La lettre juridique n°200 du 2 février 2006

La lettre juridique - Édition n°200

Éditorial

La clause de non-concurrence : le chant du cygne ?

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N3995AK8

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction

Le 27 Mars 2014


Assurément, la clause de non-concurrence insérée dans un contrat de travail n'est pas la clause la plus communément discutée au moment de l'embauche... Elle passerait même inaperçue si une récente jurisprudence n'avait imposé une contrepartie financière qui a fait, convenons en, coulé beaucoup d'encre. Pourtant, avec plus de 76 000 occurrences sur le moteur de recherche Google (pour les profanes) et plus d'une décision de justice par semaine (pour les amoureux des statistiques judiciaires), la clause de non-concurrence n'en finit pas d'alimenter les chroniques juridiques, tant la rétroactivité de la jurisprudence supra, comme la rédaction hasardeuse de nombreuses clauses continuent de grossir un contentieux déjà surabondant devant les juridictions sociales. Pour exemple, la Cour de cassation vient de rappeler que les clauses de non-concurrence sont d'interprétation stricte et que ce principe d'interprétation ne saurait être remis en cause en raison de la perception par le salarié d'une indemnité. Objective, subjective ou combinée, comme nous le rappelle Jacques Lacan (oui, le droit recèle aussi sa part de psychologie), "l'interprétation n'a pas plus à être vraie que fausse ; elle a à être juste". Et le versement d'une indemnité de licenciement ou de la fameuse contrepartie financière ne saurait interférer dans cette quête de la "juste" interprétation. Pour un éclairage certain sur cette difficulté d'interprétation, les éditions juridiques Lexbase vous invitent à lire le commentaire de Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu Bordeaux IV, Les clauses de non-concurrence sont d'interprétation stricte !. Pour l'heure, on peut légitimement se poser la question du devenir de la clause de non-concurrence. En effet, le licenciement "ad nutum" caractérisant le contrat nouvelles embauches et, sans doute, le futur contrat première embauche, ne risque-t-il pas de faire passer pour exorbitante l'application de cette clause, aux yeux du juge social ? Du moins, lorsqu'elle trouve à s'appliquer après un licenciement non motivé (écartons là l'hypothèse de la démission). D'aucuns répondront, qu'aujourd'hui, la clause de non-concurrence, prévue quel que soit le mode de rupture du contrat de travail, prévaut en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle peut même être applicable dans le cadre de la rupture d'une période d'essai. Mais admettons que l'économie générale de ces nouveaux contrats n'est pas la même que celle des contrats existants jusqu'alors : la flexibilité ne devrait-elle pas jouer dans les deux sens ? Pourra-t-on envisager l'application d'une clause de non-concurrence au préjudice certain d'un salarié licencié sans motif, au vu du montant des contreparties financières accordées aujourd'hui ? Et après tout, "détruire la concurrence, c'est tuer l'intelligence" disait Frédéric Bastiat !

newsid:83995

Social général

[Jurisprudence] Seule l'hypothèse d'une fraude autorise l'AGS à contester le montant des créances garanties en exécution d'une transaction

Réf. : Cass. soc., 25 janvier 2006, n° 03-45.444, AGS c/ M. Vincent Sénequier-Crozet, FS-P+B+R (N° Lexbase : A5501DMP)

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010

Chargée de garantir le paiement des créances des salariés lorsque l'entreprise se trouve placée dans une situation d'insolvabilité, l'AGS cherche, dès qu'elle le peut, à contester le montant de sa propre garantie afin de résorber le déficit endémique qui est aujourd'hui le sien. La Cour de cassation n'a pas été particulièrement sensible à ces arguments de gestion et assure, au contraire, la protection des intérêts des salariés en restreignant le droit propre de contestation que lui reconnaît classiquement la jurisprudence. Dans cet arrêt en date du 25 janvier 2006, l'AGS cherchait à contester le montant de la créance du salarié, constatée dans une transaction conclue dans le cadre d'une médiation judiciaire (1). Or, la Cour de cassation a considéré que pareille contestation ne pouvait être admise que si l'AGS démontrait l'existence d'une fraude, ce qui nous semble parfaitement justifié (2).
Décision

Cass. soc., 25 janvier 2006, n° 03-45.444, AGS c/ M. Vincent Sénequier-Crozet, FS-P+B+R (N° Lexbase : A5501DMP)

Rejet (CA Grenoble, Chambre sociale, 2 juin 2003)

Textes concernés : C. trav., art. L. 143-11-1 (N° Lexbase : L7703HBW) ; C. trav., art. L. 143-11-8 (N° Lexbase : L7706HBZ) ; C. trav., art. D. 143-2 (N° Lexbase : L3725ABL) ; C. civ., art. 1134 (N° Lexbase : L1234ABC) ; C. civ., art. 1351 (N° Lexbase : L1460ABP) ; C. civ., art. 2051 (N° Lexbase : L2296ABN) ; C. civ., art. 2044 (N° Lexbase : L2289ABE) ; loi n° 95-125, 8 février 1995, relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative (N° Lexbase : L1139ATD).

Mots-clefs : licenciement ; transaction ; AGS ; droit propre ; contestation du montant de la créance garantie ; nécessité d'une fraude.

Lien bases :

Résumé

L'AGS n'est recevable à contester un accord transactionnel conclu au cours d'une procédure de médiation et homologué par le juge prud'homal qu'à la condition d'établir que cet accord procède d'une fraude. Trouvant son fondement dans l'article L. 122-14-4 du Code du travail (N° Lexbase : L8990G74), la créance indemnitaire du salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse relève du plafond 13, peu important que son montant résulte d'un accord de médiation.

Faits

1. M. Sénequier-Crozet, entré au service de la société Papeterie de la Gorge de Domène en 1976, a été licencié le 8 septembre 1998.

Il a saisi la juridiction prud'homale de demandes indemnitaires, en contestant notamment la cause de son licenciement. Une procédure de médiation, mise en place par le bureau de conciliation, a abouti à la conclusion d'un accord qui allouait des dommages-intérêts à M. Sénequier-Crozet et accordait à l'employeur des délais de règlement. Après l'homologation de cet accord par le juge prud'homal le 4 mai 2000, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société Papeterie de la Gorge de Domène.

2. Le salarié a alors saisi à nouveau la juridiction prud'homale pour être reconnu créancier des sommes restant dues en vertu de cet accord.

La cour d'appel de Grenoble (2 juin 2003) a dit que l'AGS devait garantir le solde restant dû sur l'indemnité prévue dans cet accord, dans la limite du plafond de garantie le plus élevé.

Décision

1. "Après avoir exactement énoncé que l'AGS n'était recevable à contester l'accord transactionnel conclu au cours d'une procédure de médiation et homologué par le juge prud'homal qu'à la condition d'établir que cet accord procédait d'une fraude, la cour d'appel a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que cet accord, par lequel le salarié renonçait à une partie de ses prétentions, n'avait pas été conclu en vue de frauder aux droits de l'AGS".

2. "Trouvant son fondement dans l'article L. 122-14-4 du Code du travail, la créance indemnitaire du salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse relevait du plafond 13, peu important que son montant résulte d'un accord de médiation".

3. Rejet

Commentaire

1. Transaction et garantie de l'AGS

  • Premières remarques sur la transaction et le licenciement

La transaction conclue entre un salarié et son employeur postérieurement à la notification d'un licenciement présente, pour les parties, de nombreux avantages : elle met un terme rapidement au différend, permet de régler à l'amiable les conséquences les plus diverses du licenciement et permet parfois au salarié de percevoir rapidement des indemnités qu'il pourrait mettre des mois, parfois des années, à toucher dans le cadre d'une action judiciaire.

Le recours à la transaction présente surtout certains risques, en raison de l'effet qui s'y attache, puisqu'une transaction valablement conclue a autorité de la chose jugée entre les parties, et le salarié qui a mal négocié pourra se trouver privé d'indemnités auxquelles il aurait eu normalement droit dès lors que des concessions réciproques auraient été faites par les deux parties, et ce même si elles sont insuffisantes.

  • Transaction et situation de l'AGS

Ce risque pour le salarié se double d'un risque pour l'AGS qui doit garantir, en vertu de l'article L. 143-11-1 du Code du travail, les "sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail". Or, dans le cadre d'une transaction, l'employeur peut être amené à consentir au salarié le paiement d'indemnités d'un montant parfois plus élevé que ce à quoi il aurait pu prétendre en application du Code du travail.

On sait que ces indemnités ne changent pas de nature lorsqu'elles sont comprises dans une transaction et qu'elles doivent donc normalement être garanties par l'AGS (Cass. soc., 3 avril 2001, n° 99-42.183, M. Gers c/ M. Pavec, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Senicorp, publié N° Lexbase : A5705AGE, Dr. soc. 2001, p. 672, obs. Ch. Radé) ; cette solution est logique dans la mesure où la transaction possède un effet déclaratif et qu'elle n'est pas censée créer de nouveaux droits au profit de ses parties, mais seulement reconnaître l'existence de créances préexistantes.

L'AGS peut donc avoir intérêt à contester les termes de l'accord transactionnel pour faire baisser le montant de sa garantie. Mais le peut-elle, et dans quelles conditions ? C'était l'enjeu de cet arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 25 janvier 2006.

  • Situation en l'espèce

Dans cette affaire, un salarié licencié avait, lors de l'audience prud'homale qui s'était engagée par la suite, conclu un accord transactionnel à l'occasion d'une procédure de médiation judiciaire. L'entreprise ayant été placée en redressement judiciaire, il avait saisi de nouveau la juridiction prud'homale afin de voir l'AGS condamnée à le garantir du paiement des sommes restant dues.

La cour d'appel de Grenoble (2 juin 2003) avait fait droit à ses demandes, dans la limite du plafond de garantie le plus élevé, ce que contestait, bien entendu, l'AGS qui avait formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Ce sera peine perdue dans la mesure où le pourvoi est rejeté, la Cour de cassation relevant, d'une part, "qu'après avoir exactement énoncé que l'AGS n'était recevable à contester l'accord transactionnel conclu au cours d'une procédure de médiation et homologué par le juge prud'homal qu'à la condition d'établir que cet accord procédait d'une fraude, la cour d'appel a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que cet accord, par lequel le salarié renonçait à une partie de ses prétentions, n'avait pas été conclu en vue de frauder aux droits de l'AGS" et, d'autre part, "que, trouvant son fondement dans l'article L. 122-14-4 du Code du travail, la créance indemnitaire du salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse relevait du plafond 13, peu important que son montant résulte d'un accord de médiation".

2. Le droit propre à contestation limité à l'hypothèse d'une fraude

  • Une solution prévisible

C'était, à notre connaissance, la première fois que la Cour de cassation avait à se prononcer sur cette question. On pouvait s'attendre, toutefois, à la solution finalement adoptée compte tenu de la position adoptée en 2002, concernant le droit propre reconnu à l'AGS de demander la requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Rompant avec une solution jusque-là bien établie, la Cour de cassation avait limité ce droit à l'hypothèse de l'inexistence du contrat ou d'une fraude des parties (Cass. soc., 4 décembre 2002, n° 00-43.750, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A1592A4Q, lire nos obs., Seule la fraude autorise l'AGS à demander la requalification d'un contrat à durée déterminée - chronique d'un revirement annoncé, Lexbase Hebdo n° 52 du 19 décembre 2002 - édition sociale N° Lexbase : N5245AAI).

C'est donc dans la droite ligne de cet arrêt que la Cour de cassation a décidé de restreindre, également, le droit de contester la transaction conclue entre le salarié et l'employeur par l'AGS.

  • Une solution juridiquement fondée

Sur un plan juridique, la solution nous semble bienvenue.

La reconnaissance d'un droit propre de contestation de l'AGS a été classiquement discutée dans la mesure où il ne résulte d'aucun texte du Code du travail, mais d'une position adoptée par la Cour de cassation depuis 1978, tirée de la spécificité de cet organisme (Cass. soc., 3 mai 1978, n° 76-12.757, Assedic de l'Aisne, Assoc pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés AGS c/ Paradis, publié N° Lexbase : A8424AXB, D. 1978, jurispr. p. 492, note A. Honorat).

En limitant le pouvoir de contestation des accords conclus entre salariés et employeurs à la seule hypothèse de fraude, la Cour de cassation ne retient que la seule hypothèse véritablement incontestable, l'exception de fraude étant d'application générale en droit.

  • Une solution opportune

Sur le plan de l'opportunité, la décision semble également bienvenue.

