Le Quotidien du 22 février 2023 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Portée du dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire et exercice d’une action en responsabilité contre un avocat

Réf. : Cass. com., 8 février 2023, n° 21-16.954, F-B N° Lexbase : A97059B3

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N4325BZ9

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[Brèves] Portée du dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire et exercice d’une action en responsabilité contre un avocat. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/93223205-breves-portee-du-dessaisissement-du-debiteur-en-liquidation-judiciaire-et-exercice-dune-action-en-re
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par Vincent Téchené

le 21 Février 2023

► Le débiteur, dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens par l'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire, conserve le droit, pourvu qu'il l'exerce contre le liquidateur ou en sa présence, de former un appel, puis le cas échéant, un pourvoi en cassation, contre les décisions prononçant la résolution de son plan de redressement et sa liquidation judiciaire. Il n'est, en revanche, pas recevable à agir en responsabilité contre l'avocat qu'il a mandaté pour le représenter et l'assister dans l'exercice de ce droit propre, une telle action en responsabilité n'ayant pas pour effet de faire valoir le point de vue du débiteur dans le déroulement de la procédure collective, mais poursuivant une finalité patrimoniale consistant en l'obtention de dommages et intérêts et relevant, en conséquence, des droits et actions atteints par le dessaisissement et exercés par le liquidateur pendant la durée de la procédure collective.

Faits et procédure. Après la mise en redressement judiciaire d'un débiteur, son plan de continuation a été résolu par un jugement du 29 mars 2011 qui a également prononcé sa liquidation judiciaire. Ce jugement a été confirmé par un arrêt d’appel cassé en toutes ses dispositions par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 22 mai 2013 (Cass. com., 22 mai 2013, n° 12-16.641, F-D N° Lexbase : A9150KDA).

Se prévalant d'une faute de son avocat, consistant à ne pas avoir saisi la cour de renvoi dans le délai imparti après l'arrêt de cassation précité, le débiteur l'a assigné en paiement de dommages et intérêts.

La cour d’appel de Douai (CA Douai, 18 mars 2021, n° 19/05979 N° Lexbase : A50804LQ) ayant confirmé l'ordonnance du juge de la mise en état qui a « annulé » l'assignation pour « défaut de capacité » à agir du débiteur en liquidation judiciaire dessaisi, celui-ci a formé un pourvoi en cassation.

Décision. La Haute juridiction énonce que si le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, par l'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire, conserve le droit, pourvu qu'il l'exerce contre le liquidateur ou en sa présence, de former un appel, puis le cas échéant, un pourvoi en cassation, contre les décisions prononçant la résolution de son plan de redressement et sa liquidation judiciaire, il n'est, en revanche, pas recevable à agir en responsabilité contre l'avocat qu'il a mandaté pour le représenter et l'assister dans l'exercice de ce droit propre.

Elle ajoute qu’une telle action n'ayant pas pour effet de faire valoir le point de vue du débiteur dans le déroulement de la procédure collective, mais poursuivant une finalité patrimoniale consistant en l'obtention de dommages et intérêts, elle ne peut se rattacher à l'exercice d'un droit propre et la fin de non-recevoir opposée au débiteur n'est pas contraire aux exigences de l'article 6 § 1 de la CESDH N° Lexbase : L7558AIR, dès lors que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine, seuls atteints par le dessaisissement, sont exercés par le liquidateur pendant toute la durée de la procédure collective.

En conséquence, la Cour en conclut que l'arrêt d’appel a exactement retenu que le débiteur exerçait contre son avocat une action en responsabilité de nature patrimoniale entrant dans le champ d'application de l'article L. 641-9 du Code de commerce, de sorte qu'il n'avait pas qualité pour agir contre son avocat.

Observations. Concernant les actions en responsabilité, il a été jugé que le débiteur peut exercer une action en responsabilité si elle est fondée sur un préjudice moral (Cass. com., 13 février 2007, n° 05-12.471, F-D N° Lexbase : A2082DUN). Par ailleurs, dans un important arrêt du 17 décembre 2014, la Cour de cassation, opérant un revirement, a étendu la théorie des droits propres qui échappent au dessaisissement frappant le débiteur, qui lui interdit l'exercice de toute action concernant son patrimoine tant que dure la liquidation judiciaire, à celui d'agir contre l'État en réparation du dommage causé, pour faute lourde, par le fonctionnement défectueux du service de la justice, sur le fondement de l'article L. 141-1 du COJ N° Lexbase : L2419LB9 (Cass. com., 16 décembre 2014, n° 13-19.402, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A6743M7U, P.-M. Le Corre, in Chron., Lexbase Affaires, janvier 2015, n° 409 N° Lexbase : N5530BUD).

Il est habituellement considéré que les droits propres sont ceux qui permettent au débiteur de faire valoir son point de vue sur le déroulement de la procédure collective, dont il est le sujet, et non simplement l'objet. C’est la formule reprise ici par la Cour de cassation qui considère notamment que l’action en responsabilité contre l’avocat « n'[a] pas pour effet de faire valoir le point de vue du débiteur dans le déroulement de la procédure collective ».

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les effets du prononcé de la liquidation judiciaire, Les droits propres du débiteur, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre) Lexbase N° Lexbase : E3976EUS.

 

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