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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction
Le 07 Octobre 2010
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Réf. : Cass. soc., 20 avril 2005, n° 03-40.069, M. Jean-Paul Dobel c/ Société Honeywell Garrett, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A9302DHY)
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N3600AI8
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 07 Octobre 2010
Décision
Cass. soc., 20 avril 2005, n° 03-40.069, M. Jean-Paul Dobel c/ Société Honeywell Garrett, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A9302DHY) Cassation (jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Epinal, section industrie, le 14 octobre 2002) Textes visés : C. trav., art. L. 122-42 (N° Lexbase : L5580ACN) ; C. trav., art. L. 144-1 (N° Lexbase : L5778ACY) Mots-clefs : compensation ; conditions ; responsabilité civile contractuelle du salarié ; exigence d'une faute intentionnelle Liens base : ; |
Faits
1. M. Dobel, engagé en juin 1996 par la société Garrett, s'est vu remettre le 1er janvier 1998 un badge neuf lui permettant d'accéder au site de travail et au restaurant de l'entreprise et de pointer ses horaires. Le 12 juin 2001, M. Dobel a fait savoir à son employeur que son badge était détérioré. 2. Il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir le remboursement de la somme retenue sur son salaire et correspondant au coût du renouvellement du badge. Pour rejeter cette demande, le conseil de prud'hommes, après avoir énoncé que l'article L. 144-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5778ACY) permet une compensation sur les salaires dus pour fournitures diverses, a considéré que le badge est un outil nécessaire au travail et, qu'en conséquence, les directives données par la direction en ce qui concerne le coût du renouvellement d'un badge détérioré doivent être appliquées. |
Problème juridique
Le salarié qui détériore le badge d'accès à l'entreprise doit-il supporter le coût de son remplacement ? |
Solution
1. "La responsabilité pécuniaire d'un salarié à l'égard de son employeur ne peut résulter que de sa faute lourde, même en ce qui concerne le droit à compensation prévu à l'article L. 144-1 du Code du travail". 2. "En statuant comme il l'a fait, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé". "Casse et annule, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 octobre 2002, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Epinal ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Nancy". "Condamne la société Honeywell Garrett aux dépens". "Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Honeywell Garrett à payer à M. Dobel la somme de 2 500 euros". |
Commentaire
1. Une solution justifiée au regard des règles qui gouvernent la compensation
La compensation constitue un mode de paiement direct des obligations, qui éteint la dette concernée (C. civ., art. 1289 N° Lexbase : L1399ABG). Elle opère "de plein droit par la seule force de la loi" (C. civ., art 1290 N° Lexbase : L1400ABH), c'est-à-dire en dehors de toute intervention du juge. Elle constitue donc une menace pour le salarié, que le Code du travail a entendu limiter en posant un principe de prohibition qui déroge donc au Code civil, mais ne concerne, d'une part, que les seuls salaires et, d'autre part, les seules sommes dues à l'employeur "pour fournitures diverses, quelles qu'en soient la nature, à l'exception toutefois 1° Des outils et instruments nécessaires au travail ; 2° Des matières ou matériaux dont le salarié a la charge et l'usage ; 3° Des sommes avancées pour l'acquisition de ces mêmes objets". L'étendue de la prohibition fait l'objet d'un contentieux persistant devant les juridictions prud'homales, comme le montre cette affaire, contentieux qui porte généralement sur le champ d'application du régime dérogatoire de l'article L. 144-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5778ACY) ainsi que sur les limites de la compensation (qui ne peut porter sur le fraction saisissable du salaire : Cass. soc., 21 mars 2000, n° 99-40.003, M. Etcheverry c/ M. Maafa, publié N° Lexbase : A4972AGA).
La compensation en cause concernait ici le coût d'un badge d'accès à l'entreprise que le salarié avait détérioré. L'employeur l'avait remplacé aux frais du salarié, par compensation sur son salaire, et ce conformément à une note de service interne à l'entreprise, ce que le salarié contestait. Pour admettre la compensation, le conseil de prud'hommes d'Epinal avait fait application de l'article L. 144-1 du Code du travail qui concerne bien la compensation entre les salaires dus et les dettes du salarié à l'égard de l'employeur. Le conseil avait écarté le principe d'interdiction qui concerne les "fournitures diverses", en qualifiant le badge d'"outil nécessaire au travail", ce qui autorise exceptionnellement la compensation, conformément au 1° de l'article L. 144-1. Sur ce point précis, la Chambre sociale de la Cour de cassation ne conteste pas la qualification juridique opérée, car le badge d'accès à l'entreprise peut parfaitement être qualifié d'"outil" ou d'"instrument" nécessaire au travail ; sans badge, le salarié ne peut, en effet, pénétrer dans l'entreprise et donc exécuter sa prestation. Sur le plan de la seule compensation et de son régime propre aux dettes professionnelles du salarié, l'analyse développée par le conseil de prud'hommes n'était pas en cause.
Mais, ce débat avait focalisé l'attention du conseil de prud'hommes qui avait totalement occulté la nature exacte de ce mécanisme. La compensation constitue, en effet, un mode de paiement particulier de l'obligation qui ne préjuge en rien de l'existence des dettes à compenser. Ce n'est donc pas parce que les dettes des parties au contrat de travail sont potentiellement compensables que l'employeur est en droit d'opérer la compensation. Encore faut-il, comme l'indique très clairement l'article 1289 du Code civil (C. civ., art. 1289 N° Lexbase : L1399ABG), que "deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre" et que la dette du salarié soit établie. Or, tel n'était pas le cas ici. 2. Une solution justifiée au regard des règles qui gouvernent la responsabilité civile contractuelle du salarié
Il convenait donc, dans cette affaire, non pas de s'intéresser au régime de la compensation, mais bien à l'existence d'une dette du salarié compensable. Cette exigence avait d'ailleurs été rappelée par le ministère du Travail en 1980 (Rép. min. n° 33842, JO ANQ, du 20 août 1980, p. 3590) qui avait indiqué que "la compensation entre le salaire et les dettes du salarié est admise en cas de détérioration du matériel, dès lors que le salarié en a effectivement la garde et l'usage, et que sa responsabilité civile peut être engagée du fait de cette détérioration".
Dans des hypothèses très précises, c'est le Code du travail qui indique à quelles conditions le salarié pourrait être débiteur de son employeur. Il en ira ainsi en cas de démission abusive ou de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée en dehors des hypothèses autorisées par la loi (C. trav., art. L. 122-3-8, al. 4 N° Lexbase : L5457AC4). Dans les autres hypothèses, c'est à la jurisprudence qu'il revient de déterminer les conditions de la responsabilité du salarié. Or, on sait que le dommage causé par le salarié dans l'exécution de son contrat n'ouvre droit au bénéfice de l'employeur à réparation qu'en cas de faute lourde (Cass. soc., 27 novembre 1958 : D. 1959, p. 20, note R. Lindon) témoignant de l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise (Cass. soc., 5 avril 1990, n° 88-40.245, M. Jacknovitz c/ M. Montenay et autres, publié N° Lexbase : A4122AH7). Cette immunité ne s'applique toutefois pas lorsque les dommages causés par le salarié sont étrangers à l'exécution du contrat de travail ou lorsque le salarié a perçu, pour le compte de l'employeur, des sommes d'argent avec obligation de les lui restituer (Cass. soc., 19 novembre 2002, n° 00-46.108, FS-P+B+R sur le deuxième moyen N° Lexbase : A0492A4Y, lire nos obs., L'obligation de restituer les sommes perçues pour le compte de l'employeur - le recul de l'immunité civile du salarié ?, Lexbase Hebdo n° 50 du 5 décembre 2002, édition sociale N° Lexbase : N5053AAE).
En l'espèce, le badge du salarié ne fonctionnait plus, sans que l'on sache d'ailleurs si ce dysfonctionnement résultait d'une usure normale ou d'une détérioration imputable à la négligence du salarié. Or, l'employeur avait appliqué ici un principe qu'il avait lui-même fixé, en se payant directement du coût du remplacement sur le salaire. En d'autres termes, l'employeur considérait le salarié comme "responsable" de la détérioration du badge. Incontestablement, l'immunité civile du salarié dans l'exécution de son contrat de travail devait ici s'appliquer et la compensation ne pouvait donc s'opérer que si la preuve de la faute intentionnelle du salarié avait été rapportée, ce qui n'était, bien entendu, pas le cas. C'est déjà en ce sens qu'avait statué la Chambre sociale de la Cour de cassation en 1996, dans une affaire où l'employeur s'était directement remboursé de la franchise d'assurance restée à sa charge après un accident de la circulation causé par le salarié avec son véhicule de fonction (Cass. soc., 11 avril 1996, n° 92-42.847, M. Josselin c/ Société Century Group et autre N° Lexbase : A2316ABE), la Haute juridiction ayant reproché au conseil de prud'hommes d'avoir admis la compensation à l'égard du salarié alors "qu'il ne peut être tenu pour responsable, à l'égard de l'employeur, des conséquences pécuniaires de fautes commises dans l'exécution du contrat de travail qu'en cas de faute lourde, non alléguée en l'espèce".
