Réf. : CE, 2e-7e ch. réunies, 24 juillet 2024, n° 491268, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A54365TI
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par Anna Maria Smolinska, avocat spécialiste droit public & de la commande publique
Le 18 Septembre 2024
Mots clés : principe d'impartialité • acheteur public • commentaire public • collectivité délégataire • gestion du service
Dans un arrêt rendu le 24 juillet 2024, la Haute juridiction a dit pour droit que le commentaire public d'un élu d'une collectivité délégataire relatif à la gestion du service ne constitue pas une méconnaissance du principe d'impartialité s'imposant à l'acheteur public.
Le soupçon du manque d’impartialité parmi les membres d’une commission ou les agents d’un service intervenant en cours d’une procédure de publicité et de mise en concurrence est un sentiment fréquemment mis en avant par les opérateurs économiques, notamment à l’occasion d’un référé précontractuel.
Le Conseil d’État a reconnu que le principe d’impartialité s’appliquait dans domaine de la commande publique, par un arrêt de principe de 2015 [1]. Il est important de se souvenir que, dans cette affaire, la motivation assise sur ce principe général a permis à la Haute juridiction d’annuler une procédure qui, aujourd’hui, relèverait probablement de la définition du conflit d’intérêts prévue par la Directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics N° Lexbase : L8592IZA, transposée en droit interne et codifiée à l’article L. 2141-10 du Code de la commande publique N° Lexbase : L4493LRT.
C’est d’ailleurs dans un contexte similaire qu’en 2015 – intervention lors de l’attribution du contrat d’un assistant à maîtrise d’ouvrage ayant occupé un poste au sein de la structure à laquelle le contrat est attribué – que le Conseil d’État a appliqué le principe d’impartialité pour fonder l’annulation d’un marché pour vice grave entachant la procédure de passation [2].
Ces deux jurisprudences illustrent la proximité entre la notion de conflit d’intérêts et le principe d’impartialité. En effet, ce dernier transcende la définition même du conflit d’intérêts, qui se manifeste par la compromission de l’impartialité ou de l’indépendance de la personne qui participe au déroulement de la procédure.
La différence entre le principe d’impartialité et le conflit d’intérêts réside dans l’existence ou non d’un intérêt qui animerait la personne concernée. Ce n’est qu’en présence d’un « intérêt financier, économique ou tout autre intérêt personnel » que le manque d’impartialité sera qualifié de conflit d’intérêt (CCP, art. L. 2141-10).
Le principe d’impartialité peut donc être considéré comme une solution de rattrapage pour fonder l’annulation d’une procédure (ou d’un contrat) lorsque l’identification d’un intérêt personnel n’est pas aisée mais qu’un comportement caractérise le manque de partialité.
Pour autant, souvent invoqué, le principe d’impartialité ne prospère que rarement lorsque le lien avec le conflit d’intérêts est rompu.
Ainsi, le fait que le maire d’une commune, siégeant dans la commission d’appel d’offres avait, dans le passé, siégé dans le conseil d’administration de la société attributaire n’est pas suffisant pour que le juge le considère partial [3] ; de même, sans autre preuve que ses allégations, un opérateur ne peut invoquer un conflit en raison des difficultés d’exécution d’un précédent contrat pour prétendre à la violation du principe d’impartialité [4], enfin les seuls liens capitalistiques indirects entre l’assistant à maîtrise d’ouvrage et l’entreprise attributaire n’ont pas davantage été jugés suffisants pour caractériser l’impartialité [5].
Dès ses premières applications dans le domaine de la commande publique, le principe d’impartialité a été qualifié de « nouveau glaive prétorien » et, en même temps, la difficulté de sa mise en œuvre, nécessitant une « vérification délicate et périlleuse » a été soulignée [6].
Cette analyse est confirmée par le nouvel exemple d’application fourni par le Conseil d’État.
Dans l’arrêt commenté, la situation est cependant très différente de celles précédemment mentionnées. En effet, l’opérateur n’avait pas de difficulté pour prouver « l’élément matériel » sur lequel il appuyait ses allégations d’impartialité. Il s’agissant des propos publics et écrits : un commentaire sur Facebook.
L’auteur du commentaire était le président délégué de la commission de délégation de service public (qui doit donner l’avis sur le choix des candidatures, autoriser le pouvoir exécutif à négocier avec les candidats admis et donner son avis sur le choix de l’offre pour l’attribution des délégations de service public, CGCT, L. 1411-5 N° Lexbase : L3849HWH). Son rôle dans le choix de l’attributaire du contrat était donc important.
Dans le commentaire, il a critiqué la gestion du marché forain de la ville, objet de la mise en concurrence. Il a mentionné la volonté de la ville d’apporter davantage de diversité et de commerces de qualité et regretté les « incivilités qui font fuir les clients du centre-ville ».
Ce commentaire a été publié alors même que la procédure d’attribution du nouveau contrat de délégation de service public était engagée, mais l’analyse des candidatures.
L’élu n’a pas nommément visé le gestionnaire du marché, également soumissionnaire et, finalement, auteur du recours.
Ce rappel détaillé des faits est indispensable car l’approche du juge administratif se confirme très casuistique. En l’espèce, le Conseil d’État a tenu compte non seulement de la teneur même du propos et du contexte de sa publication mais également de « l’absence de parti pris ou d'animosité personnelle ».
I. La teneur des propos et le contexte de la publication
Le Conseil d’État ne s’attarde pas à qualifier les propos tenus par l’élu et ne relève pas leur connotation négative dont on peut aisément convenir. Notamment la première phrase du commentaire « ce marché est mal géré » ne laisse pas de place au doute quant à l’appréciation portée par l’élu sur la qualité actuelle du service, nécessairement au moins en partie imputable au titulaire du contrat en cours, futur soumissionnaire évincé.
Malgré ce caractère négatif évident et au regret d’une partie des praticiens, le Conseil d’État souligne, au contraire, la modération des propos tenus.
Sur ce point, la ligne de crête semble se situer entre une critique du service et une critique du délégataire : en l’espèce non seulement le nom du délégataire en charge du service n’a pas été mentionné, mais de surcroit, il n’apparaît pas évident qu’il soit réellement visé par l’élu. Ce dernier mentionne en effet deux éléments extérieurs au délégataire : d’une part les incivilités et, d’autre part, la nécessité de reformer le futur contrat.
On peut donc considérer – et cela semble être le cas de la juridiction – que le propos ne visait pas l’opérateur économique mais bien le marché forain lui-même.
Cette modération des propos n’apparaît pas décorrélée du contexte dans lequel ils ont été tenus. Le Conseil d’État lie les deux éléments dans sa motivation.
Il est cependant regrettable que ce qui est visé en tant que « contexte » ne soit pas davantage explicité. S’agit-il du fait que la publication apparaissait sur un réseau social, lieu désormais privilégié pour les échanges entre les élus et les électeurs (remplaçant dans cette fonction… les marchés) ? Est-ce le fait que le propos émanait d’un élu (par opposition à un agent) ? La juridiction a-t-elle tenu compte de la temporalité de ces propos par rapport au déroulé de la procédure ? Aucun éclairage n’est donné par la juridiction sur ce point, alors même que l’arrêt est publié aux tables du recueil Lebon. Nous ne pouvons donc que spéculer sur un éventuel faisceau d’indices dont les premiers éléments pourraient être :
II. L'absence de parti pris et d’animosité personnelle
La seconde branche de la motivation retient « l’absence de parti pris et d’animosité personnelle ». Deux observations à ce sujet :
Premièrement, dans la jurisprudence administrative récente, la caractérisation avérée de parti pris et d’animosité ne permet pas, à elle seule, de caractériser la violation du principe d’impartialité [7].
L’ensemble des éléments relevés par le Conseil d’État apparaissent donc comme posés sur un balancier :
Cette logique interroge, à nouveau, quant à la frontière entre la violation du principe d’impartialité et le conflit d’intérêt. Satisfaire l’animosité personnelle, n’est-pas un « intérêt personnel » ?
En somme cependant, alors que certains s’inquiètent que la parole des élus ne soit trop contrainte par le droit de la commande publique et d’autres, à l’inverse, craignent que les juridictions administratives protègent trop les acheteurs au détriment des opérateurs économiques, le Conseil d’État rend une décision empreinte par la recherche d’équilibre.
[1] CE, 14 octobre 2015, n° 390968 N° Lexbase : A3734NTH.
[2] CE, 25 novembre 2021, n° 454466 N° Lexbase : A13147DZ.
[3] CE, 20 octobre 2021, n° 453653 N° Lexbase : A653249S.
[4] TA Rennes, 9 mars 2023, n° 2005740 N° Lexbase : A18559IK.
[5] TA Melun, 26 avril 2021, n° 2103261 N° Lexbase : A86884WP.
[6] F. Linditch, Un nouveau principe général du droit pour la commande publique : l'impartialité, JCP éd. A, n° 47, 26 novembre 2018, 2316.
[7] Cf. par exemple TA Besançon, 6 mars 2024, n° 2400277 N° Lexbase : A61155ZI.
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par Charles-Henri Hardy, Maître de conférences en droit privé à l’Université Toulouse Capitole, Co-directeur du Master 2 Contentieux fiscal et douanier, Membre du Centre de droit des affaires (CDA)
Le 18 Septembre 2024
Mots-clés : répression administrative fiscale • punitions administratives fiscales • procédures fiscales • contribuable
Cette chronique a pour ambition de présenter, de manière synthétique, quelques-unes des décisions de jurisprudence, rendues entre le 1er janvier et le 31 juin 2024, revêtant un intérêt particulier en matière de répression administrative fiscale.
Sommaire :
I. Les manquements aux obligations fiscales
II. L’infliction des punitions administratives fiscales
B. Le régime des punitions administratives fiscales
Dans le prolongement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel ayant qualifié des mesures répressives fiscales de « sanction[s] ayant le caractère de punition » lorsqu’elles n’ont pas pour seul objet de réparer le préjudice subi par l’État du fait du paiement tardif de l’impôt [1], quelques décisions du premier semestre 2024 se prononcent sur la notion de punition en matière fiscale.
Confirmant la position de juge du fond [2], le Conseil d’État a affirmé que la procédure de taxation d’office des personnes morales passibles de l’impôt sur les sociétés qui n’ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration (LPF, art. L. 66 N° Lexbase : L1447MDX) vise à permettre l’établissement et le contrôle de l’imposition et ne constitue pas par elle-même une sanction ayant le caractère d’une punition [3]. Par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, résultant de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, est inopérant. Le moyen assimilant la procédure de taxation d’office à une punition était pourtant juridiquement fondé [4] : la procédure de taxation d’office est conditionnée à l’existence d’un manquement déclaratif et entraine une réduction des droits pour le contribuable (diminution de la possibilité de contredire l’administration [5], couverture de certains vices de procédure commis lors de la procédure de contrôle [6], complexification de la charge de la preuve [7], restrictions apportées aux obligations d’information et de communication pesant sur l’administration [8]). Prévoyant que « sont taxés d’office » les contribuables défaillants, la rédaction impérative de l’article L. 66 du LPF est d’ailleurs révélatrice de la volonté du législateur d’employer cette procédure pour répondre aux comportements déviants des contribuables et donc d’utiliser cette procédure comme outil de répression. L’administration fiscale a la même conception lorsqu’elle vise les « Manquements sanctionnés par la TO » [9]. À ne pas s’y tromper, les éléments caractéristiques de cette procédure d’imposition correspondent non seulement à la définition constitutionnelle d’une « sanction ayant le caractère de punition » à laquelle des garanties quasi pénales sont associées, mais aussi à la définition d’« accusation en matière pénale » établie par la Cour européenne des droits de l’homme. S’agissant du second critère « Engel » [10] – la nature de l’infraction –, la procédure d’imposition d’office est en effet mise en place en raison de la violation d’une norme générale et a une finalité à la fois préventive et répressive. Au regard du faisceau d’indices « Bendenoun » [11], la loi fiscale et la procédure d’imposition d’office sont d’application générale ; la seconde, en ce qu’elle prive le contribuable de nombreuses garanties, vise, pour l’essentiel, à punir en vue d’éviter une réitération d’agissements semblables ; la procédure spéciale entraîne des atteintes aux droits des contribuables et l’ajout d’obligations contraignantes dont les intensités n’ont pas leur pareil en droit pénal commun. L’exclusion des garanties du contribuable dans le cadre particulier des procédures d’imposition d’office est dès lors critiquable au regard de la connotation pénale de la procédure imposée qui implique de lourdes punitions fiscales administratives [12] et pénales [13]. Les premières étant assimilées aux secondes, la solution retenue par le juge administratif dans la décision commentée apparait particulièrement sévère puisqu’il serait pénalement impensable « que l’auteur du délit ou du crime le plus grave puisse être privé pour cette seule raison de toute garantie de procédure » [14]. Si la qualification répressive de la procédure de taxation d’office apparaît donc juridiquement correcte, elle ne pouvait cependant pas être reconnue en raison des contraintes pratiques qu’entraineraient l’application des garanties pénales au contribuable vérifié dans ce cadre spécifique. Obligeant l’autorité administrative au dialogue avec le contribuable déviant, l’application des garanties pénales viderait de sens les procédures d’imposition d’office qui de facto disparaitraient. Particulièrement contrainte, l’administration n’aurait en outre qu’un intérêt limité à y recourir et son action de contrôle et de répression des manquements fiscaux en serait complexifiée. L’incohérence juridique de l’absence de reconnaissance de la qualification de punition des procédures d’imposition d’office s’explique ainsi par la nécessité d’assurer l’efficience du système d’imposition par le biais d’une lutte elle-même efficiente contre l’incivisme fiscal.
Outre cette décision du Conseil d’État, deux arrêts de la CAA de Paris refusant la qualification de punition à des dispositifs fiscaux doivent être rapportés. Le premier concerne l’allongement du délai de reprise prévu à l’article L. 188 B du LPF N° Lexbase : L6057LMB s’appliquant lorsque l’administration a, dans le délai de reprise, déposé une plainte ayant abouti à l’ouverture d’une enquête judiciaire pour fraude fiscale [15]. Les juges affirment que ce mécanisme « n’ayant d’autre objet que d’allonger le délai de reprise dont dispose l’administration », il ne peut pas être analysé « comme ayant le caractère d’une sanction d’un comportement ». À l’instar de la décision du Conseil d’État, la solution est critiquable : le mécanisme est conditionné à un manquement du contribuable et le prive de la garantie de la limitation temporelle du délai de reprise de l’administration. L’extension du délai de reprise et la limitation de la prescription n’entraînent pas l’obligation de payer une charge fiscale supérieure à celle initialement due par le contribuable. Néanmoins, cette imposition peut lui être réclamée pour une période censée être protégée par la sécurité juridique [16]. Le contribuable ne peut donc pas prétendre être libéré de l’obligation de se justifier [17]. La finalité de ce dispositif est donc de faire peser sur le contribuable ayant manqué à son devoir fiscal des obligations supplémentaires qui ne s’appliquent pas aux autres contribuables. Conformément à la volonté du législateur [18], ce « traitement spécial » constitue ainsi une sanction qui répond à un manquement du contribuable. N’ayant pas une finalité exclusivement indemnitaire [19], le dispositif peut donc être qualifié de punition à l’aune de la définition portée par les juges européens et nationaux. Si la reconnaissance jurisprudentielle de cette qualification a déjà été effectuée concernant un dispositif similaire [20], l’arrêt rapporté s’y oppose. Juridiquement incohérente, la solution retenue se comprend par la volonté des juridictions de ne pas complexifier le travail de contrôle des agents de l’administration fiscale en raison de l’application des garanties du régime répressif -telles la nécessité et la proportionnalité des punitions- qui auraient pour effets de protéger certains comportements déviants visés.
