Réf. : Cass. civ. 1, 25 février 2016, n° 14-25.729, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1654QDM)
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N1617BWS
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Le 10 Mars 2016
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Réf. : CE 6 s-s., 26 février 2016, n° 386483, inédit (N° Lexbase : A4480QDB)
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N1626BW7
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Le 10 Mars 2016
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 15 février 2016, n° 375667, mentionné dans les tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1012PL3)
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par Christian Louit, Professeur agrégé des facultés de droit, Avocat
Le 10 Mars 2016
Il convient tout d'abord de rappeler que le Code pénal sanctionne la divulgation d'une information à caractère secret par une personne qui en est le dépositaire par état ou par profession.
La peine est d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende (C. pén., art. 226-13 N° Lexbase : L5524AIG). L'article 226-14 du même code (N° Lexbase : L2280KQI) précise que l'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation d'un secret.
Les associations agréées, auxquelles peuvent adhérer les professions libérales, ont vu cependant encadrer l'obligation de secret professionnel qui pèse, entre autres sur les avocats. C'est ce que rappelle le Conseil d'Etat au cas d'espèce : en vertu de l'article 1649 quater G du Code général des impôts (N° Lexbase : L1829HMP), les documents comptables tenus par les adhérents des associations agréées de professions libérales (et donc d'avocats) comportent "quelle que soit la profession exercée par l'adhérent, l'identité du client, ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires".
Rappelons pour l'histoire que le Conseil d'Etat, par un arrêt d'Assemblée du 12 mars 1982 (CE ass., 12 mars 1982, n° 11099, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9316AKA), avait sanctionné ce dispositif au nom du secret professionnel (v. RJF 1982, 227, concl. Verny ; Dr. fisc., 1982, comm., 1225).
L'article 1649 quater G avait voulu, en son temps, limiter le secret professionnel dont pouvaient notamment se prévaloir les professions médicales, afin de faciliter le contrôle de leurs revenus. Les dispositions de l'article donnent bien sûr accès aux documents visés aux vérificateurs mais aussi à toutes les personnes auxquelles les dispositions légales donnent mission de concourir à la procédure d'imposition, par exemple les membres des commissions départementales des impôts (CE 3° et 8 ° s-s-r, 7 juillet 2004, n° 253711 N° Lexbase : A1359DDP, Dr. fisc., 2004, comm., 814, concl. Seners).
Ceci étant, ainsi que le rappelle la Haute assemblée au cas d'espèce, la situation n'est pas meilleure pour les non adhérents d'une association agréée, puisque l'article 99 du CGI (N° Lexbase : L0917I74) précise que le livre journal tenu par les non adhérents comporte "quelle que soit la profession exercée, l'identité déclarée par le client, ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires".
Enfin, l'article L. 13-0 A du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L2551DAQ), rappelé par le juge, dispose que les agents de l'administration des impôts peuvent demander toutes informations relatives au montant, à la date et à la forme des versements afférents aux recettes de toute nature par les personnes dépositaires du secret professionnel en vertu des dispositions de l'article 226-13 du Code pénal. Ils ne peuvent demander de renseignements sur la nature des prestations fournies par ces personnes.
En fait, la seule chose couverte, sans discussion et de façon relativement claire, par l'obligation de secret professionnel des avocats est la nature des prestations fournies. Mais cette clarté n'est que relative.
En effet, le Conseil d'Etat au cas d'espèce, toujours sur le fondement de l'article L. 13-0 A du Livre des procédures fiscales, développe un considérant qui peut paraître quelque peu contradictoire : "que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'administration prenne connaissance, pendant les opérations de contrôle, des factures établies par l'avocat pour des prestations fournies à des clients nommément désignés, dès lors que ces documents ne comportent aucune indication, même sommaire, sur la nature des prestations fournies à ces clients ; qu'elles font en revanche obstacle à ce que le vérificateur procède à des demandes complémentaires relatives à l'identité des clients concernés...".
Ce considérant semble quelque peu obscur quant au secret couvrant l'identité des clients.
Par ailleurs, on remarquera que, si les factures émises par un avocat ne comportent "aucune indication, même sommaire, sur la nature des prestations fournies", il est évident que dans le cadre d'une vérification de droit commun, ces factures courent le risque d'être rejetées, car ne permettant pas d'identifier les prestations fournies. Un avocat scrupuleux pourrait donc établir des factures détaillées, couvertes par le secret professionnel. Une éventuelle irrégularité de la vérification pourrait en naître, si le vérificateur en prenait connaissance. Dans le cas contraire, la vérification serait à l'évidence privée de sa portée.
Dans son ensemble, la question du secret professionnel qui s'impose aux avocats n'est donc pas simple. Elle est complexifiée par différents textes et différentes jurisprudences.
II - La bouteille à encre ?
Alors même que l'arrêt du Conseil d'Etat ici commenté ne lève pas toutes les incertitudes, la jurisprudence et les textes compliquent encore l'analyse.
On peut noter tout d'abord que la jurisprudence récente de certaines cours administratives d'appel divergent parfois de celle du Conseil d'Etat. Il en est ainsi de celle de la cour administrative d'appel de Lyon qui mérite attention sur la lecture de l'article L. 13-0 A du Livre des procédures fiscales.
Ainsi, dans un arrêt du 18 décembre 2014 (CAA Lyon, 5ème ch., 18 décembre 2014, n° 13LY01059, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A7027M97), la cour annule le jugement de première instance et sanctionne l'administration fiscale qui avait pris un soin particulier à connaître, de façon précise, la nature des prestations effectuées en se plaignant que celles-ci étaient rédigées en termes très généraux dans les notes d'honoraires, mais qu'en outre elle avait également pris connaissance de l'identité des clients par la photocopie des notes d'honoraires (V. Nioré, Dalloz avocats, exercer et entreprendre, 2015, p. 83).
Pour la cour, l'article L. 13-0 A du Livre des procédures fiscales et l'article 226-13 du Code pénal "font obstacle à ce qu'un vérificateur ait accès aux documents comptables d'un redevable tenu au secret professionnel comportant à la fois l'identité de ses clients et une indication, même sommaire ou codée, concernant la nature des prestations rendues à ces derniers".
Dans un arrêt du 16 mai 2013 (CAA Lyon, 5ème ch., 16 mai 2013, n° 11LY01009 N° Lexbase : A1684KE4), la cour de Lyon manifeste la même fermeté dans l'interprétation de l'article 13-0 A du Livre des procédures fiscales : "Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a demandé à Mme D. la communication de ses factures afin d'effectuer un rapprochement entre les dates et les montants des recettes y figurant et ceux mentionnés dans les déclarations de l'intéressé ; qu'il n'est pas contesté que ces factures mentionnent l'identité et l'adresse des clients de Mme D. ainsi que la nature des prestations en cause ; que, nonobstant la présence de ces informations, le vérificateur a confirmé sa demande de communication desdites factures ; qu'en prenant ainsi connaissance de l'identité des clients de Mme D. et de la nature des prestations qui leur ont été rendues, le vérificateur a méconnu les dispositions précitées de l'article 13-0 A du Livre des procédures fiscales alors même, qu'ainsi que le fait valoir le ministre, le vérificateur n'aurait interrogé l'intéressée ni 'sur l'exactitude de l'identité de ses clients ni sur la nature des prestations fournies à ces derniers' ; que, dès lors, le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a, pour ce motif, déchargé Mme D. des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elles a été assujettie au titre des années 2003, 2004 et 2005, ainsi que des pénalités y afférentes".
Le commentaire Lefebvre (RJF, 2013, § 844) est le suivant : " il résulte des articles 66-5 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) et L. 13-0 A du Livre des procédures fiscales que le droit de contrôle de l'administration ne peut porter ni sur l'identité des clients ni sur la nature des prestations rendues par une personne dépositaire du secret professionnel".
Il y aurait donc, sur l'identité des clients, contradiction entre les articles 1649 quater G et 99 du CGI et l'article L. 13-0 A du Livre des procédures fiscales et clairement des réticences de certaines cours administratives d'appel à admettre que l'identité du client ne soit pas protégée lorsque s'applique la règle du secret professionnel.
Le règlement interne national des barreaux (février 2016) (N° Lexbase : L4063IP8) n'a pas lui ces hésitations, même s'il ne fait pas loi : "le secret professionnel de l'avocat est d'ordre public. Il est général, absolu et illimité dans le temps" (RIN, art. 2-1). Il couvre notamment "le nom des clients et l'agenda de l'avocat".
Pour les avocats (Me Gavaudan et Abeille, RDSS, 2011, p.65) "le secret professionnel de l'avocat est aujourd'hui un élément clef du fonctionnement moderne de la justice... il n'est établi ni dans l'intérêt des professionnels qui reçoivent des confidences, ni dans celui de ceux, clients ou autres, qui ont livré leurs confidences, mais pour l'intérêt général".
Et la Cour européenne des droits de l'Homme de son côté porte une attention particulière au risque d'atteinte au secret professionnel des avocats (CESDH, art. 8 N° Lexbase : L4798AQR), qui garantit le droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances (voir CEDH, 1er décembre 2015, Req. 69436/10 N° Lexbase : A1464NYU).
On ne peut cependant faire abstraction des articles L. 86 (N° Lexbase : L3965ALG) et L. 86 A (N° Lexbase : L7917AEX) du LPF qui précisent que l'identité du client doit être fournie dans le cadre du droit de communication appliqué aux professions non commerciales et interdisent seulement l'information sur la nature des prestations fournies lorsque le contribuable est membre d'une profession non commerciale tenue au secret professionnel.
Nous avons vu que cette protection du secret de la nature des prestations fournies est certainement difficile à faire respecter.
Sans même évoquer les dispositifs mis en place par l'Union européenne pour lutter contre le blanchiment de capitaux, traduits par la loi nationale, et qui ont fait l'objet de nombreux recours, le secret professionnel qui s'impose aux avocats français nous paraît singulièrement et fâcheusement rétréci (1).
(1) Fort heureusement, le Conseil constitutionnel s'est opposé (Cons. const., décision n° 2013-685 DC du 29 décembre 2013 N° Lexbase : A9152KSR et Cons. const., décision n° 2014-707 DC, du 29 décembre 2014 N° Lexbase : A8031M8X) à des textes attentatoires du secret professionnel.
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Réf. : Cass. civ. 1, 11 février 2016, quatre arrêts, n° 14-28.383, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A7326PKK) ; n° 14-27.143, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A7325PKI) ; n° 14-29.539, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A7327PKL) ; n° 14-22.938, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A7324PKH)
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N1673BWU
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par Hervé Causse, Professeur d'Université, Directeur du Master Droit des Affaires et de la Banque de l'Université d'Auvergne, Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit bancaire"
Le 11 Mars 2016
3. Solution. Les décisions intervenues règlent la question de cette prescription qui est d'une importance majeure pour les établissements comme pour les emprunteurs. La solution de principe est rendue au visa des trois articles précités. La Haute juridiction juge que, à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéances successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité (5). On peut classiquement scinder cet attendu selon lequel "la prescription se divise comme la dette elle-même", ce qui implique que la division de la dette (I) commande la division de la prescription (II).
I - La division de la dette
4. Singulier pluriel. L'article L. 137-2 du Code de la consommation invite à considérer les faits, à savoir une réalité singulière (la dette) composée d'une pluralité (les termes). A défaut d'indiquer un événement unique pour critère de départ de la prescription, l'article implique la considération des termes successifs de la dette (A) et l'éviction d'un terme unique (B).
A - La considération des termes successifs de la dette
5. Les termes du crédit. L'expression de "dette à termes successifs" que la Cour de cassation utilise convient pour la plupart des crédits immobiliers dont font partie ceux des espèces commentées. Mais les crédits in fine, qui servent à quelques opérations de gestion de patrimoine (...), ou les crédits relais, n'ont en principe qu'un seul terme. La solution jurisprudentielle apportée ne les intéresse guère. Pour leur part, les crédits immobiliers classiques, remboursables sur plusieurs années, montraient parfois ces termes successifs. Ainsi en était-il grâce, notamment, à l'ancien article 2277 du Code civil (N° Lexbase : L2564ABL), relatif à la prescription quinquennale des dettes payables par échéances périodiques, ce qui par définition amenait à considérait les termes (6) ; des exemples avec des prescriptions plus longues ont dû être rares et moins spécifiques à défaut de prescription plus courte et donc contentieuse.
6. Un nouvel article. L'adoption de l'article L. 137-2 du Code de la consommation (loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile N° Lexbase : L9102H3I) a changé les choses. Cet article a été introduit au cours de la discussion parlementaire, en s'inspirant de l'action des "marchands" contre leurs clients soumise à un délai de deux ans (C. civ., art. 2272, anc. N° Lexbase : L2559ABE) . Il a ainsi complété l'article L. 137-1, prévu dans la proposition de loi qui, entre professionnel et consommateur, interdit de modifier conventionnellement les délais de prescription. Mais la disposition a été véritablement réécrite en visant le rapport professionnel/consommateur, excluant la notion de marchands (au revoir le droit commercial...), et en visant "les biens et les services", et non plus les marchandises. Cet article qui fait juger que les crédits sont des services (v. n° 2 et n° 8) invite à relever la révolution en cours.
7. La révolution des services. Caractéristique de l'économie moderne, l'omniprésence des services peut sembler banale. Pourtant, le phénomène interroge le droit français qui doit assumer la révolution des services sans "théorie juridique des services" (8). Souvent laissé aux discussions et choix nationaux par le droit européen, le contrat n'est pas le principal vecteur d'évolution. Les autorités européennes ne s'embarrassent guère des contrats spéciaux : on régit les activités en identifiant des services, soit des ensembles comprenant des professionnels et des prestations imposant abstraitement des obligations détaillées ou clauses légales plus ou moins lourdes.