Deux éléments étaient toutefois susceptibles de modifier l'analyse, même s'ils n'apparaissent pas dans l'arrêt. En premier lieu, on aurait pu considérer que ce n'était pas l'exécution du contrat de travail proprement dit qui était en cause, mais une convention de prêt accessoire, échappant donc à l'immunité civile. On sait, toutefois, que la Cour de cassation fait application de sa jurisprudence, exigeant une faute intentionnelle y compris lorsque est en cause l'exécution d'une telle convention accessoire afin d'étendre la protection du salarié (notre ouvrage Droit du travail et responsabilité civile, LGDJ- Bibliothèque de droit privé, n° 282, 1997, n° 239). En second lieu, l'employeur aurait pu se fonder sur les dispositions de sa note de service prévoyant la facturation des badges détériorés aux salariés, au titre des dispositions du règlement intérieur. Mais, là encore, l'argument ne pouvait prospérer dans la mesure où la jurisprudence considère l'immunité civile du salarié comme d'ordre public, ce qui met en échec tant les clauses de responsabilité inscrites dans le contrat de travail (Cass. soc., 10 novembre 1992, n° 89-40.523, Société Océan automobiles c/ Mlle Pichot, publié N° Lexbase : A9400AAE) que les reconnaissances de dettes signées par le salarié (Cass. soc., 12 avril 1995, n° 92-12.373, M Maze c/ Société Gaumont, publié N° Lexbase : A0960AB8) ou les dispositions contraires du règlement intérieur (Cass. soc., 9 juin 1993, n° 89-41.476, Régie des Transports de Marseille c/ M. Masegosa, publié N° Lexbase : A1664AAU). La solution finalement adoptée est donc parfaitement conforme aux solutions qui gouvernent la responsabilité personnelle du salarié et qui font supporter à l'employeur les coûts normalement prévisibles de l'activité que les travailleurs développent à son profit. |
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Le 07 Octobre 2010
I - Champ d'application du nouveau PTZ
Le nouveau prêt à 0 % est ouvert à 80 % des personnes qui souhaitent devenir propriétaires d'un logement (1).
1- Les bénéficiaires
Les bénéficiaires du nouveau prêt à 0 % sont des personnes physiques primo-accédantes. Le prêt n'est accordé qu'à des particuliers, c'est pourquoi, il ne peut pas être consenti à une société civile immobilière, à un groupement foncier agricole, pour l'achat de valeurs mobilières pour financer de l'immobilier, ou pour l'achat de parts de coopératives.
L'emprunteur ou chacun des co-emprunteurs ne doit pas avoir été propriétaire de sa résidence principale, au cours des 2 dernières années, précédant l'offre de prêt. Cependant, des exceptions sont prévues lorsque le bénéficiaire du prêt ou l'un des occupants du logement financé avec le prêt à 0 % est titulaire d'une carte d'invalidité, bénéficiaire d'une allocation adulte handicapé ou d'une allocation d'éducation spéciale ou, encore, victime d'une catastrophe ayant conduit à rendre inhabitable de manière définitive sa résidence principale du fait d'une catastrophe. Dans ce cas, la demande de prêt doit être faite dans les 2 ans suivant la date de publication de la décision de constatation de l'état de catastrophe ou la survenance du sinistre.
2- Les opérations finançables
Le nouveau prêt à 0 % sert à financer l'acquisition d'une résidence principale. Il peut s'agir de :
- la construction ou l'acquisition d'un logement neuf, jamais occupé ;
- l'acquisition et l'aménagement ou l'aménagement seul d'un local non destiné à l'habitation en logement (le prêt ne peut pas être accordé pour des travaux d'agrandissement seuls) ;
- l'acquisition d'un logement ancien, ayant déjà été occupé, avec ou sans travaux. Les travaux d'amélioration pris en compte sont ceux ayant pour objet la mise aux normes de surface et d'habitabilité du logement ou prévus lors de l'acquisition (les logements anciens doivent, le cas échéant, après travaux répondre à des normes de surface et d'habitabilité) ;
- l'acquisition d'un logement faisant l'objet d'un contrat de location accession.
Les dépendances des logements sont, aussi, finançables dans la mesure où elles font partie d'une opération immobilière, elle-même, financée par le nouveau prêt à 0 %.
Tant que le prêt à 0 % n'est pas intégralement remboursé, les logements acquis ne pourront être transformés en locaux commerciaux ou professionnels, affectés à la location saisonnière ou en meublé, utilisés en résidence secondaire ou occupés à titre d'accessoire du contrat de travail. En cas de destruction du logement avant la fin du remboursement du prêt, son maintien est subordonné à sa reconstruction dans un délai de 4 ans à compter de la date du sinistre.
3- Les conditions de ressources
Il est accessible aux personnes qui disposent de revenus fiscaux de référence inférieurs à un certain plafond. Les plafonds de ressources sont à comparer avec la somme des revenus fiscaux de référence de l'emprunteur et de l'ensemble des personnes, destinées à occuper le logement, non rattachées à son foyer fiscal, au titre de l'avant dernière année précédant l'offre de prêt (année N-2), pour les offres de prêt émises entre le 1er janvier et le 31 mars d'une année N, et au titre de l'année précédant l'offre de prêt pour les offres émises entre le 1er avril et le 31 décembre d'une année N. Aucune distinction n'est faite entre couple marié et concubins, le nombre de personnes appelées à habiter le logement étant le seul critère pris en compte.
4- Le montant du nouveau prêt à 0 %
Le montant de ce prêt est limité dans certains cas puisqu'il doit être égal à la moins élevée des sommes résultant de ces deux calculs :
- soit 20 % du coût de l'opération, ou 30 % dans les zones franches urbaines et dans les zones urbaines sensibles, dans la limite d'un prix maximal qui varie en fonction de la composition de la famille, de la localisation du logement et du caractère neuf ou ancien du logement ;
- soit 50 % du montant du ou des autres prêts d'une durée supérieure à 2 ans.
Le coût réel de l'opération peut, quant à lui, dépasser le prix maximal qui sert à déterminer le montant du nouveau prêt à 0 %, mais n'est, en aucun cas, un prix plafond d'acquisition. Dans tous les cas, il ne peut être accordé qu'un seul PTZ par opération.
5- Les plafonds de ressources
Composition de la famille | Zone A* | Zones B et C* |
1 personne | 22 110 € | 18 950 € |
2 personnes | 28 420 € | 25 270 € |
3 personnes | 32 390 € | 29 230 € |
4 personnes | 35 540 € | 32 390 € |
5 personnes et plus | 38 690 € | 35 540 € |
Ces plafonds sont à comparer avec le revenu fiscal de référence de l'emprunteur auquel est ajouté, le cas échéant, celui des autres personnes destinées à occuper le logement au titre de résidence principale et qui ne sont pas rattachées au foyer fiscal de l'emprunteur :
- de l'année N-2 pour les offres de prêt émises du 1er janvier au 31 mars ;
- de l'année N-1 pour les offres de prêt émises entre le 1er avril et le 31 décembre.
* Les zones A, B et C sont les zones du dispositif "Robien", selon l'arrêté du 19 décembre 2003 (N° Lexbase : L9718DLI).
6- Les plafonds pour calculer le montant du nouveau prêt à 0 %
6-1- Les logements neufs
Composition de la famille | Montant maximal du prêt à 0 % en euros | |||
Zone A | Zones B et C | |||
Prix maximum | Montant du prêt | Prix maximum | Montant du prêt | |
1 personne | 80 000 € | 16 000 € | 55 000 € | 11 000 € |
2 personnes | 112 500 € | 22 500 € | 82 500 € | 16 500 € |
3 personnes | 125 000 € | 25 000 € | 95 000 € | 19 000 € |
4 personnes | 137 500 € | 27 500 € | 107 500 € | 21 500 € |
5 personnes | 150 000 € | 30 000 € | 120 000 € | 24 000 € |
6 personnes et plus | 162 500 € | 32 500 € | 132 500 € | 26 500 € |
6-2- Les logements anciens
Composition de la famille | Montant maximal du prêt à 0 % en euros | |||||
Zone A | Zone B | Zone C | ||||
Prix maximum | Montant du prêt | Prix maximum | Montant du prêt | Prix maximum | Montant du prêt | |
1 personne | 72 000 € | 14 400 € | 44 000 € | 8 800 € | 41 250 € | 8 250 € |
2 personnes | 101 250 € | 20 250 € | 66 000 € | 13 200 € | 61 875 € | 12 375 € |
3 personnes | 112 000 € | 22 500 € | 76 000 € | 15 200 € | 71 250 € | 14 250 € |
4 personnes | 123 750 € | 24 750 € | 86 000 € | 17 200 € | 80 625 € | 16 125 € |
5 personnes | 135 000 € | 27 000 € | 96 000 € | 19 200 € | 90 000 € | 18 000 € |
6 personnes et plus | 146 250 € | 29 250 € | 106 000 € | 21 200 € | 99 375 € | 19 875 € |
Les montants en euros sont applicables aux offres de prêt émises à compter du 1er février 2005. Dans les zones franches urbaines et les zones urbaines sensibles, le montant maximal du prêt est majoré de 50 % par rapport au montant indiqué.
II - Mise en oeuvre du nouveau PTZ
1- Conditions d'occupation du logement pour l'octroi du prêt
Un emprunteur peut bénéficier du nouveau prêt à 0 % uniquement pour l'acquisition de sa résidence principale. Celle-ci devra être occupée par l'emprunteur et par les personnes destinées à occuper le logement au moins 8 mois par an, sauf en cas d'obligation de déplacement liée à l'activité professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure. Le logement financé à l'aide du nouveau prêt à 0 % doit être occupé dans un délai d'1 an suivant, soit la déclaration d'achèvement des travaux, soit l'acquisition du logement si celle-ci est postérieure à ladite déclaration. Ce délai est porté à 6 ans lorsque le logement est destiné à être occupé par l'emprunteur à compter de la date de son départ à la retraite uniquement si le logement est loué pendant ce délai dans les conditions définies ci-après.
Tant que le nouveau prêt à 0 % n'est pas totalement remboursé, l'emprunteur ne peut proposer le logement à la location que dans les conditions suivantes :
- la location d'une durée maximale de 6 ans, doit résulter de la survenance de l'un des faits suivants : mobilité professionnelle entraînant un trajet de plus de 70 kilomètres entre le nouveau lieu de travail et le logement financé, décès, divorce, dissolution d'un pacte civil de solidarité, invalidité ou incapacité, chômage d'une durée supérieure à 1 an ;
- le logement doit être loué à un locataire dont les ressources, à la date d'entrée dans les lieux, ne dépassent pas les plafonds du prêt à 0 % ;
- les loyers ne peuvent excéder 5 % du coût de l'opération, dans la limite du prix maximum d'opération, ce dernier étant révisé au moment de la mise en location en fonction des variations de la moyenne sur les 4 derniers trimestres de l'indice INSEE mesurant le coût de la construction ;
- l'évolution du loyer obéit aux révisions de droit commun ;
- la location fait l'objet d'une déclaration à l'établissement de crédit et, le cas échéant, à l'organisme payeur de l'allocation personnalisée au logement.
