La lettre juridique n°986 du 6 juin 2024

La lettre juridique - Édition n°986

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Jurisprudence] L’action aux fins d’inopposabilité de la décision de prise en charge de l’accident n’interrompt pas le délai de la prescription biennale de l’action en faute inexcusable

Réf. : Cass. civ. 2, 25 avril 2024, n° 22-16.197, F-B N° Lexbase : A917428B

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par Bruno Fieschi, Avocat associé, Flichy Grangé Avocats

Le 05 Juin 2024

Mots-clés : accident du travail • maladies professionnelles • indépendance des rapports caisse-assuré et caisse-employeur • action en reconnaissance de la faute inexcusable d’employeur • délai de la prescription biennale et cause interruptive du délai de prescription

Le délai de la prescription biennale applicable à l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur est interrompu par l’exercice de l’action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident (CSS, art. L. 431-2). En raison de l'indépendance des rapports entre la caisse et la victime, d'une part, et de ceux entre la caisse et l'employeur, d'autre part, l'exercice par ce dernier d'une action aux fins d'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle, qui est sans incidence sur la décision de reconnaissance de son caractère professionnel à l'égard de la victime, n'interrompt pas le délai de la prescription biennale de l'action exercée par la victime en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur. En conséquence, l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur engagée plus de deux ans après la cessation du paiement des indemnités journalières en lien avec l’accident du travail est prescrite.


La configuration du litige. La caisse primaire d'assurance maladie prend en charge le 30 mars 2012, au titre de la législation professionnelle, un accident du travail survenu le 8 septembre 2011, puis elle fixe à 4 % le taux d'incapacité permanente de la victime à la date de consolidation du 12 novembre 2012. Dans les suites de la décision de prise en charge de l’accident, l’employeur saisit le 4 juillet 2012 une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale d'un recours en inopposabilité de cette décision.

Après être intervenue volontairement, le 21 août 2013, à l'instance initiée par l'employeur, la victime forme en cours d’instance une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur le 2 mars 2016. La juridiction de première instance donne acte à la victime de son intervention volontaire aux débats dans le litige opposant l’employeur et la caisse relatif à l’inopposabilité de la décision de prise en charge, ordonne la disjonction de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur formée par la salariée en renvoyant son examen à une prochaine audience ; et statue sur le recours en déclarant opposable à l’employeur la décision de prise en charge de l’accident du travail.

À la suite de la disjonction de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable, la salariée est déclarée prescrite en son action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, tant en première en instance qu’en appel, dès lors que la victime ne justifie pas avoir interrompu utilement le délai de la prescription biennale, eu égard aux différents points de départ possibles de ce délai [1] , notamment en pouvant se prévaloir de l’effet interruptif du délai de prescription d’une action en reconnaissance du caractère professionnel de l’accident. La cour d’appel juge notamment que, « en application du principe de l’indépendance des rapports entre la caisse et la victime, d’une part, la caisse et l’employeur, d’autre part, l’instance engagée par l’employeur aux fins de voir déclarer inopposable à son égard la décision de prise en charge était sans incidence sur les droits de la salariée et, notamment, ne privait pas cette dernière du droit de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur » [2].

Les termes du débat relatif à l’application des règles de la prescription biennale. S’agissant de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, il résulte de l’application combinée des dispositions des articles L. 431-2 N° Lexbase : L2713LWE et L. 452-1 N° Lexbase : L5300ADN du Code de la Sécurité sociale que, en cas d'accident du travail ou de maladies professionnelles, les droits à une indemnisation complémentaire de la victime ou de ses ayants droit se prescrivent dans un délai de deux ans. Le point de départ de ce délai peut être le jour de l’accident ou de la cessation de paiement des indemnités journalières versées au titre de la prise en charge des accidents du travail et des maladies professionnelles [3] ; et il ne peut commencer à courir qu’à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie [4]. En outre, le dernier alinéa de l’article L. 431-2 du Code de la Sécurité sociale ajoute que le délai de la prescription biennale est interrompu par l’exercice de l’action pénale engagée pour les mêmes faits [5] ou de l’action en reconnaissance du caractère professionnel de l’accident. Ainsi, au-delà de la connaissance du délai de la prescription applicable, la détermination du point de départ de la prescription biennale, pouvant être différé par des causes interruptives, apparaît tout aussi importante et ce, d’autant plus que le point de départ du délai est à choix multiple et qu’il convient de retenir le point de départ le plus récent [6].

Au soutien de son pourvoi en cassation, et après avoir été déclarée prescrite en son action, la victime faisait grief à l’arrêt attaqué d’avoir retenu que l’instance engagée par l’employeur aux fins de se voir déclarer inopposable la décision de prise en charge de l’accident au titre de la législation professionnelle était sans incidence sur les droits de la salariée  alors que cette action visait à remettre en cause, selon elle, le caractère professionnel de l’accident, et que, en conséquence, le délai de la prescription biennale n’avait recommencé à courir qu’à compter de la reconnaissance définitive de ce caractère par la juridiction saisie par l’employeur.

La solution juridique retenue par l’arrêt rendu le 25 avril 2024. En raison de l’indépendance des rapports entre la caisse et la victime, d’une part, et de ceux entre la caisse et l’employeur, d’autre part, l’exercice par ce dernier d’une action aux fins d’inopposabilité de la décision de prise en charge de l’accident au titre de la législation professionnelle, qui est sans incidence sur la décision de reconnaissance de son caractère professionnel à l’égard de la victime, n’interrompt pas le délai de la prescription biennale de l’action exercée par la victime en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur. La contestation par l’employeur du caractère professionnel de l’accident était sans incidence sur la prise en charge dont bénéficiait la victime depuis le 30 mars 2012, le délai de prescription de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur n’avait pas été interrompu, de sorte que l’action engagée par la victime plus de deux ans après la cessation du paiement des indemnités journalières était prescrite.

L’apport juridique de l’arrêt rendu le 25 avril 2024 tient à ce que la deuxième civile de la cour de cassation fait une application du principe de l’indépendance des rapports entre la caisse et la victime, et de ceux entre la caisse et l’employeur (I.) pour déterminer si l’action engagée par l’employeur aux fins d’inopposabilité de la décision de prise en charge de l’accident ou de maladie a un effet interruptif sur le délai de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur (II.).

I. Le principe de l'indépendance des rapports gouverne l’articulation des contentieux générés par les décisions d’accord ou de refus de prise en charge adoptées par la CPAM

Spécifique à la législation professionnelle des accidents du travail et des maladies professionnelles, ce principe a pour principale conséquence que la décision prise par la caisse obéit pour chaque destinataire, employeur et victime, à un régime autonome. Les droits de l'un sont donc indifférents à la contestation formée par l’autre. Il s’agit de l’indépendance des rapports caisse / employeur et caisse / victime qui induit une indépendance des procédures en contestation des décisions adoptées par la CPAM.

Ainsi, toute décision revêt, dès sa notification à la personne à laquelle elle ne fait pas grief, un caractère définitif à son égard dans ses rapports avec la caisse. La décision initiale de refus de prise en charge revêt un caractère définitif à l’égard de l’employeur, sans que cet effet juridique puisse être remis en cause par une décision ultérieure [7] ; et quand bien même la seconde décision en sens contraire intervient sur le seul recours de la victime, l’employeur n’a pas d’intérêt à agir à l’encontre de la décision de prise en charge [8].

Parallèlement, la décision de justice rendue sur la contestation par l’employeur du caractère professionnel d'une affection demeure sans incidence sur la prise en charge au titre de la législation professionnelle de cette affection décidée par la caisse au profit de la victime, qu’elle soit partie ou non à l’instance [9] ; et cette solution prévaut quel que soit le motif du recours exercé par l’employeur. En conséquence de quoi, la victime intervenant volontairement à une instance relative aux rapports entre la caisse et l’employeur peut être déclarée irrecevable pour défaut d’intérêt à agir [10].

Enfin, le fait que le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie ne soit pas établi entre la caisse et l'employeur ne prive pas la victime ou ses ayants droit de la faculté de faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur. Dans ce cas, il appartient à la juridiction saisie d'une telle action de rechercher, après débat contradictoire, si l'accident ou la maladie a un caractère professionnel et si l'assuré a été exposé au risque dans des conditions constitutives d'une faute inexcusable [11].

II. L’action engagée par l’employeur aux fins d’inopposabilité de la décision de prise en charge de l’accident ou de maladie n’a pas un effet interruptif sur le délai de la prescription biennale de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur

Si la solution juridique dégagée par l’arrêt commenté du 25 avril 2024 se fonde sur une jurisprudence constante relative à l’indépendance des rapports entre la caisse et la victime, il n’en reste pas moins qu’elle permet de préciser que, quand bien même l’employeur conteste le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie aux fins d’inopposabilité de la décision de prise en charge, dans ses rapports avec la CPAM, cette action n’est pas pour autant une action qui a un effet interruptif sur le délai de la prescription biennale de l’action en faute inexcusable, puisque l’action engagée par l’employeur ne permet pas de remettre en cause le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, définitivement acquis dans les rapports entre la caisse et la victime.

En conséquence, la victime qui n’avait pas exercé le recours en faute inexcusable dans le délai de deux ans à compter du jour de la reconnaissance du caractère de l’accident ou du jour de la cessation de paiement des indemnités journalières, ne pouvait pas valablement soutenir que l’action engagée par l’employeur dans ses rapports avec la CPAM devait être assimilée à une action en reconnaissance du caractère professionnel de l’accident, au motif qu’elle avait pour effet de différer la reconnaissance définitive du caractère professionnel de l’accident jusqu’à ce qu’une décision définitive ne tranche le litige opposant l’employeur et la caisse. Le moyen au soutien du pourvoi faisant fi du principe de l’indépendance des rapports entre la caisse et de la victime, et de ceux entre la caisse et l’employeur, est rejeté par la Cour de cassation qui approuve la cour d’appel ayant déclaré le recours en faute inexcusable prescrit dès lors qu’il a été engagé par la victime plus de deux ans après la cessation de paiement des indemnités journalières en lien avec l’accident du travail.

La solution juridique dégagée par l’arrêt commenté apparaît également en cohérence avec les dispositions de l’article 2241 du Code civil N° Lexbase : L7181IA9 dont il résulte que si, en principe, l’interruption de prescription ne peut s’étendre d’une action à l’autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu’ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première [12], ce qui peut aboutir à des solutions juridiques nuancées lorsqu’il est apprécié l’effet interruptif d’une saisine du conseil de prud’hommes sur la prescription de l’action en faute inexcusable [13]. Or, si le but de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur tend à octroyer à la victime des réparations complémentaires aux prestations en espèce ou en nature prévues par le régime forfaitaire de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles dans le cadre d’une action en responsabilité de l’employeur, celui de l’action engagée par l’employeur aux fins d’inopposabilité de la décision de prise en charge de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle consiste à neutraliser le coût financier de la décision adoptée par la CPAM, eu égard à son caractère bien-fondé ou non, dans le cadre d’une appréciation judiciaire de la légalité de la décision adoptée au regard des dispositions d’ordre public du code de la sécurité sociale.

Autrement dit, en matière de contentieux AT/MP, il convient d’engager les différentes actions judiciaires avec discernement, à l’aune du principe de l’indépendance des rapports. La victime qui a obtenu la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne doit pas se tromper de voie procédurale pour que son droit à une indemnisation complémentaire soit préservé, alors qu’elle a finalement assez peu à gagner à intervenir à une procédure opposant la caisse et l’employeur, après avoir obtenu la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident. En dernier lieu, c’est la juridiction saisie de l’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur qui a vocation à trancher définitivement le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie, dans le cadre d’un débat contradictoire opposant la victime et l’employeur [14], mais encore faut-il que, d’une part, la victime exerce l’action ; et, d’autre part, qu’elle l’exerce dans un temps non prescrit.


[1] Ch. Blanc Laussel, Prescription biennale et faute inexcusable de l’employeur : précisions sur son point de départ et ses causes suspensives et interruptives à la lumière de la jurisprudence récente, Lexbase Social, septembre 2023, n° 958 N° Lexbase : N6889BZ8.

[2]  CA Lyon, 5 avril 2022, n° 19/00284 N° Lexbase : A45697SZ.

[3] Cass. civ. 2, 18 janvier 2005, n° 03-17.564, FS-P+B N° Lexbase : A0863DG3 ; Cass. civ. 2, 9 juillet 2009, n° 08-15.481, F-D N° Lexbase : A7338EIM.

[4] Cass. civ. 2, 3 avril 2003, n° 01-20.872, FS-P+B N° Lexbase : A6529A7X ; Cass. soc., 29 juin 2004, n° 03-10.789, publié N° Lexbase : A9044DCX ; Cass. civ. 2, 14 mars 2013, n° 12-11.856, F-D N° Lexbase : A9790I9H ; Cass. civ. 2, 2 avril 2015, n° 14-14.577, F-D N° Lexbase : A0938NGT.

[5] Cass. civ. 2, 23 janvier 2020, n° 18-19.080, F-P+B+I N° Lexbase : A59583CN.