Le "jeu" de ces services fait déjà hésiter quant à la simple question de leur existence ou domaine d'application. Ainsi, en l'espèce, en visant les services, l'article L. 137-2 a fait se demander si le crédit était un service. Le droit français ne répond pas explicitement à la question. La qualification conduisant au régime d'un contrat spécial ne suffit donc pas ou plus. Ici, la qualification d'opération ou de prêt soumis au Code de la consommation ne dit pas d'évidence que l'on est en présence d'un service. Comme le fait souvent la foisonnante législation européenne, l'article L. 137-2 régit les activités par le concept économique et social de service qui devient... juridique !
A l'instar des services financiers qui englobent les crédits, le droit européen consacre, notamment à travers le Code monétaire et financier, les services de paiement, les services d'investissement (9) et, d'un autre type, des services à distance ou encore de démarchage... Dans sa logique, le droit européen a qualifié les crédits de services financiers. Cela donne un argument de texte. A la suite des Directives européennes, le Code de la consommation qualifie les crédits de services financiers pour l'application des règles relatives aux services financiers à distance (10). Le Code monétaire et financier classe du reste les opérations de banque aux côtés de divers services (services de paiement, d'investissement, de prestation de conseil en investissement). En effet, la législation sur le démarchage bancaire et financier vise nombre d'opérations de banque au même titre que les services (C. mon. fin., art. L. 341-1 N° Lexbase : L3755I3H et s.). Ces dispositions démontrent que les crédits sont des services financiers, des services. Les travaux législatifs ont pu s'inspirer des concepts et conceptions du droit européen. L'application de l'article L. 137-2 aux crédits immobiliers d'espèce était inévitable à raison d'un libellé qui a des racines profondes, ce que la Haute juridiction a l'occasion de réaffirmer dans l'un des quatre arrêts commentés (11).
8. Retour aux espèces. La solution considérant les termes successifs de la dette a pu s'inspirer de la logique de l'application d'anciens articles du Code civil, les évoquant, on l'a dit. La chambre saisie avait, du reste, déjà formulé cette solution au moyen de la même phrase (12).
Pourtant, depuis qu'elle avait décidé d'appliquer l'article L. 137-2, en 2012, la Cour de cassation n'avait pas considéré le caractère de dette payable par termes successifs. Elle avait fait prévaloir l'article 2224 (sans viser l'article 2233 traitant des dettes à terme). Ainsi, elle jugeait il y a quelques mois : "le point de départ du délai de prescription biennale prévu [...] se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer l'action concernée, soit, dans le cas d'une action en paiement au titre d'un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé" (13). On avait alors pu relever qu'un alignement semblait s'opérer sur le crédit à la consommation tout en relevant la différence de nature des règles en cause (14). Le caractère de dettes successives ne dominait alors pas la motivation, même si l'un des arrêts cassés avait fait démarrer le délai de prescription biennale de l'article L. 137-2 à la seule "date de déchéance du terme de ces prêts", ce qui méconnaissait les termes échus, autant le premier impayé que les suivants.
Dans ces circonstances, les quatre arrêts commentés sont d'un apport déterminant, ce qui forge leur valeur de principe ; ils peuvent être vus comme un revirement par rapport à la décision précitée de 2014 (15). On plonge au coeur des arrêts rendus qui évincent un point de départ unique du délai de prescription qui postulerait un terme unique.
B - L'éviction d'un terme unique
9. Influence du crédit à la consommation. Les trois arrêts qui prononcent une cassation montrent que les juges du fond ont cherché un seul point de départ de la prescription. On peut penser qu'ils ont été influencés par le jeu du délai de forclusion prévu en matière de crédit à la consommation, mais qui n'existe pas dans le régime du crédit immobilier. Ainsi, dans la troisième espèce précitée (16), l'arrêt d'appel avait jugé que "la défaillance de l'emprunteur [...] est l'événement qui constitue le point de départ nécessaire mais suffisant du délai d'action sans que celle-ci soit subordonnée au prononcé de l'exigibilité anticipée du terme, [...] et que la prescription biennale qui a commencé à courir à compter du premier incident de paiement non régularisé atteint l'intégralité de l'action née du contrat". L'idée que l'intégralité de l'action en justice est atteinte mime la solution de la forclusion consacrée dans le crédit à la consommation, où est instauré un point unique de départ du délai : le premier incident de paiement non régularisé. Mais le tout est expressément prévu par la loi pour établir un délai de forclusion (et non de prescription) (17).
Dans les deux autres espèces où une cassation est prononcée, les juges du fond ont encore utilisé l'idée de "premier incident de paiement non régularisé", et encore comme seul point de départ du délai de deux ans (18). Mais, toujours pour annuler un commandement de payer, il servit aussi à évincer un autre mécanisme : "le prononcé de la déchéance du terme, laissé à la seule appréciation du créancier, ne peut constituer le point de départ du délai de prescription" (19). Contrairement aux termes de cette motivation, que le juge du droit censure, la déchéance du terme relève de l'exercice même du droit de résiliation ou résolution. Principe du droit des obligations, ce droit de prononcer la déchéance du terme ne peut ni être confié à une autre personne que le créancier..., ni être méconnu si la mesure est prononcée, comme le suggérait le juge du fond.
10. Fondamentalement. Dans le crédit à la consommation, la loi a notamment attaché à un événement spécial (premier incident de paiement non-régularisé) la forclusion, sanction spéciale consistant en l'impossibilité d'agir en justice (C. consom., art. L. 311-52 N° Lexbase : L9554IMS). Le choix du législateur défavorise les financiers professionnels (20) ; considérer le premier incident de paiement fait démarrer le délai de prescription dès que possible, c'est une faveur au débiteur. On se l'explique parce que les crédits à la consommation ont toujours vu leur légitimité discutée, notamment parce qu'ils sont un facteur de surendettement.
11. La forclusion puise profond ses fondements (21) et, en pur droit, l'article L. 132-7 établit quant à lui, assez logiquement, une prescription d'une nature différente. Cela interdit une interprétation par analogie de la disposition de forclusion.
De façon surabondante, la forclusion ne peut pas "transformer" l'article L. 132-7 à raison du caractère propre des lois sur le crédit composant le Code de la consommation. Elles n'établissent aucun contrat spécial de crédit qui pourrait tendre vers un régime unique (22). Enfin, et toujours de façon surabondante, l'appartenance des deux articles au même Code de la consommation est indifférente car son unité est très partielle (23).
Ces nuances techniques s'illustrent dans un cas spécial. Les parties se soumettent parfois conventionnellement au régime légal du crédit immobilier ; le prêteur professionnel peut ainsi préserver sa méthode de travail, bien rôdée, même en présence d'un client professionnel. Dans ce cas, il vient d'être jugé que l'article L. 137-2 ne s'applique pas pour la raison que l'on vient d'expliquer, une partie du code n'en vaut pas une autre (24). Les professionnels prendront garde, dans la rédaction de la clause qui soumet leur prêt au régime du crédit immobilier, à ne pas viser le consommateur ou le Code de la consommation dans son entier : la solution pourrait sinon être autre.
12. Il résulte du tout que le point du premier incident de paiement non régularisé est hors de propos, sauf pour calculer la prescription de la première échéance impayée. Quant au jour où le prêteur devait savoir devoir agir, il semble absorbé par le fait même des termes : chaque partie les connaît par la convention ! Se dresse alors la double conséquence d'avoir à considérer, d'une part, les termes successifs, le premier terme impayé comme les suivants et, d'autre part, la fréquente déchéance du terme. Comme le juge la Cour de cassation, il faut considérer la division de la prescription.
II - La division de la prescription
13. Le contexte. Les termes successifs donnent une prescription divisée, ce qui signifie qu'elle s'applique à chacun d'eux. En soi, la solution n'est pas inconnue (25). Les quatre arrêts commentés appellent à clairement les distinguer, non sans dire au préalable le contexte dans lequel le juge examine ces délais.
La prescription joue contre toute action en justice. La première qui vienne à l'esprit est l'action en paiement, comme des décisions viennent de le montrer hors le domaine du crédit (v. n° 1). L'action en paiement n'est finalement qu'une action en exécution forcée que le titre exécutoire permet. Le cas échéant, le délai joue également contre la possibilité de procéder à un acte d'exécution forcée qui, lui aussi, interrompt le délai de prescription ou de forclusion, du reste comme toute mesure conservatoire du Code des procédures civiles d'exécution (C. civ., art. 2244). S'agissant d'un crédit immobilier, comme dans les quatre espèces rapportées, un commandement de payer à fin de saisie immobilière (26) aura été délivré aux emprunteurs (C. proc. civ. exécution, art. R. 321-3 N° Lexbase : L7888IUP) (27), ce qui se retrouve dans les arrêts commentés.
Ainsi, une demande en justice ou un acte d'exécution doit intervenir dans le délai de deux ans. Le délai de prescription court de façon variable, selon les termes successifs ou échéances (A) ou l'éventuelle déchéance du terme (B).
A - La prescription à partir des échéances
14. Le jeu de la solution. Dans la dernière espèce des quatre précitées, la Cour de cassation rejette le pourvoi principal formé par l'emprunteur contre l'arrêt d'appel qui avait appliqué la solution de principe (28). La Haute juridiction illustre la solution en citant les dates utiles à l'exercice de son contrôle de pur droit.
L'arrêt d'appel n'est pas cassé parce qu'il a retenu que "les emprunteurs avaient cessé de rembourser les mensualités à compter du 7 juillet 2009 et que la banque avait prononcé la déchéance du terme le 24 février 2010" ; l'arrêt d'appel a donc "exactement retenu que l'action engagée le 7 février 2012 n'était pas prescrite en ce qu'elle tendait au paiement des échéances dues à compter du 7 février 2010 et du capital devenu exigible". Le banquier était donc prescrit pour les échéances survenues avant la déchéance et depuis plus de deux ans, soit celles entre le 7 juillet 2009 et deux ans avant l'action du 7 février 2012, soit le 7 février 2010 ; le banquier a ainsi vu sept mois d'échéances prescrites (si les termes étaient mensuels et de début de mois comme il est d'usage).
La situation explique que le consommateur ait formé un pourvoi (principal), espérant une prescription plus large (considérant le premier incident de paiement non régularisé !) (29). On comprend aussi que le banquier ait formé un pourvoi incident, espérant, pour sa part, récupérer sept échéances jugées prescrites.
15. Suites. Il faut aussi rappeler que la prescription cesse encore de courir si une médiation est demandée ou, a fortiori, si l'emprunteur demande un délai de grâce au juge (C. consom., art. L. 313-12 N° Lexbase : L1529HIH ; v. infra n° 16 ; s'il fait des règlements, il veillera à payer des sommes qui ne sont pas prescrites). Les quatre décisions rendues soulignent le régime propre de chaque échéance, chacune ayant son délai de prescription. Les seuls termes successifs peuvent faire l'objet d'une assignation, d'un acte d'exécution ou d'une mesure conservatoire. Si au terme d'une vingtaine de mois (d'échéances impayées) le professionnel espère encore que le client redresse sa situation, ce peut être un moyen de préserver les droits du prêteur professionnel tout en évitant une procédure de saisie immobilière. Les seules échéances échues peuvent faire l'objet d'un commandement à fin de saisie immobilière, mais à commencer cette lourde procédure, autant la conduire pour l'entière dette et donc après avoir prononcé la déchéance du terme.
B - La prescription à partir de la déchéance du terme
16. Logique. La déchéance du terme s'inscrit dans la logique d'une exécution forcée, notamment d'une saisie du bien immobilier. Si la déchéance du terme n'est pas une fatalité, il faut noter que le banquier ne peut pas, en tout cas moins aujourd'hui qu'hier, se permettre d'accumuler dans son bilan des créances devenant de plus en plus virtuelles au fil des échéances impayées. Les créances des établissements de crédit ou des sociétés de financement sont analysées de plus en plus précisément dans un but de gestion prudentielle et de stabilité financière. Aux antipodes de la politique d'indulgence à l'égard du consommateur, on peut même penser, notamment dans le cadre de l'Union bancaire européenne, qu'assigner promptement et sans faiblesse est une vertu : une mesure de gestion prudentielle. Ainsi, s'il peut y avoir des exceptions, à raison de la qualité d'un client, l'établissement peut devoir sortir de cette situation d'impayés en passant à l'exécution forcée pour faire vendre l'immeuble et que sa créance redevienne du liquide (de la monnaie).
17. Pratique. La déchéance du terme est donc souvent le moyen le plus sûr de recouvrer la créance. Le banquier résilie la convention de prêt, droit que lui réserve la clause de résolution de plein droit : il prononce la déchéance du terme. En somme, il y met un terme, l'expression étant de circonstance. Elle prend la forme d'une lettre, dont la forme est précisée par la convention de prêt, généralement une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et ce après une mise en demeure (30) qui prévient (en général explicitement) du risque de déchéance du terme. Cette mesure est souvent une nécessité parce que la créance est importante : seule la vente forcée de l'immeuble permettra au professionnel de rentrer en possession de l'essentiel du capital prêté.
18. Sanction. La déchéance du terme joue comme une sanction du consommateur : d'un jour à l'autre, il doit rembourser le principal (capital prêté) et les intérêts accumulés, ce que la loi rappelle (C. consom., art. L. 312-22). La résiliation de la convention se fait à son détriment. Transformer l'article L. 132-7 en délai de forclusion poussait à la déchéance et à la saisie ; la nouvelle solution a l'avantage de laisser du temps aux parties pour s'arranger, ce qui est conforme à la volonté du législateur marquée par diverses dispositions protectrices.
