La lettre juridique n°679 du 8 décembre 2016

La lettre juridique - Édition n°679

Aide juridictionnelle

[Jurisprudence] La rétribution de l'avocat de la partie civile intervenant au titre de l'aide juridictionnelle

Réf. : CE 1° et 6° ch.-r., 3 novembre 2016, n° 378190 (N° Lexbase : A9161SGE)

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par Guillaume Royer, Maître de conférences à Sciences-Po Paris (Campus franco-allemand de Nancy), Avocat au barreau de Nancy

Le 08 Décembre 2016

Par un arrêt du 3 novembre 2016, le Conseil d'Etat nous rappelle que l'aide juridictionnelle est régulièrement au centre des revendications de la profession d'avocat. Que le montant de l'unité de valeur soit considéré comme insuffisant ou que le nombre d'unités de valeur soit qualifié d'insignifiant, rares sont les confrères qui se réjouissent de la délivrance de la célèbre "AFM" (attestation de fin de mission), parfois obtenue après des semaines d'attente auprès des greffes et payées après des mois d'attente par les CARPA... C'est dans ce contexte que, par une lettre en date du 19 décembre 2013, une association dénommée "Institut pour la Justice" a saisi le premier ministre d'une demande tendant à l'abrogation du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 (N° Lexbase : L0627ATE), portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (N° Lexbase : L8607BBE). Elle critiquait essentiellement le décret en ce qu'il consommait deux formes d'inégalités entre la rétribution des avocats de parties civiles et celle des avocats de personnes mises en cause au sujet de l'action publique (qu'elles soient mises en examen, prévenues, accusées ou condamnées). En effet, l'examen de l'article 90 du décret du 19 décembre 1991 fait apparaître, d'une part, que la rétribution de l'avocat de la partie civile est généralement plus faible que celle de l'avocat du mis en cause et, d'autre part, que pour certaines missions spécifiques, seule la rétribution de l'avocat de la personne mise en cause est envisagée par les textes. Dans cette dernière série d'hypothèses, l'avocat de la partie civile ne peut prétendre à aucune rétribution, de sorte que le greffier présent à l'audience ne délivrera aucune attestation de fin de mission. Tel est notamment le cas lorsque l'avocat de la partie civile est présent au débat contradictoire de la juridiction de l'application des peines portant sur la libération conditionnelle, prévu à l'article 730 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9903I38).

Par une décision expresse en date du 20 février 2014, le ministre de la Justice a rejeté la demande d'abrogation formulée par l'association "Institut pour la Justice". Celle-ci a alors saisi le Conseil d'Etat d'un recours pour excès de pouvoir à l'encontre du décret du 19 décembre 1991, ainsi que de la décision du ministre de la Justice refusant de l'abroger. Au soutien de son recours pour excès de pouvoir, l'association reprenait les deux formes d'inégalité évoquées, découlant de la rétribution minorée de l'avocat de la partie civile, voire de l'absence totale de rétribution.

Le Conseil d'Etat, à travers la décision commentée, a partiellement annulé la décision du Garde des Sceaux en date du 20 février 2014, refusant l'abrogation du décret du 19 décembre 1991. Il a censuré le décret uniquement en ce que les dispositions de l'article 90 ne prévoient pas de part contributive de l'Etat à la rétribution au titre de l'aide juridictionnelle de l'assistance de l'avocat de la partie civile dans le cadre de la procédure prévue à l'article 730 du Code de procédure pénale. Aux termes de sa décision, le Conseil d'Etat a commencé par rappeler sa jurisprudence constante, d'où il résulte que le principe d'égalité ne s'opposait pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. Après avoir rappelé cette règle, le Conseil d'Etat a considéré que, si les différences de rétribution pouvaient s'expliquer par la différence de charge de travail de l'avocat de la personne mise en cause et de l'avocat de la partie civile (I), cette différence ne pouvait conduire à exclure toute rétribution au profit de l'avocat de la partie civile (II).

I - Une différenciation admise

L'article 27 de la loi du 10 juillet 1990 pose un principe simple en indiquant que "l'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle perçoit une rétribution". Or, cette rétribution est fixée forfaitairement par l'article 90 du décret du 19 décembre 1991 qui prend la forme d'un tableau -tentaculaire- à double entrée. Pour chaque affaire, un nombre d'unités de valeur est attribué à l'avocat ayant prêté son concours. En matière civile, aucune discrimination n'est prévue entre l'avocat du demandeur et celle du défendeur qui perçoivent une rétribution identique. Mais, il en va fort différemment en matière pénale puisque l'article 90 du décret du 19 décembre 1991 admet, assez fréquemment, une inégalité entre la rétribution perçue par l'avocat de la personne mise en cause et celui de la partie civile. Par exemple, l'assistance d'une partie civile pour une instruction correctionnelle est rétribuée 8 UV alors que l'assistance d'un mis en examen à l'occasion d'une instruction correctionnelle est rétribuée 12 UV, voire 20 UV lorsque le mis en examen est placé en détention provisoire. Autre exemple, l'assistance d'une partie civile ou d'un civilement responsable devant la cour d'assises est rétribuée 35 UV tandis que l'assistance de l'accusé devant la cour d'assises est rétribuée 50 UV. Sachant que le montant de l'unité de valeur est désormais fixé à 26,50 euros hors taxes, des différences notables peuvent surgir au cours d'une même procédure, voire d'une même audience...

Toutefois, le Conseil d'Etat considère que ces inégalités peuvent être admises dès lors que "les missions de l'avocat de la défense et celles de l'avocat de la partie civile ne sauraient être considérées comme identiques" et que la défense pénale "implique, en particulier, des obligations et charges plus lourdes pour l'avocat de la personne mise en cause, tant au cours de l'instruction que durant le procès ; que celui-ci doit notamment répondre au ministère public et à la partie civile ; que, lors du procès pénal, il appartient à l'avocat de la défense de plaider non seulement, comme l'avocat de la partie civile, sur la question de la culpabilité, mais également sur celle du quantum de la peine". En effet, il est parfaitement admis dans la jurisprudence du Conseil d'Etat que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier (v. en ce sens, CE, 28 juin 2002, n° 223212 N° Lexbase : A0213AZW).

II - Une exclusion prohibée

Toutefois, si la différenciation de la rétribution entre avocats est admise, selon que ceux-ci occupent pour la personne mise en cause ou pour la partie civile, le Conseil d'Etat pose une limite évidente. En effet, l'article 90 du décret du 19 décembre 1991, pris pour l'application de la loi du 19 décembre 1991, ne saurait conduire à ce que l'intervention de l'avocat de la partie civile ne soit pas pris en charge au titre de l'aide juridictionnelle.

Cette situation reste exceptionnelle puisque, comme on pourra le constater, le tableau figurant à l'article 90 du décret du 19 décembre 1991 prévoit une rétribution pour la majeure partie des interventions d'un avocat au soutien des intérêts d'une partie civile. Ainsi, le texte prévoit la rétribution de l'avocat de la partie civile au stade de l'instruction correctionnelle ou criminelle, et au stade du jugement criminel, correctionnel ou contraventionnel, en première instance ou en appel. Rien n'est, cependant, prévu pour l'assistance de la partie civile au stade de l'exécution des peines.

En règle générale, la partie civile n'a plus la qualité de partie au procès pénal lors de la phase de l'exécution des peines (v. en ce sens, nos obs. in La victime et la peine - contribution à la théorie du procès pénal post sententiam, D., 2007, p. 1745 et s., spéc. n° 12). De manière très exceptionnelle, le législateur a prévu la présence de l'avocat de la partie civile, celle-ci étant entendue en sa plaidoirie au cours du débat contradictoire mené devant le juge de l'application des peines ou devant le tribunal de l'application des peines. Soulignons que, depuis la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, dite loi pénitentiaire (N° Lexbase : L9344IES), il est désormais admis que "pour les demandes de libération conditionnelle concernant des personnes condamnées à une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à cinq ans ou à une peine de réclusion, l'avocat de la partie civile peut, s'il en fait la demande, assister au débat contradictoire devant le juge de l'application des peines, le tribunal de l'application des peines ou la chambre de l'application des peines de la cour d'appel statuant en appel pour y faire valoir ses observations, avant les réquisitions du ministère public". Dès lors que l'avocat peut intervenir, la question de sa rétribution, au titre de l'aide juridictionnelle, doit être envisagée.

Toutefois, aucune rétribution n'est prévue par l'article 90 du décret du 19 décembre 1991. C'est précisément en cela que le décret méconnaissait le principe d'égalité. En effet, le Conseil d'Etat considère qu'en s'abstenant de prévoir toute rétribution de la mission d'assistance de l'avocat de la partie civile intervenant, au titre de l'aide juridictionnelle, dans la procédure prévue à l'article 730 du Code de procédure pénale, alors que celle de l'avocat assistant au même titre la personne condamnée dans cette procédure bénéficie d'une contribution de l'Etat à hauteur de quatre unités de valeur, l'article 90 du décret du 19 décembre 1991 a méconnu le principe, posé par l'article 27 de la loi du 10 juillet 1991, de rétribution de l'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, et a, ce faisant, établi une différence de traitement manifestement disproportionnée.

En définitive, si le pouvoir réglementaire peut moduler le nombre d'unité de valeurs en tenant compte de la lourdeur de l'intervention de l'avocat de la partie civile et de la personne mise en cause, il reste tenu de prévoir une rétribution. Exclure toute forme de rétribution pour une mission conduirait à faire peser l'intégralité de la charge financière de l'aide juridictionnelle sur l'avocat et à libérer l'Etat de ses obligations en la matière, ce qui est manifestement disproportionné. Aussi, Michel Rocard aurait sans doute pu dire, au sujet de l'aide juridictionnelle, que "les avocats ne peuvent supporter tout le poids de l'aide juridictionnelle [...] mais ils doivent en prendre leur part".

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Arbitrage

[Jurisprudence] Quand le Conseil d'Etat siffle un pénalty contre l'arbitre...

Réf. : CE, Ass., 9 novembre 2016, n° 388806, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0614SGT)

Lecture: 8 min

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par Houssam Mermech, élève avocat EFB/IDPA, sous la direction scientifique de Maître Régis Froger, Avocat associé au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, SCP Foussard-Froger

Le 08 Décembre 2016

"Que le différend touche au droit privé ou au droit public, l'arbitrage demeure une justice privée rendue sous l'égide du droit privé". Cette formule explique sans doute la réticence traditionnelle du droit administratif à l'égard de l'arbitrage. Toutefois, si le principe posé à l'article 2060 du Code civil (N° Lexbase : L2306ABZ) demeure celui de l'interdiction faite aux personnes publiques de recourir à l'arbitrage, cette position tend à s'effacer progressivement . La décision commentée l'illustre, en définissant de manière inédite l'office du juge administratif face aux sentences d'arbitrale international*. Le litige portait sur l'exécution d'un contrat administratif conclu en 2004 entre Gaz de France, alors établissement public, et un groupement de sociétés ayant pour objet la construction d'un terminal méthanier sur la presqu'île de Fos Cavaou.

Par un premier avenant du 17 juin 2005, Gaz de France, devenu une société anonyme, avait cédé ce contrat administratif au profit d'une de ses filiales, la société X. Cette cession avait la particularité d'être conclue avec un effet rétroactif, le contrat étant réputé avoir une nature privée dès son origine.

Par un second avenant du 11 juillet 2011, les parties avaient inséré dans le contrat une clause compromissoire, stipulant que tout différend relatif au contrat serait tranché définitivement suivant le règlement d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale, par trois arbitres nommés conformément à ce règlement.

A l'achèvement des travaux, la société X a reproché au groupement de sociétés des retards et malfaçons dans la livraison du terminal méthanier. Elle a en conséquence initié la procédure d'arbitrage afin d'obtenir réparation du préjudice résultant de ces manquements. Le groupement de sociétés a présenté des conclusions reconventionnelles tendant au remboursement de l'intégralité des surcoûts supportés pour la réalisation du terminal.

La Chambre de commerce internationale, faisant office de tribunal arbitral, a rendu sa sentence le 13 février 2015, qui a condamné le groupement de sociétés à payer la somme de 68 805 345 euros à la société X, tandis que cette dernière a été condamnée à payer au groupement la somme de 128 162 021 euros.