Les parties disposent, en effet, d'une grande latitude lorsqu'elles négocient une transaction, dès lors que les droits sont disponibles et qu'elles se consentent des concessions réciproques. L'employeur peut, d'ailleurs, valablement consentir au salarié, en échange de la renonciation de ce dernier à agir en justice, des indemnités d'un montant supérieur à ce qui lui est garanti par le Code du travail ; or, ces accords sont, en toute hypothèse, valables dans le champ de l'ordre public social. Permettre à l'AGS de contester l'étendue de ces avantages n'aurait donc pas de sens car elle menacerait l'économie générale de la transaction. Il serait, par ailleurs, assez paradoxal de permettre à l'AGS de contester l'étendue de ces créances alors que les parties elles-mêmes n'en ont pas le droit.

Le contexte dans lequel cette transaction avait été conclue incite, d'ailleurs, encore plus fortement à approuver la décision. Dans cette affaire, la transaction avait été conclue dans le cadre d'une médiation judiciaire et fait l'objet d'une homologation judiciaire. Or, on peut penser que la juridiction avait vérifié que l'accord conclu respectait bien les droits des parties en présence mais aussi ceux des tiers, chargés d'en garantir le paiement, ou des organismes de recouvrement. Dans ces conditions, il semblait inutile de permettre à l'AGS de remettre en cause pareille transaction. Sans le dire, d'ailleurs, et tout en faisant référence au pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond, la Cour de cassation semble relever, comme une évidence, qu'il ne pouvait s'agir ici d'une collusion frauduleuse dans la mesure où le salarié avait, dans le cadre de cette transaction, renoncé à certains droits.

  • La confirmation d'une jurisprudence désormais passée sur les plafonds de garantie

Restait à déterminer l'étendue de la garantie de l'AGS et l'application de l'un des plafonds prévus par l'article L. 143-2 du Code du travail (N° Lexbase : L5755AC7).

Jusqu'à la réforme intervenue en 2003 -et qui a considérablement modifié les plafonds de garantie de l'AGS- (décret n° 2003-684 du 24 juillet 2003, modifiant l'article D. 143-2 du Code du travail, pris en application de l'article L. 143-11-8 du Code du travail, relatif aux plafonds de garantie des salaires en cas d'insolvabilité des entreprises N° Lexbase : L1124BIH, lire notre chron., A propos de la réforme de l'AGS : attention à vos créances, plafonds surbaissés !, Lexbase Hebdo n° 84 du 4 septembre 2003 - édition sociale N° Lexbase : N8570AAN), dans un sens d'ailleurs très favorable à l'institution, l'article D. 143-2 du Code du travail (N° Lexbase : L3725ABL) disposait que "le montant maximum de la garantie prévue à l'article L. 143-11-8 du Code du travail est fixé à treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance-chômage lorsque les créances résultent des dispositions législatives ou réglementaires ou de stipulations d'une convention collective et sont nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire".

Afin de favoriser les salariés, la Cour de cassation, revenant sur une jurisprudence antérieure plus restrictive, avait considéré, d'une part, que le plafond 13 devait s'appliquer toutes les fois qu'une créance trouvait sa source dans la loi ou le statut collectif, et ce même si son montant avait été conventionnellement majoré (Cass. soc., 15 décembre 1998, n° 98-40.937, Association pour la gestion du régime d'assurance des créances c/ M. Boue et autre, publié N° Lexbase : A4862AG8, Dr. soc. 1999, p. 152, concl. P. Lyon-Caen ; Dr. ouvrier 1999, p., rapp. J.-Y. Frouin, note ; D. 1999, p. 205, note C. Souweine) et, d'autre part, que lorsqu'une créance relevait du plafond 13 et d'autres du plafond 5, toutes devaient globalement être soumises au plafond 13 (Cass. soc., 30 novembre 1999, n° 96-40.686, M. Foucault c/ Groupement régional des Assedic de la région parisienne (Garp), publié N° Lexbase : A8053AGD, Dr. Soc. 2000, p. 222, obs. Ch. Radé).

C'est cette jurisprudence qu'applique ici, d'une manière inédite, la Chambre sociale de la Cour de cassation aux créances résultant d'un accord de médiation, en réalité d'une transaction homologuée. Les créances de rupture en cause résultaient bien des dispositions du Code du travail (indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse, indemnité de licenciement ou de préavis, etc..) et leur montant avait bien été, pour certaines d'entre-elles, majoré par les parties. Compte tenu de sa jurisprudence désormais bien acquise, la Chambre sociale devait logiquement appliquer ici le plafond 13 à l'ensemble des créances.

newsid:83838

Rel. individuelles de travail

[Jurisprudence] Les clauses de non-concurrence sont d'interprétation stricte !

Réf. : Cass. soc., 17 janvier 2006, n° 04-41.038, Société Groupe Aline c/ M. Stéphan Wagner, F-P+B (N° Lexbase : A4090DMG)

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N3793AKP

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Le 07 Octobre 2010

Non sans une certaine exagération, on peut se demander s'il se passe une semaine sans que la Cour de cassation ait à connaître d'un litige relatif aux clauses de non-concurrence. On se souvient, en effet, que dans un arrêt rendu le 11 janvier 2006, celle-ci a affirmé que le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice (Cass. soc., 11 janvier 2006, n° 03-46.933, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A3385DMC et notre chronique éponyme, Le respect par un salarié d'une clause de non-concurrence illicite lui cause nécessairement un préjudice, Lexbase Hebdo n° 199 du 26 janvier 2006 - édition sociale N° Lexbase : N3518AKI). La décision ici commentée, en date du 17 janvier 2006 et qui sera également publiée, donne à la Cour de cassation l'occasion de rappeler que les clauses de non-concurrence sont d'interprétation stricte et que ce principe d'interprétation ne saurait être remis en cause en raison de la perception par le salarié d'une indemnité.
Décision

Cass. soc., 17 janvier 2006, n° 04-41.038, Société Groupe Aline c/ M. Stéphan Wagner, F-P+B (N° Lexbase : A4090DMG)

Rejet (CA Nouméa, Chambre sociale, 5 novembre 2003)

Textes concernés : principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle et de la liberté d'entreprendre.

Mots-clefs : clause de non-concurrence ; portée ; interprétation stricte ; indemnité ; absence d'effet sur ce principe d'interprétation.

Lien bases :

Apport de l'arrêt

Une clause de non-concurrence doit être interprétée strictement et ne peut être étendue au-delà de ses prévisions. La perception par le salarié concerné d'indemnités à l'expiration de son contrat de travail ne fait pas obstacle à ce principe d'interprétation.

Faits

La société Groupe Aline, qui avait engagé M. Wagner en qualité de directeur général a, estimant que celui-ci avait violé la clause de non-concurrence lui interdisant d'entrer au service d'une entreprise vendant des produits pouvant concurrencer directement ou indirectement ceux de l'employeur et de s'intéresser, directement ou indirectement, sous quelque forme que ce soit, à une entreprise de cet ordre, demandé condamnation du salarié à lui payer une somme à tire de dommages-intérêts.

L'arrêt attaqué ayant débouté l'employeur de sa demande, ce dernier a formé un pourvoi en cassation dans lequel il avançait que constitue une violation de la clause de non-concurrence le fait pour un salarié, avant l'expiration du délai de non-concurrence, d'organiser une future activité concurrentielle, notamment par la prise de contact avec les fournisseurs. Ainsi, après avoir perçu, en exécution d'une transaction, des indemnités substantielles réparant le préjudice que lui causait son éviction du secteur d'activité de la société Cida IC, le salarié avait, par l'entremise de son épouse, signé une promesse synallagmatique de vente sous condition suspensive de l'entreprise Commercial Office concurrente de son ancien employeur et était entré en contact avec divers fournisseurs, le plus souvent au nom de Commercial office.

Solution

1. Rejet

2. "Mais attendu, d'une part, qu'une clause de non-concurrence qui apporte une restriction aux principes de la liberté fondamentale d'exercer une activité professionnelle et de la liberté d'entreprendre étant d'interprétation stricte et ne pouvant être étendue au-delà de ses prévisions, la cour d'appel a exactement retenu que la perception par M. Wagner d'indemnités à l'expiration de son contrat de travail ne faisait pas obstacle à ce principe d'interprétation".

Commentaire

1. Pourquoi interpréter une clause de non-concurrence ?

  • Déterminer la portée de l'obligation de non-concurrence

Dès lors qu'elle remplit toutes les conditions de validité exigées par la Cour de cassation, une clause de non-concurrence doit recevoir application. Sa mise en oeuvre suppose cependant, dans un tout premier temps, que l'on en détermine la portée exacte. Il n'est guère besoin de souligner, et l'arrêt commenté en témoigne, qu'une telle opération s'effectuera le plus fréquemment en aval, lorsque l'employeur estimera que le salarié a violé son obligation de non-concurrence.

La portée de cette dernière va évidemment découler des précisions données par la clause elle-même, que celle-ci figure dans le contrat de travail ou dans une convention collective. Tout va dès lors dépendre, on l'aura compris, de la rédaction de la clause et de son degré de précision. Ainsi, s'il est stipulé que la clause de non-concurrence s'appliquera uniquement en cas de licenciement pour motif personnel, le salarié ne sera pas lié par une telle obligation en cas de licenciement pour motif économique ou de démission (1). Dans une telle hypothèse, il n'y a guère de place pour l'interprétation, compte tenu du caractère clair et précis des termes employés.

A rebours, la clause de non-concurrence peut être rédigée en termes généraux et prévoir qu'elle s'appliquera lors de la rupture du contrat de travail, sans plus de précisions. Dans ce cas, elle doit recevoir application quels que soient les circonstances et l'auteur de la rupture du contrat de travail. Les juges décident notamment que la clause doit être mise en oeuvre alors même que le licenciement est déclaré sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 25 octobre 1995, n° 93-45.442, Mme Maryse Audoin c/ Société des établissements Cosset, inédit N° Lexbase : A2095AAT ; Cass. soc., 22 octobre 1997, n° 94-45.186, M. Dias c/ Société Sofeb, publié N° Lexbase : A1670ACT). Si cette solution s'avère pour le moins critiquable (2), on ne saurait véritablement dire qu'elle est le fruit d'une interprétation extensive de la clause, compte tenu, là encore, du caractère clair et précis des termes employés.

  • L'exigence d'interprétation

Compte tenu de ce qui vient d'être dit, l'interprétation de la clause de non-concurrence va s'avérer nécessaire lorsque ses rédacteurs auront manqué de précision et de clarté. Or, il nous semble qu'il en ira, sinon exclusivement, du moins fréquemment ainsi à propos de la détermination des activités concurrentielles (3). En effet, s'agissant des limitations dans le temps et dans l'espace, elles devront nécessairement être précisées, dans la mesure où elles constituent une condition de validité de la clause elle-même.

Dans l'espèce commentée, la clause de non-concurrence faisait interdiction au salarié "d'entrer au service d'une entreprise vendant des produits pouvant concurrencer directement ou indirectement ceux de l'employeur et de s'intéresser, directement ou indirectement, sous quelque forme que ce soit à une entreprise de cet ordre". L'employeur estimait, par suite, que le salarié avait violé son obligation de non-concurrence en organisant une future activité concurrentielle, notamment par la prise de contact avec les fournisseurs et par divers autres actes préparatoires à cette activité, sans engagement définitif. L'employeur n'a toutefois pas été suivi par les juges d'appel qui, approuvés par la Cour de cassation, ont considéré, au contraire, que le salarié n'avait pas violé l'obligation de non-concurrence à laquelle il était tenu en vertu de la clause précitée. Ce faisant, les juges ont procédé à une interprétation stricte de la clause.

2. Comment interpréter une clause de non-concurrence ?

  • L'exigence d'une interprétation stricte

Dans leur travail d'interprétation du contrat, les juges du fond peuvent recourir à deux méthodes : la méthode subjective, qui fait une large place à la commune intention des parties, et la méthode objective, qui conduit en substance à rechercher ce qui est juste et habituellement pratiqué. Sans entrer dans le détail d'une question bien connue, on sait que le droit positif combine ces deux méthodes qui sont ainsi complémentaires (v., sur la question, F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 9ème éd., spéc. pp. 451 et s.).

Le Code civil offre à ce titre des directives d'interprétation qui, si elles se rattachent essentiellement à la méthode d'inspiration subjective, ont aussi à voir avec une approche plus objective. Il en va ainsi de l'article 1162 (N° Lexbase : L1264ABG) qui précise que "dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation".