[6] Cass. soc., 12 décembre 2002, n° 01-03.243, F-D N° Lexbase : A4190A4X.

[7] Cass. civ. 2, 20 décembre 2018, n° 17-21.528, FS-P+B N° Lexbase : A6613YRD.

[8] Cass. civ. 2, 22 octobre 2020, n° 19-16.999, F-P+B+I N° Lexbase : A87423YG.

[9] Cass. civ. 2, 19 février 2009, n° 08-10.544, FS-P+B N° Lexbase : A3989ED4.

[10] CA Paris, 6-13, 10 juin 2022, n° 20/05122 N° Lexbase : A513977H.

[11] Cass. soc., 28 février 2002, n° 99-17.201, publié, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A0761AYT ; Cass. civ. 2, 4 novembre 2010, n° 09-16.203, F-P+B N° Lexbase : A8993GG8 ; Cass. civ. 2, 10 mai 2012, n° 11-15.406, F-D N° Lexbase : A1347ILH.

[12] Cass. civ. 2, 21 janvier 2010, n° 09-10.944, F-P+B N° Lexbase : A4784EQA.

[13] Cass. civ. 2, 6 juillet 2017, n° 16-22.243, F-D N° Lexbase : A8255WLC ; Cass. civ. 2, 31 mai 2018, n° 17-18.793, F-D N° Lexbase : A1790XQD ; Cass. civ. 2, 7 juillet 2022, n° 20-21.294, F-D N° Lexbase : A72198AM.

[14] Cass. soc., 28 février 2002, n° 99-17.201, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A0761AYT ; Cass. civ. 2, 4 novembre 2010, n° 09-16.203, F-P+B N° Lexbase : A8993GG8 ; Cass. civ. 2, 10 mai 2012, n° 11-15.406, F-D N° Lexbase : A1347ILH.

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Baux commerciaux

[Brèves] Contentieux de la fixation du loyer de renouvellement du bail commercial en cas de loyer binaire

Réf. : Cass. civ. 3, 30 mai 2024, n° 22-16.447, FS-B+R N° Lexbase : A97735DC

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N9529BZX

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par Vincent Téchené

Le 05 Juin 2024

Le moyen par lequel une partie à un bail commercial s'oppose à une demande en fixation du prix du bail renouvelé à la valeur locative au motif que les parties sont convenues d'un loyer comprenant une part variable, sans prévoir de recours au juge des loyers commerciaux pour fixer la part fixe ou le minimum garanti à la valeur locative, s'analyse en une défense au fond et non en une fin de non-recevoir. Si les parties à un bail commercial qui stipule une clause de loyer variable manifestent, en principe, une volonté d'exclure une fixation judiciaire du prix du bail renouvelé à la valeur locative, il en va autrement lorsqu'elles ont exprimé une volonté commune contraire. Dès lors, même en l'absence d'une clause expresse de recours au juge des loyers commerciaux, il appartient à celui-ci, lorsqu'il est saisi d'un tel moyen de défense au fond, de rechercher cette volonté commune contraire, soit dans le contrat, soit dans des éléments extrinsèques. Enfin, le fait que toute contestation sur le prix d'un bail renouvelé ne se résolve pas par une fixation judiciaire à la valeur locative et puisse, aboutir au maintien du loyer antérieur, ne méconnaît pas le droit d'accès au tribunal consacré par l'article 6, § 1, de la CESDH mais procède de l'autonomie de la volonté des parties.

Faits et procédure. Le 26 avril 1966, une SCI a donné à bail des locaux commerciaux pour une durée de vingt-cinq ans moyennant un loyer fixé en fonction du coût de l'investissement.

En cours de bail, par avenant du 8 mars 1979, les parties sont convenues d'augmenter le loyer et d'insérer une clause selon laquelle le loyer annuel ne pourra être inférieur à 1,50 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé par le preneur dans les locaux entre les 1er janvier et 31 décembre de chaque année.

Par jugement du 7 juin 1996, les parties n'ayant pu fixer amiablement le prix du bail renouvelé, le loyer a été fixé judiciairement. Par avenant du 16 juin 1997, les parties se sont ensuite accordées pour retenir comme montant du loyer la somme fixée par le juge et pour stipuler une clause identique à celle précitée. Par avenant du 11 janvier 2001, elles sont convenues d'une augmentation du loyer et ont maintenu ladite clause.

Par avenant du 30 juin 2003, après avoir rappelé l'historique de leurs relations contractuelles, les parties se sont accordées sur le renouvellement du bail pour une durée de douze ans, moyennant un loyer annuel minimum garanti fixé à la somme de 247 623,20 euros par an hors taxes et hors charges et pour reconduire ladite clause.

Le 24 mars 2015, la locataire a sollicité le renouvellement du bail à compter du 1er avril 2015. Le 23 juin 2015, la bailleresse a accepté le principe du renouvellement.

Par mémoire préalable du 29 mars 2017, la bailleresse a sollicité la fixation du prix du bail renouvelé à la somme de 800 000 euros par an aux motifs que le bail expiré avait été conclu pour une durée de douze ans et que, dès lors, le loyer n'était pas plafonné et qu'il devait être fixé à la valeur locative.

À défaut d'accord, par acte du 18 octobre 2018, elle a assigné la locataire devant le juge des loyers commerciaux en fixation du prix du loyer renouvelé.

Par mémoire en réponse du 30 novembre 2018, la locataire a sollicité une fixation du prix du bail renouvelé à la somme de 545 000 euros et l'étalement de la hausse du déplafonnement.

Puis, par mémoire rectificatif du 11 avril 2019, elle a soulevé l'incompétence du juge des loyers commerciaux et l'irrecevabilité de la demande de la bailleresse, arguant que le loyer binaire était régi uniquement par la volonté des parties.

Décision. C’est dans ces conditions que la Cour de cassation, par un moyen relevé d’office censure l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 24 février 2022, n° 19/1762 N° Lexbase : A50727PK, V. Téchené, Lexbase Affaires, mars 2022, n° 710 N° Lexbase : N0868BZ8).

Elle rappelle notamment qu’ il résulte des articles L. 145-33 N° Lexbase : L5761AI9 à L. 145-36 N° Lexbase : L0894ING du Code de commerce, qu'à défaut d'accord des parties sur le montant du loyer du bail renouvelé, celui-ci est fixé judiciairement à la valeur locative.

Par ailleurs, selon l'article R. 145-23 du Code de commerce N° Lexbase : L4149LTT, les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont portées, quel que soit le montant du loyer, devant le président du tribunal judiciaire ou le juge qui le remplace. Les autres contestations sont portées devant le tribunal judiciaire qui peut, accessoirement, se prononcer sur ces demandes.

Ensuite, aux termes de l'article 71 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1286H4E, constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire. Aux termes de l'article 122 du même code N° Lexbase : L1414H47, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix et la chose jugée.

La Haute juridiction constate que le pourvoi pose la question préalable de la qualification du moyen soulevé par l'une des parties à un bail commercial pour s'opposer à une demande en fixation du prix du bail renouvelé à la valeur locative, au motif que les parties sont convenues d'un loyer comprenant une part variable sans prévoir de recours au juge des loyers commerciaux pour fixer la part fixe ou le minimum garanti à la valeur locative.

L'article R. 145-23 du Code de commerce étant applicable à toute demande en fixation du prix d'un bail renouvelé sans exclusion pour les baux stipulant un loyer comprenant une part variable, un tel moyen s'analyse en une défense au fond et non en une fin de non-recevoir.

En conséquence, pour la Cour de cassation, le juge des loyers commerciaux ne peut déclarer irrecevable une telle demande, mais doit l'examiner au fond.

La Cour de cassation constate qu’il en découle une autre question relative à l'office du juge des loyers commerciaux saisi d'une contestation portant sur le prix du bail renouvelé d'un loyer comprenant une part variable.

Elle rappelle que sur ce point, la jurisprudence a évolué. En dernier lieu, la Cour de cassation a jugé que lorsque les parties sont convenues d'un loyer comprenant un minimum garanti et une part variable, elles peuvent prévoir, par une clause du contrat, de recourir au juge des loyers commerciaux pour évaluer, lors du renouvellement, ce minimum garanti à la valeur locative (Cass. civ. 3, 3 novembre 2016, n° 15-16.826, , FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4695SCU, J.-P. Dumur, Lexbase Affaires, novembre 2016, n° 488 N° Lexbase : N5296BW3 ; Cass. civ. 3, 29 novembre 2018, n° 17-27.798, FS-P+B+I N° Lexbase : A9307YNZ, B. Brignon, Lexbase Affaires, décembre 2018, n° 576 N° Lexbase : N6762BXQ).

En effet, d'une part, les dispositions du Code de commerce relatives à la fixation du prix du bail renouvelé étant supplétives de la volonté des parties, celles-ci sont libres de déterminer des conditions de fixation du prix du bail renouvelé excluant une fixation judiciaire à la valeur locative, d'autre part, le juge des loyers commerciaux ne peut déterminer qu'une somme fixe et ne peut modifier la clause de loyer variable, reconduite dans le bail renouvelé.

Si les parties qui stipulent une clause de loyer variable manifestent ainsi, en principe, une volonté d'exclure une fixation judiciaire du prix du bail renouvelé à la valeur locative, il en va autrement lorsqu'elles ont exprimé une volonté commune contraire.

Dès lors, pour la Haute juridiction, même en l'absence d'une clause expresse de recours au juge des loyers commerciaux, il appartient à celui-ci, lorsqu'il est saisi du moyen de défense au fond de rechercher cette volonté commune contraire, soit dans le contrat, soit dans des éléments extrinsèques.

Ainsi, le fait que toute contestation sur le prix d'un bail renouvelé ne se résolve pas par une fixation judiciaire à la valeur locative et puisse aboutir au maintien du loyer antérieur, les parties pouvant toujours exercer leur droit d'option, ne méconnaît pas le droit d'accès au juge consacré par l'article 6 § 1 de la CESDH N° Lexbase : L7558AIR.

La Cour de cassation censure alors l’arrêt d’appel qui a déclaré irrecevable la demande en fixation judiciaire du loyer renouvelé.

En effet, la locataire ne soulevait pas une fin de non-recevoir mais une défense au fond et la cour d'appel devait restituer son exacte qualification à ce moyen et rechercher, comme le lui demandait la bailleresse, si les parties n'avaient pas exprimé une volonté commune, en cas de désaccord, de voir fixer judiciairement le prix du bail renouvelé à la valeur locative.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La clause-recettes du bail commercial, L'exclusion des mécanismes légaux de fixation du prix du bail renouvelé en présence d'une clause recettes au contrat de bail commercial, in Baux commerciaux (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E8942AEW.

 

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Construction

[Brèves] L’assurance obligatoire ne garantit pas les dommages à l’ouvrage existant

Réf. : Cass. civ. 3, 30 mai 2024, n° 22-20.711, FP-B N° Lexbase : A97745DD

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J AVOCATS, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 05 Juin 2024

► Clarification : l’article L. 243-1-1, II, du Code des assurances reprend de sa superbe ;

L’assurance obligatoire ne s’applique que si l’ouvrage existant s’incorpore totalement dans l’ouvrage neuf ;

À défaut, les dommages subis par l’existant ne relèvent pas de l’assurance obligatoire des constructeurs.

À quelques jours du revirement de jurisprudence aux termes duquel les éléments d’équipements sur existant ne sont plus éligibles aux garanties légales sauf lorsqu’ils sont constitutifs d’un ouvrage (Cass. civ. 3, 21 mars 2024, n° 22-18.694 FS-B+R N° Lexbase : A24682WC), cette décision est la bienvenue en ce qu’elle en est le prolongement naturel.

Tous se souviennent de l’arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 26 octobre 2017 (Cass. civ. 3, 26 octobre 2017, n° 16-18.120, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A8797WWQ), relatif au régime de la garantie d’assurance applicable à la responsabilité civile des constructeurs au titre des dommages consécutifs causés aux existants. Cet arrêt, pour protéger le constructeur et le contraindre à s’assurer, avait refusé d’appliquer l’article L. 243-1-1, II, du Code des assurances N° Lexbase : L2007IBX qui exclut l’application des garanties d’assurance obligatoire pour l’indemnisation des dommages aux existants. Cet arrêt s’inscrivait dans le prolongement de l’arrêt sur les responsabilités rendu par cette même chambre, le 15 juin 2017 (Cass. civ. 3, 15 juin 2017, n° 16-19.640, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6831WHH).

La façon est la même. Après une décision sur les responsabilités, suit celle sur le régime d’assurance obligatoire. La démarche est cohérente, à la faveur des assureurs.

En l’espèce, des maîtres d’ouvrage ont confié à un constructeur des travaux de remplacement des tuiles de la couverture de leur maison d’habitation. Les travaux se sont terminés en janvier 2012 et ont été tacitement réceptionnés. Se plaignant d’une déformation du rampant de la toiture, les maîtres d’ouvrage assignent le constructeur et son assureur de responsabilité civile décennale.