La société X a saisi le Conseil d'Etat d'un recours tendant à l'annulation de la sentence arbitrale. La Haute juridiction a saisi le Tribunal des conflits par une décision du 3 décembre 2015 (3). Ce dernier (4), après avoir rappelé que la nature d'un contrat s'appréciait au moment de sa conclusion (5), a réaffirmé sa jurisprudence "INSERM" de 2010 (6), selon laquelle, si le recours formé contre une sentence d'arbitrage international relève en principe de la compétence des juridictions judiciaires, le juge administratif reste toutefois compétent lorsque le recours implique le contrôle de la conformité de la sentence aux règles impératives du droit public français relatives à l'occupation du domaine public ou à celles qui régissent la commande publique. Le Tribunal des conflits a considéré qu'en l'espèce le contrat litigieux relevait du régime administratif d'ordre public de la commande publique, de sorte que le juge administratif était compétent pour connaitre du recours contre la sentence arbitrale.

L'affaire est revenue devant le Conseil d'Etat qui, par sa décision d'Assemblée du 9 novembre 2016, a successivement défini la nature et les modalités du contrôle qu'il exerce sur les sentences d'arbitrage international, puis précisé les effets de ce contrôle, à travers l'office du juge administratif en cas d'annulation de la sentence arbitrale.

S'il appert que l'office du juge est étroitement encadré en matière de contentieux de l'arbitrage international (I), il convient de souligner que, lorsque le litige entre dans l'office du juge, les règles d'ordre public jouent un rôle essentiel en la matière (II).

I - Un office du juge strictement limité en matière de contentieux de l'arbitrage international

1 - Dans sa décision du 9 novembre 2016, le Conseil d'Etat offre une méthodologie détaillée sur sa manière de procéder lorsqu'il statue sur un recours contre une sentence arbitrale internationale. Il définit l'étendue de son office, qui se limite à un contrôle à trois niveaux.

En premier lieu, le Conseil d'Etat vérifie l'arbitrabilité du litige, c'est à dire la légalité de la convention d'arbitrage. Conformément au principe rappelé au premier alinéa de l'article 2060 du Code civil, qui interdit aux personnes publiques de recourir à l'arbitrage, elles ne peuvent compromettre que dans les cas prévus par la loi. La compétence du juge administratif pour connaître des sentences arbitrales internationales permet de faire respecter les règles d'ordre public qui s'imposent aux personnes publiques. A ce titre, il doit contrôler le principe même du recours à l'arbitrage. Ce premier niveau de contrôle est essentiel, en ce qu'il détermine le sort du litige en cas d'annulation de la sentence arbitrale.

En deuxième lieu, le Conseil d'Etat vérifie que la sentence arbitrale a été rendue au terme d'une procédure régulière. Il s'agit de contrôler le respect par le tribunal arbitral de sa compétence et de sa mission, de sa correcte composition, des principes d'indépendance et d'impartialité des juges, ainsi que du caractère contradictoire de la procédure et de la motivation de la sentence (7). Dans le cas d'espèce, ce point n'a pas fait l'objet de difficulté particulière.

En troisième lieu, la Haute juridiction administrative vérifie la conformité de la sentence aux règles d'ordre public. Selon la décision "INSERM", ce sont précisément "ces règles impératives du droit public français" dont relèvent le régime des contrats administratifs en matière de commande publique et de domanialité publique qui justifient la compétence du Conseil d'Etat en la matière. En ce sens, la décision commentée s'inscrit dans la continuité de la décision "INSERM". Ce contrôle de conformité révèle une volonté marquée de protéger "un noyau dur" de règles impératives (8). Dès lors que le litige entre dans l'office du juge, il s'agira de faire respecter l'application des règles impératives du droit public (9), quelles que soient la nature du contrat ou la nationalité des cocontractants.

2 - Au-delà de ces indications quant au contrôle du juge administratif, une interrogation demeure : qu'en est-il des sentences arbitrales rendues à l'étranger sur la base du droit français ? Cette interrogation pose la question de la compétence du Conseil d'Etat pour juger des recours dirigés contre une sentence rendue à l'étranger. Dans sa décision "Syndicat mixte des aéroports de Charente" (10), le Conseil d'Etat a précisé que la juridiction administrative était incompétente pour connaître d'un recours contre une sentence arbitrale rendue à l'étranger. Ces dernières échappent donc au contrôle de conformité lorsque la juridiction arbitrale a siégé à l'étranger. Toutefois, le Conseil d'Etat pourra appréhender ces sentences et contrôler leur conformité aux règles d'ordre public à l'occasion d'une demande tendant à l'exequatur.

En affirmant clairement dans la décision du 9 novembre 2016 que les contrôles effectués par le juge de la sentence et le juge de l'exequatur doivent être similaires, le Conseil d'Etat adopte une position semblable à celle prévalant en droit privé (11) ; position légitimée par un certain pragmatisme économique. Il peut effectivement être argué qu'un contrôle moins approfondi sur une sentence rendue à l'étranger que sur celle rendue en France n'aurait que pour effet d'amener les parties à localiser le siège de leur tribunal à l'étranger.

En conséquence, tout laisse à penser que le mécanisme élaboré par les juges du Palais-Royal permettra un contrôle efficace du respect des règles d'ordre public des sentences arbitrales. Un contrôle interviendra lorsque la juridiction administrative est compétente pour statuer sur un recours contre une sentence arbitrale et un autre contrôle visera à pallier les hypothèses d'incompétence, par la vérification de la conformité de la sentence aux règles procédurales et impératives à l'occasion d'une demande tendant à l'exequatur.

La décision vient donc compléter la matière naissante sur ce point ; elle apporte également d'autres éclaircissements essentiels.

II - Les règles d'ordre public, boussole du juge administratif statuant en matière d'arbitrage

1 - Un autre apport de cette décision réside dans la notion d'ordre public que le Conseil d'Etat s'est employé à préciser. Le cinquième considérant apporte des précisions attendues notamment par rapport à la décision "INSERM", le Conseil d'Etat définissant trois catégories de règles d'ordre public.

La première catégorie a trait aux "vices d'une particulière gravité relatifs notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement". Cette formulation n'est pas sans rappeler la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière contractuelle (12) et atteste de la volonté du Conseil d'Etat de ne sanctionner que les vices les plus graves. Ce qui se conçoit aisément, puisque c'est un contrat qui est à l'origine de la désignation de l'arbitre.

La deuxième catégorie est relative aux "règles auxquelles les personnes publiques ne peuvent déroger, telles notamment l'interdiction de consentir des libéralités, d'aliéner le domaine public ou de renoncer aux prérogatives dont ces personnes disposent dans l'intérêt général au cours de l'exécution du contrat". Cette catégorie se réfère à la jurisprudence constante du Conseil d'Etat (13). Par exemple, a déjà été reconnue contraire à l'ordre public la clause prévoyant la possibilité pour la personne publique de renoncer à l'exercice de son pouvoir de résiliation unilatérale (14).

La troisième et dernière catégorie renvoie "aux règles d'ordre public du droit de l'Union européenne". Ce qui pourrait, notamment, faire référence aux obligations de publicité et de mise en concurrence -ce point restant toutefois à préciser, puisque l'on sait que la seule méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence n'est pas jugée comme constituant nécessairement un vice suffisamment grave pour justifier une annulation-.

En l'espèce, le Conseil d'Etat a eu à connaître de la question suivante : la faculté pour le maître d'ouvrage de faire réaliser par un tiers les prestations d'un marché de travaux publics en cas de défaillance du titulaire et aux frais et risques de celui-ci, en l'absence de résiliation du marché, constitue-t-elle une règle d'ordre public à laquelle les parties ne peuvent déroger ? Le Conseil d'Etat a estimé que cette règle était d'ordre public et que la sentence l'avait méconnue, ce qui a justifié son annulation. L'arbitre, qui a appliqué des règles de droit privé, avait jugé que la société X ne pouvait pas procéder à la mise en régie des travaux. Or, il s'agit précisément d'une faculté dont disposent les personnes publiques dans l'exécution du contrat dans un but d'intérêt général.

2 - Par ailleurs, précisant son office, le Conseil d'Etat estime qu'il ne peut rejuger l'affaire au fond car, dans le cas d'espèce, le recours à l'arbitrage n'était pas illégal. En d'autres termes, le litige était arbitrable, de sorte qu'il reviendra aux parties de décider du sort du litige, le juge respectant l'accord des volontés pour décider de recourir à un arbitre plutôt qu'aux juridictions Etatiques pour régler leur différend. Le Conseil d'Etat est le juge de la sentence, il ne règle pas le litige.

Il en ira autrement dans un seul cas : lorsque le principe même du recours à l'arbitrage était illégal. En ce cas, la sentence est annulée et le juge recouvre sa pleine compétence, soit que le Conseil d'Etat renvoie le règlement du litige au tribunal administratif compétent, soit qu'il règle lui-même l'affaire au fond.

En conclusion, un effort de pédagogie du Conseil d'Etat ressort nettement de la décision commentée, puisque ce dernier s'est attaché à mettre en place un régime juridique clair dans cette nouvelle branche du contentieux administratif. Ce régime doit permettre à l'arbitrage intéressant les personnes publiques de se développer dans un cadre qui se construit progressivement. Gageons que la jurisprudence en la matière saura préciser davantage les règles d'ordre public dont les catégories sont désormais identifiées.


(1) D. Foussard, L'arbitrage et le droit administratif, Rev. arb., 1990, p. 14.
(2) V. en ce sens Conseil d'Etat, Régler autrement les conflits : conciliation, transaction, arbitrage en matière administrative, 4 février 1993, rapport du groupe de travail sur l'arbitrage (dir. D. Labetoulle), 13 mars 2007 ; colloque du 30 septembre 2009 organisé par la Chambre nationale pour l'arbitrage privé et public - intervention de J.-M. Sauvé, vice-président du Conseil d'Etat.
(3) CE 2° et 7° s-s-r., 3 décembre 2015, n° 388806 (N° Lexbase : A6196NY7).
(4) T. confl., 11 avril 2016, n° 4043 (N° Lexbase : A6727RC7).
(5) T. confl., 16 octobre 2006, n° 3506 (N° Lexbase : A9491DRX).
(6) T. confl., 17 mai 2010, n° 3754 (N° Lexbase : A3998EXD).
(7) L'exigence de motivation est un ajout du Conseil d'Etat par rapport à l'article 1520 du Code de procédure civile, qui prévoit les premiers cas d'irrégularités énoncés. Cette exigence de motivation est une principe général du droit opposable à toutes les juridictions relevant du contrôle du Conseil d'Etat (CE, Ass., 1er juillet 1932, Sté Les Grands Magasins du Globe, Rec. p. 650 ; CE, 8 juillet1970, n° 75362 (N° Lexbase : A5705B7G), Rec. p. 471 ; CE, 19 juillet 2010, n° 337071, 338491 (N° Lexbase : A0011E7K), Rec. T. 914.
(8) M. Audit, Présentation générale : les contrats publics sont-ils solubles dans l'arbitrage international ?, in Contrats publics et arbitrage international, Bruylant, 2011, p. XII.
(9) L'identification de ces règles d'ordre public constitue un autre apport de cette décision (cf. infra).
(10) CE, 19 avril 2013, n° 352750 (N° Lexbase : A4180KCS).
(11) C. pr. civ., art. 1525 (N° Lexbase : L2180IPG).
(12)  V. not. CE, Ass., 28 décembre 2009, n° 304802 (N° Lexbase : A0493EQC), Rec. p. 509 ; CE, Ass., 4 avril 2014, n° 358994 (N° Lexbase : A6449MIP), Rec. p. 70; CE, 21 février 2011, n° 337349 (N° Lexbase : A7022GZ4), Rec. p. 54.
(13)  V. not. concernant l'interdiction des libéralités : CE Sect., 19 mai 1971, n° 79962 (N° Lexbase : A2915B8H), Rec. p. 235 ; CE, Ass., 6 décembre 2002, n° 249153 (N° Lexbase : A4627A47), Rec. p. 196.
(14) CE, 1er octobre 2013, n° 349099 (N° Lexbase : A3383KMA).
*Issu du numéro 23 de la Gazette de l'IDPA du mois de novembre 2016, revue mensuelle publiée par l'Association de l'Institut de droit public des affaires (directeur de la rédaction, Christophe Farineau ; co-rédacteurs en chef, Mélanie Dinane et Nicolas Quénard ; mise en forme, Nicolas Kéravel).

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Avocats

[Pratique professionnelle] Optimiser sa présence digitale pour un cabinet d'avocats

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par Pascal Mendak, Directeur associé chez Legal'Dev - Groupe Fargo

Le 08 Décembre 2016

Lancer ou refondre un site internet, ouvrir un compte sur les principaux réseaux sociaux, se lancer dans la création d'une appli mobile : ces actions doivent faire l'objet d'une réflexion stratégique intense et approfondie en amont au sein de son cabinet d'avocat pour construire et développer sa communication digitale. A - Qu'est-ce qu'une bonne communication digitale ?