Le second arrêt rapporté de la CAA de Paris porte sur la qualification de l’intérêt de retard de l’article 1727 du CGI [21]. En l’espèce, le contribuable arguait de la qualification répressive de l’intérêt de retard pour que le principe de rétroactivité de la loi répressive plus douce puisse être appliquée. L’enjeu était donc de bénéficier rétroactivement du taux d’intérêt mensuel de 0,20% institué par la loi du 28 décembre 2017 plutôt que du taux mensuel de 0,40% antérieurement en vigueur. De manière prévisible [22], les juges rejettent le moyen en rappelant que l’intérêt de retard fiscal prévu à l’article 1727 du CGI vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l’État à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l’impôt aux dates légales. L’évolution des taux du marché ne confère pas pour autant à cet intérêt fiscal la nature d’une punition, dès lors que son niveau n’est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié, dont la durée d’emprunt n’est pas connue. L’arrêt précise que le taux de l’intérêt fiscal ne peut d’ailleurs pas être comparé avec les taux d’émission des obligations assimilables du Trésor (OAT) et des bons du Trésor à taux fixe (BTF), appliqués aux créanciers de l’État dans le cadre d’un emprunt pour une durée déterminée. En l’espèce, la différence entre le taux annuel d’intérêt de retard fiscal fixé à 4,80 % et le taux annuel du marché de référence établi à 2,40 % (soit le double !) n’est pas jugé comme entrainant la qualification punition. La rétroactivité in mitius est donc considérée comme inapplicable.
I.Les manquements aux obligations fiscales
S’agissant des manquements aux obligations fiscales, une seule décision notable a été sélectionnée. Relative à l’obligation déclarative, elle traite de la répression de l’irrégularité comptable délibérée.
Par une décision rendue en formation de plénière fiscale, le Conseil d’État admet que l’administration inflige la majoration de 40 % pour manquement délibéré à une société ayant intentionnellement comptabilisé une dette au nom d’un autre créancier que le créancier réel [23]. Dans un premier temps, le juge affirme en effet qu’est sans incidence sur le bien-fondé des rehaussements en litige, le fait que la société ait comptabilisé une dette injustifiée envers un associé alors que le prêt avait en réalité été consenti par l’associé gérant au moyen de fonds provenant d’un compte à l’étranger non déclaré dont celui-ci était titulaire, « dans la mesure où [la société] ayant délibérément omis de faire figurer la dette correspondante au passif de son bilan, elle ne pouvait solliciter la correction de cette omission ». Dans ces circonstances, l’erreur comptable délibérée est alors opposable au contribuable qui l’a commise, contrairement aux erreurs involontaires qui sont rectifiables [24]. Rappelant ainsi la solution jurisprudentielle de principe permettant d’opposer au contribuable ses erreurs comptables délibérées influant sur son bilan [25], la plénière fiscale du Conseil d’État refuse d’étendre sa jurisprudence d’exception selon laquelle l’irrégularité comptable délibérée ne saurait fonder un rehaussement lorsqu’elle est sans incidence sur l’actif net d’une société dès lors qu’une compensation est techniquement réalisable en raison de l’identité de créancier [26]. La solution rendue est toutefois sévère puisque le fait que la dette soit réelle et effectivement inscrite au passif mais au nom d’un autre titulaire n’a pas d’incidence sur l’actif net. Plus encore, la suppression de la dette en tant qu’elle n’est pas au nom de son véritable créancier entraine l’augmentation du bénéfice imposable à due concurrence alors que, parallèlement, la prise en compte de la dette au nom de son véritable créancier est refusée. Prétendument amoral [27], le droit fiscal est ainsi curieusement mobilisé dans une finalité moralisatrice : alors que l’erreur n’a aucune incidence sur le bénéfice imposable, le contribuable est taxé sur un bénéfice fictif en raison de son comportement dissimulateur d’information.
Dans cette optique, et dans un second temps, le Conseil d’État confirme logiquement l’arrêt d’appel qui a validé l’infliction de la majoration de 40 % pour manquement délibéré au motif que « le gérant de la société ne pouvait ignorer la provenance réelle de la somme comptabilisée au crédit du compte courant d’associé de [l’associé faussement prêteur] et [que] le maintien au passif du bilan pendant plusieurs exercices successifs d’une dette non justifiée d’un montant important ne pouvait être regardé comme une simple erreur commise de bonne foi ». Ainsi appliquée en cas d’erreur comptable délibérée portant -uniquement- sur l’identité d’un créancier, la pénalité de 40 % prévu au a. de l’article 1729 du CGI réprime implicitement le comportement du contribuable qui a cherché, sur plusieurs exercices, à dissimuler la véritable provenance des fonds prêtés alors qu’aucune élusion d’impôt n’a été effectuée au niveau de la société. S’il en était besoin, cette décision rappelle finalement l’importance de la transparence et de la bonne foi en matière de comptabilité : « on ne badine pas avec les écritures comptables » [28].
II. L’infliction des punitions administratives fiscales
Sur le semestre étudié, certaines décisions portent sur le champ d’application et la conventionnalité de certaines punitions encourues (A) alors que d’autres apportent des éclairages relatifs au régime des punitions administratives fiscales (B).
1) L’assiette de la majoration de 40 % de l’article 1728 du CGI
Dans un avis du 4 janvier 2024 [29], le Conseil d’État s’est prononcé sur l’assiette à retenir pour l’application des majorations prévues aux articles 1728 N° Lexbase : L1445MDU et 1758 A N° Lexbase : L3181LCS du CGI en cas de défaut, retard ou insuffisance de déclaration en matière d’impôt sur le revenu. Après avoir rappelé que les majorations contribuent à l’objectif à valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale [30] afin d’assurer l’égalité devant les charges publiques [31], la haute juridiction s’appuie implicitement sur la jurisprudence constitutionnelle considérant que la privation pour le contribuable de la possibilité de déduire de l’impôt rappelé les déficits ou réductions dont il dispose ou bénéficie (CGI, art. 1731 bis) ne fait que conférer une effectivité renforcée à la répression des manquements en question [32]. Par ailleurs, le Conseil d’État relève qu’en matière d’impôt sur le revenu, le montant des droits mis à la charge des contribuables est fixé par voie de rôle indépendamment, le cas échéant, des versements non libératoires déjà versés (acomptes [33] ou prélèvements à la source [34]). Le Conseil d’État en déduit alors que cette assiette à retenir pour l’application de ces majorations correspond « au montant des droits dû tel que mentionné au rôle, sans déduction des éventuels acomptes et retenues déjà versés ». Ayant sollicité l’avis, le tribunal administratif de Grenoble a donc repris le raisonnement du Conseil d’État en ajoutant que le contribuable « ne peut prétendre au bénéfice des déficits mentionnés aux I et I bis de l’article 156 non plus qu’à des réductions d’impôt » [35]. Il rejette alors la demande de décharge du contribuable arguant que l’administration aurait dû tenir compte, pour le calcul de l’assiette de la majoration de 40 %, des paiements dont il s’était déjà acquitté par prélèvements à la source, de son déficit foncier ainsi que de diverses réductions d’impôt.
L’avis rendu est toutefois critiquable d’abord en ce qu’il induit que les montants versés dans le cadre du prélèvement à la source ne réduisent pas l’assiette de la majoration alors que ceux versés dans le cadre du prélèvement forfaitaire unique, qui constitue un prélèvement libératoire, devraient quant à eux réduire l’assiette de calcul de la majoration. Si une telle différence en fonction de l’origine des revenus interroge au regard de l’égalité des contribuables devant la loi répressive, elle ne semble cependant pas pouvoir être utilement invoquée au regard de la jurisprudence constitutionnelle refusant de censurer des dispositifs lorsque les contribuables ne sont pas placés dans une même situation [36].
Plus encore, le Conseil d’État ne fait ensuite aucune distinction entre d’une part un contribuable qui aurait omis de déclarer mais qui aurait versé des acomptes d’impôts au cours de l’année et d’autre part un contribuable qui, n’ayant pas non plus réalisé de déclaration, n’aurait versé aucun acompte ni payé aucune retenue à la source. L’avis diffère alors de la solution adoptée en matière de TVA dans laquelle l’assiette de la majoration correspond au reliquat dû par le redevable placé sous le régime simplifié [37] et, en l’absence de cohérence entre les solutions, interroge quant à celle qui sera retenue en matière d’impôt sur les sociétés [38]. Sur ce point, la CAA de Toulouse a d’ailleurs depuis pris position en considérant, de façon inédite, que l’assiette de la majoration de 40 % de l’article 1728 du CGI correspond au montant d’impôt sur les sociétés dû sans déduction des éventuels acomptes déjà versés mais déduction faite du crédit d’impôt compétitivité et emploi dont le contribuable dispose [39]. Si les juges grenoblois ont refusé de prendre en compte les déficits et réductions d’impôt invoqués par le contribuable, les juges toulousains ont quant à eux retenu que ce crédit d’impôt « ne constitue pas une simple modalité de paiement mais intervient dans le calcul de l’impôt dès lors qu’il a pour effet de diminuer le montant des droits dus par le contribuable ». S’agissant de l’IS, l’arrêt de la CAA de Toulouse ouvre donc la voie à une déduction des crédits d’impôt du montant des droits pour la détermination de l’assiette des pénalités fiscales. Loin d’être pleinement cohérente et unifiée, la jurisprudence sera donc certainement encore développée.
Même si, contrairement à l’intérêt de retard, la finalité de la majoration de l’article 1728 est de punir un comportement sans tenir compte du préjudice subi par le Trésor, la solution du Conseil d’État est enfin particulièrement sévère en pratique : un contribuable qui s’est acquitté de 90 000 euros d’impôt par des retenues à la source mais a commis un manquement déclaratif et fait l’objet d’un rehaussement de 100 000 euros de droits en principal se verra appliquer une majoration de 10 % (par exemple) sur 100 000 euros et non sur les seuls 10 000 euros non perçus par le Trésor. Le montant de la pénalité de 10 %, représentant alors 100 % de la somme non perçue par le Trésor, conduit à s’interroger sur la proportionnalité in concreto de la punition au regard du droit du Conseil de l’Europe. Si l’espoir d’une modulation de la punition sur le fondement de l’article 6, §1 de la Conv. ESDH est vain [40], l’article 1er du 1er protocole additionnel à la Conv. ESDH semble, au cas par cas, pouvoir être mobilisé lorsque la charge financière exigée du contribuable apparaît excessive par rapport au manquement commis [41]. Le récent arrêt « Waldner c/ France » semble d’ailleurs en ce sens [42].
2) La conventionnalité conditionnée de la majoration de 25 % pour non-adhésion à un organisme de gestion agréé
Dans arrêt « Waldner c/ France » de la fin d’année 2023, la CEDH a considéré la majoration de 25 % appliquée aux professionnels non adhérents à un organisme de gestion agréé [43] incompatible avec l’article 1er du 1er protocole additionnel à la Conv. ESDH [44]. La CEDH a ainsi invalidé l’analyse que le Conseil d’État avait retenue [45] et a condamné la France. Remplaçant un abattement de 20 % depuis la refonte du barème de l’impôt sur le revenu [46], cette majoration revenait en effet à augmenter l’assiette de l’imposition des professionnels indépendants n’ayant pas soit adhéré à un organisme de gestion agréé soit recouru à un professionnel agréé pour établir leur comptabilité. La majoration s’appliquait alors même que ces contribuables avaient rempli leurs obligations déclaratives et que leur bonne foi n’était pas contestée. Toutefois, « Dès lors que l’imposition majorée était basée sur des revenus du requérant dont la perception n’avait pas été démontrée, la Cour considère que les dispositions fiscales applicables consistaient bien à imposer des revenus pouvant être qualifiés de “ fictifs ” au stade de la déclaration d’impôt […] Or, la Cour considère que le fait que le requérant ait respecté ses obligations au regard de la législation fiscale et que sa bonne foi n’ait pas été mise en doute revêt une certaine importance dans l’appréciation du caractère raisonnable des mesures prises par l’État pour parvenir au recouvrement optimal de l’impôt » (§53). Dans les circonstances particulières de l’espèce, la Cour juge alors que les modalités prévues pour assurer le paiement de l’impôt n’ont pas suffisamment reposé sur une « base raisonnable » (§59), dès lors qu’elles sont contraires à « la philosophie générale d’un système fondé sur les déclarations présumées faites de bonne foi du contribuable » (§58) et qu’elles conduisent « de facto, [a] sanctionn[er] plus sévèrement le requérant que tout autre contribuable dont la déclaration d’impôt est inexacte mais dont la bonne foi est présumée » (§55). De plus, le taux de 25 % de la majoration automatiquement applicable est jugé comme entraînant « une surcharge financière disproportionnée à l’encontre du requérant » (§59), de sorte que le juste équilibre devant exister entre les impératifs de l’intérêt général et ceux de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu a été rompu.
La Cour EDH ayant été particulièrement sensible à l’absence de remise en cause de la bonne foi et de la diligence fiscale du requérant, la solution apparaît difficilement duplicable pour les dispositifs réprimant un manquement à une obligation fiscale pour lequel la bonne foi du contribuable est remise en cause. L’arrêt ouvre cependant quelques perspectives pour les punitions infligées, dont les montants sont particulièrement importants, sans que la bonne foi du contribuable ne soit questionnée. Même s’il porte sur un dispositif abrogé, la portée de l’arrêt n’est donc pas neutre en droit français. Preuve en est : suite à l’arrêt de la CEDH, l’administration a parfois déchargé le contribuable de la majoration en question avant même que les juges ne se prononcent [47] et différentes juridictions du fond [48], après avoir rappelé la solution de la Cour de Strasbourg, ont jugé que l’application de l’ancienne majoration de 25 % de l’article 158, 7°, 1 du CGI N° Lexbase : L5202MMM à des contribuables dont la bonne foi n’est pas remise en cause est inconventionnelle et doit être écartée. Conformément à l’arrêt « Waldner c/ France », la solution est cependant différente et l’inconventionnalité n’est pas prononcée lorsque la même majoration est appliquée à un contribuable ayant exercé une activité occulte [49]. Une divergence entre les juges du fond existant toutefois dans cette dernière situation [50] et l’extension (selon nous injustifiée) de jurisprudence « Waldner c/ France » au 2° du même article 158, 7 du CGI (majoration de 25 % pour les revenus réputés distribués) ayant été largement refusée [51], le Conseil d’État pourrait (de nouveau, puisque consécutivement à l’arrêt de la CEDH) avoir à se prononcer et, à cette occasion, devrait notamment revoir sa position de 2015.
B. Le régime des punitions administratives fiscales
1) Le caractère relatif de la transaction fiscale
À l’issue d’une procédure de vérification de comptabilité, des rectifications ont été proposées à une société en matière de TVA, avec application de la majoration pour de manquement délibéré, et d’impôt sur les sociétés, consistant en la réintégration d’un passif injustifié. Le 21 mars 2016, la société a conclu une transaction avec l’administration fiscale permettant de réduire la pénalité en contrepartie de l’acceptation des rectifications et du paiement des impositions supplémentaires. Parallèlement, dans le cadre d’une procédure de contrôle sur pièces, l’administration fiscale a adressé à la société, le 11 mars 2016, une proposition de rectification du résultat imposable à l’impôt sur les sociétés au titre de l’exercice clos en 2014 à raison de la remise en cause de la déduction d’un mali de fusion. La société, suivie par les juges du fond, arguait alors que la transaction conclue faisait obstacle au rehaussement issu de la seconde procédure. Le Conseil d’État ne l’a pas suivi en rappelant [52] que les dispositions de l’article L. 51 du LPF N° Lexbase : L1198MLX ne font pas obstacle à ce que, à la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale corrige dans le délai de reprise les insuffisances ou erreurs dont la découverte résulte de l’examen du dossier du contribuable, dans le cadre d’un contrôle sur pièces au titre du même impôt et de la même période. Il en déduit alors que « la conclusion d’une transaction à l’issue d’une première procédure de contrôle ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que, sans préjudice des dispositions de l’article L. 51 du Livre des procédures fiscales, l’administration fiscale rectifie, dans le cadre d’une seconde procédure, même concomitante, les bases imposables du contribuable au titre des mêmes impôts et de la même période que ceux couverts par la transaction, à raison de chefs de rectification distincts » [53]. Par suite, les suppléments d’impôt sur les sociétés mis à la charge du contribuable n’ayant en l’espèce, dans les deux procédures suivies portant sur le même exercice, pas les mêmes chefs de rectification, la transaction conclue à l’issue de la première procédure ne pouvait pas avoir d’incidence sur la charge fiscale supplémentaire résultant de la seconde procédure. En affirmant que les rehaussements opérés distinctement à la suite d’un contrôle sur pièces n’entraient pas dans le champ de la transaction précédemment conclue, le Conseil d’État confirme ainsi -logiquement- le caractère relatif des transactions fiscales [54] découlant de la nature conventionnelle de celle-ci.
