Réf. : Cass. soc., 9 octobre 2013, n° 12-12.113, FS-P+B (N° Lexbase : A6759KMB)
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N9074BTA
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par Sébastien Tournaux, Professeur à l'Université des Antilles et de la Guyane
Le 24 Octobre 2013
Résumé
Lorsque le salarié a été, après l'échéance du terme de son contrat à durée déterminée, engagé par contrat à durée indéterminée, la durée du ou des contrats à durée déterminée est déduite de la période d'essai éventuellement prévue dans le nouveau contrat de travail, peu important que le salarié ait occupé le même emploi, en exécution de différents contrats. |
Commentaire
I - Succession de contrats de travail et faculté de prévoir une période d'essai
Depuis la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008, portant modernisation du marché du travail (N° Lexbase : L4999H7B), on sait avec certitude que la période d'essai du contrat de travail a pour objet de permettre "à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent" (1). Pour que cette évaluation soit nécessaire aussi bien qu'efficace, il importe que la période d'essai intervienne au début de la relation de travail qui se noue entre les parties (2), faute de quoi l'essai effectué en cours de relations, à l'occasion d'un changement de fonctions par exemple, ne peut plus être qualifié d'essai mais seulement de période probatoire (3).
D'autres conséquences ont été tirées de cette exigence que la période d'essai commence en même temps que l'exécution du travail. La Chambre sociale de la Cour de cassation a, ainsi, jugé qu'en présence de contrats de travail successifs conclus entre deux parties, l'existence d'une période d'essai dans le second contrat "n'était licite qu'à la condition que ce contrat ait été conclu pour pourvoir un emploi différent de celui objet du premier contrat" (4). La règle a, d'ailleurs, été appliquée lorsqu'un contrat à durée indéterminée succédait à un contrat à durée déterminée pour l'exercice de fonctions identiques (5).
Dans certains cas, le Code du travail encadre cependant la succession de relations de travail et les conséquences qu'il convient d'en tirer sur la période d'essai comprise dans le second contrat. Tel est le cas, par exemple, de l'article L. 6222-16 du Code du travail (N° Lexbase : L8827IQY), qui interdit purement et simplement toute période d'essai dans le contrat de travail conclu à la suite de l'extinction d'un contrat d'apprentissage entre les parties ou, encore, de l'article L. 1221-24 du Code du travail (N° Lexbase : L8839IQG), qui permet de déduire la durée d'un stage préalable réalisé dans l'entreprise de la durée de la période d'essai du contrat de travail conclu à l'issue du stage.
Enfin, l'article L. 1243-11 du Code du travail (N° Lexbase : L1475H9I) envisage le sort de la période d'essai en cas de succession entre un contrat à durée déterminée et un contrat à durée indéterminée en disposant que "la durée du contrat de travail à durée déterminée est déduite de la période d'essai éventuellement prévue dans le nouveau contrat de travail".
Une salariée avait été engagée en qualité de vendeuse par deux contrats de travail à durée déterminée très courts, d'une durée de deux jours chacun. Quelques jours seulement après la fin du second contrat, elle concluait un contrat de travail à durée indéterminée avec l'employeur, contrat stipulant une période d'essai d'une durée d'un mois. Avant l'échéance de la période d'essai, l'employeur décidait de mettre fin au contrat de travail. La salariée saisit la juridiction prud'homale pour contester la rupture du contrat mais fut déboutée de ses demandes.
Formant pourvoi en cassation, la salariée contestait le raisonnement adopté par le conseil de prud'hommes en ce que celui-ci jugeait que les deux contrats à durée déterminée et le contrat à durée indéterminée n'étaient pas des contrats de travail successifs, sans interruption, mais des contrats distincts, si bien qu'une période d'essai pouvait être prévue par chaque contrat.
Par un arrêt rendu le 9 octobre 2013, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi et juge "qu'il résulte de l'article L. 1243-11 du Code du travail que lorsque le salarié a été, après l'échéance du terme de son contrat à durée déterminée, engagé par contrat à durée indéterminée, la durée du ou des contrats à durée déterminée est déduite de la période d'essai éventuellement prévue dans le nouveau contrat de travail ; qu'il importe peu que le salarié ait occupé le même emploi, en exécution de différents contrats". Elle conclut en observant que le conseil de prud'hommes a "justement déduit la durée des contrats à durée déterminée préalablement conclus entre les parties, de la période d'essai prévue dans le nouveau contrat de travail à durée indéterminée".
II - Succession de contrats de travail et appréciation des qualités du salarié
Par cette solution, la Chambre sociale déplace le débat sur un autre terrain que celui sur lequel il avait eu lieu devant le conseil de prud'hommes. La question du caractère successif des contrats de travail est quelque peu laissée de côté et c'est principalement la faculté de prévoir une période d'essai dans le dernier contrat de travail qui est, finalement, analysée.
La solution de la Chambre sociale varie, très clairement, d'autres décisions antérieures rendues dans des situations proches. Ainsi, la règle générale n'autorisant la stipulation d'une période d'essai dans le second contrat de travail, qu'à la condition que le salarié soit engagé pour d'autres fonctions que celles assumées à l'occasion du premier contrat, est en partie écartée. Le raisonnement est, en particulier, en totale opposition avec une décision rendue en 2011, précédemment évoquée (6), qui faisait application de la règle générale à la succession d'un contrat à durée indéterminée à un contrat à durée déterminée.
La solution peut sembler logique à plusieurs égards.
D'abord, parce que la règle générale posée par la Chambre sociale, interdisant la stipulation d'une période d'essai dans un second contrat de travail ayant pour objet les mêmes fonctions pour le salarié, est clairement contrariée par l'article L. 1243-11 du Code du travail qui, tout en l'encadrant, autorise clairement cette succession. D'une certaine manière, cette règle légale peut être vue comme une règle spéciale qui déroge à la règle générale posée par la jurisprudence et parfois appliquée par le législateur, en matière d'apprentissage par exemple.
Sur un plan théorique, encore, la règle posée a l'immense mérite d'éviter l'amalgame entre contrat de travail à durée déterminée et période d'essai. Quoique la pratique permette, parfois, de contester l'effectivité de cette règle, le contrat à durée déterminée ne devrait pas avoir pour objet d'expérimenter une relation de travail, les cas de recours à ce type de contrats étant nettement circonscrits par le Code du travail et ne prévoyant pas que le contrat à terme peut être utilisé dans le but de faire l'essai d'une relation de travail.
La solution doit, enfin, être approuvée sur un plan plus factuel compte tenu de la durée extrêmement courte des contrats à durée déterminée conclus par la salariée avant d'être engagée à durée déterminée. Interdire la stipulation d'une période d'essai dans le contrat de travail à durée indéterminée final aurait équivalu à permettre à l'employeur d'évaluer la salariée pendant quatre jours seulement, ce qui s'apparente davantage à un test professionnel qu'à une période d'essai (7). L'application de la règle de déduction prévue par l'article L. 1243-11 du Code du travail paraît autrement plus judicieuse, en ce qu'elle ne prive l'employeur d'une période d'essai dans le dernier contrat que lorsque le ou les contrats antérieurs ont duré suffisamment longtemps pour permettre aux parties d'apprécier si la relation de travail leur convient.
La Chambre sociale se contente donc d'appliquer les textes relatifs à la succession d'un contrat à durée indéterminée à un contrat à durée déterminée, ce dont il serait inopportun de la blâmer.
Cela étant dit, l'évolution de la motivation adoptée pour permettre une bonne application de ce texte aboutit à une conséquence étonnante sur l'objectif même de la période d'essai.
En effet, alors que l'article L. 1221-20 du Code du travail, comme la Cour de cassation avant lui (8), définit la période d'essai comme ayant pour objet de permettre d'apprécier les "compétences du salarié dans son travail", l'adaptation de la règle déplace clairement l'évaluation sur un autre plan. La Chambre sociale précise, en effet, qu'"il importe peu que le salarié ait occupé le même emploi, en exécution de différents contrats". Dit autrement, la déduction opérée par l'article L. 1243-11 du Code du travail s'applique quelles que soient les fonctions assumées par le salarié dans les deux contrats et, surtout, s'applique si ces fonctions sont différentes. Est-ce bien alors le "travail" du salarié qui est évalué ou la Chambre sociale dévie-t-elle sur une appréciation des qualités personnelles de celui-ci ?
C'est bien probablement vers cette deuxième hypothèse que la solution rendue s'oriente mais, une fois encore, il paraît difficile de le reprocher à la Chambre sociale qui refuse de distinguer là où l'article L. 1243-11 du Code du travail ne distingue pas.
(1) C. trav., art. L. 1221-20 (N° Lexbase : L9174IAZ).
(2) Cass. soc., 28 juin 2000, n° 98-45.349, publié (N° Lexbase : A8771AHC) ; Dr. soc., 2000, p. 1011, obs. C. Roy-Loustaunau.
(3) Cass. soc., 30 mars 2005, n° 03-41.797, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A4306DHX), JCP éd. S, 2005, p. 1369, obs. X. Carsin ; Dr. soc., 2005, p. 810 obs., J. Mouly.
(4) Cass. soc., 30 octobre 2000, n° 98-44.994, F-D (N° Lexbase : A9799AT4) ; Cass. soc., 11 décembre 2002, n° 01-40.440, F-D (N° Lexbase : A4412A48).
(5) Cass. soc., 23 mars 2011, n° 09-69.349, F-D (N° Lexbase : A7652HIA).
(6) Ibid.
(7) Sur le test professionnel, v. nos obs., Le test professionnel n'est pas un contrat de travail, Lexbase Hebdo n° 330 du 11 décembre 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N9170BH4).
(8) "La période d'essai [est] destinée à permettre à l'employeur d'apprécier la valeur professionnelle du salarié", v. Cass. soc., 20 novembre 2007, n° 06-41.212, FP-P+B+R (N° Lexbase : A7171DZM) et les obs. de Ch. Radé, Rupture du contrat de travail en période d'essai : l'étau se resserre, Lexbase Hebdo n° 283 du 29 novembre 2007 - édition sociale (N° Lexbase : N2219BDK).
Décision
Cass. soc., 9 octobre 2013, n° 12-12.113, FS-P+B (N° Lexbase : A6759KMB) Rejet, CPH Grenoble, sect. com., 1er mars 2011 Textes cités : C. trav., art. L. 1243-11 (N° Lexbase : L1475H9I) Mots-clés : période d'essai, contrats de travail successifs. Liens base : (N° Lexbase : E7816ESB) |
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Réf. : T. confl. 14 octobre 2013, n°3918 (N° Lexbase : A1334KNQ)
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N9148BTY
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Le 25 Octobre 2013
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Réf. : Cass. soc., 15 octobre 2013, n° 12-19.807, FS-P+B (N° Lexbase : A0958KNS)
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N9112BTN
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Le 06 Novembre 2013
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Réf. : Décret n° 2013-880 du 1er octobre 2013, relatif à l'expérimentation de la garantie jeune (N° Lexbase : L3086IYX)
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N9079BTG
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par Christophe Willmann, Professeur à l'université de Rouen, Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la protection sociale"
Le 24 Octobre 2013
L'originalité de la "garantie jeunes" tient à la nature de la réponse donnée par les pouvoirs publics à la question du chômage des jeunes, et plus généralement, de leur pauvreté. Il ne s'agit plus d'accompagner ou d'encourager certaines catégories de jeunes, pour lesquels l'accès à l'emploi serait momentanément impossible (pour des raisons tenant à la mauvaise conjoncture économique, à l'inadéquation de leur formation avec les besoins des employeurs, à leur manque d'expérience). Ces inadaptations des jeunes aux exigences du marché du travail sont connues, et elles ont fait l'objet de nombreuses mesures, depuis les années 1980 (un grand nombre a d'ailleurs été abrogé : emplois d'utilité collective ; emplois d'initiative locale ; travaux d'utilité collective ; contrats emplois solidarité ; contrat emploi consolidé ; contrats emploi ville -1996-1997- ; programme nouveaux services/emplois jeunes ; contrats d'adaptation ; contrats d'orientation ; contrats de qualification ; contrats de professionnalisation ; contrat première embauche ; CIVIS "emplois d'utilité sociale" ; emplois d'avenir ; emplois francs ; enfin jusqu'à un certain point, le contrat de génération).
La situation à laquelle le pouvoir réglementaire et le législateur doivent faire face, depuis quelques années, se pose en des termes différents. La situation de ces jeunes, en grande précarité, qui ne sont ni étudiants, ni en emploi, ni en formation, pose un double défi : celui de leur retour vers le marché du travail (avec les problématiques habituelles de formation, insertion, qualification, ...) ; celui de la gestion de leur quotidien (c'est-à-dire, la nécessité de leur verser un revenu de subsistance). Le RSA jeunes n'est plus suffisant ; ses conditions d'éligibilité, très strictes, ne couvrent qu'une faible partie de la population concernée. D'où l'expérimentation de la "garantie jeunes".
I - La "garantie jeunes", à titre expérimental
Jusqu'au 31 décembre 2015, il est institué à titre expérimental une "garantie jeunes", qui a pour objet d'amener les jeunes en situation de grande précarité vers l'autonomie par l'organisation d'un parcours d'accompagnement global, social et professionnel, vers et dans l'emploi ou la formation.
La "garantie jeunes" comporte un accompagnement individuel et collectif des jeunes par les missions locales (permettant l'accès à une pluralité d'expériences professionnelles et de formation, en vue de construire ou de consolider un projet professionnel) et une garantie de ressources (décr. n° 2013-880, art. 1er).