Dans son acception globale, la communication digitale consiste à diffuser, échanger, partager des informations et créer des interactions sur tous supports dématérialisés selon une stratégie bien pensée en amont. Son site, ses comptes "réseaux sociaux" ou une application mobile seront autant d'outils qui permettront de déployer sa communication et sa notoriété. Digital ou numérique, tout dépend de l'exigence linguistique que l'on porte à la langue française quant à cette définition. Désormais, parler de digital est largement répandu, tant et si bien que beaucoup ne se posent plus la question.

Passer du papier ou des rencontres et échanges verbaux à des messages n'implique pas seulement un changement de vecteur de communication, c'est repenser en totalité sa stratégie de communication, avec une nouvelle logique de contenus, une temporalité renouvelée et une façon de travailler, impliquant souvent une collaboration de plusieurs personnes, soit internes au cabinet, soit avec le soutien d'une agence de communication.

Disposer d'un site esthétique présentant son activité, "twitter" régulièrement et "liker" des articles, c'est une base, mais une bonne communication digitale c'est tout autre chose : elle implique une grande variété d'actions, une méthodologie. Si des actions éparses peuvent même s'avérer contre productives (messages peu ciblés, diffus, ligne éditoriale peu définie...), il est, en revanche, essentiel avant toute action de construire une stratégie pertinente et murement réfléchie.

  • Construire sa stratégie avant tout

Il faut prendre le temps de faire un bilan de son activité : quelles sont les valeurs et les expertises à mettre en lumière, celles à développer, quels sont ses clients ? Leurs attentes, leurs besoins ? Essayer de se mettre à leur place, les interroger. Quelle typologie de client souhaite-t-on développer ? Qu'apprécient-ils ? Quelles sont les insatisfactions exprimées, quels sont ses concurrents ?

Cette étape d'audit, réalisée en interne ou par une agence de communication, comme toute stratégie marketing, sera déployée de la façon suivante :

- une analyse de la segmentation des clients, le choix de privilégier certains prospects cibles en fonction d'un potentiel de chiffre d'affaires et de définir un positionnement clair, porteur et différenciant. Un outil CRM (custom relationship management) de qualité complété par l'accompagnement d'un conseil en stratégie de développement qui pourra venir en soutien de ceux et celles qui ne maîtrisent pas les techniques marketing ;

- un audit d'image pourra être réalisé également (enquêtes clients, étude concurrentielle...) ;

- une synthèse (SWOT, facteurs clés de succès, benchmark) permettra d'avoir une vision claire de la situation actuelle et de définir ses objectifs à court et moyen terme ;

- les actions pour atteindre ses objectifs ; définition d'une stratégie de contenus sur le site, les réseaux sociaux, optimisation de l'ergonomie du site, renforcement de l'interactivité via les réseaux et la mise en place d'un espace utilisateur sur le site..

Parés de ces éléments de synthèse, l'on doit construire sa stratégie, un plan de communication.

Comment mettre en place sa stratégie digitale ?

Pour atteindre une forte visibilité de lancement ou bien la renforcer sur un domaine de compétence spécifique, le cabinet devra actionner tous les leviers de la communication digitale.

Les étapes pourront alors s'enchaîner ainsi :

1/ définition de la ligne éditoriale (informations à chaud, informations froides, avis d'experts, cas pratiques, informations technique, vulgarisation) pour adresser ses messages à la bonne personne, au bon moment et sur le bon support ;

2/ un comité éditorial hebdomadaire idéalement pour définir les principaux sujets, l'angle, le séquençage de la publication ;

3/ le choix des supports de diffusions.

Pour un article de fond, un avis d'expert, le choix de la publication sur le site sera privilégié.

Pour une actualité à chaud et brute telle l'annonce d'un nouvel arrêt ou d'un texte de loi, le choix de Twitter sera privilégié.

  • Créer son site internet

Véhicule de sa visibilité et vitrine de son savoir-faire, le site internet du cabinet est un moyen quasi incontournable de son identité numérique. Le réflexe pour la plupart des recherches de professionnels notamment consiste à interroger les moteurs de recherche ; il est donc nécessaire de disposer a minima d'une identité visuelle par un site internet consultable sur tous supports (PC, mobiles , tablettes). La réalisation d'un site en "responsive design" est désormais une exigence pour tout concepteur de sites.

Un site esthétique, ergonomique et attractif, une présentation des expertises et de ses experts : fort bien. Mais, l'essentiel réside surtout dans la façon de le faire vivre et c'est précisément là que la stratégie digitale prend toute sa mesure : la stratégie de contenu, on le rappelle encore, le bon sujet, le bon angle diffusé au bon moment et répondant aux attentes de ses prospects et clients pour un référencement optimisé (SEO ou search engine optimization).

Ayant défini les thématiques sur lesquelles on doit prioriser sa communication et son engagement en fonction de sa ligne éditoriale, un article par semaine est idéal (un par mois a minima) court, synthétique sur l'actualité ou un cas pratique présenté renforceront son référencement et sa visibilité. 1 500 à 2 000 signes suffisent. Il importera de soigner la rédaction du titre, court et intégrant les mots clés représentatifs les plus impactants de son contenu en y ajoutant une illustration. De nombreux sites proposent des photos ou dessins libres de droit ou bien à un prix très modique.

Si l'on a rédigé un article publié dans la presse, il convient de demander à la rédaction la possibilité de le publier sur son site, sans oublier de mentionner la source de la publication d'origine. La plupart des supports ne poseront pas de difficulté, dès lors que la mise en ligne sur son site est effectuée après publication de l'article dans le journal ou la revue. Ces précautions d'usage sont importantes pour entretenir de bons rapports avec la presse.

Alternative intéressante pour présenter un cas pratique ou un texte de loi, le legal design est apparu depuis plusieurs années. Editeurs juridiques et presse grand public l'utilisent et certains avocats (E. Pierrat, 100 infographies pour déchiffrer la justice, éd. La Martinière) en font même des ouvrages.

Par des schémas, des tableaux et dessins, le legal design permet de rendre plus explicite et donc plus accessible une information juridique pour ses clients tant pour les étudiants, le grand public et les entreprises. La réalisation d'une information traduite sous forme de legal design implique, outre la parfaite maîtrise du sujet de droit, l'utilisation de logiciel dédié (Xmind ou Easel.ly, piktochart ) ou l'accompagnement par un professionnel de la communication qui proposera les solutions les plus adaptées.

Enfin, la création de vidéos pour mettre en valeur son expertise sera l'un des moyens les plus efficaces pour renforcer son positionnement d'expert et optimiser son référencement, ainsi que son image auprès de ses prospects et clients. Il faut oublier la vidéo "institutionnelle" sur son cabinet sauf pour la présentation de son activité sur son site et privilégier la vidéo présentant un contenu utile et pertinent (cas pratique, impact d'une jurisprudence récente, commentaire d'une actualité porteuse). Il importe de raconter une histoire, avec un séquençage bien étudié et fluide de son scénario, afin de captiver l'attention de ses auditeurs, et de ses prospects. La structure du scénario doit être simple et percutante : une question et des éléments de réponses concis et précis. Il faut compter 5 à 6 lignes de réponses par question. Les vidéos doivent être courtes (1mn 30- 2mn chacune et dynamiques).

Cette démarche nécessite un travail préalable de réflexion et de conception du story telling qui devra être mené avec un prestataire aguerri.

Si la stratégie de contenus est prioritaire pour sa visibilité, il faudrait renforcer également la dynamique de son site et son service clients en proposant des newsletters qui permettront de récupérer des données précieuses pour enrichir son fichier prospects et en le dotant d'un espace utilisateur qui permet de renforcer les liens avec ses clients : partage de dossiers, archivages des correspondances, ressources documentaires juridiques seront intégrés par exemple dans cet espace. Les Solutions de My cercle, Diapaz ou Secib notamment proposent des outils qui pourront être intégrés sur son site. Un traitement des données personnelles sera rigoureusement organisé selon les derniers textes en vigueur (loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique aux fichiers et aux libertés N° Lexbase : L8794AGS, loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016, pour une République numérique (N° Lexbase : L4795LAT).

  • Le community management

Le community management intègre l'ensemble des actions qui permettent de répondre à des objectifs définis par la stratégie de son cabinet : accroître la visibilité et la notoriété de son cabinet en publiant des informations, animant des échanges et partages d'expériences.

Le site internet en est l'un des principaux supports pour la diffusion de ses contenus, mais c'est sur les réseaux sociaux que se concentrent les actions.

Dans le respect de la ligne éditoriale définie, deux principales actions seront donc mises en oeuvre :

- sur le site internet, par la publication d'articles réguliers (voir ci-dessus) viralisés ensuite via les réseaux définis via les boutons de partage intégrés par un webmestre sous les articles.

- sur les réseaux sociaux proprement dits.

B - Quel réseau social investir ?

Selon les principaux objectifs définis (quelles cibles de clientèle ? Quel positionnement pour le cabinet, quelles expertises mettre en valeur ?), un choix peut être opéré entre les différents réseaux sociaux.

Pour une cible B to B, LinkedIn sera privilégié.

Dédié aux professionnels pour les professionnels, doté d'une dimension internationale, mise en valeur des expertises fortes et acteurs influents, LinkedIn est parfaitement adapté à l'optimisation du branding de la marque et son e-reputation, la conquête de nouveaux clients, le développement ou le renforcement d'une activité.

Plusieurs options de communication sont possibles (profil, page société, groupe), intégrant les profils et informations les plus pertinents (selon affinité, l'importance de l'information et sa fraîcheur). LinkedIn pourrait, le cas échéant, constituer un ersatz à un site ou blog entreprise.

Inviter des prospects, relations professionnelles, intégrer des groupes liés à son activité professionnelle ainsi qu'à ses compétences et participer ensuite font partie des premières actions stratégiques lors du lancement de sa page entreprise. Il y a même la possibilité d'obtenir les noms de tous les membres d'un groupe même si on ne l'a pas intégré.

Il convient d'enrichir sa page par des articles intéressant ses relations avec l'outil Pulse, en écrivant des articles deux fois par mois, courts synthétiques et pratiques, de 1 500 signes environ. Les articles longs feront l'objet de 2 ou 3 publications successives et permettront à court ou moyen terme de capter l'écoute, l'intérêt et la curiosité de prospects.

Partager et liker ponctuellement les publications de spécialistes de qualité feront partie des actions quotidiennes de community management dans le cadre d'une veille. Rappelons ici que LinkedIn est un puissant outil de veille que l'on peut optimiser via un paramétrage spécifique.

Facebook, l'autre grand réseau ne devra pas être négligé selon les secteurs d'activité ciblés (grande distribution, marques, mode, IP-IT), et clients personnes physiques. Les petites et moyennes entreprises étant également souvent présentes sur Facebook, une page Facebook pourra être créée et animée si elle représente une part de ses clients et prospects. A noter également l'arrivée de Workplace la plateforme business de Facebook, qui va sans doute se développer dans le monde du travail.

Quant à Twitter, à la fois utilisé pour la veille et la viralisation de ses contenus, en 140 caractères, il reste l'outil de veille très performant et de communication à chaud, en prenant toutes les précautions nécessaires afin d'éviter tout message hâtif. Au-delà des tweets et retweets (3 par jour est un bon rythme), l'emplacement des bons hashtags et l'intégration de photos ou de toute illustration pour une bonne visibilité, Twitter permet aussi de rapides sondages en questions fermées. Utile pour faire interagir ses followers...

Pour gagner du temps dans ses veilles et ses envois qualifiés, il convient de créer des listes qualifiées de ses followers, au fur et à mesure qu'ils s'inscrivent.

Enfin, la présence sur Google + devra être installée pour des raisons de référencement.

C - Quelles actions mettre en place ?

Il n'est pas question ici de développer le référencement commercial (Adwords et campagnes sponsorisées) mais de privilégier le SEO ou référencement naturel. Grace à de articles pertinemment écrits et intégrant des principaux mots clés qui caractérisent son article, répétés au sein de son article, une fréquence régulière de ses publications, et l'on obtient ainsi un référencement de qualité.

Bien entendu, pour booster un développement d'activité ou quelques tweets porteurs, il sera possible de mettre en oeuvre des actions de sponsoring à étudier de préférence avec un professionnel.

Trois actions guideront son community management : écouter/veiller, pour suivre les comptes les plus influents, parler par des Tweets et des citations et des questions à ses followers, répondre à un tweet ou à une question posée. Comme l'exprime l'une des grandes références en social média John Munsell : "Le contenu est roi, la conversation est reine".

Un calendrier rédactionnel et un point hebdomadaire sont conseillés, le tout sera synthétisé par exemple sur matrice Excel (par jour et selon le réseau social).

La veille quotidienne réalisée chaque matin permettra d'animer le compte Twitter. L'outil de curation de contenus Netvibes est l'un des plus pertinents. Il est également possible d'y intégrer les veilles programmées sur Google.