L'emprunteur a notamment la possibilité d'obtenir des délais de paiement dans les conditions de l'article L. 313-12 du Code de la consommation, spécialement en cas de licenciement (31). Le créancier peut aussi, au lieu d'exiger le règlement du capital dû, majorer le taux d'intérêt que l'emprunteur payera jusqu'à ce qu'il ait repris le cours normal des échéances contractuelles (C. consom., art. L. 312-22).
Le prononcé de la déchéance du terme suivie d'une saisie sera souvent inévitable. Les pénalités sont alors limitées en cas de défaillance de l'emprunteur à 7 % du capital restant dû et des intérêts échus (C. consom., art. L. 312-22 et R. 312-3 N° Lexbase : L6833ABP). Si le prêteur professionnel était garanti par une caution bancaire, comme dans l'une des espèces, ce sera l'établissement qui le règle qui, subrogé dans les droits de son confrère, devra initier l'exécution forcée dans le délai de deux ans lié à la déchéance du terme. Dans ce cas de défaillance de l'emprunteur, les pénalités sont alors limitées à 7 % du capital restant dû et des intérêts échus (C. consom., art. L. 312-22 et R. 312-3 N° Lexbase : L6833ABP). Cette pénalité doit être considérée comme le capital dû (ensemble des échéances à terme devenues exigibles), le délai de deux ans commençant également à courir contre cette somme qui résulte de la déchéance du terme.
(1) Article applicable aux ventes immobilières et aux prestations des avocats ; voyez la récente décision dans laquelle un professionnel de l'immobilier, pour une vente en l'état futur d'achèvement, a tenté en vain de recouvrer le solde du prix de l'ouvrage (Cass. civ. 1, 17 février 2016, n° 14-29.612, F-P+B+I N° Lexbase : A3360PLZ) ; Cass. civ. 2, 14 janvier 2016, n° 14-26.943, F-D (N° Lexbase : A9487N3R).
(2) Cass. crim., 7 août 1990, n° 87-80.303, publié (N° Lexbase : A1019ABD), D., 1990, IR, 225 ; Cass. civ. 3, 10 décembre 1986, n° 85-16.144 (N° Lexbase : A6606AAW), Bull. civ. III, n° 181.
(3) Cass. civ. 1, 28 novembre 2012, n° 11-26.508, F-P+B+I (N° Lexbase : A6412IXR) : "les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des organismes de crédit constituent des services financiers fournis par des professionnels".
(4) Une QPC sur le sujet a été posée par un consommateur mais n'a pas été transmise : Cass. QPC, 17 février 2016, n° 15-19.803, F-D (N° Lexbase : A4616PZY).
(5) Sur le sujet en général : J. Klein, Le point de départ de la prescription, préf. N. Molfessis, Economica, 2013.
(6) Cass. civ. 2, 28 mars 1996, n° 94-12.437, inédit (N° Lexbase : A5404C4W), qui distingue parfaitement les termes successifs soumis à l'article 2277 du Code civil, dans sa rédaction d'alors, prescrits au-delà de cinq ans, et le capital restant dû qui n'est pas un terme successif puisque lié à la déchéance du terme.
(7) Sénat, rapport n° 83, Session 2007-2008, p. 55 et 56.
(8) Pour une approche renouvelée de la matière qui considère davantage les services, notre ouvrage, Droit bancaire et financier, préface Daniel Tricot, 2016, Mare et Martin, n° 798.
(9) Les opérations de change liées à des prêts en devise étrangère ne constituent pas un service d'investissement (CJUE, 3 décembre 2015, aff. C-312/14 N° Lexbase : A3339NYC), ce qui les fait échapper à l'application de la Directive "MIF" 2004/39 du 21 avril 2004 (N° Lexbase : L2056DYS).
(10) C. comsom., art. L. 121-26, al. 2 (N° Lexbase : L7789IZI), en visant les "services mentionnés aux livres Ier à III et au titre V du livre V du Code monétaire et financier" : les crédits relèvent du livre III.
(11) Cass. civ. 1, 28 novembre 2012, préc., note 3 : "les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des organismes de crédit constituent des services financiers fournis par des professionnels" ; Cass. civ. 1, 11 février 2016, n° 14-22.938, F-P+B+R+I : elle rejette le pourvoi incident de la banque en rappelant l'application de l'article L. 137-2, conformément à la décision précitée de 2012 (cf. l’Ouvrage "Droit bancaire" N° Lexbase : E9005BXS).
(12) Cass. civ. 1, 28 juin 2012, n° 11-17.744, F-D (N° Lexbase : A1194IQB) jugeant au visa de l'article 2233 du Code civil (N° Lexbase : L7218IAL), "qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, la cour d'appel a violé le texte susvisé". En revanche, l'idée en a été rejetée dans un contexte spécial, de droit maritime, et sur l'invocation de "termes successifs", mais invoqués semble-t-il à l'appui de l'existence de diverses factures, or la facture ne semble pas être la preuve indiscutable de termes successifs lesquels doivent avoir été stipulés par les parties commerciale (Cass. com., 3 décembre 2013, n° 12-22.093, FS-P+B N° Lexbase : A8478KQ3, Bull. civ. IV, n° 178).
(13) Cass. civ. 1, 3 juin 2015, n° 14-16.950, F-P+B (N° Lexbase : A2125NKW) ; Cass. civ. 1, 10 juillet 2014, n° 13-15.511, FS-P+B+I (N° Lexbase : A3176MU8).
(14) JCP éd. E, 7 Janvier 2016, 1010, n° 14, obs. N. Mathey (à propos notamment de Cass. civ. 1, 3 juin 2015, n° 14-16.950, préc. et de Cass. civ. 1, 10 juillet 2014, n° 13-15.511, préc.).
(15) D. Actualités, 17 février 2016, obs. V. Avena-Robardet.
(16) Cass. civ. 1, 11 février 2016, n° 14-29.539, F-P+B+R+I.
(17) C. consom., art. L. 311-37 (N° Lexbase : L6496AB9 devenu C. consom., art. L. 311-52 N° Lexbase : L9554IMS ; la rédaction du nouveau texte est plus précise tout en gardant le cas de premier incident non-régularisé.
(18) Cass. civ. 1, 11 février 2016, n° 14-28.383, F-P+B+R+I : la cour d'appel avait jugé, pour annuler un commandement de payer valant saisie immobilière, "que le point de départ du délai de prescription biennale se situe au jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer l'action concernée, soit, dans le cas d'une action en paiement au titre d'un crédit immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé".
(19) Cass. civ. 1, 11 février 2016, n° 14-27.143, F-P+B+R+I.
(20) Ce sont essentiellement : les établissements de crédits dont les banques, établissements de crédits spécialisés, sociétés de financement, ou même nous semble-t-il tout autre professionnel qui ferait, à titre exceptionnel, un crédit à un consommateur.
(21) Même si, désormais, la version légale du crédit à la consommation, jusque 75 000 euros, permet de faire des dépenses très légitimes valant investissement... soit éminemment utile à l'emprunteur et à la société
(22) Le crédit à la consommation n'établit pas un contrat spécial qui permettrait d'imaginer un contrat de crédit implicitement consacré par le Code de la consommation ; en effet, en pur droit, ce contrat de crédit n'existe pas parce qu'il n'existe pas véritablement de crédit à la consommation ou de crédit immobilier : il existe seulement des régimes de protection (quoique dits "crédit à la consommation" ou "crédit immobilier") qui, pour exister dans la pratique, exigent la mise en oeuvre d'un contrat spécial par ailleurs consacré (par exemple le prêt du Code civil, ou un autre... le crédit-bail) : JCP éd. E, 7 janvier 2016, 1010, n° 13, nos obs..
(23) La codification à droit constant, imposée par la loi de codification, préserve la teneur de chaque loi codifiée -imposant un principe d'interprétation à droit constant peu souligné-. Le Code de la consommation demeure une compilation de lois ou de dispositions de diverses origines, chacune ayant son domaine et sa logique d'application (par exemple, hier, la loi "Scrivener" -loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 (N° Lexbase : L1051IUH)- et, aujourd'hui la loi dite "Lagarde" -loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 (N° Lexbase : L6505IMU)-, toutes deux sur le crédit à la consommation) ; ce qui peut être vu comme un défaut de la codification : Y. Picod, Droit de la consommation, Sirey, p. 11, n° 14.
(24) Cass. civ. 1, 3 février 2016, n° 15-14.689, F-P+B (N° Lexbase : A3076PK7) ; ce cas de cassation pour défaut de base légale étant lumineux ; sinon, sur la possibilité et les conditions posées par la jurisprudence pour se soumettre à l'un des régimes de protection du crédit à la consommation : JCP éd. E, 7 janvier 2016, 1010, n° 13, préc.
(25) Cass. civ. 1, 28 juin 2012, préc. note 12, rendu au visa de l'article 2233 du Code civil ; parmi les quelques arrêts rendus invitant à diviser la prescription comme la dette l'est, voyez aussi, bien plus ancien : Cass. civ. 2, 17 mai 1993, n° 91-19.477 (N° Lexbase : A7704CUU) ; voyez aussi très clair et en l'absence de déchéance du terme : Cass. civ. 1, 4 novembre 2011, n° 10-17.453, F-D (N° Lexbase : A8797HZT).
(26) Le commandement indique notamment (C. proc. civ. exécution, art. R. 321-3 N° Lexbase : L7888IUP) : "1° La constitution d'avocat du créancier poursuivant, laquelle emporte élection de domicile ; 2° L'indication de la date et de la nature du titre exécutoire en vertu duquel le commandement est délivré ; 3° Le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts moratoires ; 4° L'avertissement que le débiteur doit payer ces sommes dans un délai de huit jours, qu'à défaut de paiement, la procédure à fin de vente de l'immeuble se poursuivra et qu'à cet effet, le débiteur sera assigné à comparaître à une audience du juge de l'exécution pour voir statuer sur les modalités de la procédure ; [...]".
(27) A publier au fichier immobilier, puisqu'il met en cause un droit réel immobilier, ce commandement est un préalable à l'assignation ouvrant la procédure de vente judiciaire forcée ou amiable. Il est donc souvent contesté car son invalidation fera qu'il n'a pas pu interrompre le court de la prescription. En effet, pour cette raison ou celle de sa seule tardiveté, s'il intervient après l'expiration du délai de deux ans, le juge saisi devra constater qu'il n'a pas pu empêcher la prescription de certains termes.
(28) Cass. civ. 1, 11 février 2016, n° 14-22.938, FS-P+B+R+I.
(29) La prescription, à la différence de la forclusion, doit être soulevée par le consommateur au cours du procès, le juge n'a pas à la relever d'office.
(30) Ce qui suppose une mise en demeure sauf la rédaction de la clause de déchéance dans le prêt : Cass. civ. 1, 3 juin 2015, n° 14-15.655, FS-P+B (N° Lexbase : A2186NK8), nos obs., in Panorama (n° 16), Lexbase, éd. aff., 2015, n° 443 (N° Lexbase : N9819BU9) ; JCP éd. E, 7 janvier 2016, 1010, n° 4, obs. J. Stoufflet ; Cass. civ. 1, 3 février 2004, n° 01-02.020, FS-P sur le 1er moyen (N° Lexbase : A2258DBA) ; Bull. civ. I, n° 27 ; JCP éd. G, 2004, II, 10149, note E. Treppoz.
(31) Ce qui suspend la prescription au profit du professionnel : Cass. civ. 1, 1er juillet 2015, n° 14-13.790, FS-P+B (N° Lexbase : A5537NMZ) ; nos obs. in Panorama (n° 17) , préc..
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Réf. : Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (N° Lexbase : L4857KYK)
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par Gaël Piette, Professeur à l'Université de Bordeaux, Directeur scientifique des Encyclopédies "Droit des sûretés" et "Droit des contrats spéciaux"
Le 10 Mars 2016
La réduction du prix n'est pas totalement inconnue du droit français (1). Dans le contrat de vente, l'action estimatoire en garantie des vices cachés, prévue par l'article 1644 du Code civil (N° Lexbase : L9498I7W) permet déjà à l'acheteur déçu de demander une réduction du prix. Les articles 1617 (N° Lexbase : L1717AB9) et 1619 (N° Lexbase : L1719ABB) respectivement relatifs à la contenance d'un bien immobilier et à la vente mobilière à la mesure permettent également des réajustements de prix. L'article L. 211-10 du Code de la consommation (N° Lexbase : L9654G83) autorise l'acheteur à garder le bien dont la réparation ou le remplacement sont impossibles, moyennant la restitution d'une partie du prix. Dans les ventes commerciales, la jurisprudence a, depuis longtemps (2), élaboré une réfaction des contrats, en cas de prestation insuffisante de la part du vendeur (3). Enfin, le recours à la responsabilité contractuelle (anc. art. 1147 N° Lexbase : L1248ABT) rend possible l'obtention d'une réduction indirecte du prix par le biais d'une demande de dommages et intérêts (4).
La nouveauté provient du fait que, s'agissant d'un texte de droit commun, le nouvel article 1223 aura vocation à s'appliquer à la plupart des contrats. Lesquels exactement seront concernés ? Que le créancier puisse réduire le prix qu'il doit limite nécessairement cette disposition aux contrats synallagmatiques : dans un contrat unilatéral, par hypothèse, le créancier n'est pas lui-même débiteur d'un prix. En outre, la référence au prix limite l'article 1223 aux obligations pécuniaires (5). Il n'y a pas lieu, en revanche, de limiter cette disposition au contrat qui prévoit un prix au sens extrêmement strict de ce terme, c'est-à-dire la vente : retenir l'inverse rendrait ce nouveau texte complètement inutile, en raison de l'existence de l'article 1644.
L'article 1223 a par conséquent un domaine d'application fort large : tous les contrats synallagmatiques dans lesquels l'une des parties assume une obligation pécuniaire. Cela recouvre des contrats aussi variés que la vente, le bail, le mandat et le dépôt salariés, le contrat d'entreprise, le contrat de transport, la fiducie, etc..