A - Bénéficiaires
1 - Public visé
Peuvent bénéficier de la "garantie jeunes" les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans révolus (décr. n° 2013-880, art. 2 , I). Ce sont les publics prioritaires dits "coeur de cible".
La cible dite périphérique est constituée :
- à titre exceptionnel, des jeunes étudiants, en formation, en emploi ou en service civique dont la situation est porteuse d'un risque de rupture ;
- à titre exceptionnel, des jeunes âgés de seize à dix-huit ans pour lesquels la "garantie jeunes" constitue un appui adapté au parcours vers l'autonomie ;
- des jeunes dont le niveau de ressources dépasse le plafond (supra), lorsque leur situation le justifie, à titre exceptionnel (décr. n° 2013-880, art. 2, II).
2 - Conditions
Peuvent bénéficier de la "garantie jeunes" les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans révolus :
- qui vivent hors du foyer de leurs parents ou au sein de ce foyer sans recevoir de soutien financier de leurs parents (décr. n° 2013-880, art. 2, I) ;
- qui ne sont ni étudiants, ni en formation, ni en emploi (décr. n° 2013-880, art. 2, I) ;
- et dont le niveau de ressources ne dépasse pas celui défini par le RSA (montant mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du Code de l'action sociale et des familles N° Lexbase : L0894IC4). Pour la détermination de ce montant, les jeunes qui vivent au sein du foyer de leurs parents sont réputés constituer un foyer autonome (décr. n° 2013-880, art. 2, I). Les bénéficiaires du revenu de solidarité active (C. act. soc. fam., art. L. 262-7-1 N° Lexbase : L2937IGU) ou en raison du fait qu'ils assument la charge d'un ou plusieurs enfants nés ou à naître (C. act. soc. fam., art. L. 262-4, 1° N° Lexbase : L8838IQE), ne peuvent bénéficier de la garantie jeunes (décr. n° 2013-880, art. 2, I).
B - Le dispositif
1 - Conditionnalité
Principe. Le bénéfice de la "garantie jeunes" s'accompagne d'une contractualisation entre la mission locale et le jeune, fixant des engagements réciproques en vue de l'insertion sociale et professionnelle du jeune. Par cette forme de contractualisation : le jeune s'engage notamment à déclarer chaque mois ses ressources d'activité à la mission locale et à certifier la sincérité des informations communiquées ; de son côté, la mission locale s'engage notamment à proposer au jeune des opportunités d'emploi ou de formation (décr. n° 2013-880, art. 3, I).
Initialement, le contenu de l'engagement du jeune était un peu plus précis : il consistait à accepter de prendre des engagements au cours de son parcours, de lui-même ou sur proposition de son conseiller, et à les tenir ; de son côté, la mission était soumise à des engagements beaucoup plus précis que ceux retenus par le pouvoir réglementaire dans le décret n° 2013-880 (6).
Durée. Le contrat est conclu pour une durée maximale d'un an. Il est renouvelable sur décision de la commission, pour douze mois ou, sur décision de la commission, en fonction du parcours du jeune, pour une durée comprise entre six et douze mois (décr. n° 2013-880, art. 3, I).
Sanctions. En cas de non-respect ponctuel par le bénéficiaire des engagements contractuels, la commission peut décider de suspendre temporairement, pour une durée qu'elle fixe, le versement de l'allocation. En cas de non-respect réitéré de ces engagements, la commission peut décider de la sortie du jeune de la "garantie jeunes" (décr. n° 2013-880, art. 4, IV).
2 - Actions
Les promoteurs du projet avaient suggéré que la "garantie jeunes" se compose de deux grands types d'action :
- une action de "remobilisation immédiate" pour faire adhérer le jeune et confirmer son engagement. Le jeune intègre un collectif de travail à temps plein au cours duquel il éprouve son projet et confirme son implication et son engagement à rechercher une première expérience professionnelle tout en étant accompagné par un conseiller qui fixe avec lui des objectifs personnalisés. Le conseiller amène chaque jeune à identifier ses atouts et potentiels professionnels ;
- une action qui s'inscrit dans un processus de "médiation active". L'objectif est de démultiplier les opportunités de mise en relation avec les entreprises. Le conseiller amène le jeune à valoriser ses points forts et ses compétences transférables pour lui permettre d'acquérir une autonomie professionnelle.
Le décret n° 2013-880 n'a pas repris ces préconisations.
3 - Bénéfice d'un revenu "jeunes"
Montant. La "garantie jeunes" ouvre droit à une allocation forfaitaire, d'un montant mensuel équivalent à celui du revenu de solidarité active (C. act. soc. fam., art. L. 262-2, 2°) pour une personne seule (483,24 euros, montant du RSA pour une personne seule sans revenu en 2013), déduction faite du forfait logement (C. act. soc. fam., art. R. 262-9, 1° N° Lexbase : L0819IE3), soit 433,75 euros en 2013 (décr. n° 2013-880, art. 4, I).
Cumul. L'allocation est intégralement cumulable avec les ressources d'activité du jeune tant que celles-ci ne dépassent pas un montant mensuel net de 300 euros, représentant un montant mensuel de 733,75 euros (433,75 euros, montant de la "garantie jeunes" + 300 euros, montant du cumul autorisé). Ce seuil maximum de cumul a été calculé de telle manière qu'il corresponde au seuil de pauvreté, situé aux alentours de ce même niveau (en 2011, le seuil de pauvreté situé à 60 % du revenu médian, pour une personne seule, est de 977 euros mensuels, celui situé à 50 % du revenu médian est de 814 euros) (7).
Au-delà, l'allocation est dégressive linéairement et s'annule lorsque le total des ressources d'activité du jeune équivaut à 80 % du montant mensuel brut du SMIC, soit l'équivalent d'un SMIC net.
Sont considérés comme des ressources d'activité, les revenus d'activité professionnelle, les indemnités de chômage et de Sécurité sociale, les allocations de formation, les indemnités de stage, les indemnités de formation professionnelle et de service civique. L'allocation est entièrement cumulable avec toutes les autres ressources perçues par le bénéficiaire, y compris les prestations sociales. Elle est incessible et insaisissable (décr. n° 2013-880, art. 4, II).
Cette possibilité de cumul fait sens, dans la mesure où, précisément, le mécanisme de la "garantie jeunes" a pour objet, à plus ou moins courte échéance, le retour vers l'emploi (donc, la multiplication des expériences professionnelles, les mises en situation, ...) (8).
Versement. L'allocation est versée mensuellement et à terme échu, au nom de l'Etat, par l'Agence de services et de paiement. Elle est proratisée en fonction de la durée pendant laquelle le jeune bénéficie de la "garantie jeunes" (décr. n° 2013-880, art. 4, III).
Suspension, interruption. En cas d'accès du jeune à une activité durable en cours de contrat, la commission peut décider de la suspension ou de la fin de la "garantie jeunes" (décr. n° 2013-880, art. 6, I).
3 - Statut du jeune
Les jeunes accédant à la garantie jeunes sont affiliés au régime général de Sécurité sociale (C. trav., art. L. 6342-1 N° Lexbase : L2776H9P et L. 6342-3 [LXB= L2782H9W]), pour les périodes pendant lesquelles ils ne sont pas affiliés à un autre régime de Sécurité sociale (décr. n° 2013-880, art. 3, II).
C - Gestion du dispositif
Commission d'attribution. Dans chaque territoire participant à l'expérimentation, une commission d'attribution et de suivi de la garantie jeunes est constituée.
Cette commission a pour fonction le repérage des jeunes, et surtout, de prendre les décisions d'admission et de renouvellement dans la "garantie jeunes", ainsi que les décisions de suspension ou de sortie de la "garantie jeunes". Elle organise et anime les partenariats locaux permettant le repérage des jeunes et le bon déroulement des parcours. Elle se réunit au moins une fois par mois.
La commission est composée du préfet de département (ou de son représentant, qui en assure la présidence), du président du conseil général (ou de son représentant) et des présidents des missions locales participant à l'expérimentation (ou de leurs représentants). Les autres membres de la commission sont désignés par le préfet de département parmi les acteurs impliqués dans l'insertion sociale et professionnelle des jeunes. La commission peut solliciter l'avis de toute personne ou structure impliquée dans le parcours d'un jeune (décr. n° 2013-880, art. 5).
Recours. Les décisions de la commission interviennent après que le jeune a été invité à présenter ses observations (décr. n° 2013-880, art. 6, II). Les recours gracieux contre les décisions de la commission font l'objet d'une décision de son président. Le préfet de région peut être saisi d'une demande de réexamen de ces dernières décisions (décr. n° 2013-880, art. 6, III).
Expérimentation. La liste des territoires concernés par l'expérimentation est fixée par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'Emploi et du ministre chargé du Budget (décr. n° 2013-880, art. 7).
Sont mis en place pour le suivi de l'expérimentation : un comité de pilotage national comprenant notamment un représentant de chaque territoire participant à l'expérimentation ; un comité scientifique en charge de l'évaluation de l'expérimentation afin de déterminer les conditions appropriées pour sa généralisation ; les membres de ce comité sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'Emploi (décr. n° 2013-880, art. 8).
Par arrêté (JO 2 octobre 2013), la liste des missions locales éligibles à l'expérimentation de la garantie jeunes a été fixée (9). Le programme de lancement de la "garantie jeunes" vise 10 000 jeunes la première année (entre le 1er octobre 2013 et le 1er octobre 2014) ; puis 20 000 bénéficiaires supplémentaires à compter du 1er octobre 2014. Le dispositif est programmé pour être généralisé sur l'ensemble du territoire à partir de 2016 pour environ 100 000 jeunes en régime de croisière. 1 600 euros de crédits d'accompagnement par personne et par an seront attribués à chaque mission locale participant à l'expérimentation.
II - Place de la "garantie jeunes" parmi les mesures de traitement de la pauvreté des jeunes
Le décret n° 2013-880 revendique une double filiation :
- le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale (comité interministériel de lutte contre les exclusions du 21 janvier 2013). Les groupes thématiques chargés par le Gouvernement de travailler sur les moyens d'endiguer la pauvreté en vue de la Conférence nationale des 10 et 11 décembre 2012 avaient rendu public, le 3 décembre 2012, leurs rapports. Le groupe "emploi, travail, formation professionnelle" avait recommandé d'organiser un parcours en fonction du projet professionnel des jeunes, en garantissant une allocation équivalente au RSA à ceux sans ressources ou ne pouvant faire face à leurs charges (10) ;
- la recommandation du Conseil de l'Union européenne concernant l'établissement d'une "Garantie pour la jeunesse" du 22 avril 2013 enjoint aux Etats membres de veiller à ce que les jeunes de moins de 25 ans se voient proposer un emploi de qualité, une formation continue, un apprentissage ou un stage. Le texte invite les Etats membres à améliorer la première expérience professionnelle des jeunes et leur participation au marché du travail.
Le cadre conceptuel de la "garantie jeunes" n'est donc pas, à titre unique ou exclusif, l'amélioration de la position des jeunes sur le marché du travail, en travaillant sur les handicaps dont les jeunes sont atteints (formation insuffisante ou inadaptée ; absence ou défaut d'expérience ; absence de repères (sociologiques, comportementaux, ...). Les mesures pour l'emploi mises en place poursuivent, le plus souvent, des objectifs d'amélioration de l'employabilité des jeunes (former les jeunes, leur faire acquérir une expérience professionnelle). Ces dispositifs comprennent plusieurs dimensions : l'insertion sociale professionnelle, employabilité (le contrat d'insertion dans la vie sociale "accompagnement vers l'emploi", le contrat initiative emploi, le contrat d'accompagnement dans l'emploi, emplois d'avenir et enfin, les emplois francs) ; la formation en alternance (le contrat d'apprentissage, le contrat de professionnalisation) ; la résorbtion du chômage des jeunes par la diminution du coût du travail des jeunes) (mesures abrogées, le contrat jeunes en entreprise, le contrat nouvelles embauches ; l'exonération pour l'embauche d'un jeune et le contrat première embauche ; mesures en vigueur, l'exonération de la part patronale des contributions d'assurance chômage pour l'embauche d'un jeune et le contrat de génération).
La "garantie jeunes" relève plutôt, si l'on prend en consésidération le public visé, d'une logique "aide sociale", c'est-à-dire, d'une prise en charge, d'un accompagenement des jeunes en situation de grande précarité vers l'autonomie par l'organisation d'un parcours d'accompagnement global, social et professionnel, vers et dans l'emploi ou la formation ; ainsi que le versement d'une allocation mensuelle (revenu de subsistance).
Toute la difficulté consiste à comprendre le mode d'articulation entre la "garantie jeunes" et les mécanisme qui existent déjà. Les textes (le décret n° 2013-880) sont, en l'état actuel, muets (11) : ils prévoient seulement la possibilité (ou pas) de cumuls de revenus, mais n'organisent pas l'articulation entre ces différents dispositifs.
A - CIVIS "accompagnement vers l'emploi"
Le contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS) est un contrat d'accompagnement personnalisé pour les jeunes, peu ou pas qualifiés, âgés de 16 à 25 ans, voulant s'insérer socialement et professionnellement, par la réalisation d'un projet (12).
Le CIVIS se divise en trois volets : accompagnement vers l'emploi (ce volet, rénovant le programme TRACE, s'adresse plus particulièrement aux jeunes les plus éloignés de l'emploi) ; création et reprise d'entreprise (ce volet doit permettre de soutenir le projet de jeunes désireux de créer ou de reprendre une entreprise par un accompagnement personnalisé en amont des dispositifs existants, notamment l'encouragement au développement d'entreprises nouvelles) ; emplois d'utilité sociale (il s'agit d'emplois conçus comme des postes d'accueil et de professionnalisation mais sans pérennité des jeunes).