La cour d’appel de Caen, dans un arrêt rendu le 14 juin 2022 (CA Caen, 14 juin 2022, n° 19/01103 N° Lexbase : A653877B), condamne l’assureur à garantir les dommages à l’existant. Il forme un pourvoi en cassation qui est accueilli.

Au visa de l’article L. 243-1-1, II, précité, la Haute juridiction rappelle que les articles relatifs à l’assurance obligatoire ne sont pas applicables aux ouvrages existants avant l’ouverture du chantier à l’exception de ceux qui, totalement incorporés dans l’ouvrage neuf, en deviennent complètement indivisibles.

Il en résulte que l’assurance obligatoire ne garantit les dommages à l’ouvrage existant provoqués par la construction d’un ouvrage neuf que dans le cas d’une indivisibilité technique des deux ouvrages et si celle-ci procède de l’incorporation totale de l’existant dans le neuf.

Faute de rapporter cette double condition, dont l’appréciation relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond, il n’est pas possible de condamner l’assureur de responsabilité civile décennale à garantir les dommages subis à l’existant.

Ainsi, les juges du fond auraient dû rechercher si la charpente forme un tout indivisible pour constituer la toiture.

newsid:489503

Contrats administratifs

[Brèves] Office du juge de plein contentieux saisi de l'irrégularité portant sur des clauses divisibles du contrat

Réf. : CE, 9°-10° ch. réunies, 17 mai 2024, n° 466568, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A00685CI

Lecture: 2 min

N9531BZZ

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par Yann Le Foll

Le 06 Juin 2024

► Dans le cas où l'irrégularité constatée n'affecte que des clauses divisibles du contrat, le juge, saisi d'un recours contestant la validité du contrat, peut prononcer, s'il y a lieu, la résiliation ou l'annulation de ces seules clauses ;

► De même, le juge, saisi d'un litige relatif à l'exécution du contrat, peut, le cas échéant, régler le litige sur le terrain contractuel en écartant l'application de ces seules clauses.

Position CE. Les parties à un contrat d'achat d'électricité, comme celui en cause dans le présent litige, ne peuvent contractuellement déroger aux tarifs d'achat fixés par l'arrêté interministériel, pris sur le fondement du décret n° 2001-410 du 10 mai 2001 N° Lexbase : L6531A4N, correspondant à la filière de production électrique concernée (pour rappel, il avait déjà été jugé qu’en cas de divisibilité des clauses illicites du contrat, le juge peut toutefois régler le litige dans le cadre contractuel en écartant l'application de ces seules clauses, CE, 4 mai 2011, n° 340089, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0970HQY).

Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué (CAA Marseille, 6ème ch., 8 juin 2022, n° 19MA04319 N° Lexbase : A658679S) que la cour a jugé que les stipulations de l'article 5 du contrat conclu entre les sociétés SMA Energie et EDF revêtaient ainsi un caractère illicite en tant qu'elles prévoient le versement de la prime à la méthanisation, qui ne pouvait être légalement versée en l'espèce en application de l'arrêté du 10 juillet 2006. La cour a retenu que cette clause était divisible des autres stipulations du contrat et a entendu prononcer son annulation.

Décision. En statuant ainsi, la cour, qui a nécessairement jugé qu'il ne pouvait être fait application de cette clause contractuelle, n'a pas commis d'erreur de droit, ni insuffisamment motivé son arrêt.

Action en restitution. Il résulte de l'article 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC que la prescription de l'action en restitution intentée par une partie à un contrat administratif comportant des irrégularités justifiant son annulation ne commence à courir qu'à compter du jour où le juge prononce, dans l'exercice de son office précité, l'annulation de ce contrat ou d'une clause divisible de ce contrat.

À ce sujet. Lire T. Gaspar, L’illicéité de la clause relative à la justification et aux modalités de calcul de la redevance versée par le délégataire, n’est pas de nature à entraîner la nullité de la convention de délégation de service public, Lexbase Public, 2020 N° Lexbase : N4495BY7.

newsid:489531

Conventions et accords collectifs

[Brèves] Pour dénoncer un accord collectif, encore faut-il le faire explicitement !

Réf. : Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-23.415, F-B N° Lexbase : A84215DA

Lecture: 2 min

N9487BZE

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par Lisa Poinsot

Le 05 Juin 2024

► Une décision unilatérale de l’employeur ne peut emporter dénonciation implicite d’un accord collectif portant sur le même objet.

Faits et procédure. Après l’échec de négociations de révision d’un accord collectif d’entreprise portant sur le régime de prévoyance complémentaire, l’employeur prend une décision unilatérale consistant à modifier l’accord collectif en question.

Le tribunal judiciaire a été saisi afin de constater que l’accord collectif a été mis à néant par la décision unilatérale de l’employeur.

La cour d’appel a admis que l’accord collectif à l’origine de la mise en place du régime de prévoyance complémentaire a été implicitement dénoncé de sorte que le second accord relatif à la participation au financement du régime est devenu caduc. Ainsi, les décisions unilatérales sont nulles.

Un pourvoi est formé par l’entreprise contre cette décision.

Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision d’appel sur le fondement de l’article 1134 devenu l'article 1103 N° Lexbase : L0822KZH du Code civil, les articles L. 2261-9 N° Lexbase : L2434H9Z et L. 2262-1 N° Lexbase : L2476H9L du Code du travail, les accords d'entreprise des 27 octobre 2006 et 4 décembre 2006.

La Haute juridiction affirme que la dénonciation d’un accord collectif ne peut être implicite.

Ainsi, la modification par voie de décision unilatérale de l’employeur, après échec des négociations collectives, d’un régime d’assurance complémentaire « frais de santé », instauré par voie d’accord collectif, rendues nécessaires par la mise en conformité avec des dispositions législatives et conventionnelles nouvelles, ne prive pas de cause et ne rend pas dès lors caduc un accord collectif antérieur relatif au cofinancement par les institutions représentatives du personnel de ce régime complémentaire au titre des activités sociales et culturelles.

Pour aller plus loin :

  • v. déjà Cass. soc., 21 mars 2006, n° 04-45.812, F-D N° Lexbase : A8036DNX : un accord collectif, même moins favorable, peut mettre un terme et se substituer à un usage ou à une décision unilatérale antérieure si ces normes ont le même objet ;
  • v. ÉTUDE : Les dispositions propres aux accords d’entreprise, La mise en œuvre de la dénonciation des accords d’entreprise, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2384ETH.
  • v. aussi ÉTUDE : La disparation des garanties, La dénonciation ou le non-renouvellement de l’accord collectif, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E2721038.

 

newsid:489487

Fiscalité des particuliers

[Brèves] Modalités d’imposition des gains nets de cession de titres dans le cas d’un couple marié sous le régime de la communauté universelle

Réf. : CE 3e et 8e ch. réunies, 26 avril 2024, n° 453014, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2412299

Lecture: 4 min

N9463BZI

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Juin 2024

Le Conseil d’État est revenu dans un arrêt du 26 avril 2024, sur le bénéfice de l’abattement dont peuvent bénéficier des dirigeants de PME, lors de leur départ à la retraite, sur la cession de leurs titres de sociétés.

Faits. Les requérants ont cédé des actions d’une société. L’administration fiscale remet en cause l’exonération d’imposition de la plus-value réalisée lors de cette cession.

Procédure. Le tribunal administratif de Bastia réduit le montant de la plus-value de cession au litige et prononce la réduction correspondante des impositions supplémentaires contestées et des pénalités. La cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et remis à la charge des requérants l’intégralité des impositions supplémentaires (CAA Marseille, 6 avril 2021, n° 19MA01814 N° Lexbase : A61284QZ).

Rappel. Les plus-values de cession réalisées par des dirigeants de PME prenant leur retraite bénéficient, sous conditions d’un abattement (CGI, art. 150-0 D ter N° Lexbase : L9350LHR).

Le bénéfice de cet abattement est subordonné à certaines conditions rappelées par le Conseil d’État dans cet arrêt.

Ces conditions, relatives à la personne du cédant, tiennent notamment à l'exercice effectif de fonctions de direction normalement rémunérées au sein de la société dont les titres sont cédés et à la cessation de toute fonction au sein de cette même société dans les deux années suivant ou précédant la cession.

Ici, il s’agissait d’un couple marié.

Pour le Conseil d’État, dans le cas d’un couple marié, le respect de ces conditions s'apprécie nécessairement, dans le cas d'un couple marié, au niveau de chaque conjoint pris isolément.

Si les dispositions de l'article 6 du Code général des impôts N° Lexbase : L7395MDA soumettent les personnes mariées à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles, cette règle n'implique pas, par elle-même, d'apprécier au niveau du foyer fiscal le respect des conditions d'éligibilité à l'abattement pour durée de détention applicable aux cessions réalisées par les dirigeants de sociétés lors de leur départ en retraite. Enfin la circonstance que les époux sont mariés sous le régime de la communauté, qu'il s'agisse de la communauté légale ou de la communauté universelle, est sans incidence sur l'appréciation individuelle que requiert l'application des dispositions fiscales en cause.

Précisions. Cette solution avait déjà été adoptée par le Conseil d’État en 2014 (CE 3e et 8e s.-sect. réunies, 10 décembre 2014, n° 371437, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6189M7D).

En appel, pour juger que la plus-value réalisée par les requérants lors de la cession des titres ne pouvait bénéficier du régime de l'abattement, la cour s'est fondée sur ce que l’époux avait seul la qualité de cédant de ces titres et qu'ayant fait valoir ses droits à la retraite dix ans avant la cession, il ne satisfaisait pas aux conditions posées par l’article 150-0 D ter du Code général des impôts précité.

Toutefois, en se fondant, pour juger que l’époux était l'unique cédant des titres en litige, sur la seule mention figurant dans la liasse fiscale déposée par la société au titre de l'exercice clos en 2011 selon laquelle l'intéressé était propriétaire de ces titres et en écartant l'acte de cession, produit par les requérants, qui désignait les époux comme les deux cédants des actions qu'ils détenaient conjointement à raison de leur mariage sous le régime de la communauté universelle, la cour a insuffisamment motivé son arrêt et commis une erreur de droit.

Par suite, l’arrêt de la cour administrative d'appel est annulé.

 

newsid:489463

Licenciement

[Brèves] Licenciement pour faute grave d’un DRH pour dissimulation d’une relation intime avec une salariée exerçant des mandats syndicaux

Réf. : Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-16.218, F-B N° Lexbase : A84155DZ

Lecture: 2 min

N9451BZ3

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par Charlotte Moronval

Le 05 Juin 2024

► Un salarié occupant des fonctions de direction et chargé notamment de la gestion des ressources humaines, peut être licencié pour avoir caché à son employeur la liaison qu'il entretient avec une autre salariée, exerçant des mandats de représentation syndicale et de représentation du personnel.

Faits. Un salarié exerçant des fonctions de direction, en particulier la gestion des ressources humaines, est licencié pour faute grave pour avoir dissimulé la relation intime qu'il entretient avec une salariée titulaire de mandats syndicaux et de représentation du personnel dans l'entreprise.

Contestant ce licenciement, le salarié saisit la juridiction prud’homale.

Position de la cour d’appel. Pour juger le licenciement pour faute grave justifié, la cour d’appel (CA Amiens, 25 novembre 2021, n° 21/01635 N° Lexbase : A69507DR), elle relève que ce salarié exerçait des fonctions de direction, chargé en particulier de la gestion des ressources humaines, et avait reçu du président du directoire de la société diverses délégations en matière d'hygiène, de sécurité et d'organisation du travail ainsi que pour présider, en ses lieux et place, de manière permanente, les différentes institutions représentatives du personnel.

Ce salarié avait caché à son employeur la relation amoureuse qu'il entretenait, depuis la fin de l'année 2008, avec une autre salariée, laquelle était, jusqu'à son départ de l'entreprise, en avril 2013 :

  • investie de mandats de représentation syndicale et de représentation du personnel ;
  • s'était investie en 2009 et 2010 dans des mouvements de grève et d'occupation d'un des établissements de l'entreprise et lors de la mise en oeuvre d'un projet de réduction d'effectifs ;
  • avait participé, en 2009 puis au cours de l'année 2012 et en janvier 2013, à diverses réunions où le salarié avait lui-même représenté la direction et au cours desquelles avaient été abordés des sujets sensibles relatifs à des plans sociaux.

Le salarié forme un pourvoi en cassation.

Solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle rappelle qu’un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.

En l’espèce, en dissimulant cette relation intime, qui était en rapport avec ses fonctions professionnelles et de nature à en affecter le bon exercice, le salarié a ainsi manqué à son obligation de loyauté à laquelle il était tenu envers son employeur, rendant impossible son maintien dans l'entreprise, peu important qu'un préjudice pour l'employeur ou pour l'entreprise soit ou non établi.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, La vie personnelle du salarié, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3369Z38.