La vente ou la donation du logement entraîne le remboursement intégral du capital restant dû correspondant au prêt à 0 %, au plus tard, au moment de l'accomplissement des formalités de publicité foncière. Le transfert du capital restant dû est possible lorsque le bénéficiaire du prêt à 0 % acquiert un autre logement, finançable par un PTZ, en vue de l'occuper à titre de résidence principale.
2- Tableau récapitulatif du remboursement du prêt
Les conditions de remboursement du nouveau prêt à 0 % pour les offres émises à compter du 1er février 2005 sont les suivantes :
Revenu imposable du ménage | Durée | Remboursements |
---|---|---|
Moins de 12 641 € | 22 ans | Dont 18 ans de différé total et 4 ans de remboursement |
De 12 641 € à 15 800 € | 21 ans | Dont 18 ans de remboursement partiel de 25 % et 3 ans de remboursement total |
De 15 801 € à 18 950 € | 17 ans | Dont 15 ans de différé partiel de 50 % et 2 ans de remboursement |
De 18 951 € à 25 270 € | 8 ans | Remboursement sans différé |
Au-delà du 25 270 € | 6 ans | Remboursement sans différé |
1ère période : période "différée", 2ème période : période de remboursement des sommes restant dues à l'issue du différé.
3- Les démarches à effectuer pour l'obtention du prêt à 0 %
Le nouveau prêt à 0 % est distribué par tous les établissements de crédit qui ont signé une convention avec l'Etat. Pour l'instruction de sa demande de prêt, l'emprunteur doit fournir à l'établissement de crédit :
- l'avis d'imposition de l'année N-2, pour toutes les personnes destinées à occuper le logement, et quelle que soit la période à laquelle l'offre du nouveau prêt à 0 % est émise ;
- l'avis d'imposition de l'année N-1 quand ils sont disponibles auprès de l'administration fiscale, pour toutes les personnes destinées à occuper le logement. Cela concerne les offres de prêts émises entre le 1er avril et le 31 décembre d'une année N ;
- les justificatifs attestant qu'il n'était pas propriétaire de sa résidence principale au cours des 2 années précédant celle de l'émission de l'offre de prêt ;
- une déclaration sur l'honneur conforme à un modèle type par laquelle il certifie l'exactitude des ressources déclarées et reconnaît les obligations lui incombant au titre du PTZ. L'emprunteur renseigne également les tableaux à joindre à cette déclaration ;
- une attestation relative aux conditions de remboursement de l'avance, le cas échéant, lorsque l'emprunteur demande une réduction de la durée de remboursement du PTZ.
4- La fiscalité du nouveau prêt à 0 %
Le nouveau prêt à 0 % permet l'application de la taxe locale d'équipement et des taxes assimilées de catégorie 4 dont la valeur au 1er janvier 2005 est de 213 euros par m² hors Ile-de-France et 235 euros par m² en Ile-de-France.
L'obtention de ce prêt n'entraîne pas d'avantage fiscal spécifique. La fiscalité du droit commun comprend, notamment, les droits d'enregistrement perçus sur l'achat du terrain, et pour les logements neufs, acquis ou construits, une exonération de 2 ans de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Toutefois, les communes peuvent supprimer cette exonération en ce qui concerne la part de cette taxe qui leur revient. De plus, la taxe de publicité foncière est réduite au taux de 0,6 % pour les acquisitions dans le neuf ou les constructions.
Armelle Ribot
Rédactrice en droit immobilier et copropriété
(1) Source : ministère délégué au Logement et à la Ville.
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Réf. : Instruction du 21 février 2005, BOI n° 5 D-3-05 (N° Lexbase : X9041ACT)
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N3111AI3
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par Armelle Ribot, Rédactrice en droit privé et immobilier
Le 07 Octobre 2010
1.1. Les personnes concernées
Seules peuvent bénéficier de ce régime les personnes physiques et les sociétés non soumises à l'impôt sur les sociétés.
Le bénéfice de la nouvelle déduction au titre de l'amortissement est réservé aux contribuables, dont les revenus provenant de la location du logement sont imposés dans la catégorie des revenus fonciers. Le logement peut être la propriété des deux époux, ou bien d'un seul d'entre eux, ou encore des personnes à la charge du foyer fiscal au sens des articles 196 à 196 B du CGI .
Il convient de souligner que les contribuables non fiscalement domiciliés en France peuvent, aussi, bénéficier de ces mesures, dès lors que les revenus tirés de la location de leur logement sont imposables en France dans la catégorie des revenus fonciers.
Les immeubles peuvent être la propriété d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés autre qu'une société civile de placement immobilier (SCPI). Il peut s'agir, par exemple, d'une société civile immobilière de gestion, d'une société immobilière de copropriété ou de toute autre société de personnes, dans la mesure où les revenus de ces immeubles sont imposés entre les mains des associés dans la catégorie des revenus fonciers. En revanche, les SCPI, régies par les articles L. 214-50 et suivants du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9977DY8), sont exclues du champ d'application, puisqu'une déduction au titre de l'amortissement spécifique applicable aux souscriptions en numéraire de parts de SCPI est prévue à l'article 31 bis du CGI .
Les parts des sociétés doivent être détenues dans le cadre de la gestion du patrimoine privé du contribuable. Elles ne peuvent, donc, figurer à l'actif d'une société ou d'une entreprise individuelle, alors même que les résultats de celles-ci seraient soumis à l'impôt sur le revenu. En revanche, lorsque ces titres sont détenus par une société non soumise à l'impôt sur les sociétés autre qu'une SCPI, dont l'activité revêt, également, un caractère purement civil, les membres de cette société, dont la part dans les bénéfices sociaux relève de la catégorie des revenus fonciers, peuvent bénéficier de la déduction au titre de l'amortissement.
1.2. Les immeubles concernés
Les immeubles doivent être situés en France et être à usage d'habitation.
La déduction au titre de l'amortissement ne s'applique qu'aux propriétés urbaines. En outre, les logements doivent être situés sur le territoire métropolitain ou dans l'un des quatre départements d'outre-mer, à savoir la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion.
Par ailleurs, cette déduction ne s'applique qu'aux locaux à usage d'habitation. Toutefois, la circonstance que le logement donné en location constitue, également, le domicile commercial de l'entreprise du locataire n'est pas de nature à faire échec à l'application de cet avantage fiscal, dès lors que le logement est totalement affecté à usage d'habitation.
En revanche, les locaux à usage mixte ne peuvent, en principe, ouvrir droit au bénéfice de ce régime de faveur. Néanmoins, il est admis que la partie du logement louée à usage d'habitation principale ouvre droit, quand même, à la déduction, à la condition que le local soit affecté à l'habitation pour les trois quarts au moins de sa superficie.
1.3. Les investissements concernés
Pour l'application de la déduction fiscale, doivent être pris en compte la nature des investissements éligibles, ainsi que la date de leur réalisation.
La déduction au titre de l'amortissement s'applique uniquement aux investissements portant sur un logement au sens des articles R. 111-1 (N° Lexbase : L4283DYB) à R. 111-17 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L7131ABQ) ou sur un local transformé, par la suite, en un tel logement. L'immeuble doit, par conséquent, satisfaire aux conditions de volume, de surface, de confort et de sécurité définies par ces dispositions.
Pour le bénéfice de cette déduction, l'investissement doit être réalisé à titre onéreux. Il en est ainsi lorsque le logement neuf est acquis par remise d'un terrain (dation en paiement). Même si les logements acquis à titre gratuit n'ouvrent pas droit à cet avantage fiscal, il est admis que, lorsque le transfert de la propriété d'un logement ou de droits sociaux placés sous le régime de la déduction au titre de l'amortissement résulte du décès de l'un des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité soumis à imposition commune, le conjoint ou le partenaire survivant attributaire du logement ou des titres peut demander la reprise du dispositif à son profit, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, pour la période restant à courir à la date de transmission.
Il convient, maintenant, d'examiner plus précisément les différents types d'acquisitions ouvrant droit à l'avantage fiscal. Il peut, ainsi, s'agir :
- d'acquisition de logements neufs ;
Les logements neufs s'entendent des immeubles à usage d'habitation, dont la construction est achevée et qui n'ont jamais été habités, ni utilisés sous quelque forme que ce soit. Notons que ce logement a pu faire l'objet d'une précédente mutation à titre onéreux ou à titre gratuit.
- d'acquisition de logements en l'état futur d'achèvement ;
La vente en l'état futur d'achèvement est le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l'acquéreur ses droits sur le sol, ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l'acquéreur au fur et à mesure de leur exécution. L'acquéreur est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux. Le vendeur conserve les pouvoirs de maître de l'ouvrage jusqu'à la réception des travaux selon l'article L. 261-3 du CCH (N° Lexbase : L7320ABQ).
- d'acquisition de logements ayant fait l'objet de la part du vendeur de travaux de transformation ou de réhabilitation ;
Il s'agit des logements acquis à titre onéreux et qui ont fait l'objet, de la part du vendeur, de travaux de réhabilitation, dont la nature et l'importance ont abouti à la création d'un logement neuf, de sorte que la vente du logement entre dans le champ de la TVA en application du 7° de l'article 257 du CGI .
- d'acquisition de locaux inachevés ;
Les contribuables qui acquièrent à titre onéreux un immeuble inachevé peuvent bénéficier de la déduction au titre de l'amortissement, dès lors que le local inachevé n'a jamais été utilisé, ni occupé entre la date de son acquisition et celle de son achèvement, et que l'immeuble, une fois achevé, a la nature de logement au sens des articles R. 111-1 à R. 111-17 du CCH.
- de logements que le contribuable fait construire ;
Les logements, qui ont fait l'objet, à compter de la date d'application de la nouvelle déduction, de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 421-40 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L8522ACM), ouvrent droit au bénéfice de cet avantage fiscal.