Trois Tweets par jours sont conseillés pour développer la visibilité du réseau en utilisant les hashtags pertinents (pas plus de 3 par messages en principe).

Les articles et informations repérées pourront également être partagées sur les autres réseaux via la plateforme Hootsuite qui permet la diffusion simultanée.

Le séquençage des envois devra être bien étudié selon les profils que l'on souhaite capter : l'idéal étant le matin avant 10 H, pendant l'heure du déjeuner et le soir entre 17 et 21 h.

Afin de piloter l'activité de community management et son suivi, confirmer ou informer les actions prises, il importe de mesurer les performances réalisées. Les indices de performances ou key performance indicators (KPI) devront être mis en place en fonction des objectifs à atteindre : nombre de followers, d'engagements sur les messages diffusés, nombre de nouveaux contacts, de prospects.

L'ouverture d'un compte Google analytics constitue l'outil ad hoc pour ce suivi.

Un pilotage hebdomadaire ou a minima mensuel permettra de suivre les actions, de les réorienter et de les adapter. Chacun des réseaux sociaux intègre des outils statistiques permettant d'extraire des données chiffrées qu'il faudra ensuite interpréter.

Conclusion

La communication digitale est devenue l'un des vecteurs essentiels de son développement. Elle implique une intense réflexion préalable sur la stratégie du cabinet et les actions efficaces pour la mettre en oeuvre régulière et bien séquencée sur son site internet et les réseaux sociaux pour établir une relation de proximité avec ses clients. Il n'existe pas de solutions idéales, il importe de tenter des actions, des expressions sur les différents supports et de les revoir selon les réactions obtenues par vos lecteurs pour optimiser les interactions. Ainsi que l'écrivait si justement Montesquieu : "pour faire de grandes choses, il ne suffit pas d'être au-dessus des hommes, il suffit d'être avec eux".

newsid:455509

Avocats

[Pratique professionnelle] Optimiser sa présence digitale pour un cabinet d'avocats

Lecture: 10 min

N5509BWX

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par Pascal Mendak, Directeur associé chez Legal'Dev - Groupe Fargo

Le 08 Décembre 2016

Lancer ou refondre un site internet, ouvrir un compte sur les principaux réseaux sociaux, se lancer dans la création d'une appli mobile : ces actions doivent faire l'objet d'une réflexion stratégique intense et approfondie en amont au sein de son cabinet d'avocat pour construire et développer sa communication digitale. A - Qu'est-ce qu'une bonne communication digitale ?

Dans son acception globale, la communication digitale consiste à diffuser, échanger, partager des informations et créer des interactions sur tous supports dématérialisés selon une stratégie bien pensée en amont. Son site, ses comptes "réseaux sociaux" ou une application mobile seront autant d'outils qui permettront de déployer sa communication et sa notoriété. Digital ou numérique, tout dépend de l'exigence linguistique que l'on porte à la langue française quant à cette définition. Désormais, parler de digital est largement répandu, tant et si bien que beaucoup ne se posent plus la question.

Passer du papier ou des rencontres et échanges verbaux à des messages n'implique pas seulement un changement de vecteur de communication, c'est repenser en totalité sa stratégie de communication, avec une nouvelle logique de contenus, une temporalité renouvelée et une façon de travailler, impliquant souvent une collaboration de plusieurs personnes, soit internes au cabinet, soit avec le soutien d'une agence de communication.

Disposer d'un site esthétique présentant son activité, "twitter" régulièrement et "liker" des articles, c'est une base, mais une bonne communication digitale c'est tout autre chose : elle implique une grande variété d'actions, une méthodologie. Si des actions éparses peuvent même s'avérer contre productives (messages peu ciblés, diffus, ligne éditoriale peu définie...), il est, en revanche, essentiel avant toute action de construire une stratégie pertinente et murement réfléchie.

  • Construire sa stratégie avant tout

Il faut prendre le temps de faire un bilan de son activité : quelles sont les valeurs et les expertises à mettre en lumière, celles à développer, quels sont ses clients ? Leurs attentes, leurs besoins ? Essayer de se mettre à leur place, les interroger. Quelle typologie de client souhaite-t-on développer ? Qu'apprécient-ils ? Quelles sont les insatisfactions exprimées, quels sont ses concurrents ?

Cette étape d'audit, réalisée en interne ou par une agence de communication, comme toute stratégie marketing, sera déployée de la façon suivante :

- une analyse de la segmentation des clients, le choix de privilégier certains prospects cibles en fonction d'un potentiel de chiffre d'affaires et de définir un positionnement clair, porteur et différenciant. Un outil CRM (custom relationship management) de qualité complété par l'accompagnement d'un conseil en stratégie de développement qui pourra venir en soutien de ceux et celles qui ne maîtrisent pas les techniques marketing ;

- un audit d'image pourra être réalisé également (enquêtes clients, étude concurrentielle...) ;

- une synthèse (SWOT, facteurs clés de succès, benchmark) permettra d'avoir une vision claire de la situation actuelle et de définir ses objectifs à court et moyen terme ;

- les actions pour atteindre ses objectifs ; définition d'une stratégie de contenus sur le site, les réseaux sociaux, optimisation de l'ergonomie du site, renforcement de l'interactivité via les réseaux et la mise en place d'un espace utilisateur sur le site..

Parés de ces éléments de synthèse, l'on doit construire sa stratégie, un plan de communication.

Comment mettre en place sa stratégie digitale ?

Pour atteindre une forte visibilité de lancement ou bien la renforcer sur un domaine de compétence spécifique, le cabinet devra actionner tous les leviers de la communication digitale.

Les étapes pourront alors s'enchaîner ainsi :

1/ définition de la ligne éditoriale (informations à chaud, informations froides, avis d'experts, cas pratiques, informations technique, vulgarisation) pour adresser ses messages à la bonne personne, au bon moment et sur le bon support ;

2/ un comité éditorial hebdomadaire idéalement pour définir les principaux sujets, l'angle, le séquençage de la publication ;

3/ le choix des supports de diffusions.

Pour un article de fond, un avis d'expert, le choix de la publication sur le site sera privilégié.

Pour une actualité à chaud et brute telle l'annonce d'un nouvel arrêt ou d'un texte de loi, le choix de Twitter sera privilégié.

  • Créer son site internet

Véhicule de sa visibilité et vitrine de son savoir-faire, le site internet du cabinet est un moyen quasi incontournable de son identité numérique. Le réflexe pour la plupart des recherches de professionnels notamment consiste à interroger les moteurs de recherche ; il est donc nécessaire de disposer a minima d'une identité visuelle par un site internet consultable sur tous supports (PC, mobiles , tablettes). La réalisation d'un site en "responsive design" est désormais une exigence pour tout concepteur de sites.

Un site esthétique, ergonomique et attractif, une présentation des expertises et de ses experts : fort bien. Mais, l'essentiel réside surtout dans la façon de le faire vivre et c'est précisément là que la stratégie digitale prend toute sa mesure : la stratégie de contenu, on le rappelle encore, le bon sujet, le bon angle diffusé au bon moment et répondant aux attentes de ses prospects et clients pour un référencement optimisé (SEO ou search engine optimization).

Ayant défini les thématiques sur lesquelles on doit prioriser sa communication et son engagement en fonction de sa ligne éditoriale, un article par semaine est idéal (un par mois a minima) court, synthétique sur l'actualité ou un cas pratique présenté renforceront son référencement et sa visibilité. 1 500 à 2 000 signes suffisent. Il importera de soigner la rédaction du titre, court et intégrant les mots clés représentatifs les plus impactants de son contenu en y ajoutant une illustration. De nombreux sites proposent des photos ou dessins libres de droit ou bien à un prix très modique.

Si l'on a rédigé un article publié dans la presse, il convient de demander à la rédaction la possibilité de le publier sur son site, sans oublier de mentionner la source de la publication d'origine. La plupart des supports ne poseront pas de difficulté, dès lors que la mise en ligne sur son site est effectuée après publication de l'article dans le journal ou la revue. Ces précautions d'usage sont importantes pour entretenir de bons rapports avec la presse.

Alternative intéressante pour présenter un cas pratique ou un texte de loi, le legal design est apparu depuis plusieurs années. Editeurs juridiques et presse grand public l'utilisent et certains avocats (E. Pierrat, 100 infographies pour déchiffrer la justice, éd. La Martinière) en font même des ouvrages.

Par des schémas, des tableaux et dessins, le legal design permet de rendre plus explicite et donc plus accessible une information juridique pour ses clients tant pour les étudiants, le grand public et les entreprises. La réalisation d'une information traduite sous forme de legal design implique, outre la parfaite maîtrise du sujet de droit, l'utilisation de logiciel dédié (Xmind ou Easel.ly, piktochart ) ou l'accompagnement par un professionnel de la communication qui proposera les solutions les plus adaptées.

Enfin, la création de vidéos pour mettre en valeur son expertise sera l'un des moyens les plus efficaces pour renforcer son positionnement d'expert et optimiser son référencement, ainsi que son image auprès de ses prospects et clients. Il faut oublier la vidéo "institutionnelle" sur son cabinet sauf pour la présentation de son activité sur son site et privilégier la vidéo présentant un contenu utile et pertinent (cas pratique, impact d'une jurisprudence récente, commentaire d'une actualité porteuse). Il importe de raconter une histoire, avec un séquençage bien étudié et fluide de son scénario, afin de captiver l'attention de ses auditeurs, et de ses prospects. La structure du scénario doit être simple et percutante : une question et des éléments de réponses concis et précis. Il faut compter 5 à 6 lignes de réponses par question. Les vidéos doivent être courtes (1mn 30- 2mn chacune et dynamiques).

Cette démarche nécessite un travail préalable de réflexion et de conception du story telling qui devra être mené avec un prestataire aguerri.

Si la stratégie de contenus est prioritaire pour sa visibilité, il faudrait renforcer également la dynamique de son site et son service clients en proposant des newsletters qui permettront de récupérer des données précieuses pour enrichir son fichier prospects et en le dotant d'un espace utilisateur qui permet de renforcer les liens avec ses clients : partage de dossiers, archivages des correspondances, ressources documentaires juridiques seront intégrés par exemple dans cet espace. Les Solutions de My cercle, Diapaz ou Secib notamment proposent des outils qui pourront être intégrés sur son site. Un traitement des données personnelles sera rigoureusement organisé selon les derniers textes en vigueur (loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique aux fichiers et aux libertés N° Lexbase : L8794AGS, loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016, pour une République numérique (N° Lexbase : L4795LAT).

  • Le community management

Le community management intègre l'ensemble des actions qui permettent de répondre à des objectifs définis par la stratégie de son cabinet : accroître la visibilité et la notoriété de son cabinet en publiant des informations, animant des échanges et partages d'expériences.

Le site internet en est l'un des principaux supports pour la diffusion de ses contenus, mais c'est sur les réseaux sociaux que se concentrent les actions.

Dans le respect de la ligne éditoriale définie, deux principales actions seront donc mises en oeuvre :

- sur le site internet, par la publication d'articles réguliers (voir ci-dessus) viralisés ensuite via les réseaux définis via les boutons de partage intégrés par un webmestre sous les articles.

- sur les réseaux sociaux proprement dits.

B - Quel réseau social investir ?

Selon les principaux objectifs définis (quelles cibles de clientèle ? Quel positionnement pour le cabinet, quelles expertises mettre en valeur ?), un choix peut être opéré entre les différents réseaux sociaux.

Pour une cible B to B, LinkedIn sera privilégié.

Dédié aux professionnels pour les professionnels, doté d'une dimension internationale, mise en valeur des expertises fortes et acteurs influents, LinkedIn est parfaitement adapté à l'optimisation du branding de la marque et son e-reputation, la conquête de nouveaux clients, le développement ou le renforcement d'une activité.

Plusieurs options de communication sont possibles (profil, page société, groupe), intégrant les profils et informations les plus pertinents (selon affinité, l'importance de l'information et sa fraîcheur). LinkedIn pourrait, le cas échéant, constituer un ersatz à un site ou blog entreprise.

Inviter des prospects, relations professionnelles, intégrer des groupes liés à son activité professionnelle ainsi qu'à ses compétences et participer ensuite font partie des premières actions stratégiques lors du lancement de sa page entreprise. Il y a même la possibilité d'obtenir les noms de tous les membres d'un groupe même si on ne l'a pas intégré.

Il convient d'enrichir sa page par des articles intéressant ses relations avec l'outil Pulse, en écrivant des articles deux fois par mois, courts synthétiques et pratiques, de 1 500 signes environ. Les articles longs feront l'objet de 2 ou 3 publications successives et permettront à court ou moyen terme de capter l'écoute, l'intérêt et la curiosité de prospects.