2) L’articulation des répressions administrative et pénale
Dans une décision du 5 février 2024 [55], le Conseil d’État a complété les jurisprudences -établies sur des fondements différents- des Cours européennes, du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation relatives au cumul des répressions administrative et pénale en matière fiscale en affirmant qu’il appartient au juge administratif de réduire les punitions administratives qui contreviendraient à la règle constitutionnelle du cumul plafonné des punitions [56]. Si cette précision sur l’office du juge est heureuse et confirme que les contribuables doivent systématiquement interroger le juge administratif sur la proportionnalité du cumul des punitions fiscales, la décision apparaît toutefois d’une portée limitée en raison des évolutions des quanta des peines qui ont réduit les risques de dépassement du plafond du cumul des punitions autorisé.
L’avancée relative à l’office du juge dans son contrôle du cumul plafonné des punitions fiscales est par ailleurs contrariée par la restriction du champ d’application de la réserve constitutionnelle opérée dans la décision commentée. Le Conseil d’État affirme en effet qu’un contribuable qui a été condamné à des peines pour « un concours d’infractions de fraude fiscale » (en matière de TVA et d’impôt sur le revenu) « et non à raison des seuls faits pour lesquels les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu mises à la charge de son foyer fiscal ont été assorties de la majoration de 40 % prévue au b du 1 de l’article 1728 du Code général des impôts », ne peut se prévaloir de la réserve constitutionnelle encadrant le cumul des punitions. En l’espèce, les peines prononcées par le juge pénal réprimant à la fois un délit de fraude fiscale en matière de TVA et un délit de fraude fiscale portant sur l’impôt sur le revenu, seul le second délit était également réprimé par la majoration administrative. Selon les juges du Palais Royal, cette différence de champ répressif des peines et de la majoration exclut l’application de la réserve constitutionnelle. L’affirmation surprend puisque l’administration ne dépose plainte ou ne transmet un dossier au procureur de la République pour fraude fiscale quasiment que dans des hypothèses où la répression administrative est appliquée (même par voie transactionnelle) [57]. La solution paraît en outre sévère en raison des champs des deux répressions qui étaient en l’espèce en partie communs (soustraction à l’impôt sur le revenu). Au lieu de priver totalement le contribuable de la garantie constitutionnelle de proportionnalité au motif que la peine réprimait un concours d’infractions, le juge aurait dû permettre au contribuable de bénéficier de l’application de la réserve a minima sur la partie commune des répressions (la clé de répartition des peines liées aux délits étant à définir [58]). La lecture restrictive du champ d’application de la garantie conduit à restreindre exagérément l’applicabilité de la réserve. Cette restriction est d’autant plus artificielle en l’espèce qu’il ressort des conclusions du rapporteur public que le contribuable avait également subi des majorations fiscales en matière de TVA mais ne les avait pas contestées devant la juridiction administrative d’appel.
Pour justifier l’inapplicabilité de la réserve sur le cumul plafonné des punitions, le Conseil d’État affirme en outre dans sa décision que la majoration de 40 % de l’article 1728 du CGI « revêtant une nature différente de la peine de confiscation prononcée par le juge pénal, le cumul de ces deux sanctions ne saurait méconnaître cette réserve d’interprétation » (§10). Si la précision apportée est conforme à la position retenue par la Cour de cassation qui affirme que la réserve constitutionnelle ne concerne que les sanctions de « même nature » [59] et que « seule l’amende est considérée comme étant de même nature que les majorations fiscales, ce qui exclut d’autres peines telles que les mesures de confiscation » [60], elle interroge sur sa cohérence avec la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne qui refuse l’infliction non contrôlée de punitions de formes différentes au visa de l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne [61]. La norme de référence n’est certes pas la même et, en l’espèce, le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur une punition appliquée à une imposition entrant dans le champ d’application du droit de l’Union européenne. La recherche d’une cohérence globale dans l’application du cumul des punitions fiscales devrait toutefois conduire au respect tant des exigences constitutionnelles que des arrêts rendus par la CJUE ; à défaut, un risque d’incohérence de jurisprudence existe selon que l’affaire traitée est dans le champ du droit de l’Union européenne ou uniquement dans celui du droit du Conseil de l’Europe.
De manière classique, le Conseil d’État rappelle enfin que la réserve française à l’article 4 du Protocole n° 7 à la Conv. ESDH -dont il s’estime incompétent pour contrôler la validité- empêche l’application de la règle non bis in idem en dehors de la matière pénale au sens du droit interne. Si l’incertitude -relative- de l’appréciation de la réserve française par la Cour de Strasbourg entretient l’incertitude sur l’applicabilité de celle-ci, l’absence de recours à la demande d’avis consultatif de la Cour EDH [62] traduit la volonté des juridictions internes d’éviter de prendre la responsabilité des conséquences qu’emporterait l’invalidation de la réserve sur le système répressif français. Dans cette hypothèse, elles devraient en effet se prononcer sur la dissociabilité de la réserve à l’égard des stipulations de l’article 4 et, en cas de réponse positive, l’absence de « lien matériel et temporel suffisamment étroit » [63] entre les voies de répression pour permettre leur cumul risquerait d’entraîner d’importantes conséquences sur l’articulation des répressions. La Cour de Strasbourg affirmant que le lien temporel est rompu lorsqu’un délai de plus d’un an sépare les décisions définitives d’infliction des punitions administratives et pénales [64], un doute sérieux apparaît d’ailleurs sur l’articulation des répressions au cas d’espèce puisque la décision définitive de condamnation pénale a été rendue en 2019 alors que les pénalités administratives ont été infligées dans des propositions de rectifications du 17 décembre 2012 et 28 juin 2013 [65]. Un recours devant la Cour européenne serait ainsi opportun afin de réaliser une véritable avancée dans la pleine intégration en droit fiscal français de la règle non bis in idem.
Si la décision rendue confirme finalement logiquement l’office du juge administratif lorsqu’il se prononce sur le cumul des répressions administrative et pénale en matière fiscale, l’appréhension restrictive de la règle du cumul plafonné des punitions interroge en ce qu’elle conduit à en limiter fortement l’applicabilité. Heureusement, cette règle constitutionnelle trouve encore des cas d’application et a ainsi pu conduire les juges du fond à minorer la majoration de 80 % visée à l’art 1729, c du CGI (en l’espèce 707 184 euros) du montant de l’amende prononcée dans la condamnation pénale pour fraude fiscale (30 000 euros) intervenue à l’égard du même contribuable pour les mêmes faits [66].
[1] V. par ex. Cons. const., 30 décembre 1982, no 82-155 DC N° Lexbase : A8054ACB ; Cons. const., décision n° 2012-239 QPC, du 4 mai 2012 N° Lexbase : A5657IKQ.
[2] V. par ex. : CAA Douai., 13 juin 2007, no 06DA00941 N° Lexbase : A2604DXQ ; CAA Versailles, 7 juin 2011, no 09VE02490.
[3] CE 8° ch., 28 février 2024, n° 488020, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A41702QI.
[4] V. déjà en ce sens et pour plus de développements : A. Perin-Dureau, L’obligation fiscale à l’épreuve des droits et libertés fondamentaux, Dalloz, 2012, §633 ; C.-H. Hardy, La répression en matière fiscale en France, 1789-2019, Éditions IRJS, 2023, §192-222 ; Ch. de la Mardière, La déclaration fiscale, RFFP ; 2000, no 71, p. 130.
[5] V. par ex. CE Contentieux, 29 juillet 1998, n° 172175 N° Lexbase : A7999AS3. La même solution est retenue par le juge judiciaire (Cass. com., 6 mars 2007, n° 05-17.261, F-P+B N° Lexbase : A5930DU8).
[6] V. par ex. V. par ex., CE Contentieux, 10 octobre 2001, n° 199333 N° Lexbase : A1916AXA.
[7] LPF, art. L. 193 N° Lexbase : L8356AE9 et R. 193-1 N° Lexbase : L1588IN7.
[8] V. par ex. CE 10° et 9° ssr., 10 avril 2009, no 297040 N° Lexbase : A0042EGN ; CAA Versailles, 14 juin 2011, no 09VE03099 N° Lexbase : A9089HWK.
[9] BOI-CF-IOR-50-10-20-20, du 28 juillet 2016.
[10] CEDH, 8 juin 1976, Req. 5100/71, Engel et autres N° Lexbase : A5111AYX.
[11] CEDH, 24 février 1994, Req. 12547/86, BENDENOUN c/ FRANCE N° Lexbase : A0346ND8 ; CEDH, 23 novembre 2006, Req. 73053/01, JUSSILA c/ FINLANDE N° Lexbase : A5011DSE.
[12] V. par ex. CGI, arts. 1728 N° Lexbase : L1445MDU et 1732 N° Lexbase : L0571LZ8.
[13] CGI, arts. 1741 N° Lexbase : L1203ML7 1746 N° Lexbase : L3322IQ4.
[14] C. Baylac, L’administration est délivrée de l’obligation d’information au cours de la procédure d’évaluation d’office pour opposition à contrôle fiscal, Dr. fisc. 2008, no 49, comm. 612, no 13 (note sous CE 3° et 8° ssr., 6 octobre 2008, n° 299933, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7093EAX).
[15] CAA Paris, 17 mai 2024, n° 21PA06237 N° Lexbase : A00255CW.
[16] CE Contentieux, 24 mars 2006, n° 288460, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7837DNL.
[17] Plus globalement, sur le refus des juges de prendre en compte l’éloignement des preuves, v. E. Joannard-Lardant, L’établissement processuel de la preuve fiscale : Essai de droit comparé interne, L’Harmattan, 2019, p. 674-680, §1155-1167.
[18] G. Carrez, Rapport AN no 2132, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2009, enregistré le 2 décembre 2009, p. 279 et 281 ; N. Bricq, Rapport Sénat no 164, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011, enregistré le 7 décembre 2011, p. 340.
[19] Conf. par ex. les rapports parlementaires no 2132 et no 164 précités (ibid.) ; V. aussi, BOI-CF-PGR-10-70, du 29 décembre 2016, §1 N° Lexbase : X7400ALN.
[20] CA Pau, 30 avril 2013, n° 13/1881 N° Lexbase : A9252KCN.
[21] CAA de Paris, 27 juin 2024, n° 22PA02511 N° Lexbase : A82795L9.
[22] V. par ex. CE Contentieux, 12 avril 2002, n° 239693, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6303AY4 ;
CE 3° et 8° ssr., 27 avril 2009, n° 308444 N° Lexbase : A6417EGR et n° 308445 N° Lexbase : A6418EGS.
[23] CE Contentieux, 22 mars 2024, n° 471089, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A47272WY : Dr. fisc. 2024, n° 20, comm. 230, note A.-G. Hamonic-Gaux.
[24] CE Contentieux, 7 juillet 2004, n° 230169 N° Lexbase : A0698DD9.
[25] V. par ex. CE 8° et 9° ssr., 12 mai 1997, n° 160777 N° Lexbase : A9837ADP.
[26] CE 3° et 8° ssr., 25 mars 2013, n° 355035, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3277KBY ; V. sur le sujet G. Dedeurwaerder, La distinction des erreurs et des décisions de gestion - Essai de présentation renouvelée d’une théorie générale : Dr. fisc. 2014, n° 28, comm. 427.
[27] V. par ex. CE 3° et 8° ssr., 24 mai 2006, n° 274471 N° Lexbase : A6697DPQ ; (Déductibilité des dépenses illicites en matière d’acte anormal de gestion) ; CJCE, 28 mai 1998, aff. C-3/97, Procédure pénale c/ John Charles Goodwin et Edward Thomas Unstead N° Lexbase : A2012AID (absence de taxation des activités illicites à la TVA sauf si elles entrent en concurrence avec les activités licites).
[28] M. Cozian, On ne badine pas avec les écritures comptables, La théorie des erreurs comptables délibérées : Dr. fisc. 1999, n° 20, ét. 100181.
[29] CE 9° et 10° ch.-r., 4 janvier 2024, n° 488915, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A61872C7.
[30] Par ex. Cons. const., décision n° 2016-564 QPC, du 16 septembre 2016, consid. 4 et 5 N° Lexbase : A2487R3I.
[31] Cons. const., décision n° 2010-105/106 QPC, du 17 mars 2011, consid. 5 et 6 N° Lexbase : A8914HC7 consid. 5 et 6.
[32] Cons. const., décision n° 2016-564 QPC, du 16 septembre 2016, consid. 4 et 5.
[33] CGI, art. 1664 N° Lexbase : L9142LKS.
[34] CGI, art. 204 A N° Lexbase : L7925LGM.
[35] TA Grenoble, 15 février 2024, n° 2108203 N° Lexbase : A11252NY.
[36] V. par ex. Cons. const., décision n° 2016-564 QPC, du 16 septembre 2016, consid. 10 ; Cons. const., décision n° 2016-618 QPC, du 16 mars 2017, consid. 14 N° Lexbase : A3169T8U (Amende pour défaut de déclaration de trust).
[37] CE 3° et 8° ch.-r., 20 septembre 2019, n° 428750, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3224ZP4.
[38] V., sous toute réserve, par analogie, CE 9° et 10° ssr., 20 mars 2013, n° 347633, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8551KAX (le calcul de la réserve de participation des salariés est effectué sur l’IS dû sans tenir compte du montant du crédit d’impôt recherche).
[39] CAA Toulouse, 23 mai 2024, n° 22TL21736 N° Lexbase : A94105CI.
[40] Par ex. CE 3° et 8° ssr., 27 juin 2008, n° 301342, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3541D9Z , 27 juin 2008, no 301342 et n° 301343, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3542D93 ; CEDH, 7 juin 2012, no 4837/06, Segame SA c/ France, §59 N° Lexbase : A6665IN8.
[41] CEDH, 11 janvier 2007, no 35533/04, Mamidakis c/ Grèce N° Lexbase : A4568DTD.
[42] CEDH, 7 décembre 2023, Req. 26604/16, Waldner c/ France N° Lexbase : A727217H.
[43] CGI, art. 158, 7, 1° (abrogé par L. n° 2020-1721, 29 décembre 2020, de finances pour 2021, art. 34).
[44] CEDH, 7 décembre 2023, Req. 26604/16, Waldner c/ France N° Lexbase : A727217H : Dr. fisc. 2024, n° 19, ét. 263, obs. L. Ayrault.
[45] CE 9° et 10° ssr., 9 novembre 2015, n° 366457 N° Lexbase : A3589NWT ; V. D. Gutmann, La portée de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme en matière fiscale, Dr. fisc. 2016, n° 38, étude 501.
[46] Loi n° 2005-1719, du 30 décembre 2005, de finances pour 2006, art. 76 N° Lexbase : L6429HET.
[47] CAA Marseille, 31 mai 2024, n° 22MA01710 N° Lexbase : A24885GA ; CAA Lyon, 11 juillet 2024, 22LY03041 N° Lexbase : A07605Q9 ; CAA Nantes, 16 juillet 2024, n° 23NT00754 N° Lexbase : A39365R9.