- d'acquisition de logements ne satisfaisant pas aux caractéristiques de décence en vue de leur réhabilitation ;
La nouvelle déduction s'applique aux logements, qui ne satisfont pas aux caractéristiques de décence prévues au décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 pris en application de l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 modifiée (N° Lexbase : L4298A3L), et qui font l'objet, de la part de l'acquéreur, de travaux de réhabilitation, permettant aux logements d'acquérir des performances techniques voisines de celles des logements neufs. Le logement doit, pour bénéficier de l'avantage fiscal, être acquis à titre onéreux en vue d'être réhabilité.
La déduction au titre de l'amortissement s'applique, en principe, aux investissements réalisés à compter du 3 avril 2003. Il est, toutefois, admis d'appliquer cet avantage fiscal aux options exercées à compter du 1er janvier 2004, qu'elles soient afférentes à des investissements réalisés avant ou après le 3 avril 2003. Cette mesure est, bien entendu, soumise à la condition que le contribuable n'ait pas demandé le bénéfice de la déduction au titre de l'amortissement des logements neufs prévus au g du 1 ° du I de l'article 31 du CGI (dispositif "Besson-neuf ").
2. Modalités de mise en oeuvre du dispositif
2.1. Les conditions d'application
La déduction ne s'applique que si le contribuable en fait la demande.
La déduction au titre de l'amortissement est réservée aux locations non meublées à usage de résidence principale du locataire.
La location doit être effective et continue pendant la période d'engagement, ce qui exclut les logements dont le propriétaire se réserve la jouissance, à quelque usage que ce soit et même pour une très courte durée, pour lui-même ou un membre de son foyer fiscal, directement ou par l'intermédiaire d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés dont il est associé.
L'habitation principale s'entend du logement où résident habituellement et effectivement les membres du foyer fiscal et où se situe le centre de leurs intérêts professionnels et matériels. La condition de location du logement à usage de résidence principale du locataire doit être respectée au moment de la signature du bail mais, également, de façon continue pendant toute la période couverte par l'engagement de location.
Enfin, le locataire s'entend de la ou des personnes qui obtiennent le droit d'utiliser la chose louée en contrepartie du versement d'un loyer. Il s'agit de la personne ou des personnes désignées dans le contrat de location. En outre, l'article 1751 du Code civil (N° Lexbase : L1873ABY) prévoit que le bail est réputé appartenir à l'un et l'autre des époux, lorsque le logement sert effectivement à l'habitation du couple, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire.
Lorsque l'immeuble est la propriété d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés, le titulaire du bail doit être une personne physique autre qu'un des associés ou qu'un membre du foyer fiscal de l'un des associés. Il est, toutefois, admis que la location par la société à l'une de ces personnes n'entraîne la reprise de la déduction au titre de l'amortissement qu'à l'égard du seul associé et pour l'imposition des revenus du seul logement concerné.
Par exception à la règle selon laquelle la location doit être consentie à usage d'habitation principale du locataire, la location du logement consentie à un organisme public ou privé qui le donne en sous-location nue à usage d'habitation principale à une personne autre que le propriétaire du logement, son conjoint ou les membres de son foyer fiscal, ne fait pas obstacle au bénéfice de la déduction, à la condition que cet organisme ne fournisse aucune prestation hôtelière ou para-hôtelière.
En outre, le loyer mensuel par m² ne doit pas être supérieur, pendant toute la période couverte par l'engagement de location, à celui fixé à l'article 2 terdecies A de l'annexe III au CGI . Il diffère selon la zone dans laquelle se situe l'immeuble donné en location.
La surface à prendre en compte pour l'appréciation du plafond de loyer est la même que celle prévue pour l'application de l'article 2 duodecies de l'annexe III au CGI . Elle s'entend de la surface habitable au sens de l'article R. 111-2 du CCH augmentée de la moitié, dans la limite de 8 mètres carrés par logement, de la surface des annexes mentionnées aux articles R. 353-12 (N° Lexbase : L8744ABH) et R. 331-10 du CCH (N° Lexbase : L8540ABW). La surface, ainsi, définie figure dans l'engagement de location pris par le bailleur.
L'option peut être exercée soit par le propriétaire de l'immeuble, soit par le porteur de parts.
Dans la première hypothèse, l'option doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l'année d'acquisition, d'achèvement du logement, des travaux de transformation du logement ou des travaux de réhabilitation. Lorsque l'immeuble est la propriété d'une société, non soumise à l'impôt sur les sociétés, autre qu'une SCPI, la possibilité pour les associés personnes physiques imposables dans la catégorie des revenus fonciers de bénéficier de la déduction au titre de l'amortissement en proportion de leurs droits dans la société, est subordonnée à un engagement de location souscrit par la société et remplissant les mêmes conditions que celles prévues pour les personnes physiques.
Dans la seconde hypothèse, la possibilité pour le porteur de parts de bénéficier, en proportion de ses droits dans la société, de la déduction calculée sur le montant de l'investissement réalisé par cette dernière est subordonnée à l'engagement de l'associé de conserver ses parts jusqu'à l'expiration de la période couverte par l'engagement de location pris par la société.
L'option pour la déduction doit comporter l'engagement du propriétaire de louer le logement nu à usage d'habitation principale à une personne autre qu'elle-même ou un membre de son foyer fiscal ou, si le logement appartient à une société, à une personne autre qu'un associé ou un membre de son foyer fiscal, pendant une durée de 9 ans (CGI, art. 31 du CGI). L'engagement de location comporte une mention prévoyant que le montant du loyer ne peut excéder le plafond fixé par l'article 2 terdecies A de l'annexe III au CGI.
En outre, la location doit prendre effet dans les 12 mois qui suivent la date d'acquisition ou d'achèvement du logement, la date d'achèvement des travaux de transformation ou des travaux de réhabilitation.
Il convient, enfin, de souligner le caractère irrévocable de l'option. En conséquence, le contribuable ne peut, postérieurement à la date limite prévue pour le dépôt de la déclaration des revenus de l'année au titre de laquelle l'option a été exercée, demander à être replacé dans le régime de droit commun des revenus fonciers, quand bien même sa demande serait présentée à l'administration dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du LPF (N° Lexbase : L6486AEX).
2.2. L'amortissement du prix d'acquisition de l'immeuble
La base de la déduction au titre de l'amortissement est constituée par le prix d'acquisition ou de revient global du logement, y compris la fraction qui se rapporte aux dépendances immédiates et nécessaires, telles que les emplacements de stationnement .
Pour les immeubles acquis neufs ou en l'état futur d'achèvement, la déduction est calculée sur le prix d'acquisition majoré des frais afférents à l'acquisition (honoraires de notaire, commissions versées aux intermédiaires, droits de timbre, taxe sur la valeur ajoutée, droits d'enregistrement le cas échéant, et taxe de publicité foncière).
En ce qui concerne les immeubles acquis inachevés, la déduction est calculée sur le prix d'acquisition du local inachevé majoré des frais afférents à cette acquisition et sur le montant des travaux d'achèvement de la construction, y compris les travaux d'aménagement intérieur que le contribuable réalise ou fait réaliser, dès lors qu'ils ont pour objet de rendre habitable un logement neuf et qu'ils peuvent être regardés comme indissociables de l'opération de construction.
Pour les immeubles que le contribuable fait construire, la déduction est calculée sur le prix d'acquisition du terrain nu, le prix payé pour la construction du logement (frais d'architecte, prix d'achat des matériaux, mémoires des entrepreneurs, salaires versés aux ouvriers et charges sociales y afférentes et autres frais généraux engagés pour la construction qui ne constituent pas des charges déductibles des revenus fonciers), et sur le prix payé pour l'installation des équipements initiaux du logement (équipement sanitaire, chauffage...).
La base de la déduction des locaux, que le contribuable acquiert en vue de les transformer en logements, est, constituée du prix d'acquisition du local majoré des frais afférents à l'acquisition (honoraires de notaire, commissions versées aux intermédiaires, droits de timbre et droits de mutation à titre onéreux), ainsi que du montant des travaux de transformation en logement (travaux de reconstruction, d'agrandissement, de réparation et d'amélioration ayant pour effet de rendre habitables des locaux qui ne l'étaient pas auparavant).
Enfin, la déduction des logements ne répondant pas aux critères de décence que le contribuable acquiert en vue de les réhabiliter est calculée sur le prix d'acquisition des locaux majoré des frais afférents à l'acquisition ainsi que sur le montant du prix des travaux de réhabilitation. Le montant des travaux de réhabilitation s'entend des frais d'architecte, du prix d'achat des matériaux , des mémoires des entrepreneurs, des salaires versés aux ouvriers et des charges sociales y afférentes et autres frais généraux engagés pour la réhabilitation, qui ne constituent pas des charges déductibles des revenus fonciers. Le travail personnel du contribuable n'est pas pris en compte. Les prestations d'étude, d'organisation et de suivi des travaux de réhabilitation ainsi que des frais liés à l'établissement des états et attestations prévus à l'article 2 quindecies C de l'annexe III au CGI sont pris en compte.
Pour les immeubles acquis neufs et locaux assimilés aux logements neufs, la période d'amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l'acquisition du logement.
Pour les immeubles acquis en l'état futur d'achèvement, inachevés ou que le contribuable fait construire, la période d'amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l'achèvement du logement. Pour déterminer la date ce dernier, il convient de se référer aux conditions d'application de l'exonération temporaire de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les diverses catégories de constructions nouvelles, reconstructions et additions. Dans les immeubles collectifs, l'état d'avancement des travaux s'apprécie distinctement pour chaque appartement et non globalement à la date d'achèvement des parties communes.
En ce qui concerne les locaux transformés en logements, la période d'amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l'achèvement des travaux de transformation.
Enfin, la période d'amortissement des logements ne répondant pas aux critères de décence réhabilités a pour point de départ le premier jour du mois de l'achèvement des travaux de réhabilitation.
La déduction au titre de l'amortissement est pratiquée pendant 9 ans. Elle est égale à 8 % de la base de la déduction les 5 premières années et à 2,5 % de cette base les 4 années suivantes.