1 - Bénéficiaires
Peuvent bénéficier du CIVIS "accompagnement vers l'emploi" les personnes de 16 à 25 ans rencontrant des difficultés particulières d'insertion sociale et professionnelle. Les catégories de bénéficiaires sont : les jeunes dont le niveau de qualification est inférieur ou équivalent à un diplôme de fin de second cycle long de l'enseignement général, technologique ou professionnel ; les jeunes n'ayant pas achevé le premier cycle de l'enseignement supérieur ; ou les jeunes inscrits en tant que demandeur d'emploi depuis plus de 12 mois au cours des 18 derniers mois.
2 - Nature du contrat
Le CIVIS "accompagnement dans l'emploi" n'est pas un contrat de travail mais un contrat d'accompagnement conclu avec l'Etat. Ce contrat prévoit les engagements du bénéficiaire en vue de son insertion professionnelle, les actions engagées à cet effet et les modalités de leur évaluation. L'accompagnement dans le cadre du CIVIS est assuré au sein d'une mission locale pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes ou d'une permanence d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO), par un référent qui établit, avec le bénéficiaire du contrat, un parcours d'accès à la vie active. Ce parcours doit être établi dans les trois mois à compter de la signature du CIVIS.
Dès lors que le jeune accède à l'emploi, l'accompagnement peut se poursuivre pendant un an. Les bénéficiaires ont le statut social de stagiaires de la formation professionnelle : ils sont affiliés au régime général de sécurité sociale, pour les périodes pendant lesquelles ils ne sont pas affiliés à un autre titre à un régime de sécurité sociale.
3 - Régime
Le CIVIS mentionne les actions destinées à la réalisation du projet d'insertion professionnelle ainsi que l'obligation pour le bénéficiaire d'y participer. Il précise la nature et la périodicité, au moins mensuelle, des contacts entre la mission locale pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes ou la PAIO et le bénéficiaire.
Le CIVIS est conclu pour une durée d'un an. Il peut être renouvelé pour une durée maximale d'un an lorsque l'objectif d'insertion professionnelle n'est pas atteint. Dès lors que le jeune accède à l'emploi, l'accompagnement peut se poursuivre pendant un an. L'objectif poursuivi est d'instituer un système de tutorat permettant un suivi du jeune dès qu'il aura accédé à l'emploi.
Le CIVIS peut prendre fin : au terme concluant de la période d'essai d'un emploi d'une durée au moins égale à six mois ; six mois après que son bénéficiaire a créé ou repris une activité non salariée ; lorsque son bénéficiaire atteint son vingt-sixième anniversaire ; en cas de manquements de son bénéficiaire à ses engagements contractuels.
Pour les bénéficiaires âgés de 18 à 25 ans révolus, l'Etat verse une allocation pendant les périodes durant lesquels aucune autre allocation ou rémunération au titre d'un emploi ou d'un stage n'est perçue. Le bénéfice de l'allocation est accordé pour toute la durée du contrat, dans la limite de 1 800 euros par an.
Le montant mensuel de l'allocation est fixé en fonction de la situation personnelle du bénéficiaire, de son projet d'insertion professionnelle et du nombre de jours pendant lesquels il n'a perçu aucune rémunération au titre d'un emploi ou d'un stage ou toute autre allocation. Il est plafonné à 450 euros et varie, par jour, de 0 à 15 euros, par tranche de 5 euros.
Le bénéficiaire de l'allocation déclare chaque mois au représentant légal de la mission locale pour l'insertion professionnelle et sociale des jeunes ou de la PAIO, les éléments nécessaires à la détermination du montant mensuel de l'allocation, notamment les périodes pendant lesquelles il a perçu des rémunérations ou allocations, ainsi que leur montant. Le paiement de l'allocation peut être suspendu ou supprimé en cas de non-respect par le bénéficiaire de ses engagements contractuels et après qu'il ait été mis à même de présenter ses observations.
B - Droit à l'accompagnement et autres aides au retour vers l'emploi
1 -Versement d'un revenu de subsistance
RSA jeunes. Le RSA jeunes (13) n'est pas un contrat de travail, mais un revenu minimum de subsistance. La loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 (loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, de finances pour 2010 N° Lexbase : L1816IGD) a étendu le bénéfice du RSA aux jeunes actifs de moins de 25 ans. Pour percevoir le RSA jeunes, le demandeur doit être âgé de moins de 25 ans, remplir les conditions prévues pour le RSA, mais en plus, justifier d'une activité professionnelle préalable. Le jeune doit avoir travaillé à temps plein au moins deux ans, consécutifs ou non, au cours des trois années précédant la demande (soit l'équivalent de 3 214 heures).
Revenu contractualisé d'autonomie. A l'image du RSA jeune, le revenu contractualisé d'autonomie (14) n'est pas un contrat de travail, mais un revenu sui generis. Il s'agit d'une aide financière destinée aux jeunes à la recherche d'un premier emploi, afin d'accroître leur autonomie. Le fonds d'appui aux expérimentations en faveur des jeunes peut financer, à titre expérimental, pour une durée de trois ans, ce revenu contractualisé d'autonomie et une dotation d'autonomie.
Le dispositif se décline en deux volets : l'un, destiné aux jeunes en insertion accompagnée par les missions locales (revenu contractualisé d'autonomie) ; l'autre, destiné aux jeunes diplômés (niveau licence), inscrits depuis plus de six mois à Pôle emploi).
Fonds d'aide aux jeunes en difficulté. Les fonds d'aide aux jeunes (FAJ) attribuent des aides financières et des prestations d'accompagnement social. Ils subventionnent parfois d'autres fonds ou organismes oeuvrant auprès d'un public jeune. Bénéficient des aides du FAJ les jeunes de 18 à 25 ans connaissant des difficultés d'insertion sociale ou professionnelle.
Fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes. La loi de finances pour 2005 (loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, de finances pour 2005 N° Lexbase : L5203GUA) a mis en place un fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes (FIPJ), destiné à financer des actions complémentaires à l'accompagnement personnalisé et renforcé des jeunes confrontés aux difficultés de tous ordres (sociales, familiales, culturelles...). Les aides directes visent la sécurisation financière des parcours des jeunes. Les jeunes visés sont à la fois exclus du bénéfice du FAJ et de l'allocation CIVIS.
Contrat d'autonomie. Le contrat d'autonomie (16) a été mis en place en 2008, dans le cadre du Plan Espoir Banlieues, pour faciliter l'accès à l'emploi de 45 000 jeunes des ZUS. Il vise les quartiers couverts par un contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) dans 35 départements. Le contrat d'autonomie est destiné aux jeunes de 16 à 25 ans, non connus ou mal suivis par le service public de l'emploi (moins de la moitié des jeunes des ZUS sans emploi étaient inscrits à Pôle emploi en 2008). Le contrat prévoit le versement d'une bourse de 300 euros par mois pendant 6 mois et une enveloppe financière afin de lever les obstacles à l'emploi (problème de mobilité, logement...).
2 - Bénéfice d'un accompagnement éducation
Enfin, il faut mentionner les dispositifs qui reposent ni sur un support contractuel (contrat de travail) ou monétaire (revenu de subsistance) mais éducatif (formations "deuxième chance").
Pour les jeunes les plus éloignés de l'emploi, des établissements spécialisés, dits de la "deuxième chance" (17), ont été créés (ministère de la Défense et Ecoles de la deuxième chance). Les centres "Défense - Deuxième chance", qui relèvent de l'Etablissement public d'insertion de la Défense (EPIDE) créé en 2005, ont pour mission d'assurer l'insertion sociale et professionnelle de jeunes en difficulté scolaire, sans qualification professionnelle ni emploi, sur la base du volontariat.
Enfin, les écoles de la deuxième chance, créées en 1997, s'adressent aux jeunes de 18 à 25 ans, sortis du système scolaire sans diplôme. Implantées sur le territoire à l'initiative des collectivités territoriales et des acteurs de l'insertion, ces écoles proposent aux jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans dépourvus de qualification professionnelle ou de diplôme, un parcours de formation personnalisé, incluant une période d'alternance.
(1) E. Wargon et M. Gurgand, Garantie jeunes - Synthèse des travaux du groupe, mai 2013 ; Avis du Conseil national de l'emploi, 17 septembre 2013.
(2) Etude d'impact - Projet de loi portant création des emplois d'avenir, août 2012.
(3) Bibliographie sélective : C. Branchu et A. Morin, Evaluation du dispositif local d'accompagnement (DLA), IGAS, janvier 2012 ; Conseil d'analyse stratégique, Emploi et chômage des jeunes : un regard comparatif et rétrospectif, mai 2011 ; Conseil d'orientation pour l'emploi, Diagnostic sur l'emploi des jeunes, 10 février 2011 ; Conseil économique, social et environnemental : J.-B. Prevost, L'emploi des jeunes, Avis, septembre 2012 ; A. Dulin Antoine, Droits formels - droits réels : améliorer le recours aux droits sociaux des jeunes, Rapport et avis du CESE, brochure n° 2012-11, 12 juin 2012 ; C. Dumont, Vingt-cinq ans de politique d'insertion des jeunes, quel bilan ?, Avis, Conseil économique, social et environnemental, 2008 ; Commission européenne, Initiative sur les perspectives d'emploi des jeunes, communication 20 décembre 2011 ; Cour des comptes, Rapport public annuel, février 2012 ; La politique de la ville, une décennie de réformes, Rapport public thématique, 2012 ; L'éducation nationale face à l'objectif de la réussite de tous les élèves, Rapport public thématique, 2010 ; Marché du travail : face à un chômage élevé, mieux cibler les politiques, Rapport public thématique, 2013 ; Inspection générale des affaires sociales, Rapport annuel, 2000, La doc. fr. ; M. Hisch, Livre vert, Commission sur la politique de la jeunesse, Haut commissariat à la jeunesse, 2009 ; A. Jeannet, L. Caillot, Y. Calves, L'accès à l'emploi des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville, Rapport IGAS, juillet 2010, RM2010-037P ; J.-B. Prevost, L'emploi des jeunes, Avis, Conseil économique, social et environnemental, septembre 2012 ; Observatoire des inégalités, La pauvreté en France, Note de l'Observatoire n°1, Octobre 2013.
(4) Ces difficultés sont encore plus aiguës dans certains territoires : les zones urbaines sensibles, certains territoires ruraux, ainsi que les territoires d'outre-mer. Le taux de chômage des 15-24 ans résidant en zones urbaines sensibles en 2010 était de 41,7 % (contre 23,7 % sur l'ensemble du territoire). En France métropolitaine, en 2011, 1,6 million de jeunes de 16 à 25 ans sont sortis de formation initiale avec au plus un CAP ou BEP ; 860 000 jeunes sont sans diplôme ou avec le seul brevet ; 470 000 jeunes, de 16 à 25 ans, sortis de formation initiale sans diplôme ou avec le seul brevet, n'étaient ni en emploi ni en formation. Seule la moitié de ces jeunes sans diplôme se sont inscrits à Pôle emploi. En 2010, la part des jeunes de 15 à 24 ans qui n'étaient ni en emploi ni en formation représentait à 25,2 % dans les ZUS, contre 14,9 % en moyenne.
(5) Conseil d'orientation pour l'emploi, Diagnostic sur l'emploi des jeunes, 10 février 2011, p. 7.
(6) E. Wargon et M. Gurgand, préc., p. 5. Les missions locales doivent proposer un parcours comprenant "un accompagnement continu, sans rupture, enchaînant les actes nécessaires à l'accès à l'emploi dans le cadre d'un processus itératif de médiation active autour duquel vont s'articuler un accompagnement renforcé et des actions de formation. Le conseiller s'engage à répondre aux sollicitations du jeune, à l'appuyer et à l'orienter pour résoudre les difficultés empêchant son accès à l'autonomie et à lui faire, à échéances régulières, des propositions d'emploi ou de formation susceptibles de nourrir son parcours".
(7) Selon l'INSEE, le seuil de pauvreté est calculé par rapport à la médiane des niveaux de vie. Les seuils traditionnellement retenus par l'Insee et l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (Onpes) sont fixés à 60 % ou à 50 % du niveau de vie médian. Le seuil à 60 % est celui privilégié en France et en Europe. En 2010, le niveau de vie annuel moyen des individus s'établit à 22 590 euros. Selon l'Observatoire des inégalités, en France, un individu peut être considéré comme pauvre quand ses revenus mensuels sont inférieurs à 814 euros ou 977 euros selon la définition adoptée... V. aussi Observatoire des inégalités, La pauvreté en France, préc..
(8) E. Wargon et M. Gurgand, préc., p. 7.
(9) Le programme expérimental vise les régions de Marseille Provence Métropole (missions locales de Marseille, Berre-l'Etang, Martigues et La Ciotat) ; La Réunion (missions locales de Saint-Benoît, Saint-Denis, Saint-Paul et Sud Réunion ; la communauté d'agglomération Est Ensemble (missions locales de la Mire (Bobigny, Drancy et Le Blanc-Mesnil), Bondy, Montreuil et Pantin) ; le Vaucluse (missions locales d'Avignon, Carpentras, Pertuis et Valréas) ; le Lot-et-Garonne (missions locales d'Agen, Marmande et Villeneuve-sur-Lot) ; l'Allier associé au Puy-de-Dôme pour les communes de Cournon-d'Auvergne, Clermont-Ferrand, Thiers et Ambert (missions locales de Montluçon, Moulins et Vichy, Cournon-d'Auvergne, Clermont-Ferrand, Thiers et Ambert) ; le Finistère (missions locales de Brest, Morlaix et Quimper et la mission locale Centre Ouest Bretagne), l'Eure (missions locales d'Evreux, Bernay, Val-de-Reuil et Vernon) ; l'Aude (missions locales de Narbonne, Carcassonne et la mission locale départementale rurale de Limoux) ; les Vosges (missions locales du pays de Remiremont et de ses vallées, Epinal, Plaine des Vosges et Saint-Dié).
