► Il résulte de la combinaison des articles L. 512-6, L. 511-21, alinéa 7, et L. 511-78 du Code de commerce que l’action cambiaire contre l’avaliste d’un billet à ordre est soumise à la prescription de trois ans édictée par le dernier texte cité pour l’action exercée contre l’accepteur.
L’aval est une garantie personnelle donnée par une personne appelée « donneur d’aval » (ou « avaliste »). Celui-ci va, en effet, s’engager à régler tout ou partie du montant de la traite à l'échéance en cas de carence de la personne pour le compte de laquelle il est donné, c'est-à-dire l'avalisé. C’est ainsi une forme « particulière » de cautionnement commercial dont le régime spécifique est défini à l'article L. 511-21 du Code de commerce N° Lexbase : L6674AIZ.
L’aval apposé sur un billet à ordre a donné lieu, ces derniers mois, à des décisions remarquées (v. par ex., Cass. com., 7 février 2024, n° 23-18.633, F-D N° Lexbase : A65012LD ; Cass. com., 2 mai 2024, n° 22-19.408, F-D N° Lexbase : A52845AX). Nous en avons ici une nouvelle illustration.
Faits et procédure. Le 1er août 2016, la société G. avait souscrit en faveur de la banque X. un billet à ordre à échéance du 5 septembre 2016, prorogée au 15 septembre 2016, avalisé par son gérant, M. H. Le 20 janvier 2017, la société avait été mise en redressement judiciaire.
Le 7 février 2018, la banque avait assigné M. H. en paiement du montant du billet à ordre en sa qualité d’avaliste. Cependant, la cour d’appel d’Amiens avait, par une décision du 21 juillet 2022 (CA Amiens, 21 juillet 2022, n° 20/04984 N° Lexbase : A70038DQ), déclaré irrecevables comme prescrites ses demandes au titre de l’aval du billet à ordre. L’établissement de crédit X. avait alors formé un pourvoi en cassation.
Décision. Ce dernier se révèle utile puisque, par l’arrêt étudié, la Cour de cassation casse la décision des juges du fond.
Elle commence par indiquer qu’aux termes de l'article L. 512-6 du Code de commerce N° Lexbase : L6740AIH, le souscripteur d'un billet à ordre est obligé de la même manière que l’accepteur d’une lettre de change et, selon l’article L. 511-21, alinéa 7, de ce code, rendu applicable au billet à ordre en vertu de l’article L. 512-4 N° Lexbase : L6738AIE, le donneur d’aval est lui-même tenu de la même manière que celui dont il s'est porté garant.
De plus, elle rappelle que l’article L. 511-78 du Code de commerce N° Lexbase : L6731AI7, rendu applicable au billet à ordre en vertu de l'article L. 512-3 N° Lexbase : L6737AID, dispose, en son premier alinéa, que toutes actions résultant de la lettre de change contre l’accepteur se prescrivent par trois ans à compter de la date de l’échéance et, en son deuxième alinéa, que les actions du porteur contre les endosseurs et contre le tireur se prescrivent par un an à partir de la date du protêt dressé en temps utile ou de celle de l'échéance, en cas de clause de retour sans frais.
Dès lors, il résulte de la combinaison de ces textes que l’action cambiaire contre l’avaliste d'un billet à ordre est soumise à la prescription de trois ans édictée par le dernier texte cité pour l'action exercée contre l'accepteur.
Or, pour déclarer prescrite l’action en paiement dirigée contre M. H., la cour d’appel avait énoncé que l’action du porteur à l’encontre de l’avaliseur d’un billet à ordre suivait le même régime de prescription annale que l’action du porteur à l’encontre du tireur prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 511-78 et constaté que l’action de la banque avait été introduite plus d’un an après la date d'échéance du billet à ordre litigieux.
Dès lors, en statuant ainsi, la cour d’appel d’Amiens, avait violé les articles L. 512-3, L. 512-4, L. 512-6, L. 511-21, alinéa 7, et L. 511-78, alinéas 1er et 2, du Code de commerce.
Observations. Cette solution est convaincante à la vue de ces dispositions légales. Il est cependant regrettable que les juges soient ainsi obligés de « jongler » avec tous ces textes pour connaître la durée exacte du délai de prescription applicable à l’action cambiaire contre l’avaliste. Une clarification des textes applicables pourrait donc être ici utile.
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