Ce vaste domaine mérite d'autant plus d'être souligné lorsque l'on constate les insuffisances du texte : son déclenchement est imprécis (I), sa mise en oeuvre est incertaine (II).
I - Un déclenchement imprécis
Selon le texte, "le créancier peut, après mise en demeure, accepter une exécution imparfaite du contrat [...] ". Il est difficile d'imaginer une rédaction plus imprécise. Elle laisse sans réponse trois questions relatives au déclenchement de la réduction du prix : celle de la nature de l'exécution imparfaite, celle de sa gravité, et la question d'un éventuel préjudice du créancier.
En ce qui concerne la nature de l'exécution imparfaite, dans le silence du texte, il convient de considérer qu'elle doit être entendue de manière très large. Il peut s'agir d'une insuffisance quantitative, telle que la livraison par le vendeur d'une quantité de marchandises inférieure à celle stipulée dans le contrat. Mais il peut également s'agir d'une insuffisance qualitative : tel sera par exemple le cas d'une prestation effectuée par l'entrepreneur qui serait d'une qualité inférieure aux standards habituels, aux "règles de l'art". Or, si l'insuffisance quantitative, par nature, paraît pouvoir être objectivement appréciée, il en va autrement de l'insuffisance qualitative. L'appréciation d'un "mauvais travail" par le créancier de la prestation dans un contrat de transport, ou de dépôt salarié, ou encore de mandat rémunéré est inévitablement teintée de subjectivisme. La question de l'imperfection de l'exécution provoquera ainsi des divergences de vue entre le créancier et le débiteur, ce dernier défendant l'exécution de son travail, le premier souhaitant obtenir la prise en considération de sa déception.
S'agissant de la gravité de l'inexécution (puisqu'une exécution imparfaite est avant tout une inexécution), force est de constater que l'article 1223 n'en a cure. Il y aurait donc lieu de penser qu'aucun degré de gravité n'est requis. Dès lors, une imperfection minime pourrait suffire pour que le créancier puisse invoquer la réduction du prix. Il pourrait toutefois en être autrement si la jurisprudence décidait de raisonner par analogie avec l'exception d'inexécution, pour laquelle elle exige que l'inexécution invoquée présente un certain degré de gravité (6).
Cette solution, fondée sur la bonne foi, pourrait à première vue être transposée à la réduction du prix, notamment au regard de l'extension textuelle que connaît la bonne foi à travers la réforme du 10 février 2016. Un obstacle pourrait néanmoins s'y opposer : la lettre même de l'article 1223. Si la jurisprudence a pu limiter l'exceptio non adimpleti contractus aux inexécutions d'une certaine ampleur, c'est en raison de l'absence de texte de portée générale : l'exception d'inexécution est avant tout une construction jurisprudentielle. A l'inverse, l'article 1223 pose un principe de réduction du prix pour exécution imparfaite. Et ce texte ne fait aucune distinction selon la gravité de l'inexécution. Ubi lex non distinguit...
Cette indifférence du texte quant à la gravité de l'inexécution paraît bien dangereuse. Pourrait-on imaginer le client d'un avocat, qui estimerait insuffisants ou peu appropriés les arguments juridiques soulevés par ce dernier, solliciter une réduction des honoraires stipulés dans la convention ? Ou le client d'un coiffeur qui refuserait de payer le prix convenu car sa nouvelle coupe de cheveux ne lui donne pas plus de succès auprès de la gente féminine ?
Enfin, la réduction du prix est-elle subordonnée à l'existence d'un préjudice pour le créancier ? La question peut sembler incongrue : s'il y a exécution défectueuse, il y a certainement préjudice. Pourtant, il est possible d'imaginer des inexécutions ne causant pas de préjudice au créancier. Par exemple, voici une personne qui, dans le cadre d'un dépôt salarié, confie son véhicule automobile à une autre. Il est stipulé dans le contrat que le véhicule sera placé dans un endroit clos et couvert. Le déposant, à l'issue du contrat, découvre que le véhicule est demeuré stationné en extérieur, mais qu'il n'a pour autant subi aucun dommage. Peut-il, du fait de cette exécution imparfaite, exiger du dépositaire une réduction du prix stipulé, alors même qu'il n'a subi aucun préjudice ? La réponse nous semble devoir être positive, car la réduction du prix n'est pas liée à la responsabilité ; un préjudice n'a donc pas à figurer parmi ses conditions.
II - Une mise en oeuvre incertaine
La mise en oeuvre de la réduction du prix n'est pas davantage développée par le nouvel article 1223 du Code civil. Elle est par conséquent totalement laissée dans l'ombre, ce qui engendre des doutes, notamment sur trois points.
D'abord, le texte précise que le créancier peut "solliciter" une réduction du prix. Le terme "solliciter" est peu précis. "Requérir quelque chose de quelqu'un" pour Littré, "prier quelqu'un de consentir à faire quelque chose", voire "demander quelque chose à un supérieur" pour Larousse, le verbe "solliciter" n'est guère juridique. Plus précisément, aucune indication n'est fournie sur le destinataire de la sollicitation. Le créancier insatisfait doit-il s'adresser au débiteur? Ou directement au tribunal ? Dans la première hypothèse, c'est-à-dire s'il doit solliciter la réduction du prix auprès de son cocontractant, quelles sont ses possibilités en cas de refus de ce dernier ?
Ensuite, le texte précise que le créancier qui n'a pas encore payé doit "notifier sa décision" de réduire le prix. Cette formulation appelle deux remarques. D'une part, le texte ne parle plus ici de sollicitation, ou de demande, mais de décision. Il semblerait donc que lorsque le créancier n'a pas encore payé, c'est à lui de décider unilatéralement la réduction. Son cocontractant n'aura alors d'autre choix que de saisir le tribunal s'il conteste l'imperfection de l'exécution. D'autre part, aucun détail n'est fourni sur le contenu de la notification. Ainsi, le créancier n'a pas, visiblement, l'obligation de motiver sa décision de réduire le prix. Il lui revient seulement la tâche d'en informer, par notification, son cocontractant. Ce dernier n'a par conséquent pas les moyens d'apprécier le bien-fondé de la décision du créancier, ce qui, notamment pour des contrats complexes comportant de multiples prestations, pourrait s'avérer problématique.
Enfin, la plus grave imprécision du texte concerne l'appréciation de la réduction. "Le créancier peut [...] solliciter une réduction proportionnelle du prix". La question qui se pose inévitablement à la lecture de ce passage est celle de savoir comment doit s'apprécier cette proportionnalité, base de la détermination de la réduction du prix. Bien évidemment, il n'y aura guère de difficulté si l'insuffisance alléguée est quantitative : si le vendeur n'a livré que les deux tiers des marchandises, il est aisé de déterminer que la réduction du prix devra être d'un tiers. Mais ce calcul se compliquera singulièrement lorsque l'insuffisance dont se plaint le créancier est qualitative. Plusieurs exemples permettent de s'en convaincre. Dans un bail d'habitation, le locataire qui estime que le défaut de réparations incombant au bailleur diminue sa jouissance paisible des lieux pourra-t-il solliciter une réduction du montant du loyer ? Et dans quelle proportion devra s'apprécier la diminution de la jouissance paisible ? Dans un contrat d'entreprise, dans quelle proportion le maître de l'ouvrage qui reproche à l'entrepreneur d'avoir taillé ses haies trop court pourra-t-il exiger une réduction du prix ?
La notion de proportionnalité est une notion qui occupe une place en constante progression en droit français. Pour autant, elle peut s'avérer d'un maniement délicat, ainsi qu'en atteste notamment la jurisprudence relative à l'exigence de proportionnalité dans le cautionnement (C. conso., art. L. 341-4 N° Lexbase : L8753A7C).
Il apparaît ainsi que les conditions de déclenchement et de mise en oeuvre de l'article 1223 du Code civil soulèvent beaucoup trop de questions, ce qui risque de provoquer une insécurité juridique importante : l'appréciation et la gravité de l'inexécution, de même que les modalités et la mesure de la réduction, sont laissées dans un flou ambiant.
Ce texte risque donc d'engendrer des abus de la part des créanciers, ce qui conduira les cocontractants à saisir le juge. Il s'ensuivrait une immixtion supplémentaire du juge dans le contrat, puisque ce sera à lui, in fine, de déterminer ce qu'étaient les attentes du créancier, quelle est l'ampleur de la différence entre l'exécution et ces attentes, et quelle doit être la réduction du prix. Ce problème n'est pas sans rappeler la "théorie des attentes", d'origine anglo-saxonne, et relayée en France, notamment par Bruno Oppetit (7). En vertu de cette théorie des "reasonnable expectations", la force obligatoire des conventions aurait pour fondement l'attente raisonnable du créancier. Cette théorie permettrait de limiter les obligations du débiteur à ce qu'attendait son créancier. Elle n'a pas prospéré en droit français, et fut combattue par certains auteurs, qui lui reprochaient notamment sa subjectivité : en effet, elle "ne fonde pas la force obligatoire du contrat sur ce que le créancier attend raisonnablement, mais sur ce qu'autrui estime être raisonnable de la part du créancier d'attendre" (8).
Au final, l'article 1223 risque de susciter un abondant contentieux. Les soucis d'efficacité (9) et de souplesse qui pouvaient sembler l'inspirer s'effaceront à l'usage. L'article 1223 est ainsi un leurre. Il reste à savoir à qui profitera l'argent de ce leurre.
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Réf. : Cass. soc., 10 février 2016, cinq arrêts, n° 14-30.095, FS-P+B (N° Lexbase : A0267PLH) ; n° 15-16.132, FS-P+B (N° Lexbase : A0270PLL) ; n° 14-28.084, FS-P+B (N° Lexbase : A0337PL3) ; n° 15-16.080, FS-P+B (N° Lexbase : A0324PLL) ; n° 14-26.147, FS-P+B (N° Lexbase : A0230PL4)
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par Gilles Auzero, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux
Le 10 Mars 2016
Résumés
- Cass. soc., 10 février 2016, n° 14-30.095, FS-P+B (N° Lexbase : A0267PLH) : il résulte des dispositions d'ordre public de l'article L. 1243-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0887I7Y), auxquelles ni la Charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective sectorielle, ni le contrat de travail ne peuvent déroger dans un sens défavorable au salarié, que le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas d'accord des parties, de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail. - Cass. soc., 10 février 2016, n° 15-16.132, FS-P+B (N° Lexbase : A0270PLL) : les dispositions de l'article 11.2 de la Convention collective du rugby, qui, en cas de relégation ou de rétrogradation du club, permettent au joueur de rejoindre un autre club professionnel avant le terme du contrat en cours, sans rendre la rupture imputable à l'employeur, ni interdire au salarié de rompre le contrat en invoquant une faute grave de l'employeur, dérogent dans un sens favorable au salarié à l'article L. 1243-1 du Code du travail. - Cass. soc., 10 février 2016, n° 14-28.084, FS-P+B (N° Lexbase : A0337PL3) : il résulte de l'article 680 de la Charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective sectorielle, dans sa rédaction applicable au litige, que chaque premier contrat dans un club de l'entraîneur titulaire du diplôme d'entraîneur professionnel de football est conclu pour une durée minimum de deux saisons. - Cass. soc., 10 février 2016, n° 15-16.080, FS-P+B (N° Lexbase : A0324PLL) : l'article 12. 3. 3 de la Convention collective nationale du sport régissant la durée des contrats à durée déterminée des sportifs professionnels et de leurs entraîneurs ne s'applique pas aux titulaires de contrats à durée indéterminée. - Cass. soc., 10 février 2016, n° 14-26.147, FS-P+B (N° Lexbase : A0230PL4) : sauf disposition légale contraire, une convention collective ne peut permettre à un employeur de procéder à la modification du contrat de travail sans recueillir l'accord exprès du salarié. |
Observations
I - La conclusion et l'exécution du contrat de travail
A - Le choix du contrat
Les exigences légales nouvelles. Issu du la loi n° 2015-1541 du 25 novembre 2015 (1), l'article L. 222-2-3 du Code du sport (N° Lexbase : L8130KRK) dispose qu'"afin d'assurer la protection des sportifs et entraîneurs professionnels et de garantir l'équité des compétitions, tout contrat par lequel une association sportive ou une société mentionnée aux articles L. 122-2 (N° Lexbase : L0810ISS) et L. 122-12 (N° Lexbase : L6314HN8) s'assure, moyennant rémunération, le concours de l'un de ces salariés est un contrat de travail à durée déterminée".
Ainsi que le laisse clairement entendre ce texte (2), le CDI se trouve désormais banni du sport professionnel, pour laisser la place au seul CDD. Le changement est, pour le moins, radical, même s'il n'est guère besoin de souligner, qu'en pratique, le CDD régnait déjà en maître dans ce secteur. Il n'en demeure pas moins qu'antérieurement à la réforme précitée, un sportif ou entraîneur professionnel pouvait tout à fait exercer son activité dans le cadre d'un CDI. Il faut, en outre, rappeler que dans un important arrêt en date du 2 avril 2014 (3), la Chambre sociale de la Cour de cassation avait jugé illicite la stipulation de la convention collective du rugby professionnel imposant le recrutement des joueurs par CDD.