[48] TA Caen, 26 janvier 2024, n° 2102488 N° Lexbase : A10852IZ ; CAA Douai, 14 mars 2024, n° 22DA01150, 22DA01151, 22DA01152, 22DA01153 N° Lexbase : A22782WB.
[49] CAA Paris, 31 mai 2024, n° 23PA04629 N° Lexbase : A37555ES.
[50] CAA Versailles, 6 juin 2024, n° 21VE02503 N° Lexbase : A52975GB (l’inconventionnalité est prononcée « sans qu’y fasse obstacle la circonstance […] que l’intéressée relevait de la procédure d’imposition d’office à raison d’une activité occulte illicite »).
[51] CAA Douai, 25 janvier 2024, n° 23DA00238 N° Lexbase : A72512IE ; CAA Paris, 6 mars 2024, n° 22PA03057 N° Lexbase : A95622SX ; CAA de Douai, 11 avril 2024, n° 23DA00092 N° Lexbase : A806727W ; CAA Versailles, 20 juin 2024, n° 21VE02027 N° Lexbase : A17125KM ; CAA Versailles, 2 juillet 2024, n° 22VE01881 N° Lexbase : A58605MY.
[52] V. CE 9° et 8° ssr., 17 juin 1996, n° 140510 N° Lexbase : A9603ANY.
[53] CE 9° et 10° ch.-r., 5 février 2024, n° 470616, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A53942KY.
[54] Le CE avait déjà affirmé que la transaction ne lie pas l’administration s’agissant des pénalités qui sont hors du champ de la transaction (CE 9° et 10° ssr., 24 mars 2006, n° 257533 N° Lexbase : A7788DNR).
[55] CE 3° et 8° ch.-r., 5 février 2024, n° 472284, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A53932KX. Pour de plus amples analyses de cette décision, v. not. C.-H. Hardy, Cumul des punitions fiscales : confirmation de l’office du juge et éviction de la règle du plafonnement, Les Nouvelles fiscales, n° 1355-10.
[56] V. not. Cons. const., décision n° 2016-545 QPC, du 24 juin 2016, consid. 24 N° Lexbase : A0909RU9 ; Cons. const., décision n° 2018-745 QPC, du 23 novembre 2018, consid. 22 N° Lexbase : A3978YMB ; Cons. const., décision n° 2022-988 QPC, du 8 avril 2022, consid. 7 N° Lexbase : A49337SI.
[57] LPF, art. L. 228 N° Lexbase : L6506LUI ; CIF, Rapport d’activité 2022, p. 6 et 8. Par exception, la plainte est aussi déposée pour mettre en œuvre une procédure judiciaire d’enquête fiscale alors que les sanctions administratives ne sont pas encore appliquées.
[58] Pour des pistes de réflexion sur cette clé de répartition, v. S. Detraz, Proportionnalité de la répression de la fraude fiscale en cas de déclarations de culpabilité multiples, Dr. fisc. 2024, n° 11, ét. 200.
[59] V. en ce sens, Cass. crim., 11 septembre 2019, n° 18-81.067, FS-P+B+R+I (§45-49)N° Lexbase : A9082ZMC et no 18-82.430 (§22-26) N° Lexbase : A9084ZME.
[60] Bull. d’information de la Ch. crim. n° 915, 1er fév. 2020, p. 21
[61] V. not. CJUE, 5 mai 2022, aff. C-570/20, BV, §50 N° Lexbase : A11807WM. Pour la CJUE, l’article 50 de la Charte, s’oppose à une réglementation nationale (en l’espèce celle de la France) « qui n’assure pas, dans les cas du cumul d’une sanction pécuniaire et d’une peine privative de liberté, par des règles claires et précises, […], que l’ensemble des sanctions infligées n’excède pas la gravité de l’infraction constatée ».
[62] Protocole n° 16.
[63] CEDH, 15 nov. 2016, Req. 24130/11 et 29758/11, A. et B. c/ Norvège, §130 N° Lexbase : A9900SGR ; CEDH, 1re sect., 18 mai 2017, Req. 22007/11, Jóhannesson et a. c/ Islande.
[64] CEDH, 18 mai 2017, Req. 22007/11, Jóhannesson et a. c/ Islande, §54 ; CEDH, 16 avr. 2019, Req. 72098/14, Bjarni Ármannsson c/ Islande, §56.
[65] V. les conclusions du rapporteur public R. Victor sous la décision.
[66] CAA Paris, 17 mai 2024, n° 21PA06237 N° Lexbase : A00255CW.
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Réf. : Communiqué DAJ
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N0285B3X
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par Yann Le Foll
Le 18 Septembre 2024
► La lettre de la DAJ n° 383 a été publiée le 11 septembre 2024 sur le site du ministère de l’Économie et des Finances.
Après un éditorial revenant sur la dimension internationale des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, la lettre revient dans sa partie « Institutions » sur la loi n° 2024-850, du 25 juillet 2024, visant à prévenir les ingérences étrangères en France N° Lexbase : L2160MNC. Il rappelle ensuite que les compétences des sections administratives du Conseil d’État ont été revues par un arrêté du 4 juillet 2024 N° Lexbase : L9390MMQ. Ce texte ajoute aux compétences de la section de l'intérieur, les affaires relatives aux juridictions commerciales et aux difficultés des entreprises.
Par ailleurs, il étend la compétence de la section de finances sur les affaires relatives à l'organisation économique des secteurs du commerce et des postes et aux communications électroniques, ainsi qu’aux affaires relatives au droit des sociétés. Parallèlement, échappent désormais à la compétence de la section des travaux publics les affaires relatives aux postes et aux communications électroniques.
Dans sa partie « Juridictions », elle indique que pour alléger la charge de travail de la Cour de justice de l’Union dans le domaine préjudiciel, six matières sont transférées au Tribunal de l’Union européenne à compter du 1er octobre 2024. Ces matières, qui représentent 20 % des renvois préjudiciels, sont les suivantes : le système commun de TVA ; les droits d’accise ; le Code des douanes (le classement tarifaire des marchandises dans la nomenclature combinée) ; l’indemnisation et l’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement ou de retard ou d’annulation de services de transport et le système de quotas d’émission de gaz à effet de serre.
Enfin, dans la partie « Commande publique », elle revient sur deux arrêts récents. Dans le premier, le Conseil d’État a dit pour droit qu’une offre ne peut être déclarée inacceptable au motif qu’elle excède les crédits budgétaires alloués au contrat que lorsque ce montant a été porté à la connaissance des candidats (CE, 2e-7e ch. réunies, 12 juin 2024, n° 475214, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A79715HP).
Dans le second, il considère que l'acheteur n'est pas tenu de suivre l'avis émis par le jury du concours et qu'il peut porter son choix sur tout candidat ayant participé au concours (CE, 2e-7e ch. réunies, 30 juillet 2024, n° 470756, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A24295UI).
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Réf. : Cass. soc., 11 septembre 2024, n° 23-60.107, F-B N° Lexbase : A53455YM
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N0318B38
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par Charlotte Moronval
Le 18 Septembre 2024
► La possibilité de rectifier l'attribution erronée des sièges à l'issue du scrutin ne s'applique pas en cas de vacance, consécutive à l'annulation de l'élection d’un salarié pour non-respect de la représentation équilibrée femmes-hommes
Faits et procédure. Une société organise les élections des membres de la délégation du personnel au CSE. A l'issue du premier tour du scrutin, tous les sièges ont été pourvus et a notamment été élue une femme, candidate du premier collège positionnée en tête d’une liste comprenant deux femmes et un homme, alors que trois sièges étaient à pourvoir et que les femmes, ne représentant que 15,9 % des effectifs dans ce collège, se trouvaient en position ultra minoritaire.
L’élection de cette femme est annulée, au regard du non-respect la part de femmes et d'hommes. Dès lors, le syndicat demande l’attribution du siège vacant à un autre candidat. Sa demande est rejetée par le tribunal judiciaire. Le syndicat forme un pourvoi en cassation.
La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale rejette le pourvoi.
Après avoir annulé l'élection de l’intéressée, en qualité de membre titulaire, au regard de la part de femmes et d'hommes que les listes devaient respecter et de son positionnement sur la liste de candidats, c'est à bon droit que le tribunal a refusé de faire droit à la demande d'attribution du siège devenu vacant à un autre candidat.
La Cour rappelle toutefois que des élections partielles peuvent être organisées à l'initiative de l'employeur si un collège électoral n'est plus représenté ou si le nombre des membres titulaires de la délégation du personnel du CSE est réduit de moitié ou plus, sauf si ces événements interviennent moins de six mois avant le terme du mandat des membres de la délégation du personnel du comité social et économique.
Pour aller plus loin :
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Réf. : CA Aix-en-Provence, 6 juin 2024, n° 23/13573 N° Lexbase : A41735HZ
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N0209B37
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par Pierre-Michel Le Corre, Professeur à l'Université Côte d'Azur, Directeur du Master 2 Administration et liquidation des entreprises en difficulté de la Faculté de droit de Nice, Membre CERDP (EA 1201)
Le 20 Septembre 2024
Mots-clés : rétablissement professionnel • disproportion entre le passif et l’actif • interdiction d’effacer les dettes • fin de la procédure de rétablissement professionnel sans clôture • ouverture de la liquidation judiciaire
Lorsque les dettes ne peuvent être effacées, en raison d’une disproportion entre le passif et l’actif, il y a lieu de mettre fin à la procédure de rétablissement professionnel et d’ouvrir une liquidation judiciaire.
La loi du 14 février 2022 (loi n° 2022-172 en faveur de l'activité professionnelle indépendante N° Lexbase : L3215MBP), qui a posé le nouveau statut de l’entrepreneur en créant de plein droit deux patrimoines, l’un professionnel, l’autre non professionnel, a donné lieu à d’importantes adaptations du droit des entreprises en difficulté pour tenir compte de cette dualité patrimoniale. Cette loi a notamment modifié quelques règles en matière de rétablissement professionnel, en interdisant l’effacement de dettes au titre d’un patrimoine dont la situation n’est pas irrémédiablement compromise et surtout en posant la règle selon laquelle aucune dette ne peut être effacée lorsqu'il apparaît que le montant du passif total est disproportionné au regard de la valeur de l'actif, biens insaisissables de droit non compris. C’est cette dernière règle qui est au centre de l’intéressant arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Le 11 octobre 2018, le tribunal de commerce de Marseille ouvre une procédure de redressement judiciaire à l’égard d’un artisan, M. C., puis arrête un plan de redressement. Par jugement du 11 avril 2023, en application de l'article L. 631-20 du Code de commerce N° Lexbase : L9179L74, le tribunal de commerce de Marseille a : (i) constaté l'inexécution du plan de redressement ; (ii) constaté l'état de cessation des paiements ; (iii) prononcé la résolution du plan de redressement ; (iv) sursis à statuer sur la demande de liquidation judiciaire ; (v) ouvert une procédure de rétablissement professionnel au bénéfice de M. C.
Sur le rapport en date du 29 août 2023 de Me Louis, mandataire judiciaire, le tribunal de commerce de Marseille, par jugement du 25 octobre 2023 considérant qu'au vu de la situation patrimoniale professionnelle de M. C., irrémédiablement compromise, compte tenu du montant du passif identifié et d'un montant d'actif inférieur à 15 000 euros, a estimé que l'effacement des dettes était impossible et, en conséquence, a mis fin à la procédure de rétablissement personnel et ouvert une procédure de liquidation judiciaire
Le ministère public a fait appel de ce jugement le 3 novembre 2023. Aux termes de la déclaration d'appel, l'appel porte sur les chefs du jugement critiqué, en ce qu'il a : (i) mis fin à la procédure de rétablissement professionnel ouverte au bénéfice de M. C. ; (ii) révoqué le sursis à statuer sur la liquidation judiciaire prononcé dans le jugement du 11 avril 2023 ; (iii) ouvert la procédure de liquidation judiciaire.
Dans ses dernières conclusions, le ministère public demande à la cour de : (i) déclarer son appel recevable et infirmer le jugement attaqué en « jugeant qu'il y a lieu de clôturer la procédure de rétablissement professionnel ouverte au bénéfice de M. [C] en mentionnant dans l'arrêt les dettes effacées grevant le patrimoine professionnel de M. [C] ».
La cour d’appel ne va pas faire droit à l’appel du ministère public, et confirmer le jugement attaqué en jugeant que « c'est à juste titre que le tribunal, au regard de la valeur de l'actif du débiteur, estimé hors biens de plein droit insaisissables, à moins de 15 000 euros, et du passif total s'élevant à la somme de 155 595,06 euros (142 245,52 + 13 349,54) a en a déduit qu'il y existait une disproportion manifeste, faisant obstacle à l'effacement des dettes du débiteur, en application de l'article L. 645-11 alinéa 3 N° Lexbase : L3701MBP et a, en conséquence, mis fin à la procédure de rétablissement professionnel et ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l'égard de M. C. ».
Cette décision nous apparaît partiellement critiquable.
Tout d’abord, nous partageons l’analyse de la cour d’appel quant à l’appréciation du caractère manifestement disproportionnée du passif par rapport à l’actif. Rappelons, que, comme le fait la cour d’appel, dans l’appréciation de l’actif, il faut faire abstraction de l’immeuble légalement insaisissable.
L'alinéa 3 de l’article L. 645-11 du Code de commerce, tel que modifié par la loi n° 2022-172 du 14 février 2022, est clair : « Aucune dette ne peut être effacée lorsqu'il apparaît que le montant du passif total est disproportionné au regard de la valeur de l'actif, biens insaisissables de droit non compris ». Il n’y a pas à ajouter au texte de loi comme tente de le faire le ministère public : peu importe le chiffre d’affaires, peu importe la durée pendant lequel le passif a été créé. Il faut, mais il suffit, qu’existe cette disproportion entre passif et actif.
Par conséquent, doit trouver à s’appliquer la règle nouvelle posée en 2022 par le législateur : aucune dette ne peut être effacée.
Mais faut-il pendre l’effet pour la cause ? Au prétexte qu’aucune dette ne peut être effacée, il faudrait selon les premiers juges et la cour d’appel, quitter la procédure de rétablissement professionnel. Pourtant les textes ne prévoient rien de tel. Le fait que le passif ne puisse être effacé n’est pas une condition de l’abandon de la procédure de rétablissement professionnel, même si cet effacement est la quête première du débiteur. Relisons les textes.
L’alinéa 1 de l’article L. 645-9 du Code de commerce N° Lexbase : L8811LQE prévoit que « A tout moment de la procédure de rétablissement professionnel, le tribunal peut, sur rapport du juge commis, ouvrir la procédure de liquidation judiciaire sur laquelle il a été sursis à statuer s'il est établi que le débiteur n'est pas de bonne foi ou si l'instruction a fait apparaître l'existence d'éléments susceptibles de donner lieu aux sanctions prévues par le titre V du présent livre ou à l'application des dispositions des articles L. 632-1 à L. 632-3 ».
L’alinéa 2 du même article ajoute que « La procédure de liquidation judiciaire est également ouverte s'il apparaît que les conditions d'ouverture de la procédure de rétablissement professionnel n'étaient pas réunies à la date à laquelle le tribunal a statué sur son ouverture ou ne le sont plus depuis ».
Par conséquent, les textes font apparaître qu’il y a lieu à ouverture de la liquidation judiciaire, après ouverture d’un rétablissement professionnel dans quatre cas. L’alinéa 1 vise trois cas : le débiteur n’est pas de bonne foi, ou s’il y a place à l’application des sanctions prévues par les articles L. 651-1 N° Lexbase : L3702MBQ et suivants du Code de commerce ou encore s’il y a place au jeu des nullités de la période suspecte. L’alinéa 3 vise un dernier cas : les conditions d’ouverture du rétablissement professionnel n’étaient pas réunies ou ne le sont plus. C’est sans doute sur ce dernier point qu’a cru devoir s’appuyer la cour d’appel : les conditions d’ouverture du rétablissement professionnel ne seraient pas réunies si le passif ne peut être effacé. En effet, la cour d’appel a énoncé qu’« il se déduit de l'application combinée de ces dispositions que doivent être examinées par la juridiction à l'issue de la période de quatre mois si les conditions ayant présidé à l'ouverture du rétablissement professionnel sont toujours réunies, et si les conditions sont réunies permettant ou non l'effacement des dettes ».