(10) Le groupe de travail avait recommandé d'étendre le CSP aux jeunes, selon des modalités à définir (accompagnement renforcé et aides au revenu et à la formation) ; ou d'ouvrir le RSA aux jeunes peu qualifiés, non attributaires des emplois d'avenir, s'étant engagé à suivre un parcours qualifiant ; ou de transformer le Civis en un revenu contractuel d'accès à l'autonomie, plus régulier, plus stable.
(11) E. Wargon et M. Gurgand, préc., p. 7-8. Ces travaux envisagent la possibilité d'un cumul entre ces différents mécanismes, sans en détailler les conditions.
(12) Sur le régime du contrat d'insertion du jeune dans la vie sociale (Civis), cf. l’Ouvrage "Droit du travail" .
(13) Cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" ; P. Cahuzac, S. Carcillo et K.-F. Zimmermann, L'emploi des jeunes peu qualifiés en France, Note du CAE n° 4, avril 2013 ; Groupe de travail Accès aux droits et aux biens essentiels, minima sociaux, Rapport B. Fragonard, Président du groupe, M. Peltier et A. Rivard, Rapporteurs ; O. Bargain et A. Vicard, Le RMI et son successeur le RSA découragent-ils certains jeunes de travailler ? Une analyse sur les jeunes autour de 25 ans , INSEE Analyses n° 6, septembre 2012.
(14) Cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" .
(15) Loi n° 92-722 du 29 juillet 1992, portant adaptation de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 (N° Lexbase : L7461AI8) ; Loi n° 98-657 du 29 juillet 1998, d'orientation relative à la lutte contre les exclusions (N° Lexbase : L9130AGA) ; Loi n° 2004-809 du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales (N° Lexbase : L0835GT4) ; A. Legal, Les aides financières individuelles attribuées au titre du fonds d'aide aux jeunes en 2011, DREES, Etudes et Résultats n° 830, février 2013.
(16) DARES analyses, DARES indicateurs, n° 2012-089, Les contrats aidés dans les ZUS en 2011, 28 novembre 2012 ; n° 2012-084, Le contrat d'autonomie : 4 jeunes sur 10 entrés en 2009 ont accédé à un emploi ou à une formation, 16 novembre 2012 ; V. aussi Rapport "l'emploi des jeunes", Conseil économiques, social et environnemental, déc. 2012, Recommandation n° 8, p. 78.
(17) Loi n° 2009-1437du 24 novembre 2009, relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie (N° Lexbase : L9345IET) ; décret n° 2007-1756 du 13 décembre 2007, relatif aux écoles de la deuxième chance (N° Lexbase : L5347H3G) ; décret n° 2009-221 du 24 février 2009, relatif aux conditions de financement des écoles de la deuxième chance par la taxe d'apprentissage (N° Lexbase : L9626ICI) ; C. édu., art. L. 214-14 (N° Lexbase : L9733IE9) et art. D. 214-9 (N° Lexbase : L4163H93) à D. 214-12 ; Rapport "l'emploi des jeunes", préc, p. 77.
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par La rédaction
Le 24 Octobre 2013
La surveillance et la subordination ne sont plus dans l'air du temps pour le Professeur Ray : nous sommes passés d'un droit des travailleurs aux droits de la personne au travail. Le Web, 2.0 en particulier, se manifeste par une grande liberté d'expression, ce sentiment de liberté pouvant donner lieu à des dérapages. Nous assistons, également, à un conflit de générations entre les plus de 45 ans et leur culture du secret, et l'immense transparence de la génération Y.
Myriam Quéméner, Magistrat, Procureur adjoint, estime qu'il faut trouver un équilibre entre la protection des intérêts des salariés et des intérêts des employeurs. Nous sommes en présence d'une guerre économique.
Comment ainsi protéger l'entreprise face au vol de données immatérielles ?
Il y a trois niveaux de cybermenaces :
- la cyberdéfense (au niveau étatique) ;
- la cybersécurité (au niveau de l'entreprise) ;
- la cybercriminalité (au niveau judiciaire), les infractions classiques sont démultipliées par les réseaux numériques.
Il existe, également, des infractions liées au contenu, en droit de la presse, au niveau du racisme et de la xénophobie et des images à caractère pédopornographique..
Myriam Quéméner souligne que plus de 5 000 entreprises sont attaquées chaque année en France. 20 % des entreprises ont subi des pertes financières. Nous constatons, en outre, des incidents en propriété intellectuelle ou d'atteinte à l'image (e-reputation).
Il est à noter qu'une Directive en matière de cybermenaces va bientôt être adoptée et va imposer la notification des incidents pour toutes les entreprises. Mais se pose la question du destinataire de ces informations. Reconnaître ces incidents numériques, c'est reconnaître ses failles.
Les risques étant importants, les entreprises mettent en place des outils de surveillance et tentent de limiter l'utilisation de l'Internet de la messagerie électronique. Selon Myriam Quéméner, il est nécessaire de sécuriser les réseaux contre les intrusions et éviter l'utilisation abusive des outils technologiques mis à disposition du personnel par l'employeur. La Chambre sociale avait, par exemple, estimé qu'une clé USB, dès lors qu'elle est connectée à un outil informatique mis à la disposition du salarié par l'employeur pour l'exécution du contrat de travail, est présumée utilisée à des fins professionnelles. L'employeur peut avoir accès aux fichiers non identifiés comme personnels qu'elle contient, hors la présence du salarié (1). Myriam Quéméner constate, par ailleurs, une augmentation des contentieux liés à l'infraction d'abus de confiance ayant des impacts en droit travail mais également en droit pénal.
Il est nécessaire de trouver un équilibre entre protection des libertés individuelles et sécurité de l'entreprise.
Les entreprises doivent anticiper ces risques de dérive, notamment en modifiant les chartes informatiques afin d'introduire des dispositions sur les réseaux sociaux. Elles doivent également développer la notion d'intelligence économique.
Comme le préconise la CNIL, il faut contrôler l'usage des outils numériques et des techniques au sein de l'entreprise, l'objectif étant d'éviter de "sombrer dans le pénal" pour Myriam Quéméner. Il faut un véritable travail de sensibilisation, de pédagogie. Il est vrai que ce travail est rendu difficile par un éparpillement des structures, des textes.
Selon Anne Souvira, Commissaire Divisionnaire, Chef de la Brigade d'enquête sur les Fraudes aux technologies de l'information de la Direction de la Police Judiciaire de la préfecture de police , le droit des nouvelles technologies concerne tous les droits.
La Brigade d'enquête sur les Fraudes aux technologies de l'information s'occupe de l'ensemble des infractions qui ressortent de la loi n° 88-19 du 5 janvier 1988, sur la fraude informatique, dite loi "Godfrain" (N° Lexbase : L2291HUE), de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, dite "Informatique et liberté" (N° Lexbase : L8794AGS), mais également d'affaires d'escroquerie, d'usurpation d'identité, de contrefaçons etc..
Composée de dix-huit enquêteurs, la Brigade a enquêté sur 356 dossiers en 2011 et 252 en 2012. Le Brigade, dans sa lutte contre la cybercriminalité, a le souci de l'information des entreprises et des particuliers afin qu'ils puissent garder confiance dans l'économie numérique. Son travail est, notamment, de recueillir la preuve numérique pour permettre d'administrer la preuve de manière incontestable. Elle oriente l'entreprise en fonction des faits dont elle est victime et sensibilise son environnement pour réagir en cas de crise notamment de violation de des systèmes d'information parfois en interne.
Il est important de souligner que la procédure civile est accusatoire, il y a donc du contradictoire pendant l'enquête. En droit pénal, l'enquête est secrète et la preuve demeure libre.
Mais quelle stratégie juridique et contractuelle à adopter en cas de vol de données ? Il faut rappeler que la Cour de cassation ne qualifie de vol de données que les informations copiées ou transférées sur un support physique. Lorsque le transfert de données a lieu par le réseau vers un ordinateur, on parle alors de contrefaçon. Pour Anne Souvira, très souvent, la preuve rapportée par les parties n'est pas incontestable et difficilement exploitable. Il faut absolument abolir certains comportements qui consistent à rechercher la preuve via des ordonnances de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) ; ce qui encombre par ailleurs la Justice, mais retarde, surtout, d'autant la récupération de la preuve informatique qui dépérit très vite, imputant le coût à la victime qui doit avoir un motif à cette action. A la différence, au pénal, il s'agit de frais de justice et l'intérêt d'aller vite est ensuite de pouvoir geler les données à l'international. Le recours à l'huissier peut être intéressant mais il faut que la preuve soit récupérée de façon incontestable et remise rapidement entre les mains de la justice.
Jean-Emmanuel Ray a, ensuite, rappelé les faits de l'arrêt du "Corbeau" rendu par la Chambre sociale, le 17 juin 2009 (2). Une entreprise avait reçu par la Poste des données à caractère ultra-confidentielles auxquelles avaient seulement accès dix-sept personnes. Afin de déterminer l'auteur de ces courriers, elle fit contrôler tout le contenu de tous leurs postes informatiques. Mais, pour la Chambre sociale, sauf circonstances tout à fait exceptionnelles (pédophilie, terrorisme) qu'elle qualifie dans l'arrêt de "circonstances particulières", l'employeur n'a pas accès à ce qui est titré "personnel". Or dans ces hypothèses très lourdes, selon le Professeur Ray, l'employeur doit surtout ne rien faire pour éviter toute erreur de manipulation, et immédiatement contacter les services de police, et, en particulier, le BEFTI dirigé par Anne Sauvira.
Pour le Professeur Ray, sur la question des fuites d'informations, la Chambre sociale hésite entre sévérité et permissivité : la BDU issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 posera à nouveau cette difficile question.
Dans un arrêt du 5 juillet 2011 (3), était visé le non-respect de la confidentialité. Une secrétaire avait permis à une personne non habilitée, un cadre de l'entreprise, d'utiliser ses codes d'accès pour télécharger des données confidentielles en méconnaissance des règles et protocoles prévus par la charte informatique de l'entreprise. Pour la Cour de cassation, le non-respect volontaire et réitéré par un salarié de la charte informatique rend impossible son maintien dans l'entreprise et justifie un licenciement pour faute grave.
Dans un arrêt du 17 mars 2010 (4), elle avait jugé que constituait une faute grave la violation de ses obligations contractuelles, l'intéressé ayant transmis volontairement à des personnes extérieures à l'entreprise, en utilisant le réseau professionnel interne et une liste de diffusion personnelle, une succession de courriers électroniques contenant des informations confidentielles, concernant les relations de la société avec l'un de ses clients, et susceptibles de nuire à la réputation de celle-ci.
Mais Jean-Emmanel Ray souligne aussi la permissivité de la Haute juridiction dans la communication des documents pour préparer la défense.
Le salarié ne peut prendre que ce qui est strictement nécessaire à l'exercice des droits de sa défense dans un litige l'opposant à son employeur. La Chambre criminelle s'est alignée sur cette position dans un arrêt du 16 juin 2011 (5). Ainsi, ne commet pas d'infraction le salarié qui, avisé du projet de son employeur de rompre son contrat de travail, appréhende des documents de l'entreprise dont il a eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et dont la production est strictement nécessaire à l'exercice de sa défense dans une procédure prud'homale engagée peu après, même lorsque cette appropriation a lieu avant le début de la procédure de licenciement.
Mais dans son arrêt du 21 juin 2011 (6), la Chambre criminelle a, cependant, estimé que, dès lors qu'un salarié emporte des dossiers de son entreprise ou les transfère sur son ordinateur personnel, beaucoup plus nombreux que le seul devant lui permettre de se prémunir d'une action en justice introduite à son encontre devant la juridiction prud'homale, il commet un délit.
Dans un arrêt du 28 septembre 2011 (7), après une prise d'acte, un employeur a formé une demande reconventionnelle en paiement d'une indemnité pour préavis non effectué et de dommages-intérêts pour concurrence déloyale. La Chambre estime que la salariée "qui bénéficiait de la confiance de l'entreprise, avait conservé ces fichiers après la rupture pour les affecter à la société concurrente dont elle avait envisagé la création avant même la prise d'acte, [la cour d'appel] a caractérisé l'intention de nuire de la salariée" et donc sa faute lourde, et l'a condamnée à des dommages et intérêts..
Sur les exigences procédurales, le Professeur Ray constate des divergences entre la Chambre sociale et la Chambre criminelle. La Chambre sociale refuse tout stratagème depuis de nombreuses années. Elle a rappelé cette exigence dans un arrêt du 4 juillet 2012 (8) concernant la mise en place par la Poste de "lettres festives", des lettres ayant la particularité de diffuser une encre bleu si elles sont ouvertes. Pour la Chambre sociale, si l'employeur a le pouvoir de contrôler et de surveiller l'activité de son personnel pendant le temps de travail, il ne peut mettre en oeuvre un dispositif de contrôle clandestin et à ce titre déloyal. La Poste aurait donc dû évoquer cette possibilité de contrôle dans son règlement intérieur.