En outre, et ainsi que le relèvent les auteurs précités, "d'autres procédés d'interprétation objective non visés par le Code civil peuvent, au demeurant, être utilisés. Ainsi, lorsque certaines clauses portent atteinte à des droits fondamentaux tels que le droit de gérer librement son patrimoine, d'agir en justice, la liberté de contracter, d'entreprendre, de commercer, de travailler...". Et ces mêmes auteurs de préciser que sont ainsi interprétées restrictivement les clauses d'exclusivité, les clauses résolutoires, les clauses de domiciliation et, bien-sûr, les clauses de non-concurrence (4).

L'arrêt commenté donne à la Cour de cassation l'occasion de rappeler cette solution de principe qui avait été, au demeurant, déjà énoncée dans des décisions antérieures (v., notamment, Cass. soc., 29 juin 1999, n° 97-40.082, SA Lepetit-Niquevert c/ Brignoli et autres, publié N° Lexbase : A6339AGU ; Cass. soc., 13 décembre 2000, Ric c/ Société MI-Gso, n° 98-45.043, inédit N° Lexbase : A9800AT7 ; Cass. soc., 16 novembre 2005, n° 03-43.312, Société Spat c/ M. Jean-Pierre Lauretou, inédit N° Lexbase : A5502DLD).

On ne peut qu'approuver l'exigence d'une interprétation stricte des clauses de non-concurrence, compte tenu de l'atteinte qu'elles portent à la liberté d'exercer une activité professionnelle ou à la liberté d'entreprendre, qui sont autant de droits fondamentaux. On saura, en outre, gré à la Cour de cassation de venir préciser, dans l'arrêt commenté, que la perception par le salarié d'une indemnité ne saurait faire exception à ce principe d'interprétation.

  • Le caractère indifférent de la perception d'une indemnité par le salarié

Ainsi que le souligne expressément la Chambre sociale dans le motif de principe de sa décision, la perception par le salarié d'indemnités à l'expiration de son contrat de travail ne fait pas obstacle au principe d'interprétation stricte des clauses de non-concurrence. A dire vrai, on ne voit pas pourquoi il en aurait été autrement. En effet, le fait que le salarié lié par une clause de non-concurrence perçoive une indemnité lors de la rupture de son contrat ne change rien au fait que l'obligation qui s'impose à lui porte atteinte aux libertés fondamentales précédemment évoquées. Il en va d'ailleurs ainsi qu'il s'agisse, comme en l'espèce, d'une indemnité transactionnelle ou, plus spécifiquement, de la contrepartie pécuniaire désormais érigée en condition de validité de la clause de non-concurrence (5).

Peut-être la Cour de cassation a-t-elle souhaité prévenir la tentation de certains juges du fond de se départir, compte tenu du versement d'une indemnité quelle qu'elle soit, de l'exigence d'une interprétation stricte. En tout état de cause, au terme de ce bref commentaire, on ne saurait trop recommander aux rédacteurs des clauses de non-concurrence de faire preuve de vigilance lors de la rédaction de celles-ci, si tant est qu'ils l'avaient oublié.

Gilles Auzero
Professeur à l'Université Montesquieu Bordeaux IV


(1) Les parties peuvent également convenir que l'obligation de non-concurrence recevra application quelle que soit la cause de cessation du contrat de travail, en prévoyant cependant des exceptions limitativement énumérées (par exemple, licenciement pour motif économique).
(2) V., en ce sens, J. Pélissier, A. Supiot, A. Jeammaud (Droit du travail, Précis Dalloz, 22ème éd., 2004, § 268), qui soulignent que "curieusement l'employeur qui prive à tort le salarié de son emploi peut encore lui interdire de travailler pour le compte d'un concurrent".
(3) V., infra, les exemples jurisprudentiels cités.
(4) F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, ouvrage préc., § 451, in fine et la jsp. citée.
(5) Contrepartie pécuniaire qui permet d'avancer que l'article 1162 du Code civil (N° Lexbase : L1264ABG), qui aurait également pu servir de fondement à l'interprétation stricte des clauses de non-concurrence, soit laissé de côté.

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Fiscalité financière

[Textes] La réforme des plus-values mobilières des particuliers

Réf. : Loi n° 2005-1720, 30 décembre 2005, de finances rectificative pour 2005, art. 29 (N° Lexbase : L6430HEU)

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par S. D.

Le 07 Octobre 2010

L'article 29 de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 a substantiellement modifié le régime fiscal des plus-values de cession de titres réalisées par les particuliers. Sur le modèle des plus-values réalisées en matière immobilière, cette réforme s'articule autour de deux points. Le premier point introduit des abattements en fonction de la durée de détention des valeurs mobilières au moins égal à 6 ans, avec une exonération totale au bout de huit ans. Soulignons que le choix de la durée se justifie par le fait que les entreprises, selon les dires du Gouvernement, connaissent une "crise de croissance" au bout de leur sixième année d'existence. Cette disposition est d'ordre général. En effet, elle est destinée à s'appliquer à tous les actionnaires et entrera en vigueur pour les titres enregistrés à partir du 1er janvier 2006 (1). Le second point prévoit une exonération totale de plus-values sur la cession de leur PME pour les dirigeants arrivés à l'âge de la retraite et qui ont détenu leurs actions pendant huit ans, afin de favoriser les transmissions d'entreprises (2). A cet effet, sont insérés, après l'article 150-0 D du CGI , deux nouveaux articles 150-0 D bis et 150-0 D ter. 1. L'exonération progressive de plus-values mobilières des particuliers

Les plus-values de cession de titres des sociétés, cotées et non cotées, établies dans l'espace économique européen bénéficieront, dorénavant, d'abattements progressifs, lorsque les titres cédés auront été détenus au moins six ans, et seront totalement exonérées d'impôt, lorsque cette détention sera supérieure à huit ans.

1.1. Le régime antérieur

La loi de finances pour 2000 avait fusionné les quatre régimes, antérieurement en vigueur, pour l'imposition des plus-values sur valeurs mobilières réalisées par les particuliers . De ce fait, elle a institué un régime unique d'imposition de ces plus-values. Ainsi, ces dernières sont imposées au taux de 16 %, hors prélèvements sociaux, lorsque le montant annuel des cessions excède la limite de 15 000 euros . Ce seuil d'imposition s'apprécie en totalisant l'ensemble des cessions réalisées, au cours de la même année, par l'ensemble des membres du foyer fiscal .

Sont concernés par ce régime, les plus-values réalisées par des personnes physiques, dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé, à l'occasion de la cession à titre onéreux, qu'il s'agisse de négociations effectuées en bourse ou de cessions entre particuliers (ventes, apports en société, échanges, partages autres que des successions) de valeurs mobilières, droits sociaux ou titres assimilés que sont, notamment, les actions, obligations, titres participatifs, usufruit ou nue-propriété portant sur ces valeurs, droits ou titres, ou titres les représentant (SICAV et FCP).

Aux termes des dispositions de l'article 150-0 D, 1°, , les gains nets sont constitués par la différence entre le prix de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittées par le cédant et leur prix d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutations.

Concernant les moins-values résultant de telles cessions, elles d'imputent sur des gains de même nature réalisés la même année ou les dix années suivantes, à la condition, toutefois, que le seuil annuel de cession soit franchi.

Il convient de souligner, qu'à titre exceptionnel, les plus-values réalisées par des particuliers sont imposables dans la catégorie des BNC, si elles sont effectuées dans des conditions similaires à celles qui caractérisent une activité exercée par une personne se livrant à titre professionnel à ce type d'opérations. Les plus-values réalisées à titre habituel restent, donc, imposables au titre des plus-values sur valeurs mobilières.

1.2. Le régime modifié

La loi de finances rectificative pour 2005 institue un abattement progressif d'un tiers par année de détention à partir de la sixième année applicable aux gains nets de cession à titre onéreux de certaines valeurs mobilières. Ces plus-values sont, ainsi, exonérées totalement et les moins-values cessent d'être imputables au-delà de la huitième année de détention.

Le bénéfice de cet abattement est subordonné au respect de diverses conditions. Trois conditions sont relatives aux sociétés émettrices. Ces dernières doivent :

  • être passibles de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent ou soumise sur option à cet impôt ;
  • exercer une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, ou a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités précitées. Cette condition s'apprécie de manière continue pendant les cinq années précédant la cession ;
  • avoir son siège social dans un Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale.

Une série de sociétés sont, toutefois, exclues de ce nouveau régime. Il s'agit, notamment, des sociétés ayant pour activité la gestion des titres de participation et des titres de placement, telles que les sociétés de capital-risque (SCR), les sociétés d'investissement (SDI), les sociétés d'investissement à capital variable (SICAV), les sociétés de développement régional ou bien encore les sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable et les société unipersonnelle d'investissement à risque (SUIR). S'agissant de ces dernières, l'exclusion du bénéfice de l'exonération ne s'applique que pendant les dix premières années suivant celle de sa création parce que, durant cette période, elles sont exonérées d'impôt sur les sociétés. Ce qui nous permet d'enchaîner sur la deuxième série de sociétés mises à l'écart de l'abattement. Il s'agit, en effet, des cessions qui bénéficient, déjà, d'avantages fiscaux. Ainsi, sont hors du champ d'application de l'abattement l'avantage prévu à l'article 163 bis C tiré de l'acquisition des options sur actions (stock-options), les plus-values sur les cessions de titres de SA ayant pour objet exclusif le financement d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles (SOFICA), ou de sociétés agréées pour le financement de la pêche artisanale (SOFIPECHE), ainsi qu'aux pertes consécutives à l'annulation des titres dans le cadre d'une procédure collective.

S'agissant de la durée de détention, celle-ci est, en principe, décomptée à partir du 1er janvier de l'année d'acquisition ou de souscription des titres ou droits ou à partir du 1er janvier 2006, s'ils ont été acquis ou souscrits antérieurement, le fait générateur variant en fonction des situations. Ainsi, par exemple, en cas de cession de titres ou droits effectuée par une personne interposée, le fait générateur faisant courir le délai de détention est la date d'acquisition ou de souscription des titres par cette dernière.

Cet abattement du tiers est déduit du montant de la plus-value, constituée par la différence entre le prix de cession des titres et leur prix d'acquisition.

Il convient de souligner la mise en place de la règle du "premier entré, premier sorti" pour le calcul des plus-values en cas de cession de titres ou de droits appartenant à une série de titres ou droits de même nature, mais acquis ou souscrits à des dates différentes. Dans cette hypothèse, la cession est réputée porter sur les titres ou droits acquis ou souscrits aux dates les plus anciennes.

Le montant de l'abattement, ainsi calculé, doit être déclaré par le bénéficiaire dans sa déclaration de revenus n° 2042. Toutefois, il n'est pas pris en compte pour la calcul de l'assiette de la CSG et de la CRDS. En revanche, il est à ajouter au montant des revenus et plus-values retenu pour le calcul du revenu de référence.

Mais attention, étant donné les modalités de décompte de la durée de détention, l'abattement ne s'appliquera qu'aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2012, à moins que celles-ci soient effectuées par des dirigeants de PME partant à la retraite. 

2. Le cas particulier des dirigeants de PME partant à la retraite

Les dirigeants de PME qui cèdent les titres ou droits, qu'ils ont acquis ou souscrit avant le 1er janvier 2006, de la société dans laquelle ils exercent leur fonction pour partir à la retraite peuvent bénéficier de l'exonération des plus-values, dès l'imposition des revenus 2006.

A cette fin, certaines conditions, là encore, doivent être réunies. Elles concernent, essentiellement, le dirigeant.

Aussi, celui-ci doit :

  • avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession l'une des fonctions mentionnées au 1° de l'article 885 O bis du CGI , à savoir, soit gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, soit associé en nom d'une société de personnes, soit président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une société par actions. Ces fonctions doivent être effectivement exercées et donner lieu à une rémunération normale. Celle-ci doit représenter plus de la moitié des revenus, à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du CGI .
  • avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et soeurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ;
  • et, enfin, dans l'année suivant la cession, cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite.

Par ailleurs, la cession doit porter sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société, dont les titres ou droits sont cédés ou sur plus de 50 % des droits de vote ou, en cas de la seule détention de l'usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de cette société.