Mais nulle part, au stade des conditions d’ouverture de la procédure de rétablissement professionnel, il n’est fait état de cette exigence aux termes de laquelle les conditions d’ouverture de la procédure de rétablissement professionnel doivent permettre l’effacement des dettes. L’alinéa 1 de l’article L. 645-1 du code se contente d’indiquer qu’« Il est institué une procédure de rétablissement professionnel sans liquidation ouverte à tout débiteur, personne physique, mentionné au premier alinéa de l'article L. 640-2, en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible, n'a pas cessé son activité depuis plus d'un an, n'a employé aucun salarié au cours des six derniers mois et dont l'actif déclaré a une valeur inférieure à un montant fixé par décret en Conseil d'État ». L’alinéa 3 ajoute que « La procédure ne peut être ouverte en cas d'instance prud'homale en cours impliquant le débiteur au titre de l'un quelconque de ses patrimoines ».
C’est donc ajouter à la loi que de juger que les conditions d’ouverture du rétablissement professionnel ne sont pas réunies si le passif ne peut être éteint dans la mesure où le passif serait disproportionné par rapport à l’actif. De lege ferenda, il serait sans doute opportun de poser en cause de décharge du bénéfice de la procédure de rétablissement professionnel à l’article L. 645-9, alinéa 1, l le cas du passif manifestement disproportionné par rapport à ‘l’actif.
Mais, de lege lata, la solution posée par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ne mérite donc pas d’être approuvée en ce qu’elle ajoute à l’application des textes des conditions qu’il ne comporte pas.
Ce qui est vrai est que le débiteur s’est clairement trompé de procédure. Il aurait dû demander la liquidation judiciaire, pour bénéficier de l’interdiction du droit de reprise des poursuites individuelles et refuser la procédure de rétablissement professionnel suggéré par le tribunal. Mais il n’appartient pas à la cour d’appel de réparer l’erreur d’un plaideur trop gourmand, qui a trop tenté, mérite seulement d’échouer : il doit supporter son passif, le trainer comme un boulet, à titre de sanction, car créer trop de passif par rapport à son actif, c’est faire évidemment prendre des risques à ses créanciers, et démontrer ainsi une forme d’insouciance, une sorte d’irresponsabilité face à ses dettes. Et même si c’est bien dans l’air du temps, le « après moi le déluge, ne mérite pas autant d’encouragement !
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Réf. : Décret n° 2024-692, du 5 juillet 2024, relatif à la contre-visite mentionnée à l'article L. 1226-1 du Code du travail N° Lexbase : L9558MMX
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par Stéphanie Tondreau, Avocate spécialisée en droit du travail, Capstan Avocats
Le 18 Septembre 2024
Mots-clés : arrêt maladie • contre-visite médicale • lieu de repos du salarié • moment de la contre-visite • lieu de la contre-visite • maintien de salaire
Le décret n° 2024-692 du 5 juillet 2024 a (enfin) défini les modalités d’organisation de la contre-visite médicale. Si les juges avaient déjà encadré la contre-visite médicale, le décret apporte des éclairages utiles sur ce sujet. En particulier, la contre-visite médicale peut s’effectuer, au choix du médecin, au domicile du salarié (ou tout autre lieu de repos notifié à l’employeur) ou chez le médecin contrôleur, sur convocation.
La contre-visite médicale est le dispositif permettant à l’employeur de vérifier le bien-fondé de l’arrêt de travail pour maladie ou accident d’un salarié, y compris dans sa durée, ainsi que le respect par le salarié des obligations de présence à son domicile (ou au lieu renseigné par le salarié). Lorsque le médecin contrôleur estime que l’arrêt de travail n’est pas justifié, l’employeur peut suspendre le versement des indemnités complémentaires de maladie.
Cette contre-visite médicale constitue une contrepartie à l’obligation de l’employeur de maintenir tout ou partie de la rémunération du salarié malade.
La possibilité de procéder à une contre-visite médicale du salarié malade est prévue par l’article L. 1226-1 du Code du travail N° Lexbase : L8858KUM. Ce texte prévoit simplement l’existence d’une contre-visite médicale dont le résultat permet de confirmer le certificat d’arrêt de travail du salarié et dispose qu’un décret détermine les formes et conditions de la contre-visite.
Jusqu’au 5 juillet 2024, ce décret n’avait pas été publié, ce qui n’a toutefois pas constitué pour la Cour de cassation un obstacle à la mise en œuvre du dispositif [1]. Simplement, en l’absence dudit décret, la contre-visite médicale était encadrée essentiellement par quelques décisions de jurisprudence, et le cas échéant par les dispositions conventionnelles applicables.
Très attendu, le décret n° 2024-692 du 5 juillet 2024, applicable depuis le 7 juillet, a enfin fixé les modalités de la contre-visite médicale. Le décret intègre ainsi les nouveaux articles R. 1226-10 N° Lexbase : L0210MN4 à R. 1226-12 au Code du travail. Le décret apporte certaines nouveautés et reprend pour d’autres questions la position des juges.
Quel est ce nouveau cadre ? Comment et où se déroule cette contre-visite médicale ? Voici les dispositions que les employeurs doivent prendre en compte pour l’organisation d’une contre-visite médicale d’un salarié placé en arrêt de travail.
I. Lieu de repos du salarié
Le salarié est tenu de communiquer à son employeur, dès le début de son arrêt de travail [2] :
1/ son lieu de repos, s’il est différent de son domicile. De même, tout changement dudit lieu de repos en cours d’arrêt devra être notifié à l’employeur.
2/ les horaires auxquels la contre-visite médicale peut s’effectuer, si l’arrêt de travail porte la mention « sortie libre » prévue à l’article R. 323-11-1 du Code de Sécurité sociale N° Lexbase : L1641L4K.
Le décret transpose donc les principes qui avaient été édictés par la jurisprudence selon lesquels le salarié doit indiquer à l’employeur les horaires et l’adresse où la contre-visite médicale peut avoir lieu, notamment s’il bénéficie d’un arrêt de travail « sorties libres » [3] ou si son lieu de repos n’est pas sa résidence habituelle [4] .
En revanche, le décret ne précise pas :
II. Personne réalisant la contre-visite médicale
Le décret ne modifie pas les dispositions légales en vigueur et ne prévoit pas d’exception. La contre-visite ne peut être réalisée que par un médecin mandaté à cet effet par l’employeur [7]. Les textes ne précisent pas les conditions que doivent remplir les médecins chargés par l’employeur d’effectuer la contre-visite médicale. En pratique, il peut s’agir d’un médecin contrôleur exerçant à titre indépendant ou appartenant à un organisme spécialisé dans le contrôle médical (et donc ni le médecin traitant du salarié ni le médecin du travail de l’entreprise).
Il revient à l’employeur de choisir librement le médecin contrôleur qui effectuera la contre-visite médicale [8]. Toutefois, il convient de vérifier que la convention collective ne restreint pas ce choix. Ainsi, une convention collective (en l’espèce celle de la presse quotidienne régionale) peut prévoir que le contrôle sera exercé par le médecin choisi par l’employeur, ou à la demande du salarié, par un praticien choisi parmi ceux figurant sur la liste des experts près tribunaux. Si le salarié use de cette faculté et que le médecin-contrôleur mandaté par l'employeur n'a pas cette qualité, le refus de contrôle par le salarié sera imputable à l'employeur qui restera tenu de verser les indemnités conventionnellement prévues [9].
III. Lieu et moment de la contre-visite
De manière conforme à la position édictée par les juges [10], le décret retient que la contre-visite médicale peut s’effectuer à tout moment de l’arrêt de travail, à l’initiative de l’employeur qui supporte d’ailleurs les frais afférents à cette contre-visite.
Pour rappel, les juges considéraient déjà que la contre-visite pouvait être ordonnée par l’employeur dès le commencement de l’arrêt de travail du salarié [11]. En pratique, cette contre-visite est possible dès lors que l’employeur est tenu de verser un complément de salaire au salarié malade.
En revanche, il appartient au médecin de fixer le lieu du rendez-vous de contrôle.
À ce sujet, le décret précise utilement que le rendez-vous n’a pas à se dérouler par principe au domicile du salarié. Ainsi, c’est « au choix du médecin » que la contre-visite se déroule :
→ soit au domicile du salarié ou au lieu de repos communiqué par dernier. Dans ce cas, le médecin peut s’y présenter sans délai de prévenance, à tout moment, en respectant soit les horaires de sortie autorisés par les textes (présence de 9 h à 11 h et de 14 h à 16 h) soit les horaires communiqués à l’employeur par le salarié en cas de sortie libre autorisée.
Pas de nouveauté en la matière puisque la Cour de cassation considérait déjà que la contre-visite médicale avait lieu au domicile (ou lieu de repos) du salarié, l’employeur n’était pas tenu d’informer au préalable le salarié de l’imminence de la contre-visite médicale [12].
En revanche, même si le décret ne le précise pas, le médecin doit bien, lorsqu’il se présente au domicile / lieu de repos du salarié, décliner sa qualité ainsi que le mandat dont il est investi par l’employeur. À défaut, le refus de bonne foi du salarié de se soumettre au contrôle ne peut pas le priver du bénéfice des indemnités complémentaires de maladie [13].
Autre petit rappel utile en la matière : lorsque le certificat d’arrêt de travail ne comporte aucune indication sur les heures d’autorisation de sortie, cette sortie est présumée ne pas avoir été accordée. En revanche, si la contre-visite médicale a lieu pendant les heures de sortie autorisées, l’absence du salarié n’autorise pas l’employeur à suspendre le maintien de salaire [14].
→ soit au cabinet du médecin, sur convocation de celui-ci effectuée par tout moyen. Aucun délai de prévenance n’est prévu par le décret. En revanche, il précise que si le salarié est dans l’impossibilité de se déplacer, notamment en raison de son état de santé, il doit en informer le médecin en précisant les raisons.
Le décret va sur ce point à rebours de la position des juges qui considéraient jusque-là que le salarié n’était pas tenu de se déplacer chez le médecin pour subir la contre-visite médicale [15]. Le décret ouvre la possibilité au médecin de choisir que la contre-visite médicale puisse avoir lieu au cabinet du médecin. La réalisation de la contre-visite médicale au cabinet du médecin suppose dans ce cas que le médecin fixe à l’avance un rendez-vous et que le salarié pourra « s’y préparer » (avec sous doute un coût moindre facturé à l’entreprise, mais une perte de l’effet « surprise » de la contre-visite médicale). Reste qu’un médecin pourrait préférer rencontrer le salarié malade directement à son cabinet pour ne pas avoir à se déplacer…
IV. Rôle du médecin contrôleur
Le médecin mandaté par l’employeur doit se prononcer sur le caractère justifié de l’arrêt de travail, et sur le caractère justifié de sa durée.
Au terme de sa mission, le médecin informe l’employeur, soit du caractère justifié ou injustifié de l’arrêt de travail (ou de sa durée), soit de l’impossibilité de procéder au contrôle pour un motif imputable au salarié (par exemple son refus de se présenter à la convocation ou son absence lors de la visite à domicile).
Le médecin adresse son rapport au service du contrôle médical de la caisse primaire d’assurance maladie (dans les 48 jours de la contre-visite – CSS, art. L. 315-1 N° Lexbase : L9380MKM). Le service devra, à la lecture des conclusions du médecin, prendre position sur l’arrêt de travail. Il pourra à cet effet soit demander à la caisse de suspendre le versement des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) [16], soit procéder à un nouvel examen de la situation de l’assuré (cet examen étant de droit si les conclusions du médecin font état de l’impossibilité de procéder à la contre-visite médicale).
Que se passe-t-il si le salarié refuse de se soumettre à la contre-visite médicale. Si le décret ne les précise pas, les principes suivants restent applicables :
V. Conséquences du contrôle
L’employeur doit communiquer au salarié sans délai les conclusions du médecin. Si le décret ne précise pas la forme de cette information, elle devra avoir lieu pour des raisons de preuve par tout moyen permettant de lui conférer date certaine et par écrit. L’employeur devrait également préciser au salarié les conséquences découlant des conclusions du médecin, notamment si cela a pour conséquence la suspension du versement par l’employeur du maintien de salaire complémentaire de l’employeur.
Si le médecin contrôleur conclut au caractère justifié de l’arrêt de travail et confirme ainsi la décision du médecin traitant du salarié, l’employeur reste alors tenu de maintenir le versement des indemnités complémentaires au salarié pour la durée de l’arrêt de travail.
Si le médecin contrôleur conclut au caractère injustifié de l’arrêt, l’employeur peut suspendre le versement de l’indemnité complémentaire aux IJSS. L’employeur ne peut en revanche pas, même s’il y a subrogation, suspendre le paiement des IJSS.
Le médecin contrôleur peut également conclure au caractère justifié de l’arrêt de travail, mais en fixant une date de reprise différente de celle prévue par l’arrêt de travail. Dans ce cas, l’employeur pourra suspendre le versement des indemnités complémentaires à compter de la date de reprise fixée par le médecin contrôleur.
Le décret ne précise pas si la suspension du versement peut intervenir à compter de la date du contrôle du médecin du travail ou de la date de l’information par l’employeur du salarié sur les conclusions du médecin. Par application de la jurisprudence antérieure, on peut considérer que le versement sera suspendu uniquement à partir de la date du contrôle [22].
En pratique, en cas de suspension du paiement des indemnités complémentaires de l’employeur, le salarié pourra décider, soit de reprendre son travail (le cas échéant avec organisation d’une visite médicale de reprise selon la durée et/ou la nature de l’arrêt), soit de s’en tenir aux prescriptions de son médecin et rester en arrêt de travail. En revanche, l’employeur ne pourra pas sanctionner ni licencier le salarié qui refuse de reprendre le travail à la suite d’un avis du médecin contrôleur concluant au caractère injustifié de l’arrêt de travail [23].
On gardera à l’esprit que la contre-visite médicale ne permet que de suspendre, le cas échéant, le complément de salaire versé par l’employeur. L’employeur ne peut donc pas sanctionner ou licencier un salarié faisant obstacle à la visite, ou absent lors de celle-ci [24], ou dont l’arrêt de travail a été considéré comme non justifié par le médecin contrôleur.
De même, si la contre-visite médicale reste une option ouverte à l’employeur tenu de maintenir tout ou partie de la rémunération du salarié, il convient de ne pas multiplier le recours à ce dispositif à l’égard d’un même salarié. Les tribunaux ont déjà considéré que le recours systématique à une contre-visite médicale pour vérifier les arrêts de travail d’un salarié constituait des éléments permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral [25].
VI. Les voies de recours ouvertes au salarié
Le décret ne modifie pas les règles en vigueur sur ce point. Le salarié garde la possibilité de contester les conclusions du médecin contrôleur. Le salarié doit dans ce cas solliciter une expertise médicale devant le juge. Le conseil de prud’hommes pourra être saisi selon la forme des référés. Les conclusions de l’expertise médicale rendues par le médecin expert nommé par le juge prévalent dans ce cas sur les conclusions du médecin mandaté par l’employeur [26] et s’imposent donc à ce dernier. Ainsi, si le médecin-expert conclut à la justification de l’arrêt de travail, l’employeur devra procéder au rappel des indemnités non versées au titre des périodes d’arrêt qui sont finalement considérées comme justifiées par le médecin expert.
En dernier lieu, il sera utilement précisé que les conclusions du médecin n’ont de portée que pour l’arrêt de travail qu’il a été chargé de contrôler. La prescription d’un nouvel arrêt de travail postérieurement à la date du contrôle devrait rétablir le salarié dans ses droits [27], à charge pour l’employeur de diligenter une nouvelle contre-visite médicale.
