soc., 13 juillet 2010, n° 09-40.984, FS-P+B (N° Lexbase : A6831E4R).
(9) "La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître".
(10) Anciennement intitulé "du compromis".
(11) C. pr. pén., art. 622 (N° Lexbase : L5444I3Z) et s..
(12) Cass. soc., 30 septembre 2005, n° 04-47.130, FS-P (N° Lexbase : A6001DKH) "Mais attendu que la décision du Comité des ministres du Conseil de l'Europe ou l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme dont il résulte qu'un jugement rendu en matière civile et devenu définitif a été prononcé en violation des dispositions de la Convention européenne de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ouvre aucun droit à réexamen de la cause".
(13) CE Contentieux, 30 juillet 2014, n° 358564, publié au Recueil Lebon N° Lexbase : A7889MUQ) à propos des sanctions administratives.
(14) Cf. COJ, art. L. 452-1 (N° Lexbase : L1821LB3) et s..
(15) Le rapport "Calais-Auloy" proposait dès 1990 l'instauration d'une action de groupe en droit de la consommation.
(16) Cf., une présentation synthétique du mécanisme dans notre Chronique de procédure civile du mois de mai 2014, Lexbase éd. priv., n° 572, 2014 (N° Lexbase : N2414BUX).
(17) Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016, de modernisation de notre système de santé (N° Lexbase : L2582KXW), cf. J. Perot, Trois mesures phares de la loi "santé" du 26 janvier 2016 : la recherche sur l'embryon, la suppression du délai de réflexion en matière d'interruption volontaire de la grossesse et l'action de groupe santé, Lexbase éd. priv., n° 644, 2016 (N° Lexbase : N1340BWK).
(18) Loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations est ainsi modifiée et loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (N° Lexbase : L8986H39).
(19) C. consom., art. L. 623-1 (N° Lexbase : L0812K79) et s..
(20) Etude d'impact de la loi, p. 153.
(21) Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, art. 61.
(22) Le Code de procédure civile, d'origine réglementaire, ne peut pas être modifié par le législateur.
(23) C. trav., art. L. 1134-7 (N° Lexbase : L5901LB8).
(24) Les "cas typiques" sont des cas de victimes individualisées qui sont présentés au juge dans le but d'établir l'existence d'un préjudice commun entre tous les membres du groupe.
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par Hervé Haxaire, ancien Bâtonnier, Avocat à la cour d'appel, Président de l'Ecole régionale des avocats du Grand Est (ERAGE), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition professions
Le 30 Décembre 2016
La représentation est rendue obligatoire devant les chambres sociales des cours d'appel.
L'idée était bonne. Mais de quelle représentation obligatoire est-il question, et selon quelle procédure ?
Le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail instaure, d'une part, la représentation obligatoire devant la chambre sociale de la cour d'appel en cas d'appel d'une décision du conseil des prud'hommes, d'autre part, et à peine d'irrecevabilité relevée d'office, la remise des actes de procédure par voie électronique à la juridiction, c'est-à-dire la mise en oeuvre de la procédure avec représentation obligatoire.
Faut-il comprendre que nous serions en présence d'une réforme simplificatrice instituant, au niveau des cours d'appel, une représentation obligatoire par avocat comparable à celle qui fut instituée au profit des avocats aux Conseils devant la Chambre sociale de la Cour de cassation par le décret n° 2004-836 du 20 août 2004, portant modification de la procédure civile (N° Lexbase : L0896GTD) ?
Si l'on se réfère au rapport d'activité de la Chambre sociale de la Cour de cassation pour l'année 2005, et alors que le décret n° 2004-836 du 20 août 2004, portant modification de la procédure civile (N° Lexbase : L0896GTD) applicable au 1er janvier 2005 n'avait pas encore pu produire tous ses effets pour cette année 2005 (en raison de la poursuite des dossiers en cours selon la procédure antérieure sans représentation obligatoire), l'entrée en vigueur de cette réforme a eu pour effets d'entraîner une diminution du nombre des pourvois (30 %), une diminution de la durée moyenne de traitement des procédures terminées par un arrêt, et une augmentation du nombre des arrêts rendus (16,5 % par rapport à l'année précédente).