 

newsid:489451

Procédure civile

[Panorama] De l’appel au pourvoi en passant par les conséquences des arrêts de cassation pour les juridictions de renvoi : quelques arrêts importants rendus par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation au mois de mai 2024

Réf. : Cass. civ. 2, 23 mai 2024, 3 arrêts, n° 22-17.104, F-B N° Lexbase : A86135CY, n° 22-11.817, F-B N° Lexbase : A86045CN, n° 22-11.175, FS-B N° Lexbase : A86015CK et Cass. civ. 2, 16 mai 2024, n° 22-22.543, F-B N° Lexbase : A62785B7

Lecture: 43 min

N9489BZH

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par Yannick Ratineau, Maître de conférences à l’Université Grenoble Alpes, Co-directeur de l’Institut d’Études Judiciaires de Grenoble, Co-directeur du BACAGe (Bulletin des arrêts de la cour d’appel de Grenoble), Centre de Recherches Juridiques – EA 1965

Le 05 Juin 2024

Mots-clés : voie de recours • appel • cassation • juridiction de renvoi après cassation • déclaration de saisine • appel compétence • délai • procédure à jour fixe • formalisme excessif • déclaration d’appel • signification • ministère public • premier président • impartialité

En ce mois de mai 2024, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rendu plusieurs arrêts dont les solutions intéressent l’exercice des voies de recours. Qu’il s’agisse de répondre à la question de savoir si les parties sont tenues d’indiquer dans leurs conclusions jointes à la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation si elles demandent l’infirmation ou l’annulation du jugement rendu en première instance, de savoir dans quel délai l'appelant d’un jugement statuant sur la compétence doit solliciter l'autorisation du premier président d'assigner à jour fixe, si l’obligation faite à l’appelant, dans une procédure de demande de retour d’enfant, de signifier sa déclaration d’appel à tous les intimés, y compris au procureur général lorsque le ministère public est partie principale à l’instance, ne constitue pas un formalisme excessif, ou encore des difficultés susceptibles de surgir lorsque la décision cassée a été prise par le premier président d’une cour d’appel et qu’il est désigné comme juridiction de renvoi devant être composée autrement. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a répondu à toutes ces problématiques au mois de mai 2024 par une série d’arrêts dont les solutions méritent d’être présentées et commentées.


  • Dispositif des conclusions : ce qui vaut pour la déclaration d’appel vaut pour la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi (Cass. civ. 2, 23 mai 2024, n° 22-17.104, F-B N° Lexbase : A86135CY)

L’on se souvient que les modifications apportées par le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 N° Lexbase : L2696LEL à la procédure d’appel en matière civile, notamment par la réécriture du contenu des articles 542 N° Lexbase : L7230LEI et 954 N° Lexbase : L7253LED du Code de procédure civile, a conduit la Cour de cassation à instaurer une règle nouvelle en en vertu de laquelle « lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement [1]. » Compte tenu de la sévérité de la sanction encourue par l’appelant, la Haute juridiction a fait le choix de moduler l’application de la règle nouvelle dans le temps en retenant qu’elle ne peut s’appliquer aux déclarations d’appel antérieures au 17 septembre 2020 [2]. Cette solution a-t-elle vocation à s’appliquer à la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation ? Voilà la question à laquelle la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a répondu dans un arrêt rendu le 23 mai 2024.

En l’espèce, une société de crédit (la banque) consent à une société civile immobilière (SCI) quatre prêts immobiliers. Invoquant l'inexactitude des taux effectifs globaux figurant sur les offres de prêt, la SCI assigne la banque afin d'obtenir, à titre principal, la déchéance totale du droit aux intérêts, et, à titre subsidiaire, l'annulation de la stipulation d'intérêts et la substitution de l'intérêt au taux légal. Par déclaration du 13 novembre 2015, la SCI relève appel du jugement de première instance l'ayant débouté de toutes ses demandes. La cour d’appel de Grenoble rend un arrêt [3] qui est censuré par la Cour de cassation [4] dans le cadre d’un premier pourvoi, laquelle désigne la cour d’appel de Lyon comme juridiction de renvoi. Par arrêt du 15 mars 2022, les juges d’appel lyonnais confirment le jugement rendu en première instance au motif que, dans le dispositif des conclusions de son avocat notifiées le 10 mai 2021, la SCI n’a pas sollicité l'infirmation du jugement de première instance n’ayant pourtant fait droit à aucune de ses demandes, en application de la solution retenue par la Cour de cassation dans son arrêt du 17 septembre 2020. Dans le cadre d’un nouveau pourvoi en cassation, la SCI fait grief à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Lyon d’avoir appliqué l’obligation procédurale nouvelle mise à la charge des parties par la Cour de cassation dans son arrêt du 17 septembre 2020, alors que la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation n'est pas une déclaration d'appel. Pour la demanderesse au pourvoi, la juridiction de renvoi était donc nécessairement investie, par l'arrêt de cassation, de la connaissance de l'entier litige tel qu'il avait été déféré au juge d'appel par les appels originairement formés, et l'instruction reprise en l'état de la procédure non atteinte par la cassation ; l'obligation de mentionner expressément la demande d'infirmation n’avait donc pas vocation à s'appliquer dès lors que la juridiction d'appel censurée a été saisie par une déclaration d'appel antérieure à la date de l'arrêt du 17 septembre 2020.

Au visa des articles 6, §1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales N° Lexbase : L7558AIR, 542 et 954 du Code de procédure civile, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation prononce - sans surprise - l’annulation en toutes ses dispositions de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Lyon le 15 mars 2022, et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée. Dans un effort de pédagogie certain, la Deuxième chambre civile de la Cour de cassation commence par rappeler que la règle affirmée dans l’arrêt du 17 septembre 2020 en vertu de laquelle, « si l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement », n’est applicable immédiatement qu’aux seules instances introduites par une déclaration d'appel postérieure à la date de cet arrêt. Poursuivant son raisonnement, la Haute juridiction rappelle que la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi n'étant pas une déclaration d'appel, elle n'a pas vocation à introduire une nouvelle instance. C'est la même instance qui reprend et se poursuit devant la juridiction de renvoi, de sorte que, lorsque cette instance a été introduite par une déclaration d'appel antérieure à l'arrêt du 17 septembre 2020, la règle de procédure nouvelle énoncée pour la première fois par cet arrêt ne peut recevoir application.

La solution retenue dans l’arrêt du 23 mai 2024 nous semble devoir être pleinement approuvée dans la mesure où la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi et la déclaration d’appel partageant un formalisme commun, ce qui vaut pour l’une doit également valoir pour l’autre. En effet, aux termes de l'article 625 du Code de procédure civile N° Lexbase : L5914MBN, la cassation replace les parties dans la situation dans laquelle elles se trouvaient avant la décision cassée. En vertu de ce texte, la cassation emporte donc deux effets : le dessaisissement de la juridiction dont la décision a été cassée, et la continuation de l’instance devant une juridiction de renvoi qui se trouve substituée, par délégation spéciale de la Cour de cassation, à la juridiction ayant rendu l'arrêt cassé [5]. Très tôt, la Haute juridiction a affirmé le principe selon lequel, si un nouveau juge est substitué à l'ancien, l'instance pendante devant le juge du fond, en revanche, demeure la même ; elle est seulement reprise et continuée [6]. Si les parties n'ont donc pas à introduire une nouvelle instance puisqu’elles poursuivent l'instance ayant abouti à la décision cassée, il appartient toutefois à la partie qui y a intérêt de saisir la juridiction désignée comme juridiction de renvoi par l’arrêt de la Cour de cassation par une déclaration de saisine, comme le prévoit l'article 1032 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6686LNX La Cour de cassation a déjà eu l’occasion d’affirmer que la déclaration de saisine n'est pas un acte d'appel, elle ne se substitue donc pas à ce dernier qui demeure, dans le cadre du renvoi de cassation, l'acte introductif de l'instance d'appel. Reste que, si la déclaration de saisine n'est pas une déclaration d'appel, elle partage avec cette dernière un formalisme commun puisque l’article 1033 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1308H49, qui précise les mentions devant être portées dans l'acte de saisine de la juridiction de renvoi après cassation, renvoie aux « mentions exigées pour l'acte introductif d'instance devant cette juridiction ». En appel, ces mentions sont prévues par l'article 901 N° Lexbase : L5914MBN du même code – qui lui-même renvoie aux articles 57 N° Lexbase : L9288LT8 et 54 N° Lexbase : L8645LYT, dont l’alinéa 4 concerne les « chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ». Il résulte d’une lecture combinée de ces textes que la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi, à l’instar de la déclaration d’appel, doit en principe mentionner les chefs expressément critiqués. En l’espèce, dès lors que la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi était postérieure à l’arrêt du 17 septembre 2020 de la Cour de cassation, il était possible de s’interroger sur le fait de savoir si les parties avaient l’obligation de renseigner, dans le dispositif des conclusions jointes à cette dernière, si elles demandaient l'infirmation des chefs du dispositif du jugement critiqué dont elles recherchent l'anéantissement, ou son annulation ? Si la Cour de cassation, tout en rappelant que la juridiction de renvoi est saisie dans la limite de l'arrêt de cassation [7] dont la portée se trouve dans le dispositif de l’arrêt [8] depuis la réécriture de l’article 624 du Code de procédure civile  N° Lexbase : L7853I4M par le décret du 6 novembre 2014 relatif aux exceptions d'incompétence et à l'appel en matière civile N° Lexbase : L2696LEL, n’a pas remis en cause le fait que, par application des articles 1033 et 901 du Code de procédure civile, la déclaration de saisine doit mentionner les chefs expressément critiqués [9], elle a toutefois précisé que cette mention dans l'acte de saisine « ne peut avoir pour effet de limiter l'étendue de la saisine de la cour d'appel de renvoi »[10]. Pour la Haute juridiction, la déclaration de saisine est donc un acte de procédure permettant de saisir la juridiction de renvoi de manière à poursuivre une instance existante, de sorte que, comme elle l'a précisé, c'est l'acte d'appel, et seulement l'acte d'appel, qui fixe la dévolution de l'appel [11]. Dans ce contexte, l’intérêt de l’obligation faite aux parties, par application des articles 1033 et 901 du Code de procédure civile, de renseigner dans la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi si elles demandent l'infirmation des chefs du dispositif du jugement critiqué dont elles recherchent l'anéantissement, ou son annulation,  interroge nécessairement, dès lors que la cour d'appel, sur renvoi de cassation, est tenue par l'effet dévolutif opéré par l'acte d'appel, dans la limite toutefois du dispositif de l'arrêt de cassation, qui marque la portée de la cassation. La règle étant déjà contestable en tant que telle, le bon sens commandait de surcroît qu’il ne soit pas imposé aux parties une charge procédurale qui ne leur incombait pas lorsqu’elles ont introduit leur instance d’appel. Or c’est bien à ce résultat qu’aboutissait la solution retenue par la cour d’appel de renvoi en l’espèce. Pour la Cour de cassation, s’il n’y a pas lieu d’imposer à l’appelant la règle nouvelle dégagée à l’occasion de l’arrêt du 17 septembre 2020, aucune raison ne justifie de l’imposer à la partie qui saisit la juridiction de renvoi après cassation. Ce qui vaut pour la déclaration d’appel vaut donc pour la déclaration de saisine.

À retenir : si la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi après cassation n'est pas une déclaration d'appel et n'introduit pas une nouvelle instance, mais entraîne seulement la poursuite de l'instance d'appel initiale introduite par l’acte d’appel, il incombe à la partie qui saisit la juridiction de renvoi d’indiquer si elle demande l’infirmation ou l’annulation du jugement critiqué dans la déclaration de saisine. Toutefois, lorsque cette instance a été introduite par une déclaration d'appel antérieure à l'arrêt du 17 septembre 2020, la partie qui saisit la juridiction de renvoi n’a pas à indiquer si elle demande l’infirmation ou l’annulation du jugement critiqué dans la déclaration de saisine.