La Chambre sociale est extrêmement rigoureuse, souligne notre intervenant, sur le respect de la procédure d'information-consultation. Dans un arrêt du 27 février 2013 (9), dans une entreprise existent un système d'assistance à l'argumentation au moyen d'une écoute des entretiens téléphoniques des salariés du service commercial, lequel avait été discuté lors d'une réunion des représentants du personnel en 2007, et un dispositif de vérification et d'écoute au moyen d'un couplage informatique et de téléphonie permettant de contrôler le taux de connexion des salariés correspondant au rapport entre leur temps de présence et la durée des communications passées ou reçues par eux, qui n'avait pas fait l'objet d'une consultation des représentants du personnel. Pour la Chambre sociale, ce second dispositif était donc inopposable aux salariés.
La rigueur de la Chambre sociale se retrouve également dans le cadre des salariés mis à disposition, en l'espèce des gardiens. Dans un arrêt du 10 janvier 2012 (10), elle a rappelé que si l'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de ses salariés pendant le temps de travail, il ne peut utiliser comme mode de preuve les enregistrements d'un système de vidéo-surveillance installé sur le site d'une société cliente permettant le contrôle de leur activité, dont les intéressés n'ont pas été préalablement informés de l'existence.
Par ailleurs, le Professeur Ray rappelle la jurisprudence récente sur le contrôle patronal de l'employeur sur l'utilisation abusive du matériel électronique.
La Chambre sociale a, ainsi, énoncé que constitue une faute grave l'utilisation abusive d'internet par une salariée lorsque celle-ci s'est connectée pendant son temps de travail à de très nombreuses reprises à de nombreux sites extraprofessionnels tels que des sites de voyage ou de tourisme, de comparaison de prix, de marques de prêt-à-porter, de sorties et événements régionaux ainsi qu'à des réseaux sociaux et à des sites de magazines féminins : plus de 10 000 fois sur la période du 15 au 28 décembre 2008 et du 8 janvier au 11 janvier 2009 (11).
Le 19 juin 2013 (12), la Chambre criminelle a indiqué, dans une hypothèse il est vrai caricaturale, que "l'utilisation par un salarié, de son temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles il perçoit une rémunération de son employeur constitue un abus de confiance" (10 mois d'emprisonnement avec sursis, 50 000 euros d'amende et 131 411 euros à titre de dommages et intérêts à l'employeur : le temps consacré à travailler pour son propre compte.
Cependant, dans un arrêt du 6 février 2013 (13), la Chambre sociale affirme que si l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectué à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n'en est pas de même de l'utilisation par le destinataire des messages téléphoniques vocaux dont l'auteur ne peut ignorer qu'ils sont enregistrés par l'appareil récepteur.
Avec l'affaire de la clé "USB" (14) sans aucune identification personnelle, mais branchée sur un appareil professionnel, et qui est donc présumée professionnelle, la Haute juridiction se situe dans le prolongement de sa politique habituelle : dissuader le salarié d'apporter sa vie privée dans l'entreprise.
Enfin, Jean-Emmanuel Ray rappelle l'arrêt rendu par la Chambre sociale le 23 mai 2012 (15) traitant d'enregistrements réalisés par une salariée sur son dictaphone personnel. La Haute juridiction énonce que l'employeur ne peut procéder à l'écoute des enregistrements réalisés par la salariée sur son dictaphone personnel en son absence ou sans qu'elle ait été dûment appelée. Les enregistrements ayant été détruits, la salariée avait été mise dans l'impossibilité d'apporter une preuve contraire aux attestations qu'il produisait.
En conclusion, le Professeur Ray revient sur le contrôle de l'employeur à l'extérieur de l'entreprise. Alors que sortiront prochainement les premiers arrêts "Twitter" (16) devant les juges du fond, notre intervenant rappelle que des dérapages diffusés par un salarié sur des réseaux sociaux ne constituent pas en principe des fautes disciplinaires. Mais un licenciement pour simple cause réelle et sérieuse peut être prononcé sur le fondement du trouble objectif caractérisé si l'employeur peut le prouver.
Dans le premier arrêt "dérapages Facebook" (17), la première chambre civile a retenu la notion classique de "communauté d'intérêt" et résolu le problème de l'application de vie privée en contradiction avec le modèle économique de Facebook. Ainsi, ne constituent pas des injures publiques des propos tenus par une ancienne salarié et diffusés sur ses comptes ouverts tant sur le site Facebook que sur le site MSN, lesquels n'étaient en l'espèce "accessibles qu'aux seules personnes agréées par l'intéressée, en nombre très restreint, celles ci formant une communauté d'intérêts". Facebook étant un espace public par destination, l'immense majorité des comptes Facebook est ainsi public. La Chambre sociale devrait reprendre cette notion très classique en droit de la presse.
(1) Cass. soc., 12 février 2013, n° 11-28.649, FS-P+B (N° Lexbase : A0485I8H) ; v. les obs. de S. Tournaux, La consultation des fichiers contenus dans la clé USB du salarié, Lexbase Hebdo n° 518 du 28 février 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5976BTI).
(2) Cass. soc., 17 juin 2009, n° 08-40.274, FS-P+B (N° Lexbase : A3095EIH), v. les obs. de S. Tournaux, Précieuses indications sur une procédure méconnue : le référé du délégué du personnel pour la défense des droits des personnes et des libertés individuelles, Lexbase Hebdo n° 357 du 2 juillet 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N9786BKN).
(3) Cass. soc., 5 juillet 2011, n° 10-14.685, F-D (N° Lexbase : A9526HUD).
(4)Cass. soc., 17 mars 2010, n° 08-45.519, F-D (N° Lexbase : A8143ETR).
(5) Cass. crim., 16 juin 2011, n° 10-85.079, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6188HTD), v. les obs. de L. Casaux-Labrunée, La légitimation du vol par le salarié de documents de l'entreprise en vue d'un procès prud'homal, Lexbase Hebdo n° 448 du 14 juillet 2011 - édition sociale (N° Lexbase : N7001BS4).
(6) Cass. crim., 21 juin 2011, n° 10-87.671, F-P+B (N° Lexbase : A6349HUP).
(7) Cass. soc., 28 septembre 2011, n° 09-67.510, FS-P+B (N° Lexbase : A1317HYG).
(8) Cass. soc., 4 juillet 2012, n° 11-30.266, FS-P+B N° Lexbase : A4789IQG), v. les obs. de L. Casaux-Labrunée, Preuve de l'employeur contre le salarié : de la loyauté avant tout !, Lexbase Hebdo n° 495 du 26 juillet 2012 - édition sociale (N° Lexbase : N3218BTD).
(9) Cass. soc., 27 février 2013, n° 11-26.029, F-D (N° Lexbase : A8905I8C).
(10) Cass. soc., 10 janvier 2012, n° 10-23.482, FS-P+B (N° Lexbase : A5276IAN).
(11) Cass. soc., 26 février 2013, n° 11-27.372, F-D (N° Lexbase : A8793I88).
(12) Cass. soc., 12 février 2013, n° 11-28.649, FS-P+B, préc..
(13) Cass. crim., 19 juin 2013, n° 12-83.031, FS-P+B+R (N° Lexbase : A1808KHG).
(14) Cass. soc., 6 février 2013, n° 11-23.738, FP-P+B, sur le 1er moyen (N° Lexbase : A6342I7Z).
(15) Cass. soc., 23 mai 2012, n° 10-23.521, FS-P+B (N° Lexbase : A0671IMS) ; v. les obs. de S. Tournaux, Les enregistrements clandestins diligentés par le salarié, Lexbase Hebdo n° 488 du 7 juin 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N2236BTY).
(16) Sur cette question, L'abus de Twitter est dangereux pour votre emploi - Questions à Maître Mathieu Davy, Avocat à la cour, Associé chez Orialegal, Lexbase Hebdo n°513 du 24 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : N5428BT9).
(17) Cass. civ. 1, 10 avril 2013, n° 11-19.530, FS-P+B+I (N° Lexbase : A9954KBB).
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Réf. : Circ. CNAV, n° 2013/44, du 15 octobre 2013, condition d'exonération de CSG et de CRDS et de la Casa liée à la situation d'imposition
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Réf. : Circ. CNAV, n° 2013/46, du 16 octobre 2013, assurance veuvage - capital décès (N° Lexbase : L3867IYU)
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Réf. : Circ. n° DSS/SD5B/2013/344 du 25 septembre 2013 (N° Lexbase : L2810IYQ)
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par Marion Del Sol, Professeur à l'Université de Rennes 1
Le 24 Octobre 2013
Résumé
Il s'agit ici pour l'administration de tenir compte des dispositions réglementaires issues du décret n° 2012-25 du 9 janvier 2012, portant sur le caractère collectif et obligatoire des garanties de protection sociale complémentaire (N° Lexbase : L7139IRT) (3) et, ainsi, d'actualiser son interprétation des conditions nécessaires au bénéfice, pour l'employeur, de la déductibilité sociale sous plafond de sa participation financière (CSS, art. L. 242-1 N° Lexbase : L4931ADY). Pour parvenir à cette actualisation, la DSS a pris son temps (4) mais a également eu recours, chose inhabituelle, à une consultation publique d'un projet de circulaire (du 7 au 21 juin 2013). La nouvelle circulaire n'emporte pas pour autant abrogation de la précédente, celle de 2009 (circ. n° DSS/5B/2009/32 du 30 janvier 2009 N° Lexbase : L9384ICK). En effet, 7 des 9 fiches que comporte la circulaire de 2009 restent quasiment inchangées ; seules -mais il s'agit des plus essentielles- les fiches 5 et 6 relatives aux caractères collectif et obligatoire se trouvent modifiées afin de tenir compte de l'évolution réglementaire intervenue en 2012 (5).
Il convient également de souligner que la DSS reporte la date-butoir de mise en conformité au décret du 9 janvier 2012 fixée initialement au 31 décembre 2013. Le délai est prolongé de six mois et prendra fin au 30 juin 2014, ce qui laisse ainsi davantage de temps aux entreprises pour (re)configurer les dispositifs de protection sociale à l'aune de la nouvelle interprétation administrative (6)... intervenue bien tardivement. |
Pour revêtir un caractère collectif au sens de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité sociale, les prestations complémentaires instituées doivent bénéficier à l'ensemble des salariés ou à une partie d'entre eux. Des dispositifs catégoriels peuvent donc être considérés comme collectifs mais c'est à la condition que le critère de catégorisation retenu soit objectif et utilisé conformément aux dispositions issues du décret du 9 janvier 2012.
L'adoption de ce texte réglementaire a rebattu les cartes puisque la détermination des critères objectifs de catégorisation est désormais encadrée, ce qui conduit la doctrine administrative à réécrire la fiche n° 5 (caractère collectif) à la lumière des dispositions des nouveaux articles R. 242-1-1 (N° Lexbase : L7177IRA), R. 242-1-2 (N° Lexbase : L7178IRB) et R. 242-1-3 (N° Lexbase : L7179IRC) du Code de la Sécurité sociale (7).
A - Les contours des critères
L'article R. 242-1-1 du Code de la Sécurité sociale énumère les critères permettant de définir objectivement une catégorie de bénéficiaires. La circulaire précise qu'il s'agit là d'une liste limitative (8), raison pour laquelle, contrairement à la doctrine antérieure, disparaît de la fiche n° 5 la possibilité de constituer des catégories objectives par référence aux catégories retenues pour l'application du droit du travail, dont celle de cadres dirigeants (9). En revanche, la DSS donne ici son interprétation des contours des cinq critères réglementaires.
Critère n° 1 - appartenance aux catégories "cadres" et "non-cadres" au sens de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947. Au regard de la réglementation AGIRC issue de la convention de 1947, la DSS considère que trois groupes de cadres peuvent exister : salariés exerçant les fonctions d'ingénieur et de cadre au sens de l'article 4, salariés relevant du groupe de l'article 4 auxquels s'ajoutent les employés techniciens et agents de maîtrise assimilés à des cadres par l'article 4 bis en raison de leur coefficient hiérarchique, les salariés composant les groupes article 4 et article 4 bis auxquels s'ajoutent les salariés bénéficiant d'une extension de la notion de cadre par recours à l'article 36 de l'annexe I de la convention de 1947.
La circulaire de septembre 2013 considère que chaque groupe peut constituer une catégorie objective, étant précisé que l'ensemble des salariés affiliés à l'AGIRC constitue a fortiori une catégorie donnant un caractère collectif au dispositif institué. Mais la DSS raisonne également a contrario pour définir les catégories objectives de non-cadres : l'ensemble des salariés non affiliés à l'AGIRC, les ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise, à l'exception de ceux assimilés cadres en application de l'article 4bis et de ceux bénéficiant de l'extension "cadre" en application de l'article 36, les ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise assimilés cadres en application de l'article 4bis, les ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise.
La circulaire invite à se montrer très précis dans la délimitation des catégories par référence, positive ou négative, aux dispositions régissant le champ d'application personnel de l'AGIRC. Cette exigence est à l'évidence susceptible de mettre en porte-à-faux nombre de dispositifs s'étant contentés de définir les catégories bénéficiaires par utilisation des seuls termes "cadres" et "non-cadres". Au regard de cette réalité, la DSS a manifestement décidé de faire preuve de pragmatisme : elle considère que "la mention dans un acte des catégories de "cadres" et "non-cadres" sans autre précision ne remet pas en cause les exclusions de l'assiette sociale", la catégorie "cadres" englobant alors les seuls salariés relevant de l'article 4 et la catégorie "non-cadres" les ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise. Cette interprétation devrait permettre à certaines entreprises de faire l'économie d'un processus de mise en conformité.
Critère n° 2 - tranches de rémunération fixées pour le calcul des cotisations AGIRC et ARRCO (10). Ce critère pose moins de difficultés que le précédent puisqu'il renvoie à la façon dont les régimes AGIRC et ARCCO "découpent" les rémunérations des salariés en tranchespour le calcul des cotisations dues (AGIRC : entre un et quatre plafonds de la sécurité sociale/entre quatre et huit plafonds ; ARRCO : entre zéro et un plafond/entre un et trois plafonds).