Nous pourrions, mais ce serait un autre débat, nous interroger sur l'opportunité d'une réforme qui a éloigné le justiciable de son juge, fût-il suprême, par l'instauration d'un filtre autant procédural que financier.
Il reste que d'un point de vue purement statistique, la réforme instituant la représentation obligatoire par un avocat aux Conseils devant la Chambre sociale de la Cour de cassation a apporté la démonstration que l'avocat pouvait tout à la fois, déconseiller des recours voués à l'échec, et se révéler un facilitateur du travail des magistrats.
Dès lors, il n'était pas incongru de penser que la réforme de la représentation devant les chambres sociales des cours d'appel, issue du décret du 20 mai 2016, aurait pu être calquée sur celle instituée par le décret du 20 août 2004, relative à la Chambre sociale de la Cour de cassation.
Pourquoi faire simple lorsque l'on peut faire compliqué ?
L'article 28 du décret du 20 mai 2016 dispose que : "A défaut d'être représentées par la personne mentionnée au 2° de l'article R. 1453-2 (N° Lexbase : L2640K8B), les parties sont tenues de constituer avocat".
La personne mentionnée à l'article R. 1453-2 du Code du travail étant le défenseur syndical.
On ne peut mieux dire que la représentation par avocat a, au moins sur un plan formel, un caractère subsidiaire par rapport à la représentation par un défenseur syndical. Il faut, cependant, s'étonner que, dans la matière du droit du travail profondément réformée par le recours autoritaire à l'article 49.3 de la Constitution, les pouvoirs publics consacrent ainsi, et néanmoins, le rôle éminent des syndicats dans la justice prud'homale en appel. Sauf à penser que cette consécration serait en réalité une compensation à un dialogue social tellement vanté et pourtant tellement malmené ?
Le représentant d'une partie, s'il n'est avocat, doit justifier d'un pouvoir spécial.
Le défenseur syndical apparaît comme un acteur nouveau dans la procédure prud'homale, lequel ne doit pas être confondu avec le délégué syndical qui, dans les procédures introduites avant le 1er août 2016, avait qualité pour représenter ou assister les parties devant le conseil de prud'hommes et devant la chambre sociale de la cour d'appel.
L'article D. 1453-2-1 (N° Lexbase : L3783K9Y), créé par le décret n° 2016-975 du 18 juillet 2016 (N° Lexbase : L3694K9P), dispose que le défenseur syndical doit être inscrit sur une liste établie par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, sur proposition des organisations d'employeurs et de salariés mentionnées à l'article L. 1453-4 du Code du travail (N° Lexbase : L5961KGU).
Ces dernières désignent des défenseurs syndicaux au niveau régional en fonction de leur expérience des relations professionnelles et de leurs connaissances du droit social.
Le défenseur syndical exerce ses fonctions à titre gratuit. Il est radié d'office de la liste par le préfet de région en cas de défaut d'exercice de sa fonction à titre gratuit (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-6 N° Lexbase : L3788K98).
Les défenseurs syndicaux sont inscrits sur la liste de la région de leur domicile ou du lieu d'exercice de leur activité professionnelle.
Ainsi, cette liste des défenseurs syndicaux est arrêtée dans chaque région par le préfet de région et publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de région (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-3 N° Lexbase : L3785K93).
L'inscription sur cette liste permet l'exercice de la fonction de défenseur syndical dans le ressort des cours d'appel de la région (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-4 N° Lexbase : L3786K94), sauf l'hypothèse où le défenseur syndical a assisté ou représenté la partie appelante ou intimée en première instance, puisque le défenseur syndical pourra alors continuer à assister ou représenter celle-ci devant une cour d'appel qui a son siège dans une autre région (C. trav., nouvel art. D. 1453-2-4 N° Lexbase : L3786K94).