Enfin, la société dont les titres ou les droits sont cédés doit répondre à certains critères qui correspondent à la définition communautaire d'une PME :

  • elle doit employer moins de deux cent cinquante salariés au 31 décembre de l'année précédant celle de la cession ou, à défaut, au 31 décembre de la deuxième ou de la troisième année précédant celle de la cession ;
  • elle doit réaliser un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros au cours du dernier exercice clos ou a un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros à la clôture du dernier exercice ;
  • enfin, son capital ou ses droits de vote ne doivent pas être détenus à hauteur de 25 % ou plus par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne répondant pas aux conditions de nombre de salariés et chiffre d'affaire ou de bilan), de manière continue au cours du dernier exercice clos. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations de sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des sociétés de développement régional, des sociétés financières d'innovation et des sociétés unipersonnelles d'investissement à risque ne sont pas prises en compte, à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 du CGI entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds. Cette condition s'apprécie, aussi, de manière continue au cours du dernier exercice clos.

Enfin, en cas de cession des titres ou droits à une entreprise, le cédant ne doit pas détenir, directement ou indirectement, de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire. En cas de non-respect de cette condition, à un moment quelconque au cours des trois années qui suivent la cession des titres ou droits, l'abattement est remis en cause au titre de cette année.

La principale différence avec le régime général concernent les dispositions relatives au calcul de la durée de détention. En effet, celle-ci est décomptée, en principe, à partir du 1er janvier de l'année d'acquisition ou de souscription des titres ou des droits cédés, à moins qu'interviennent des événements particuliers. Dans cette hypothèse, la durée de détention est calculée à partir du 1er janvier de l'année au cours de laquelle il est intervenu.

Quant aux plus-values, elles aussi bénéficient de la règle du "premier entré, premier sorti". En outre, en cas de cessions antérieures de titres ou droits de la société concernée pour lesquelles le gain net a été déterminé en retenant un prix d'acquisition calculé suivant la règle de la valeur moyenne pondérée d'acquisition, le nombre de titres ou droits cédés antérieurement est réputé avoir été prélevé en priorité sur les titres ou droits acquis ou souscrits aux dates les plus anciennes.

Surtout, ces dispositions s'appliquent aux cessions réalisées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2013 de titres ou de droits ou souscrits avant le 1er janvier 2006.

Cette réforme à deux vitesses essuie, actuellement, de nombreuses critiques, parmi lesquelles l'acquisition trop tardive de l'exonération totale et l'exclusion de l'abattement de l'assiette des prélèvements sociaux. Toutefois, ne soyons pas trop exigeants, cette promesse présidentielle attendue par les entreprises est particulièrement favorable à l'investissement à long terme des particuliers dans les actions tout en assurant les fonds propres des entreprises.

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Fiscalité des particuliers

[Textes] L'actualité des donations

Lecture: 5 min

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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris

Le 07 Octobre 2010

Le 17 janvier 2006, le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie est monté à la tribune de l'Assemblée Nationale, afin de préciser, à maintes reprises, le régime fiscal des donations. Lexbase Hebdo - éditions fiscale vous en propose une synthèse commentée. 1. Présents d'usage

L'administration vient de préciser qu'il était admis, "compte tenu, notamment, du montant maximum des sommes pouvant être placées par des parents sur un plan d'épargne logement (PEL) ouvert au nom de leur enfant, que ce placement financier puisse être qualifié de présent d'usage" (QE n° 63526 de M. Chartier Jérôme, JOANQ, 26 avril 2005 p. 4159, min. Eco., réponse publ. 17 janvier 2006 p. 504, 12ème législature N° Lexbase : L5607HGR). Autrement dit, elle admet que les dispositions de l'article 784 du CGI , qui imposent le rappel des donations, ne soient pas opposées aux parties, lorsque des parents alimentent un PEL, dont le titulaire est l'un de leurs enfants. Le don, ainsi, réalisé est et reste non taxable. Cette position de l'administration peut étonner. En effet, l'ouverture d'un PEL s'accompagne d'un versement initial minimum de 225 euros et, chaque année, il doit être versé 540 euros. Mais, le montant maximum pouvant être placé est de 61 200 euros !

On sait que si l'article 784 du CGI impose, sur le plan fiscal, le rapport de toutes les donations de moins de six ans, lors d'une nouvelle mutation à titre gratuit entre les mêmes personnes, ces dispositions ne s'appliquent pas aux présents d'usage (Doc. adm. 7 G 3162, 20 décembre 1996, n° 2). Deux conditions doivent être réunies pour que soit reconnue la qualification de présent d'usage : l'usage et la modicité du présent. L'article 852 du Code civil (N° Lexbase : L3493ABY) l'énonce sans ambages : la condition de l'absence de rapport, civil comme, par conséquence, fiscal, est lié à un usage. Tel est le cas du cadeau réalisé à l'occasion de certains évènements marquants de la vie, comme un anniversaire, les étrennes, la réussite à un examen ou encore le mariage. Certains auteurs proposent, ce qui n'a pas été validé par les juges, d'étendre cette notion aux hypothèses où des parents aident leurs enfants, comme lors de l'acquisition d'un bien immobilier ou lors de l'installation dans la vie professionnelle. La modicité du présent est, elle, appréciée au regard de la situation financière du "donateur" et de sa générosité. Ainsi, ne relèvent pas des dispositions des articles 784 du CGI et 852 du Code civil des chèques d'un montant total de 30 500 euros remis à deux enfants par une personne disposant d'un patrimoine de 1 250 000 euros (CA Paris, 1ère, B, 11 avril 2002, n° 2001/03791, M. Le directeur des services fiscaux de Paris Ouest c/ Madame Dalloz-Furet N° Lexbase : A5521AY7 ; lire Fabien Girard de Barros, Succession : la non réintégration des présents d'usage, Lexbase Hebdo,  n° 22 du 7 mai 2002 - édition fiscale N° Lexbase : N2810AAC).

2. Dons exceptionnels de sommes d'argent

Nul n'ignore que, jusqu'au 31 décembre 2005, les dons de sommes d'argent consentis en pleine propriété étaient exonérés de droits de mutation à titre gratuit à hauteur de 30 000 euros.

2.1. Insertion d'une obligation d'emploi dans un acte notarié de donation

Cette disposition temporaire, dénommé "dons exceptionnels", avait pour objectif, selon les termes du projet de loi, d'encourager les jeunes générations à consommer. En raison de cette finalité, l'administration fiscale vient de préciser que, dans l'hypothèse où, dans l'acte de donation constatant une telle donation, il aurait été inséré une obligation d'emploi, comme, par exemple, dans l'acquisition de la nue-propriété d'un bien donné, cette clause serait de nature à remettre en cause l'application du régime d'exonération (QE n° 77708 de M. Mariani Thierry, JOANQ, 8 novembre 2005, p. 10271, min. de l'Eco., réponse publ. 17 janvier 2006, p. 511, 12ème législature N° Lexbase : L5610HGU). L'administration justifie cette position, au motif qu'une telle clause est de nature à écarter toute possibilité pour le bénéficiaire d'acheter et d'utiliser pleinement des biens ou services avec les sommes reçues, en contradiction avec le but poursuivi par le loi incitative. Cette précision soulève des interrogations. En effet, cette exigence de consommation par le donataire, bien que reprise dans la présentation de l'instruction administrative commentant ce dispositif, n'avait pas été explicitée dans le texte même. Devant le Sénat, lors de la discussion du texte, le Ministre avait déclaré : "nous avons voulu laisser totalement libre d'utilisation ces 20 000 euros [le montant initialement fixé à 20 000 euros a été ultérieurement porté à 30 000 euros]. Une tentative de lister certains produits a tourné court : il fallait permettre à la solidarité entre les générations de s'exprimer, mais ne surtout pas se préoccuper de ce qui serait acheté ! Ce n'est pas notre rôle". L'usage fait par le bénéficiaire semblait, donc, indifférent jusqu'à la récente réponse ministérielle.

2.2. Rappel des donations antérieures

L'article 784 du CGI impose de prendre en compte les donations antérieures pour déterminer les droits dus, lors d'une nouvelle transmission à titre gratuit entre les mêmes personnes. Cependant, seules sont rapportables les donations consenties depuis moins de six ans. Dans un récente réponse ministérielle, il vient d'être confirmé que cette règle ne s'applique pas aux dons exceptionnels, lors de la succession du donateur (QE n° 72118 de M. Lachaud Yvan, JOANQ, 9 août 2005, p. 7621, min. de l'Eco., réponse publ. 17 janvier 2006, p. 504, 12ème législature N° Lexbase : L5609HGT). On remarquera que le fait que les dons exceptionnels ne soient pas pris en compte pour la liquidation des droits dus à raison de mutations à titre gratuit consenties postérieurement entre les mêmes personnes ne permet pas toujours une totale transparence de ces derniers lors de la succession du donateur. En effet, les règles civiles peuvent conduire à la "reprise" partielle de cette exonération. Ainsi, dans l'hypothèse d'une personne, mariée sous un régime de communauté, qui aurait donnée seule 30 000 euros à son fils, sans l'accord de son conjoint, au mépris de l'article 1422 du Code civil (N° Lexbase : L1551AB3), le droit des régimes matrimoniaux lui impose, au jour de son décès, de rapporter à la communauté une récompense d'égale montant à la somme donnée. Par suite, sa succession incluant la moitié de l'actif de cette communauté, l'équivalent de la moitié du don est soumis aux droits de mutation par décès.

3. Application de l'article 784 du CGI

Deux règles viennent en application du principe, selon lequel les donations consenties par une personne et sa succession sont reliées les unes aux autres de telle sorte que les biens transmis fassent, en principe, l'objet d'une liquidation unique des droits. La première est la règle du rappel civil qui conduit à prendre en compte les donations antérieures pour vérifier si la réserve de chaque successible est respectée. La seconde règle est celle du rapport fiscal, codifiée à l'article 784 du CGI, qui impose de prendre en compte les donations antérieures pour déterminer les droits dus lors d'une nouvelle transmission à titre gratuit. Cette règle du rapport, qui se limite, depuis le 1er janvier 2006, aux donations consenties depuis six ans, induit un effet de seuil important selon que la nouvelle transmission se situe quelques jours avant ou après ce délai. Pour cette raison, il a été demandé au ministre de l'Economie s'il était envisageable d'introduire un barème d'abattements applicable proportionnellement aux années écoulées entre les deux transmission à titre gratuit. La réponse est négative (QE n° 69250 de M. Masdeu-Arus Jacques, JOANQ, 5 juillet 2005, p. 6534, min. de l'Eco., réponse publ. 17 janvier 2006, p. 505, 12ème législature N° Lexbase : L5608HGS). Le motif du refus est double : selon l'administration, cette manière de procéder n'apparaît pas adéquate avec les mécanismes des donations, qui sont assimilées à une ouverture partielle et anticipée de la succession, mais surtout, la mesure aurait un coût élevé ! Voilà une motivation pour le moins franche.

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Droit financier

[Le point sur...] L'indépendance de l'analyse financière (2ème partie)

Lecture: 3 min

N6224AKQ

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Le 07 Octobre 2010

L'analyse financière est aujourd'hui définie à l'article L. 544-1 du Code monétaire et financier, aux termes duquel "exerce une activité d'analyse financière toute personne qui, à titre de profession habituelle, produit et diffuse des études sur les personnes morales faisant appel public à l'épargne, en vue de formuler et de diffuser une opinion sur l'évolution prévisible desdites personnes morales et, le cas échéant, sur l'évolution prévisible du prix des instruments financiers qu'elles émettent". L'analyste financier constitue ainsi "un intermédiaire entre les sociétés cotés en bourse et des investisseurs susceptibles de s'y intéresser" (1) dont le rôle est d'apprécier la valeur d'une entreprise et les perspectives d'évolution de ses titres afin de formuler une recommandation d'investissement destinée à éclairer les décisions prises par les investisseurs. Ainsi, "les travaux des analystes comportent généralement deux éléments essentiels : d'une part la présentation des faits et leur interprétation raisonnée, rendue nécessaire par la complexité des constructions comptables, d'autre part, les recommandations conduisant à classer les sociétés analysées dans des catégories déterminées (achat, vente, conserver), en fonction des performances attendues" (2) (cf. L'indépendance de l'analyse financière (1ère partie) N° Lexbase : N3962AKX).
III - La promotion d'une analyse financière indépendante : les propositions du rapport Demandolx

La solution la plus radicale qui peut être imaginée pour prévenir les conflits d'intérêts est d'isoler l'analyse financière dans une structure juridique autonome en consacrant son indépendance structurelle par rapport à la fourniture de services d'investissement et de services connexes (34). Dès lors, on peut s'interroger sur le point de savoir si la promotion d'une analyse financière structurellement indépendante souhaitée par le Rapport Demandolx ne constitue pas une réponse appropriée à la question de l'indépendance de l'analyse financière de nature à prévenir les risques de conflits d'intérêts.

