Le Quotidien du 17 janvier 2023 : Droit rural

[Brèves] Résiliation judiciaire du bail rural pour manquement du preneur : retour sur la nécessité, ou pas, de constater la gravité du manquement

Réf. : Cass. civ. 3, 7 décembre 2022, n° 21-19.789, F-D N° Lexbase : A43128YD

Lecture: 4 min

N3931BZM

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Résiliation judiciaire du bail rural pour manquement du preneur : retour sur la nécessité, ou pas, de constater la gravité du manquement. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/92312243-0
Copier

par Anne-Lise Lonné-Clément

le 16 Janvier 2023

► Le défaut d'accomplissement de l'obligation d'information du propriétaire prévue par l'article L. 411-35, alinéa 3 et 4, du Code rural et de la pêche maritime en cas de cessation d'activité de l'un des copreneurs, constitue une contravention aux dispositions de ce texte permettant au bailleur de demander la résiliation du bail sur le fondement de l'article L. 411-31, II, 1°, du même code, sans que le bailleur ait à justifier de la compromission du fonds.

Les textes. Pour bien comprendre la solution, il est nécessaire de rappeler le texte de l’article L. 411-31 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L8924IWG, qui prévoit les conditions de résiliation judiciaire du bail. Alors que le I prévoit des cas de résiliation pour manquement du preneur aux obligations du bail, le II énumère des motifs de résiliation pour non-respect des dispositions du statut du fermage.

Plus précisément, il est écrit que :

« II.-Le bailleur peut également demander la résiliation du bail s'il justifie d'un des motifs suivants :
1° Toute contravention aux dispositions de l'article L. 411-35 N° Lexbase : L4458I4U [cession, sous-location, co-titularité] ;
2° Toute contravention aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 411-38 N° Lexbase : L0858HPH [apport du droit au bail à une société ou un GAEC] ;
3° Toute contravention aux obligations dont le preneur est tenu en application des articles L. 411-37 N° Lexbase : L4462I4Z [mise à disposition du bail], L. 411-39 N° Lexbase : L4782I4U [échange], L. 411-39-1 N° Lexbase : L7820K9I [assolement en commun] si elle est de nature à porter préjudice au bailleur ;
4° Le non-respect par l'exploitant des conditions définies par l'autorité compétente pour l'attribution des biens de section en application de l'article L. 2411-10 du Code général des collectivités territoriales N° Lexbase : L4532I4M. »

Solution. La solution dégagée dans cet arrêt rendu le 7 décembre 2022 correspondait donc au cas visé par l’article L. 411-31, II, 1°, qui prévoit que « toute » contravention justifie la demande de résiliation du bail par le bailleur. De même que s’agissant du cas visé par l’article L. 411-31, II, 2° (auquel la solution peut donc être étendue), peu importe donc le caractère de gravité du manquement, le seul manquement à une des dispositions en cause suffit à justifier une demande de résiliation.

Le présent arrêt vient donc simplement rappeler la lettre du texte. Et c’est donc à tort que la cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 20 mai 2021, n° 19/04837 N° Lexbase : A35124SU), pour rejeter la demande en résiliation du bail, avait retenu que le fait, pour le preneur et le GAEC de ne pas avoir informé leur bailleresse de la dissolution anticipée du second à compter du 30 juin 2020 et en conséquence de son départ en qualité de copreneur, ne constituait pas une contravention suffisamment grave aux obligations du preneur pour justifier la résiliation du bail, alors qu'il n’était pas de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds.

Or, parmi les obligations prévues par l’article L. 411-35, dans le cas de la cessation d'activité d'un copreneur et de poursuite du contrat par l'autre copreneur, l’alinéa 3 prévoit que le copreneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom.

La seule contravention à cette disposition justifiait donc, per se, la demande de résiliation du bail par le bailleur.

L’arrêt est ainsi censuré par la Cour régulatrice au visa des articles L. 411-31, II, 1°, et L. 411-35, alinéa 3, du Code rural et de la pêche maritime.

Confusion. On relèvera que l’erreur commise ici par la cour d’appel vient d’une confusion avec le cas de résiliation judiciaire pour agissements du preneur compromettant la bonne exploitation, prévu par l’article L. 411-31, I, 3°, qui suppose lui de démontrer en quoi les agissements du preneur sont de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds.

De même, s’agissant des cas de résiliation judiciaire du bail pour contravention aux dispositions du statut du fermage mentionnées à l’article L. 411-35, II, 3°, on relèvera que le manquement suppose, en outre, de démontrer qu’il est de nature à porter préjudice au bailleur, pour justifier d’une demande de résiliation.

Dans ces deux cas donc, la gravité du manquement est appréciée, selon qu’elle est de nature à compromettre la bonne exploitation, ou à porter préjudice au bailleur. Mais tel n’est pas le cas s’agissant des manquements visés aux 1° et 2° de l’article L. 411-31, II.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Résiliation du bail rural, spéc. Résiliation judiciaire du bail rural (pour faute du preneur), in Droit rural, (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E8995E9Z.

                                                                                                            

newsid:483931

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.