Lecture: 5 min
N9547BZM
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Vincent Vantighem
Le 11 Juin 2024
Il a beau avoir revendu ses activités au groupe MSC en 2022, Vincent Bolloré n’en a pas fini avec ses affaires africaines. Du moins, du point de vue de la justice… Le parquet national financier (PNF) a, en effet, requis un procès contre le tout puissant industriel breton, notamment pour des faits de « corruption ». Le magnat conservateur est soupçonné d’avoir frauduleusement aidé les campagnes présidentielles de Faure Gnassingbé au Togo en 2010 et d’Alpha Condé en Guinée à la même époque. En échange de quoi, les deux dirigeants africains lui auraient accordé des facilités pour obtenir des contrats sur leurs territoires.
Cela fait plus de dix ans que la justice enquête sur ces faits, et l’histoire judiciaire a connu de multiples rebondissements. Pour éviter un long et pénible procès pénal, Vincent Bolloré et deux de ses proches concernés par la procédure avaient accepté en 2021 le principe d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Lors de l’audience publique en février 2021, ils avaient reconnu les faits et accepté une peine de 375 000 euros d’amende pour mettre fin aux poursuites.
Mais la magistrate Isabelle Prévost-Desprez ne l’entendait pas de cette oreille. Chargée d’homologuer le dispositif comme il est d’usage, la juge du siège avait refusé de le faire et avait renvoyé le dossier à l’instruction. Elle avait en revanche homologué une convention judiciaire d’intérêt public (Cjip) pour le groupe Bolloré qui avait payé douze millions d’euros d’amende contre l’abandon des poursuites.
Tout cela n’arrange pas les affaires de Vincent Bolloré. L’industriel breton, onzième fortune de France, se retrouve aujourd’hui dans une situation inédite. Après avoir reconnu les faits lors de cette fameuse CRPC avant que celle-ci ne capote, il va aujourd’hui potentiellement devoir se défendre de les avoir commis lors d’un procès public qui s’annonce d’ores et déjà électrique. Touché par ce revers procédural, Vincent Bolloré avait été jusqu’en Cour de cassation pour faire valoir ce qu’il estime une grave atteinte à sa présomption d’innocence. Mais il n’avait pas obtenu gain de cause…
La gestion des ports de Lomé et Conakry en jeu
Tout porte donc à croire que le puissant homme d’affaires va devoir, dans un avenir proche, comparaître à la barre du tribunal judiciaire de Paris pour des faits de « corruption active d’agence public étranger ». Dans ce dossier, la justice dispose de beaucoup d’éléments. Elle soupçonne le groupe Bolloré d’avoir utilisé les activités de conseil politique de sa filiale Euro RSCG (devenue Havas depuis) pour décrocher frauduleusement la gestion des ports de Lomé au Togo et de Conakry en Guinée, au bénéfice d’une filiale phare de l’époque, Bolloré Africa Logistics.
C’est en tout cas ce qu’estime le parquet national financier qui a donc requis, lundi 3 juin, le renvoi de Vincent Bolloré ainsi que de Gilles Alix, le directeur général de son groupe à l’époque et de Jean-Philippe Dorent, l’ex-directeur international d’Havas, pour des faits de corruption, abus de confiance et complicité.
D’après les éléments du réquisitoire, les procureurs financiers estiment que Vincent Bolloré a « personnellement » suivi les activités de son groupe au Togo et qu’il l’a engagé dans la campagne de Faure Gnassingbé, notamment en recrutant son demi-frère dans sa branche togolaise.
Contrepartie de ce « pacte de corruption » aux yeux du PNF, le groupe Bolloré aurait profité de différents contrats dont celui de la gestion du port de Lomé ainsi que d’avantages fiscaux.
Toujours dans ce même réquisitoire, le PNF demande également que le procès englobe des accusations visant Vincent Bolloré en Guinée-Conakry, estimant que le groupe français a participé frauduleusement « aux frais de communication » de la campagne d’Alpha Condé en 2010, à hauteur de 170 000 euros. Sur ce point, Vincent Bolloré avait reconnu, lors de sa garde à vue, que « sa candidature présentait pour [lui] un grand intérêt », selon des extraits parus dans différents médias.