Le principal apport de la circulaire est de prévoir une tolérance en permettant de recourir à une tranche qui n'existe pas en matière de cotisation de retraite complémentaire, à savoir une tranche correspondant à deux plafonds. Dès lors, une catégorie peut regrouper les salariés dont la rémunération est inférieure ou égale à un, deux, trois, quatre ou huit plafonds.
En revanche, l'administration ne fait pas place à l'idée défendue par certains d'une tranche "D" (pour la fraction des rémunérations supérieure à huit plafonds). Par conséquent, une catégorie peut regrouper les salariés dont la rémunération est égale ou supérieure à un, deux, trois ou quatre plafonds.
Critère n° 3 - appartenance aux catégories et classifications professionnelles définies par les conventions de branche. Selon la circulaire, ce critère renvoie au premier niveau de classification des salariés défini par la convention de branche dont relève l'employeur. Cette interprétation appelle deux remarques. En faisant référence au premier niveau de classification conventionnelle, la DSS recourt à un critère opérationnel utilisable dans tous les cas de figure indépendamment de la façon dont est dénommé ce premier niveau dans chaque convention de branche et du type de classification utilisé. Par ailleurs, en précisant "convention de branche dont relève l'employeur", la circulaire ferme a priori la voie à un recours instrumentalisé à une classification conventionnelle d'une branche dont ne relève pas l'entreprise. Elle laisse toutefois en suspens la question d'une application volontaire.
Critère n° 4 - sous-catégories fixées par les conventions de branche. Curieusement, la circulaire semble occulter une partie du critère tel que précisé au 4° de l'article R. 242-1-1 du Code de la Sécurité sociale : "le niveau de responsabilité, le type de fonctions ou le degré d'autonomie dans le travail des salariés correspondant aux sous-catégories...". Pour la DSS, ce critère n° 4 permet de prendre en considération les niveaux de classification conventionnelle inférieurs au 1er niveau retenu (qui est d'utilisation au titre du critère n° 3) et ce jusqu'au niveau le plus bas. Cependant, selon la circulaire, retenir une sous-catégorie (ou un sous-niveau) ne peut être envisagé qu'à la condition que "ces niveaux correspondent à une définition" et pas seulement à un coefficient de rémunération. Malgré quelques exemples, cette condition est peu explicite. On peut faire l'hypothèse qu'elle doit être comprise par croisement avec les termes de l'article R. 242-1-1 4° du Code la Sécurité sociale évoqués ci-dessus.
Critère n° 5 - appartenance aux catégories définies à partir des usages professionnels.
B - Les conditions d'utilisation des critères
En préambule de la fiche n° 5, la circulaire précise que les critères peuvent être combinés entre eux. Cependant, quelques lignes plus bas, la DSS avertit que le recours aux critères dans les conditions d'utilisation requises ne ferme pas la porte à une requalification s'il peut être démontré que la catégorisation instituée a eu "en fait pour objectif d'accorder un avantage personnel" en totale contradiction avec l'exigence d'un caractère collectif. En d'autres termes, une certaine complexité dans la combinaison des critères peut rendre le montage suspect pour les URSSAF. Gare, donc, à une instrumentalisation abusive des critères.
En fonction de l'objet du régime (risques couverts). Les modalités d'utilisation des critères dépendent de la nature des garanties, plus précisément des risques couverts. Elles sont prévues à l'article R. 242-1-2 du Code de la Sécurité sociale. Eu égard à leur complexité, la circulaire s'efforce d'en faire une présentation pédagogique sous forme de tableau croisant chaque critère et chaque grande catégorie de risque (retraite - incapacité (11)/invalidité/inaptitude/décès - maladie au sens de couverture frais de santé) (v. tableau reproduit ci-dessous).
Les "croisements" relèvent du cadre général lorsque la situation correspond à l'une de celles que l'article R. 242-1-2 du Code de la Sécurité sociale reconnaît comme constituant une catégorie objective. En revanche, les autres situations relèvent de cadres particuliers qui contraignent l'employeur à justifier du caractère objectif des catégories, c'est-à-dire à démontrer que les catégories permettent de couvrir tous les salariés que leur activité professionnelle place dans une situation identique au regard des garanties concernées. Dans le cadre général, l'entreprise bénéfice d'une présomption de caractère collectif ; dans les cadres particuliers, elle doit en faire la démonstration.
Critère 1 | Critère 3 | Critère 4 | Critère 5 |
Catégorie cadres/non cadres | Catégories des conventions collectives | Sous-catégories des conventions collectives | Catégories issues d'usages |
Retraite |
Cadre général
sous réserve que tous les salariés soient couverts (B) |
Cadres particuliers | |
Incapacité (A), invalidité, inaptitude, décès (C) | |||
Maladie | sous réserve que tous les salariés soient couverts |
En fonction de conditions particulières d'exercice de l'activité. L'alinéa 1er de l'article R. 242-1-3 du Code de la Sécurité sociale dispose en substance que le caractère collectif doit être vérifié pour chaque garantie prévue par le régime institué : "les garanties [...] doivent être les mêmes" pour tous les salariés relevant d'une catégorie identifiée. Toutefois, cette exigence peut être aménagée en matière de prévoyance, l'alinéa second permettant l'instauration de garanties plus favorables au bénéfice de certains salariés "en fonction des conditions d'exercice de leur activité". En particulier, il peut être fait place à des garanties renforcées si l'activité de certains salariés les expose davantage à des risques de santé. L'aménagement est bienvenu et pertinent ; il suppose toutefois une grande vigilance de la part de l'employeur dont l'administration attend qu'il puisse justifier du lien entre le caractère particulier de l'activité des salariés bénéficiaires de ces garanties "améliorées" et la nature desdites garanties.
II - Caractère obligatoire : quelques précisions ministérielles
Conditionné par le caractère collectif des prestations complémentaires, le bénéfice du régime social de faveur est également subordonné à leur caractère obligatoire pour les salariés concernés. Le décret du 9 janvier 2012 fait toutefois place à des facultés de dispense d'adhésion dont l'existence, sous réserve de respecter les exigences de l'article R. 242-1-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7182IRG), ne remet pas en cause le caractère obligatoire.
A - Conditions générales relatives aux dispenses d'adhésion
Le premier alinéa de l'article R. 242-1-6 du Code de la Sécurité sociale dispose que "les garanties mentionnées [...] sont mises en place à titre obligatoire au profit des salariés sous réserve des facultés de dispense d'adhésion, au choix du salarié, prévues dans l'acte juridique et énoncées ci-dessous [...]". Les termes auxquels recourt le texte réglementaire conduisent la circulaire à rappeler, davantage qu'à préciser, les trois conditions générales.
Des dispenses expressément prévues dans l'acte juridique. La prévision de dispenses d'adhésion ne constitue qu'une simple faculté. Cependant, si le choix est fait d'en instituer une ou plusieurs, il doit s'agir d'un choix explicite qu'il convient de matérialiser dans l'acte juridique et ce quel que soit le mode opératoire utilisé (accord collectif, référendum ou décision unilatérale).
Dans sa circulaire précédente de 2009, la DSS faisait déjà place aux dispenses... à une époque où aucun texte réglementaire n'existait. Pour certains cas de dispense, la doctrine administrative n'admettait l'instauration de dispenses qu'au stade de l'acte juridique initial (12). La nouvelle fiche n° 6 balaie ces conditions restrictives et considère que les dispenses peuvent être prévues tant dans l'acte initial que dans des actes modificatifs ultérieurs. Cette prise de position est logique au regard des termes mêmes de l'article R. 242-1-6 qui ne distingue pas.
Des dispenses laissées au libre choix du salarié. Seul le salarié peut décider de faire jouer la dispense en sa faveur. Celle-ci ne peut en aucune manière être mise en oeuvre par l'employeur au seul constat que le salarié serait dans une des situations prévues (par exemple, salarié ayant un CDD de moins de 12 mois). C'est la raison pour laquelle la circulaire précise que le jeu de la dispense ne peut résulter que d'une demande explicite du salarié traduisant sa volonté de renoncer au bénéfice des garanties collectives.
A n'en pas douter l'existence de facultés de dispense induit une obligation d'information ad hoc à la charge de l'employeur afin que les salariés potentiellement concernés aient connaissance de leur existence, en comprennent les enjeux et puissent le cas échéant les faire jouer de façon éclairée, Enfin, un certain formalisme devra être respecté afin de pouvoir attester du choix effectué par le salarié mais également de produire les justificatifs éventuellement nécessaires au jeu de la dispense (par exemple, une attestation d'assurance santé complémentaire individuelle).
Des motifs de dispense entrant dans les prévisions de l'article R. 242-1-6 (v. ci-dessous).
B - Conditions particulières relatives aux différents cas de dispense
Cas n° 1 : salariés embauchés avant la mise en place de garanties par une décision unilatérale. Ce premier cas de dispense envisagé par l'article R. 242-1-6 n'est pas sans filiation avec l'article 11 de la loi "Evin" du 31 décembre 1989 . Cet article dispose en effet que "aucun salarié employé dans une entreprise avant la mise en place, à la suite d'une décision unilatérale de l'employeur, d'un système de garanties collectives [en matière de prévoyance (14)] ne peut être contraint à cotiser contre son gré à ce système". Le caractère d'ordre public de cette loi pourrait laisser penser qu'il n'était pas besoin pour le décret de janvier 2012 d'évoquer ce cas de dispense ni d'exiger une dispense explicite dans l'acte juridique.
En réalité, si la filiation est évidente, les situations visées ne se recouvrent pas nécessairement. En effet, la loi "Evin" ouvre un véritable droit de ne pas adhérer aux salariés embauchés avant la mise en place de garanties par décision unilatérale dans la seule hypothèse où une quote-part de financement est laissée à leur charge ; dès lors, dans cette situation, nul besoin d'une dispense expresse dans l'acte juridique comme l'évoque un peu maladroitement la circulaire. En revanche, l'article R. 242-1-6 du Code de la Sécurité sociale ne pose pas de condition relative aux modalités de financement des garanties et ouvre une possibilité générale de dispense en faveur des salariés présents dans l'entreprise lorsque des garanties collectives sont instituées par voie de décision unilatérale.... donc y compris lorsque le dispositif est intégralement financé par l'employeur. C'est sans doute la raison qui pousse la DSS à estimer que cette dispense générale peut également concerner les décisions unilatérales modifiant un régime préexistant "lorsque cette modification consiste en une remise en cause du financement intégral par l'employeur".
Cas n° 2 : salariés en situation salariale particulière. La circulaire ne comporte aucun commentaire relativement aux conditions permettant à des salariés en CDD, en contrat d'apprentissage ou à temps partiel de faire jouer l'éventuelle dispense insérée dans l'acte juridique. Cela ne surprend pas puisqu'elles font l'objet de précisions suffisamment claires au 2° de l'article R. 242-1-6.
En revanche, la DSS revient sur une "anomalie" du décret que nombre de praticiens avaient pointée, à savoir le fait que le texte réserve la possibilité de prévoir cette catégorie de dispense aux seules garanties mises en place par accord collectif ou référendum. Si la circulaire ne peut ajouter au texte en vigueur afin d'englober également la décision unilatérale, elle prend soin de souligner que "l'anomalie" sera prochainement corrigée par voie réglementaire (15). Tous les modes opératoires visés à l'article L. 911 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2615HIP) seront à l'avenir concernés.
Cas n° 3 : salariés en situation de double couverture. Le 3° de l'article R. 242-1-6 du Code de la Sécurité sociale permet de prévoir, à certaines conditions, une dispense (parfois temporaire) d'adhésion pour les salariés bénéficiaires de la CMU-C ou d'un chèque santé (aide à l'acquisition d'une complémentaire santé-ACS) ou couverts par un contrat individuel "frais de santé" ou une autre couverture collective. S'agissant de cette dernière hypothèse, la circulaire retranscrit les dispositions de l'arrêté du 26 mars 2012 qui donne la liste des couvertures collectives éligibles au jeu de la dispense. Elle en profite pour rendre explicites les conditions permettant au salarié de demander une dispense ès qualité d'ayant-droit de la couverture d'entreprise d'un de ses proches ; il doit s'agir d'une couverture présentant un caractère collectif et obligatoire au sens de l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité sociale, ce qui suppose que le régime ait rendu obligatoire l'adhésion non seulement des salariés mais également des ayants-droit.
La DSS prend en quelque sorte acte du caractère réversible ou évolutif de certaines situations. Ce faisant, elle apporte confirmation aux praticiens que les dispenses au titre du bénéfice de la CMU-C, du chèque santé ou d'une autre couverture collective (16) peuvent être sollicitées en cours de régime (et pas seulement au moment où il est institué) lorsque la situation du salarié vient à changer (17).
(1) V. nos obs., Généralisation de la couverture santé des salariés : des avancées, des évolutions, des interrogations (commentaire ANI du 11 janv. 2013) ? Lexbase Hebdo, n° 514 du 31 janvier 2013 - édition sociale (N° Lexbase : L9638IUI).
(2) V. nos. obs., Commentaire de l'article 1er de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi sur la généralisation de la couverture santé, la fin des clauses de désignation et la réforme de la portabilité ? Lexbase Hebdo, n° 534 du 4 juillet 2013 - édition sociale (N° Lexbase : L0394IXU).
