Le Quotidien du 25 septembre 2023 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Règlement insolvabilité : détermination du tribunal compétent pour connaître de la procédure étendue en cas de confusion des patrimoines

Réf. : Cass. com., 13 septembre 2023, n° 22-12.855, F-B N° Lexbase : A57371GL

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[Brèves] Règlement insolvabilité : détermination du tribunal compétent pour connaître de la procédure étendue en cas de confusion des patrimoines. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/99918825-breves-reglement-insolvabilite-determination-du-tribunal-competent-pour-connaitre-de-la-procedure-et
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par Vincent Téchené

le 20 Septembre 2023

► Lorsqu’une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d'un État membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre État membre à l'encontre d'une autre société établie sur le territoire de ce dernier État, il nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle le centre des intérêts principaux de la société visée par cette action se trouve au lieu du siège statutaire, qu'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permette d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension se situe dans l'État membre où a été ouverte la procédure d'insolvabilité initiale.

Faits et procédure. La société ATC RIB, qui exerçait son activité dans des locaux donnés à bail par la société Lek (de droit allemand), qui avait le même dirigeant et dont elle était la filiale, a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 14 mai 2018. Un jugement du 3 août 2018, confirmé par un arrêt du 25 avril 2019, a converti cette procédure en liquidation judiciaire.

Le liquidateur a assigné la société Lek pour lui voir étendre la procédure collective de la société ATC en invoquant l'existence de relations financières anormales. La société Lek a contesté la compétence du tribunal de la procédure collective en se prévalant des dispositions du Règlement « Insolvabilité » n° 2015/848 du 20 mai 2015 N° Lexbase : L7603I84.

La cour d’appel (CA Dijon, 2 décembre 2021, n° 21/00765 N° Lexbase : A93297DU) a confirmé le jugement rejetant l'exception d'incompétence territoriale qu’avait soulevée la société Leck et lui a étendu la liquidation judiciaire. Cette dernière a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles 3 § 1 et 4 du Règlement (UE) n° 2015/848 du 20 mai 2015.

Rappelons que, selon l’article 4 du Règlement, la juridiction saisie d'une demande d'ouverture d'une procédure d'insolvabilité examine d'office si elle est compétente en vertu de l'article 3 du Règlement, indique, dans la décision d'ouverture de la procédure d'insolvabilité, les fondements de sa compétence et précise, notamment, si sa compétence est fondée sur le § 1 ou 2 de l'article 3.

Or, l’article 3 § 1 prévoit que les juridictions de l'État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d'insolvabilité.

Comme le rappelle la Haute juridiction le précédent Règlement « Insolvabilité » de 2000 (Règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000 N° Lexbase : L6914AUM), remplacé par le Règlement de 2015, ici applicable, ne contient pas de règle de compétence se référant expressément à l'extension, au motif d'une confusion des patrimoines, d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un État membre à une société dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre. La CJUE (CJUE, 15 décembre 2011, aff. C-191/10 N° Lexbase : A2893H8N, V. Téchené, Lexbase Affaires, janvier 2012, n° 278 N° Lexbase : N9469BSI) palliant ce manque a alors retenu que le Règlement de 2000, « doit être interprété en ce sens que dans l'hypothèse où une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d'un État membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre État membre à l'encontre d'une autre société établie sur le territoire de ce dernier État, la seule constatation de la confusion des patrimoines de ces sociétés ne suffit pas à démontrer que le centre des intérêts principaux de la société visée par ladite action se trouve également dans ce dernier État. Il est alors nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle ce centre se trouve au lieu du siège statutaire, qu'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permette d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension se situe dans l'État membre où a été ouverte la procédure d'insolvabilité initiale ».

La Cour de cassation énonce ici la même règle : le Règlement du 20 mai 2015 ne contenant pas non plus de règle de compétence pour le même cas et son article 3 § 1 étant rédigé dans des termes identiques à celui de l'article 3 § 1 du Règlement du 29 mai 2000, il s'en déduit que la règle énoncée par la CJUE dans son arrêt du 15 décembre 2011 s'applique de façon similaire aux procédures soumises au Règlement du 20 mai 2015.

Appliquant la solution à l’affaire qui lui est soumise, la Haute juridiction retient que la cour d’appel s’est déterminée par des motifs impropres à établir que le centre des intérêts principaux de la société Lek se trouvait en France et à fonder sa compétence. Cette dernière ne pouvait, en effet, se déduire de la confusion de son patrimoine avec celui de la société initialement mise en liquidation judiciaire, mais exclusivement d'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permettant d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société Lek se trouvait en France et non au lieu de son siège statutaire en Allemagne.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L'ouverture des procédures par extension, Le tribunal compétent en matière d'extension de la procédure collective, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E8678ETL.

 

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