Partager et liker ponctuellement les publications de spécialistes de qualité feront partie des actions quotidiennes de community management dans le cadre d'une veille. Rappelons ici que LinkedIn est un puissant outil de veille que l'on peut optimiser via un paramétrage spécifique.

Facebook, l'autre grand réseau ne devra pas être négligé selon les secteurs d'activité ciblés (grande distribution, marques, mode, IP-IT), et clients personnes physiques. Les petites et moyennes entreprises étant également souvent présentes sur Facebook, une page Facebook pourra être créée et animée si elle représente une part de ses clients et prospects. A noter également l'arrivée de Workplace la plateforme business de Facebook, qui va sans doute se développer dans le monde du travail.

Quant à Twitter, à la fois utilisé pour la veille et la viralisation de ses contenus, en 140 caractères, il reste l'outil de veille très performant et de communication à chaud, en prenant toutes les précautions nécessaires afin d'éviter tout message hâtif. Au-delà des tweets et retweets (3 par jour est un bon rythme), l'emplacement des bons hashtags et l'intégration de photos ou de toute illustration pour une bonne visibilité, Twitter permet aussi de rapides sondages en questions fermées. Utile pour faire interagir ses followers...

Pour gagner du temps dans ses veilles et ses envois qualifiés, il convient de créer des listes qualifiées de ses followers, au fur et à mesure qu'ils s'inscrivent.

Enfin, la présence sur Google + devra être installée pour des raisons de référencement.

C - Quelles actions mettre en place ?

Il n'est pas question ici de développer le référencement commercial (Adwords et campagnes sponsorisées) mais de privilégier le SEO ou référencement naturel. Grace à de articles pertinemment écrits et intégrant des principaux mots clés qui caractérisent son article, répétés au sein de son article, une fréquence régulière de ses publications, et l'on obtient ainsi un référencement de qualité.

Bien entendu, pour booster un développement d'activité ou quelques tweets porteurs, il sera possible de mettre en oeuvre des actions de sponsoring à étudier de préférence avec un professionnel.

Trois actions guideront son community management : écouter/veiller, pour suivre les comptes les plus influents, parler par des Tweets et des citations et des questions à ses followers, répondre à un tweet ou à une question posée. Comme l'exprime l'une des grandes références en social média John Munsell : "Le contenu est roi, la conversation est reine".

Un calendrier rédactionnel et un point hebdomadaire sont conseillés, le tout sera synthétisé par exemple sur matrice Excel (par jour et selon le réseau social).

La veille quotidienne réalisée chaque matin permettra d'animer le compte Twitter. L'outil de curation de contenus Netvibes est l'un des plus pertinents. Il est également possible d'y intégrer les veilles programmées sur Google.

Trois Tweets par jours sont conseillés pour développer la visibilité du réseau en utilisant les hashtags pertinents (pas plus de 3 par messages en principe).

Les articles et informations repérées pourront également être partagées sur les autres réseaux via la plateforme Hootsuite qui permet la diffusion simultanée.

Le séquençage des envois devra être bien étudié selon les profils que l'on souhaite capter : l'idéal étant le matin avant 10 H, pendant l'heure du déjeuner et le soir entre 17 et 21 h.

Afin de piloter l'activité de community management et son suivi, confirmer ou informer les actions prises, il importe de mesurer les performances réalisées. Les indices de performances ou key performance indicators (KPI) devront être mis en place en fonction des objectifs à atteindre : nombre de followers, d'engagements sur les messages diffusés, nombre de nouveaux contacts, de prospects.

L'ouverture d'un compte Google analytics constitue l'outil ad hoc pour ce suivi.

Un pilotage hebdomadaire ou a minima mensuel permettra de suivre les actions, de les réorienter et de les adapter. Chacun des réseaux sociaux intègre des outils statistiques permettant d'extraire des données chiffrées qu'il faudra ensuite interpréter.

Conclusion

La communication digitale est devenue l'un des vecteurs essentiels de son développement. Elle implique une intense réflexion préalable sur la stratégie du cabinet et les actions efficaces pour la mettre en oeuvre régulière et bien séquencée sur son site internet et les réseaux sociaux pour établir une relation de proximité avec ses clients. Il n'existe pas de solutions idéales, il importe de tenter des actions, des expressions sur les différents supports et de les revoir selon les réactions obtenues par vos lecteurs pour optimiser les interactions. Ainsi que l'écrivait si justement Montesquieu : "pour faire de grandes choses, il ne suffit pas d'être au-dessus des hommes, il suffit d'être avec eux".

newsid:455509

Avocats/Institutions représentatives

[Brèves] Elections au conseil de l'Ordre : régularité de la règle du tirage au sort

Réf. : CE 1° et 6° ch.-r., 30 novembre 2016, n° 393896, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A8748SNC)

Lecture: 2 min

N5533BWT

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/36535274-derniere-revue-en-pdf#article-455533
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Le 08 Décembre 2016

N'est pas annulé le 1° de l'article 8 de l'ordonnance du 31 juillet 2015, relative à l'égal accès des femmes et des hommes au sein des Ordres professionnels (N° Lexbase : L6761KDR), prévoyant la règle du tirage au sort, dans les cas où le conseil de l'Ordre comprend un nombre impair de membres. L'application du tirage au sort est susceptible de conduire, pour les cas limités où il trouvera à s'appliquer, à ce que l'égal accès des femmes et des hommes à ces conseils soient assuré dans des conditions moins optimales, eu égard à l'aléa statistique qu'il implique, le dispositif mis en place par l'ordonnance ne méconnaît pas pour autant l'objectif de favoriser une représentation équilibrée des femmes et des hommes lors des élections aux conseils de l'Ordre des avocats. Cette règle n'a pas pour effet de dessaisir les électeurs de leur liberté de choix aux élections ordinales ni de porter atteinte à "la libre expression du suffrage" ; de même et en tout état de cause, cette règle serait sans incidence sur le "caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion". Enfin, cette règle ne méconnaît pas le principe d'indépendance ou le caractère libéral de la profession d'avocat. Telle est la solution d'un arrêt du Conseil d'Etat, rendu le 30 novembre 2016 (CE 1° et 6° ch.-r., 30 novembre 2016, n° 393896, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A8748SNC). Dans cette affaire, plusieurs barreaux contestaient le 1° de l'article 8 de l'ordonnance du 31 juillet 2015, relative à l'égal accès des femmes et des hommes au sein des Ordres professionnels, demandant son annulation en ce qu'il prévoit que les conseils des barreaux comptant plus de trente électeurs, dont les membres sont élus pour trois ans et sont renouvelables par tiers tous les ans par les avocats du barreau en cause, inscrits et honoraires, seront désormais élus au scrutin secret binominal majoritaire à deux tours, chaque binôme étant composé de candidats de sexe différent ; et précise que "dans les cas où le conseil de l'Ordre comprend un nombre impair de membres, est considéré comme élu le membre du dernier binôme paritaire élu tiré au sort". Le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient l'habilitation reçue du Parlement et seraient contraires aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er de la Constitution (N° Lexbase : L0827AH4) est écarté. Les autres moyens le sont tout autant (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E4292E74).

newsid:455533

Bancaire

[Brèves] Reforme du régime juridique en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme

Réf. : Ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016 renforçant le dispositif français de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (N° Lexbase : L4816LBY)

Lecture: 2 min

N5546BWC

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/36535274-derniere-revue-en-pdf#article-455546
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Le 09 Décembre 2016

Une ordonnance, publiée au Journal officiel du 2 décembre 2016 (ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016 renforçant le dispositif français de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme N° Lexbase : L4816LBY), procède principalement à la transposition de la Directive 2015/849 du 20 mai 2015 (N° Lexbase : L7601I8Z), afin de moderniser le régime juridique en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Elle permet (art. 2) d'élargir et de clarifier le périmètre des entités assujetties aux règles applicables en matière de lutte anti-blanchiment et financement du terrorisme (C. mon. fin., art. L. 561-2 N° Lexbase : L5133LBQ). L'article 3 de l'ordonnance clarifie et renforce les dispositions sur l'évaluation des risques conduite par les personnes assujetties (C. mon. fin., art. L. 561-4-1 N° Lexbase : L4967LBL), ainsi que les procédures de contrôle et d'échange d'informations à mettre en place, y compris au niveau des groupes financiers et non financiers (C. mon. fin., art. L. 561-33 N° Lexbase : L5167LBY). Dans ses articles 4 et 5, le texte permet également de clarifier et renforcer les prérogatives de la cellule de renseignement financier (Tracfin), notamment en matière d'échange d'information avec les personnes assujetties et les cellules de renseignement financier étrangères. L'article 6 de l'ordonnance transpose les dispositions relatives à la définition d'une organisation et de procédures adaptées pour le partage d'information au sein des groupes financiers et non-financiers ainsi qu'à la mise en place au sein de ces groupes de mesures de vigilance adaptées. Les articles 7, 9, 12, 13, 15 et 16 ont pour objet de renforcer le dispositif de supervision et de sanction des personnes assujetties à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, conformément à ce qui est prévu dans la Directive transposée. L'ordonnance procède dans ses articles 8 et 10 à la création des registres des bénéficiaires effectifs des personnes morales et des trusts. L'article 11 consacre une obligation, et non plus une faculté, pour les plateformes de don de disposer du statut d'intermédiaire en financement participatif et donc d'être assujetties à la lutte anti-blanchiment. En outre, l'article 14 prévoit la possibilité de définir par voie règlementaire un seuil spécifique concernant les paiements en espèces effectués par les non-résidents au profit des personnes assujetties à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Enfin, le texte contient des dispositions transitoires, notamment celles permettant aux entreprises de se préparer à la collecte et à la communication des informations concernant leurs bénéficiaires effectifs aux registres du commerce et des sociétés, ainsi qu'une disposition reportant au 26 juin 2017 l'extension du champ des personnes politiquement exposées faisant l'objet de mesures de vigilance renforcées à celles qui résident en France en plus de celles qui résident à l'étranger.

newsid:455546

Collectivités territoriales

[Brèves] Prêches appelant à la violence et à la discrimination : rejet de la demande de suspension de la décision de fermeture de la salle de prière

Réf. : CE référé, 6 décembre 2016, n° 405476 (N° Lexbase : A9677SNQ)

Lecture: 1 min

N5610BWP

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Le 09 Décembre 2016

Les prêches appelant à la violence, à la discrimination des femmes et combattant les confessions chrétiennes et juives étant suffisamment établis, la demande de suspension de la décision de fermeture de la salle de prière doit être rejetée. Ainsi statue le Conseil d'Etat dans une ordonnance rendue le 6 décembre 2016 (CE référé, 6 décembre 2016, n° 405476 N° Lexbase : A9677SNQ). L'article 8 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955, relative à l'état d'urgence (N° Lexbase : L6821KQP), actuellement en vigueur permet au préfet de fermer provisoirement "les lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence ou une provocation à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes". Sur le fondement de cet article, le préfet des Yvelines a, par un arrêté du 2 novembre 2016, ordonné la fermeture de la salle de prière d'une commune de ce département. Dans sa décision, le juge des référés du Conseil d'Etat a relevé que les fidèles pouvaient fréquenter trois autres mosquées à moins de cinq kilomètres. S'agissant des prêches appelant à la violence, discriminant les femmes, refusant l'autorité des institutions publiques ou combattant les confessions juives ou chrétiennes, le juge des référés a relevé que l'association soit ne les niait pas réellement, soit avançait des arguments qui n'en diminuait pas le caractère dangereux. La circonstance que la substance de ces propos serait extraite du Coran ou que certaines déclarations appellent aussi à respecter ou à accueillir les fidèles d'autres confessions n'en diminue pas la violence. Enfin, les violences entre enfants en milieu scolaire et le rejet de femmes non voilées sont estimés peu fréquents par l'association, mais ne sont pas démentis. Dans ces conditions, le juge des référés du Conseil d'Etat estime que la décision de fermeture provisoire, qui conserve ses effets jusqu'à la fin de l'état d'urgence, ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Il rejette donc l'appel de l'association et la salle de prière demeure provisoirement fermée.

newsid:455610

Électoral

[Brèves] Conditions dans lesquelles un électeur peut obtenir la communication de la liste électorale de toute commune

Réf. : CE, 2 décembre 2016, n° 388979, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A8042SLG)