(3) Décret n° 2012-25 du 9 janvier 2012, relatif au caractère collectif et obligatoire des garanties de protection sociale complémentaire (N° Lexbase : L7139IRT) ; V. nos. obs., Caractère collectif et obligatoire des garanties de protection sociale complémentaire : il est (enfin !) venu le temps du décret ? Lexbase Hebdo, n° 472 du 9 février 2012 - édition sociale (N° Lexbase : L7139IRT).
(4) Pour partie, cette temporisation peut s'expliquer par le recours en annulation formé par certaines confédérations syndicales contre le décret du 9 janvier 2012. En effet, contestant la légalité du texte réglementaire, la CGT et la CFE-CGEC ont saisi le Conseil d'Etat en mars et juin 2012. Or ce contentieux ne s'est que récemment dénoué par le rejet des requêtes syndicales et donc la validation du décret (CE 15 mai 2013, n° 357479, mentionné aux tables du Recueil LebonN° Lexbase : A3191KDK).
(5) Sur un plan pratique, il convient donc d'utiliser de façon combinée les deux circulaires, ce qui rend fort utile le recours à la version consolidée et actualisée de l'ensemble des fiches mise en ligne sur le site sécurité-sociale.fr.
(6) Pour rappel, les circulaires ministérielles et l'interprétation qu'elles donnent des textes peuvent être opposées par le cotisant aux URSSAF, opposabilité en sens unique qui est source de sécurité juridique pour l'entreprise qui ferait le choix de se glisser dans les pas de la doctrine administrative (CSS, art. L. 243-6-2 N° Lexbase : L6610G9P).
(7) Bien que non développé dans le présent commentaire, il convient de souligner que la circulaire précise comment il convient d'apprécier le caractère collectif en cas de modification de la situation juridique de l'employeur au sens de l'article L. 1224-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0840H9Y) (v. p. 12 de la circulaire). Elle fait sienne la jurisprudence sur le respect du principe d'égalité de traitement en cas de coexistence de dispositifs différents consécutifs à l'application de l'article L. 1224-1.
(8) Cette affirmation est partiellement démentie par la circulaire elle-même quelques pages plus loin afin de faire place à certaines situations un peu particulières (v. p. 8 et 9 de la circulaire). Parmi celles-ci, la situation des salariés détachés à l'étranger et maintenus au régime français de sécurité sociale qui peuvent effectivement avoir besoin d'une couverture spécifique rendant pertinente la possibilité de les traiter dans une catégorie à part. V. G. Godard, A. Le Fur et M. Del sol, Prévoyance des expatriés et caractère collectif des garanties de protection sociale complémentaire : comment concilier l'inconciliable ? JCP, 2012, éd. S, p. 1328.
(9) La circulaire traite toutefois dans un paragraphe à part de la situation des mandataires sociaux qui, à certaines conditions qui sont précisées, peuvent être rattachés à une catégorie de bénéficiaires, y compris lorsqu'ils ne sont pas titulaires d'un contrat de travail. En revanche, les mandataires sociaux ne peuvent à eux seuls constituer une catégorie objective.
(10) La DSS prend soin de préciser que la rémunération s'entend de la rémunération brute annuelle constituant l'assiette des cotisations AGIRC et ARCCO (CSS, art. L. 242-1 N° Lexbase : L0132IWS). Les éléments de rémunération à intégrer dans le calcul ne sont pas laissés à la disposition des employeurs, fermant logiquement la voie à toute modulation "volontariste" des tranches.
(11) La circulaire précise qu'une modification de l'article R. 242-1-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7178IRB) interviendra prochainement par voie réglementaire afin de rattacher explicitement "la perte de revenu en cas de maladie" au risque "incapacité" et non "frais de santé" comme actuellement (CSS, art. R . 242-1-2 4°). Ainsi, il y a aura, d'une part, la prévoyance "gros risques" et, d'autre part, la prévoyance "petits risques" (frais de santé), ce qui est beaucoup plus pertinent.
(12) Pour une condamnation judiciaire des exigences de la circulaire de 2009 en matière de dispense, Cass. civ. 2, 19 septembre 2013, n° 12-22.59, F-D (N° Lexbase : A5031KLW).
(13) Loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989, renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques (N° Lexbase : L5011E4D).
(14) En matière de retraite supplémentaire, la jurisprudence fait application de la même solution. V. Cass. soc., 17 octobre 2000, n° 98-40.288 (N° Lexbase : A7678AHT).
(15) Correction qui interviendra à l'occasion d'un décret pris en application de la loi n° 2013-504, 14 juin 2013, relative à la sécurisation de l'emploi (N° Lexbase : L0394IXU).
(16) Par erreur, la circulaire a visé le cas de la couverture individuelle en lieu et place manifestement de la situation d'une autre couverture collective.
(17) La circulaire entend que le libre choix du salarié soit préservé puisqu'elle fait place implicitement à une demande de dispense différée par rapport à la date à laquelle la situation personnelle du salarié vient à changer.
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Réf. : Cons. const., décision n° 2013-349 QPC, du 18 octobre 2013 (N° Lexbase : A0316KNZ)
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N9046BT9
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Le 24 Octobre 2013
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Réf. : Cass. soc., 15 octobre 2013, n° 12-21.746, FS-P+B (N° Lexbase : A1053KNC)
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N9081BTI
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Le 24 Octobre 2013
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Réf. : Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-21.448, FS-P+B (N° Lexbase : A1045KNZ)
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N9144BTT
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Le 07 Novembre 2013
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Réf. : Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-21.680, FS-P+B (N° Lexbase : A0892KND)
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N9146BTW
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Le 30 Octobre 2013
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Réf. : Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 13-11.217, FS-P+B (N° Lexbase : A0965KN3)
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N9145BTU
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Le 24 Octobre 2013
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Réf. : Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 13-11.324, FS-P+B (N° Lexbase : A1022KN8)
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N9143BTS
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Le 31 Octobre 2013
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Réf. : Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-60.281, FS-P+B (N° Lexbase : A0987KNU)
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N9147BTX
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Le 02 Novembre 2013
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Réf. : Cass. soc., 9 octobre 2013, n° 12-17.882, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6852KMQ)
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N9072BT8
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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale
Le 24 Octobre 2013
Résumé.
Le principe de l'égalité des armes s'oppose à ce que l'employeur utilise son pouvoir disciplinaire pour imposer au salarié les conditions de règlement du procès qui les oppose. |
I - Le licenciement annulé
Les faits. Un salarié avait été employé dans le secteur de la production audiovisuelle à compter de 1994 dans le cadre de très nombreux CDD successifs. Il avait saisi la juridiction prud'homale et obtenu que l'ensemble soit requalifié en CDI à temps partiel sur la base d'un salaire mensuel de référence à 1 417 euros (1).
Le jour du jugement prud'homal, son employeur avait adressé au conseil du salarié une proposition de contrat de travail établi sur la base de trente-six heures par mois pour un salaire de 523 euros, que celui-ci a (logiquement) rejeté, réclamant un contrat conforme à la décision du juge prud'homal.
Le salarié allait interjeter appel du jugement rendu, et l'employeur allait pour sa part le mettre à pied et le convoquer quatre jours plus tard en vue d'un licenciement disciplinaire, qui fut prononcé quelques jours plus tard.
Le salarié a alors demandé au juge de constater la nullité de la rupture de son contrat de travail et d'ordonner sa réintégration, ce qu'il n'avait pas obtenu de la cour de Versailles (2).
C'est cet arrêt qui se trouve ici cassé.
La cassation. La cassation est tout d'abord fondée directement sur l'article 6 § 1 de la CESDH et des libertés fondamentales, dont la Haute juridiction tire la règle selon laquelle "le principe de l'égalité des armes s'oppose à ce que l'employeur utilise son pouvoir disciplinaire pour imposer au salarié les conditions de règlement du procès qui les oppose". Or, en l'espèce, la cour d'appel avait constaté "que l'employeur avait utilisé son pouvoir de licencier afin d'imposer au salarié sa propre solution dans le litige qui les opposait relativement à l'exécution du jugement du conseil de prud'hommes, litige qui n'avait pas été définitivement tranché", ce dont elle aurait dû déduire que le licenciement était nul.
Une solution pleinement justifiée. Cette décision doit être pleinement approuvée car elle assure la protection effective de l'un des droits les plus fondamentaux, celui d'un procès équitable entre justiciables égaux en droits et en moyens.
II - La protection effective du principe de l'égalité des armes
Sources du principe d'égalité des armes. L'égalité des armes, qui est donc au coeur de cette décision, constitue l'une des manifestations du droit au procès équitable dégagé par la Cour européenne des droits de l'Homme sur le fondement de l'article 6 § 1 de la CESDH à partir de 1970 (3) : "dans un litige opposant des intérêts privés [ce principe doit] offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause [...] dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire" (4).
Il s'agit d'un principe généralement considéré comme procédural qui s'applique au procès pénal comme civil, et qui se confond, dans certaines de ses applications, avec le principe du contradictoire que le juge doit faire respecter (5), qu'il s'agisse du Ministère public (6) ou des parties (7) dans le cadre du procès (8), pour vérifier qu'elles ont eu la possibilité de discuter contradictoirement les éléments produits (9).
La Cour de cassation en a également fait application dans les instances disciplinaires, qu'il s'agisse de la discipline des professions (10) ou des règles qui régissent le droit disciplinaire conventionnel (11).
Ressources du principe d'égalité des armes. Ce principe est souvent invoqué par les justiciables, mais la Cour de cassation n'en fait qu'une application limitée. Ainsi, la Haute juridiction a considéré comme n'étant pas contraire à cette exigence l'aménagement des règles de preuve réalisé en matière civile pour favoriser les victimes de discriminations (12).
Cette rareté rend cette nouvelle décision d'autant plus importante.
La Cour fait, en effet, ici une application très extensive du principe d'égalité des armes car ce qui était en cause n'était pas directement le comportement des parties dans le procès (communication des pièces, caractère contradictoire, parole donnée en dernier au défendeur), mais un acte (le licenciement) formellement extérieur au procès et indépendant du contexte judiciaire.
La solution ne peut en réalité pas se comprendre du seul point de vue du principe de l'égalité des armes et doit être replacée dans le contexte plus large du droit du licenciement.
On sait, en effet, que la Cour de cassation considère comme nul le licenciement du salarié prononcé en violation d'une liberté fondamentale (13), et qu'à ce titre le droit au procès équitable, dans toutes ses composantes, constitue un droit sans doute encore plus fondamental que les autres puisqu'il permet la protection judiciaire de tous les droits substantiels du salarié.
En 2006, la Chambre sociale de la Cour de cassation avait considéré que "la teneur des écrits produits devant les juridictions, qui relève de la liberté fondamentale de la défense, ne peut connaître d'autres limites que celles fixées par l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 qui organise, par la suppression, les dommages-intérêts et la réserve d'action qu'il prévoit, les seules sanctions possibles de leur méconnaissance [et] qu'il en résulte qu'un licenciement prononcé des suites d'une telle méconnaissance est nul comme contraire à l'article L. 120-2 du Code du travail (N° Lexbase : L5441ACI) (devenu l'article L. 1121-1 N° Lexbase : L0670H9P)" (14).
Dernièrement, la Chambre sociale de la Cour de cassation a accepté de modifier sa jurisprudence et d'admettre que devait être considérée comme nulle la rupture du contrat de travail du salarié en raison de la saisine par ce dernier du juge prud'homal dans le cadre d'un différend l'opposant à son employeur sur la requalification de son contrat à durée déterminée (15).
C'est donc la troisième fois que la Chambre sociale de la Cour de cassation protège le droit au juge, cette fois-ci en visant l'égalité des armes et en se référant uniquement à l'article 6 § 1 de la CESDH (16), pour en tirer une nouvelle règle qui interdit à l'employeur d'user de son pouvoir disciplinaire "pour imposer au salarié les conditions de règlement du procès qui les oppose".
En d'autres termes, le juge intervient pour neutraliser le pouvoir disciplinaire de l'employeur qui lui confère une "arme", dont le salarié ne dispose, par hypothèse, pas, pour forcer le règlement de leur différend, et bien entendu pour protéger le salarié contre tout chantage à l'emploi.
Une solution parfaitement justifiée. Vue sous cet angle, la solution doit être approuvée car effectivement il serait scandaleux que l'employeur profite de son pouvoir disciplinaire pour contraindre le salarié soit à renoncer à son appel, soit à renoncer à l'exécution du jugement qui lui aurait été favorable en première instance.
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, cette solution n'interdit pas à l'employeur de licencier le salarié dès lors qu'un litige est en cours de règlement judiciaire, car celui-ci conserve bien entendu la possibilité de fonder le licenciement sur tout motif légitime, personnel comme économique, sans que personne ne puisse rien y trouver à redire. Il lui est en revanche interdit de sanctionner le salarié en raison du refus opposé par ce dernier des conditions du règlement du différend, ce qui est très différent.
Il serait même souhaitable d'appliquer ici, sur le fondement de l'article 1315 du Code civil (N° Lexbase : L1426ABG) et à l'instar de ce qui a été jugé en matière d'égalité de traitement (17), que le salarié n'a qu'à rapporter l'existence d'éléments de fait laissant supposer qu'il a été licencié en raison du différend l'opposant à son employeur en justice, à charge pour ce dernier de prouver que le motif retenu était totalement étranger à ce différend judiciaire.
(1) On sait, en effet, que le recours à l'utilisation de CDD successifs doit être justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi (Cass. soc., 23 janvier 2008, n° 06-44.197, FP-P+B(N° Lexbase : A1016D4E), singulièrement dans le domaine de l'audiovisuel où de nombreuses requalifications ont été prononcées : Cass. soc., 23 janvier 2008, n° 06-43.040, FP-P+B+R (N° Lexbase : A0999D4R) (journaliste pigiste). Cass. soc., 26 novembre 2008, n° 07-41.189, F-D (N° Lexbase : A4657EB4) (présentateur télé).