Partant du constat que les structures d'analystes indépendants sont peu nombreuses dans le paysage financier français et qu'il n'existe pas aujourd'hui de cadre réglementaire et de moyens financiers appropriés permettant le développement de l'analyse financière "indépendante", le Rapport Demandolx formule huit recommandations.

En particulier, le groupe de travail recommande l'établissement par l'AMF d'une définition réglementaire de l'analyse financière "indépendante" permettant de la distinguer de l'analyse financière "sell-side" et "buy-side" en fonction de critères précis. La qualification d'analyse financière "indépendante" supposerait, ainsi, une indépendance capitalistique par rapport aux banques d'affaires et aux sociétés de bourses, ainsi qu'une indépendance commerciale et financière par rapport aux sociétés cotées. Les analystes financiers "indépendants" devraient, en outre, bénéficier d'une certaine indépendance économique, c'est-à-dire ne pas dépendre d'un nombre trop faible de clients et assurer une couverture du marché suffisamment large pour ne pas être influencés par les émetteurs couverts. Enfin, l'indépendance de jugement de l'analyste financier "indépendant" par rapport aux clients et au marché devrait être assurée par son statut. Les analystes financiers "indépendants" seraient enregistrés auprès de l'AMF, par exemple, à travers l'adhésion à une association professionnelle.

Le Rapport Demandolx recommande, par ailleurs, de rendre obligatoire la production d'une analyse financière indépendante en parallèle à celle fournie par les syndicats bancaires impliqués, lors des introductions en bourse ou lors d'une émission significative de titres de capital ou de titres donnant accès au capital (35).

La principale difficulté posée par l'analyse financière indépendante est la question de son financement. En effet, aujourd'hui, l'analyse financière "sell-side" est rémunérée sur les frais de courtage facturé à ses clients par la société de bourse et l'analyse financière "buy-side" est rémunérée sur les frais de gestion facturés par le gestionnaire, étant précisé que, généralement, les sociétés de bourse ne distinguent pas entre la partie du courtage rémunérant le service d'exécution d'ordres et la partie rémunérant l'analyse financière.

Deux solutions complémentaires sont proposées par le Rapport Demandolx pour financer l'analyse financière "indépendante". La première consisterait en la mise en place d'un système mutualisé de financement de la recherche par les sociétés cotées qui souhaiteraient y participer sur une base volontaire. La seconde consisterait à imposer aux intermédiaires financiers de distinguer la rémunération du service d'exécution de celle de l'analyse financière et de permettre de reverser cette dernière, à la demande du donneur d'ordre et dans des proportions définies par celui-ci, à un bureau d'analystes financiers indépendants.

Le Rapport Demandolx a fait l'objet d'une consultation publique du 13 juillet au 30 septembre 2005. Dans ce cadre, les recommandations formulées ont fait l'objet de certaines critiques de la part des professionnels concernés.

L'on peut peut-être se demander si la promotion de l'analyse financière "indépendante" est vraiment nécessaire dès lors que les analystes financiers, et en particulier les analystes "sell-side", sont, aujourd'hui, soumis à des règles contraignantes ayant notamment vocation à prévenir et à gérer les conflits d'intérêts. Ces règles peuvent paraître suffisantes pour garantir l'indépendance des analystes financiers et ce, malgré l'absence de séparation structurelle avec les autres services fournis par le prestataire habilité. Plus grave, il n'est pas certain que le système de financement de l'analyse indépendante proposé soit économiquement viable. Enfin, quelle que soit la volonté politique de développer l'analyse financière indépendante, les banques d'affaires prestigieuses et leurs analystes vedettes jouissent aujourd'hui d'un crédit et d'une réputation que les recommandations d'investissement des bureaux d'analystes indépendants mettront du temps à acquérir.

Bernard-Olivier Becker
Avocat à la CourBredin Prat


(1) J.-P. Pierret, La profession d'analyste financier, Revue Lamy Droit des Affaires, septembre 2003, n° 63.
(2) Rapport de l'AMF en date du 13 juillet 2005, élaboré par le groupe de travail présidé par Jean de Demandolx intitulé : "Pour un nouvel essor de l'analyse financière indépendante".
(3) Communiqué de presse conjoint (SEC, Procureur général de l'Etat de New-york, NASD, NYSE et NASAA) du 28 avril 2003 disponible sur le site de la SEC.
(4) T. com. Paris, 1ère ch. supplémentaire du 12 janvier 2004, SA LVMH c/ Société Morgan Stanley & Co International Limited (N° Lexbase : A7001DAK), Bull. Joly Bourse, mars-avril 2004, p. 185, note D. Schmidt ; A. Pietrancosta, L'affaire Morgan Stanley/LVMH, Banque d'investissement et analyse financière, RD bancaire et financier 2004, n° 2, p. 131 ; F.-L. Simon, Des conditions de mise en oeuvre de la responsabilité civile des analystes financiers, Revue des sociétés, 2004, n° 2, p. 297 ; J.-J Daigre, LVMH c/ Morgan Stanley, le sens d'une histoire, JCP éd. G. 2004, p. 219 ; F. Leplat, La responsabilité des analystes financiers, Lexbase Hebdo n° 105 du Jeudi 29 Janvier 2004 - édition affaires (N° Lexbase : N0309AB3) ; A. Couret, Banques d'affaires, analystes financiers et conflits d'intérêts, D. 2004, p. 335.
(5) IOSCO -OICV, Statement of Principles for adressing sell-side securities anayst conflicts of interest ; voir : Analyse financière et agence de notation, propositions de l'OICV, JCP éd. E, 2004, n° 27, p. 1099.
(6) Ces textes sont aujourd'hui abrogés et les dispositions correspondantes concernant la réglementation de l'analyse financière ont été reprises dans le Règlement général de l'AMF.
(7) C. com., art. L. 544-1, précité.
(8) Désormais, l'article L. 621-7, VIII, du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L3976HBU) énonce que le règlement général de l'AMF détermine, "concernant les personnes autres que celles mentionnées aux 1° et 7° du II de l'article L. 621-9 (N° Lexbase : L3978HBX) [i.e. les personnes autres que les prestataires de service d'investissement, les organismes de placement collectif ou leur société de gestion], qui produisent et diffusent des analyses financières : 1° les conditions d'exercice de l'activité des personnes visées à l'article L. 544-1 ;2° Les règles de bonne conduite s'appliquant aux personnes physiques placées sous l'autorité ou agissant pour le compte des personnes qui produisent et diffusent des analyses financière à titre de profession habituelle, et les dispositions propres à assurer leur indépendance d'appréciation et la prévention des conflits d'intérêts".
(9) B. Le Bars, Adoption d'un statut des services d'analyse financière et des agences de notation, PA 14 novembre 2003, n° 228, p. 63.
(10) Ibidem.
(11) Bulletin COB 2003, n° 382, p.183.
(12) En pratique, il s'agirait principalement des recommandations diffusées par les journalistes, divers réseaux de diffusion d'informations ou de lettres périodiques (voir, le Rapport n° 2342 du Député Gilles Carrez présenté à l'Assemblée Nationale le 30 mai 2005 dans le cadre de l'adoption de la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie).
(13) Article L. 621-7 IX du Code monétaire et financier introduit par la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie.
(14) Article L. 621-17-1du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L8011HBC) introduit par la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie.
(15) Pour un commentaire des dispositions contenues dans le projet de décret d'application de la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie, voir ANSA, n° 05-052, novembre 2005.
(16) Articles L. 621-31 à L. 621-35 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L7986HBE) introduit par la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie.
(17) B. Le Bars, Adoption d'un statut des services d'analyse financière et des agences de notation, PA, 14 novembre 2003, n° 228, p. 63.
(18) J.-J. Daigre, L'analyse financière, une nouvelle activité réglementé, études J. Béguin, Litec, 2005, p. 231.
(19) Le déontologue est la personne physique dont la fonction est de s'assurer du respect des règles de bonnes conduites en matière de service d'investissement et de services connexes par le prestataire habilité, ses mandataires et ses collaborateurs (Article 321-26 du Règlement général de l'AMF).
(20) Règlement général AMF, art. 321-29 (N° Lexbase : L5526G88).
(21) Règlement général AMF, art. 321-128, II (N° Lexbase : L5494G8Y).
(22) Règlement général AMF, art. 321-123 (N° Lexbase : L5489G8S).
(23) Règlement général AMF, art. 321-128.
(24) Règlement général AMF, art. 321-133 (N° Lexbase : L5500G89).
(25) Ibidem.
(26) J.-J. Daigre, précité.
(27) Règlement général AMF, art. 321-40 (N° Lexbase : L5539G8N).
(28) Règlement général AMF, art. 321-36 (N° Lexbase : L5534G8H).
(29) Règlement général AMF, art. 321-37 (N° Lexbase : L5535G8I).
(30) Règlement général AMF, art. 321-37 et 322-80 (N° Lexbase : L5682G8X).
(31) op. cit.
(32) Règlement général AMF, art. 321-39 (N° Lexbase : L5537G8L).
(33) Règlement général AMF, art. 321-38 (N° Lexbase : L5536G8K).
(34) J.-P. Zimmermann, Les analystes financiers, Revue des sociétés, octobre-décembre 2003, p. 741 ; Ph. Bissara, Analystes financiers et agences de notation, Bull. Joly Bourse, janvier-février 2004, p. 11.
(35) Synthèse de la consultation publique sur le rapport du groupe de travail sur l'analyse financière indépendante, disponible sur le site internet de l'AMF.

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Procédure civile

[Textes] Premières observations sur la réforme de la procédure civile (partie I)

Réf. : Décret n° 2005-1678, 28 décembre 2005, relatif à la procédure civile, à certaines procédures d'exécution et à la procédure de changement de nom (N° Lexbase : L3298HEU)

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N3997AKA

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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris

Le 07 Octobre 2010

Le décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005 modifie de manière importante les règles applicables à la procédure civile. Cette réforme touche la procédure à ses différents stades : notification et signification des actes de procédure, demande en justice, mise en état, mesure d'instruction, élaboration et caractères du jugement, voies de recours, communication d'actes par voie électronique, etc. Elle entrera en vigueur, pour l'essentiel, le 1er mars 2006 (article 87 du décret).
L'objet du présent commentaire porte sur la modification des règles relatives au jugement, aux voies de recours et aux significations et notifications, à l'exclusion, pour ces dernières, de celles dans les collectivités d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et à l'étranger. I - Dispositions relatives aux notifications et aux significations

A - La modification de l'article 655 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 54 du décret

"Si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

La copie peut être remise à toute personne présente, à défaut au gardien de l'immeuble, en dernier lieu à tout voisin.

La copie ne peut être laissée qu'à la condition que la personne présente, le gardien ou le voisin l'accepte, déclare ses nom, prénoms, qualité et, s'il s'agit du voisin, indique son domicile et donne récépissé.

L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise".

"Si la signification à personne s'avère impossible, l'acte peut être délivré soit à domicile, soit, à défaut de domicile connu, à résidence.

L'huissier de justice doit relater dans l'acte les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification.

La copie peut être remise à toute personne présente au domicile ou à la résidence du destinataire.

La copie ne peut être laissée qu'à condition que la personne présente l'accepte et déclare ses nom, prénoms et qualité.

L'huissier de justice doit laisser, dans tous ces cas, au domicile ou à la résidence du destinataire, un avis de passage daté l'avertissant de la remise de la copie et mentionnant la nature de l'acte, le nom du requérant ainsi que les indications relatives à la personne à laquelle la copie a été remise".

  • Commentaire

La signification doit, en principe, être effectuée à personne (NCPC, art. 654 N° Lexbase : L2920ADI). Lorsqu'elle est impossible, l'acte peut cependant être délivré à domicile ou à résidence (NCPC, art. 655).

La Cour de cassation avait exigé que l'acte d'huissier mentionne à l'acte la ou les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une signification à personne (Cass. civ. 2, 30 juin 1993, n° 91-21.216, Monsieur Guillard c/ Monsieur Di Martino N° Lexbase : A5939ABL ; voir également Cass. civ. 2, 10 novembre 2005, n° 03-20.369, FS-P+B N° Lexbase : A5081DLR).

Le décret du 28 décembre 2005 confère à l'obligation de l'huissier de mentionner les circonstances caractérisant l'impossibilité de signifier à personne, d'origine jurisprudentielle, une force légale et elle lui impose également de relater les diligences qu'il a accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire.

L'article 655 du Nouveau Code de procédure civile est également modifié en ce que, désormais, lorsque la signification s'effectue à domicile ou à résidence, la copie de l'acte délivré ne pourra plus être remise, à défaut de toute personne présente, au gardien ou, en dernier lieu, à un voisin.