Lecture: 2 min

N5613BWS

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Le 30 Décembre 2016

Dès lors que le maire a pu légalement estimer qu'il existait des raisons sérieuses de penser que l'usage des listes électorales risquait de revêtir, au moins en partie, un caractère commercial, il était en droit de refuser, pour ce motif, de communiquer la liste électorale. Telle est la solution d'un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 2 décembre 2016 (CE, 2 décembre 2016, n° 388979, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8042SLG). L'article L. 28 du Code électoral (N° Lexbase : L2534AA4) prévoit que les listes électorales sont conservées par les communes et que "tout électeur, tout candidat et tout parti ou groupement politique peut prendre communication et copie de la liste électorale". L'article R. 16 du même code (N° Lexbase : L4502IYE) prévoit que, pour obtenir la copie de la liste électorale, l'électeur doit s'engager à ne pas en faire un usage commercial. Le Conseil d'Etat précise ici les pouvoirs du maire ou du préfet saisis d'une telle demande : si l'électeur qui demande copie de listes électorales signe l'engagement de ne pas en faire un usage commercial mais qu'il existe des raisons sérieuses de penser que l'usage des listes électorales risque de revêtir, en tout ou partie, un caractère commercial, ils peuvent rejeter la demande de communication. Ils peuvent solliciter du demandeur qu'il produise tout élément d'information de nature à leur permettre de s'assurer de la sincérité de son engagement. L'absence de réponse à une telle demande n'a pas d'effet automatique mais peut être prise en compte parmi d'autres éléments afin d'apprécier s'il convient ou non de communiquer la liste. En l'espèce, le maire avait demandé de telles précisions et le demandeur n'avait pas répondu. Etant donné que cet électeur avait une profession de "conseil juridique au soutien des entreprises" pour laquelle une telle liste pouvait être utile, qu'il avait déjà demandé la communication d'une liste électorale d'une autre grande ville et qu'il s'était abstenu de fournir toute explication sur les motifs de sa demande, le Conseil d'État a jugé que le maire avait pu légalement estimer qu'il existait des raisons sérieuses de penser que l'usage des listes électorales risquait de revêtir, au moins en partie, un caractère commercial et refuser, pour ce motif, de communiquer la liste électorale (cf. l’Ouvrage "Droit électoral" N° Lexbase : E7298EQD).

newsid:455613

Entreprises en difficulté

[Brèves] Revendication de biens fongibles : conflit entre vendeurs réservataires impayés ayant vendu des choses semblables

Réf. : Cass. com., 29 novembre 2016, n° 15-12.350, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4620SLP)

Lecture: 2 min

N5443BWI

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Le 08 Décembre 2016

Il résulte de l'article L. 624-16 du Code de commerce (N° Lexbase : L3509ICX) que l'existence en nature des biens fongibles pouvant être revendiqués dans la procédure collective de l'acquéreur s'apprécie au jour de l'ouverture de celle-ci. Lorsque plusieurs vendeurs avec réserve de propriété revendiquent, dans le délai de trois mois prévu par l'article L. 624-9 du même code (N° Lexbase : L3492ICC), les mêmes biens, ceux-ci doivent leur être restitués à proportion de la quantité livrée par chacun d'eux et restant impayée à la date de l'ouverture. Il en résulte que, si l'administrateur judiciaire peut, conformément à l'article L. 624-17 du Code de commerce (N° Lexbase : L1413HI8), acquiescer à de telles demandes de revendication, il ne peut procéder à la restitution des biens avant l'expiration du délai de revendication. Telle est la solution énoncée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 29 novembre 2016 (Cass. com., 29 novembre 2016, n° 15-12.350, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4620SLP). En l'espèce une société (la débitrice) a fait l'objet, le 8 mars 2012, d'une procédure de sauvegarde avec désignation d'un administrateur. Le 4 avril 2012, un créancier a revendiqué 32 001 litres de carburant qu'il avait livrés à la société débitrice avec réserve de propriété sans être payée, ou leur contre-valeur. La cour d'appel accueille cette demande dans la limite de 3 740 litres. Pour ce faire, l'arrêt d'appel énonçant que l'administrateur peut acquiescer à une demande de revendication sans attendre l'expiration du délai de revendication, a relevé qu'à la date de l'ouverture de la procédure collective, il restait dans les cuves de la société débitrice 80 000 litres de carburant. Ainsi, après acquiescement, le 19 mars 2012, par l'administrateur, à une demande de revendication formée le 9 mars précédent par un autre fournisseur et portant sur 65 000 litres, la revendication du "deuxième" créancier, en l'espèce, ne pouvait plus s'exercer que sur la différence, soit 15 000 litres, et cette quantité devait être partagée proportionnellement aux montants de leurs créances respectives entre ce dernier et un troisième fournisseur créancier, qui avaient présenté concomitamment une demande de revendication. Enonçant la solution précitée, la Cour de cassation censure l'arrêt d'appel au visa des articles précités : en statuant ainsi, en privilégiant le revendiquant le plus diligent au détriment des autres fournisseurs ayant également présenté leurs demandes dans le délai légal, la cour d'appel a violé les textes susvisés (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E5047E73 ; N° Lexbase : E4441EY7).

newsid:455443

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Opération d'apport partiel d'actifs : pas d'obligation pour la société apporteuse de calculer la parité d'échange retenue sur la base de la valeur réelle des actifs apportés

Réf. : CE 10° et 9° ch.-r., 28 novembre 2016, n° 378793, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A3762SLW)

Lecture: 2 min

N5579BWK

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Le 09 Décembre 2016

Ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-424 DC du 29 décembre 1999 (N° Lexbase : A8787ACG), la délivrance de l'agrément prévu par les dispositions du 3 de l'article 210 B du CGI (N° Lexbase : L6590K8L) constitue un droit pour les sociétés qui remplissent les conditions objectives, nécessaires et suffisantes fixées par ces dispositions ; au nombre de ces conditions, ne figure pas l'obligation de calculer la parité d'échange retenue pour une opération d'apport partiel d'actifs sur la base de la valeur réelle des actifs apportés. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 28 novembre 2016 (CE 10° et 9° ch.-r., 28 novembre 2016, n° 378793, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3762SLW). En effet, les opérations d'apport partiel d'actifs qui ne remplissent pas les conditions prévues au 1 de l'article 210 B du CGI bénéficient, sur agrément, du régime de faveur prévu à l'article 210 A de ce code (N° Lexbase : L9521ITS) lorsqu'elles remplissent les conditions prévues au 3 de l'article 210 B. En l'espèce, la société requérante a sollicité le bénéfice des agréments prévus notamment au 3 de l'article 210 B afin de bénéficier des régimes prévus à l'article 210 au titre, d'une part, de l'apport partiel d'actifs de sa branche complète et autonome d'activité de transport et logistique au profit d'une filiale et, d'autre part, de l'attribution à une autre société filiale des titres reçus en contrepartie de cette opération. La société requérante a procédé à cet apport partiel d'actifs le 2 novembre 2009. Par décisions du 28 décembre 2009, le ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l'Etat a refusé à cette société le bénéfice des agréments sollicités. Cependant, la Haute juridiction en a décidé autrement. Pour les magistrats, en refusant de délivrer à cette société l'agrément qu'elle avait demandé sur le fondement du 3 de l'article 210 B au motif que la rémunération de l'apport partiel d'actif, objet du litige, avait été calculée sur la base des valeurs nettes comptables, le ministre lui a opposé une condition non prévue par ce texte .

newsid:455579

Huissiers

[Brèves] Elections des délégués à la Chambre nationale des huissiers de justice : le vote par procuration est bel et bien possible !

Réf. : Cass. civ. 1, 30 novembre 2016, n° 15-20.210, FS-P+B (N° Lexbase : A8301SNR)

Lecture: 1 min

N5528BWN

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Le 08 Décembre 2016

La règle de la voix unique, découlant du principe général d'égalité des électeurs devant le suffrage, n'exclut pas le droit de voter par procuration qui, s'il permet à un absent d'exprimer sa voix en ayant recours à un autre électeur qui le représentera, n'a pas pour effet d'attribuer à ce dernier un suffrage supplémentaire ; ainsi, l'alinéa 7 de l'article 67 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 (N° Lexbase : L6897A49), modifié, qui prévoit que "chaque électeur n'a qu'une seule voix", signifie qu'un même huissier ne peut disposer de plusieurs voix ; partant cette disposition n'interdit pas le recours à la procuration de vote. Telle est la solution dégagée par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 30 novembre 2016 (Cass. civ. 1, 30 novembre 2016, n° 15-20.210, FS-P+B N° Lexbase : A8301SNR). Dans cette affaire la chambre départementale des huissiers de justice de Paris, chargée, en tant que chambre régionale, d'organiser l'élection d'un de ses délégués à la Chambre nationale des huissiers de justice, a, par une délibération du 6 novembre 2013, autorisé l'usage de procurations de vote pour ce scrutin, dont la date était fixée au 13 novembre. Le délégué sortant, M. X, ayant été réélu par quatre-vingt-quinze voix contre cinquante-trois à Mme Y, celle-ci a exercé le recours prévu par l'article 92 du décret du 29 février 1956. Elle soutenait que le vote par procuration était interdit pour l'élection des délégués nationaux, et a demandé, outre l'annulation des votes exprimés selon cette modalité, celle, consécutive, du scrutin dont la sincérité se trouvait, selon elle, affectée. La cour d'appel ayant rejeté ses demandes, elle a formé un pourvoi. En vain. En effet, énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi.

newsid:455528

Pénal

[Brèves] Précisions sur les critères devant être pris en compte dans la motivation des décisions de refus d'aménagement d'une peine d'emprisonnement sans sursis

Réf. : Cass. crim., 29 novembre 2016, deux arrêts, n° 15-86.116, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A4623SLS) et n° 15-83.108, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A4622SLR)

Lecture: 2 min

N5576BWG

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Le 30 Décembre 2016

Les juges ne sont tenus de spécialement motiver leur décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu que pour refuser d'aménager la peine d'emprisonnement sans sursis qu'ils prononcent, lorsque cette peine est d'une durée qui n'excède pas deux ans, ou un an en cas de récidive, et non pour justifier la nécessité d'une telle peine. Telle est la solution énoncée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans deux arrêts rendus le 29 novembre 2016 (Cass. crim., 29 novembre 2016, deux arrêts, n° 15-86.116, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A4623SLS et n° 15-83.108, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A4622SLR). Dans la première espèce, un gérant de société avait été condamné à une peine d'un an d'emprisonnement du chef de banqueroute et de direction, gestion ou contrôle d'une société, malgré une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler tout entreprise commerciale. Pour ce faire, la cour d'appel a relevé que les multiples interdictions de gérer et la liquidation dont il avait fait l'objet avaient été totalement inefficaces pour mettre fin à ses agissements frauduleux et gravement préjudiciables à la collectivité et que son comportement traduisait un risque non négligeable de réitération des faits, ce qui justifiait une peine ferme. Dans la seconde espèce, M. Z. avait été condamné à une peine de deux mois en première instance puis quatre mois en cause d'appel. Les juges d'appel avaient alors retenu que les faits étaient d'une particulière gravité, compte tenu du discrédit jeté, de manière gratuite et réitérée, sur les forces de l'ordre. Sur la personnalité du prévenu, ils ont relevé qu'il avait été condamné à quatorze reprises pour de nombreuses infractions, qu'il avait fait l'objet de huit retraits de crédit de réduction de peine et qu'il ne semblait pas manifesté de volonté d'insertion sociale mais, au contraire, se complaisait dans son oisiveté. Dans les deux cas, la cour d'appel a donc considéré que la gravité des infractions, la personnalité des auteurs, et le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction rendaient nécessaire une peine d'emprisonnement sans sursis et que, en l'absence d'éléments suffisants, elle était dans l'impossibilité de prononcer une mesure d'aménagement. Les protagonistes de chaque espèce avaient alors formé des pourvois, arguant de ce que la cour qui prononce une peine d'emprisonnement ferme devait motiver sa décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale. A tort selon la Chambre criminelle qui, énonçant la solution précitée, rejette les deux pourvois .

newsid:455576

Procédure pénale

[Brèves] Publication d'une ordonnance relative à la décision d'enquête européenne en matière pénale

Réf. : Ordonnance n° 2016-1636 du 1er décembre 2016, relative à la décision d'enquête européenne en matière pénale (N° Lexbase : L4817LBZ)