  • Appel compétence : pas de délai à double ressort ! (Cass. civ. 2, 23 mai 2024, n° 22-11.817, F-B N° Lexbase : A86045CN)

Jusqu'à l'entrée en vigueur du décret no 2017-891 du 6 mai 2017 relatif à la procédure applicable devant la Cour de cassation N° Lexbase : L7585I4P, lorsqu'un tribunal devant lequel était soulevée une exception d'incompétence statuait seulement sur celle-ci sans trancher au fond, sa décision ne pouvait être attaquée que par la voie du contredit. Il en allait de même lorsque le juge avait tranché une question de fond dont dépendait la compétence ou s'il s'était prononcé sur la compétence et avait ordonné une mesure d'instruction ou une mesure provisoire, sous réserve dans ce cas du respect des règles particulières à l'expertise. Depuis l'entrée en vigueur du décret du 6 mai 2017, l’article 83 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1426LGW prévoit que, « lorsque le juge s’est prononcé sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision peut faire l’objet d’un appel », lequel est soumis à des règles particulières concernant le délai d’appel, les mentions que doit comporter l’acte d’appel et la procédure à suivre devant la cour. Alors que le contredit était une procédure orale sans représentation obligatoire, l’appel du jugement sur la compétence obéit à des règles distinctes selon que la représentation par avocat est ou non obligatoire. Sur ce point, il sera remarqué que l’article 85 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1423LGS impose que l’appel soit instruit et jugé comme en matière de procédure à jour fixe si les règles applicables à l’appel des décisions rendues par la juridiction dont émane le jugement frappé d’appel imposent la constitution d’avocat. Puisque les règles de la procédure à jour fixe doivent être respectées, il en est une qui soulève régulièrement des interrogations : celle du délai. Selon l’article 84 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1424LGT, l’appelant doit saisir le premier président dans le délai d’appel en vue d’être autorisé d’assigner à jour fixe, et la sanction du non-respect de cette obligation n’est ni plus ni moins que la caducité de la déclaration d’appel. Cette sanction est particulièrement sévère dans la mesure où le premier président ne peut réellement refuser le jour fixe si les conditions de l’appel d’un jugement statuant exclusivement sur la compétence sont réunies, et à dire vrai la requête adressée au premier président ne poursuit en réalité qu’un seul objectif : obtenir une date d’audience. La sévérité de la sanction peut donc sembler quelque peu “disproportionnée“ et inquiète d’autant plus que la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a généralisé cette procédure à l’ensemble des jugements sur la compétence en faisant prévaloir l’article 83 du Code de procédure civile sur les règles spéciales [12], notamment en ce qui concerne l’appel des décisions du juge de l’exécution ou du juge des référés [13]. La Haute juridiction a également précisé dans un arrêt du 22 octobre 2020 que l’erreur consistant à demander la fixation prioritaire de l’affaire (applicable uniquement lorsque la représentation par avocat n’est pas obligatoire) au lieu de la procédure à jour fixe est sanctionnée par la caducité de la déclaration d’appel [14] ; étant rappelé toutefois que la partie dont la déclaration a été frappée de caducité peut encore réitérer son appel dans le délai de recours, l’article 911-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7243LEY sur l’irrecevabilité de l’appel en cas de caducité n’étant pas applicable à la procédure d’appel d’un jugement statuant exclusivement sur la compétence [15]. Autant dire que les décisions relatives à l’appel des jugements statuant sur la compétence font toujours l’objet d’une attention toute particulière ! L’arrêt rendu le 23 mai 2024 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation ne fait donc pas exception.

En l’espèce, un plaignant a relevé appel d'un jugement d'un tribunal judiciaire se déclarant incompétent pour statuer sur son action engagée à l'encontre d’une société (la société). Par requête du 22 février 2021, le demandeur a sollicité du premier président de la cour d'appel de Rennes l'autorisation d'assigner à jour fixe ; demande à laquelle il a été fait droit par ordonnance du 4 mars 2021. La cour d'appel devait inviter les parties à présenter leurs observations sur l'application des articles 83 et suivants du Code de procédure civile, ainsi que sur la caducité de l'appel encourue au motif que, si l’appelant a bien déposé sa requête dans le délai d'appel, il n'a en revanche pas saisi le premier président dans les huit jours de la déclaration d'appel, puisque celle-ci est intervenue le 22 janvier 2021 alors que la requête en vue d'être autorisé à assigner à jour fixe n'a été déposée que le 22 février 2021, de sorte que, par arrêt en date du 14 décembre 2021, la cour d’appel de Rennes a déclaré l’appel irrecevable au motif que, appelant d'un jugement statuant exclusivement sur la compétence, le plaignant devait se conformer, non seulement à ces dispositions, mais encore à celles de l'article 919 du Code de procédure civile N° Lexbase : L0973H4S, en ce qu'elles imposent que la requête soit présentée au premier président dans les huit jours de la déclaration d'appel, dans la mesure où elles ne seraient pas incompatibles, mais imposeraient « un délai à double ressort ». Un pourvoi en cassation est formé par le plaignant qui fait notamment grief à la cour d'appel d’avoir violé l'article 84, alinéa 2, du Code de procédure civile, par refus d'application, et l'article 919, alinéa 3, du même code, par fausse application en ayant retenu un délai à double ressort, alors même que, nonobstant toute disposition contraire, l'appel dirigé contre la décision d'une juridiction du premier degré se prononçant sur la compétence sans statuer sur le fond est instruit et jugé comme en matière de procédure à jour fixe, lorsque les parties sont tenues de constituer avocat, et qu'en ce cas, l'appelant doit saisir, dans le délai d'appel et à peine de caducité de la déclaration d'appel, le premier président de la cour d'appel, en vue d'être autorisé à assigner l'intimé à jour fixe.

La cassation prononcée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, au visa des articles 83, 84 alinéa 2, et 85 alinéa 2 du Code de procédure civile, dans son arrêt rendu le 23 mai 2024, ne surprendra personne tant la solution retenue par la cour d’appel est contestable. En effet, le décret no 2017-891 du 6 mai 2017 a substitué au contredit un ensemble de règles spéciales régissant l’appel des jugements dans lesquels le juge a statué sur sa compétence. Le législateur a prévu que, lorsque le juge a statué sur sa seule compétence sans aborder le fond du litige, son jugement peut faire l'objet d'un appel qui est instruit et jugé « comme en matière de procédure à jour fixe », et non pas « suivant la procédure à jour fixe ». Le choix des mots est important ! Si les règles relatives à l’appel compétence renvoient à la procédure à jour fixe, elles n’en suivent cependant pas toutes les conditions. Instituée par les articles 917 N° Lexbase : L0969H4N et suivants du Code de procédure civile, la procédure à jour fixe devant la cour d'appel s'inspire de la procédure à jour fixe devant le tribunal judiciaire en ce qu’elle semble postuler une extrême urgence dès lors qu’elle est soumise à la condition que les droits d'une partie soient en péril, et partage avec elle des modalités qui semblent, de prime abord, très proches. Mais, en dépit d’apparentes similitudes, la procédure à jour fixe en appel se distingue de celle suivie en première instance puisqu’il existe des hypothèses dans lesquelles la condition de péril n’est pas exigée, par exemple. Il en est ainsi lorsque la procédure à jour fixe est mise en œuvre par décision du premier président ou du conseiller de la mise en état, à l'occasion des pouvoirs qui leur sont conférés en matière de référé ou d'exécution provisoire, par exemple. Il est encore ainsi dans la procédure d'appel à jour fixe des décisions d'incompétence prévue aux articles 83 et suivants du Code de procédure civile, laquelle n'est pas conditionnée à la démonstration préalable d'un péril. Par ailleurs, si l'article 919 du Code de procédure civile offre à l'appelant une alternative à deux branches puisqu’il lui permet, soit de présenter sa requête afin d'être autorisé à assigner à jour fixe au premier président avant de déposer son acte d'appel qui visera, dans ce cas, l'ordonnance du premier président, soit de présenter sa requête aux fins d'assigner à jour fixe au premier président au plus tard dans les huit jours de la déclaration d'appel, cette alternative n’est absolument pas prévue par les dispositions qui encadre l’exercice de l’appel compétence introduit par le décret du 6 mai 2017. L’article 84 du Code de procédure civile dispose seulement que le délai d'appel est de quinze jours à compter de la notification du jugement par le greffe et que l'appelant doit, à peine de caducité de la déclaration d'appel, saisir, dans le délai d'appel, le premier président en vue, selon le cas, d'être autorisé à assigner à jour fixe ou de bénéficier d'une fixation prioritaire de l'affaire. Point d’option pour l’appelant donc ! Il est en outre classiquement admis que la sanction qui s'attache au non-respect du délai de huit jours prévu à l’article 919 du Code de procédure civile est assez relative dans la mesure où elle ne peut qu'entraîner le refus d'autoriser l'assignation à jour fixe de la part du premier président, et non pas de la cour d'appel, à qui l'ordonnance de fixation s'impose à défaut de rétractation [16], bien loin donc de l’irrecevabilité de l’appel brandit par la cour d’appel de Rennes dans l’espèce commentée ! En rappelant que le seul délai qui s’impose à l’appelant d’un jugement dans lequel le juge a statué sur sa compétence sans aborder le fond du litige pour saisir le premier président en vue, selon le cas, d'être autorisé à assigner à jour fixe ou de bénéficier d'une fixation prioritaire de l'affaire est celui prévu à l’article 84 du Code de procédure civile – quinze jours à compter de la notification du jugement par le greffe – la Cour de cassation offre une clarification plus que bienvenue sur les délais qui s’imposent à l’appelant dans le cas d’un d’appel compétence. Gageons qu’elle soit entendue par les cours d’appel et que la confusion des genres à l’origine de la création de ce délai à double ressort retenu dans l’arrêt d’appel ne soit bientôt plus qu’un mauvais souvenir…

À retenir : l'appelant d’un jugement statuant sur la compétence doit solliciter l'autorisation du premier président d'assigner à jour fixe, dans le seul délai d'appel de quinze jours prévu à l’article 84 du Code de procédure civile, lequel court à compter de la notification du jugement par le greffe.
  • Obligation pour l’appelant de signifier sa déclaration d’appel au ministère public et formalisme excessif (Cass. civ. 2, 23 mai 2024, n° 22-11.175, FS-B N° Lexbase : A86015CK)

Depuis plusieurs années, plusieurs décisions de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) sont venues illustrer la confrontation qui existe entre deux logiques procédurales : d'une part, celle de la procédure civile interne, marquée par des règles précises, abstraites et rigides, et d'autre part, celle du contrôle exercé par la CEDH qui se caractérise par une adaptation concrète des règles à la spécificité de chaque espèce en tenant compte du critère de proportionnalité. À plusieurs reprises, cette confrontation s’est soldée par une condamnation de la France pour formalisme excessif [17], lequel ne résulte pas seulement des textes, mais aussi de l'interprétation particulièrement rigoureuse qu'en font les juridictions[18]. Ces dernières doivent donc rechercher un équilibre entre « un excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité de la procédure, et une souplesse excessive qui aboutirait à supprimer les conditions de procédure établies par les lois » [19]. La construction d’un “formalisme raisonné“ [20] par la Cour de cassation la conduit à apprécier plus souplement le respect de certaines exigences formelles, sans toutefois renoncer à appliquer les sanctions prévues par le législateur en cas de manquement substantiel mettant en péril l’intérêt des justiciables qui, dans le champ de la procédure civile, suppose que le comportement procédural des parties au procès d’appel réponde à des normes prévisibles qui encadrent son déroulement. C’est ainsi que la Cour de cassation, dans le cadre de son contrôle, n’hésite plus à censurer les cours d’appel qui, dans l’application qu’elles font des dispositions du Code de procédure civile, seraient amenées à imposer aux parties une charge procédurale qu’elle juge excessive, et qui, par voie de conséquence, méconnaîtrait les exigences du procès équitable [21]. L’arrêt rendu le 23 mai 2024 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation fait assurément parti de ces décisions.

En l’espèce, le 6 octobre 2015 est né un enfant dont la famille réside en Ukraine à compter de septembre 2018. Alors qu'une procédure judiciaire était en cours devant le juge ukrainien concernant la détermination des modalités d'exercice de l'autorité parentale envers l'enfant, son père l'a ramené d'Ukraine en France, le 11 avril 2019. Le 28 avril 2020, sa mère a saisi l'autorité ukrainienne d'une demande de retour de l'enfant, sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants. Le 30 novembre 2020, le procureur de la République d'un tribunal judiciaire a assigné le père devant un juge aux affaires familiales tandis que la mère est intervenue volontairement à l'instance. Dans son jugement du 21 janvier 2021, assorti de l'exécution provisoire, si le tribunal judiciaire constate que le déplacement de l'enfant était illicite, il observe dans le même temps que l'enfant s'est intégré depuis mai 2019 en France, en conséquence de quoi, il rejette la demande de retour de l'enfant mineur en Ukraine. La mère de l’enfant relève appel de cette décision le 26 janvier 2021, en intimant le père de l’enfant et le procureur général. L'affaire est orientée à bref délai et une ordonnance en date du 15 juin 2021 est rendue par le président de la chambre saisie dans laquelle il déclare caduque la déclaration d'appel au motif que l'appelante n'avait signifié sa déclaration d'appel qu'au père de l’enfant et non au procureur général. La mère de l’enfant a relevé appel de cette ordonnance qui est confirmée par la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 28 septembre 2021 au motif que la mère n'avait pas signifié au procureur général sa déclaration d'appel dans les dix jours de l'avis de fixation, conformément à l’article 905-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7035LEB. Un pourvoi en cassation est formé dans lequel la demanderesse fait grief à la cour d’appel de Paris d’avoir violé les articles 6 §.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, 905-1, 902 N° Lexbase : L7237LER et 1210-4 N° Lexbase : L6128LT7 du Code de procédure civile, dès lors que l'obligation qui est faite à l'appelant de signifier la déclaration d'appel à l'intimé ne tend à remédier qu’au défaut de constitution de ce dernier à la suite du premier avis du greffe ; imposer à l'appelant cette obligation à l'égard du ministère public, partie à l'instance d'appel qui est dispensée de constituer avocat, sous peine de caducité de la déclaration d'appel revient à lui imposer une charge procédurale inutile dont la sanction le prive définitivement de son droit de former appel principal et constitue en conséquence une atteinte disproportionnée et injustifiée au droit d'accès au juge.