A défaut de personne présente au domicile ou à la résidence du signifié, la signification aura lieu, non plus en mairie, mais en l'étude d'huissier à la suite de la modification de l'article 656 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L7673HEW).

B - La modification de l'article 656 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 55 du décret

"Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice et dont il sera fait mention dans l'acte de signification que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est réputée faite à domicile ou à résidence.

Dans ce cas, l'huissier de justice est tenu de remettre copie de l'acte en mairie le jour même ou au plus tard le premier jour où les services de la mairie sont ouverts au public. Le maire, son délégué ou le secrétaire de mairie fait mention sur un répertoire de la remise et en donne récépissé.

L'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence du destinataire un avis de passage conformément à ce qui est prévu à l'article précédent. Cet avis mentionne que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à la mairie, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

La copie de l'acte est conservée à la mairie pendant trois mois. Passé ce délai, celle-ci en est déchargée.

Le maire, son délégué ou le secrétaire de mairie peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l'acte à une autre mairie où celui-ci pourra la retirer dans les mêmes conditions".

"Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.

La copie de l'acte est conservée à l'étude pendant trois mois. Passé ce délai, l'huissier de justice en est déchargé.

L'huissier de justice peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l'acte à une autre étude où celui-ci pourra le retirer dans les mêmes conditions".

  • Commentaire

L'article 656 du Nouveau Code de procédure civile modifie en profondeur les règles de la signification puisqu'il supprime la signification à domicile par remise de l'acte en mairie.

Si le mécanisme de l'avis déposé au domicile du signifié l'invitant à retirer la copie de l'acte est maintenu, ce sera désormais à l'étude d'huissier que s'effectuera ce retrait.

Pour le reste, la procédure de signification par remise de la copie de l'acte à l'étude d'huissier est identique à celle par remise de la copie de l'acte en mairie.

Ses effets sont, toutefois, différents puisque cette nouvelle forme de signification ne sera pas réputée faite à domicile ou à résidence comme l'était, auparavant, la signification par remise de la copie de l'acte en mairie. Cette modification ne sera pas sans conséquence sur la détermination de la date de signification de l'acte délivré selon cette nouvelle modalité. En effet, aux termes de l'article 653 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L7671HET), la date de la signification d'un acte d'huissier de justice est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile ou à résidence, au parquet ou celle de l'établissement du procès-verbal de l'article 659 du Nouveau Code de procédure civile. La signification par remise de l'acte en mairie étant réputée faite à domicile, l'article 653 du Nouveau Code de procédure civile trouvait à s'appliquer et sa date, selon la jurisprudence, est celle du jour où l'huissier dépose l'avis de passage au domicile du signifié. Quelle date retenir, désormais, pour la signification par remise de la copie de l'acte à l'étude d'huissier puisqu'elle n'est plus réputée à domicile et que l'article 653 du Nouveau Code de procédure civile n'a plus vocation à s'appliquer ?

Enfin, il doit être noté que l'article 658 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L7675HEY), qui impose à l'huissier de justice qui a signifié à domicile ou par remise de la copie de l'acte en son étude, d'aviser l'intéressé de la signification par lettre simple, a été modifié par l'article 57 du décret du 28 décembre 2005 pour prendre en compte la disparition de la signification par remise de la copie de l'acte en mairie. Désormais, cette lettre devra rappeler que le destinataire pourra demander, non pas à la mairie la transmission de la copie de l'acte à une autre mairie, mais à l'huissier de justice de transmettre la copie de l'acte en une autre étude.

C - Modification de l'article 657 du Nouveau Code de procédure civile

"Lorsque l'acte n'est pas délivré à personne, l'huissier de justice mentionne sur la copie, soit les indications relatives à la personne à laquelle cette copie a été laissée, soit l'indication de la mairie à laquelle elle a été remise.

La copie de l'acte signifié doit être placée sous enveloppe fermée ne portant que l'indication des nom et adresse du destinataire de l'acte, et le cachet de l'huissier apposé sur la fermeture du pli".

"Lorsque l'acte n'est pas délivré à personne, l'huissier de justice mentionne sur la copie les conditions dans lesquelles la remise a été effectuée.

La copie de l'acte signifié doit être placée sous enveloppe fermée ne portant que l'indication des nom et adresse du destinataire de l'acte, et le cachet de l'huissier apposé sur la fermeture du pli".

  • Commentaire

L'ancien article 657 du Nouveau Code de procédure civile impose à l'huissier de justice qui n'a pas signifié à personne de mentionner sur la copie de l'acte les indications relatives à la personne à laquelle cette copie a été laissée ou la mairie à laquelle elle a été remise.

Le principe de cette obligation a été maintenu par l'article 657 du Nouveau Code de procédure civile mais elle est énoncée en des termes plus généraux puisque l'huissier devra, désormais, mentionner sur la copie de l'acte "les conditions dans lesquelles la remise a été effectuée", ces dernières ne pouvant être, au demeurant, celles consistant en la remise de la copie de l'acte à une autre personne que celle étant présente au domicile ou à la résidence du signifié ou en mairie.

D - La création d'un article 665-1 du Nouveau Code de procédure civile

"Lorsqu'elle est effectuée à la diligence du greffe, la notification au défendeur d'un acte introductif d'instance comprend, de manière très apparente :

1° Sa date ;

2° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

3° L'indication que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;

4° Le cas échéant, la date de l'audience à laquelle le défendeur est convoqué ainsi que les conditions dans lesquelles il peut se faire assister ou représenter".

  • Commentaire

L'article 665 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2931ADW) ouvre la section relative à la notification des actes en la forme ordinaire. Le nouvel article 665-1 du même code, qui lui fera suite, prévoit les mentions que devra comporter la notification par le greffe d'un acte introductif d'instance dont certaines doivent actuellement figurer sur une assignation en application de l'article 55 du Nouveau Code de procédure (N° Lexbase : L2784ADH).

Ces précisions, visant à informer le demandeur, ont s'imposent en raison de la modification des articles 54 (N° Lexbase : L7637HEL) et 58 (N° Lexbase : L7652HE7) du Nouveau Code de procédure civile, par les articles 2 et 3 du décret du 28 décembre 2005, qui étendent la possibilité de former une demande initiale par requête ou déclaration au greffe.

E - La modification des articles 670 et 670-1 du Nouveau Code de procédure civile par les articles 59 et 60 du décret

"La notification est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire".

"En cas de retour au secrétariat de la juridiction d'une lettre de notification qui n'a pu être remise à son destinataire, le secrétaire invite la partie à procéder par voie de signification".

"La notification est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire.

La notification est réputée faite à domicile ou à résidence lorsque l'avis de réception est signé par une personne munie d'un pouvoir à cet effet".

"En cas de retour au secrétariat de la juridiction d'une lettre de notification dont l'avis de réception n'a pas été signé dans les conditions prévues à l'article 670, le secrétaire invite la partie à procéder par voie de signification".

  • Commentaire

Un nouvel alinéa a été ajouté à l'article 670 du Nouveau Code de procédure civile. Il prévoit que la notification, lorsqu'elle n'est pas signée par son destinataire, sera réputée faite à domicile ou à résidence si elle est signée par une personne ayant un pouvoir à cet effet. L'article 670-1 du Nouveau Code de procédure civile prend en compte cette nouvelle modalité de notification.

II - Dispositions relatives au jugement

A - Modification de l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 43 du décret

"Si le jugement ne peut être prononcé sur-le-champ, le prononcé en est renvoyé, pour plus ample délibéré, à une date que le président indique.

Il peut toutefois aviser les parties, à l'issue des débats, que le jugement sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la juridiction, à la date qu'il indique".

"Si le jugement ne peut être prononcé sur-le-champ, le prononcé en est renvoyé, pour plus ample délibéré, à une date que le président indique, à moins qu'il ait été fait application du troisième alinéa de l'article 764.

Il peut toutefois aviser les parties, à l'issue des débats, que le jugement sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la juridiction, à la date qu'il indique, à moins qu'il ait été fait application du troisième alinéa de l'article 764.

S'il décide de renvoyer le prononcé du jugement à une date ultérieure, le président en avise les parties par tout moyen. Cet avis comporte les motifs de la prorogation ainsi que la nouvelle date à laquelle la décision sera rendue".

  • Commentaire

Le délibéré est le "nom spécialement donné aux délibérations des juges [...], c'est-à-dire à la phase (secrète) du jugement qu s'intercale entre les débats et le prononcé et qui peut avoir lieu soit séance tenante (délibéré sur le siège), soit après renvoi du jugement à une date ultérieure (délibéré en la chambre du conseil)" (Vocabulaire juridique, G. Cornu, 3e éd., PUF). L'article 450 du Nouveau Code de procédure civile envisage ces deux modalités.

Le décret du 20 août 2004 (décret n° 2004-836, portant modification de la procédure civile N° Lexbase : L0896GTD) avait, par adjonction d'un nouvel alinéa à l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile, prévu une nouvelle modalité du prononcé du jugement par sa mise à disposition au greffe à une date que le juge devait également préciser.

Le décret du 28 décembre 2005 a modifié l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile afin de prendre en compte l'hypothèse dans laquelle le juge de la mise en état aurait fixé un calendrier et, à cette occasion, la date du délibéré. En effet, l'article 764 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L7706HE7) a fait lui-même l'objet d'une modification par l'article 23 du décret du 28 décembre 2005. Cet article, relatif à la mise en état devant le tribunal de grande instance, confère au juge de la mise en état le pouvoir de fixer les délais nécessaires à l'instruction de l'affaire et de proroger ces délais. C'est le dernier alinéa de cet article, prévoyant la faculté pour le magistrat de renvoyer l'affaire à une conférence ultérieure, qui a été modifié. Désormais, aux termes de trois nouveaux derniers alinéas, le juge de la mise en état peut fixer un calendrier de la mise en état comportant la date d'échange des conclusions, la date de clôture, des débats et, par dérogation à l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile, c'est-à-dire, lorsque le délibéré a été renvoyé à une date que le président doit indiquer, du prononcé de la décision.

En outre, le dernier alinéa nouveau de l'article 450 du Nouveau Code de procédure civile prévoit expressément la possibilité pour le président de proroger la date du délibéré. Cette décision, qui sera portée à la connaissance des parties par tout moyen, devra être motivée et indiquer la nouvelle date du prononcé de la décision. Les éléments pouvant motiver une telle décision n'ont pas été précisés et aucune sanction ne vient assortir cette obligation. En conséquence, si l'objectif est louable, qui tend à éviter que le prononcé de la décision soit retardé, il est à craindre que cette nouvelle disposition soit peu efficace en pratique.

B - Modification de l'article 474 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 44 du décret

"En cas de pluralité de défendeurs cités pour le même objet, lorsque l'un au moins d'entre eux ne comparaît pas, le jugement est réputé contradictoire à l'égard de tous si la décision est susceptible d'appel ou si ceux qui ne comparaissent pas ont été cités à personne.

Si la décision requise n'est pas susceptible d'appel, les parties défaillantes qui n'ont pas été citées à personne doivent être citées à nouveau. Le juge peut néanmoins décider, si la citation a été faite selon les modalités prévues à l'article 659, qu'il n'y a pas lieu à nouvelle citation. Le jugement rendu après nouvelles citations est réputé contradictoire à l'égard de tous dès lors que l'un des défendeurs comparaît ou a été cité à personne sur première ou seconde citation ; dans le cas contraire, le jugement est rendu par défaut".

"En cas de pluralité de défendeurs cités pour le même objet, lorsque l'un au moins d'entre eux ne comparaît pas, le jugement est réputé contradictoire à l'égard de tous si la décision est susceptible d'appel ou si ceux qui ne comparaissent pas ont été cités à personne.

Lorsque la décision n'est pas susceptible d'appel et que l'une au moins des parties qui n'a pas comparu n'a pas été citée à personne, le jugement est rendu par défaut".

  • Commentaire

Le Nouveau Code de procédure civile opère une classification tripartite des jugements fondée sur la comparution ou la non-comparution des parties : le jugement contradictoire, le jugement réputé contradictoire et le jugement par défaut. De cette qualification dépendront, notamment, les voies de recours offertes à la partie défaillante. Ainsi, si le jugement est réputé contradictoire, il ne pourra être frappé de recours que par les voies ouvertes contre les jugements contradictoires (NCPC, art. 477 N° Lexbase : L2717ADY). Le jugement rendu par défaut ne pourra, en revanche, faire l'objet que d'une opposition, lorsque cette voie de recours est, par ailleurs, ouverte (NCPC, art. 473 N° Lexbase : L2713ADT).