Nous pouvons supposer que le fait qu'un défenseur syndical accomplisse des actes de procédure, dont au premier chef la déclaration d'appel, sans être régulièrement inscrit sur la liste des défenseurs syndicaux au jour de leur accomplissement, ou sans être titulaire d'un pouvoir de représentation ayant date certaine (ce qui supposerait qu'il en soit justifié concomitamment à l'acte d'appel ou à l'acte de constitution), entraînera la nullité de ces actes.
La consultation du recueil des actes administratifs de la préfecture de région pourrait à cet égard constituer une mesure de précaution utile pour toute partie à la procédure d'appel.
Bien que le défenseur syndical ne puisse pas être rémunéré, il n'en reste pas moins un mandataire. A ce titre, il est susceptible d'engager sa responsabilité civile professionnelle.
Les dispositions du décret du 18 juillet 2016 n'instaurent à son égard aucune obligation de justifier de la souscription d'une assurance au titre de son activité de mandataire, ce qui laisse présager que naîtront des contentieux en cas de sinistres, et des situations bien difficiles pour une partie dont le représentant ne sera pas assuré, ou pour le défenseur s'il a un quelconque patrimoine.
Ainsi donc vont coexister, devant les chambres sociales des cours d'appel, deux types de représentants obligatoires, le défenseur syndical et l'avocat, soumis l'un et l'autre aux mêmes dispositions du Code de procédure civile, mais seul l'avocat étant astreint à justifier de la souscription d'une assurance au titre de sa responsabilité civile professionnelle et au titre des maniements de fonds, et seul astreint à des règles déontologiques.
Les règles de la confidentialité des échanges entre avocats ne s'appliqueront pas davantage aux échanges entre l'avocat et le défenseur syndical, ce qui ne sera pas de nature à favoriser des pourparlers. Certes, la situation était la même lorsque les parties se défendaient elles-mêmes ou étaient représentées par un délégué syndical. Mais le propre d'une réforme n'est-il pas d'introduire des progrès ?
En somme, deux types de représentants devant la cour d'appel ayant des droits et des obligations différents.
S'agit-il là des seules différences qui existeront entre ces deux représentants des parties devant les chambres sociales des cours d'appel ?
Pourquoi faire simple lorsque l'on peut faire compliqué ?
L'article 30 du décret du 20 mai 2016 institue des règles différentes selon que le représentant d'une partie est avocat ou défenseur syndical.
Au titre VI du livre II du Code de procédure civile, après l'article 930-1 (N° Lexbase : L0362ITL), il est inséré un article 930-2 (N° Lexbase : L2619K8I) ainsi rédigé : "Les dispositions de l'article 930-1 ne sont pas applicables au défenseur syndical. Les actes de procédure effectués par le défenseur syndical peuvent être établis sur support papier et remis au greffe. Dans ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué".
Rappelons que l'article 930-1 du Code de procédure civile, applicable aux seuls avocats, dispose que : "A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique. Lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe. En ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué. Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l'expéditeur. Un arrêté du Garde des Sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique".
Vont donc, non seulement coexister mais bien pire, s'enchevêtrer, des règles procédurales différentes selon qu'une ou plusieurs parties seront représentées par un avocat et/ou par un défenseur syndical : communication électronique pour l'avocat et communication papier pour le défenseur syndical dans leurs rapports avec la juridiction, communication électronique dans les rapports entre avocats, mais communication électronique et communication papier dans les rapports entre l'avocat et le défenseur syndical, et dans les rapports entre avocats exerçant dans les ressorts de cours d'appel différentes.
Cette complexification est-elle purement anecdotique ? Hélas non.
L'article 29 du décret du 20 mai 2016, modifiant l'article R. 1461-2 du Code du travail, dispose que la procédure devant la chambre sociale de la cour d'appel est désormais une procédure avec représentation obligatoire.
