Le Quotidien du 30 janvier 2023 : Entreprises en difficulté

[Brèves] Créancier demeurant à l’étranger : le délai augmenté ne s’applique pas à la déclaration d'indemnité de résiliation d’un contrat en cours

Réf. : Cass. com., 18 janvier 2023, n° 21-15.514, F-B N° Lexbase : A606888A

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[Brèves] Créancier demeurant à l’étranger : le délai augmenté ne s’applique pas à la déclaration d'indemnité de résiliation d’un contrat en cours. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/92520563-0
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par Vincent Téchené

le 25 Avril 2023

► La différence de traitement entre, d’une part, le créancier qui ne demeure pas sur le territoire de la France métropolitaine qui dispose d'un délai augmenté pour déclarer une créance antérieure au passif de son débiteur et, d’autre part, le créancier qui ne demeure pas sur le territoire de la France métropolitaine qui ne dispose pas d’un délai augmenté pour déclarer au même passif une créance d'indemnité résultant de la résiliation du contrat en cours, est justifiée et située dans un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi tenant à la détermination du passif de la procédure.

Faits et procédure. Deux sociétés ont conclu un contrat de licence portant sur une célèbre marque de montres de luxe stipulant une clause compromissoire pour régler tout différend issu de la convention.

Le 12 mai 2016, le licencié (le débiteur) a été mis en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Lyon, puis en liquidation judiciaire le 15 novembre 2016. Le 23 novembre 2016, la propriétaire de la marque a mis le liquidateur en demeure de prendre parti sur la poursuite du contrat de licence. Le liquidateur, qui avait, le 21 décembre 2016, obtenu du juge-commissaire une prolongation de deux mois pour opter, n'a pas répondu.

Le contrat a ainsi été résilié de plein droit à la date du 24 février 2017 pour défaut de réponse à la mise en demeure. Le 23 mai 2017, la cocontractante du débiteur a déclaré au passif une créance d'indemnités résultant de cette résiliation. La régularité de la déclaration de créance a été contestée.

Le juge-commissaire et à sa suite la cour d’appel (CA Lyon, 11 mars 2021, n° 20/03669 N° Lexbase : A72524KS) ont déclaré forclose la déclaration de créance. La créancière a donc formé un pourvoi en cassation.

Décision. En premier lieu, la Cour de cassation rappelle qu’il résulte de l'article R. 622-24 du Code de commerce N° Lexbase : L6120I33 que lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France métropolitaine, l'augmentation de deux mois du délai de déclaration pour les créanciers qui ne demeurent pas sur ce territoire concerne celui fixé en application de l'article L. 622-26 du même code N° Lexbase : L9127L78, pour déclarer les créances nées antérieurement au jugement d'ouverture, courant à compter de la publication de ce jugement, et non celui d'un mois prévu à l'article R. 622-21, alinéa 2, dudit code N° Lexbase : L5947KGD ouvert au cocontractant du débiteur pour déclarer au passif la créance résultant de la résiliation d'un contrat en cours, courant à compter de la date de la résiliation de plein droit ou de la notification de la décision prononçant la résiliation.

Ainsi, elle approuve les juges du fond d’avoir retenu exactement qu'aucun texte ne prescrit une augmentation de deux mois du délai pour déclarer une créance d'indemnité de résiliation qui résulterait de la domiciliation en Suisse de la créancière. Par ailleurs, l'article R. 622-24, alinéa 2, octroie ce délai de prolongation pour la seule déclaration opérée en application de l'article L. 622-26, visant les créances antérieures et non celles résultant d'une résiliation de plein droit d'un contrat non poursuivi, intervenue après la liquidation judiciaire.

En second et dernier lieu, la Cour régulatrice précise que le créancier, cocontractant du débiteur, qui ne demeure pas sur le territoire de la France métropolitaine n'est pas placé dans la même situation, selon qu'il dispose d'un délai augmenté en raison de la distance pour déclarer une créance antérieure au passif de son débiteur dont la procédure collective a été ouverte par une juridiction située sur ce territoire ou qu'il dispose d'un délai insusceptible d'augmentation en raison de cette même distance pour déclarer au même passif une créance d'indemnité résultant de la résiliation du contrat en cours. Cette différence de traitement est, selon la Cour, justifiée et située dans un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but poursuivi tenant à la détermination du passif de la procédure, dès lors que l'augmentation du délai est destinée, dans le premier cas, à compenser la contrainte liée à l'éloignement qui ne permet pas aisément au créancier d'avoir connaissance de l'ouverture de la procédure collective du débiteur et de ses effets dans les deux mois qui suivent la publication en France de cette ouverture, et que, dans le second cas, les conditions procédurales et de fond de la résiliation des contrats en cours prévues aux articles L. 622-13 N° Lexbase : L7287IZW et L. 622-14 N° Lexbase : L8845INW du Code de commerce, rendus applicables au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 N° Lexbase : L9175L7X, et aux articles L. 641-11-1 N° Lexbase : L3298IC7 et L. 641-12 N° Lexbase : L8859ING du même code, garantissent au cocontractant une connaissance immédiate de la résiliation du contrat, qu'elle intervienne à son initiative ou non, qui lui permet de réagir dans le délai suffisant d'un mois pour déclarer sa créance d'indemnité.

Observations. On notera que la faculté ouverte par l’article R. 622-21, alinéa 2, du Code de commerce n'a pour effet que d'allonger la période de déclaration de certaines créances (Cass. com., 24 octobre 1995, n° 93-21.211, inédit N° Lexbase : A1863AZZ). Ainsi, n'encourt pas de forclusion le bailleur qui, dans le délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au Bodacc, a déclaré une créance résultant de la résiliation du bail décidée par le liquidateur, peu important que ce délai ait expiré postérieurement au délai d'un mois imparti par l'article R. 622-21, alinéa 2, pour déclarer l'indemnité de résiliation (Cass. com., 26 mars 2013, n° 11-21.060, F-P+B N° Lexbase : A2616KBI).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les délais de la déclaration des créances, Le délai de déclaration de l'indemnité de résiliation, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre) N° Lexbase : E0354EXE.

 

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