L'article 474 du Nouveau Code de procédure civile est relatif au jugement rendu en cas de pluralité de défendeurs cités pour le même objet et du défaut de comparution de l'un d'eux au moins.

Le premier alinéa de ce texte prévoit que, dans cette hypothèse, lorsque le jugement est susceptible d'appel ou que celui ou ceux qui ne comparaissent pas ont été cités à personne, le jugement est réputé contradictoire à l'égard de tous.

Le second alinéa disposait que, lorsque le jugement n'était pas susceptible d'appel, les parties non citées à personne devaient être à nouveau citées, sauf lorsque la citation avait été effectuée par procès-verbal de recherches infructueuses (NCPC, art. 659 N° Lexbase : L2925ADP), auquel cas le juge pouvait décider de ne pas citer à nouveau. Le jugement était alors réputé contradictoire à l'égard de tous si l'un d'eux comparaissait ou que l'un d'eux avait été cité à personne lors de la première ou de la seconde citation.

En cas de pluralité de défendeurs, n'étaient donc rendus par défaut que les jugements non susceptibles d'appel et pour lesquels, sur la première ou seconde citation, aucun défendeur n'avait été cité à personne ou n'avait comparu.

L'ensemble de ces solutions semble s'appuyer, notamment, sur la présomption selon laquelle les défendeurs non comparants ou non cités à personne sont informés par la personne qui a comparu ou qui a été citée à personne. Cette présomption fragile est sévère lorsque le jugement est rendu en dernier ressort (J. Héron, Droit judiciaire privé, 2ème éd., par T. Le Bars, Domat Montchrestien, n° 1126).

Le décret du 28 décembre 2005 atténue cette sévérité puisque, désormais, pour les jugements non susceptibles d'appel, le seul fait que l'un des défendeurs non comparant n'ait pas été cité à personne impliquera que le jugement soit rendu par défaut. L'obligation d'effectuer une seconde citation a été corrélativement supprimée.

En conséquence, lorsque le jugement est insusceptible d'appel, il ne sera désormais réputé contradictoire que dans l'hypothèse où le ou les défendeurs non comparants ont tous été cités à personne.

III - Dispositions relatives aux voies de recours

A - Modification de l'article 515 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 46 du décret

"Hors les cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi.

Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation. En aucun cas, elle ne peut l'être pour les dépens".

"Hors les cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi.

Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation".

  • Commentaire

Le décret du 28 décembre 2005 a supprimé la dernière phrase de l'article 515 du Nouveau Code de procédure civile qui interdisait au juge d'ordonner l'exécution provisoire pour les dépens de l'instance. Désormais, puisqu'elle est peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation, elle pourra également l'être pour la condamnation aux dépens.

B - La création d'un nouvel article 525-1 du Nouveau Code de procédure civile et la modification de l'article 526 du même code par l'article 47 du décret

"Lorsque l'exécution provisoire n'a pas été demandée, ou si, l'ayant été, le juge a omis de statuer, elle ne peut être demandée, en cas d'appel, qu'au premier président statuant en référé ou, dès lors qu'il est saisi, au magistrat chargé de la mise en état".

"Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

Le premier président ou le conseiller chargé de la mise en état autorise, sauf s'il constate la péremption, la réinscription de l'affaire au rôle de la cour sur justification de l'exécution de la décision attaquée".

  • Commentaire

Les dispositions de l'ancien article 526 du Nouveau Code de procédure civile ont été intégralement reprises par un nouvel article 525-1 du même code (N° Lexbase : L7649HEZ), tandis que de nouvelles dispositions ont été intégrées dans le premier.

Ces dernières prévoient que, lorsqu'une décision est revêtue de l'exécution provisoire, qu'elle soit de droit ou qu'elle ait été ordonnée, le premier président ou le conseiller de la mise en état lorsqu'il est saisi, peut décider la radiation du rôle de l'affaire si l'appelant n'a pas exécuté cette décision ou procédé à la consignation prévue par l'article 512 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L5007GUY).

Le but de cette nouvelle disposition est clair : inciter la partie condamnée à exécuter la décision.

La radiation devra avoir été demandée par l'intimé et les observations des parties devront avoir été recueillies.

Il ne s'agit ici que d'une faculté pour le magistrat qui ne pourra, toutefois, ordonner la radiation si l'exécution est de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

L'existence de conséquences manifestement excessives confère également la possibilité, au premier président, de suspendre les effets de l'exécution provisoire lorsqu'elle a été ordonnée et lorsqu'elle est de droit si, en outre, le principe du contradictoire ou l'article 12 du Nouveau Code de procédure (N° Lexbase : L2043ADZ) a été manifestement violé (NCPC, art. 524 N° Lexbase : L4949GUT). En cas d'exécution provisoire de droit, l'existence de conséquences manifestement excessives permet aussi, au premier président, de la subordonner à la constitution d'une garantie par le bénéficiaire de l'exécution provisoire ou de la suspendre en obligeant la partie condamnée au paiement d'une somme à la consigner.

Seul le premier président pouvant suspendre l'exécution provisoire, il existe un risque, lorsque le juge de la mise en état est saisi, de voir le premier, saisi d'une demande de suspension de l'exécution provisoire, prendre une décision divergente de celle du second, saisi d'une demande de radiation, quant aux conséquences manifestement excessives. Il aurait été sans doute préférable de reconnaître la compétence de suspendre l'exécution provisoire et celle de d'ordonner la radiation au même juge.

Enfin, la radiation de l'affaire du rôle de la cour n'est pas définitive puisque le premier président ou le conseiller de la mise en état pourra, sauf péremption, réinscrire l'affaire au rôle sur la justification de l'exécution de la décision attaquée (NCPC, nouvel article 526, dernier alinéa).

C - Modification de l'article 540 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 48 du décret

"Si le jugement a été rendu par défaut ou s'il est réputé contradictoire, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l'expiration du délai si le défendeur, sans qu'il y ait eu faute de sa part, n'a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours, ou s'il s'est trouvé dans l'impossibilité d'agir.

Le relevé de forclusion est demandé au président de la juridiction compétente pour connaître de l'opposition ou de l'appel. Le président est saisi comme en matière de référé.

La demande n'est recevable que si elle est formée dans un délai raisonnable à partir du moment où le défendeur a eu connaissance de la décision, sans jamais pouvoir l'être plus d'un an après la notification de celle-ci ; ce délai n'est pas suspensif d'exécution.

Le président se prononce sans recours.

S'il fait droit à la requête, le délai d'opposition ou d'appel court à compter de la date de sa décision, sauf au président à réduire le délai ou à ordonner que la citation sera faite pour le jour qu'il fixe".

"Si le jugement a été rendu par défaut ou s'il est réputé contradictoire, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l'expiration du délai si le défendeur, sans qu'il y ait eu faute de sa part, n'a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours, ou s'il s'est trouvé dans l'impossibilité d'agir.

Le relevé de forclusion est demandé au président de la juridiction compétente pour connaître de l'opposition ou de l'appel. Le président est saisi comme en matière de référé.

La demande est recevable jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur.

Le président se prononce sans recours.

S'il fait droit à la requête, le délai d'opposition ou d'appel court à compter de la date de sa décision, sauf au président à réduire le délai ou à ordonner que la citation sera faite pour le jour qu'il fixe".

  • Commentaire

La sanction du dépassement du délai pour exercer une voie de recours est grave car elle entraîne la forclusion du justiciable. Le législateur a tempéré cet effet en octroyant au défendeur forclos, à certaines conditions, la possibilité d'être relevé de sa forclusion.

Il devra, à cette fin, saisir le président de la juridiction compétente pour connaître de l'appel ou de l'opposition et établir qu'il n'y a pas eu faute de sa part et qu'il n'a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours ou qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité d'agir.

Avant sa modification par le décret, le troisième alinéa de l'article 540 du Nouveau Code de procédure civile imposait au défendeur de former sa demande de relever de forclusion dans un délai raisonnable à partir du moment où il avait eu connaissance de la décision, sans jamais pouvoir l'être plus d'un an après la notification de celle-ci.

L'article 48 du décret supprime ce double délai et en crée un nouveau, à la fois plus sévère et plus favorable au défendeur forclos. En effet, désormais, il devra effectuer sa demande de relever de forclusion dans un délai de deux mois qui courra à compter du premier acte signifié à personne ou de la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie de ses biens. Dans ces deux cas, il existe une forte présomption que le défendeur ait été mis au courant de la décision rendue à son encontre et il apparaît légitime de limiter le délai dans lequel il peut agir. La référence au délai raisonnable et au délai d'un courant à compter de la notification de la décision ayant été supprimée, aucun délai ne vient, a priori, limiter la demande du défendeur auquel aucun acte n'a été signifié à personne. Toutefois, dès la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles les biens du débiteur, le délai de deux mois courra.

D - Modification des articles 1009-1 et 1009-2 du Nouveau Code de procédure civile par les articles 49 et 50 du décret

"Hors les matières où le pourvoi empêche l'exécution de la décision attaquée, le premier président ou son délégué décide, à la demande du défendeur et après avoir recueilli l'avis du procureur général et les observations des parties, le retrait du rôle d'une affaire lorsque le demandeur ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée de pourvoi, à moins qu'il ne lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande du défendeur doit, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, être présentée avant l'expiration des délais prescrits aux articles 982 et 991.

La décision de retrait du rôle n'emporte pas suspension des délais impartis au demandeur au pourvoi par les articles 978 et 989".

"Hors les matières où le pourvoi empêche l'exécution de la décision attaquée, le premier président ou son délégué décide, à la demande du défendeur et après avoir recueilli l'avis du procureur général et les observations des parties, la radiation d'une affaire lorsque le demandeur ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée de pourvoi, à moins qu'il ne lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que le demandeur est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.

La demande du défendeur doit, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, être présentée avant l'expiration des délais prescrits aux articles 982 et 991.

La décision de radiation n'emporte pas suspension des délais impartis au demandeur au pourvoi par les articles 978 et 989".

"Le délai de péremption court à compter de la notification de la décision ordonnant le retrait du rôle. Il est interrompu par un acte manifestant sans équivoque la volonté d'exécuter".

"Le délai de péremption court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation. Il est interrompu par un acte manifestant sans équivoque la volonté d'exécuter".

  • Commentaire

Afin d'inciter le demandeur au pourvoi à exécuter la décision dont il est l'objet, l'article 1009-1 du Nouveau Code de procédure civile offrait au défendeur la possibilité de saisir le premier président de la Cour de cassation afin que ce dernier décide de "retirer" l'affaire du rôle si la décision attaquée n'était pas exécutée.

Cette possibilité est maintenue mais a été modifiée à deux niveaux.

Tout d'abord, au terme retrait a été substitué celui de radiation, plus proche de la mesure réellement en cause. En effet, aux termes de l'article 381 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2612AD4), le retrait est en principe ordonné lorsque toutes les parties en font la demande écrite et motivée. En revanche, aux termes de l'article 383 du Nouveau code de procédure civile, la radiation sanctionne, dans les conditions de la loi, le défaut de diligence des parties. En application de l'article 383 du Nouveau Code de procédure civile (N° Lexbase : L2614AD8), il appartiendra donc au demandeur au pourvoi de justifier de l'accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné la radiation, soit, ici, l'exécution de la décision objet du pourvoi, afin que l'affaire soit rétablie.

Ensuite, le premier président peut désormais refuser de radier l'affaire du rôle non plus seulement lorsque "l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives", mais également, "lorsque le demandeur est dans l'impossibilité d'exécuter la décision". Il faut voir dans cet ajout, notamment, une volonté de l'Etat français de se conformer à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme qui a jugé, précisément à propos de l'article 1009-1 du Nouveau Code de procédure civile, que la décision de radiation d'un pourvoi du rôle de la Cour de cassation violait l'article 6 § 1 de la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR) lorsque le demandeur au pourvoi connaissait des difficultés financières importantes l'empêchant d'exécuter une condamnation (CEDH, 20 novembre 2000, Annoni Di Gussola et autres c/ France, n° 31819/96 et 33293/96). La Cour de cassation avait, cependant, également jugé que l'exécution d'une décision à l'encontre d'un débiteur en état d'impécuniosité entraînait des conséquences manifestement excessives empêchant le retrait de l'affaire (Cass. ord. 1er président, 2 février 2000, n° 91205). Désormais, l'impossibilité d'exécuter faisant obstacle à la radiation, le demandeur au pourvoi sans ressources pourra voir, néanmoins, son pourvoi examiné.