L'affaire. Dans l'affaire ayant conduit à l'arrêt rendu sous le numéro de pourvoi 15-16.080, M. X avait été engagé, une fois n'est pas coutume, par contrat à durée indéterminée pour exercer les fonctions d'entraîneur de l'équipe espoir, d'intervenant sur les équipes professionnelles, d'intervenant au centre de formation de haut niveau et d'intervenant coordinateur pour la détection des jeunes. Licencié consécutivement à la liquidation judiciaire du club employeur, le salarié avait saisi la juridiction prud'homale
Le salarié reprochait à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande en fixation d'une somme à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive. A l'appui de son pourvoi, il soutenait que l'article 12-3-3 de la Convention collective nationale du sport (N° Lexbase : X7393AGW), qui prévoit que si le contrat commence à s'exécuter en cours de saison, il doit courir au minimum jusqu'à la veille de la saison suivante, est applicable à tout contrat de travail conclu entre une société sportive et un entraîneur, quelle que soit la nature du contrat de travail. En conséquence, le salarié devait bénéficier, du fait de sa qualité d'entraîneur, d'une garantie de paiement des salaires conformément aux stipulations du texte précité.
La solution. L'argumentation du salarié est écartée par la Cour de cassation qui souligne, tout d'abord, que "l'article 12-3-3 de la Convention collective nationale du sport régissant la durée des contrats à durée déterminée des sportifs professionnels et de leurs entraîneurs ne s'applique pas aux titulaires de contrats à durée indéterminée". La Chambre sociale affirme, ensuite, que "la cour d'appel ayant, par des motifs non critiqués par le moyen, constaté que le salarié avait été engagé en qualité d'entraîneur, par un contrat à durée indéterminée, en a exactement déduit que ce salarié ne pouvait se prévaloir de ces dispositions".
La solution retenue est pleinement justifiée. La lecture de l'article 12-3-3 de la Convention collective nationale du sport laisse, en effet, clairement apparaître que ce texte vise à régir les seuls contrats de travail conclus pour une durée déterminée. A dire vrai, cela n'avait sans doute pas échapper à l'auteur du pourvoi qui, sans soutenir que la stipulation en cause a valeur de clause de garantie d'emploi, arguait du fait qu'elle institue une garantie de paiement des salaires (4).
Mais c'était se livrer là à une interprétation très orientée de l'article 12-3-3, qui se borne à fixer une durée minimale au contrat conclu en cours de saison ou, plus exactement, au contrat à durée déterminée conclu en cours de saison. Or, en l'espèce, les parties avaient entendu se lier pour une durée indéterminée.
La Cour de cassation ne devrait plus, à l'avenir, avoir à connaître de ce type de litige puisque, comme il a été dit précédemment, le CDD est désormais appelé à régner en maître dans le sport professionnel. Il importe, toutefois, d'être ici plus précis et d'indiquer que le CDI n'a plus sa place dans les relations de travail unissant les clubs et les seuls sportifs et entraîneurs professionnels.
Or, en application de l'article L. 222-2, 2° du Code du sport (N° Lexbase : L8177KRB), l'entraîneur professionnel est défini "comme toute personne ayant pour activité principale rémunérée de préparer et d'encadrer l'activité sportive d'un ou de plusieurs sportifs professionnels salariés dans un lien de subordination juridique avec une association sportive ou une société mentionnée aux articles L. 122-2 et L. 122-12 et titulaire d'un diplôme, d'un titre à finalité professionnelle ou d'un certificat de qualification prévu à l'article L. 212-1 (N° Lexbase : L6359HNT)".
On constate, ce faisant, que la qualification d'entraîneur professionnel exige la réunion d'un certain nombre de critères (5). Or, pour en revenir à l'espèce qui nous intéresse, il apparaît que le salarié n'était appelé qu'à "intervenir" auprès des équipes professionnelles, ce qui paraît exclure qu'il avait pour "activité principale" de préparer et d'encadrer l'activité sportive d'un ou de plusieurs sportifs professionnels salariés. Il y a ainsi lieu de considérer que, postérieurement à l'adoption de la loi du 25 novembre 2015, un salarié peut toujours être engagé par un CDI afin d'exercer les fonctions d'entraîneur, dès lors qu'il ne relève pas de la catégorie "d'entraîneur professionnel", au sens de l'article L. 222-2 du Code du sport.
B - La durée du contrat
Liberté des parties. Antérieurement à la loi du 25 novembre 2015, dès lors que les parties à la relation de travail optaient pour le CDD, elles n'avaient d'autre choix que de recourir au CDD d'usage, tel qu'il est réglementé par le Code du travail. On sait que, s'agissant de ce contrat, ledit Code ne fixe aucune durée minimale à la relation de travail (6).
La loi précitée a profondément modifié cet état du droit. Désormais, en effet, la durée du contrat conclu avec un entraîneur ou un sportif professionnel " ne peut être inférieure à la durée d'une saison sportive fixée à douze mois" (7). On comprend, ainsi, qu'à l'avenir, le contrat conclu avec un entraîneur ou un sportif professionnel aura nécessairement une durée minimale de douze mois. Cela étant, rien n'interdisait aux parties à la relation de travail de stipuler une telle durée minimale dans le contrat de travail sous l'empire des textes antérieurs. En outre, il faut compter en la matière avec les exigences conventionnelles.
Exigences conventionnelles. On se bornera à relever que dans l'arrêt rendu sous le numéro de pourvoi 14-28.084, la Cour de cassation, après avoir visé l'article 680 de la Charte du football professionnel dans sa rédaction applicable au litige, affirme "qu'aux termes de ce texte chaque premier contrat dans un club de l'entraîneur titulaire du diplôme d'entraîneur professionnel de football est conclu pour une durée minimum de deux saisons" et que "le salarié ne peut renoncer par avance aux droits qu'il tient de la Charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective sectorielle".
On passera rapidement sur cette dernière affirmation, qui ne constitue pas une nouveauté, tant dans l'assimilation de la Charte du football professionnel à une convention collective que dans l'affirmation selon laquelle un salarié ne peut renoncer, par avance, aux droits qu'il tient d'une norme conventionnelle.
Doit, en revanche, retenir l'attention le fait que la Cour de cassation fasse produire effet à l'article 680 de la Charte du football professionnel. A l'époque des faits, ce texte stipulait que "chaque premier contrat dans un club de l'entraîneur titulaire du DEPF est conclu pour une durée minimum de deux saisons" (8). A n'en point douter, et contrairement à ce que soutenait curieusement l'employeur dans son pourvoi, ce texte instituait une durée minimale pour le premier contrat conclu avec un entraîneur.
Mais là n'est pas le problème. En faisant produire effet à la clause en cause qui, rappelons-le, impose que le contrat de travail ait une durée minimale de deux saisons, la Cour de cassation paraît assurer la validité d'une stipulation qui, par là-même, impose que le contrat de travail ait une durée déterminée. On avait pourtant compris qu'il résultait de l'arrêt précité rendu le 2 avril 2014 par cette même Cour de cassation que sont illicites les stipulations des conventions collectives imposant le recrutement des joueurs par CDD.
En réalité, ces deux décisions se concilient parfaitement. Plus exactement, là où la stipulation de la Convention collective du rugby, qui était au coeur de l'arrêt de 2014, impose le recours au CDD, l'article 680 de la Charte du football professionnel ne fait qu'imposer une durée minimale lorsque, dans un tout premier temps, les parties ont décidé de se lier par un CDD. Celles-ci restent donc libres, à s'en tenir à cette seule stipulation, de recourir à un CDI.
Cela étant, dans la mesure où, antérieurement à la réforme opérée par la loi du 25 novembre 2015, la loi ne fixait aucune durée minimale lors de la conclusion d'un CDD d'usage, c'est aussi admettre que l'article 680 de la Charte du football professionnel est plus favorable pour le salarié que les dispositions légales. Il est vrai que la Cour de cassation n'était pas précisément saisie de la question à laquelle il n'est, d'ailleurs, pas évident d'apporter une réponse. Peut-être lui sera-t-elle soumise un jour car, désormais, si le CDD conclu avec un sportif ou un entraîneur professionnel doit avoir une durée minimale, celle-ci n'est que d'une saison et non de deux.
Cela étant, on rappellera que la loi du 25 novembre 2015 est explicitement fondée sur l'idée que le CDD est plus protecteur pour les sportifs et entraîneurs que le CDI (9). A ce compte-là, il y a lieu d'admettre aussi qu'une durée minimale de deux années est plus protectrice qu'une durée minimale d'une année...
C - La modification du contrat de travail
L'affaire. Le 31 mai 2007, M. X avait été engagé par la société FC Nantes par contrat à durée déterminée en qualité de joueur professionnel pour trois saisons successives. Le 21 juin 2009, le club avait informé le joueur que du fait de sa relégation en ligue 2, sa rémunération contractuelle ne pouvait pas être maintenue. Le joueur a saisi la juridiction prud'homale.
Pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire et de congés payés, l'arrêt attaqué avait retenu qu'aux termes de l'article 761 de la Charte de football professionnel, en cas de relégation en division inférieure, les clubs ont la faculté de diminuer la rémunération de leurs joueurs de 20 % et qu'au-delà de ce pourcentage, ils peuvent proposer individuellement à leurs joueurs, par écrit et avant le 30 juin, une diminution de la rémunération ; la réponse du joueur devant intervenir dans un délai de 8 jours de la réception de la proposition écrite. En outre, l'absence de réponse écrite du joueur dans le délai indiqué vaut acceptation de la diminution proposée par le club.
Il résulte des pièces produites que le courrier recommandé du club, daté du 24 juin 2009, a été présenté à son destinataire le 29 juin 2009, lequel n'a contesté la baisse de sa rémunération que plus d'une année plus tard, le 21 juin 2010 auprès de la LFP, soit manifestement hors délai.
Une censure inéluctable. La Cour de cassation vient censurer la décision des juges d'appel au visa de l'article 1134 du Code civil (N° Lexbase : L1234ABC) et de l'article 761 de la Charte du football professionnel, laquelle a valeur de convention collective sectorielle. Après avoir rappelé que "sauf disposition légale contraire, une convention collective ne peut permettre à un employeur de procéder à la modification du contrat de travail sans recueillir l'accord exprès du salarié", la Chambre sociale affirme "qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que le joueur avait donné son accord exprès à la réduction de rémunération décidée par le club de football, la cour d'appel a violé les textes susvisés".
On ne peut qu'être surpris de la position qu'avaient adoptée les juges du fond en application des stipulations, pour le moins contestables, de la Charte du football professionnel et en méconnaissance d'exigences prétoriennes anciennes et élémentaires. Il n'est, à cet égard, guère besoin de rappeler que le salaire est nécessairement un élément du contrat de travail et que, dès lors, toute modification du salaire, même minime, est une modification du contrat de travail. Il ne saurait, en conséquence, y avoir de place en la matière pour la décision unilatérale de l'employeur (10).
En outre, une convention collective, dont on sait qu'elle est impuissante à modifier le contrat de travail (11), ne peut pas plus conférer un tel pouvoir à l'employeur. Par suite, un club employeur ne saurait, en application de l'article 761 de la Charte du football professionnel, imposer à un joueur une réduction de sa rémunération de 20 % sous prétexte de relégation du club en division inférieure. La stipulation précitée est illicite ou, à tout le moins, n'est pas de nature à écarter l'exigence du consentement du salarié.
De même, faut-il rappeler que, depuis l'arrêt "Raquin" du 8 octobre 1987 (12), l'acceptation d'une modification de son contrat de travail par un salarié ne peut qu'être expresse, sans pouvoir découler de la poursuite du travail ? En conséquence, une convention collective ne peut, à l'instar de la Charte du football professionnel, organiser une acceptation tacite de la modification, par l'écoulement d'un certain délai.
III - La rupture du contrat de travail
A - L'application de la loi
Les exigences légales. Dès lors qu'un contrat de travail est conclu pour une durée déterminée, il ne peut, en principe, être rompu avant l'échéance de son terme. On sait, toutefois, que l'article L. 1243-1 du Code du travail autorise sa rupture anticipée en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail (13).
Il importe de préciser que ce texte continuera de recevoir application postérieurement à l'adoption de la loi du 27 novembre 2015. En effet, si l'article L. 222-2-1 du Code du sport, après avoir indiqué que "le Code du travail est applicable au sportif professionnel salarié et à l'entraîneur professionnel salarié", exclut l'application de certains textes dudit Code, l'article L. 1243-1 ne fait pas partie de la liste énumérée.
Mise en oeuvre. Etait en cause, dans l'arrêt rendu sous le numéro de pourvoi 14-30.095, un entraîneur de football dont le contrat de travail à durée déterminée avait fait l'objet d'une rupture anticipée à l'initiative du club employeur.
Pour débouter le salarié de ses demandes d'indemnité, l'arrêt attaqué avait retenu que l'article 679 de la Charte professionnelle du football prévoit que l'entraîneur titulaire du DEPF, responsable de la direction technique du club, et l'entraîneur titulaire du certificat de formateur responsable du centre de formation des joueurs professionnels ne peuvent, sous peine de résiliation de contrat, sans indemnité, exercer aucune activité salariale, libérale commerciale.
Le salarié soutenait que son employeur connaissait parfaitement l'existence de la société MPM communication et sa qualité de gérant, se prévalant à ce titre de l'attestation de son agent sportif qui relate dans quelles conditions l'employeur a reçu cette information. Ce témoignage était cependant contredit par celui d'une autre personne attestant que l'existence de cette société n'avait pas été invoquée lors des réunions auxquelles elle avait participé, que le salarié ne peut pas justifier d'une information écrite de l'employeur dont la réalité ne souffrirait pas alors de contestation.
Au-delà de la violation de ces dispositions de la Charte du football professionnel, la situation de l'entraîneur est révélatrice d'un manque de disponibilité mis en lumière, par ailleurs, au vu d'autres éléments de la procédure et déjà évoqués, étant observé que le salarié ne fournit aucun élément permettant d'affirmer que la gérance de cette société, dont le siège social se situe à son domicile, était en réalité exercée, de fait, par une autre personne, qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que le salarié n'a pas respecté la Charte du football professionnel et les obligations professionnelles inhérentes au poste d'entraîneur principal, son comportement ne permettant pas le maintien du contrat de travail, en ce qu'il portait atteinte à l'indispensable confiance que doit avoir un club en son entraîneur.