A l'issue de cette période de 9 ans, en cas de poursuite, de reconduction ou de renouvellement du contrat de location avec le même locataire ou en cas de changement de titulaire du bail, le contribuable peut continuer à bénéficier, par période de 3 ans et dans la limite de 6 ans, de cette déduction au taux de 2,5 %, dès lors que la condition de loyer reste remplie. Le total des déductions représente, ainsi, 50 %, 57,5 % ou 65 % de la valeur du logement, selon que le contribuable n'a pas prolongé son engagement, l'a prolongé pour une seule période triennale ou l'a prolongé pour deux périodes triennales.
L'article 2 vicies de l'annexe III au CGI prévoit les modalités de calcul de l'annuité déductible. Lorsque le point de départ de la période d'amortissement a lieu après le 31 janvier de l'année d'imposition, la première et la dernière annuité d'amortissement sont réduites prorata temporis. Il en est de même la sixième année compte tenu de la baisse de 8 % à 2,5 % du taux de la déduction.
Cette réduction s'effectue selon les modalités suivantes : pour la première année, la déduction calculée sur les bases d'amortissement est admise dans la proportion existant entre, d'une part, le nombre de mois décompté à partir de celui de l'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, de l'achèvement des travaux de transformation ou de réhabilitation ou encore de l'achèvement des travaux de reconstruction, d'agrandissement et d'amélioration jusqu'à la fin de l'année et, d'autre part, le nombre douze. Lorsque cette déduction, prorogée ou non, prend fin en cours d'année, elle est admise dans la proportion existant entre, d'une part, le nombre entier de mois compris entre le 1er janvier et le premier jour du mois au cours duquel expire l'annuité d'amortissement et, d'autre part, le nombre douze. Lorsque le taux d'amortissement est réduit de 8 % à 2,5 % en cours d'année, chaque période est décomptée selon les modalités définies ci-dessus.
2.3. Les conséquences sur le régime fiscal du bailleur
Dans le régime de droit commun, le taux de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers prévu au e du 1° du I de l'article 31 du CGI est fixé à 14 %, alors qu'en cas d'option pour le dispositif de la déduction au titre de l'amortissement prévue au h du 1° du I du même article, il est ramené à 6 %. En effet, dès lors que l'option pour la déduction au titre de l'amortissement est exercée, la déduction forfaitaire ne représente plus que les frais de gestion et d'assurance à l'exception de celles afférentes à un contrat, dont l'objet exclusif est de couvrir le risque de loyers impayés et qui sont déductibles pour leur montant réel.
Il convient, ici, de faire attention car la baisse du taux de la déduction forfaitaire n'est pas définitive. Le taux de droit commun est, en effet, à nouveau applicable après l'expiration de la ou des périodes d'application du régime de la déduction au titre de l'amortissement selon que le contribuable a ou non bénéficié de ce régime pour les dépenses de reconstruction ou d'agrandissement. En outre, le logement étant, désormais, un logement ancien, le contribuable qui satisferait aux conditions prévues au e du 1° du I de l'article 31 du CGI peut bénéficier du taux majoré à 40 % de la déduction forfaitaire.
Les logements entrant dans le champ d'application de la déduction sont exclus du bénéfice de la déduction forfaitaire majorée de 40 % et de 60 % prévue aux deuxième et quatrième alinéas du e du 1° du I de l'article 31 du CGI (régime "Besson ancien" et "Lienemann"). L'exclusion du bénéfice du taux de la déduction forfaitaire n'est, pas non plus définitive. En effet, cette déduction forfaitaire majorée est applicable après l'expiration de la ou des périodes d'application du régime de l'amortissement sous réserve que la condition de loyer prévue par les régimes "Besson ancien" et "Lienemann" soit remplie.
Le régime d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global n'est pas modifié pour les contribuables qui constatent un déficit sur un logement pour lequel la déduction au titre de l'amortissement a été exercée. Les déficits qui résultent de dépenses autres que les intérêts d'emprunts sont imputables sur le revenu global dans la limite de 10 700 euros, le surplus étant déductible des revenus fonciers des 10 années suivantes.
Cependant, il convient de rappeler que, pour les contribuables qui constatent un déficit sur un logement pour lequel est pratiquée la déduction au titre de l'amortissement prévue au f du 1° du I de l'article 31 du CGI, la limite d'imputation des déficits fonciers est portée à 15 300 euros.
Les plus-values retirées de la cession d'immeubles ou de parts sociales ayant ouvert droit au régime de la déduction au titre de l'amortissement relèvent du régime de droit commun d'imposition des plus-values immobilières .
3. Les obligations des contribuables et des sociétés
3.1. L'hypothèse d'un logement donné en location par une personne physique
Le contribuable, qui entend bénéficier de la déduction au titre de l'amortissement, est tenu de joindre à la déclaration des revenus de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, une copie du bail et l'option établie sur un imprimé fourni par l'administration (imprimé n° 2044 EB) comportant :
- l'identité et l'adresse du contribuable,
- l'adresse du logement concerné, sa date d'acquisition ou d'achèvement, la date de sa première location et la surface à prendre en compte pour l'appréciation du plafond de loyer ;
- le montant du loyer mensuel, charges non comprises, tel qu'il résulte du bail ;
- l'engagement de louer le logement non meublé à usage d'habitation principale, pendant une durée de 9 ans au moins, à une personne autre qu'un membre du foyer fiscal ; cet engagement prévoit, en outre, que le loyer ne doit pas excéder les plafonds fixés par le décret n° 2003-1219 du 19 décembre 2003 (N° Lexbase : L9721DLM) ;
- les modalités de décompte de la déduction au titre de l'amortissement accompagnées des justificatifs (factures des entrepreneurs, copies des actes authentiques, factures d'honoraires du notaire...).
De plus, chaque année, le contribuable joint à la déclaration de ses revenus un état établi conformément à un modèle fixé par l'administration (imprimé n° 2044 S) et faisant apparaître, pour chaque logement, le détail du calcul du montant de la déduction pratiquée au titre de l'amortissement, ainsi qu'une note indiquant le nom des locataires de l'immeuble.
Outre les documents ci-dessus mentionnés, les contribuables sont tenus de fournir :
- pour les immeubles que le contribuable fait construire, une copie de la déclaration d'ouverture de chantier prévue à l'article R. 421-40 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L8522ACM) et de la déclaration d'achèvement des travaux, accompagnées des pièces attestant de leur réception en mairie ;
- pour les locaux que le contribuable transforme en logement, une copie de la déclaration d'achèvement des travaux accompagnée d'une pièce attestant de sa réception en mairie et d'une note précisant la nature de l'affectation précédente des locaux ;
- pour les logements que le contribuable acquiert en vue de les réhabiliter, les états et attestations ainsi que, lorsque ces états sont requis, les états prévus aux articles L. 1334-5 (N° Lexbase : L8896GTN) et L. 1334-7 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L8898GTQ) fournis par le vendeur lors de la promesse de vente ou annexés à l'acte authentique de vente du logement.
Le bailleur d'un logement donné en location à un organisme qui le sous-loue doit joindre à la déclaration des revenus de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure, outre l'ensemble des documents visés ci-dessus, la copie du bail conclu avec l'organisme locataire, ainsi qu'une copie du contrat de sous-location faisant apparaître le montant de la redevance payée par le sous locataire.
3.2. L'hypothèse d'un immeuble donné en location par une société
Les sociétés ont des obligations déclaratives à l'égard de l'administration et à l'égard des associés.
Vis-à-vis des premières, elles doivent produire les documents suivants :
- engagement de la société de louer les logements nus pendant une durée de 9 ans ;
- un exemplaire de l'attestation fournie aux associés ;
- le tableau d'amortissement sur lequel elle indique l'identité et l'adresse des associés, ainsi que la part des revenus des immeubles de la société correspondant aux droits des associés.
Ceux-ci sont joints à sa déclaration du résultat de l'année d'achèvement du logement ou de son acquisition si elle est postérieure ou à sa déclaration du résultat de l'année d'achèvement des travaux (imprimés 2044 S et 2044 EB).
Aux associés, la société doit fournir à chacun d'entre eux, avant le 16 février de chaque année, une attestation en double exemplaire justifiant, pour l'année précédente, de l'existence à son actif de logements éligibles à la déduction au titre de l'amortissement. Pour que chacun des associés puisse déclarer ses revenus fonciers sur l'imprimé n° 2044 spécial, la société doit lui faire connaître la quote-part correspondant à ses droits du revenu brut, des intérêts d'emprunt et des autres charges foncières, parmi lesquelles figure la déduction au titre de l'amortissement.
Par ailleurs, les parts détenues par les associés, qui entendent bénéficier de la déduction au titre de l'amortissement, doivent être inscrites, dans les 30 jours suivant la date limite de dépôt de la déclaration des revenus de l'année au titre de laquelle les parts ont été souscrites ou acquises ou, si elle est postérieure, de l'année de l'acquisition ou de l'achèvement de l'immeuble, sur un compte ouvert au nom de l'associé dans la comptabilité de la société ou sur un registre spécial. Les documents relatifs aux opérations ayant affecté ce compte sont conservés jusqu'à la fin de la 3ème année suivant celle de l'expiration de l'engagement de conservation des titres (CGI, ann . III, art. 2 octodecies).
Les porteurs de parts de sociétés, qui entendent bénéficier du régime de faveur, doivent s'engager à conserver lesdites parts pendant une durée de 9 ans. L'engagement de conservation des titres est constaté lors du dépôt de la déclaration de revenus de l'année au titre de laquelle les parts ont été souscrites ou acquises ou, si elle est postérieure, de l'année de l'acquisition ou de l'achèvement de l'immeuble.
En outre, pendant la durée d'application de la déduction au titre de l'amortissement, les associés doivent joindre à chacune de leurs déclarations des revenus un exemplaire de l'attestation (CGI, ann. III, art. 2 octodecies). Le défaut de production de ce document est sanctionné par l'amende prévue à l'article 1725 du CGI .