L’impact de la non-homologation de la CRPC...
« Je me réjouis de cette demande de renvoi dans ce lourd dossier qui dure depuis 2013 (…) dans lequel est particulièrement mouillé le président du Togo, a réagi Alexis Ihou, avocat de plusieurs candidats malheureux à l’élection présidentielle de 2010 au Togo. Dossier dans lequel Vincent Bolloré a tenté, à plusieurs reprises, de faire obstacle à la manifestation de la vérité. »
Un sentiment partagé par les associations Sherpa et Anticor, également parties civiles à la procédure et dont l’avocat Jérôme Karsenti n’a cessé de dénoncer l’attitude de Vincent Bolloré qui a « soulevé toutes les arguties juridiques pour échapper à son procès ».
Évidemment, les avocats de l’industriel breton ne sont pas sur cette ligne et déplorent l’impact que la non-homologation de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité aura sur tout ça. « Une demande de non-lieu sera présentée, les faits étant contestés depuis le premier jour dans un dossier juridiquement vide. Le faux-pas de non-validation de la CRPC prive définitivement les parties du droit à être jugées de manière impartiale et objective », ont ainsi dénoncé Céline Astolfe et Olivier Baratelli.
La décision finale sur la tenue ou non du procès revient au juge d’instruction Serge Tournaire. Il devrait rendre une ordonnance dans les prochains mois.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489547
Réf. : Cass. soc., 22 mai 2024, n° 22-17.036, FS-B N° Lexbase : A72595CT
Lecture: 2 min
N9537BZA
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Charlotte Moronval
Le 10 Juin 2024
► Lorsqu'une clause de non-concurrence est annulée, le salarié qui a respecté une clause de non-concurrence illicite peut prétendre au paiement d'une indemnité en réparation du fait que l'employeur lui a imposé une clause nulle portant atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle mais l’employeur ne peut pas demander la restitution des sommes versées au titre de la contrepartie financière ;
Toutefois, l’employeur qui prouve que le salarié a violé la clause de non-concurrence pendant la période au cours de laquelle elle s’est effectivement appliquée, est fondé à solliciter le remboursement de la contrepartie financière indûment versée à compter de la date à laquelle la violation est établie.
Faits. Un employeur saisit la juridiction prud’homale afin de faire constater la violation, par un ancien salarié démissionnaire, de sa clause de non-concurrence. Il demande à ce titre le remboursement de la contrepartie financière versée au salarié.
Position de la cour d’appel. Les juges du fond (CA Paris, 6-6, 23 mars 2022, n° 19/11800 N° Lexbase : A23537RL) annulent la clause, jugeant qu’elle portait une atteinte excessive à la liberté du salarié, en raison d’un champ d’application géographique trop vaste. Cependant, la cour d’appel ne condamne pas le salarié à restituer la contrepartie financière.
L’employeur forme un pourvoi en cassation.
Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.
En se déterminant comme elle l’a fait, sans rechercher si le salarié avait violé la clause de non-concurrence pendant la période au cours de laquelle elle s'est effectivement appliquée avant que la nullité n'en soit judiciairement constatée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Pour aller plus loin :
|
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489537
Réf. : Cass. crim., 30 avril 2024, n° 23-80.962, FS-B N° Lexbase : A647129K
Lecture: 3 min
N9549BZP
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Lisa Poinsot
Le 12 Juin 2024
► Le fait que les données personnelles d’un candidat à l’embauche ou d’un salarié soient librement accessibles sur internet ou soient rendues publiques par ce dernier, ne permet pas à l’employeur de les collecter et de les utiliser, à son insu, à des fins de profilage et d’enquête sur sa vie privée.
Faits et procédure. Une entreprise procède à des enquêtes sur ses salariés, les candidats à l’embauche, ses clients ou ses prestataires. En effet, le directeur de la sécurité de cette société demande à un enquêteur privé de collecter des informations sur ces derniers, notamment les antécédents judiciaires, les renseignements bancaires, téléphoniques, sur leur véhicule et leurs propriétés, la situation matrimoniale, leur état de santé, leur qualité de locataire ou de propriétaire ainsi que leurs déplacements à l’étranger.