(2) CA Versailles, 22 février 2012, n° 11/03226 (N° Lexbase : A0599IDK).
(3) CEDH, 17 janvier 1970 : Grands arrêts de la CEDH, Thémis-Puf, dir. F. Sudre, 2011, p. 332 s., par A. Gouttenoire.
(4) CEDH, 27 octobre 1993, Req. 37/1992/382/460 (N° Lexbase : A6587AWU).
(5) Cass. soc., 28 octobre 1999, n° 97-21.328 (N° Lexbase : A7772C4M) : "aucun texte n'interdit à l'employeur dont le salarié a été victime d'un accident mortel du travail de solliciter une autopsie auprès du juge compétent" ; Cass. soc., 17 janvier 2000, n° 98-11.198, FS-D (N° Lexbase : A9294C3M) : "si la Caisse établit sa demande de remboursement de l'indu au vu des seuls renseignements qu'elle a recueillis, hors toute procédure contradictoire, le praticien bénéficie d'un recours approprié, dans le cadre d'un débat contradictoire, devant les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale" ; Cass. soc., 29 octobre 2002, n° 00-13.413 (N° Lexbase : A4173A3X), : "l'employeur et le journaliste bénéficient des mêmes voies de recours contre, d'une part, la décision prud'homale et, d'autre part, la sentence arbitrale ; que, dès lors, c'est sans violer l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme que la cour d'appel a rejeté le recours en annulation"; Cass. soc., 26 septembre 2007, n° 06-43.850, FS-D (N° Lexbase : A5946DYU) : "en décidant que la signature, par le salarié, à l'occasion de la résiliation de son contrat de travail, d'un reçu pour solde de tout compte ne comportant pas le détail des sommes réglées ne pouvait valoir renonciation de celui-ci au droit de contester devant le juge prud'homal la cause de son licenciement, la cour d'appel n'a pas méconnu les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales qui garantit le droit d'accès au juge et le droit à un procès équitable" ; Cass. soc., 22 septembre 2011, n° 10-18.864, FS-D (N° Lexbase : A9812HXP) : "la preuve étant libre en matière prud'homale, rien ne s'oppose à ce que le juge prud'homal retienne des attestations établies par des salariés de l'entreprise et en apprécie librement la valeur et la portée pour établir la faute grave fondant un licenciement sans méconnaître le principe de l'égalité des armes résultant du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales dès lors que ces attestations, versées au débat, sont soumises à la discussion contradictoire des parties ; Cass. soc., 5 juin 2013, n° 12-15.292, FS-D (N° Lexbase : A3187KG7) (idem).
(6) Cass. civ.1, 20 septembre 2012, n° 11-16.402, F-P+B+I (N° Lexbase : A1056ITB).
(7) Sur l'intervention de la Halde (qui n'est pas partie au litige) devant les tribunaux qui n'a pas été jugé contraire au principe "dès lors que les parties sont en mesure de répliquer par écrit et oralement à ces observations, et que le juge apprécie la valeur probante des pièces qui lui sont fournies et qui ont été soumises au débat contradictoire" : Cass. soc., 16 novembre 2010, n° 09-42.956, FS-D (N° Lexbase : A5849GKT) ; Cass. soc., 20 octobre 2011, n° 10-30.258, FS- D (N° Lexbase : A8840HY3).
(8) Ainsi sur la communication des pièces : Cass. civ 3, 7 novembre 2012, n° 11-17.803, FS-P+B (N° Lexbase : A6665IWR).
(9) Cass. soc., 5 juin 2013, n° 12-15.292, F-D (N° Lexbase : A3187KG7).
(10) Cass. civ. 1, 5 octobre 1999, n° 97-15.277 (N° Lexbase : A5194AWB), D., 2000. p. 312, note B. Blanchard ; RTDCiv., 2000. p. 618, obs. J. Normand.
(11) Cass. soc., 16 mai 2012, n° 11-17.683, FS-P+B+I (N° Lexbase : A7031ILY) : "l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier, et que mention en soit faite dans la décision" ; Cass. soc., 3 décembre 2002, n° 00-46.055, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1558A4H) : Dr. soc. 2003, p. 235, obs. J. Savatier : "les conventions et accords collectifs de travail peuvent limiter les possibilités de licenciement aux causes et conditions qu'ils déterminent et qui ne rendent pas impossible toute rupture du contrat de travail ; que la cour d'appel a décidé à bon droit que le fait pour les partenaires sociaux de subordonner une mesure de révocation immédiate privative pour le salarié de préavis et d'indemnité à l'avis conforme d'un organisme paritaire constituant une émanation des employeurs et des salariés ne méconnaissait pas les dispositions de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'Homme et des libertés fondamentales". Sur cette application, P. Waquet, "Le juge social et la convention EDH", (Actes du colloque du 27 novembre 1998 organisé par la Cour de cassation, Documentation Française, p. 163).
(12) Cass. soc., 28 janvier 2010, n° 08-41.959, FS-D (N° Lexbase : A7667EQZ) ; Cass. soc., 7 février 2012, n° 10-19.505, FS-P+B (N° Lexbase : A3579ICK).
(13) Cass. soc., 13 mars 2001, n° 99-45.735 (N° Lexbase : A0149ATP) ; Dr. soc. 2001, p. 1117, obs. C. Roy-Loustaunau. Cass. soc., 31 mars 2004, Dr. soc., 2004, p. 666, obs. Ch. Radé.
(14) Cass. soc., 28 mars 2006, n° 04-41.695, FS-P+B (N° Lexbase : A8616DNG).
(15) Cass. soc., 6 février 2013, n° 11-11.740, FP-P+B+R (N° Lexbase : A6281I7R) : La protection du droit d'agir en justice à l'épreuve du droit de la rupture anticipée du CDD, Lexbase Hebdo n° 519 du 14 mars 2013 - édition sociale, chron. B. Gauriau (N° Lexbase : N6134BTD) ; Procédures du 1er avril 2013, n° 4, p. 21, note A. Bugada ; Dr. soc., 2013 p. 415, crhon. J. Mouly.
(16) Dans la décision de 2006, elle avait visé l'article L. 120-2, aujourd'hui L. 1121-1 du Code du travail, tout comme dans l'arrêt du 6 février 2013.
(17) Cass. soc., 28 septembre 2004, Dr. soc., 2004, p. 1144, obs. Ch. Radé. Cass. soc., 20 octobre 2010, n° 08-19.748, FS-P+B (N° Lexbase : A4140GCC) : v. les obs de Ch. Radé, Harcèlement et inégalité salariale : la Cour de cassation plus exigeante sur les éléments pertinents à fournir par le demandeur, Lexbase Hebdo n° 415 du 4 novembre 2010 (N° Lexbase : N4485BQ8).
Décision
Cass. soc., 9 octobre 2013, n° 12-17.882, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6852KMQ)
Cassation partielle (CA Versailles, 22 février 2012, n° 11/03226 N° Lexbase : A0599IDK) Texte visé : article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR) Mots clef : procès équitable ; égalité des armes ; violation d'une liberté fondamentale ; licenciement ; nullité Lien base : (N° Lexbase : E2757ETB) |
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Réf. : Cass. soc., 15 octobre 2013, n° 12-21.765, FS-P+B (N° Lexbase : A0968KN8)
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N9114BTQ
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Le 01 Novembre 2013
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Réf. : CPH Marseille, 9 octobre 2013, n° 13/00768 (N° Lexbase : A0324KNC)
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N9149BTZ
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Le 24 Octobre 2013
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Réf. : Arrêté du 7 octobre 2013, fixant les montants plafonds des forfaits journaliers mentionnés à l'article R. 314-207, au 1° de l'article D. 313-17 et à l'article D. 313-20 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L3988IYD)
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N9056BTL
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Le 24 Octobre 2013
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Réf. : CE 1° 6° s-s-r., 16 octobre 2013, n° 368174, publié aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1111KNH)
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N9111BTM
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Le 05 Novembre 2013
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N9126BT8
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Le 25 Octobre 2013
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-18.229, F-D (N° Lexbase : A1058KNI) : l'employeur tient de son pouvoir de direction, né du contrat de travail, le droit d'évaluer ses salariés. Les résultats d'une telle évaluation peuvent constituer une justification objective des décisions de l'employeur dès lors qu'elle est fondée sur des motifs objectifs étrangers à toute discrimination prohibée (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E5824ETU).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-18.809, F-D (N° Lexbase : A0934KNW) : caractérisent le transfert d'une entité économique autonome qui a conservé son identité et dont l'activité a été poursuivie, entraînant la reprise des contrats de travail des salariés affectés à cette activité, l'affectation des salariés aux mêmes emplois et qualifications, le transfert du personnel d'encadrement, de même que le transfert des moyens d'exploitation tels que le logiciel de stockage (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8829ESS).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 11-29.043, F-D (N° Lexbase : A0823KNS) : il n'y a pas transfert de l'entité économique autonome lorsqu'aucun moyen matériel ni aucun personnel n'a été spécialement affecté, et ce même si le transport privé du personnel de la société P. était à l'origine de la création de la société W. et générait encore une part importante de son chiffre d'affaires au moment de sa liquidation (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E8829ESS).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-11.971, F-D (N° Lexbase : A1008KNN) : il n'y a pas de trouble manifestement illicite lorsque le licenciement est fondé sur la manière véhémente et agressive dont le salarié a publiquement exprimé certaines revendications et mis en cause la probité de sa hiérarchie, caractérisant un usage abusif de la liberté d'expression (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9239ESY).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-13.284, F-D (N° Lexbase : A0827KNX) : constitue une faute grave le fait pour un salarié, travaillant dans un établissement placé sous vidéo-surveillance en raison de l'activité exercée, de soustraire une cassette d'enregistrement aux fins de se constituer une preuve contre son employeur qu'il suspecte, par ce biais, d'écouter les conversations du personnel à son insu (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9188ES4).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-13.455, F-D (N° Lexbase : A1054KND) : constitue une faute grave rendant impossible le maintien de l'intéressée dans l'entreprise, le fait pour la salariée de n'avoir produit aucune justification, ni même prévenu du motif de son absence et de ne s'être jamais mise à la disposition de l'employeur pour organiser la visite de reprise (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9188ES4).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 11-27.37, F-D (N° Lexbase : A0941KN8) : le fait pour une salariée, disposant de neuf ans d'ancienneté, de ne pas se présenter à son poste de travail à l'issue d'un congé sans solde afin de pallier l'impossibilité d'organiser la présence nécessaire au quotidien auprès de sa fille handicapée, ne constitue pas une faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9187ES3).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-19.670, F-D (N° Lexbase : A1026KNC) : constitue une faute grave, rendant impossible le maintien dans l'entreprise, le fait pour une salariée d'avoir, d'une part, violé ostensiblement l'interdiction de fumer imposée dans la zone non fumeur de l'établissement affectant ainsi l'obligation de l'employeur d'assurer le respect de la législation en matière de santé publique, et, d'autre part, tenu des propos à connotation raciste à l'égard d'un membre du personnel (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9188ES4).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-15.638, F-D (N° Lexbase : A0974KNE) : peut constituer un manquement à l'obligation de loyauté, l'activité de pilote de rallye exercée par le salarié pendant la période de suspension du contrat de travail, compte tenu de son inaptitude à conduire des véhicules et des nombreux arrêts de travail liés à sa maladie professionnelle touchant ses deux mains, lorsque cette activité crée un préjudice à l'employeur (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3111ETE).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-12.187, F-D (N° Lexbase : A0873KNN) : la gratification annuelle et la prime de treizième mois, prévues par des conventions collectives, possèdent une nature identique et désignent toutes deux une prime à caractère annuel même si leurs modalités de versement diffèrent, par conséquent seule la plus élevée des deux est due (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2296ET9).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-13.045, F-D (N° Lexbase : A0981KNN) : laisse présumer l'existence d'une discrimination syndicale, le fait pour une entreprise de ne pas augmenter pendant vingt-trois ans le salaire d'un salarié titulaire d'un mandat syndical, de ne proposer aucun autre exemple de salarié ayant connu une stagnation de coefficient appliqué à la rémunération pendant trente-cinq ans (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E5478EX8).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-15.049, F-D (N° Lexbase : A0832KN7) : la différence de traitement doit être objectivement et raisonnablement justifiée par un but légitime. Or, les motifs économiques et démographiques tel qu'avancés par la cour d'appel ne permettent pas d'établir le caractère légitime de la cessation d'activité en raison de l'âge (mise à la retraite d'office des agents ayant atteint 55 ans). L'objectif de la protection de la santé des agents ayant accompli quinze ans de service actif en l'absence d'éléments précis relatifs à la nature des travaux, notamment ceux accomplis par l'intéressé, et leurs conséquences sur la santé ne permet pas de justifier la différence de traitement (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2589ET3).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-60.293, F-D (N° Lexbase : A0988KNW) : justifie l'annulation du scrutin portant sur la désignation d'un membre du CHSCT, le fait pour l'employeur d'avoir eu un "rôle actif" lors de la réunion du collège désignatif en présidant la séance et en participant au dépouillement, manquant ainsi à son obligation de neutralité (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3387ETM).
- Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-13.933, F-D (N° Lexbase : A0833KN8) : en présence d'une circulaire administrative relative aux dotations vestimentaires, dont les dispositions seraient moins favorables que celles prévues par le Code du travail, les juges du fond doivent surseoir à statuer en renvoyant une question préjudicielle portant sur l'interprétation de ce texte auprès du juge administratif.
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