Sont donc applicables, depuis le 1er août 2016 au procès prud'homal en appel, les dispositions des articles 899 (N° Lexbase : L0369ITT) à 930 du Code de procédure civile, dont notamment celles des articles 908 (N° Lexbase : L0390IGK), 909 (N° Lexbase : L0163IPQ) et 910 (N° Lexbase : L0412IGD) instituant, à peine de caducité de l'appel ou d'irrecevabilité des conclusions, les délais impératifs de trois et deux mois.
Il apparaît là que la complexité nouvelle des notifications d'actes entre avocats appartenant à des barreaux situés dans des cours d'appel différentes, ou entre avocats et défenseurs syndicaux, va imposer le respect de règles différentes selon les cas de figure envisagés :
- lorsque l'appelant et l'intimé seront représentés l'un et l'autre par un avocat du ressort de la même cour, il n'y aura pas de difficulté. L'un et l'autre pourront conclure au plus tard le dernier jour du délai des articles 908 à 910 par la voie de la communication électronique (le RPVA), aussi bien avec la cour qu'avec l'avocat adverse ;
- lorsque l'avocat aura pour contradicteur un défenseur syndical, ou un avocat du ressort d'une autre cour (sauf l'hypothèse où ce dernier aura mandaté un avocat "postulant" devant la cour saisie du litige), les actes devront être signifiés entre eux par acte d'huissier, en ce y compris le bordereau de pièces. Ce qui ne dispensera pas l'avocat du ressort de la cour saisie du litige de remettre les actes de procédure à la juridiction, à peine d'irrecevabilité, par la voie électronique.
Dans ceux bien sûr édictés par les articles 908 à 910 précités, c'est-à-dire trois mois pour le représentant de l'appelant à compter de la déclaration d'appel, deux mois pour le représentant de l'intimé à compter de la notification des conclusions de l'appelant, et deux mois au représentant de l'appelant en cas d'appel incident ou d'appel provoqué.
Mais ATTENTION : si la communication électronique permet en toutes matières à l'avocat de conclure devant la cour, le cas échéant, le dernier jour des délais précités puisque la juridiction comme le représentant de la partie adverse reçoivent cette communication en temps réel, tel n'est pas le cas en matière sociale.
La signification des actes de procédure par voie d'huissier devra intervenir au plus tard le dernier jour des délais des articles 908 à 910.
Les délais seront donc ceux des articles du Code de procédure civile... diminués du temps nécessaire à la signification des actes par huissier.
Rappelons encore que l'article 902 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0377IT7), auquel il est renvoyé pour un examen plus complet, impose au représentant de l'appelant d'assigner l'intimé, qui n'a pas constitué un représentant devant la cour, dans le délai d'un mois à compter de l'avis adressé par le greffe, à peine de caducité de l'appel.
A ce stade de notre réflexion, une pensée s'impose pour les justiciables qui perdront leur procès en appel pour une simple question de procédure, sans examen au fond de leur cause, lorsque par malchance pour eux, ils ne seront pas représentés l'un et l'autre par un avocat du ressort de la même cour communiquant entre eux par la voie électronique. Ayons également une pensée pour les justiciables dont le représentant ne sera pas soumis à une obligation d'assurance.
Nous avons rappelé que la définition même de la postulation était la représentation obligatoire par avocat.
Qu'advient-il lorsqu'un décret institue une exception à la règle de la postulation dans une procédure avec représentation obligatoire ? Un grand désordre.
Peu importent la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dite loi "Macron", et le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, ainsi que les dispositions du Code de procédure civile relatives à la postulation. Ne nous embarrassons pas de ce concept antédiluvien de la hiérarchie des normes alors que, nous l'avons vu, le décret du 20 mai 2016 nous propulse dans le monde du futur, de la modernité, et de la simplification.
La réponse à la question nous est donnée par le "ministère de la Justice" (cf. la fiche d'information technique diffusée par le Conseil national des barreaux le 27 juillet 2016 - page 5) : "Le ministère de la Justice a considéré que le régime de la postulation territoriale n'était pas applicable devant les cours d'appel statuant en matière prud'homale, y compris en Alsace-Moselle, dans la mesure notamment où il échappe au monopole général d'assistance et de représentation par avocat puisque 'le défenseur syndical peut exercer des fonctions d'assistance ou de représentation devant les conseils de prud'hommes et les Cours d'appel en matière prud'homale' (C. trav., nouvel art. L. 1453-4 N° Lexbase : L5961KGU - loi du 6 août 2015, art. 258)".