Cette collecte d’informations résulte de la capture et du recoupement d’informations diffusées sur des sites publics tels que sites web, annuaires, forums de discussion, réseaux sociaux, sites de presse régionale.
La cour d’appel estime que ces faits constituent un délit de collecte de données à caractère personnel par un moyen déloyal au motif que ces données ont fait l’objet d’une utilisation sans rapport avec l’objet de leur mise en ligne et ont été recueillies à l’insu des personnes concernées, ainsi privées du droit d’opposition institué par la loi n° 78-17, du 6 janvier 1978 dite « Informatique et libertés » N° Lexbase : L8794AGS.
Le pourvoi, formé contre cette décision, soutient que les données collectées sont des données en open source du fait qu’elles soient rendues publiques par voie de presse ou diffusées publiquement par une personne sur un réseau social, de sorte que le moyen de collecte ne peut donc pas être déloyal.
Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre criminelle de la Cour de cassation affirme que le fait que les données à caractère personnel collectées ont été pour partie en accès libre sur internet, ne retire rien au caractère déloyal de cette collecte, dès lors qu’une telle collecte, de surcroît réalisée à des fins dévoyées de profilage des personnes concernées et d'investigation dans leur vie privée, à l'insu de celles-ci, ne pouvait s'effectuer sans qu'elles en soient informées.
Une telle pratique déloyale constitue un délit de collecte de données.
Cette décision apporte des précisions sur la pratique à avoir en matière de recrutement. En effet, les procédés de recrutement impliquent souvent une vérification des antécédents du candidat (parcours universitaires, expériences professionnelles et casier judiciaire). Cette vérification est néanmoins encadrée par le Règlement général de la protection des données N° Lexbase : L0189K8I.
Ainsi, une pratique déloyale dans le traitement des données à caractère personnel dans le cadre du recrutement ou de la gestion du personnel peut engager la responsabilité pénale de l’employeur.
Pour aller plus loin :
|
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489549
Réf. : CE 3e et 8e ch. réunies, 26 avril 2024, n° 453014, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2412299
Lecture: 4 min
N9463BZI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Marie-Claire Sgarra
Le 10 Juin 2024
► Le Conseil d’État est revenu dans un arrêt du 26 avril 2024, sur le bénéfice de l’abattement dont peuvent bénéficier des dirigeants de PME, lors de leur départ à la retraite, sur la cession de leurs titres de sociétés.
Faits. Les requérants ont cédé des actions d’une société. L’administration fiscale remet en cause l’exonération d’imposition de la plus-value réalisée lors de cette cession.
Procédure. Le tribunal administratif de Bastia réduit le montant de la plus-value de cession au litige et prononce la réduction correspondante des impositions supplémentaires contestées et des pénalités. La cour administrative d'appel de Marseille a annulé ce jugement et remis à la charge des requérants l’intégralité des impositions supplémentaires (CAA Marseille, 6 avril 2021, n° 19MA01814 N° Lexbase : A61284QZ).
Rappel. Les plus-values de cession réalisées par des dirigeants de PME prenant leur retraite bénéficient, sous conditions d’un abattement (CGI, art. 150-0 D ter N° Lexbase : L9350LHR).
Le bénéfice de cet abattement est subordonné à certaines conditions rappelées par le Conseil d’État dans cet arrêt.
Ces conditions, relatives à la personne du cédant, tiennent notamment à l'exercice effectif de fonctions de direction normalement rémunérées au sein de la société dont les titres sont cédés et à la cessation de toute fonction au sein de cette même société dans les deux années suivant ou précédant la cession.
Ici, il s’agissait d’un couple marié.
Pour le Conseil d’État, dans le cas d’un couple marié, le respect de ces conditions s'apprécie nécessairement, dans le cas d'un couple marié, au niveau de chaque conjoint pris isolément.
Si les dispositions de l'article 6 du Code général des impôts N° Lexbase : L7395MDA soumettent les personnes mariées à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles, cette règle n'implique pas, par elle-même, d'apprécier au niveau du foyer fiscal le respect des conditions d'éligibilité à l'abattement pour durée de détention applicable aux cessions réalisées par les dirigeants de sociétés lors de leur départ en retraite. Enfin la circonstance que les époux sont mariés sous le régime de la communauté, qu'il s'agisse de la communauté légale ou de la communauté universelle, est sans incidence sur l'appréciation individuelle que requiert l'application des dispositions fiscales en cause.