Par arrêt du 23 mai 2024, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris pour formalisme excessif au visa des articles 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, les articles 6 et 7 de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants et les articles 905-1 et 1210-4 du Code de procédure civile. Si la Haute juridiction rappelle la règle fixée par l’article 905-1 du Code de procédure civile, en vertu de laquelle l'appelant est tenu de signifier sa déclaration d'appel au procureur général lorsqu'il est intimé, elle considère néanmoins qu’en faisant prévaloir, dans la procédure de retour immédiat engagée sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, le principe de l'obligation, pour l'appelant, de signifier sa déclaration d'appel à tous les intimés y compris le procureur général, ce qui, à défaut d'une telle signification au ministère public a eu pour effet de rendre caduque la déclaration d'appel de la mère à l'égard de l'ensemble des intimés, alors qu'elle avait constaté que le procureur général avait conclu devant elle et que la déclaration d'appel avait été signifiée au père de l’enfant, la cour d'appel a fait preuve d'un formalisme excessif et a violé les textes susvisés.

Cet arrêt est intéressant à plus d’un titre.

Tout d’abord, parce que la Cour de cassation refuse – fort logiquement – de suivre le raisonnement de la demanderesse au pourvoi qui entendait faire la démonstration de l’inutilité de la règle fixée à l’article 905-1 du Code de procédure civile lorsque le ministère public est une partie à l’instance. En effet, selon elle, l'objectif recherché par l’obligation de faire à l’appelant de signifier sa déclaration d'appel à l'intimé est uniquement de remédier au défaut de constitution de ce dernier à la suite de ce premier avis du greffe, l'acte de signification rappelant que l'intimé qui ne constitue pas dans les quinze jours suivant cet acte s'expose à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire. Or, pour la demanderesse au pourvoi, le ministère public étant dispensé de constituer avocat lorsqu'il est partie à l'instance d'appel, l'appelant devrait, par conséquent, être lui-même dispensé de signifier la déclaration d'appel au procureur général qui en a reçu communication par le greffe dès son dépôt par l'appelant. Cet argument est naturellement rejeté dans la mesure où, si le raisonnement est intéressant, il n’appartient cependant pas à la Cour de cassation de réécrire la loi, et elle ne peut que constater que l’article 905-1 du Code de procédure civile n'établit aucune distinction selon la qualité de l'intimé et ne prévoit aucune exception à la règle quand l'intimé est le procureur général, de sorte que l'appelant est tenu de signifier sa déclaration d'appel au procureur général lorsqu'il est intimé.

Ensuite, parce que la Cour de cassation – après avoir rappelé, d’une part, le droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial ; d’autre part, que les autorités centrales instituées par la Convention de La Haye doivent coopérer entre elles et promouvoir une collaboration entre les autorités compétentes dans leurs États respectifs, pour assurer le retour immédiat des enfants, et notamment prendre toutes les mesures appropriées pour introduire ou favoriser l'ouverture d'une procédure judiciaire ou administrative, afin d'obtenir le retour immédiat de l'enfant, ce qui implique lorsque la demande concerne un enfant déplacé ou retenu en France, que le procureur de la République puisse, notamment, saisir le juge compétent pour qu'il ordonne les mesures provisoires prévues par la loi ou introduire une procédure judiciaire afin d'obtenir le retour de l'enfant ; enfin, que le droit d'accès à un tribunal n'est pas absolu et peut se prêter à des limitations qui ne doivent cependant pas restreindre l'accès ouvert à un justiciable d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même – se réfère explicitement à l’arrêt Henrioud c/ France rendu le 5 novembre 2015 par la CEDH [22] dans lequel elle est venue rappeler les principes qui permettent d'apprécier la compatibilité du formalisme procédural au droit au procès équitable. D'un côté, le droit d'accès à un tribunal n'est pas absolu et il se prête à des limitations, qui concernent notamment les conditions de recevabilité des recours. Il en est ainsi des formalités et délais pour former un recours, qui assurent la bonne administration de la justice et le respect de la sécurité juridique. D'un autre côté, « ces limitations ne sauraient restreindre l'accès ouvert à un justiciable de manière ou à un point tel que son droit à un tribunal s'en trouve atteint dans sa substance même ». À cet égard, les limitations doivent poursuivre un but légitime et le formalisme doit être proportionné à ce but. Comme a pu l’écrire le professeur Vergès, « cet arrêt incite à faire preuve d'un esprit critique à l'égard du formalisme procédural tel qu'il est conçu dans le Code de procédure civile, mais aussi et surtout tel qu'il est appliqué. La Cour européenne invite ainsi les juridictions internes à prendre l'initiative d'assouplir les conditions de forme posées par le code, lorsqu'une application stricte et injustifiée est susceptible d'emporter des conséquences excessives sur le fond du litige » [23]. En d’autres termes, le juge doit avoir le courage d'écarter le formalisme procédural lorsqu'une application littérale des textes provoque une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge. Or tel était le cas en l’espèce, et la Cour de cassation en fait la démonstration dans l’arrêt du 23 mai 2024 lorsqu’elle affirme qu’en ayant fait prévaloir, dans la procédure de retour immédiat engagée sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, le principe de l'obligation, pour l'appelant, de signifier sa déclaration d'appel à tous les intimés y compris le procureur général, ce qui, à défaut d'une telle signification au ministère public a eu pour effet de rendre caduque la déclaration d'appel de la mère de l’enfant à l'égard de l'ensemble des intimés, alors qu'elle avait constaté que le procureur général avait conclu devant elle et que la déclaration d'appel avait été signifiée au père de l’enfant, la cour d'appel a fait preuve d'un formalisme excessif.

Enfin, parce qu’à l’instar des autres décisions au sein desquelles le principe de proportionnalité a conduit la Cour de cassation à identifier un cas de formalisme excessif, il convient de faire preuve de prudence et de nuance quant à la portée de l’arrêt rendu le 23 mai 2024. Si ce dernier mérite assurément toute notre attention, il ne condamne pas pour autant le formalisme de l’article 905-1 du Code de procédure civile. Dans cette affaire, comme cela avait déjà été le cas dans l’affaire Henrioud c/ France ayant donné lieu à l’arrêt rendu par la CEDH en 2015, l'excès de formalisme tient essentiellement aux circonstances de l'espèce, rien de plus. À cet égard, il sera observé que la Cour de cassation prend bien soin de rappeler que la règle fixée par l’article 905-1, qui met à la charge de l’appelant l’obligation de signifier sa déclaration d’appel à tous les intimés, y compris le procureur général lorsqu’il est partie l’instance, ne saurait faire l’objet d’un quelconque aménagement ou exception que la loi ne prévoit pas. Si le formalisme procédural doit être assoupli lorsque les circonstances de l'espèce lui confèrent un caractère disproportionné, il ne doit l’être que dans cette hypothèse. L’arrêt rendu le 23 mai 2024 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation rappelle donc que l’objectif du contrôle de proportionnalité est de sanctionner les excès du formalisme procédural en l’adaptant aux particularités du cas d’espèce, pas de le remettre en cause dans son principe.

À retenir : l’appelant a l’obligation de signifier sa déclaration d’appel à tous les intimés, y compris au procureur général lorsque le ministère public est partie principale à l’instance. En cas de défaut, la caducité de la déclaration d’appel est encourue sauf à démontrer que le respect de cette obligation constitue une charge procédurale inutile dont la sanction prive définitivement le justiciable de son droit de former appel principal et constitue en conséquence une atteinte disproportionnée et injustifiée au droit d'accès au juge.
  • Difficulté résultant de la désignation du premier président comme cour de renvoi après cassation de sa décision (Cass. civ. 2, 16 mai 2024, n° 22-22.543, F-B N° Lexbase : A62785B7)

En affirmant que la cassation d'un arrêt prononcé avec renvoi entraîne le dessaisissement de plein droit du juge dont la décision a été cassée et investit exclusivement le juge de renvoi de la connaissance de l'affaire, la Cour de cassation énonce une règle dont on peine à comprendre qu’il soit encore besoin de la rappeler. En effet, l'idée qui gouverne les pouvoirs de la juridiction de renvoi est que, par l'effet de la cassation de l'arrêt qui clôturait l'instance, l'instance antérieure reprend son cours, et les parties se trouvent placées dans la même situation où elles étaient avant le prononcé de l'arrêt cassé [24]. Tel est l'effet nécessaire de l'arrêt de cassation et du renvoi : dessaisir, de plein droit, de toute connaissance ultérieure de l'affaire, le juge dont la décision a été cassée, pour en investir exclusivement le juge de renvoi [25]. La nécessité de renvoyer le procès devant d'autres juges est considérée par la loi comme mieux satisfaite lorsque le renvoi est ordonné devant une juridiction différente. Mais elle admet aussi que la connaissance de l'affaire soit attribuée à la même juridiction autrement composée. Cela peut être le fait d’une disposition législative, règlementaire ou diplomatique (tel était le cas de l'accord, annexé à la Convention judiciaire franco-marocaine du 5 octobre 1957, qui stipulait que, dans le cas où la Cour de cassation française demeurait incompétente à titre transitoire pour juger des pourvois formés contre les arrêts de la Cour de Rabat, le renvoi après cassation serait ordonné devant la Cour de Rabat autrement composée et non devant une cour française [26]). Tel a été le cas par l'effet des dispositions transitoires édictées par l'ordonnance no 58-1273 du 22 décembre 1958, les affaires renvoyées par la Cour de cassation à des juridictions supprimées étaient attribuées au tribunal de rattachement désormais compétent, même si c'était ce tribunal qui avait rendu la décision cassée [27]. La Cour de cassation use également de la faculté de renvoi à la même juridiction autrement composée, lorsque celle-ci est seule à être légalement compétente dans le contentieux sur lequel il doit être statué de nouveau. Tel est encore le cas, par exemple, des premiers présidents de cour d’appel qui ont compétence pour statuer sur les recours contre les décisions émanant d’un magistrat de première instance ou de la cour d’appel fixant les rémunérations respectives des constatants, consultants et experts [28]. Lorsque la juridiction dont la décision est cassée est désignée par la Cour de cassation comme juridiction de renvoi, il résulte d’une lecture combinée des articles L. 111-5 N° Lexbase : L7806HNG et suivants du Code de l'organisation judiciaire, qui précisent les exigences d'impartialité relatives à la composition des juridictions statuant sur recours, et L. 431-4 du Code de l'organisation judiciaire N° Lexbase : L7941HNG , sur renvoi de l'article 626 N° Lexbase : L8429IRM du Code de procédure civile que, quelle que soit la formation de la cour de renvoi, aucun magistrat ayant statué précédemment ou participé à l'affaire dans des conditions impliquant une appréciation du dossier ne peut être appelé à participer à la formation de jugement [29], et l’analyse de la jurisprudence montre que, la méconnaissance de cette obligation par la juridiction de renvoi est sanctionnée par la nullité de l'arrêt rendu. Quid lorsque la décision cassée est une ordonnance du premier président et que la Cour de cassation ordonne le renvoi de l’affaire devant la même juridiction composée autrement ? Telle est la situation dont la Cour de cassation a été saisie dans l’arrêt commenté.

En l’espèce, Mme D., administrateur judiciaire, a été désignée, par ordonnance de référé du 20 avril 2017, en qualité d'administrateur provisoire d’une société pour une durée de douze mois avec pour mission d'administrer la société suivant les pouvoirs du gérant, et d’accomplir d’autres missions. Par deux ordonnances des 8 novembre 2017 et 29 juin 2018, le président du tribunal de grande instance de Paris a arrêté le montant des honoraires de Mme D. à une certaine somme. Appel de ces ordonnances a été interjeté par la société, et par ordonnance du 24 juin 2019, le premier président de la cour d’appel de Paris a infirmé les ordonnances du président du tribunal de grande instance et arrêté les honoraires de Mme D. qui a formé un pourvoi en cassation. Par un arrêt du 1er avril 2022, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a prononcé la cassation de l’ordonnance du premier président de la cour d’appel de Paris et renvoyé l'affaire devant cette même juridiction autrement composée. Dans un arrêt en date du 29 septembre 2022, rendu sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Paris, dans sa formation collégiale, a arrêté la rémunération de la plaignante qui s’est de nouveau pourvue en cassation arguant que la cour d'appel a violé les articles 480 N° Lexbase : L2318LUE et 631 N° Lexbase : L6792H7P du Code de procédure civile en se prononçant dans sa formation collégiale alors que l'arrêt de la Cour de cassation du 1er avril 2021 avait renvoyé l'affaire et les parties devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Paris autrement composée.

