Lecture: 3 min
N2302AAI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 07 Octobre 2010
En l'occurrence, il est ici reproché à un notaire d'avoir pu prêter son concours à la réalisation par son client de ventes d'immeubles contenus dans une succession en dépit d'une notification antérieure d'un legs dévolu à un tiers. Autrement dit, reprochant au notaire d'avoir prêter son concours à la vente d'immeubles sans son autorisation, le légataire l'a assigné en responsabilité (voir, sur la responsabilité civile des notaires, J.-L. Aubert, La responsabilité civile des notaires, Defrénois, 3ème éd., 1998). Deux observations peuvent ici être faites.
En premier lieu, il n'est pas inintéressant de revenir sur la nature de la responsabilité notariale. On sait en effet que le double aspect de la fonction notariale contractuel dans sa démarche, légal dans son organisation et sa mise en oeuvre détermine une ambiguïté qui a d'ailleurs exercé une influence sur les appréciations de la doctrine. Si certains ont fait valoir que c'est la responsabilité contractuelle qui seule correspond à la réalité de l'activité notariale, dans la mesure où "l'on ne saurait nier l'existence d'un contrat entre le notaire et son client, même quand l'appel au notaire est imposé par l'exigence d'un acte authentique" (G. Durry, La distinction de la responsabilité contractuelle et de la responsabilité délictuelle , Université McGill, 1986, n°168), il reste que la jurisprudence, bien qu'elle n'ait semble-t-il pas eu explicitement à se prononcer sur cette question, paraît, surtout depuis quelques années, faire toujours référence à l'article 1382 du Code civil (pour des décisions plus anciennes rendues sur le terrain de la responsabilité contractuelle, voir not. Cass. civ. 1ère, 1er juill. 1958, Bull. civ. I, n° 351 ; Cass. Civ. 1ère, 24 juin 1963, D. 1963, J., p. 717 ; Cass. civ. 1ère, 12 juin 1972, Bull. civ. I, n° 150, Rép. Defrénois 1973, art. 30293, n°5, obs. J.-L. Aubert; sur les décisions plus récentes préférant le terrain délictuel, voir not., parmi beaucoup d'autres, Cass. civ. 1ère, 21 mai 1985 N° Lexbase : A3054AAD ; 25 mars 1991 N° Lexbase : A4871AHU et N° Lexbase : A4868AHR ; 17 mars 1993 N° Lexbase : A4809AHL ; 6 janv. 1994 N° Lexbase : A6006AHW et 7 N° Lexbase : A6009AHZ ; 26 mars 1996 N° Lexbase : A9670ABR). Au fond, la mise à l'écart de la responsabilité contractuelle peut se justifier par les considérations d'ordre public qui s'attachent à la fonction notariale en raison de sa finalité de sécurité juridique.
Ensuite, l'arrêt appelle quelques remarques tenant à la faute ici reprochée au notaire. On sait que le notaire qui a refusé d'instrumenter engage sa responsabilité, un notaire ne pouvant en principe pas se dérober à sa mission de service public pour laquelle il a été institué (voir, sur cette obligation, l'article 3 de la loi du 25 ventôse An XI, disposant que les notaires "sont tenus de prêter leur ministère lorsqu'ils en sont requis"). Cependant, il ne s'agit là que d 'un principe qu'il faut nuancer. Ainsi le notaire peut-il, à l'inverse, engager sa responsabilité pour n'avoir point refusé d'instrumenter. Il est en effet certain que les propriétés de l'acte authentique et la finalité de sécurité juridique que la loi assigne à la fonction notariale imposent au notaire de refuser son ministère dans tous les cas où l'acte pour lequel il est requis est contraire à l'ordre public et aux bonnes moeurs. Mais, et c'est bien ce qui ressort de l'arrêt, à cet impératif d'ordre public intéressant donc l'intérêt général s'ajoute des considérations intéressant, elles, les intérêts particuliers. C'est ce qui explique que le notaire doive, sous peine de voir sa responsabilité civile délictuelle engagée, s'abstenir de prêter son ministère pour conférer le caractère authentique à une convention dont il sait qu'elle méconnaît les droits d'un tiers.
David Bakouche
Docteur en droit
A lire également :
Appréciation du manquement du notaire à son devoir d'information et de conseil
Le devoir de conseil du notaire ne cède pas devant les compétences professionnelles de son client
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:2302
Lecture: 1 min
N2347AA8
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 07 Octobre 2010
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:2347
Réf. : CEDH 04-11-1950, art. 2 (N° Lexbase : L4753AQ4)
Lecture: 1 min
N2345AA4
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
Le 07 Octobre 2010
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:2345