Aux lecteurs qui resteraient frileusement attachés à la notion de hiérarchie des normes, nous ne pouvons que leur conseiller de s'interroger sur la valeur respective d'un avis du "ministère de la Justice" et celles de la loi et du décret.
Selon que vous serez moderne ou ancien, vous pourrez donc considérer, ou non, que dans une procédure avec représentation obligatoire, l'avocat qui représente une partie devant la chambre sociale d'une cour d'appel en étant soumis à toutes les règles de cette procédure avec représentation obligatoire postule ou non.
En page 4 de la fiche d'information en date du 27 juillet 2016, le Conseil national des barreaux écrit, sous le titre "Le cas particulier de l'Alsace-Moselle" : "Le ministère de la Justice a considéré que l'article 8 de la loi du 20 février 1922 sur l'exercice de la profession d'avocat et la discipline des barreaux en Alsace et en Lorraine, qui instaure un régime spécifique de postulation devant les cours d'appel de Metz et Colmar, n'a pas été abrogé par l'article 51 de la loi du 6 août 2015, dite loi 'Macron'".
Notons incidemment que, nonobstant l'avis du ministère de la Justice, la loi du 20 février 1922 s'applique en Alsace et en Moselle, et non en Alsace et en Lorraine.
La question qui reste posée, malgré l'avis du ministère de la Justice, est celle de savoir si l'avocat alsacien ou l'avocat mosellan postulait et postule, y compris, devant la chambre sociale des cours d'appel de Metz ou de Colmar en vertu de la loi de 1922, abrogée ou non par la loi "Macron".
Dans un arrêt en date du 21 octobre 2016 (CE 6° ch., 21 octobre 2016, n° 401741 N° Lexbase : A7048R9W), le Conseil d'Etat, saisi notamment d'une demande d'annulation pour excès de pouvoir des articles 28, 29 et 30 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, a rejeté cette demande au motif en particulier que : "[...] les articles 28, 29 et 30 du décret attaqué ont pour objet, à compter du 1er août 2016, de rendre obligatoire en appel la représentation des parties par tout avocat ou par un défenseur syndical ; qu'elles n'ont ni pour objet ni pour effet d'étendre, à compter de cette date, les règles de postulation prévues respectivement par l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 et par l'article 8 de la loi du 20 février 1922 aux procédures d'appel devant la chambre sociale de la cour d'appel d'un jugement d'un conseil de prud'hommes".
Le Conseil d'Etat a donc rendu une décision sensiblement différente de l'avis du ministère de la Justice, tel que rapporté par le Conseil national des barreaux dans sa fiche d'information du 27 juillet 2016. Ce qui nous conduit à considérer que ceux que nous appelons "les anciens", c'est à dire ceux qui privilégient l'analyse de la loi et du décret à l'avis du "ministère de la Justice", ont sans doute raison de faire preuve d'un tel conservatisme.
Ce qui nous amène à conseiller aux avocats peu familiarisés avec la procédure d'appel, soit de s'en pénétrer par une étude approfondie, soit de faire preuve de la plus grande prudence.
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Réf. : Cass. civ. 2, 16 décembre 2016, n° 15-27.917, FS-P+B+I (N° Lexbase : A2215SXC)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : Cass. civ. 1, 14 décembre 2016, n° 15-21.396, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9198SR4)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : Cass. soc., 12 décembre 2016, n° 16-25.793, FS-P+B+I (N° Lexbase : A4983SPA)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : Cass. civ. 1, 14 décembre 2016, n° 15-21.597, FS-P+B (N° Lexbase : A2148SXT)
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Le 30 Décembre 2016
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Réf. : Cass. com., 13 décembre 2016, n° 15-16.027, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5278SP8)
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Le 30 Décembre 2016
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