Lecture: 1 min

N5512BW3

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Le 08 Décembre 2016

Conformément à l'habilitation prévue par l'article 118 de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l'efficacité et les garanties de la procédure pénale (N° Lexbase : L4202K87), a été publiée au Journal officiel du 2 décembre 2016, l'ordonnance n° 2016-1636 du 1er décembre 2016, relative à la décision d'enquête européenne en matière pénale (N° Lexbase : L4817LBZ). La nouvelle ordonnance transpose, dans la partie législative du Code de procédure pénale, la Directive 2014/41/UE, concernant la décision d'enquête européenne en matière pénale (N° Lexbase : L1121I3W). Ainsi, la décision d'enquête européenne remplace les instruments en vigueur de l'Union européenne, tendant à l'obtention d'éléments de preuve, notamment la Convention relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne du 29 mai 2000. La Directive permet d'unifier un droit de l'entraide judiciaire pénale au sein de l'Union européenne jusqu'alors fragmenté et parfois complexe, sur la base du principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice, fondement de la notion d'espace judiciaire européen. Toute décision d'enquête européenne émanant d'une autorité judiciaire d'un autre Etat membre devra ainsi être reconnue et exécutée de la même manière que s'il s'agissait de la décision d'une juridiction nationale, et elle ne pourra être refusée que dans des hypothèses exceptionnelles et limitativement énumérées par la loi. La décision d'enquête européenne constituera dès lors le socle et le droit commun des mécanismes et de coopération judiciaire pénale au sein de l'Union. Elle correspondra, dans le champ de l'entraide judiciaire aux fins de recueil d'éléments de preuve, le pendant du mandat d'arrêt européen dans celui de la coopération judiciaire aux fins de remise des personnes. Les dispositions de la présente ordonnance entreront en vigueur le 22 mai 2017.

newsid:455512

Procédure pénale

[Jurisprudence] Contrôle au faciès : aménagement de la preuve et engagement de la responsabilité de l'Etat pour faute lourde

Réf. : Cass. civ. 1, 9 novembre 2016, quatre arrêts, n° 15-24.212 (N° Lexbase : A0608SGM), n° 15-25.873 (N° Lexbase : A0611SGQ), n° 15-24.210 (N° Lexbase : A0607SGL) et n° 15-25.872 (N° Lexbase : A0610SGP), P+B+R+I

Lecture: 12 min

N5515BW8

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par Kaltoum Gachi, Avocat au barreau de Paris, Docteur en droit, Chargée d'enseignement à l'Université Paris II

Le 08 Décembre 2016

A l'occasion de ces décisions inédites du 9 novembre 2016, la première chambre civile de la Cour de cassation s'est prononcée sur les contrôles d'identité abusifs car opérés sur la base d'une discrimination à raison de la seule apparence physique. Cette opération de police, qui ne fait l'objet d'aucun procès-verbal de police, ni d'aucun récépissé contrairement à certains engagements qui avaient été pris sur ce point, n'en laisse pas moins des traces sur la personne arbitrairement contrôlée, parfois de manière systématique, ce qu'elle peut évidemment ressentir comme une mesure humiliante. Ainsi, au-delà de la question purement indemnitaire et sanctionnatrice de la responsabilité pour faute lourde sur le fondement de laquelle avaient ici agi les plaignants, c'est le principe même du "contrôle d'identité au faciès" qui est au coeur de ces arrêts faisant application d'un régime d'aménagement de la preuve aussi justifié que nécessaire. Le contrôle d'identité constitue une opération de police judiciaire ou administrative qui, tout en étant censée reposer sur des dispositions du Code de procédure pénale, dépend très largement de la pratique policière qui peut parfois cibler une catégorie de population choisie à raison de sa seule apparence physique. La nécessité d'encadrer ces contrôles, dont l'utilité n'est guère contestée, est une revendication légitime en ce qu'elle contribue à combattre une éventuelle discrimination sous-jacente, à raison de l'appartenance vraie ou supposée à une ethnie ou à une race. Elle est aussi une revendication constante et relativement ancienne portée par un certain nombre d'associations. Des études réalisées, notamment par le centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP), ont ainsi démontré que le choix des personnes contrôlées s'opérait en fonction de critères arbitraires, notamment la couleur de la peau. C'est précisément ces "contrôles au faciès", éminemment attentatoires à la dignité humaine en stigmatisant une catégorie de la population, qui ont conduit la première chambre civile de la Cour de cassation, à l'occasion de ces quatre arrêts, à prendre position sur la question, sous l'angle de la responsabilité de l'Etat pour faute lourde. Rappelons brièvement que dans ces affaires, plusieurs personnes avaient fait l'objet d'un contrôle d'identité qu'elles jugeaient abusif, celui-ci étant fondé uniquement sur leur apparence physique. Elles avaient alors assigné l'Agent judiciaire de l'Etat en réparation de leur préjudice moral. Par treize arrêts en date du 24 mars 2015, la cour d'appel de Paris avait, dans cinq cas, condamné l'Etat à verser des dommages-intérêts à la personne contrôlée et dans les huit autres, elle avait choisi de ne pas retenir sa responsabilité. Des pourvois avaient été formés contre tous ces arrêts, soit par l'Agent judiciaire de l'Etat, soit par les personnes contrôlées, conduisant la Cour de cassation à se prononcer, de façon inédite, sur des contrôles qui, pour reposer sur des fondements légaux différents, n'en posaient pas moins les mêmes difficultés.

L'article 78-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4994K8H), essentiellement issu des lois n° 81-82 du 2 février 1981, renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes (N° Lexbase : L8215HI4), n° 83-466 du 10 juin 1983, portant abrogation ou révision de certaines dispositions de la loi n° 81-82 du 2 février 1981 et complétant certaines dispositions du Code pénal et du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3377ITA) et n° 93-992 du 10 août 1993, relative aux contrôles et vérifications d'identité (N° Lexbase : L7427HXD), prévoit différents types de contrôles d'identité. En particulier, l'alinéa 1er de cet article permet de contrôler l'identité de toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction, qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit, qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit, qu'elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique, d'une peine ou d'une mesure suivie par le juge de l'application des peines ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire. L'alinéa 3 de l'article 78-2 régit les contrôles d'identité sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d'infractions qu'il précise. L'identité de toute personne peut ainsi être contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat (v. A. Decocq, J. Montreuil et J. Buisson, Le droit de la police, Litec, 2ème éd., 1998, p. 546). C'est sur ces fondements qu'étaient intervenus les différents contrôles d'identité en l'espèce. Les critères des contrôles n'étant pas clairement définis par loi, le risque de discrimination est évidemment important en visant des personnes dont certains policiers pourraient estimer, à travers leurs seuls préjugés, qu'elles présentent "un risque infractionnel non négligeable" (D. Mayer, Prévention et répression en matière de contrôles d'identité : une distinction trompeuse, D., 1993, p. 272).

La Cour de cassation a été amenée, à l'occasion des pourvois qui lui étaient soumis, à préciser les conditions dans lesquelles ces personnes pouvaient apporter la preuve d'un contrôle d'identité discriminatoire. Seuls quatre de ces arrêts seront évoqués dans le présent commentaire, les développements pouvant largement dépasser leur cadre pour s'appliquer aux autres décisions rendues le même jour. Dans ces affaires, la Haute juridiction est venue entériner l'aménagement de la preuve qui avait été consacré par les juges du fond pour en faciliter la charge (I). Une fois la preuve de la discrimination établie, la Cour de cassation s'est naturellement prononcée sur les conséquences de ces "contrôles au faciès" justifiant l'engagement de la responsabilité de l'Etat pour faute lourde (II).

I - L'aménagement de la preuve de la discrimination lors d'un contrôle d'identité

La Cour de cassation a souligné, dans les espèces qui lui étaient soumises, les conditions dans lesquelles le contrôle discriminatoire pouvait être prouvé à travers une méthode qui peut être scindée en deux temps : dans un premier temps, la personne contrôlée doit apporter au juge des éléments laissant présumer l'existence d'une discrimination (A). Puis, dans un second temps, la présomption étant simple, l'administration peut rapporter la preuve contraire qui peut résulter soit de l'absence de discrimination, soit d'une différence de traitement justifiée par des éléments objectifs (B).

A - L'instauration d'une présomption simple de discrimination

A l'occasion de ces arrêts, la Haute juridiction n'a pas hésité à rappeler qu'il appartient à celui qui s'en prétend victime d'apporter des éléments de fait de nature à traduire une différence de traitement et laissant présumer l'existence d'une discrimination. Cette formule récurrente dans les arrêts du 9 novembre 2016 révèle que si la preuve pèse toujours sur le demandeur, et qu'aucun renversement de la charge de la preuve n'est donc consacré, celle-ci est en quelque sorte atténuée au profit de la partie qui s'estime victime de discrimination. En effet, cette dernière n'a pas à rapporter une preuve irréfutable et complète de discrimination, ce qui serait délicat sinon impossible, mais des éléments factuels laissant supposer que le contrôle est fondé sur des critères discriminatoires.

Cet aménagement de la preuve n'est pas sans rappeler les dispositions de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations (N° Lexbase : L8986H39), qui instaurent une présomption de discrimination et font peser la charge de la preuve de la non-discrimination sur le défendeur. Il faut rappeler que certaines juridictions de première instance avaient considéré que cette présomption n'était applicable que dans la relation employeur/salarié et l'avaient donc écartée. Pour autant, certaines cours d'appel avaient aménagé un régime de preuve fortement inspiré de cette loi en permettant à la personne s'estimant victime d'une discrimination lors d'un contrôle d'identité d'apporter la preuve de l'atteinte aux droits de la personne "par un faisceau de circonstances graves, précises et concordantes". Que cette présomption résulte directement de la loi ou qu'elle s'en inspire, l'essentiel est que la consécration d'un aménagement de la preuve est parfaitement justifiée en la matière tant il serait extrêmement délicat pour la personne arbitrairement contrôlée de rapporter la preuve de ce qu'elle allègue, le contrôle d'identité ne laissant aucune trace. En effet, aucun procès-verbal n'est établi à la différence des autres actes de procédure pénale, ni aucun récépissé remis à la personne, de sorte que la démonstration du caractère discriminatoire du contrôle n'est, de toute évidence, pas aisée. On soulignera que dans l'un des arrêts d'appel, la cour avait considéré, à très juste titre, que l'absence de rédaction d'un procès-verbal, l'absence d'enregistrement ou de remise de récépissé attestant de la réalisation de ces contrôles d'identité privait les intéressés de la possibilité de contester la mesure et, le cas échéant, son caractère discriminatoire. Elle avait alors jugé que cette situation constituait une entrave au contrôle juridictionnel en ayant pour effet de priver le justiciable de son droit au recours effectif, tel que prévu par l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L4746AQT) et par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme. Ces motifs, qui n'ont pas été expressément repris par la Cour de cassation, ne peuvent toutefois qu'être approuvés.

Une fois les éléments factuels rapportés par la personne contrôlée, celle-ci est présumée avoir subi une mesure discriminatoire mais ces éléments doivent être individualisés ou, à tout le moins, adaptés aux circonstances de l'espèce. En effet, la Cour de cassation a estimé que "les études et informations statistiques produites attestant de la fréquence de contrôles d'identité effectués, selon des motifs discriminatoires, sur une même catégorie de population appartenant aux 'minorités visibles', c'est-à-dire déterminée par des caractéristiques physiques résultant de son origine ethnique, réelle ou supposée", ne peuvent, à elles seules, suffire à laisser présumer une discrimination (n° 15-24.212). En revanche, lorsqu'un tel constat est complété par un témoignage aux termes duquel les opérations de contrôle ont visé, durant une heure trente, de façon systématique et exclusive, un type de population en raison de sa couleur de peau ou de son origine, la cour d'appel a justement considéré que la preuve de la discrimination était rapportée (n° 15-25.873). Cette présomption étant simple, l'administration peut naturellement la combattre en rapportant la preuve contraire.

B - La possibilité pour l'administration d'apporter la preuve contraire

En présence d'une présomption de discrimination, l'administration peut démontrer soit l'absence de différence de traitement, soit que celle-ci est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La Cour de cassation a pu, dans certaines hypothèses, se réfugier derrière l'appréciation souveraine des juges du fond. Ainsi, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt n° 15-24.210, deux personnes de type nord-africain avaient été contrôlées sur la voie publique sur le fondement de l'article 78-2, alinéa 1er, du Code de procédure pénale à la suite d'un vol aggravé commis à Saint-Germain-en-Laye. Pour rejeter le pourvoi formé par l'une des personnes contrôlées, la Cour de cassation a affirmé qu'"ayant souverainement estimé que la différence de traitement était justifiée par des éléments objectifs, en ce que la personne contrôlée répondait au signalement de l'un des suspects, la cour d'appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, sans inverser la charge de la preuve, en a exactement déduit que le choix de la personne contrôlée ne présentait pas de caractère discriminatoire". Dans le même sens, à l'occasion de l'arrêt n° 1244, si la cour d'appel avait retenu le caractère discriminatoire du contrôle d'identité effectué sur réquisitions judiciaires, son arrêt est censuré par la Cour de cassation qui a reproché à l'arrêt d'appel de ne pas avoir recherché si la différence de traitement n'était pas justifiée par des éléments objectifs, étrangers à toute discrimination, tenant au soupçon de commission d'une infraction que faisait naître l'attitude des deux hommes.