Précisions. Cette solution avait déjà été adoptée par le Conseil d’État en 2014 (CE 3e et 8e s.-sect. réunies, 10 décembre 2014, n° 371437, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6189M7D).
En appel, pour juger que la plus-value réalisée par les requérants lors de la cession des titres ne pouvait bénéficier du régime de l'abattement, la cour s'est fondée sur ce que l’époux avait seul la qualité de cédant de ces titres et qu'ayant fait valoir ses droits à la retraite dix ans avant la cession, il ne satisfaisait pas aux conditions posées par l’article 150-0 D ter du Code général des impôts précité.
Toutefois, en se fondant, pour juger que l’époux était l'unique cédant des titres en litige, sur la seule mention figurant dans la liasse fiscale déposée par la société au titre de l'exercice clos en 2011 selon laquelle l'intéressé était propriétaire de ces titres et en écartant l'acte de cession, produit par les requérants, qui désignait les époux comme les deux cédants des actions qu'ils détenaient conjointement à raison de leur mariage sous le régime de la communauté universelle, la cour a insuffisamment motivé son arrêt et commis une erreur de droit.
Par suite, l’arrêt de la cour administrative d'appel est annulé.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489463
Réf. : Cass. com., 10 mai 2024, n° 22-18.929, FS-B N° Lexbase : A35315BE
Lecture: 3 min
N9543BZH
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Marie-Claire Sgarra
Le 14 Juin 2024
► La Chambre commerciale est revenue, dans un arrêt du 10 mai 2024, sur le point de départ du délai de reprise de l’administration fiscale. Ici le dépôt d’un acte de donation avait été fait juste avant un jour férié.
Faits. Des petits-enfants, requérants en l’espèce, ont reçu de leur grand-mère, en nue-propriété un bien immobilier. L’acte a été enregistré et accompagné d’un chèque du montant des droits de mutation.
Procédure. L’administration fiscale a adressé aux requérants une proposition de rectification, fondée sur une réévaluation du bien donné, puis, après rejet de leur contestation, a procédé au recouvrement des droits.
Les requérants ont contesté cette rectification en soutenant que l'administration avait exercé son droit de reprise au-delà du délai fixé.
Principes :
Rappel des dates au litige :
Solution de la Chambre commerciale. Il résulte des articles L. 180 du Livre des procédures fiscales et 1703 du Code général des impôts précités que dans l'hypothèse où les droits ont été payés au jour du dépôt et où la formalité de l'enregistrement a été acceptée par le comptable, l'acte ou la déclaration soumise à droits doivent être réputés enregistrés à la date de leur dépôt afin de ne pas faire subir au contribuable un allongement du délai de reprise pour une cause qui ne lui serait pas imputable.
En appel, la cour estime l'acte de donation ayant été reçu par l'administration le vendredi 31 décembre 2010, à la veille d'une fin de semaine et à la veille également du 1er janvier 2011, jour férié, l'enregistrement réalisé dès le mardi 4 janvier 2011 ne peut être critiqué.
En statuant ainsi, alors qu'il résulte de l'article 1703 du Code général des impôts que la présentation à l'enregistrement d'un acte notarié fait présumer que les droits y afférents ont été acquittés et qu'il n'était allégué par l'administration ni que ces droits n'avaient pas été payés au jour du dépôt de l'acte ni que la formalité de l'enregistrement avait été refusée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
L’arrêt de la cour d’appel est annulé.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489543
Réf. : CE, 1re-4e ch. réunies, 14 mai 2024, n° 472121, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A49935BK
Lecture: 2 min
N9524BZR
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Yann Le Foll
Le 10 Juin 2024
► Un délai de jugement d'une demande de deux ans et plus de dix mois ne présente pas, eu égard aux circonstances dans lesquelles une médiation a été ordonnée puis a échoué, un caractère excessif.
Rappel. Il appartient au juge qui, dans le cadre d'un litige dont il est saisi, ordonne une médiation, de veiller à ce que le délai dans lequel est jugé ce litige demeure raisonnable.