La décision est censurée par la Cour de cassation au visa de l'article L. 1243-1 du Code du travail qui affirme "qu'il résulte des dispositions d'ordre public de l'article L. 1243-1 du Code du travail, auxquelles ni la Charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective sectorielle, ni le contrat de travail ne peuvent déroger dans un sens défavorable au salarié, que le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas d'accord des parties, de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail". En conséquence, "en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser une faute grave imputable au salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé".
Là encore, la solution est tout à fait justifiée. La Cour de cassation ne dit pas que le salarié ne pouvait pas, en l'espèce, se voir reprocher une faute grave. Elle reproche simplement aux juges du fond de ne pas l'avoir caractérisée, violant ainsi les prescriptions de l'article L. 1243-1 du Code du travail. Sans doute le salarié n'avait-il pas respecté les exigences de l'article 679 de la Charte du football professionnel. Mais, outre que l'on peut douter de la licéité de cette stipulation en ce qu'elle porte atteinte à la liberté du travail (14), cette méconnaissance ne peut, en soi, constituer une faute grave (15). Admettre le contraire reviendrait à priver le juge du droit de vérifier son existence, ce qui ne peut, à l'évidence, être admis.
On doit remarquer que, dans son motif de principe, la Cour de cassation exclut qu'une convention collective ou un contrat de travail déroge à l'article L. 1243-1 du Code du travail dans un sens défavorable au salarié. C'est donc admettre l'application de stipulations conventionnelles ou contractuelles plus favorables en matière de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée des sportifs professionnels.
B - L'application de stipulations conventionnelles ou contractuelles plus favorables
L'affaire. C'est la Convention collective du rugby qui était en cause dans l'arrêt rendu sous le numéro de pourvoi 15-16.132. En l'espèce, M. X et six autres joueurs professionnels de rugby avaient été engagés par contrat à durée déterminée par la société Club sportif Bourgoin-Jallieu rugby. Le 30 juin 2012, le club avait informé les joueurs de ce que leur contrat ne pouvait se poursuivre après cette date du fait de sa rétrogradation en Fédérale 1. Dans un courrier du 9 août, les joueurs avaient indiqué prendre acte de la décision de l'employeur de rompre le contrat exprimée dans la lettre du 30 juin 2012. Le club ayant été placé en liquidation judiciaire le 28 août 2012, M. F avait été désigné comme mandataire-liquidateur. Après s'être engagés, courant août 2012, auprès d'autres clubs de rugby, les salariés avaient saisi la juridiction prud'homale de demandes relatives à la rupture du contrat de travail.
Les joueurs faisaient grief aux arrêts attaqués d'avoir dit que leur contrat avait été rompu par eux et de les avoir déboutés de leurs demandes indemnitaires. A l'appui de leur pourvoi, ils soutenaient que si l'article 11. 2 de la Convention collective du rugby professionnel offre au joueur, dont le club est rétrogradé ou relégué en division inférieure, le droit de conclure un contrat de travail avec un autre club avant l'échéance du contrat à durée déterminée, la rupture du contrat reste néanmoins imputable au club rétrogradé ou relégué. En l'espèce, en jugeant que les joueurs n'avaient fait qu'exercer leur droit de résiliation anticipée né de l'article 11.2 de la Convention collective, de sorte qu'aucune somme ne leur était due par le club, la cour d'appel a violé cette disposition de la Convention collective du rugby professionnel.
Les joueurs arguaient également qu'une convention collective ne peut déroger de façon défavorable pour le salarié aux dispositions d'ordre public relatives aux conditions de recours et de forme du contrat de travail à durée déterminée. A supposer que les partenaires sociaux aient entendu faire peser sur le joueur qui use du droit de résiliation anticipée du contrat à durée déterminée en cas de rétrogradation ou de relégation du club l'imputabilité de la rupture, l'article 11.2 de la Convention collective du rugby professionnel serait alors moins favorable que les dispositions légales d'ordre public, et ne pourraient être opposées aux salariés.
Ces arguments n'auront pas convaincu la Cour de cassation qui rejette le pourvoi. La Chambre sociale affirme, d'abord, que "que les dispositions de l'article 11.2 de la Convention collective du rugby, qui, en cas de relégation ou de rétrogradation du club, permettent au joueur de rejoindre un autre club professionnel avant le terme du contrat en cours, sans rendre la rupture imputable à l'employeur, ni interdire au salarié de rompre le contrat en invoquant une faute grave de l'employeur, dérogent dans un sens favorable au salarié à l'article L. 1243-1 du Code du travail". Elle relève, ensuite, "qu'ayant constaté, d'une part, que les joueurs avaient fait usage de la faculté prévue à l'article 11.2 de la Convention collective du rugby, et, d'autre part, que le club avait exécuté loyalement ses obligations, la cour d'appel, devant laquelle les salariés ne soutenaient pas avoir rompu le contrat en raison d'une faute grave de l'employeur, a décidé à bon droit de rejeter leur demande indemnitaire".
La validation des clauses de rupture anticipée. L'arrêt présentement commenté nous paraît revêtir une importance capitale en ce que, de notre point de vue, il assure enfin clairement la validité des clauses conventionnelles ou contractuelles offrant aux joueurs professionnels la faculté de rompre leur contrat de travail de manière anticipée, dans d'autres cas que ceux énumérés par l'article L. 1243-1 du Code du travail.
Il pourra être rétorqué que la décision en cause n'est relative qu'à une stipulation conventionnelle. Mais, il faut le rappeler, l'arrêt rendu sous le numéro de pourvoi 14-30.095 vise, quant à lui, les normes conventionnelles et le contrat de travail, pour exclure qu'ils puissent déroger dans un sens défavorable au salarié aux dispositions de l'article L. 1243-1 du Code du travail.
On pourra aussi souligner que la décision relative à la Convention collective du rugby ne comporte aucune affirmation d'ordre général assurant la validité des clauses de rupture anticipée. Le motif de principe ne laisse, cependant, guère de place au doute. A cela, on ajoutera encore qu'il existe de solides arguments juridiques conduisant à retenir cette validité, ainsi que nous l'avons soutenu, il y a fort longtemps de cela, en nous appuyant précisément sur le principe de faveur (16).
Pour revenir au cas d'espèce, la stipulation de la Convention collective du rugby ne permet pas, à proprement parler, au salarié de rompre leur contrat de travail de manière anticipée en cas de relégation ou de rétrogradation du club employeur. Elle les autorise à signer un contrat de joueur professionnel ou pluriactif avec un autre club professionnel pendant la période officielle des mutations fixée par la LNR, sous réserve d'en informer au préalable son club par lettre recommandée avec accusé de réception. Mais, cela revient à considérer que le contrat initial est, par hypothèse, rompu.
La Cour de cassation indique aussi, très clairement, à quelles conditions la stipulation conventionnelle ou contractuelle peut être considérée comme plus favorable pour le salarié. Elle ne doit pas interdire au salarié de rompre le contrat en invoquant une faute grave de l'employeur. L'exigence est logique, dans la mesure où, en ce cas, le salarié peut prétendre à des indemnités à la charge de l'employeur. Il ne faudrait pas que, sous couvert d'une clause permettant au salarié de reprendre sa liberté de manière anticipée, on permette à l'employeur d'échapper à la responsabilité qui est la sienne.
La Cour de cassation paraît également soumettre la validité de la clause au fait que la clause, tout en permettant au salarié de rompre le contrat de manière anticipée, ne rende pas la rupture imputable à l'employeur. Par ailleurs, elle prend également soin de relever que le club avait exécuté loyalement ses obligations. Est-ce à dire que si tel n'était pas le cas, la mise en oeuvre de la clause, et non sa licéité, pourrait être paralysée ? On avouera avoir de la peine à le concevoir. Soit le comportement de l'employeur constitue une faute grave et le salarié peut rompre le contrat pour ce motif, soit ce n'est pas le cas et le salarié peut mettre en oeuvre la clause de rupture anticipée tout en demandant, le cas échéant, des dommages-intérêts à l'employeur.
Il convient, pour conclure, de s'interroger sur le devenir de cette position prétorienne, compte tenu des modifications apportées par la loi du 27 novembre 2015. Celle-ci a introduit au sein du Code du sport, un article L. 222-2-7 (N° Lexbase : L8134KRP) qui dispose que "les clauses de rupture unilatérale pure et simple du contrat de travail à durée déterminée du sportif et de l'entraîneur professionnels salariés sont nulles et de nul effet".
Il convient, en premier lieu, de relever que ce texte ne vise que les clauses du contrat de travail, à l'exclusion des stipulations contenues dans les conventions collectives, ce qui contribue à affermir la jurisprudence de la Cour de cassation telle qu'elle résulte de l'arrêt rendu sous le numéro de pourvoi 15-16.132. En second lieu, s'agissant des seules clauses du contrat de travail, sont uniquement proscrites les clauses de rupture unilatérale "pure et simple". A n'en point douter, cette locution sera source de contentieux et, par suite, d'interprétation. A cet égard, ne peut-on considérer qu'une clause contractuelle qui autorise le joueur à mettre un terme à son contrat de travail en raison de la relégation ou de la rétrogradation du club n'est pas une clause de rupture unilatérale "pure et simple" du contrat ? Dans la mesure où sa mise en oeuvre est soumise à un événement extérieur à la volonté des parties et n'interdit pas au joueur de rompre le contrat en raison de la faute grave de l'employeur, nous le pensons.
(1) Loi n° 2015-1541 du 25 novembre 2015, visant à protéger les sportifs de haut niveau et professionnels et à sécuriser leur situation juridique (N° Lexbase : L5025KRK). Sur cette importante réforme, v. D. Jacotot, Le droit du travail à l'épreuve de la loi relative aux sportifs professionnels et de haut niveau, JCP éd. S, 2016, 1032 ; J. Mouly, Le législateur au secours du CDD dans le sport professionnel (1ère partie), Dr. soc., 2016, p. 161 ; nos obs., Consécration législative d'un CDD propre au sport professionnel, Lexbase, éd. soc., n° 636, 2015 (N° Lexbase : N0320BWR).
(2) Auquel il faut ajouter l'article L. 222-2-1 du Code du sport (N° Lexbase : L8176KRA) qui écarte l'application de l'article L. 1221-2 du Code du travail (N° Lexbase : L8930IAY) au terme duquel, faut-il le rappeler, "le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail".
(3) Cass. soc., 2 avril 2014, n° 11-25.442, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6371MIS), Bull. civ. V, n° 96 ; D., 2014, p. 1363, note J.-P. Karaquillo ; Dr. soc., 2014, p. 576, obs. J. Mouly.
(4) L'auteur du pourvoi aurait pu soutenir que le texte conventionnel en cause impose la conclusion d'un contrat à durée déterminée et exiger, de ce fait, la requalification de son contrat. Mais cela eut été peine perdue compte de la solution retenue par la Cour de cassation dans l'arrêt précité du 2 avril 2014.
(5) Etant, en outre, précisé qu'en application du dernier alinéa de l'article L. 222-2 (N° Lexbase : L8177KRB), "une convention ou un accord collectif national détermine les critères à partir desquels l'activité de l'entraîneur professionnel salarié est considérée comme son activité principale". Sur ce renvoi à la négociation collective, qui peut être jugé discutable, v. Mouly, art. préc., p. 165.
(6) Pas plus qu'il ne fixe de durée maximale.
(7) C. sport., art. L. 222-2-4, al. 1er (N° Lexbase : L8131KRL). Ce même texte énumère trois cas dans lesquels un contrat conclu en cours de saison sportive peut avoir une durée inférieure à douze mois.
(8) Il résulte désormais de l'article 656 de la même Charte que "chaque premier contrat avec un club de l'entraîneur titulaire du DEFP (ou BEPF), d'une équivalence de certification ou de dérogation fédérale est conclu pour une durée minimale de deux saisons".
(9) V., sur cette justification, l'art. préc. de J. Mouly, p. 167.
(10) V. sur la question, G. Auzero et E. Dockès, Droit du travail, Précis D., 30ème éd., 2016, § 646 et la jurisprudence citée.
(11) Pour combien de temps encore ?
(12) Cass. soc., 8 octobre 1987 n° 84-41.902, publié (N° Lexbase : A1981ABY), Dr. soc., 1988, p. 135, note J. Savatier.
(13) Il faut encore ajouter à cela la faculté reconnue au salarié de mettre un terme au CDD lorsqu'il justifie de la conclusion d'un CDI (C. trav., art. L. 1243-2 N° Lexbase : L5788KGH).
(14) Cette stipulation peut être qualifiée, de notre point de vue, de clause d'exclusivité. Tout en reconnaissant qu'elle porte atteinte à la liberté du travail, la Cour de cassation considère qu'elle est valable si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise et si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché : Cass. soc., 11 juillet 2000, n° 98-40.143 (N° Lexbase : A9166AGL), Dr. soc., 2000, p. 1141, obs. J. Mouly ; Cass. soc., 24 février 2004, n° 01-43.392, FS-P+B (N° Lexbase : A3751DBK), Bull. civ. V, n° 64.
(15) Quant aux autres éléments relevés par les juges du fond, ils étaient, pour le moins, très vagues.
(16) V. nos obs., La validité des clauses de rupture anticipée dans les contrats à durée déterminée, Dr. soc., 2001, p. 17.