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Réf. : Conclusions de l'Avocat général M. Poiares Maduro à propos de l'affaire C-446/03, Marks & Spencer plc. /David Halsey (HM Inspector of Taxes)
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N3516AI3
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par Jean-Marc Priol, Avocat au Barreau de Paris, Landwell & Associés
Le 07 Octobre 2010
A la question posée de savoir si la législation britannique sur le "dégrèvement de groupe", qui subordonne le transfert de pertes au sein d'un groupe de sociétés à la condition que ces sociétés soient résidentes ou exercent une activité économique au Royaume-Uni, s'oppose aux principes fondamentaux du Traité de la Communauté économique européenne (Traité CE), l'Avocat général, M. Poiares Maduro, a conclu positivement à l'existence d'une entrave aux libertés d'établissement et de circulation tout en considérant qu'elle se trouvait justifiée au regard du principe "de la cohérence du système fiscal".
En effet, l'Avocat général, aux termes de ses conclusions (point 84), propose à la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) de dire pour droit, en réponse aux questions posées, que si les articles 43 et 48 du Traité CE "s'opposent à la législation fiscale d'un Etat membre qui interdit à une société mère établie dans cet Etat [...] de bénéficier du droit à un dégrèvement de groupe, au motif que ses filiales sont établies dans d'autres Etats membres, alors que ce dégrèvement serait accordé si lesdites filiales étaient résidentes dans ce même Etat membre", ces dispositions, en revanche, "ne s'opposent pas à une législation nationale qui subordonnerait le droit à un dégrèvement de groupe [...] à la condition qu'il soit établi que les pertes des filiales résidentes dans d'autres Etats membres ne peuvent faire l'objet d'un traitement fiscal équivalent dans ces Etats membres".
La législation fiscale britannique permet à une société mère d'un groupe d'opérer sous certaines conditions, une compensation entre ses bénéfices et les pertes subies par ses filiales.
A cet effet, la société mère doit demander à son administration fiscale un dégrèvement dit de "groupe" portant sur les pertes subies par ses filiales qui ont leur résidence ou exercent leur activité au Royaume-Uni, excluant, ainsi, les filiales étrangères et, plus particulièrement, celles ayant leur siège dans l'espace communautaire ou y exerçant leur activité.
Le "dégrèvement de groupe" consiste, donc, à autoriser une société appartenant à un groupe à céder ses pertes à une autre société du même groupe permettant à cette dernière de déduire, suite à réclamation, lesdites pertes de ses bénéfices imposables, la société cédante perdant tout droit à l'utilisation des pertes cédées, notamment, en les reportant sur les bénéfices d'exercices ultérieurs.
En refusant le "dégrèvement de groupe" aux filiales établies dans d'autres Etats membres, alors que ce dégrèvement serait accordé si lesdites filiales étaient résidentes du Royaume-Uni, Etat membre, ce dernier selon l'Avocat général "impose un désavantage spécifique aux opérateurs qui souhaitent circuler ou s'établir dans la Communauté" faisant ressortir, ainsi, "une discrimination contre les ressortissants communautaires souhaitant faire valoir leurs droits tirés des libertés de circulation".
Ainsi, la législation britannique pourrait être jugée, selon l'Avocat général, comme constituant une restriction des libertés fondamentales "à la sortie", du fait du traitement défavorable qu'elle impose aux sociétés souhaitant créer des filiales dans d'autres Etats membres, qui se trouvent privées dans l'exercice de leur droit d'établissement du bénéfice d'un avantage (pour un exemple de restriction "à l'entrée" portant sur la pratique d'une taxation différenciée suivant l'implantation d'une société étrangère dans un autre Etat membre via une succursale ou une filiale, voir conclusions 14 avril 2005, affaire C-253/03, CLT-UFA).
Il convient, une fois encore, de constater la confirmation de l'impact incontournable des libertés fondamentales, garanties par le Traité instituant la Communauté européenne (Traité CE), dans les conclusions de l'Avocat général à propos de l'affaire "Marks & Spencer".
Toutefois, l'intérêt des conclusions de ce dernier réside dans le fait que la tendance, qui prévalait jusqu'à présent, à reconnaître une absence quasi-automatique de justification aux atteintes portées par les Etats aux libertés fondamentales du Traité pourrait marquer une pause si la CJCE devait confirmer, dans son prochain arrêt, les orientations de son Avocat général.
D'ailleurs, cette pause ne se trouvait-elle pas déjà annoncée dans les celles de l'Avocat général Mme Kokotte, laquelle relevait dans ses conclusions figurant sous l'arrêt "Manninen" (CJCE, 7 septembre 2004, aff. C-319/02, Petri Manninen, point 57 N° Lexbase : A2692DD3) que la conception de l'une des justifications à l'entrave aux libertés fondamentales, à savoir la "la cohérence fiscale", reposait "sur des critères trop rigides qui ne sont pas toujours pertinents compte tenu de l'objectif poursuivi par les réglementations". De même, Monsieur le commissaire du Gouvernement M. G. Goulard n'appelait-il pas de ses voeux, dans ses conclusions figurant sous l'arrêt "Coréal Gestion" (CE contentieux, 30 décembre 2003, n° 249047, Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie c/ SARL Coréal Gestion N° Lexbase : A6490DAM), un assouplissement des conditions d'admission des justifications par la CJCE en notant, singulièrement, que dans "l'affaire Coréal Gestion, dans laquelle le ministre ne cherche pas à avancer la moindre justification, n'est certainement pas la meilleure façon d'obtenir ce résultat" (lire Sophie Marsaudon, Article 212 du CGI : retour sur la chronique d'une mort annoncée, Lexbase hebdo n° 120, 12 Mai 2004 - édition fiscale N° Lexbase : N1592ABL).
Il convient de rappeler, en effet, que la Cour considère que peut être admise une mesure entravant une des libertés consacrées par le Traité CE que si elle poursuit un objectif légitime compatible avec le Traité, si elle est justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général et pour autant que son application soit propre à garantir la réalisation de l'objectif, ainsi, poursuivi et n'aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre celui-ci.
Constituent, en conséquence, selon la jurisprudence de la Cour, des raisons impérieuses d'intérêt général susceptibles de justifier des réglementations de nature à restreindre les libertés fondamentales garanties par le Traité :
- la nécessité de préserver la cohérence d'un régime fiscal (CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-204/90, Hanns-Martin Bachmann c/ Etat belge N° Lexbase : A9890AUT ; CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-300/90, Commission des Communautés européennes c/ Royaume de Belgique N° Lexbase : A9599AU3) ;
- la perte de recettes fiscales (CJCE, 16 juillet 1998, aff. C-264/96, Imperial Chemical Industries plc (ICI) c/ Kenneth Hall Colmer (Her Majesty' s Inspector of Taxes), point 28 N° Lexbase : A0410AW4 ; CJCE, 8 mars 2001, aff. C-397/98 et 410/98, Metallgesellschaft Ltd et autres c/ Commissioners of Inland Revenue et HM Attorney General, point 59 N° Lexbase : A8088AY9 ; CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02, Hughes de Lasteyrie du Saillant c/ Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A5001DBT) ;
- la prévention d'un risque d'évasion fiscale (CJCE, 7 juillet 1992, aff. C-370/90, The Queen c/ Immigration Appeal Tribunal et Surinder Singh, ex parte Secretary of State for Home Department N° Lexbase : A9785AUX ; CJCE, 16 juillet 1998, aff. C-264/96, Imperial Chemical Industries plc (ICI) c/ Kenneth Hall Colmer (Her Majesty' s Inspector of Taxes), point 26 N° Lexbase : A0410AW4 ; CJCE, 18 novembre 1999, aff. C-200/98, X AB et Y AB c/ Riksskatteverket, point 61 N° Lexbase : A0611AWK ; CJCE, 26 septembre 2000, aff. C-478/98, Commission des Communautés européennes c/ Royaume de Belgique, point 45 N° Lexbase : A0249AW7 ; CJCE, 18 novembre 1999, aff. C-200/98, X AB et Y AB c/ Riksskatteverket, point 62, précité ; CJCE, 16 juillet 1998, aff. C-264/96, Imperial Chemical Industries plc (ICI) c/ Kenneth Hall Colmer (Her Majesty' s Inspector of Taxes), point 26 N° Lexbase : A0410AW4 ; CJCE, 8 mars 2001, aff. C-397/98 et 410/98, Metallgesellschaft Ltd et autres c/ Commissioners of Inland Revenue et HM Attorney General, point 57 N° Lexbase : A8088AY9) ;
- l'efficacité des contrôles fiscaux (CJCE, 15 mai 1997, aff. C-250/95, Futura Participations SA et Singer c/ Administration des contributions, point 31 N° Lexbase : A0119AWC ; CJCE, 8 juillet 1999, aff. C-254/97, Société Baxter c/ Premier Ministre, Ministère du Travail et des Affaires sociales, Ministère de l'Economie et des Finances et Ministère de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation, point 18 N° Lexbase : A0511AWT) ;
- le principe de territorialité (CJCE, 15 mai 1997, aff. C-250/95, Futura Participations SA et Singer c/ Administration des contributions, précité ; CJCE, 18 septembre 2003, aff. C-168/01, Bosal Holding BV c/ Staatssecretaris van Financiën N° Lexbase : A5824C9L ; CJCE, 7 septembre 2004, aff. C-319/02, Petri Manninen, précité ; CJCE, 16 juillet 1998, aff. C-264/96, Imperial Chemical Industries plc (ICI) c/ Kenneth Hall Colmer (Her Majesty' s Inspector of Taxes), point 28, précité ; CJCE, 8 mars 2001, aff. C-397/98 et 410/98, Metallgesellschaft Ltd et autres c/ Commissioners of Inland Revenue et HM Attorney General, point 59, précité ; CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02, Hughes de Lasteyrie du Saillant c/ Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, précité).
Toutefois, jusqu'à présent, la jurisprudence de la Cour en a fait une application plus que limitée rejetant pratiquement dans chaque affaire l'admission de ces justifications. Il est à noter que, dans la présente affaire, "Marks & Spencer", l'Avocat général confirme, une nouvelle fois, cette position en rejetant les justifications invoquées par les Etats tirées de "la perte de recettes fiscales" (point 56), ainsi que "du principe de territorialité" (point 62).