E - Modification de l'article 1027 du Nouveau Code de procédure civile par l'article 51 du décret

"La demande de récusation d'un magistrat de la Cour de cassation est examinée par la formation à laquelle l'affaire est distribuée".

"La demande de récusation d'un magistrat de la Cour de cassation est examinée par une chambre autre que celle à laquelle l'affaire est distribuée et qui est désignée par le premier président".

  • Commentaire

Le nouvel article 1027 du Nouveau Code de procédure civile prévoit que la demande de récusation d'un magistrat de la Cour de cassation sera examinée par une autre chambre que celle à laquelle l'affaire est distribuée. Auparavant, c'est la formation -même à laquelle l'affaire avait été distribuée qui en connaissait. Cette dissociation vise à favoriser la protection du droit du justiciable à un tribunal impartial.

F - Modification de l'article R. 212-5 du Code de l'organisation judiciaire par l'article 52 du décret

"En matière civile, les renvois après cassation d'un arrêt sont portés aux audiences solennelles.

Le contentieux des élections au Conseil national des barreaux ou au conseil de l'ordre ou de celles des bâtonniers, ainsi que les recours dirigés contre les décisions ou délibérations de ces conseils sont portés aux audiences solennelles.

Ces audiences se tiennent devant deux chambres sous la présidence du premier président.

Dans les cours d'appel qui ne comprennent qu'une chambre civile, la chambre des appels correctionnels assure avec cette chambre civile le service de ces audiences".

"Après cassation d'un arrêt en matière civile, le premier président, d'office ou à la demande des parties, renvoie l'affaire à l'audience solennelle si la nature ou la complexité de celle-ci le justifie. Cette décision est une mesure d'administration judiciaire.

Le contentieux des élections au Conseil national des barreaux ou au conseil de l'ordre ou de celles des bâtonniers, ainsi que les recours dirigés contre les décisions ou délibérations de ces conseils sont portés aux audiences solennelles.

Ces audiences se tiennent devant deux chambres sous la présidence du premier président.

Dans les cours d'appel qui ne comprennent qu'une chambre civile, la chambre des appels correctionnels assure avec cette chambre civile le service de ces audiences".

  • Commentaire

Désormais, les renvois après cassation d'un arrêt ne seront pas portés automatiquement aux audiences solennelles. Ils le seront uniquement sur décision du premier président si la nature de l'affaire ou sa complexité le justifie.

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Hygiène et sécurité

[Evénement] Risques et conditions de travail : hygiène et sécurité au travail - responsabilités civiles et pénales de l'employeur

Lecture: 7 min

N3933AKU

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par Compte-rendu réalisé par Aurélie Serrano, SGR - Droit social

Le 07 Octobre 2010

Le 24 janvier dernier, Elegia organisait un colloque destiné à faire le point sur l'actualité sociale de l'année 2005. Les éditions Lexbase, présentes à cet événement placé sous la direction de Paul-Henri Antonmattéi, Doyen de la Faculté de droit de Montpellier, ont choisi de vous présenter l'intervention d'Annick Pérol, avocate en droit social au sein du cabinet Pérol Raymond Khanna et associés, sur les risques et conditions de travail. Ont notamment été abordés à cette occasion, le droit d'alerte et de retrait dans l'entreprise, le tabac et l'alcool dans l'entreprise. Ainsi que le souligne Paul-Henri Antonmattéi, ce thème est prioritaire dans l'entreprise et fait l'objet d'un investissement fort du Gouvernement. Il suffit, pour s'en convaincre, de lire les 72 pages du plan santé au travail 2005-2009 sur le site du ministère du Travail.
  • Le droit d'alerte et de retrait

Le droit d'alerte et de retrait est défini aux articles L. 231-8 (N° Lexbase : L5969AC3) et L. 231-8-1 (N° Lexbase : L5971AC7) du Code du travail. Aux termes du premier de ces articles, le salarié doit signaler "immédiatement à l'employeur ou à son représentant toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection". Lorsque ce danger persiste, l'employeur ne pourra exiger du salarié une reprise de son activité. Aux termes du second texte, "aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un salarié ou d'un groupe de salariés qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux".

A la lumière de l'obligation de sécurité de résultat qui pèse désormais sur l'employeur, la notion de "danger grave et imminent", telle qu'employée dans ces articles du Code du travail, prend un nouvel éclairage. En effet, lorsqu'un tel danger est invoqué par un salarié, si l'employeur impose la continuation du travail, il y aura présomption irréfragable de faute inexcusable de l'employeur dans le cas où le salarié serait, par la suite, victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle (C. trav. art., L. 231-8-1).

Le danger grave peut se définir comme le risque grave d'atteinte à la santé physique, mais aussi mentale du salarié.

En revanche, le danger imminent est plus difficile à caractériser, notamment dans des situations telles que le harcèlement moral ou les ambiances tabagiques.

Enfin, la notion de "motif raisonnable", appréciée subjectivement par les juges, est assez favorable au salarié qui bénéficie d'une marge d'erreur. En effet, peu importe que le danger grave et imminent existe objectivement. Il suffit qu'un certain nombre d'indices raisonnables puisse laisser penser que ce danger grave et imminent existe. C'est ce qu'illustre un arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 mars 2005 (Cass. soc., 23 mars 2005, n° 03-42.412, F-D N° Lexbase : A4237DHE). Dans cette affaire, un salarié technicien chimiste avait refusé d'exécuter les tâches qui lui étaient confiées en invoquant son droit de retrait d'un atelier pilote dans lequel il avait été affecté. Son employeur l'a licencié pour faute grave. La cour d'appel déboute le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Les juges du fond fondent leur analyse sur une note adressée au salarié par l'inspecteur du travail observant notamment qu'un rapport de visite ne révèle aucun danger grave et imminent. La Cour de cassation censure cet arrêt au motif que la cour d'appel aurait dû rechercher "si le salarié justifiait d'un motif raisonnable de penser que la situation de travail présentait un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé".

  • Tabac et alcool dans l'entreprise

En cas d'exposition au tabac, la question de l'existence d'un droit de retrait au profit du salarié reste ouverte. En effet, si l'existence d'un danger est évidente, l'imminence de ce danger est, quant à elle, plus difficile à rapporter.

De même, la maladie dont il est démontré qu'elle est la conséquence d'une exposition au tabac au temps et au lieu de travail pourrait être qualifiée de maladie professionnelle. La faute inexcusable de l'employeur pourrait même être reconnue s'il était démontré que celui-ci avait connaissance du danger et n'a pas pris les dispositions nécessaires pour protéger les salariés.

Dans un arrêt du 29 juin 2005, la Cour de cassation a considéré que "l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de ses salariés en ce qui concerne leur protection contre le tabagisme dans l'entreprise" (Cass. soc., 29 juin 2005, n° 03-44.412, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A8545DIC, sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, La prise d'acte de la rupture pour non-respect par l'employeur de la législation anti-tabac, Lexbase Hebdo n° 176 du 13 juillet 2005 - édition sociale N° Lexbase : N6574AIC). Et la Cour d'ajouter que le non-respect de cette obligation est constitutif d'une faute justifiant la prise d'acte de la rupture du contrat par le salarié.

Selon Paul-Henri Antonmattéi, si la Cour de cassation poursuit un objectif louable en voulant imposer dans l'entreprise le respect de la législation anti-tabac, pour autant, les moyens employés pour y parvenir sont dangereux. En effet, selon le Professeur Antonmattéi, l'utilisation de la notion d'obligation de sécurité de résultat ne trouve pas à s'appliquer dans un tel contentieux. La Cour de cassation a confondu cette obligation avec celle de respecter la réglementation. Or, cette extension du périmètre de l'obligation de sécurité de résultat est non seulement difficile à justifier sur un plan juridique mais elle est également difficile à mettre en oeuvre. En autorisant la prise d'acte aux torts de l'employeur de façon quasi-automatique dès que les règles anti-tabac ne sont pas appliquées parfaitement dans l'entreprise, la Cour de cassation nous ramène directement, selon Paul-Henri Antonmattéi, au spectre de la jurisprudence sur l'autolicenciement antérieure au 25 juin 2003 (Cass. soc., 25 juin 2003, n° 01-42.679, FP+P+B+R+I N° Lexbase : A8977C8Y, sur ce sujet, lire Christophe Radé, "Autolicenciement" : enfin le retour à la raison !, Lexbase Hebdo n° 78 du 3 juillet 2003 - édition sociale N° Lexbase : N8027AAK).

Le Code du travail prévoit que la présence d'alcool est interdite dans l'entreprise (C. trav., art. L. 232-2 N° Lexbase : L5976ACC). Les contrôles d'alcoolémie sont autorisés lorsque les salariés utilisent des machines dangereuses ou conduisent des véhicules. Le salarié conserve le droit de refuser un tel contrôle mais ce refus pourrait être constitutif de faute grave. En outre, le salarié a la possibilité de demander un contre-test et peut, également, demander l'assistance d'un témoin lors du contrôle.

D'une manière générale, il est intéressant de rappeler que l'article L. 230-3 du Code du travail (N° Lexbase : L5947ACA) impose au salarié "de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa sécurité et de sa santé ainsi que de celles des autres personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail". Le non-respect de cette obligation pourra caractériser une faute grave (Cass. soc., 23 mars 2005, n° 03-42.404, F-P+B N° Lexbase : A4236DHD).

  • La délégation de pouvoir

La notion de délégation de pouvoir s'utilise essentiellement dans le domaine de l'hygiène et de la sécurité. En effet, une telle délégation a pour conséquence d'exonérer l'employeur de sa responsabilité civile et pénale en ce domaine.

Pour que la délégation de pouvoir soit valable, le délégataire doit être subordonné, avoir les moyens d'agir, être compétent et indépendant. Lorsque ces conditions sont remplies, le délégataire pourra être licencié en cas de manquement à l'un des éléments placés sous sa responsabilité du fait de la délégation de pouvoir. Toutefois, l'obligation de sécurité visée à l'article L. 230-3 concerne tous les salariés et pas seulement ceux ayant reçu une délégation de pouvoirs de l'employeur. Ainsi, l'absence de délégation de pouvoirs n'empêche pas le licenciement du salarié manquant à son obligation de sécurité, ainsi qu'en témoigne un arrêt rendu par la Cour de cassation le 30 septembre 2005 (Cass. soc., 30 septembre 2005, n° 04-40.625, F-P+B N° Lexbase : A5979DKN, sur ce sujet, lire Nicolas Mingant, Le licenciement pour faute grave en cas de violation par le salarié de son obligation de sécurité, Lexbase Hebdo n° 185 du 12 octobre 2005 - édition sociale N° Lexbase : N9527AIP)

Pour qu'un licenciement soit prononcé, encore faut-il que le délégataire dispose de la formation et des moyens suffisants pour exercer sa mission. Tel n'était pas le cas, dans un arrêt rendu par la Cour de cassation, le 18 mai 2005 (Cass. soc., 18 mai 2005, n° 03-40.242, F-D N° Lexbase : A3726DIT). En l'espèce, un salarié embauché en qualité de dessinateur-projeteur s'était vu confier la responsabilité de la sécurité de l'entreprise par avenant à son contrat de travail. La Cour de cassation juge son licenciement pour faute grave sans cause réelle et sérieuse. En effet, la formation du dessinateur en matière de sécurité était limitée et sans rapport avec l'importance de cette mission au sein d'une entreprise de couverture. En outre, sa délégation de pouvoir était limitée à la signature des plans de prévention et il ne disposait d'aucun moyen propre pour faire respecter la sécurité sur le chantier.

Plus généralement, s'agissant du contentieux relatif à la délégation de pouvoir, il semble que les juges du fond introduisent progressivement un nouveau critère de validité de la délégation de pouvoir : celui de l'acceptation de la délégation par le salarié. Ainsi, le plus souvent, les délégations tacites sont invalidées par les juges du fond. Pourtant, aucun texte n'exige, en théorie, la rédaction d'une délégation écrit (Cass. crim., 27 février 1979, n° 78-92.381, Ehrsam, publié N° Lexbase : A3532AGW). En pratique, un écrit stipulant de façon précise l'étendue de la délégation est donc conseillé. Cet écrit pourra prendre la forme d'un document annexe au contrat de travail et non pas nécessairement d'un avenant audit contrat. En effet, la délégation est la conséquence des fonctions du salarié et ne constitue pas une modification du contrat de travail (CA Paris, 3ème ch., sect. B, 24 juin 2005, n° 04/12475, M. Guy Sultan c/ Maître Christophe Thévenot N° Lexbase : A0724DKZ).

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