[1] Cass. soc., 24 février 1983, n° 80-42.230 N° Lexbase : A5041C89.
[2] C. trav., art. R. 1226-10 N° Lexbase : L0210MN4.
[3] Cass. soc., 4 février 2009, n° 07-43.430, F-P N° Lexbase : A9573ECK.
[4] Cass. soc., 16 mars 2016, n° 14-16.588, F-D N° Lexbase : A3569Q8P.
[5] Cass. soc., 7 janvier 1981, n° 79-71.097, publié au Bulletin.
[6] Cass. soc., 10 mai 2001, n° 98-45.851, inédit au bulletin N° Lexbase : A4207ATY.
[7] C. trav., art. R. 1226-11.
[8] Cass. soc., 20 octobre 2015, n° 13-26.890, F-D N° Lexbase : A0298NUL.
[9] Cass. soc., 13 mai 1992, n° 89-44433, publié au bulletin N° Lexbase : A5017ABG.
[10] Cass. soc., 13 juin 2012, n° 11-12.152, FS-D N° Lexbase : A8970INK.
[11] Cass. soc., 13 juin 2012, n° 11-12.152, FS-D, préc..
[12] Cass. soc., 19 mai 1999, n° 98-44.376, inédit au bulletin N° Lexbase : A9940CW3.
[13] Cass. soc., 14 mars 1995, n° 91-44.131 N° Lexbase : A2017AAX.
[14] Cass. soc., 26 septembre 2012, n° 11-18.937, F-D N° Lexbase : A6255ITT.
[15] CA Aix-en-Provence, 20 mai 2018, n° 13/20021 N° Lexbase : A9637RPM.
[16] Le projet initial de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 était d’obliger la Sécurité sociale à suspendre le versement des IJSS en cas de contre-visite médicale concluant au caractère injustifié de l’arrêt maladie du salarié. Le Conseil constitutionnel a censuré ces dispositions compte tenu du 11e alinéa du Préambule de la Constitution en ce qu'elles ont « pour effet de priver du versement des indemnités journalières l’assuré social alors même que son incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail a été constatée par un médecin qui lui a prescrit un arrêt de travail pour une certaine durée » (Cons. const., décision n° 2023-860 DC, du 21 décembre 2023, Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 N° Lexbase : A26942AZ).
[17] Cass. soc., 5 décembre 1990, n° 87-41.375 N° Lexbase : A2084ABS.
[18] Cass. soc., 13 février 1996, n° 92-40.713 N° Lexbase : A1871ABW.
[19] Cass. soc., 10 février 1998, n° 95-41.600 N° Lexbase : A2518ACA.
[20] Cass. soc., 3 avril 1981, n° 79-41.391, publié au bulletin N° Lexbase : A8514CE3.
[21] Cass. soc., 8 juin 1983, n° 81-40.801, publié au bulletin N° Lexbase : A6193CGH.
[22] Cass. soc., 9 juin 1993, n° 90-42.701 N° Lexbase : A2208AGU.
[23] Cass. soc., 22 octobre 1997, n° 95-43.380 N° Lexbase : A1619ABL ; Cass. soc., 28 novembre 2000, n° 98-41.308 N° Lexbase : A9424AHI.
[24] Cass. soc., 27 juin 2000, n° 98-40.952 N° Lexbase : A8770AHB.
[25] Cass. soc., 13 avril 2010, n° 09-40.837, F-D N° Lexbase : A0680EW4 ; CA Reims, 20 septembre 2017, n° 15/03185 N° Lexbase : A3251WS9 ; CA Lyon, 22 avril 2011, n° 08/00690 N° Lexbase : A0872HPY.
[26] Cass. soc., 28 février 1996, n° 92-42.021 N° Lexbase : A1869ABT.
[27] Cass. soc., 25 février 1998, n° 96-40.397, publié au bulletin N° Lexbase : A5593AC7.
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par Béatrice Renard Marsili, Juriste en droit du travail et Conseil en ressources humaines - DRH externalisé
Le 18 Septembre 2024
Mots-clés : ressources humaines • entreprises • employeurs • salariés • réglementation
Chaque mois, la revue Lexbase Social vous propose de faire un point sur les changements à prendre en compte dans l’entreprise.
👉 Boss
Deux nouvelles rubriques sont entrées en vigueur au 1er septembre 2024, une sur l’exonération de cotisations sociales applicable aux rémunérations des apprentis et l’autre sur le régime social applicable aux gratifications des stagiaires.
Chacune de ces deux rubriques contient trois chapitres, précisant le champ d’application et les modalités d’application de la mesure.
Ces deux rubriques sont opposables à l’administration depuis le 1er septembre 2024 (Boss, communiqué, 29 août 2024).
La rémunération de l’apprenti est exonérée de cotisations salariales pour sa part inférieure ou égale à 79 % du SMIC. Le plafonnement de l’exonération à 79 % du SMIC s’apprécie mensuellement et ne fait l'objet d'aucune régularisation annuelle.
En cas d’arrivée ou départ en cours de mois, ce plafond de 79 % est proratisé selon la formule suivante : SMIC mensuel × 79 % × (nbre de jours de la période d’emploi / nbre de jours calendaires du mois).
Par ailleurs, le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels est conditionné au respect de l’assiette minimale de cotisations.
Les éventuels avantages en nature que le stagiaire perçoit doivent être assujettis aux cotisations et contributions sociales. La participation de l’employeur au financement du repas au restaurant d’entreprise ou des titres-restaurant est toutefois exclue.
👉 Comité social et économique
Dans un arrêt rendu le 3 avril 2024, la Cour de cassation a rejeté, pour la première fois, toute condition d’ancienneté pour le bénéfice des ASC, en considérant que « s'il appartient au CSE de définir ses actions en matière d'activités sociales et culturelles, l'ouverture du droit de l'ensemble des salariés et des stagiaires au sein de l'entreprise à bénéficier des ASC ne saurait être subordonnée à une condition d'ancienneté » (Cass. soc., 3 avril 2024, n° 22-16.812, FS-B N° Lexbase : A34992ZM).
Tirant les conséquences de cet arrêt, l'URSSAF a publié, sur son site internet, une actualité, le 30 juillet 2024, indiquant laisser un délai de 18 mois, soit jusqu'au 31 décembre 2025, pour modifier les critères de versement de ces prestations et se mettre en conformité.
Elle précise également que si l'entreprise fait l’objet d’un contrôle durant ce délai et si une condition d’ancienneté est constatée pour le bénéfice des prestations du CSE, il lui sera demandé de se mettre en conformité pour l’avenir.
Mais attention ! Cette tolérance de l'URSSAF ne concerne que les exonérations de cotisations et contributions sociales. Durant cette période de tolérance, rien n'empêche un salarié lésé de saisir le conseil de prud'hommes pour demander le bénéfice des ASC sur la base de l'arrêt du 3 avril 2024...
Le salarié qui souhaite se porter candidat aux élections du CSE doit respecter les délais et le formalisme prévus par le protocole d'accord préélectoral. Il en résulte ainsi qu’une candidature déposée 9 minutes après le délai prévu par le protocole d’accord préélectoral doit être considérée comme irrégulière (Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 23-13.551, F-D N° Lexbase : A47365QH).
L'article L. 2314-32, alinéa 4, du Code du travail N° Lexbase : L8318LG8 prévoit que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des règles de représentation équilibrée des femmes et des hommes, entraîne l'annulation de l'élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas ces règles.
Dans ce cas, l'élu concerné perd son siège mais le juge n'a pas à attribuer le siège vacant à un autre candidat. Une nouvelle élection partielle doit être organisée (Cass. soc., 11 septembre 2024, n° 23-60.107, F-B N° Lexbase : A53455YM).
Un syndicat qui a signé un protocole d'accord préélectoral sans réserve ou a présenté des candidats sans émettre de réserves, ne peut pas, après proclamation des résultats des élections, contester la validité du protocole d'accord préélectoral et demander l'annulation des élections. Et ce, quand bien même il invoquerait une méconnaissance par le protocole préélectoral de règles d'ordre public.
Il en est de même pour un salarié candidat ou élu sur la liste présentée par un syndicat ayant signé sans réserve le PAP ou présenté des candidats sans avoir émis de réserves (Cass. soc., 11 septembre 2024, n° 23-15.822, F-B N° Lexbase : A53615Y9).
Le paiement indu par l'employeur d'heures de délégation dépassant le crédit d'heures légal dont dispose le salarié en tant que délégué syndical, en l'absence de justification par le salarié des circonstances exceptionnelles autorisant ce dépassement du crédit d'heures de délégation, ne constitue pas une avance sur salaire.
Dès lors, la compensation, opérée lors d'une retenue sur salaire par l'employeur, peut s'appliquer dans la limite de la fraction saisissable du salaire (Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 23-11.770, F-D N° Lexbase : A47895QG).
👉 Congé maternité
L’employeur qui manque à son obligation de suspendre toute prestation de travail durant le congé maternité d’une salariée lui cause nécessairement un préjudice sans qu’elle ait à le prouver. C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans un arrêt du 4 septembre 2024.
L'employeur qui ne respecte pas le congé maternité d'une salariée peut être condamné à lui verser des dommages et intérêts ainsi qu'à une amende prévue pour les contraventions de 5ème classe (jusqu’à 1 500 euros pour les personnes physiques, 7 500 euros pour les personnes morales) (Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 22-16.129, FS-B N° Lexbase : A35355X9).
👉 Contrôles URSSAF
Un arrêté du 22 juillet 2024 modifie la charte du cotisant contrôlé, entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Cette mise à jour porte principalement sur la prolongation de la période contradictoire, sans changement significatif pour le cotisant.
La charte détaille désormais que les employeurs disposent de 30 jours pour répondre aux observations de l’URSSAF, avec possibilité de prolongation, sauf en cas de travail illégal. Ces ajustements alignent la charte sur les dispositions du Code de la Sécurité sociale (Arrêté du 22 juillet 2024, modifiant l'arrêté du 30 janvier 2024, fixant le modèle de la charte du cotisant contrôlé prévue à l'article R. 243-59 du Code de la Sécurité sociale et à l'article R. 724-9 du Code rural et de la pêche maritime pour les organismes en charge du recouvrement des cotisations et contributions sociales au 1er janvier 2024 N° Lexbase : L1988MNX).
Le redressement URSSAF, consécutif au constat d'un délit de travail dissimulé, doit être porté à la connaissance de l'employeur ou du travailleur indépendant par un document daté et signé par le directeur de l'organisme de recouvrement qui rappelle les références du procès-verbal pour travail dissimulé et précise la nature, le mode de calcul et le montant des redressements envisagés.
Cette formalité substantielle permet, dans le respect du principe contradictoire, d'informer l'employeur de l'ensemble des éléments pris en considération pour procéder au redressement.
En revanche, l'URSSAF n'est pas tenue de joindre à la lettre d'observations le procès-verbal constatant le délit de travail dissimulé ni de le produire aux débats. L'absence de production aux débats du procès-verbal constatant les infractions de travail dissimulé n'affecte donc pas la régularité de la procédure (Cass. civ. 2, 5 septembre 2024, n° 22-18.226, F-B N° Lexbase : A75375XG).
👉 Contrat de travail
Un salarié ne peut accepter par avance un changement d’employeur.
La cour d’appel, qui a constaté que l’employeur avait proposé à la salariée une mutation dans une société dont il était l’actionnaire majoritaire, ce dont il résultait que l’employeur ne pouvait sanctionner le refus de la salariée, en a exactement déduit que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 23-10.326, F-D N° Lexbase : A31485YA).
👉 Juridictions
La loi de programmation de la justice du 20 novembre 2023 avait prévu de transformer, à titre expérimental pendant une durée de 4 ans, un certain nombre de tribunaux de commerce en tribunaux des activités économiques (TAE) ayant une compétence élargie, notamment en matière de prévention et de traitement des difficultés des entreprises.
Les TAE seront compétents pour connaître des procédures d’alerte, des procédures amiables (mandat ad hoc, procédure de conciliation, règlement amiable pour les exploitants agricoles) et des procédures collectives (procédure de sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire) dont feront l’objet les entreprises en difficulté ayant leur siège dans leur ressort, et ce quels que soient leur statut (entreprise individuelle, professionnel libéral, société commerciale ou civile, groupement agricole, association) et leur activité (commerciale, artisanale, libérale, agricole).
À partir du 1er janvier 2025, douze tribunaux de commerce deviendront des TAE : ceux de Marseille, du Mans, de Limoges, de Lyon, de Nancy, d’Avignon, d’Auxerre, de Paris, de Saint-Brieuc, du Havre, de Nanterre et de Versailles (Décret n° 2024-674 du 3 juillet 2024, relatif à l'expérimentation du tribunal des activités économiques N° Lexbase : L9348MM8 ; Arrêté du 5 juillet 2024, relatif à l'expérimentation du tribunal des activités économiques N° Lexbase : L9637MMU)
👉 Négociation collective
L'obligation de négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (ex GPEC) est subordonnée à l'existence d'une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau de l'entreprise (Cass. soc., 11 septembre 2024, n° 23-14.333, F-B N° Lexbase : A53525YU).
👉 Plateformes de mise en relation
Un accord a été signé le 7 mai 2024 pour lutter contre les discriminations dont peuvent faire l'objet les livreurs indépendants.
Chaque plateforme doit désormais mettre en place un dispositif d’alerte facilement accessible, via une application, permettant au livreur de signaler tout incident, ainsi qu’une assistance téléphonique pour les accompagner dans leurs démarches si nécessaire. Dès que la plateforme sera informée d’un acte ou d’un comportement discriminatoire à l’encontre d’un livreur indépendant, elle devra être à son écoute et prendre en compte son signalement.
Un droit au dédommagement est également créé pour les livreurs lorsque le compte de celui-ci est suspendu en cas de signalement puis réactivé au terme des investigations menées par la plateforme.
Les plateformes doivent, en outre, concevoir et diffuser auprès de leurs utilisateurs (livreurs indépendants, restaurateurs, commerçants destinataires des livraisons), un guide d’accompagnement sur les propos, actes et comportements constitutifs d’une discrimination et les moyens de les prévenir ou d’y réagir.
Cet accord prendra effet trois mois après la date de publication au Journal officiel de la décision de son homologation par l’ARPE, soit le 31 octobre 2024. À compter de cette date, il sera obligatoire pour toutes les plateformes et leurs travailleurs indépendants (Accord du 7 mai 2024 visant à lutter contre toute forme de discrimination sur les plateformes de mise en relation [en ligne] ; Décision du 26 juillet 2024, relative à l’homologation de l’accord du 7 mai 2024 visant à lutter contre toute forme de discrimination sur les plateformes de mise en relation).
👉 Prescriptions en droit du travail
L'action en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et pour préjudice moral, qui porte sur l'exécution du contrat de travail, se prescrit par deux ans.
En revanche, la demande relative au versement sur le plan d'épargne pour la retraite collectif de sommes correspondant à des jours de RTT a une nature salariale et se prescrit par trois ans.
De même, l'indemnité pour jours de RTT non pris, qui correspond au montant de la rémunération légalement due en raison de l'exécution d'un travail, a une nature salariale et se prescrit par trois ans (Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 23-13.931, FS-B N° Lexbase : A35435XI).
L'action en paiement d'une indemnité pour repos compensateur de remplacement non pris, en raison d'un manquement de l'employeur à son obligation d'information, qui se rattache à l'exécution du contrat de travail, relève de la prescription biennale, prévue à l'article L. 1471-1 du Code du travail (Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 22-20.976, FS-B N° Lexbase : A35445XK).
L'action en paiement d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, si elle naît lors de la rupture du contrat, résulte de l'inexécution par l'employeur de ses obligations et porte donc sur l’exécution du contrat.
Cette action est donc soumise à la prescription biennale, prévue par l’article L. 1471-1 du Code du travail.