Il en était ainsi, plus particulièrement, jusqu'aux conclusions de ce dernier dans la même affaire, de la justification tirée de la cohérence du système fiscal.
En effet, celle-ci, depuis qu'elle a été admise par la Cour en 1992 (CJCE, 28 janvier 1992, aff. C-204/90, Hanns-Martin Bachmann c/ Etat belge N° Lexbase : A9890AUT), est régulièrement invoquée en vain jusqu'à présent par les Etats membres.
La Cour de justice, suivant en cela ses avocats généraux, s'est toujours refusée à admettre cette justification, au motif que l'existence d'un lien direct entre l'avantage fiscal concerné et la compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé est une condition indispensable. Or, ce lien direct ne peut exister que dans le cadre d'une même imposition et dans le chef d'un même contribuable. Par suite, dès que ce lien fait défaut, la justification tirée de la cohérence fiscale est refusée par la Cour (CJCE, 14 novembre 1995, aff. C-484/93, Peter Svensson et Lena Gustavsson c/ Ministre du Logement et de l'Urbanisme, point 18 N° Lexbase : A7474AHB ; CJCE, 27 juin 1996, aff. C-107/94, P. H. Asscher c/ Staatssecretaris van Financiën, point 58 N° Lexbase : A1787AW4 ; CJCE, 16 juillet 1998, aff. C-264/96, Imperial Chemical Industries plc (ICI) c/ Kenneth Hall Colmer (Her Majesty' s Inspector of Taxes), point 29, précité ; CJCE, 28 octobre 1999, aff. C-55/98, Skatteministeriet c/ Bent Vestergaard, point 24 N° Lexbase : A0580AWE ; CJCE, 21 novembre 2002, aff. C-436/00, X et Y c/ Riksskatteverket, point 52 N° Lexbase : A0406A78). Pour une illustration récente, la Cour a jugé dans l'affaire "Fournier" (CJCE, 10 mars 2005, aff. C-39/04, Laboratoires Fournier SA c/ Direction des vérifications nationales et internationales N° Lexbase : A2728DHI) que, dès lors qu'il n'existe aucun lien direct entre l'impôt sur les sociétés et le crédit d'impôt, l'argument tiré de la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal ne saurait prospérer (lire Jean-Marc Priol, Le crédit d'impôt recherche est-il contraire à la liberté de prestation de services ?, Lexbase hebdo n° 149, 5 Janvier 2005 - édition fiscale N° Lexbase : N4142ABZ).
Il est, donc, devenu quasiment impossible pour les Etats membres de justifier leur régime par la nécessité de garantir la cohérence fiscale.
Toutefois, la Cour pourrait être amenée, cette fois-ci, à assouplir ce critère si elle devait suivre les conclusions de son Avocat général rendues le 7 avril 2005, dans l'affaire "Marks & Spencer" ici commentée. En effet, l'Avocat général, notant la marge très réduite des Etats membres, propose (points 68 et 71), suivant en cela la position prise par un autre avocat général dans des conclusions figurant sous l'arrêt "Manninen" précité, un assouplissement des critères posés par la Cour par le biais du retour au critère de la finalité de la réglementation en cause. Dans l'affaire "Marks & Spencer", le retour au critère de la finalité permettrait, selon l'Avocat général, de justifier dans certains cas, l'absence de compensation transfrontalière des pertes dans un groupe de sociétés.
A cet égard, il rappelle que la cohérence fiscale a "pour fonction de protéger l'intégrité des systèmes fiscaux nationaux, pourvu qu'elle ne fasse pas obstacle à l'intégration de ces systèmes dans le cadre du marché intérieur".
Il observe, ainsi, que c'est un délicat équilibre qui "peut être traduit par une règle de double neutralité : d'une part, les règles fiscales nationales doivent être neutres par rapport à l'exercice des libertés de circulation" étant observé que cette dernière "doit être le plus neutre possible pour les dispositifs fiscaux adoptés par les Etats membres".
L'Avocat général rappelle que "le but du régime britannique de dégrèvement de groupe est de neutraliser fiscalement les effets de la constitution d'un groupe de sociétés", celle-ci ne devant "pas entraîner de désavantage particulier au regard des règles générales d'imposition des sociétés", et "le moyen d'y parvenir réside dans l'autorisation de faire circuler les pertes au sein du groupe". Toutefois, poursuit-il, "cela veut dire, aussi, qu'il ne saurait en résulter un avantage supplémentaire pour le groupe" expliquant, ainsi, "l'interdiction de faire une seconde utilisation des pertes cédées".
Ce régime, selon lui, "établit, donc, une corrélation, au niveau du groupe, entre le transfert de pertes au sein du groupe et l'impossibilité d'utiliser ces mêmes pertes à des fins fiscales". En effet, "des pertes sont transférées d'une société au profit d'une autre, en échange de quoi la société cédante perd le droit d'utiliser à nouveau ces pertes dans le cadre du système d'imposition sur les sociétés ; l'avantage accordé à la réclamante est supposé être neutralisé par le prélèvement qui devra être perçu sur la cédante".
Il s'ensuit que la prise en compte des pertes des filiales étrangères "susceptibles d'être transférées ou reportées dans l'Etat d'établissement" conduirait "à une double prise en compte des pertes au profit du groupe" constituant un avantage "contraire à la neutralité recherchée par ce régime fiscal".
C'est la raison pour laquelle l'Avocat général conclut qu'il convient qu'un Etat membre concerné par une telle situation "tienne compte du traitement applicable aux pertes des filiales dans les Etats de résidence de ces dernières" et que, dès lors, "une justification tirée de la cohérence du régime de dégrèvement ne saurait être admise que si les pertes étrangères peuvent faire l'objet d'un traitement équivalent dans l'Etat de source de ces pertes".
Le bénéfice du dégrèvement se trouve, donc, subordonné à la condition que les pertes des filiales étrangères ne puissent faire l'objet d'un traitement fiscal avantageux dans leur Etat de résidence.
L'Avocat général fait, ici, application en matière fiscale d'une solution fondée sur la comparaison et l'équivalence des traitements offerts dans les différents Etats membres développée dans d'autres matières, notamment, en matière de prestations de santé dans le cadre des régimes nationaux de sécurité sociale (CJCE, 23 octobre 2003, aff. C-56/01, Patricia Inizan c/ Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine N° Lexbase : A9763C9H ; CJCE, 12 juillet 2001, aff. C-157/99, B.S.M. Smits, épouse Geraets, c/ Stichting Ziekenfonds VGZ et H.T.M. Peerbooms contre Stichting CZ Groep Zorgverzekeringen N° Lexbase : A8090AYB).
En conclusion, si un assouplissement peut intervenir en ce qui concerne la justification de "la cohérence du système fiscal" traduisant un revirement de tendance non négligeable pour l'avenir, il convient, toutefois, de considérer que pour la majorité des autres justifications avancées par les Etats membres devant la Cour, ces dernières ne devront toujours pas pouvoir normalement prospérer.
Reste, sur le sujet du traitement des pertes transfrontalières au sein des groupes de sociétés, à réactiver la proposition de directive présentée le 3décembre 1990 par la Commission relative au régime de prise en compte par les entreprises des Etats membres des pertes subies par leurs établissements stables et leurs filiales dans l'espace de la Communauté (Cov. 90/595).
Voir, également, sur le traitement des pertes étrangères d'entreprises communautaires :
- CJCE, 15 mai 1997, aff. C-250/95, Futura Participations SA et Singer c/ Administration des contributions (N° Lexbase : A0119AWC) ;
- CJCE, 16 juillet 1998, aff. C-264/96, Imperial Chemical Industries plc (ICI) c/ Kenneth Hall Colmer (Her Majesty' s Inspector of Taxes) (N° Lexbase : A0410AW4) ;
- CJCE, 18 novembre 1999, aff. C-200/98, X AB et Y AB c/ Riksskatteverket (N° Lexbase : A0611AWK) ;
- CJCE, 14 décembre 2000, aff. C-141/99, Algemene Maatschappij voor Investering en Dienstverlening NV (AMID) c/ Belgische Staat (N° Lexbase : A0248AW4).