Faits. Une médiation a été ordonnée fin 2022 dans des contentieux en matière de fonction publique engagés en février et juin 2021, à laquelle la juridiction a mis fin au printemps 2023 après l'administration défenderesse a renoncé à la poursuivre.
Position CE. Le délai de jugement de la demande introduite en février 2021, qui dépasse, à la date de la décision du Conseil d'État (14 mai 2024), le délai de trois ans et deux mois, présente d'ores et déjà un caractère excessif, aucun acte de procédure n'ayant en particulier été accompli depuis la date de la clôture de l'instruction, il y a près de six mois (pour rappel, un délai de jugement de sept ans et six mois pour une requête qui ne présente pas de difficulté particulière excède le délai raisonnable, CE, 28 juin 2002, n° 239575 N° Lexbase : A0220AZ8).
En revanche, le délai de jugement d'une demande enregistrée en juin 2021, qui est de deux ans et plus de dix mois à la date du 14 mai 2024, ne présente pas à ce stade, eu égard aux circonstances dans lesquelles une médiation a été ordonnée le 30 novembre 2022, un caractère excessif.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE, L'ordre juridictionnel administratif, Les dispositions générales relatives à la médiation, in Procédure administrative (dir. C. De Bernadinis), Lexbase N° Lexbase : E7642E9W. |
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489524
Réf. : Cass. civ. 1, 23 mai 2024, n° 22-17.127, FS-B N° Lexbase : A86175C7
Lecture: 3 min
N9517BZI
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Jérôme Casey, Avocat au barreau de Paris, Maître de conférences à l’Université de Bordeaux
Le 27 Juin 2024
► Le testament olographe qui n'est pas daté de la main du testateur n'est pas valable ;
Toutefois, lorsqu'un testament olographe comporte une date dont un ou plusieurs éléments nécessaires pour la constituer ont été portés par un tiers, la nullité de celui-ci n'est pas encourue dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.
Prive sa décision de base légale au regard des dispositions de l’article 970 du Code civil, la cour d’appel qui, pour déclarer nul le testament olographe portant la date du 26 mars 2009, retient qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire déposé le 1er juin 2021 que [C] [S] n'est pas l'auteure du « 9 » de la date du « 26 mars 2009 » apposée sur le testament litigieux, ce dont il résulte que celui-ci n'a pas été entièrement écrit de la main de la testatrice, et que ce vice formel suffit à en emporter la nullité, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en dépit de cette irrégularité, des éléments intrinsèques à l'acte, dont faisait partie la mention « 26 mars 200 » écrite de la main de la testatrice, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, ne permettaient pas d'établir que le testament avait été rédigé au cours d'une période déterminée.
L’arrêt ne surprendra personne, sauf quelques juges du fond distraits. Dans un testament olographe, la date est un élément formel important, mais dont la Cour de cassation a bien précisé qu’il était relatif (v., récemment Cass. civ. 1, 22 novembre 2023, n° 21-17.524, F-B N° Lexbase : A664013C, qui admet qu’une date pré-imprimée puisse constituer un élément intrinsèque à l’acte susceptible d’être corroboré par des éléments extrinsèques permettant de dire qu’il a été rédigé au cours d’une « période déterminée » où le testateur n’était frappé d’aucune incapacité ou insanité d’esprit). Et il faut remonter à une décision de 2007 pour trouver trace, pour la première fois, de cette notion de « période » de rédaction (v., Cass. civ. 1, 10 mai 2007, n° 05-14.366, FS-P+B N° Lexbase : A1079DWU). La Cour de cassation exerce ici une influence aussi juste que souhaitable pour tempérer la rigueur de l’article 970 du Code civil N° Lexbase : L0126HPD. Il s’agit en effet de respecter la volonté du défunt, clairement exprimée, dès lors que la période d’écriture ne révèle rien d’anormal. Comme l’a très bien dit notre collègue Marc Nicod, les nullités formelles ne pouvant constituer « des fins en soi » (v., M. Nicod, obs. sous Cass. civ. 1, 22 novembre 2023, préc., Dr. fam., 2024, comm. 19). L’arrêt commenté en constitue une heureuse illustration de plus.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:489517