Lorsque le fondement de l’action du salarié repose sur un harcèlement moral dont il est victime, la prescription de deux ans est exclue. Dès lors, l'action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par cinq ans lorsqu’elle est fondée sur le harcèlement moral (Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 22-22.860, FS-B N° Lexbase : A35485XP).
👉 Preuve en droit du travail
Depuis le revirement jurisprudentiel de l'Assemblée plénière de la Cour de cassation du 22 décembre 2023, la preuve déloyale est recevable, dans un procès civil, sous conditions strictes.
Dans un arrêt du 10 juillet 2024, La Cour de cassation rappelle qu'une preuve doit s'obtenir loyalement. Mais cela n'écarte pas des débats systématiquement les preuves obtenues de façon déloyale, comme c'est le cas d'un enregistrement clandestin obtenu à l'insu de son employeur.
Sont ainsi admis, les éléments de preuve qui sont indispensables à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral et, ensuite, qui portent une atteinte à la vie personnelle de l'employeur strictement proportionnée au but recherché (Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 23-14.900, F-B N° Lexbase : A22185PT).
L'article 145 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1497H49 permet de solliciter auprès du juge, généralement en référé, des mesures d’instruction, « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige ».
L’employeur peut avoir recours à ce type de mesures notamment quand il soupçonne un salarié d’avoir commis une faute et qu’il entend en apporter la preuve.
La mesure d’instruction demandée peut notamment être la désignation d’un huissier (aujourd’hui, un commissaire de justice), sachant que son constat valablement établi fait foi jusqu'à la preuve du contraire.
La Cour de cassation vient ainsi de juger que l’employeur peut prouver la concurrence déloyale d’un salarié grâce à un huissier (Cass. civ. 2, 2 mai 2024, n° 22-16.469, F-D N° Lexbase : A52875A3).
👉 RGPD
Le Comité européen de la protection des données (CEPD) a publié un guide à destination des TPE-PME, avec pour objectif d’expliquer les principes du règlement général sur la protection des données (RGPD) et de la protection des données.
En pratique, comment choisir une base légale pour collecter et utiliser des données personnelles, travailler avec un sous-traitant, réagir à une violation de données ou encore répondre aux demandes d’exercice des droits des personnes ? Le guide du CEPD, exclusivement au format web, aborde les points essentiels de la protection des données en s’appuyant sur des cas concrets, applicables quel que soit le cœur de métier de l’entreprise (CNIL, communiqué, 5 septembre 2024 ; lire le guide ici).
👉 Repos hebdomadaire
Un décret du 9 juillet 2024 permet de suspendre le repos hebdomadaire dans certaines filières de la production agricole.
Les récoltes réalisées manuellement, en application d’un cahier des charges lié à une appellation d’origine contrôlée ou une indication géographique protégée, constituent désormais des travaux dont l’exécution ne peut être différée, susceptibles de permettre la suspension du repos hebdomadaire.
Dans ce cas, le repos hebdomadaire des salariés peut être suspendu une fois au plus sur une période de 30 jours (Décret n° 2024-780, du 9 juillet 2024, relatif aux procédures de suspension du repos hebdomadaire en agriculture N° Lexbase : L0287MNX).
👉 Retraite
Début août 2024, la CNAV a publié deux nouvelles circulaires concernant la réforme des retraites. La première ([en ligne]) précise les modalités de remboursement des rachats de cotisations, à la suite de l’augmentation de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, ainsi que la durée d’assurance requise.
La seconde ([en ligne]) concerne la retraite anticipée pour inaptitude au travail, précisant notamment les démarches pour les assurés résidant à l'étranger et les justificatifs nécessaires. Ces circulaires remplacent des textes antérieurs sans apporter de grands changements, mais clarifient certains points pratiques pour les assurés concernés.
👉 Rupture du contrat de travail
La persistance de la dissimulation de l’exercice de son activité en télétravail de l’étranger par un salarié constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, y compris pendant la période de préavis et justifie un licenciement pour faute grave (CPH Paris, section encadrement, 1er août 2024, n° 21/06451).
Le fait pour un aide médico-psychologique de porter atteinte à la dignité et à la pudeur des mineurs handicapés dont il a la charge est de nature à caractériser un comportement rendant impossible son maintien dans l'association et justifiant son licenciement pour faute grave (Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 23-15.666, F-D N° Lexbase : A47185QS).
L'article L. 1226-9 du Code du travail N° Lexbase : L1024H9S prévoit qu'au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
La Cour de cassation vient de préciser que dès lors que la cessation d'activité de l'entreprise est réelle et qu'elle rend impossible la poursuite du contrat de travail, le licenciement du salarié dont le contrat de travail est suspendu pour accident du travail est justifié (Cass. soc., 11 septembre 2024, n° 22-18.409, F-B N° Lexbase : A53485YQ).
L'employeur ayant le pouvoir de licencier est celui qui dispose de l'autorité hiérarchique sur l'auteur des manquements et qui a la qualité pour contrôler le salarié ou surveiller son activité et non pas son subordonné.
Il en découle qu’un DRH n'a pas le pouvoir de sanctionner et donc de licencier son directeur général qui est son supérieur hiérarchique (Cass. soc., 26 juin 2024, n° 23-12.475, F-D N° Lexbase : A02325MK).
La rupture du contrat de travail à durée déterminée d'un salarié protégé avant l'échéance du terme en raison d'une faute grave ou de l'inaptitude constatée par le médecin du travail, ou à l'arrivée du terme lorsque l'employeur n'envisage pas de renouveler un contrat comportant une clause de renouvellement, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.
En revanche, il n'y a pas lieu de saisir l'inspecteur du travail dans le cas de l'arrivée du terme d'un contrat à durée déterminée ne relevant pas des contrats saisonniers ou des contrats d'usage et ne comportant pas de clause de renouvellement (Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 22-21.856, FS-B N° Lexbase : A22285P9).
👉 Salaires
L’URSSAF a informé les entreprises de la notification des taux modulés d’assurance chômage en application du dispositif de bonus-malus (Information du 4 septembre 2024 [en ligne]).
Les employeurs doivent utiliser ces taux pour le calcul des cotisations dues au titre des périodes d’activité courant à compter du 1er septembre 2024.
Toutefois, dans certains cas, notamment pour les ruptures de contrats intervenant début septembre, un employeur peut ne pas avoir connaissance du taux modulé à appliquer au moment de réaliser la paie ou le solde de tout compte. Dans ces hypothèses, une tolérance est prévue :
A noter que les taux de séparation médians des 7 secteurs d’activité soumis au bonus-malus ont été fixés pour la période de modulation septembre - octobre 2024, par un arrêté du 22 août 2024 (Arrêté du 22 août 2024, portant publication des taux de séparation médians par secteur pris en compte pour le calcul du bonus-malus N° Lexbase : L3398MN8).
Les commissions pour vente constituent des éléments de rémunération dont les modalités de fixation se rattachent directement à l'activité personnelle du salarié, indépendamment de la durée du travail qu'il y consacre. Elles doivent dès lors être intégrées dans la base de calcul des majorations pour heures supplémentaires (Cass. soc., 3 juillet 2024, n° 23-10.569, F-D N° Lexbase : A35245NT).
La Fédération Syntec a signé, le 26 juin 2024, avec la CFDT et la CFTC, un accord portant revalorisation des salaires minimaux dans la branche des bureaux d’études techniques, dite « BET » [en ligne].
Par cet accord, il est ainsi convenu des augmentations suivantes :
Ces augmentations seront applicables à toutes les entreprises de la branche à partir du 1er janvier 2025. Les organisations syndicales se sont également engagées à renégocier annuellement les salaires minimaux, avec une date d’application au 1er janvier de chaque année suivante.
Les salaires minimaux sont revalorisés, depuis le 1er juin 2024, dans les entreprises relevant de la CCN de la boulangerie-pâtisserie (entreprises artisanales) du 19 mars 1976 (Avenant n° 135 à la Convention collective nationale du 19 mars 1976 (IDCC 843) [en ligne] ; Arrêté du 4 septembre 2024, portant extension d'un avenant à la Convention collective nationale de la boulangerie-pâtisserie N° Lexbase : L3963MN4).
Les salaires minimaux sont revalorisés, à compter du 1er octobre 2024, dans les entreprises relevant de la CCN des chaînes de cafétérias et assimilés du 20 août 1998 (Avenant n° 22 du 11 avril 2024 à la Convention collective nationale des chaînes de cafétérias et assimilés (n° 2060) [en ligne] ; Arrêté du 19 août 2024 portant extension d'un avenant à la convention collective nationale des chaînes de cafétérias et assimilés N° Lexbase : L3347MNB).
Les salaires minimaux sont revalorisés, depuis le 1er juillet 2024, dans les entreprises relevant de la CCN des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances du 18 janvier 2002 (Avenant du 27 juin 2024, relatif aux salaires, à la Convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances du 18 janvier 2002 [en ligne] ; Arrêté du 4 septembre 2024, portant extension d'un avenant à la convention collective nationale des entreprises de courtage d'assurances et/ou de réassurances (n° 2247) N° Lexbase : L4040MNX).
Les salaires minimaux sont revalorisés depuis le 1er juin 2024 et les indemnités de déplacement sont revalorisées, depuis le 1er septembre 2024, dans les entreprises relevant de la CCN des entreprises artistiques et culturelles du 1er janvier 1984 (Accord du 2 mai 2024 relatif aux salaires pour l'année 2024 [en ligne] ; Arrêté du 23 juillet 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles (n° 1285) N° Lexbase : L2876MNT).
À la suite de la CPPNI qui s’est tenue le 19 juin 2024, 2 avenants à la Convention collective nationale des hôtels cafés restaurants ont été signés :
Les salaires minimaux et la prime d’ancienneté sont revalorisés depuis le 1er juillet 2024, dans les entreprises relevant de la CCN de l'immobilier du 9 septembre 1988 (Avenant n° 103 du 13 mars 2024 modifiant l'annexe II « Salaires et primes d'ancienneté » [en ligne] ; Arrêté du 23 juillet 2024, portant extension d'un avenant à la Convention collective nationale de l'immobilier (n° 1527) N° Lexbase : L2868MNK).
Les salaires minimaux sont revalorisés, depuis le 1er mai 2024, pour les entreprises adhérentes des syndicats patronaux signataires et depuis le 10 août 2024, pour les entreprises de la branche non adhérentes des syndicats patronaux signataires, dans les entreprises relevant de la CCN du personnel des industries céramiques de France du 6 juillet 1989 (Accord national de branche du 30 avril 2024, relatif à l'évolution des salaires minima conventionnels des personnels ouvriers, ETAM et cadres des industries céramiques de France [en ligne] ; Arrêté du 23 juillet 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale du personnel des industries céramiques de France (n° 1558) N° Lexbase : L2864MNE).
Les salaires minimaux sont revalorisés, depuis le 1er juin 2024, dans les entreprises relevant de la CCN des industries de fabrication mécanique du verre du 8 juin 1972 (Accord collectif du 22 mai 2024, relatif aux salaires minima, conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des industries de fabrication mécanique du verre du 8 juin 1972 [en ligne] ; Arrêté du 5 août 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des industries de fabrication mécanique du verre N° Lexbase : L2903MNT).
Les salaires minimaux sont revalorisés, depuis le 1er juin 2024 pour les entreprises adhérentes à la FEH et depuis le 10 août 2024, pour les entreprises non adhérentes, dans les entreprises relevant de la CCN des maisons à succursales de vente au détail d'habillement du 30 juin 1972 (Accord du 14 mai 2024, relatif aux salaires minima garantis, conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d'habillement du 30 juin 1972 [en ligne] ; Arrêté du 23 juillet 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d'habillement (n° 675) N° Lexbase : L2849MNT).
Les salaires minimaux sont revalorisés, depuis le 1er mai 2024, pour les entreprises adhérentes à la FNAEM et depuis le 10 août 2024 pour les entreprises non adhérentes, dans les entreprises relevant de la CCN du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 (Accord du 14 mai 2024, relatif aux salaires minima, conclu dans le cadre de la convention collective nationale du négoce de l'ameublement du 31 mai 1995 [en ligne] ; Arrêté du 23 juillet 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale du négoce de l'ameublement (n° 1880) N° Lexbase : L2881MNZ).
Les salaires minimaux, prime d’intermittence et prime de détachement sont revalorisés, depuis le 1er avril 2024, pour les entreprises adhérentes des syndicats patronaux signataires et depuis le 1er septembre 2024, pour les entreprises de la branche non adhérentes des syndicats patronaux signataires, dans les entreprises relevant de la CCN du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 (Avenant n° 65 du 15 avril 2024, relatif aux minima conventionnels, à la prime d’intermittence et à la prime de détachement, à la convention collective du personnel des entreprises de restauration de collectivités [en ligne] ; Arrêté du 5 août 2024, portant extension d'un avenant à la Convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités (n° 1266) N° Lexbase : L2902MNS).
Les salaires minimaux et la prime annuelle conventionnelle sont revalorisés, depuis le 1er mai 2024, pour les entreprises adhérentes des syndicats patronaux signataires et depuis le 10 août 2024, pour les entreprises de la branche non adhérentes des syndicats patronaux signataires, dans les entreprises relevant de la CCN de la restauration rapide du 18 mars 1988 (Avenant n° 68 du 30 avril 2024, relatif à la prime annuelle conventionnelle [en ligne] ; Avenant n° 67 du 30 avril 2024, relatif aux minima conventionnels [en ligne] ; Arrêté du 23 juillet 2024, portant extension d'avenants à la Convention collective nationale de la restauration rapide (n° 1501) N° Lexbase : L2856MN4).
👉 Santé et sécurité au travail
Le ministère de la Transformation et de la fonction publiques a publié, le 11 juin 2024, une nouvelle circulaire sur la mise en œuvre du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) et le déploiement des programmes annuels de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT) dans les trois versants de la fonction publique : fonction publique de l'État, fonction publique hospitalière et fonction publique territoriale.
Cette circulaire précise que, contrairement au secteur privé, le PAPRIPACT est obligatoire, quel que soit l’effectif de la structure.
Par ailleurs, dans la fonction publique territoriale, le DUERP doit faire l’objet d’une délibération par l’organe délibérant de la collectivité (Circulaire du 11 juin 2024, relative à l’élaboration du document unique d’évaluation des risques professionnels et du programme annuel de prévention et d’amélioration des conditions de travail dans la fonction publique [en ligne]).
La Défenseure des droits a été saisie d’une réclamation d’une salariée estimant avoir subi des agissements de harcèlement sexuel dans le cadre de son emploi, au cours de l’exercice de ses fonctions syndicales.
La salariée soutenait qu’un collègue exerçant également des fonctions syndicales avait tenu des propos à caractère sexuel et l’avait agressée sexuellement. Elle disposait d’attestations de ses collègues confirmant certains faits. Ayant signalé ces faits auprès de son employeur avant de démissionner de ses missions syndicales et d’être placée en arrêt maladie, l’employeur a mis en œuvre une enquête interne au cours de laquelle plusieurs témoins ont été auditionnés. Au terme de cette enquête, l’employeur a considéré qu’aucun témoin ou preuve ne confirmait le harcèlement sexuel.
Au vu de ces éléments, le Défenseur des droits a mené une instruction auprès de l’employeur et lui a demandé les comptes rendus d’audition des témoins. Il en ressortait que les témoins ont confirmé les multiples propos à caractère sexiste et sexuel du salarié mis en cause ainsi que d’autres collègues.
Les conclusions tirées par l’employeur au terme de l’enquête interne ne sont donc pas cohérentes avec le contenu des auditions menées. De plus, tous les témoins n’ont pas été auditionnés, l’enquête a eu une durée excessive et les salariés responsables n’ont pas été sanctionnés.
Dans sa décision, la Défenseure des droits constate que la salariée a été victime de harcèlement sexuel et de harcèlement d’ambiance et que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité.