Par arrêt en date du 16 mai 2024, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, au visa des articles L. 431-4 du Code de l’organisation judiciaire et 631 alinéa 6 du Code de procédure civile, prononce la cassation de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 29 septembre 2022 au motif qu’il résulte de ces textes que la cassation d'une décision, prononcée avec renvoi, entraîne le dessaisissement de plein droit du juge dont la décision a été cassée et investit exclusivement le juge de renvoi de la connaissance de l'affaire. Cette règle étant d’ordre public, la cour d'appel de Paris, qui s'est prononcée dans sa formation collégiale sur les honoraires de l'administrateur judiciaire, alors que le premier président de la cour d'appel, désigné comme juridiction de renvoi et saisi par les parties, était tenu de statuer, a violé le texte susvisé.Il nous semble ici que la cassation est justifiée en ce que la désignation du seul premier président de la cour d’appel de Paris comme juridiction de renvoi interdisait bien évidemment à la formation collégiale de cette même cour de se saisir de cette affaire. Il nous semble également qu’à compter de l’instant où il était saisi en tant que juridiction de renvoi après cassation de sa propre décision, le premier président de la cour d’appel de Paris ne pouvait davantage se fonder sur les dispositions de l’article 724 du Code de procédure civile qui l’autorise, lorsqu’un recours est diligenté à l’encontre de sa propre décision, de pouvoir la modifier, cette faculté qui lui est reconnue n’est en effet disponible que dans l’hypothèse où le recours contre sa décision s’opère précisément dans le cadre de l’article 724. Par ailleurs, comme il a été dit supra, il est en principe impossible aux magistrats qui ont déjà statué sur un litige en première instance ou en appel de siéger dans la juridiction de renvoi, ce qui explique que la Cour de cassation, comme à chaque fois qu’elle renvoie l’affaire après cassation devant la même juridiction exige que cette dernière soit composée différemment. Le fait que la juridiction du premier président de la cour d’appel ne soit composée que du seul magistrat qui occupe les fonctions de premier président semble limiter de prime abord la possibilité de composer cette juridiction autrement… Pourtant, le Code de l’organisation judiciaire offre des solutions qui auraient pu être appliquées en l’espèce et éviter une seconde cassation. Ainsi, l’article R. 312-2 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6500IAY permet au premier président, en cas d'absence ou d'empêchement, d’être suppléé dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées, par le président de chambre qu'il aura désigné et, en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier, par le président de chambre dont le rang est le plus élevé au sein de la cour d’appel. Cette ordonnance de désignation, prise conformément aux dispositions de l'article L. 121-3 du Code de l’organisation judiciaire N° Lexbase : L7716LPH, peut être modifiée en cours d'année judiciaire par une nouvelle ordonnance du premier président en cas de cessation ou interruption des fonctions du suppléant initialement désigné. En outre, l’article R. 312-3 N° Lexbase : L6499IAX du même code dispose quant à lui que le premier président et les présidents de chambre sont, en cas d'absence ou d'empêchement, remplacés pour le service de l'audience par un magistrat du siège désigné conformément aux dispositions de l'article L. 121-3 ou, à défaut, par le magistrat du siège présent dont le rang est le plus élevé. Le fait que la juridiction du premier président de la cour d’appel soit désignée comme juridiction de renvoi après cassation devant être composée autrement constitue, nous semble-t-il, un cause d’empêchement pour le magistrat qui occupe les fonctions de premier président de la cour d’appel de statuer comme juridiction de renvoi. Il lui était donc possible de désigner, dans les conditions de l’article L. 121-3 du Code de l’organisation judiciaire, un autre magistrat du siège afin de le suppléer et de statuer comme juridiction de renvoi conformément à la volonté de la Cour de cassation.

À retenir : la cassation d'une décision, prononcée avec renvoi, entraîne le dessaisissement de plein droit du juge dont la décision a été cassée et investit exclusivement le juge de renvoi de la connaissance de l'affaire. Si la décision cassée a été prise par le premier président d’une cour d’appel et qu’il est désigné comme juridiction de renvoi, il lui incombe en ce cas de désigner un autre juge de la cour d’appel afin que la juridiction du premier président soit composée autrement et puisse statuer comme juridiction de renvoi.


[1] Cass. civ. 2, 17 septembre 2020, n° 18-23.626, FS-P+B+I N° Lexbase : A88313TA.

[2] Cass. civ 2, 20 mai 2021, n° 20-13.210, F-P N° Lexbase : A25324SL – Cass. civ 2, 20 mai 2021, n° 19-22.316 F-P, N° Lexbase : A25334SM – Y. Ratineau, Dispositif des conclusions d'appel : application dans le temps de la solution nouvelle de la Cour de cassation, Lexbase Droit privé, juin 2021, n° 868 N° Lexbase : N7812BYY. – Cass. civ. 2, 9 juin 2022, n° 20-22.588, FS-B N° Lexbase : A7921747 – Y. Ratineau, Formalisme des conclusions d’appel : petit rappel relatif à l’application dans le temps de la solution nouvelle de la Cour de cassation, in Panorama de jurisprudence : remettre toujours le métier sur l’ouvrage, Lexbase Droit privé, juin 2022, n°912 N° Lexbase : N1989BZP.

[3] CA Grenoble, 19 février 2024, n° 15/04786 N° Lexbase : A4216YXG.

[4] Cass. civ. 2, 20 janvier 2021, n° 19-15.849, FS-P N° Lexbase : A24814EM.

[5] Cass. civ. 2, 29 octobre 1965, Bull. civ. II, n° 813.

[6] Cass. civ. 2, 26 octobre 1962, D. 1963. Somm. 36.

[7] Cass. civ. 2, 14 janvier 2021, n° 19-14.293, F-P+I N° Lexbase : A22994C7 – Cass. civ. 2, 29 septembre 2022, n° 19-14.293, F-B N° Lexbase : A34368LT – Cass. civ. 2, 26 janvier 2023, n° 21-15.483, F-B N° Lexbase : A20669AR.

[8] Cass. civ. 2, 2 mai 2024, n° 22-12.473, F-B N° Lexbase : A885329R.

[9] Not. : Cass. civ. 2, 14 janvier 2021, n° 19-14.293, F-P+I, précité

[10] Cass. civ. 2, 14 janvier 2021, n° 19-14.293, F-P+I, précité. – Cass. civ. 2, 29 septembre 2022, n° 19-14.293, F-B, précité. – Cass. civ. 2, 26 janvier 2023, n° 21-15.483, F-B, précité.

[11] Cass. civ. 2, 30 janvier 2020, n° 18-22.528, FS-P+B+I N° Lexbase : A89403C4.

[12] Cass. civ. 2, 11 juillet 2019, n° 18-23.617, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A5653ZI9.

[13] Cass. civ. 2, 11 juillet 2019, n° 19-70.012 N° Lexbase : A95232QR.

[14] Cass. civ. 2, 22 octobre 2020, n° 18-19.768, F-P+B+I N° Lexbase : A88303YP.

[15] Cass. civ. 2, 19 mai 2022, n° 21-10.422, F-B N° Lexbase : A41117XK.

[16] Cass. com., 20 janvier 1998, n° 95-19.474, P N° Lexbase : A2429ACX.

[17] CEDH, 9 juin 2022, Req. 15567/20, Xavier Lucas c/ France N° Lexbase : A07327Z7 – CEDH, 12 juillet 2016, Req. 50147/11, Reichamn c/ France N° Lexbase : A9892RWB – CEDH, 5 novembre 2015, Req. 21444/11, Henrioud c/ France N° Lexbase : A7326NUU – CEDH, 15 janvier 2009, Req. 24488/04, Guillard c/ France N° Lexbase : A3583ECP.

[18] CEDH, 12 novembre 2002, Req. 46129/99, Zvolsky & Zvolska N° Lexbase : A7402A3K.

[19] CEDH, 25 mai 2004, Req. 49478/99, Kadlec et autres c/ République Tchèque N° Lexbase : A2094DCK.

[20] C. Perret, Procédure d'appel : l’expression d’un formalisme raisonné, Lexbase Droit privé, juin 2023, n° 950 N° Lexbase : N5987BZR.

[21] Cass. civ. 1, 5 avril 2023, n° 22-21.863, FS-B N° Lexbase : A61659MB.

[22] Comme elle l’avait déjà fait dans un arrêt du 5 avril 2023 dans lequel elle avait prononcé la cassation de l’arrêt pour formalisme excessif au motif que les juges d’appel avaient fait prévaloir, dans la procédure de retour immédiat engagée par le père sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants, le principe de l'obligation, pour le ministère public, qui avait un rôle central et particulier en la matière, de remettre sa déclaration d'appel par voie électronique, ce qui a eu pour effet de rendre irrecevables les prétentions tendant au retour des enfants, formées par le père en qualité d'appelant incident, la cour d'appel a fait preuve d'un formalisme excessif et a, partant, violé les textes susvisés : Cass. civ. 1, 5 avril 2023, n° 22-21.863, FS-B N° Lexbase : A61659MB.

[23] E. Vergès, Chronique de procédure civile - Janvier 2016, Lexbase Droit privé, janvier 2016, n° 639 N° Lexbase : N0769BWE.

[25] Cass. civ. 3, 8 février 1978, Bull. civ. III, n° 78. – Cass. civ. 3, 14 octobre 1992, n° 90-17.817 N° Lexbase : A3192AC9 – Cass. civ. 2, 12 mars 1997, n° 95-11.469, P N° Lexbase : A0320ACT.

[26] Cass. civ. 1, 15 février 1961, Bull. civ. I, n° 106.

[27] TGI Laval, 22 mars 1960, Gaz. Pal. 1960. 1. 359.

[29] CEDH, 18 décembre 2008, Req. n° 30609/04, Vaillant c/ France N° Lexbase : A0798ZNU – Pour une application interne : Cass. civ. 2, 20 octobre 2022, n° 21-12.241, F-B, N° Lexbase : A50638QL – Cass. civ. 2, 12 juillet 2001, n° 99-21.822 N° Lexbase : A1569AUN.

newsid:489489

Procédure civile

[Brèves] Procédure sans audience et Covid-19 : précision sur l’information par tout moyen

Réf. : Cass. civ. 2, 23 mai 2024, n° 22-15.264, F-B N° Lexbase : A86095CT

Lecture: 3 min

N9515BZG

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 07 Juin 2024

Lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut, à tout moment de la procédure, décider qu'elle se déroule selon la procédure sans audience, les parties sont informées de cette décision par tout moyen et peuvent s'y opposer dans un délai de quinze jours ; l'information par tout moyen de ce que le juge envisage de statuer sans audience peut être communiquée aux avocats des parties, notamment par messages via le Réseau privé virtuel des avocats (RPVA) conformément à l'article 748-1 du Code de procédure civile ou, à défaut, par courriels à leur adresse professionnelle, ou, à défaut encore, par tout autre mode assurant l'effectivité de cette transmission.

Faits et procédure. Dans cette affaire, la demanderesse a assigné le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille aux fins de se voir reconnaître la nationalité française. Par jugement, le tribunal l’a débouté de ses demandes et constaté son extranéité. Elle a interjeté appel à l’encontre de la décision.

Pourvoi. La demanderesse fait grief à l'arrêt rendu le 8 septembre 2021 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence de l’avoir déboutée de ses demandes, d’avoir constaté son extranéité et d'avoir ordonné la mention de l’arrêt en marge de son état civil. Elle fait valoir la violation par la cour d’appel de l’article 6 de l'ordonnance n° 2020-1400, du 18 novembre 2020, portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux copropriétés N° Lexbase : Z33490SY.

En l’espèce, l’arrêt relève pour statuer sans audience, qu'en application de l'article précité, les parties ont été avisées de ce que l'affaire serait jugée selon la procédure sans audience et ne s'y sont pas opposées.

Solution. Énonçant la solution susvisée au visa de l’article 6 de l'ordonnance n° 2020-1400, du 18 novembre 2020, la Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel. Elle énonce qu’en se déterminant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale, sans rechercher si l'information définie au paragraphe 8 avait été portée à la connaissance des parties dans des conditions leur permettant de s'opposer à la procédure sans audience dans un délai de quinze jours. Elle casse et annule en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Pour aller plus loin : v. N. Fricero, ÉTUDE : L’audience et le jugement, L'audience et les débats, in Procédure civile (dir. E. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E55038QU.

newsid:489515

Sociétés

[Jurisprudence] Cautionnement par une société anonyme « dualiste » : consentement sans décision préalable ne vaut

Réf. : Cass. com., 10 mai 2024, n° 22-20.439, F-B N° Lexbase : A01875BK

Lecture: 12 min

N9530BZY

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par Thierry Favario, Maître de conférences, Université Jean Moulin Lyon 3

Le 06 Juin 2024

Mots clés : cautionnement • autorisation • directoire • conseil de surveillance • délégation

Si le président du directoire a le pouvoir d’exécuter une décision prise par le directoire, le cas échéant, pour certains actes au nombre desquels le cautionnement, en vertu d’une autorisation donnée au directoire par le conseil de surveillance, il ne peut, en l’absence d’une telle décision, décider par lui-même de consentir un engagement de caution au nom de la société que s’il a reçu du directoire délégation pour ce faire.


