La lettre juridique n°947 du 25 mai 2023 : Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Exonération de TVA en matière de contrat d’affermage : une clarification du juge européen bienvenue !

Réf. : CJUE, 4 mai 2023, aff. C-516/21, Y N° Lexbase : A70559S4

Lecture: 4 min

N5527BZQ

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Exonération de TVA en matière de contrat d’affermage : une clarification du juge européen bienvenue !. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/96224586-brevesexonerationdetvaenmatieredecontratdaffermageuneclarificationdujugeeuropeenbienve
Copier

par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

le 24 Mai 2023

► Dans la lignée jurisprudentielle passée, la Cour de justice de l’Union européenne était amenée à trancher une question préjudicielle relative à l’exonération de TVA en matière d’affermage par un arrêt rendu le 4 mai 2023.

La question de l’exonération de TVA en matière de contrat d’affermage s’inscrit dans un contentieux jurisprudentiel relativement dense en la matière.

En effet, par un arrêt rendu le 27 septembre 2012 (CJUE, 27 septembre 2012, aff. C-392/11, point 28, Field Fisher Waterhouse LLP c/ Commissioners for Her Majesty's Revenue and Customs N° Lexbase : A4353ITE), la Cour de justice de l’Union européenne a jugé qu’une location de biens immeubles relevant de l’article 135,§1, sous 1), de la Directive TVA et des prestations de service liées à cette location peuvent constituer une prestation unique de location de biens immeubles au regard de la TVA.

Par ailleurs, les juges européens ont également jugé dans un arrêt rendu le 18 décembre 2018 (CJUE, 19 décembre 2018, aff. C-17/18, Virgil Mailat N° Lexbase : A0691YRZ) que l'article 135, paragraphe 1, sous 1), de la Directive TVA devait être interprété en ce sens qu'un contrat de location portant sur un bien immeuble qui servait à l'exploitation commerciale d'un restaurant ainsi que sur les biens d’équipement et consommables nécessaires à cette exploitation constituait une prestation unique dans laquelle la location du bien immeuble était la prestation principale.

Rappel des faits

  • Un particulier a donné en location, dans le cadre d’un bail à ferme, un bâtiment d’élevage de dindes avec des outillages et des machines fixés à demeure.
  • Par un bail à ferme, il est prévu que le bailleur perçoit une rémunération au titre de la mise à disposition du bâtiment d’élevage ainsi que des outillages et des machines. À ce titre, le bailleur estimait que la prestation d’affermage devait être exonérée de TVA.
  • À la suite d’un contrôle, l’administration fiscale a émis des avis d’imposition rectificatifs au titre des années 2010 à 2014. Elle a notamment estimé que l’affermage des outillages et des machines ne pouvait être exonéré de TVA.

 

Procédure

  • Le bailleur a introduit un recours contre l’avis de l’administration fiscale. Les juges du tribunal des finances allemand ont fait droit à la demande du requérant et ont jugé que la prestation d’affermage devait être exonérée totalement de TVA.
  • Selon les juges allemands, la mise à disposition des outillages et des machines était constitutive d’une prestation accessoire à la mise à disposition du bâtiment d’élevage et devait être exonérée au même titre que celle-ci.
  • L’administration fiscale a formé un pourvoi en révision contre ce jugement devant la Cour fédérale des finances. Les juges de la Cour fédérale des finances se sont fondés sur un arrêt de la CJUE en date du 19 décembre 2018 pour considérer que l’affermage de convoyeurs industriels à spirale, d’équipements de chauffage et de ventilation ainsi que de systèmes d’éclairage sont exonérés de TVA en vertu de l'article 135, paragraphe 1, sous 1), de la Directive TVA.
  • Ainsi, la juridiction de renvoi a jugé que la prestation fournie présente un caractère unique et s’est alignée sur la décision rendue par les juges du tribunal des finances allemand. Elle décide néanmoins de surseoir à statuer et de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne.

 

Question de droit. La Cour de Justice de l’Union européenne était amenée à trancher la question préjudicielle suivante :

L’obligation fiscale grevant la location d'outillages et de machines fixés à demeure s'applique-t-elle, en vertu de l'article 135, paragraphe 2, premier alinéa, sous c), de la Directive TVA :

  • à la seule location isolée (autonome) de ces outillages et machines ou bien également ;
  • à la location (affermage) de ces outillages et machines, qui est exonérée, en vertu de l'article 135, paragraphe 1, sous 1), de la Directive TVA, sur la base (et à titre accessoire) de l'affermage de bâtiments conclu entre ces mêmes parties ? 

 

Solution

À cette question, la Cour de Justice de l’Union européenne juge que l’article 135,§2, premier alinéa, sous c), de la Directive du 28 novembre 2006 relative à la TVA doit être interprété en ce sens qu’il ne s'applique pas à la location d'outillages et de machines fixés à demeure lorsque cette location constitue une prestation accessoire à une prestation principale d'affermage d'un bâtiment, réalisée dans le cadre d'un contrat d'affermage conclu entre les mêmes parties et exonérée en vertu de l'article 135, paragraphe 1, sous 1), de cette Directive, et que ces prestations forment une prestation économique unique.

En conséquence, en matière d’affermage, la location d’outils suit le sort de la prestation principale en ce qui concerne l’exonération de la TVA. La location d’outillages et de machines fixés à demeure constitue une prestation accessoire à une prestation principale d’affermage d’un bâtiment et doit être exonérée de TVA.

newsid:485527