Décisions
Cass. soc., 10 février 2016, n° 15-16.132 à 15-16.138, FS-P+B (N° Lexbase : A0270PLL). Rejet (CA Grenoble, 5 février 2015, sept arrêts dont n° 13/01856 N° Lexbase : A0212NBH). Textes concernés : C. trav., art. L. 1243-1 (N° Lexbase : L0887I7Y), Convention collective du rugby, art. 11.2. Mots-clefs : sportif professionnel ; contrat de travail ; durée déterminée ; rupture anticipée ; stipulation conventionnelle plus favorable. Lien base : (N° Lexbase : E2300ETD). Cass. soc., 10 février 2016, n° 14-30.095, FS-P+B (N° Lexbase : A0267PLH). Cassation (CA Douai, 31 octobre 2014, n° 13/02409 N° Lexbase : A5756MZ9). Texte visé : C. trav., art. L. 1243-1. Mots-clefs : sportif professionnel ; contrat de travail ; durée déterminée ; rupture anticipée ; stipulation conventionnelle moins favorable ; exigence d'une faute grave Lien base : (N° Lexbase : E2300ETD). Cass. soc., 10 février 2016, n° 14-28.084, FS-P+B (N° Lexbase : A0337PL3). Cassation partielle (CA Nîmes, 7 octobre 2014, n° 12/05891 N° Lexbase : A8891MXL). Texte visé : Charte du football professionnel, art. 680, qui a valeur de convention collective sectorielle, dans sa rédaction applicable au litige. Mots-clefs : football professionnel ; entraîneur ; contrat de travail ; durée minimale. Cass. soc., 10 février 2016, n° 15-16.080, FS-P+B (N° Lexbase : A0324PLL). Rejet (CA Grenoble, 5 février 2015 n° 13/01852 N° Lexbase : A0820NBY). Texte concerné : Convention collective nationale du sport, art. 12.3.3 (N° Lexbase : X7393AGW). Mots-clefs : entraîneur ; contrat de travail ; durée indéterminée. Cass. soc., 10 février 2016, n° 14-26.147, FS-P+B (N° Lexbase : A0230PL4). Cassation partielle (CA Rennes, 5 septembre 2014, n° 12/06945 N° Lexbase : A0367MWI). Textes visés : C. civ., art. 1134 (N° Lexbase : L1234ABC) ; Charte du football professionnel, art. 761, laquelle a valeur de convention collective sectorielle. Mots-clefs : joueur professionnel ; contrat de travail ; modification ; exigence du consentement exprès du salarié. Lien base : (N° Lexbase : E8923ESB). |
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Réf. : Loi n° 2016-274 du 7 mars 2016, relative au droit des étrangers en France (N° Lexbase : L9035K4E)
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Le 11 Mars 2016
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par Jules Bellaiche, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale
Le 10 Mars 2016
Lexbase : Pouvez-vous nous définir le régime actuel d'exonération des bénéfices pour les JEI ? Qui peut en bénéficier ?
Alfred Lortat-Jacob et Gauthier Moulins : Le statut de jeune entreprise innovante (JEI) prévu aux articles 44 sexies-0 A (N° Lexbase : L1928KGI) et suivants du CGI a été créé en 2004 et prorogé, pour l'instant, jusqu'au 31 décembre 2016.
Afin d'y être éligible, l'entreprise doit respecter cinq conditions :
1. être une PME selon la définition du droit communautaire, à savoir employer moins de 250 personnes et réaliser un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions d'euros ou disposer d'un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros ;
2. avoir moins de huit ans. Le statut de JEI peut être sollicité jusqu'au terme de la septième année suivant celle de sa création ;
3. réaliser un volume minimal de dépenses de recherche. L'entreprise doit avoir réalisé, à la clôture de chaque exercice, des dépenses de recherche représentant au moins 15 % des charges fiscalement déductibles. L'appréciation des dépenses de recherche retenues renvoie à celle relatives au crédit d'impôt recherche (CIR) à l'exception de celles liées à l'élaboration de nouvelles collections des entreprises du secteur cuir-textile-habillement, des stylistes et des bureaux de stylistes, et à la veille technologique ;
4. être indépendante. L'entreprise doit être indépendante au sens de l'article 44 sexies du CGI (N° Lexbase : L3941KWU), à savoir notamment être détenue à plus de 50 % par des personnes physiques et/ou par des entités éligibles ;
5. être réellement nouvelle. Elle ne doit pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activité préexistante ou d'une reprise d'une telle activité.
Pour s'assurer du respect de ces conditions, l'entreprise a la possibilité d'adresser une demande de confirmation à l'administration fiscale sous la forme d'un rescrit fiscal. Celle-ci dispose, alors, pour répondre d'un délai de trois mois à compter de la date de réception du dossier complet. L'absence de réponse dans ce délai vaut accord tacite.
Par ailleurs, en cas de désaccord entre l'entreprise et l'administration, l'entreprise peut saisir une commission spécifique, afin de se prononcer sur l'application du régime, mais la compétence de cette commission ne s'étend pas à la qualification des dépenses de recherche.
L'obtention du statut de JEI pour une entreprise apporte des avantages, aussi bien fiscaux que sociaux.
- une exonération à 100 % de l'IS ou de l'IR sur les bénéfices réalisés au titre du premier exercice bénéficiaire, puis à 50 % au titre de l'exercice bénéficiaire suivant ;
- une exonération totale d'imposition forfaitaire annuelle (IFA), tant que dure le statut de JEI ;
- sur délibération des collectivités territoriales, une JEI peut bénéficier d'une exonération de la cotisation économique territoriale et de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant 7 ans (les avantages accordés aux JEI ne peuvent excéder le plafond des aides "de minimis" fixé par la Commission européenne, soit 200 000 euros sur trois exercices fiscaux) ;
- la plus-value imposable pour les associés/actionnaires bénéficie, en matière d'impôt sur le revenu, de l'abattement majoré, à savoir 50 % en cas de détention entre 1 et 4 ans ; 65 % en cas de détention entre 4 et 8 ans ; et 85 % en cas de détention de plus de 8 ans.
L'entreprise qualifiée de JEI est exonérée de cotisations sociales patronales pour les salariés affectés à des travaux de R&D ou d'innovation. Cette exonération est également ouverte aux mandataires sociaux relevant du régime général de Sécurité sociale.
L'exonération s'applique dans la limite d'un double plafonnement :
- une rémunération mensuelle brute par personne plafonnée à 6 599,78 euros en 2016 (4,5 fois le Smic mensuel brut) ;
- un plafond annuel de cotisations éligibles par établissement fixé à 193 080 euros en 2016 (5 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale).
Lexbase : En pratique, ce régime est-il efficace ? Permet-il une véritable avancée économique ?
Alfred Lortat-Jacob et Gauthier Moulins : S'agissant de l'efficacité de ce régime, quelques chiffres sont à mettre en avant (source DGE 2015 et ACOSS 2014) :
- 3 000 entreprises ont bénéficié du dispositif en 2013 et leurs dépenses de R&D se sont élevées à 700 millions d'euros ;
- 6 600 entreprises ont bénéficié du dispositif depuis 2004 ;
- depuis 2015, les JEI ont bénéficié d'exonération de charges sociales à hauteur d'un montant total de 1 050 millions d'euros (109 millions d'euros en 2013) et de charges fiscales à hauteur d'un montant total de 120 millions d'euros (8 millions d'euros en 2013) ;
- le statut JEI représentait 22 000 emplois salariés en 2012.
Au travers de ces chiffres, on peut s'interroger sur l'efficacité réelle de ce dispositif.
Sur une période supérieure à dix années, le nombre d'entreprises qui ont bénéficié de ce dispositif est limité en comparaison du nombre d'entreprises intervenant sur les marchés innovants.
En outre, seulement 22 000 emplois salariés travaillent dans des entreprises sous ce statut, ce qui, là encore, est limité lorsque l'on compare cette donnée aux 26 millions d'emplois salariés en France.
Cependant, il faut reconnaître que le statut de JEI constitue une avancée économique dans les avantages fiscaux et sociaux qu'il octroie à des entreprises en plein développement et à fort potentiel.
Dès lors, il convient de relativiser l'efficacité de ce dispositif qui, certes, est limité par rapport à l'approche et la perspective économique qu'il représente.
Lexbase : Quelles seraient les évolutions qu'apporterait la proposition de loi du 16 février 2016 ?
Alfred Lortat-Jacob et Gauthier Moulins : Le 16 février 2016, une proposition de loi a été déposée par plusieurs députés, en vue d'améliorer le statut des JEI.
L'article 1er propose de faire bénéficier les JEI d'une exonération des bénéfices selon le barème progressif suivant :
- 100 % de son montant pour le 1er exercice ou la 1ère période d'imposition bénéficiaire ;
- 80 % de son montant pour le 2ème exercice ou la 2ème période d'imposition bénéficiaire ;
- 60 % de son montant pour le 3ème exercice ou la 3ème période d'imposition bénéficiaire ;
- 40 % de son montant pour le 4ème exercice ou la 4ème période d'imposition bénéficiaire ;
- 20 % de son montant pour le 5ème exercice ou la 5ème période d'imposition bénéficiaire.
Les articles 2 et 3 proposent de limiter à une durée de cinq ans les dispositifs d'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la cotisation foncière des entreprises mais, de ne plus soumettre le bénéfice d'une telle exonération à une prise de délibération par la collectivité territoriale concernée.
Cette proposition de loi permettrait d'améliorer le statut fiscal des JEI dans la mesure où les allégements fiscaux seraient plus conséquents.
En outre, cette proposition prend en considération les difficultés rencontrées par les JEI en ce qu'elle tient compte du caractère peu adapté du dispositif pour les entreprises au regard de l'exonération d'IS.
Comme le relèvent les auteurs de la proposition de loi, "dans la pratique, les bénéfices réalisés ne sont d'ailleurs que très rarement distribués lors des premiers exercices étant donné leur importance sur le développement de ces entreprises". Ainsi, les JEI pourraient obtenir des allégements fiscaux sur une période supérieure à deux années et obtenir ainsi une réelle exonération d'IS.
Cependant, on peut regretter qu'aucune mesure ne visant à assouplir les conditions d'éligibilité ne soit apportée.
En effet, seules 6 600 entreprises ont bénéficié de ce dispositif, ce qui démontre l'impact encore trop limité du dispositif. Or, les entreprises rencontrent, en pratique, des difficultés à respecter annuellement le plancher minimum des dépenses R&D ou d'innovation (au moins 15 % par an). C'est une des raisons pour lesquelles les JEI sont en nombre restreints aujourd'hui.
Ainsi, dans l'optique d'élargir ce dispositif, un assouplissement de la condition du volume minimale de dépenses de recherche serait souhaitable.
Plusieurs solutions pourraient être retenues :
- diminuer le pourcentage minimum des dépenses de recherche engagées annuellement (10 % par exemple) ou permettre la possibilité de lisser sur plusieurs années le volume des dépenses de recherches afin de maintenir une moyenne de 15 % par an ;
- assouplir les critères d'appréciation des dépenses de R&D éligibles au quota de 15 %.
Lexbase : Pensez-vous que ce statut crée une rupture d'égalité devant l'impôt ? Ou, sinon, faut-il en élargir les conditions d'éligibilité et la portée ?
Alfred Lortat-Jacob et Gauthier Moulins : Cette question est laissée à l'appréciation souveraine du Conseil constitutionnel.
Celui-ci a notamment précisé, dans sa décision n° 2015-466 du 7 mai 2015 (Cons. const., 7 mai 2015, n° 2015-466 QPC N° Lexbase : A5872NHX), que "le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce que, pour des motifs d'intérêt général, le législateur édicte, par l'octroi d'avantages fiscaux, des mesures d'incitation au développement d'activités économiques en appliquant des critères objectifs et rationnels en fonction des buts recherchés".
Il est utile de noter que cette décision concerne l'imposition des gains de cession des parts de JEI.
La réforme du statut des JEI semble s'inscrire dans l'ensemble des mesures d'incitation au développement de l'activité économique.
Or, comme il a précédemment été observé, le statut de JEI n'a actuellement qu'un impact limité sur l'économie française. Il gagnerait à être élargi afin qu'un nombre plus important d'entreprises innovantes puissent en bénéficier.
Ainsi, l'extension de la réforme des JEI apparaît correspondre à la poursuite du but d'intérêt général sur un plan économique. Le Gouvernement a d'ailleurs récemment proposé la mise en oeuvre d'un plan d'action pour encourager les "start-up" à la française.
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Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 26 février 2016, n° 383930, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A4476QD7)
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Le 11 Mars 2016
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Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 10 février 2016, n° 385929, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A7079PKE)
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par Pierre Tifine, Professeur à l'Université de Lorraine et directeur adjoint de l'Institut de recherches sur l'évolution de la Nation et de l'Etat (IRENEE), Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique
Le 11 Mars 2016
C'est pourtant une solution différente qui avait été retenue en première instance par le tribunal administratif de Grenoble (2) qui avait annulé la décision du directeur du centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier refusant la distribution régulière de ces repas. Faisant suite à cette annulation, les juges avaient enjoint au directeur du centre pénitentiaire de proposer régulièrement aux détenus de confession musulmane des menus composés de viandes halal dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Cette solution avait dans un premier temps fait l'objet d'une demande de sursis à exécution qui avait été rejetée par la cour administrative d'appel de Lyon (3). Toutefois, le Conseil d'Etat avait ensuite décidé de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il avait prononcé l'injonction susvisée (4). Cette solution était fondée principalement sur le fait que l'exécution de ce jugement risquait "d'entraîner des conséquences difficilement réparables" au sens de l'article R. 811-17 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3294ALL). En effet, d'une part, la distribution au sein du centre pénitentiaire de repas composés de viande halal aurait imposé de réaliser des travaux difficiles et d'un montant très élevé, sachant par ailleurs que le recours à un hypothétique sous-traitant aurait également entraîné des coûts très importants. D'autre part, et surtout, la distribution régulière de repas halal dans l'établissement aurait créé un précédent sur lequel il aurait été difficile de revenir en cas d'infirmation au fond du jugement de première instance. En outre, même si ce point n'est pas mentionné par le Conseil d'Etat, cet état de fait aurait créé un précédent qui n'aurait pas manqué de susciter dans d'autres établissements des demandes qu'il aurait été difficile de refuser, identiques à celle objet de la présente affaire.