Elle rappelle que l’aménagement de la charge de la preuve permettait à la salariée de constituer un faisceau d’indices convergents laissant supposer l’existence d’un harcèlement sexuel, sans exiger qu’elle n’en rapporte une preuve directe. La salariée devait seulement faire naître un doute raisonnable.
Enfin, la Défenseure des droits recommande à l’employeur de se rapprocher de la salariée afin de procéder à juste réparation de son préjudice et de modifier ses pratiques d’enquête dans un délai de trois mois (Décision 2024-105 du 11 juillet 2024, relative au harcèlement sexuel et au harcèlement d'ambiance subis par une salariée ainsi qu'à l'enquête interne menée par son employeur [en ligne]).
Les salariés qui ne justifient pas d'une exposition à des produits toxiques générant un risque élevé de développer une pathologie grave ne sont pas fondés à demander une indemnisation en réparation de leur préjudice d'anxiété, et ce quand bien même l'employeur ne leur a pas remis les fiches d'exposition à l'amiante et aux autres produits chimiques cancérigènes CMR (Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 22-20.917, FS-B N° Lexbase : A35495XQ).
CCN Aide à domicile : la branche de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile a conclu le 20 mars 2024 un accord relatif à la liste des activités exposées à des risques ergonomiques.
Cet accord a été étendu par arrêté du 3 septembre 2024. Il est désormais applicable à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application professionnel de la Convention collective nationale de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile du 21 mai 2010 (Arrêté du 3 septembre 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale de la branche de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile (n° 2941) N° Lexbase : L3903MNU).
CCN Assainissement et maintenance industrielle : la branche de l’assainissement et de la maintenance industrielle a conclu le 22 mai 2024 un accord relatif aux listes de métiers et activités potentiellement exposés à des risques ergonomiques.
Cet accord a été étendu par arrêté du 3 septembre 2024. Il est désormais applicable à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application professionnel de la Convention collective nationale de l'assainissement et de la maintenance industrielle du 21 mai 2002 (Arrêté du 3 septembre 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale de l'assainissement et de la maintenance industrielle (n° 2272) N° Lexbase : L3908MN3).
CCN Détaillants en chaussures : la branche des détaillants en chaussures a conclu le 16 mai 2024 un accord relatif aux listes de métiers exposés à des risques ergonomiques.
Cet accord a été étendu par arrêté du 3 septembre 2024. Il est désormais applicable à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application professionnel de la Convention collective nationale des détaillants en chaussures du 27 juin 1973 (Arrêté du 3 septembre 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la convention collective nationale des détaillants en chaussures (n° 733) N° Lexbase : L3893MNI).
CCN Fleuristes et animaux familiaux : la branche des fleuristes, de la vente et des services des animaux familiers a conclu le 24 avril 2024 un accord relatif aux listes de métiers exposés à des risques ergonomiques.
Cet accord a été étendu par arrêté du 1er juillet 2024. Il est désormais applicable à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application professionnel de la Convention collective nationale des fleuristes, de la vente et des services des animaux familiers du 21 janvier 1997 (Arrêté du 1er juillet 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des fleuristes, de la vente et des services des animaux familiers (n° 1978) N° Lexbase : L9207MMX).
CCN HLM : la branche des personnels des sociétés anonymes et fondations d'HLM a conclu le 1er février 2024 un accord relatif aux listes de métiers exposés à des risques ergonomiques.
Cet accord a été étendu par arrêté du 28 juin 2024. Il est désormais applicable à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application professionnel de la Convention collective nationale des personnels des sociétés anonymes et fondations d'HLM du 27 avril 2000 (Arrêté du 28 juin 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des personnels des sociétés anonymes et fondations d'HLM (n° 2150) N° Lexbase : L0447HTQ).
CCN Services d’eau et assainissement : la branche des entreprises des services d'eau et d'assainissement a conclu le 13 juin 2024 un accord relatif aux listes de métiers ou activités particulièrement exposés à des risques ergonomiques.
Cet accord a été étendu par arrêté du 3 septembre 2024. Il est désormais applicable à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application professionnel de la Convention collective nationale des entreprises de services d'eau et d'assainissement du 12 avril 2000 (Arrêté du 3 septembre 2024, portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la Convention collective nationale des entreprises des services d'eau et d'assainissement (n° 2147) N° Lexbase : L3901MNS).
La santé mentale des salariés français continue de se dégrader... 15 % d'entre eux déclarent se trouver en détresse psychologique élevée. 42 % des salariés estiment se trouver en détresse psychologique modérée et élevée.
28 % des jeunes de 18 à 29 ans et 26 % des télétravailleurs se disent en détresse psychologique élevée.
Le taux de burn-out reste stable à 30 % dont 11 % en risque sévère.
Si les facteurs exogènes à la détresse psychologique sont toujours présents (guerre en Ukraine, éco-anxiété, problèmes sociaux…), huit salariés sur dix attribuent leur état de détresse psychologique à leur environnement de travail.
67 % des employés pensent que leur manager prend en compte leur bien-être lorsqu’il leur fixe des objectifs.
La santé mentale des salariés est essentiellement affectée par les conditions de travail telles que le manque de temps, l’incapacité à refuser une tâche supplémentaire et l'utilisation d'outils inadaptés.
Seulement 39 % des entreprises accordent du temps à la sensibilisation aux risques psychosociaux, et moins de 40 % ont des acteurs dédiés à la santé mentale (13ème baromètre « État de santé psychologique des salariés français » réalisé du 23 mai au 4 juin par le cabinet Empreinte humaine en partenariat avec OpinionWay).
En cas d’infection par le virus Mpox, le ministère de la Santé recommande de télétravailler durant trois semaines à partir de la date de début des signes ou de ne pas travailler si le télétravail est impossible.
Si l’isolement strict n’est pas possible, il est nécessaire de limiter les interactions sociales aux activités de plein air, sans partage d’équipement et sans contact physique.
S'agissant des voyageurs et donc des salariés pouvant être amenés à se déplacer à l'étranger, aucune recommandation internationale ne va, pour l'instant, dans le sens d'une restriction des voyages (Min. Santé, Questions-réponses, 23 août 2024 [en ligne]).
👉 Sécurité sociale
Doit être considérée comme illicite la convention de prestations de services mettant la réparation d’un AT à la charge exclusive de l’employeur de la victime, et exonérant ainsi dans tous les cas l’entreprise cliente (Cass. civ. 2, 5 septembre 2024, n° 21-23.442, FS-B N° Lexbase : A75405XK).
Doit être considéré comme un accident du travail l’accident d’un télétravailleur pendant sa pause déjeuner dès lors que cet accident est survenu pendant une plage variable de l’horaire de travail et au cours une interruption de courte durée (CA Amiens, 2 septembre 2024, n° 23/00964 N° Lexbase : A91225X7).
Lorsque la caisse engage des investigations avant de statuer sur le caractère professionnel d'un accident, elle adresse un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de celui-ci à l'employeur ainsi qu'à la victime ou ses représentants, dans le délai de 30 jours francs. Ce questionnaire doit être retourné dans un délai de 20 jours francs à compter de sa réception.
Ce délai imparti à l'employeur et à la victime ou ses représentants pour répondre aux questionnaires est seulement indicatif de la célérité de la procédure à l'issue de laquelle la caisse doit statuer sur le caractère professionnel de l'accident. Il n'est assorti d'aucune sanction.
Il en résulte que la caisse n'est pas tenue d'informer l'employeur et la victime ou ses représentants du délai dans lequel ils doivent lui retourner le questionnaire qu'elle leur a adressé (Cass. civ. 2, 5 septembre 2024, n° 22-19.502, FS-B N° Lexbase : A75325XA).
S'appuyant sur sa jurisprudence récente qui a clarifié que les rentes versées par la Sécurité sociale n'indemnisent plus le déficit fonctionnel permanent, la Cour de cassation vient de préciser que cela s'applique également à l'allocation temporaire d'invalidité. Ainsi, une allocation temporaire d'invalidité versée par la Sécurité sociale ne peut pas être déduite de l'indemnisation versée par un tiers responsable pour compenser le déficit fonctionnel permanent d'une victime.
Il en résulte que la victime peut recevoir une indemnisation de la part de son employeur ou de l'assurance de l'auteur de l'accident pour compenser son incapacité permanente, même si elle perçoit déjà une allocation temporaire d'invalidité de la sécurité sociale (Cass. crim., 3 septembre 2024, n° 23-83.394, FS-B N° Lexbase : A24015X9).
Une circulaire de l'Assurance Maladie du 11 juillet 2024 précise les droits aux IJSS (indemnités journalières de Sécurité sociale), dans le contexte spécifique de l’arrivée en France d’un enfant issu de gestation ou de procréation pour autrui légalement menée à l’étranger par un ou des assurés français.
La circulaire rappelle que l’assurée qui accueille un enfant né de convention de gestation ou procréation pour autrui ne peut pas prétendre au bénéfice de l’indemnisation d’un congé de maternité. En effet, le congé maternité concerne la femme enceinte qui porte l’enfant et accouche. Ce droit accordé constitue une compensation des fatigues de la grossesse et de l’accouchement.
En revanche, l'indemnisation est possible au titre du congé de paternité et d’accueil de l’enfant et peut être examinée pour :
Un congé d’adoption peut également être indemnisé pour chaque assuré ayant un lien de filiation établi avec l’enfant né de gestation ou de procréation pour autrui par une procédure d’adoption (Circulaire CIR-20/2024 du 11 juillet 2024 [en ligne]).
👉 Travailleurs étrangers
Depuis le 1er septembre 2024, l'employeur doit respecter les obligations sociales liées à son statut ou à son activité et non plus les seules obligations déclaratives sociales.
Les infractions imputables à l'employeur, justifiant un refus d'autorisation de travail, incluent ainsi des manquements graves en matière pénale, de santé et de sécurité, ainsi que le non-respect des obligations sociales. Sont visées, d’une part, les condamnations pénales ou les sanctions administratives prononcées en cas de travail illégal, de violation des règles de santé et de sécurité au travail, d’aide à l'entrée et au séjour irrégulier en France, de méconnaissance des règles relatives au détachement temporaire, d’atteintes à la personne humaine, de faux et usage de faux, et d’autre part, la commission de manquements graves dans ces matières, même s’il n’y a pas eu de condamnation pénale ou sanction administrative.
Une possibilité de refus de délivrance de l’autorisation de travail est également introduite si le projet de recrutement de l'employeur apparaît manifestement disproportionné au regard de son activité économique.
Lorsque la demande concerne un emploi saisonnier, l’employeur doit fournir la preuve que le travailleur disposera, pour la durée de son séjour, d'un logement lui assurant des conditions de vie décentes.
Lorsque la demande d’autorisation de travail concerne un apprenti dont l’employeur est établi à l’étranger qui est accueilli dans une entreprise établie en France pour compléter sa formation, la demande est effectuée par l’entreprise d’accueil.
Lorsque la demande concerne un salarié détaché temporairement en France par une entreprise établie à l’étranger dans le cadre d’une opération de prêt de main-d’œuvre à but non lucratif, la demande est effectuée par l’entreprise utilisatrice.
Ces nouvelles conditions de délivrance des autorisations de travail sont entrées en vigueur le 1er septembre 2024 (Décret n° 2024-814 du 9 juillet 2024, relatif à l'amende administrative sanctionnant l'emploi de ressortissants étrangers non autorisés à travailler et modifiant les conditions de délivrance des autorisations de travail N° Lexbase : L1086MNK).
La loi « Immigration » du 26 janvier 2024 N° Lexbase : L3809MLN a prévu que l’emploi irrégulier d’un travailleur étranger (emploi d’un étranger sans titre de travail, ou dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autre que celle mentionnée sur son titre de travail) est désormais passible d’une amende administrative prononcée par le ministre chargé de l'Immigration, en remplacement des contributions spéciale et forfaitaire dues à l’OFII (Office français de l'intégration et de l'immigration).
Le montant maximal de cette amende est de 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti, soit 20 750 € au 1er juillet 2024, par travailleur étranger concerné.
Un décret du 9 juillet 2024 fixe les modalités d’application et de mise en œuvre de cette nouvelle amende administrative et élargit le champ d'application de la sanction aux personnes ayant recours aux services d'un employeur de ressortissants étrangers non autorisés à travailler (Décret n° 2024-814 du 9 juillet 2024, relatif à l'amende administrative sanctionnant l'emploi de ressortissants étrangers non autorisés à travailler et modifiant les conditions de délivrance des autorisations de travail N° Lexbase : L1086MNK).
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Réf. : CAA Lyon, 18 avril 2024, n° 21LY03607 N° Lexbase : A206428X
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par Marie-Claire Sgarra
Le 18 Septembre 2024
► La régularisation de la TVA non déduite au titre d'une période où le bien immobilier était affecté à une activité exonérée de cette taxe ne peut être demandée que pendant la période d'utilisation de ce bien destiné à une activité soumise à la TVA, soit à compter de l'exercice de l'option pour la TVA.
► Une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée, qui est formulée postérieurement à la date d'effet de l'option pour cette taxe, mais qui porte sur une période antérieure à l'option, date à partir de laquelle la société est devenue redevable de la TVA, est irrecevable.
Les faits. Une SCI qui avait pour activité des supports juridiques de gestion de patrimoine mobilier, a acquis l'usufruit temporaire d'un bien immobilier en Isère dont la nue-propriété a été acquise par une autre société.
Chronologie :
Procédure. La SCI relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de remboursement du crédit de TVA constaté dans cette déclaration.
Solution de la cour administrative d’appel
La régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée non déduite au titre d'une période où le bien immobilier était affecté à une activité exonérée de cette taxe, ne peut être demandée que pendant la période d'utilisation de ce bien destiné à une activité soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, soit à compter de l'exercice de l'option pour la taxe sur la valeur ajoutée et dans les conditions définies aux articles 260 N° Lexbase : L6023ISU, 261 D N° Lexbase : L0902MLY et 194 de l’annexe II N° Lexbase : L2772IZP.
En l’espèce, la SCI a demandé le remboursement de la TVA dans une déclaration souscrite postérieurement à la date d'effet de l'option pour la TVA qu'elle a formulée le 2 mai 2017, sa demande de remboursement portait sur une période, du 15 juillet 2016 au 1er mai 2017, antérieure à l'option, date à partir de laquelle elle est devenue redevable de la taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, sa demande de remboursement du crédit de TVA était irrecevable.
Précisions
Sur les effets de l'option pour la taxe sur la valeur ajoutée, le Conseil d’État a précisé dans un arrêt du 21 décembre 2023 que l'option en matière de location de locaux nue à usage de bureaux n'a pas d'effet rétroactif. Elle produit effet le premier jour du mois de son exercice (CE 3° et 8° ch.-r., 21 décembre 2023, n° 474042, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A36952A4).
Lire en ce sens sur cette affaire les conclusions de la Rapporteure publique, K. Ciavaldini, Lexbase Fiscal, janvier 2024, n° 970 N° Lexbase : N8104BZ8. |
► La CJUE a quant à elle jugé que la régularisation est applicable dans une situation dans laquelle un bien d'investissement a d'abord été affecté à une activité exonérée, qui n'ouvrait pas droit à déduction, puis, pendant la période de régularisation, a été utilisé aux fins d'une activité soumise à la TVA. Un État membre qui accorde à ses assujettis le droit d'opter pour l'imposition de la location d'un immeuble n'est pas autorisé à exclure la déduction de la TVA pour des investissements immobiliers effectués avant que soit exercé ce droit d'option, lorsque la demande présentée en vue de l'exercice de cette option n'a pas été introduite dans les six mois à partir de la mise en service de cet immeuble (CJCE, 30 mars 2006, aff. C-184/04, Uudenkaupungin kaupunki N° Lexbase : A8302DNS).
Lire sur cet arrêt, Y. Sérandour, Option pour la TVA et régularisation positive, Lexbase Fiscal, juillet 2006, n ° 224 N° Lexbase : N0987AL7. |
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