Le Quotidien du 17 avril 2023 : Bancaire

[Brèves] Précisions sur le régime juridique applicable à l’aval

Réf. : Cass. com., 5 avril 2023, n° 21-17.319, F-B N° Lexbase : A61579MY

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N4998BZ7

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par Jérôme Lasserre-Capdeville

le 14 Avril 2023

► Il résulte des articles L. 511-21 et L. 512-4 du Code de commerce que l’aval, en ce qu’il garantit le paiement d’un titre dont la régularité n’est pas discutée, constitue un engagement cambiaire gouverné par les règles propres du droit du change, de sorte que l’avaliste n’est pas fondé à rechercher la responsabilité de la banque, bénéficiaire du billet à ordre, pour manquement à un devoir d'information.

L’aval est un engagement souscrit par une personne, le donneur d’aval ou avaliste, pour garantir l’exécution de l'obligation assumée par un autre souscripteur qui a précédemment apposé sa signature sur un effet de commerce, le plus souvent un billet à ordre. Il s’agit ainsi d’une variété de cautionnement solidaire, dont le caractère cambiaire de l’engagement du donneur d’aval lui confère des caractères propres qui dérogent sur plusieurs points au droit commun du cautionnement.

Or, on peut noter, depuis quelques mois, plusieurs décisions de la Cour de cassation à l’origine de précisions intéressant le droit applicable à cet aval (Cass. com., 5 avril 2023, n° 21-19.160, F-B N° Lexbase : A61629M8, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, avril 2023, n° 753 N° Lexbase : N4999BZ8 ; Cass. com., 25 janvier 2023, n° 21-16.275, F-B N° Lexbase : A06459A7, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, février 2023, n° 744 N° Lexbase : N4194BZD ; Cass. com., 24 mars 2021, n° 19-18.614, F-P N° Lexbase : A67424MN, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, avril 2021, n° 671 N° Lexbase : N7024BYS). La décision sélectionnée attire alors l’attention.

Faits et procédure. Le 20 juillet 2017, la banque X. avait consenti à la société T. un crédit de trésorerie de 70 000 euros, matérialisé par l'établissement d'un billet à ordre sur lequel M. E., dirigeant de la société, avait porté son aval. À la suite de la défaillance de la société, la banque avait assigné l’avaliste en paiement.

Par un arrêt du 30 mars 2021, la cour d’appel de Reims (CA Reims, 30 mars 2021, n° 20/00373 N° Lexbase : A00034NG) avait ordonné de lever la garantie bancaire pour le prêt de 70 000 euros à titre chirographaire correspondant au billet à ordre impayé n° 000200753 pour un montant initial de 70 000 euros, de prononcer l’annulation de l'aval et de rejeter la demande de la banque de condamnation de M. E. au titre de l’aval. En l’occurrence, les magistrats rémois avaient considéré que la banque était débitrice de l’obligation précontractuelle d’information créée par l'article 1112-1 du Code civil N° Lexbase : L0598KZ8, lequel devait s’appliquer au billet à ordre et à l'aval en l’absence de toute règle dérogatoire du Code de commerce à cette obligation légale, qui est d’ordre public.

L’établissement prêteur avait alors formé un pourvoi en cassation.

Décision. Celui-ci se révèle utile puisque la Cour de cassation casse la décision des juges du fond.

Elle déclare, d’abord, qu’il résulte des articles L. 511-21 N° Lexbase : L6674AIZ et L. 512-4 N° Lexbase : L6738AIE du Code de commerce que l’aval, en ce qu’il garantit le paiement d’un titre dont la régularité n’est pas discutée, constitue un engagement cambiaire gouverné par les règles propres du droit du change, de sorte que l’avaliste n’est pas fondé à rechercher la responsabilité de la banque, bénéficiaire du billet à ordre, pour manquement à un devoir d’information.

Or, et cela a été dit, pour ordonner la levée de la garantie bancaire pour le prêt de 70 000 euros à titre chirographaire, correspondant au billet à ordre impayé du même montant, prononcer l’annulation de l'aval porté sur ce billet et rejeter la demande de la banque de condamnation de M. E. au titre dudit aval, l'arrêt de la cour d’appel, après avoir énoncé que l'obligation précontractuelle d'information prévue à l'article 1112-1 du Code civil est d’ordre public et qu’aucune disposition du Code de commerce ne prévoyant de règles dérogatoires, elle s'applique au billet à ordre et à l'aval, avait retenu que la banque n'avait pas délivré une information efficiente à M. E. quant à la portée de son aval. Dès lors, en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes précités.

Cette solution témoigne du fait que l’aval est une garantie particulière faisant l’objet d’un régime spécifique ; et qu’il doit en conséquence échapper aux règles protectrices plus générales figurant dans le Code civil.

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