 

Festina lente. Si la vie des sociétés se conjugue généralement avec la rapidité de la prise de décision, la loi leur impose ponctuellement une certaine lenteur s’agissant de la conclusion d’actes revêtant une particulière gravité. Le séquençage de la décision qui en découle impose alors à chacun des intervenants un strict respect de ses attributions. L’efficacité de l’acte en dépend et le présent arrêt de la Cour de cassation, ci-dessus référencé, en offre une illustration topique au cas particulier du cautionnement accordé par une société anonyme (SA) de forme « dualiste ».

Des faits de l’espèce retenons que le 13 avril 2010, une banque a consenti un prêt à une SARL que garantissait le cautionnement d’une SA de forme « dualiste » (dont la direction s’articule autour d’un directoire et d’un conseil de surveillance). Rencontrant ultérieurement des difficultés, la SARL fut mise en redressement puis en liquidation judiciaires. La suite est un classique des prétoires : la banque assigna la société caution en paiement ; cette dernière se défendit en opposant la nullité de son engagement. Le bras de fer judiciaire s’engageait. La société caution perdit sur le fond, une cour d’appel la condamnant à payer à la banque une certaine somme. Elle forma cependant un pourvoi en cassation et l’emporta sur le droit. La Cour de cassation censurait en effet l’arrêt d’appel au visa des articles L. 225-66, alinéa 1er N° Lexbase : L5937AIQ, L. 225-68, alinéa 2 N° Lexbase : L2150LYB, et R. 225-53 N° Lexbase : L2161LYP du Code de commerce. Les dispositions visées renseignent assez sur la nature du problème posé : le cautionnement passé par le président du directoire était-il régulier au regard des strictes règles d’octroi d’un tel acte, applicables au cas d’une SA « dualiste »? On sait que ces règles impliquent l’intervention successive du conseil de surveillance, du directoire et du président du directoire. Si la Cour de cassation explicite ici la solution qui résulte de la combinaison de ces règles, sa pleine compréhension supposera cependant des incursions au-delà et en deçà de la solution : au cœur (I) et autour de la solution (II) en somme.

I. Au cœur de la solution

L’explicitation de la solution suppose de plonger au cœur de la complexe machinerie régissant l’organisation du pouvoir de direction lato sensu au sein de la SA de forme « dualiste ». L’examen des principes commandant la solution (A) précédera ainsi celui de la difficulté traitée in casu (B).

A. Les principes de solution

Dans le cadre d’une SA de forme « dualiste », l’octroi d’une caution (ainsi que d’un aval ou d’une garantie, y incluant une lettre d’intention [1]) suppose l’articulation des trois pouvoirs suivants : autoriser l’acte, ce qui incombe au conseil de surveillance (C. com., art. L. 225-68, al. 2 [2]), décider de passer l’acte, pouvoir dévolu au directoire (ce dernier n’étant aucunement lié par l’autorisation éventuellement obtenue et pouvant toujours renoncer à l’acte), exécuter l’acte, prérogative relevant en principe du président du directoire comme représentant légal de la société (C. com., art. L. 225-66, al. 1er). L’arrêt sous examen a le mérite de formuler pareille articulation dans une présentation à rebours (§ 8) tout en la rattachant aux dispositions légales qui la structurent : le président du directoire a le pouvoir d’exécuter une décision prise par le directoire, le cas échéant, pour certains actes au nombre desquels le cautionnement, en vertu d’une autorisation donnée au directoire par le conseil de surveillance. Les trois pouvoirs sont ainsi bien présents et le séquençage rigoureusement établi. Il est à observer qu’en toute logique, à l’exercice de chacun de ces pouvoirs devrait correspondre une décision formalisée : un procès-verbal du conseil de surveillance autorisant l’octroi du cautionnement, un autre du directoire décidant d’octroyer ce dernier et la signature de l’acte par le président du directoire. Le directoire n’a par ailleurs pas à déléguer au président le pouvoir de conclure l’acte : ce dernier tient ce pouvoir de sa qualité de représentant légal de la société. L’interdépendance des actes n’est pas sans rappeler le mécanisme de la chaîne de délégations en ce qu’elle est susceptible d’influer sur l’efficacité de celui concluant la chaîne. Tel était du reste le problème en l’espèce.

B. La difficulté à traiter

À suivre la chronologie des faits, le conseil de surveillance de la société avait bien autorisé le directoire à se porter caution de la société débitrice principale. Un procès-verbal du 6 octobre 2009 était en ce sens. Ledit procès-verbal, dont l’arrêt reproduit des extraits, n’est du reste pas exempt de reproches. S’il autorise le directoire pour que la société se porte caution de la SARL, ce qui relève effectivement de son pouvoir, on peine cependant à comprendre comment le conseil de surveillance peut conférer « tous pouvoirs au directoire à l’effet de signer tous actes, percevoir toutes sommes, accorder les garanties demandées et généralement faire le nécessaire » : on ne peut en effet « conférer » que le pouvoir dont on dispose et le conseil de surveillance n’a certainement pas celui de signer un acte de cautionnement [3]. Peu importe en l’espèce. La cour d’appel [4] estima en effet de manière téméraire « qu’il ne résulte d’aucun texte, ni des statuts de la société […], que le président du directoire de celle-ci, lequel, aux termes de l’article L. 225-66 du Code de commerce comme de l’article 18-3 de ses statuts, représente la société dans ses rapports avec les tiers, doive lui-même être habilité par une décision spéciale du directoire à conclure l’acte de caution que le directoire a été autorisé à passer par le conseil de surveillance ». Autrement écrit, le directoire n’avait en l’espèce pas pris la décision d’accorder le cautionnement alors que l’autorisation lui a été donnée à lui et à lui seul, tandis que le président avait, lui, bien conclu, au nom de la société pareil acte. Dans la chaîne de décisions exposée précédemment, un maillon manque – « décider » – ce qui conduit logiquement à la censure de l’arrêt d’appel. La Cour de cassation énonce en effet de manière générale que le président du directoire « ne peut, en l’absence d’une telle décision [du directoire], décider par lui-même de consentir un engagement de caution au nom de la société » et juge, au cas particulier, que faute d’avoir constaté « l’existence d’une décision du directoire d’autoriser le cautionnement, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ». 

Le schéma ici dessiné par la Cour de cassation, didactique, indique le principe de la marche à suivre en cas d’octroi d’un cautionnement, d’un aval ou d’une garantie par une SA de type « dualiste ». Il clarifie le rôle respectif de chacun et confère à la censure une assise solide. Il serait cependant erroné de réduire l’arrêt sous examen à cette seule clarification.  

II. Autour de la solution

La solution formulée dépasse en effet le cadre étroit de l’espèce y apportant « un petit truc en plus » que n’imposait pas nécessairement la résolution du litige présent (A). À bien y réfléchir, il y a également un petit truc en moins dans cette solution, qui devrait pourtant se révéler nécessaire à la résolution future dudit litige (B).

A. Le « petit truc en plus »

La solution de l’arrêt sous examen précise que si le président du directoire ne peut, en l’absence d’une décision prise par le directoire, décider par lui-même de consentir un engagement de caution au nom de la société, il en va différemment « s’il a reçu du directoire délégation pour ce faire ». Cette faculté résulte de l’article R. 225-53, alinéa 4, du Code de commerce N° Lexbase : L0188HZY selon lequel « le directoire peut déléguer le pouvoir qu’il a reçu [du conseil surveillance] en application des alinéas précédents ». La logique à l’œuvre s’expose alors aisément : le conseil de surveillance peut autoriser ponctuellement le directoire à donner un cautionnement déterminé (ou un aval ou une autre garantie) ou lui confier une autorisation globale dans des limites qu’il fixe (C. com., art. R. 225-53, al. 1er), étant ici précisé que cette autorisation globale ne peut être supérieure à un an (C. com., art. R. 225-53, al. 2). Disposant d’une telle autorisation de décider de conclure les actes visés, le directoire peut déléguer ce pouvoir à son président ou à une autre personne dans des conditions qu’il fixe. Le triptyque autorisation, décision, exécution demeure, mais son déroulement est contracté : le président par exemple peut, au terme de la délégation accordée, décider de donner (ou pas) le cautionnement (comme délégataire) et passer l’acte correspondant (comme représentant légal de la société) le cas échéant. Le moyen au pourvoi qui soutenait qu’il revient « au directoire de déléguer, à son président ou à toute autre personne, les pouvoirs qu’il tient de l’autorisation du conseil de surveillance de conclure un cautionnement » a conduit la Cour de cassation à apporter cette précision et à restituer au mécanisme de la délégation sa juste portée : cette dernière est une alternative au schéma envisagé précédemment, permettant d’estomper le rôle du directoire et d’accélérer corrélativement la conclusion des actes. L’exposé de ce mécanisme ne s’imposait cependant pas pour apprécier la conformité de l’espèce au droit puisque la référence à une possible délégation est absente de la raison de la censure (§ 10: « en se déterminant ainsi, sans constater l’existence d’une décision du directoire d’autoriser le cautionnement […] »). La Cour de cassation avait manifestement à cœur de clarifier l’intégralité du dispositif relatif à l’octroi d’un cautionnement dans le cadre d’une société anonyme de forme « dualiste », quitte à aller au-delà de ce qu’imposait le seul traitement du litige.

B. Le « petit truc en moins »

Si, à la suite de cette cassation, la cour de renvoi admet la violation des règles d’octroi du cautionnement litigieux, se posera alors la question de la sanction applicable à l’acte. Le présent arrêt est muet sur la nature de cette sanction. Il est certain que le président du directoire qui octroie un cautionnement sans y avoir été valablement autorisé ou sans bénéficier d’une délégation excède ses pouvoirs et ne peut donc engager la société. En l’espèce, la société caution avait invoqué la nullité de son engagement (§ 2). Or, la Cour de cassation admet de longue date comme sanction l’inopposabilité de la caution à la société émettrice [5]. Cette position se retrouve également dans des décisions de cours d’appel plus récentes [6] et peut, avec les précautions qui s’imposent, être rapprochée de la règle qu’énonce l’article 1156, alinéa 1er, du Code civil N° Lexbase : L0874KZE. La différence des sanctions n’est pas anodine : la nullité – relative – pourrait éventuellement être confirmée par une décision ultérieure de la société, non l’inopposabilité. Il n’est pas rare cependant de plaider en doctrine en faveur de la nullité comme sanction idoine du cautionnement donné en violation des règles légales impératives gouvernant l’octroi d’un tel acte dans les sociétés anonymes [7]. La cour d’appel de renvoi aura donc à se prononcer sur la sanction appropriée le cas échéant.

En conclusion, d’aucuns pourraient légitimement soutenir que le fait qu’une société puisse se prévaloir d’une irrégularité dont elle est la cause pour se soustraire à ses engagements heurte l’esprit de justice. Ce serait cependant omettre que le cautionnement n’est pas un engagement anodin et que les règles légales ont pour objet de protéger l’intégrité du consentement de la personne morale en pareil cas. Ce serait oublier que la Cour de cassation a depuis longtemps énoncé que « le bénéficiaire du cautionnement doit vérifier si, au moment où il est souscrit, cet engagement réunit les conditions exigées en matière de droit des sociétés » [8], imposant ce faisant implicitement, mais nécessairement un devoir de vigilance particulier à ce bénéficiaire. En revanche, dès lors que la réduction du pouvoir décisionnel du président du directoire l’est dans l’intérêt de la société et que le premier est censé être le garant du respect des règles, qu’il ne puisse être sanctionné en pratique [9] s’il les ignore pourrait se discuter. Mais ceci est une autre histoire.

 

[1] Cass. com., 14 avril 2021, n° 19-14.694, F-D N° Lexbase : A79924PP.

[2] Pour une analyse du mécanisme de l’autorisation, v. S. François, Le consentement de la personne morale, LGDJ, t. 601, 2020, n° 237 et s.

[3] Comme le relève S. François, thèse préc., n° 242 : « le pouvoir de l’organe autorisant se réduit uniquement à une alternative : accepter ou refuser l’acte envisagé par le dirigeant ».

[4] CA Paris, 5-6, 22 juin 2022, n° 20/12517 N° Lexbase : A472278E.

[5] Cass. com., 11 juillet 1988, n° 87-11.209, publié au Bulletin N° Lexbase : A4007AGI – Cass. com., 8 décembre 1998, n° 96-11.542, inédit N° Lexbase : A8808AGC.

[6] Par ex. : CA Paris, 5-8, 18 octobre 2011, n° 10/24058 N° Lexbase : A0516H8M : « la sanction du non-respect de l’article L. 225-68 est l’inopposabilité de l’acte concerné à la société et non pas, comme le soutient la société [X], sa nullité relative » – adde. CA Paris, 2-2, 14 mars 2019, n° 17/19911 N° Lexbase : A8217Y3Q.

[7] Par ex. : A. Cerles, note ss. Cass. com., 21 janvier 2014, n° 12-29.452, F-P+B N° Lexbase : A9802MCZ, RD bancaire et fin., 2014, n° 3, comm. 95 et les références citées.

[8] Cass. com., 8 décembre 1998, n° 96-11.542, préc.

[9] Cass. com., 20 octobre 1998, n° 96-15.418, publié au Bulletin N° Lexbase : A5458AC7.

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