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Réf. : Cass. soc., 13 avril 2005, n° 03-44.996, CGEA d'Orléans c/ M. Fabien Rio, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A7990DHE)
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par Stéphanie Martin-Cuenot, Ater à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV
Le 07 Octobre 2010
Décision
Cass. soc., 13 avril 2005, n° 03-44.996, CGEA d'Orléans, Centre de gestion et d'étude de l'AGS, Délégation régionale AGS Centre Ouest, unité déconcentrée de l'Unedic, association déclarée, agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS c/ M. Fabien Rio, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A7990DHE) Cassation partielle (CA Versailles, 17ème Chambre sociale, 24 avril 2003) Mots-clefs : contrat de travail temporaire ; requalification ; non-cumul des indemnités. Textes visés : C. trav., art. L. 124-7 (N° Lexbase : L9648GQE) ; C. trav., art. L. 122-8 (N° Lexbase : L5558ACT) ; C. trav., art. L. 122-9 (N° Lexbase : L5559ACU) ; C. trav., art. L. 122-14-4 (N° Lexbase : L8990G74) ; C. trav., art. L. 124-7-1 (N° Lexbase : L5634ACN) Lien base : |
Faits
Un salarié a été mis à disposition d'une entreprise utilisatrice par quatre contrats de travail temporaires successifs, conclus au motif d'un accroissement temporaire d'activité. Cette société a été mise en liquidation. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de ces missions en contrats de travail à durée indéterminée. La cour d'appel a requalifié la relation de travail et a condamné à l'AGS, qui venait aux droits de la société mise en liquidation, à verser au salarié des indemnités de rupture et une indemnité de requalification pour chaque contrat de mission requalifié. |
Problème juridique
Quelle est la conséquence de la requalification du premier contrat de mission conclu par un travailleur temporaire sur les contrats de missions conclus postérieurement ? La requalification de plusieurs contrats de missions en un contrat de travail à durée indéterminée ouvre-t-elle droit, au profit du salarié, à une indemnité de requalification et des indemnités de rupture au titre de chaque contrat de mission requalifié, ou ce dernier ne peut-il prétendre qu'à une seule indemnisation ? |
Solution
1. Cassation partielle 2. "Attendu que la cour d'appel, qui a exactement requalifié le premier contrat en contrat à durée indéterminée, en relevant que le motif d'accroissement temporaire d'activité n'était pas établi, a pu décider que les contrats successifs ultérieurs relevaient de la même relation de travail à durée indéterminée, peu important le motif erroné, mais surabondant, relatif à l'inobservation du délai de carence". 3. "En statuant ainsi, alors, d'une part, que lorsqu'il requalifie en contrat à durée indéterminée une succession de missions d'intérim, le juge doit accorder au salarié une seule indemnité de requalification dont le montant ne peut être inférieur à un mois de salaire ; et alors, d'autre part, que la requalification de plusieurs contrats de travail temporaire en une relation contractuelle à durée indéterminée n'entraîne le versement d'indemnités qu'au titre de la rupture du contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les textes susvisé". |
Commentaire
1. L'incidence de la requalification du premier contrat de mission sur les contrats postérieurs
La sanction -désormais traditionnelle- de l'inobservation par l'employeur des prescriptions légales relatives aux contrats d'intérim est la requalification du contrat de travail temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée. La requalification n'est, toutefois, encourue et prononcée que dans les hypothèses limitativement énumérées par le législateur (C. trav., art. L. 124-7 alinéa 2 et 3 N° Lexbase : L9648GQE ; Cass. soc., 23 février 2005, n° 02-40.913, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A8587DG7). Il en va ainsi lorsque l'employeur continue à faire travailler le salarié après la fin de sa mission temporaire sans lui avoir fait conclure un nouveau contrat de mission (C. trav., art. L. 124-7 alinéa 2), ou en cas de violation caractérisée par l'utilisateur des dispositions des articles L. 124-2 (N° Lexbase : A8587DG7) à L. 124-2-4 (N° Lexbase : L5604ACK) du Code du travail (C. trav., art. L. 124-7 alinéa 3). Mais, qu'en est-il lorsque le travailleur intérimaire a conclu avec la même société plusieurs contrats de mission ? Faut-il que les juges constatent, pour chaque contrat, la violation d'une prescription légale, ou un seul contrat conclu en dehors des prescriptions légales suffit-il à entraîner la requalification de la relation de travail en une relation à durée indéterminée ? Quelle est, alors, l'incidence de la requalification du premier contrat de mission sur la qualification de la relation de travail ? Dans le silence du législateur, deux possibilités s'offraient aux juges. Il était, en premier lieu, possible de considérer que la requalification du premier contrat emporterait l'inscription des parties dans une relation à durée indéterminée. Il était, en second lieu, possible de prendre en considération l'indépendance de la requalification et de lui faire produire un effet limité au seul contrat pris en violation des textes légaux. Dans cette dernière hypothèse, la requalification d'un contrat de travail ne vaut que pour celui-ci et les autres contrats de mission conclus avec la même entreprise restent des contrats de travail temporaires qui peuvent, également, tomber sous le coup d'une requalification, dès lors qu'ils ont été pris en contravention d'une prescription légale, elle-même sanctionnée par la requalification. Le cas échéant, ils ne peuvent être requalifiés.
C'est la première solution qui a été retenue par la Haute juridiction. Tout en confirmant que la requalification n'est pas une sanction prévue lorsque l'employeur ne respecte pas le délai de carence entre les contrats de missions successivement conclus, ce qui interdit la requalification sur ce fondement (récemment, voir Cass. soc., 23 février 2005, n° 02-44.098, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A8599DGL et notre commentaire, Admission limitative de la requalification : deux illustrations en matière de contrat de travail temporaire, Lexbase Hebdo n° 158 du 9 mars 2005 - édition sociale N° Lexbase : N4892ABS), elle vient inscrire l'intégralité de la relation de travail dans une relation à durée indéterminée. Pour justifier la portée donnée à la requalification, elle affirme que la requalification du premier contrat a eu pour effet d'inscrire les parties dans une relation à durée indéterminée qui a emporté l'absorption de tous les contrats de missions postérieurs. Si l'on généralise cette solution, la requalification d'un contrat de mission emportera, désormais, la requalification de tous les contrats conclus postérieurement au contrat requalifié, sans qu'il soit nécessaire qu'il y ait eu réitération de la violation par l'employeur d'une disposition légale. Le salarié peut, ainsi, désormais, se prévaloir d'une relation à durée indéterminée ayant pour terme le dernier contrat de mission, dans la mesure où un contrat antérieur a été requalifié. Cette solution est totalement logique.
La requalification a pour effet d'inscrire les parties dans une relation de droit commun (C. trav., art. L. 124-7 alinéa 2 et 3) ; relation qui aurait dû être adoptée dès l'origine puisque, par nature, l'employeur ne pouvait recourir, dans cette hypothèse, à un contrat de travail temporaire. La requalification a, en effet, pour effet de transformer la nature du contrat, au regard de la clause de durée, sans affecter autrement le reste de ses stipulations (sauf dans le cas d'un contrat dérogatoire assorti d'une mise à disposition du personnel où l'utilisateur sera désormais considéré comme l'employeur). Le caractère indéterminé de la relation de travail emporte donc l'absorption des contrats postérieurs. Quel serait l'intérêt de la requalification si elle devait voir sa portée limitée au terme du contrat requalifié pour laisser place, ensuite, à un ou plusieurs contrats de travail précaires ? Cette sanction unique emporte toutefois des conséquences pécuniaires défavorables pour le salarié, puisqu'elle exclut la possibilité de cumuler les indemnités consécutives à la requalification. 2. L'incidence de l'unité de la requalification sur l'indemnisation du salarié
Le salarié dont le contrat est requalifié a droit, outre les indemnités de rupture de tout contrat de travail à durée indéterminée, à une indemnité dite "de requalification" (C. trav., art. L. 124-7-1 N° Lexbase : L5634ACN). Celle-ci ne peut être inférieure à un mois de salaire et se cumule avec les indemnités de rupture accordées au salarié au titre du contrat requalifié (C. trav., art. L. 124-7-1 in fine). Cette indemnisation étant attachée à l'admission de la demande de requalification prononcée par le salarié, l'admission de plusieurs demandes de requalification devrait pouvoir aboutir à un cumul d'indemnisations. Cette solution est vraie lorsque le travailleur temporaire entend faire sanctionner plusieurs utilisateurs. Le cumul trouve, en revanche, une limite lorsque les demandes portent sur des contrats conclus avec un même utilisateur, comme le confirme la Haute juridiction dans la décision commentée.
En donnant à la requalification une portée générale allant jusqu'au terme des relations contractuelles entre le salarié et l'utilisateur, elle vient limiter les droits à indemnisation du salarié. Désormais, le travailleur temporaire ne pourra plus prétendre qu'à une seule indemnité de requalification et à l'indemnisation de la rupture du seul contrat requalifié et ce, même si l'employeur a, pour chaque contrat de mission auquel il a eu recours, violé les prescriptions légales.
Cette solution n'est pas nouvelle. La Haute juridiction est récemment venue en poser le principe dans une espèce où le salarié avait conclu 58 contrats de travail successifs qui avaient été requalifiés (Cass. soc., 30 mars 2005, n° 02-45.410, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4303DHT). Pour sanctionner les juges du second degré qui avaient accordé au salarié autant d'indemnités de requalification et de licenciement qu'il y avait eu de contrats requalifiés, elle était venue affirmer que "lorsque le juge requalifie une succession de contrats de travail temporaire conclus avec le même salarié en contrat de travail à durée indéterminée, il ne doit accorder qu'une indemnité de requalification dont le montant ne peut être inférieur à un mois de salaire". La situation était identique dans la décision commentée puisque la cour d'appel avait accordé au salarié des indemnités pour chaque requalification prononcée.
Cette solution est juste, bien que le salarié y perde, d'un point de vue pécuniaire. La solution retenue la Cour de cassation doit être approuvée singulièrement lorsque les contrats, postérieurs au contrat requalifié et inclus dans la requalification, ont été conclus de manière licite et conforme aux prescriptions légales puisque, dans cette hypothèse, le salarié se voit verser ce qui lui est dû. Elle devient, en revanche, contestable d'un point de vue pécuniaire lorsque l'employeur a, à plusieurs reprises, conclu des contrats de mission en violation des dispositions légales. Dans cette situation, en effet, dans la mesure où le législateur n'interdit pas le cumul, le salarié devrait pouvoir prétendre au versement de plusieurs indemnités de requalification correspondant à chaque contrat requalifié ainsi qu'aux indemnités de ruptures correspondantes. Une interprétation littérale des dispositions légales semble permettre au salarié d'obtenir la condamnation de l'employeur pour chaque contrat de mission conclu en violation des prescriptions légales. Le législateur attache l'indemnisation à l'admission par les juges de la demande de requalification. Or, le salarié peut, comme dans l'espèce commentée, avoir formé plusieurs demandes distinctes qui lui ouvriraient chacune droit, si elles étaient accueillies, à une indemnité. Ceci entraîne donc théoriquement le droit pour le salarié d'obtenir le versement d'une indemnité de requalification et des indemnités de rupture par contrat requalifié. Eu égard à l'objet de la requalification, en revanche, la solution retenue dans l'espèce commentée s'imposait. La requalification fait disparaître, virtuellement, la précarité de la situation du salarié pour l'inscrire dans la durée... ce qui ne peut se faire qu'une seule fois avec un même employeur. La limite portée à l'indemnisation à laquelle peut prétendre le salarié est toutefois relative eu égard au caractère minimal de l'indemnité de précarité et des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Que l'on opte pour le versement d'une indemnité unique de requalification ou que l'on décide d'accorder au salarié plusieurs indemnités correspondant à chaque contrat requalifié, la solution pratique peut être identique. Le fait que législateur soit venu poser au profit du salarié des indemnités minimales permet aux juges d'accorder au salarié plus que le minimum pour tenir compte des circonstances de l'espèce et, notamment, de la violation par l'employeur d'un ou plusieurs contrats de mission. |
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