On le voit, si le plaignant parvient à franchir la première étape consistant à livrer à l'appréciation des magistrats des éléments factuels de nature à laisser présumer l'existence d'une discrimination, la possibilité doit être laissée à l'administration de rapporter la preuve d'une non-discrimination. Tel sera le cas, par exemple, si le comportement de la personne contrôlée laisse supposer qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction. On rejoint, ici, le motif du contrôle d'identité auquel est subordonnée sa légalité et qui, en procédure pénale, peut déboucher sur la nullité de l'opération, ce qui est tout à fait différent de la sanction encourue ici, à savoir la responsabilité de l'Etat pour faute lourde.

II - L'engagement de la responsabilité de l'Etat pour faute lourde

L'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire (N° Lexbase : L2419LB9), issu de l'article 11 de la loi n° 72-626 du 5 juillet 1972, instituant un juge de l'exécution et relative à la réforme de la procédure civile (N° Lexbase : L1056ITB), dispose que "l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice". Cette action est subordonnée à la preuve d'un déni de justice ou d'une faute lourde. C'est cette dernière notion qui justifie, en l'espèce, l'engagement de la responsabilité de l'Etat et sur laquelle il convient donc de revenir (A). Ce type de responsabilité trouve à s'appliquer car la personne faisant l'objet du contrôle est devenue, de ce seul fait, usager du service public de la justice et peut ainsi demander réparation de son préjudice moral à raison du fonctionnement défectueux de ce service public (B).

A - La notion de faute lourde

On pourrait penser, de prime abord, que le juge naturel de la faute lourde est le juge administratif. Toutefois, il faut rappeler que le Conseil constitutionnel a attribué un bloc de compétence au juge judiciaire en matière de contrôle d'identité en décidant qu'"il revient à l'autorité judiciaire gardienne de la liberté individuelle de contrôler en particulier les conditions relatives à la légalité, à la réalité et à la pertinence des raisons ayant motivé les opérations de contrôle et de vérification d'identité, qu'à cette fin il lui appartient d'apprécier, s'il y a lieu, le comportement des personnes concernées" (Cons. const., décision n° 93-323 DC du 5 août 1993 N° Lexbase : A8283ACR).

Néanmoins, le juge judiciaire doit faire application de la responsabilité en droit administratif et, partant, suivre les principes et règles posés par la jurisprudence administrative (v. not. Cass. civ. 2, 23 novembre 1956, n° 56-11.871 N° Lexbase : A7452CIT, D., 1957. 34, concl. Lemoine ; AJDA 1957, II, 91, chron. J. Fournier et G. Braibant ; JCP éd. G, 1956, II, 9681, note Esmein ; RDP, 1958, 298, note M. Waline). Les raisons de cette disjonction entre compétence juridictionnelle et règles matérielles ont pu être été synthétisées de la manière suivante : "l'opération de police judiciaire justifie la compétence du juge judiciaire, la mission de service public justifie l'application des règles du droit administratif" (B. Camguilhem, L'engagement de la responsabilité de l'Etat du fait des contrôles au faciès, AJDA, 2015, p. 1813).

Dans certaines des affaires qui lui étaient soumises ici, la Cour de cassation a saisi l'occasion de définir la faute lourde comme celle procédant "d'une déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi". Mais cette formule n'est pas propre aux contrôles d'identité. En effet, elle n'est pas nouvelle puisqu'elle résulte d'un arrêt d'Assemblée plénière de 2001 (Ass. plén., 23 février 2001, n° 99-16.165 N° Lexbase : A0716ATP, Bull. Ass. plén., n° 5). Pour certains commentateurs, cette décision avait marqué un infléchissement de la notion de faute lourde, l'Assemblée plénière s'écartant de la conception restrictive issue de la jurisprudence de la première chambre civile de la Cour de cassation, fondée sur la faute énorme, grossière, stupide, inexcusable, ou sur l'inaptitude, voire sur la méconnaissance grave et anormale des devoirs essentiels du juge dans l'exercice de ses fonctions (Cass. civ. 1, 3 octobre 1953, Bull. civ. I, n° 224).

Les présentes décisions s'inscrivent dans le sillage de cet infléchissement jurisprudentiel, la Cour de cassation estimant que le "contrôle au faciès" est en lui-même une faute lourde qui doit déboucher sur la réparation du préjudice subi.

B - Le "contrôle au faciès" constitutif d'une faute lourde justifiant réparation

La distinction des contrôles d'identité à but préventif et des contrôles d'identité à but répressif n'est pas opérante au regard de la faute lourde. En effet, les décisions commentées ne s'attardent pas sur la nature des contrôles d'identité effectués en précisant que la faute lourde "doit être regardée comme constituée lorsqu'il est établi qu'un contrôle d'identité présente un caractère discriminatoire" et que "tel est le cas, notamment, d'un contrôle d'identité réalisé selon des critères tirés de caractéristiques physiques associées à une origine, réelle ou supposée, sans aucune justification objective préalable".

C'est dire que la discrimination est suffisamment grave pour constituer ipso facto une faute lourde ouvrant droit à l'allocation de dommages-intérêts. Si la finalité de la responsabilité de l'Etat pour faute lourde est réparatrice, elle est également sanctionnatrice. Cette dernière finalité, présente dans n'importe quel régime de responsabilité, l'est encore davantage en matière de responsabilité pour faute lourde tant cette qualification amplifie le dysfonctionnement inadmissible qui est imputable à l'autorité publique concernée (B. Camguilhem, préc., p. 1813).

Dans les espèces, encore relativement rares, ayant débouché sur la responsabilité de l'Etat, une réparation au titre du préjudice moral a été accordée aux personnes arbitrairement contrôlées. Toutefois, force est de constater qu'aucun développement particulier n'a été consacré à cette question. Certes, le principe même du préjudice résulte, sans nul doute, du motif discriminatoire du contrôle d'identité effectué. Mais aucun élément permettant d'être véritablement éclairé sur le mode d'appréciation de ce préjudice n'a été mentionné. Reste que ce point est, à notre sens, accessoire au regard de l'avancée de principe que traduisent les nombreux arrêts rendus le 9 novembre 2016 qui, pour ne pas avoir tous fait l'objet d'une publication au bulletin, marquent néanmoins une évolution favorable à un encadrement plus que nécessaire de ces contrôles d'identité, à défaut de l'intervention pourtant attendue du législateur.

newsid:455515

Procédures fiscales

[Brèves] Les rescrits fiscaux désormais contestables par un recours direct !

Réf. : CE Sect., 2 décembre 2016, n° 387613, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A9075SNG)

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N5583BWP

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Le 30 Décembre 2016

Les rescrits fiscaux ne peuvent, en principe, pas être contestés par le contribuable ; toutefois, le Conseil d'Etat pose une exception à ce principe lorsque l'application de la position prise par l'administration entraînerait des effets notables autres que fiscaux. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 2 décembre 2016 (CE 3° ch., 2 décembre 2016, n° 387613, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9075SNG). En l'espèce, la société requérante a demandé à l'administration fiscale, sur le fondement de la procédure générale de rescrit prévu au 1° de l'article L. 80 B du LPF (N° Lexbase : L3693I38), si elle pouvait légalement soumettre les ventes de huit revues qu'elle édite au taux réduit de TVA applicable aux livres. L'administration fiscale a répondu que ces différentes revues relevaient du taux normal de la TVA et non du taux réduit. La société a alors formé des recours devant le tribunal administratif de Paris qui a rejeté ses demandes (TA Paris, 29 janvier 2013, n° 1214731 N° Lexbase : A3259SH8). Cependant, le Conseil d'Etat a donné raison à la requérante. La Haute juridiction a précisé que, eu égard aux enjeux économiques qui les motivent, les prises de position défavorables de l'administration dans le cadre de certaines procédures spécifiques de rescrit étaient réputées pouvoir faire l'objet d'un recours. Lorsque les conditions d'ouverture du recours sont remplies, le contribuable qui entend contester une prise de position de l'administration en réponse à sa demande de rescrit doit préalablement la saisir d'une demande de second examen sur le fondement de l'article L. 80 CB du LPF (N° Lexbase : L4725ICY). Cette demande de second examen sera un préalable obligatoire à un recours contre le rescrit. Dans la mesure où il était raisonnable de penser que les contribuables n'avaient pu anticiper le caractère obligatoire de ce recours préalable à la saisine du juge avant sa décision, cette formalité ne serait exigée que pour les demandes présentées postérieurement à la publication de la décision, soit à compter du 3 décembre 2016. Au cas présent, l'application du taux normal de TVA aux revues éditées par la société requérante était de nature à pénaliser significativement ses ventes. Le Conseil d'Etat a donc estimé que les réponses apportées par l'administration fiscale à ses demandes de rescrit étaient susceptibles de faire l'objet d'un recours. La société pourra donc bénéficier du taux réduit .

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Rémunération

[Brèves] Précisions concernant l'effet de la mainlevée sur la procédure de saisie des rémunérations

Réf. : Cass. civ. 2, 1er décembre 2016, n° 15-27.303, F-P+B (N° Lexbase : A8363SN3)

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N5569BW8

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Le 09 Décembre 2016

Si l'avis à tiers détenteur donne une priorité absolue à la trésorerie et suspend la procédure de saisie des rémunérations dès sa notification, tel n'était plus le cas lorsqu'il en avait été donné mainlevée, laquelle met fin à tous ses effets, peu important le motif de cette mainlevée, de sorte que la société, qui n'avait pas procédé aux retenues correspondant à la part saisissable des rémunérations alors que la procédure de saisie des rémunérations avait repris son cours, en est devenu personnellement débitrice en application de l'article L. 3252-10 du Code du travail (N° Lexbase : L3926IRT). Telle est la solution dégagée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 1er décembre 2016 (Cass. civ. 2, 1er décembre 2016, n° 15-27.303, F-P+B N° Lexbase : A8363SN3).
Dans cette affaire, MM. C. et H. K. et R. K., décédée, aux droits de laquelle viennent les consorts K., ont été autorisés par un tribunal d'instance à pratiquer une saisie sur les rémunérations du travail de M. L., qui a été notifiée à son employeur. Le même jour, le trésor public a notifié à cette dernière un avis à tiers détenteur. A la suite d'un accord amiable accordant un délai de paiement à M. L., le trésor public a donné mainlevée de l'avis à tiers détenteur. Par une ordonnance de contrainte, le tribunal d'instance a déclaré la société personnellement débitrice des retenues qui auraient dû être opérées sur les rémunérations de M. L. à compter de la mainlevée de l'avis à tiers détenteur. La société et M. L. ont formé opposition à cette ordonnance.
La cour d'appel (CA Chambéry, 17 septembre 2015, n° 14/02102 N° Lexbase : A1301NPU) décide que la mainlevée de l'avis à tiers détenteur avait mis fin à la suspension de la procédure de saisie des rémunérations diligentée par les consorts K., créanciers de son salarié, M. L. et juge que la société, employeur de M. L., était personnellement redevable des retenues qu'elle aurait dû opérer, en conséquence de la mainlevée de l'avis à tiers détenteur. Elle condamne ainsi la société à payer au régisseur du tribunal d'instance d'Annecy, une certaine somme. La société et M. L. forment un pourvoi en cassation.
En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction rejette le pourvoi (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E5983EXU).

newsid:455569

Rupture du contrat de travail

[Brèves] Rupture conventionnelle : preuve par le salarié du défaut d'entretien obligatoire

Réf. : Cass. soc., 1er décembre 2016, n° 15-21.609, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A7976SLY)

Lecture: 1 min

N5513BW4

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Le 08 Décembre 2016

Si le défaut du ou des entretiens prévus par l'article L. 1237-12 du Code du travail (N° Lexbase : L8193IAP) relatifs à la conclusion d'une convention de rupture entraîne la nullité de la convention, c'est à celui qui invoque cette cause de nullité d'en établir l'existence. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 1er décembre 2016 (Cass. soc., 1er décembre 2016, n° 15-21.609, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A7976SLY).
En l'espèce, un salarié est engagé par une société en qualité de responsable de l'informatique médicale. Le salarié signe avec son employeur une convention de rupture homologuée par l'administration.
La cour d'appel fait droit à la demande de nullité de la convention de rupture formée par le salarié qui soulevait l'absence d'entretien. Elle retient, après avoir constaté que la convention de rupture mentionnait la tenue de deux entretiens, que l'employeur ne produit aucun élément matériellement vérifiable permettant d'en attester la réalité. L'employeur se pourvoit en cassation.
En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'appel en ce qu'il dit nulle la convention de rupture. Elle vise les articles L. 1237-12 du Code du travail et 1315 du Code civil (art. 1353 nouveau N° Lexbase : L1013KZK). En statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0223E7E).

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