Mais si sur le fond le Conseil d'Etat confirme la légalité de la décision contestée, il apporte une solution très nuancée, qui doit permettre de concilier les nécessités du service public et les pratiques religieuses. Certes, l'administration pénitentiaire n'est pas tenue, en tout état de cause, de fournir aux détenus des menus conformes à leur religion. Mais si elle n'est pas redevable en la matière de ce qui pourrait être assimilé à une obligation de résultat (I), elle est débitrice d'une sorte d'obligation de moyens qui lui impose de rechercher à satisfaire les demandes alimentaires des détenus motivées par leurs croyances religieuses (II).
I - L'absence d'une obligation de résultant
La première question posée au Conseil d'Etat consiste à déterminer si le principe de liberté de religion, reconnu par l'article 9 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L4799AQS) et l'article 18 du Pacte sur les droits civils et politiques, ainsi que par l'article 26 de la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 (N° Lexbase : L9344IES) et le règlement-type des établissements pénitentiaires annexé à l'article R. 57-6-18 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7295IW4), implique un droit pour les détenus à recevoir une alimentation conforme à leurs croyances. La réponse à cette solution ne posait pas de difficultés majeures. En particulier, la Cour européenne des droits de l'Homme a déjà eu l'occasion de considérer que l'abattage rituel est au sens de la Convention un "rite [...] qui vise à fournir aux fidèles une viande provenant d'animaux abattus conformément aux prescriptions religieuses" (5). De la même façon, la Cour a jugé concernant un détenu bouddhiste qui voulait adopter un régime végétarien strict que "le fait de respecter des règles diététiques peut être tenu comme relevant de l'expression directe de la croyance au sens de l'article 9" (6). De son côté, le Conseil d'Etat avait pu estimer que le financement par une commune des travaux d'aménagement d'un abattoir destiné à l'abattage rituel permet "l'exercice de pratiques à caractère rituel relevant du libre exercice des cultes" (7). Concernant plus spécifiquement le rite halal, rappelons que le Conseil d'Etat avait déjà eu l'occasion de considérer qu'étaient légales les dispositions de l'article R. 214-70 du Code rural et de la pêche maritime (N° Lexbase : L5436IRR) relatives à ce type d'abattage et la dérogation qu'elles consentent à l'obligation d'étourdissement préalable des animaux dans un souci de "concilier les objectifs de police sanitaire et l'égal respect des croyances et traditions religieuses" (8).
Cette idée de conciliation est également au centre du raisonnement du Conseil d'Etat dans la présente affaire. Toutefois, ce n'est pas avec les objectifs de police sanitaire que doit être concilié le principe de liberté de religion, mais comme cela est mentionné dans la décision commentée, avec les "contraintes matérielles propres à la gestion [des établissements pénitentiaires] ... dans le respect de l'objectif d'intérêt général du maintien du bon ordre de [ces établissements]".
Cette nécessaire conciliation est permise par les textes internationaux susvisés qui précisent que le législateur peut apporter des limitations à la liberté religieuse pour des motifs de santé publique mais également pour des motifs tenant à la sécurité publique et à l'ordre. Conformément à ces stipulations, l'article 26 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 précise que les personnes détenues "peuvent exercer le culte de leur choix, selon les conditions adaptées à l'organisation des lieux, sans autres limites que celles imposées par la sécurité et le bon ordre de l'établissement". L'article R. 57-6-18 du Code de procédure pénale prévoit quant à lui que l'alimentation des personnes détenues doit "dans toute la mesure du possible" prendre en compte les convictions philosophiques ou religieuses de ces personnes.
Il ne saurait donc résulter de ces textes un droit absolu des détenus à bénéficier "en toutes circonstances" de menus confessionnels. Sur ce point, le Conseil d'Etat reprend le raisonnement qu'il avait déjà tenu à l'occasion d'un arrêt "Stojanovic" du 25 février 2015 (9). Dans cette affaire, les juges avaient en effet considéré que l'article 9 du règlement type des établissements pénitentiaires, concernant l'exercice par les personnes détenues de leurs convictions religieuses en matière d'alimentation, annexé à l'article R. 57-6-18 du Code de procédure pénale, n'imposait pas aux directeurs des établissements pénitentiaires de garantir, "en toute circonstance", une alimentation respectant ces convictions.
En tout état de cause, les difficultés pratiques auxquelles sont soumis les établissements pénitentiaires, ainsi que la prise en compte de la nécessité de préserver l'ordre dans ces établissements, s'opposent à la reconnaissance de ce qui pourrait être assimilé à une obligation de résultat. En revanche, il ne s'agit pas non plus de permette aux directeurs d'établissements de pouvoir s'abriter derrière ces contingences pratiques pour s'opposer à toutes demandes de détenus voulant bénéficier de menus confessionnels. Les directeurs d'établissements sont débiteurs en la matière d'une obligation de moyens qui leur impose de s'engager dans une réflexion portant sur la façon de satisfaire à ces demandes par des moyens raisonnablement envisageables.
II - L'existence d'une obligation de moyens
La nécessité de concilier les croyances religieuses et les impératifs de sécurité, tout en prenant en compte les difficultés concrètes auxquelles peuvent être confrontés les directeurs d'établissements pénitentiaires, implique l'exercice, par le juge administratif, d'un contrôle maximum des décisions prises dans ce domaine.
C'est ce contrôle qui est opéré sur la décision du directeur du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier refusant de distribuer régulièrement des menus composés de viandes halal aux détenus de confession musulmane. La mise en oeuvre de ce contrôle suppose, d'abord, que le juge analyse quelle est l'offre journalière de menus proposée aux détenus. Les juges relèvent, en l'espèce, que l'administration fournit à l'ensemble des détenus des menus sans porc ainsi que des menus végétariens. En outre, les détenus peuvent demander à bénéficier, à l'occasion des principales fêtes religieuses, de menus conformes aux prescriptions de leur religion. Enfin, en dehors de l'offre journalière de repas, le système de la "cantine" permet d'acquérir, en complément des menus disponibles, des aliments ou préparations contenant des viandes halal. Compte tenu de ces éléments les juges considèrent que le directeur du centre pénitentiaire "a pris en compte non seulement la circonstance que les personnes détenues de confession musulmane ne sont pas exposées au risque de devoir consommer des aliments prohibés par leur religion, mais aussi le fait que l'administration fait en sorte qu'elles puissent, dans une certaine mesure, consommer une alimentation conforme aux prescriptions de leur religion".
Une difficulté se pose, toutefois, concernant les détenus qui ne peuvent pas, faute de moyens financiers suffisants, recourir au système de la "cantine" pour se faire livrer des aliments halal. En effet, les mesures mises en oeuvre par le centre pénitentiaire ne s'appliquent pas spécifiquement aux détenus musulmans. Plus précisément, si ces détenus -comme tous les autres- se voient proposer des menus sans porc, ils n'ont la possibilité de consommer de la viande d'animaux abattus selon le rite halal -sauf éventuellement durant les périodes de fêtes religieuses- qu'en utilisant le système de la "cantine".
Il s'agit ici d'une difficulté majeure. D'une part, en effet, pour les raisons susmentionnées, il serait extrêmement difficile, pour l'administration pénitentiaire, de proposer quotidiennement une offre de viande halal aux détenus. D'autre part, ne pas permettre aux détenus les plus démunis d'avoir accès à ces aliments porte une atteinte sérieuse au principe du respect des croyances religieuses.
C'est pour cette raison que le Conseil d'Etat précise qu'il appartient aux directeurs des établissements pénitentiaires de prendre des mesures catégorielles concernant spécifiquement les détenus qui ne disposent pas des moyens financiers leur permettant de recourir au système de la cantine. La mise en oeuvre de ces mesures n'est pas jugée contraire au principe d'égalité, lequel "ne s'oppose pas à ce que des situations différentes soient réglées de façon différente ni à ce qu'il soit dérogé à l'égalité pour des motifs d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un et l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier".
Pour résoudre le problème qui leur est soumis, les juges se réfèrent aux dispositions de l'article 31 la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 dont il résulte que "les personnes détenues dont les ressources sont inférieures à un montant fixé par voie réglementaire reçoivent de l'Etat une aide en nature destinée à améliorer leurs conditions matérielles d'existence". Comme le précise ensuite l'article D. 347-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L1428IPL), cette aide "fournie prioritairement en nature" est attribuée par l'administration pénitentiaire. Relevons toutefois que ce texte ne mentionne pas expressément une aide alimentaire mais "notamment" la remise de vêtements, le renouvellement de la trousse de toilette, ainsi que la remise d'un nécessaire de correspondance. Il en résulte que si la fourniture d'aliments n'est pas expressément visée, elle est possible en application de ces dispositions.
Ainsi, dès lors que l'offre journalière de menus ne prévoit pas d'aliments halal et que les personnes détenues peuvent se procurer ces aliments par le système de la cantine, il y a lieu "de garantir à celles qui sont dépourvues de ressources suffisantes la possibilité d'exercer une telle faculté en leur fournissant, dans la limite [des] contraintes budgétaires et d'approvisionnement, une aide en nature appropriée à cette fin". Même si cette question n'est pas abordée par l'arrêt commenté, le Conseil d'Etat a déjà eu l'occasion de considérer qu'une telle aide -en l'occurrence le financement par une commune des travaux d'aménagement d'un abattoir destiné à l'abattage rituel- ne constitue pas une violation du principe de laïcité (10).
La solution retenue dans la présente affaire est-elle de nature à garantir la liberté de croyance des détenus ? Rien n'est moins évident dès lorsque les "contraintes budgétaires et d'approvisionnement" permettent aux directeurs d'établissement de s'exonérer de l'obligation de moyens dont ils sont redevables. Il sera difficile, notamment, de mettre sur le même plan l'obligation de remettre des vêtements, le renouvellement de la trousse de toilette et la remise d'un nécessaire de correspondance, qui sont expressément visés par l'article D. 347-1 du Code de procédure pénale, et la fourniture d'aliments conformes au rite halal qui n'est pas mentionnée par ce même texte. Surtout, on peut craindre, dans un contexte généralisé de restrictions budgétaires, que l'obligation mise à la charge des directeurs d'établissements pénitentiaires ne soit pas nécessairement suivie d'effets.
(1) CAA Lyon, 4ème ch., 22 juillet 2014, n° 14LY00113 (N° Lexbase : A1050PLH), AJDA, 2014, p. 2321, note P.-H. Prélot.
(2) TA Grenoble, 7 novembre 2013, n° 1302502 (N° Lexbase : A4040KQP).
(3) CAA Lyon, 20 mars 2014, n° 14LY00115 (N° Lexbase : A5402QYQ).
(4) CE, 16 juillet 2014, n° 377145 (N° Lexbase : A4412MUX).
(5) CEDH, 27 juin 2000, Req. 27417/95 (N° Lexbase : A6846AWH), Rec. CEDH, 2000-VII.
(6) CEDH, 7 décembre 2010, Req. 18429/06, AJ pénal, 2011. 258, obs. M. Herzog-Evans, RSC 2011, p. 221, obs. J.-P. Marguénaud.
(7) CE Ass., 19 juillet 2011, n° 309161 (N° Lexbase : A0574HW8), Rec. p. 393, concl. E. Geffray, AJDA, 2011, p. 1667, chron. X. Domino et A. Bretonneau, D., 2011, p. 2375, note M. Touzeil-Divina, JCP éd. A, 2011, 2307, note J.-F. Amédro, RFDA, 2011, p. 967, concl. E. Geffray.
(8) CE 3° et 8° s-s-r., 5 juillet 2013, n° 361441, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4598KI7), Dr. Administratif, 2013, 85, note M. Touzeil-Divina.
(9) CE 1° et 6° s-s-r., 25 février 2015, n° 375724, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A5172NCK).
(10) CE Ass., 19 juillet 2011, n° 309161, préc..
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Réf. : Cass. soc., 2 mars 2016, n° 14-16.414 à 14-16.420, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9222QDW)
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N1635BWH
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Le 10 Mars 2016
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Réf. : Décret n° 2016-214 du 26 février 2016, relatif aux droits des victimes (N° Lexbase : L7818K4C)
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N1625BW4
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Le 10 Mars 2016
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Réf. : Cass. crim., 1er mars 2016, n° 14-87.577, FS-P+B (N° Lexbase : A0668QYE)
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N1719BWL
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Le 15 Mars 2016
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Réf. : CJUE, 17 février 2016, aff. C-396/15 P (N° Lexbase : A1649QDG)
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N1733BW4
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Le 10 Mars 2016
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Réf. : Cons. const., décision n° 2015-523 QPC du 2 mars 2016 (N° Lexbase : A7973QDN)
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N1632BWD
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Le 10 Mars 2016
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Réf. : Cass. civ. 2, 3 mars 2016, n° 15-12.217, F-P+B (N° Lexbase : A0659QY3)
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N1727BWU
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Le 15 Mars 2016
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Réf. : Cass. civ. 1, 24 février 2016, n° 14-50.074, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0872QDN)
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N1685BWC
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Le 11 Mars 2016
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Réf. : Décret n° 2016-182 du 23 février 2016, précisant le régime de publicité des engagements pris par les sociétés en faveur de leurs mandataires sociaux à raison de la cessation de fonctions (N° Lexbase : L8876K37)
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N1603BWB
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Le 10 Mars 2016
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