Réf. : Cass. com., 14 décembre 2022, n° 21-16.785, F-B N° Lexbase : A49768ZC
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N3730BZ8
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par Vincent Téchené
le 04 Janvier 2023
► Les dommages subis par un bateau ayant été causés par la rupture d'une amarre sous l'effet du vent, à l'origine d'un phénomène de gîte important d’un autre bateau, le régime spécial de responsabilité pour abordage, prévu par l’article L. 5131-3 du Code des transports et reposant sur la faute prouvée, trouve à s’appliquer.
Faits et procédure. Le 17 février 2012, à la suite d'importantes rafales de vent, une vedette amarrée à un port a été endommagée par les mouvements de gîte du voilier voisin dont une amarre avait rompu. Le 15 avril 2016, le propriétaire de la vedette a assigné les propriétaires du voilier ainsi que leur assureur en indemnisation de ses préjudices.
Les propriétaires du voilier ayant été condamnés à payer la somme de 18 470,06 euros en réparation des dommages (CA Aix-en-Provence, 18 mars 2021, n° 18/19054 N° Lexbase : A55934LQ), ils ont formé un pourvoi en cassation.
Pourvoi. Ils soutenaient que la responsabilité pour abordage, qui trouve à s'appliquer en cas de rupture d'une amarre de navire sous l'effet du vent, a pour fondement exclusif la faute prouvée et non le fait des choses que l'on a sous sa garde. Or, en considérant, pour condamner les propriétaires du voilier, que les dommages survenus en l’espèce relevaient des dispositions de l'ancien article 1384 du Code civil N° Lexbase : L1490ABS applicable au litige, après avoir constaté que les dommages subis avaient été causés par la rupture d'une amarre sous l'effet du vent, à l'origine d'un phénomène de gîte important du voilier ayant causé les frictions constatées sur le bateau endommagé, la cour d'appel aurait violé l'article L. 5131-3 du Code des transports N° Lexbase : L7200INY.
Décision. La Cour est sensible à ces arguments et censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 5131-1 N° Lexbase : L5691L8B et L. 5131-3 du Code des transports.
Rappelons qu’il résulte du premier de ces textes que l'abordage est le choc de deux navires et qu'est assimilé au navire, ou au bateau, tout engin flottant non amarré à poste fixe ; que la condition d'absence d'amarrage ne concerne donc que les engins qui ne sont pas des navires.
Par ailleurs, selon le second de ces textes, si l'abordage d'un navire de mer par un autre est causé par la faute de l'un des navires, la réparation des dommages incombe à celui qui l'a commise. En revanche, si l'abordage est fortuit ou s'il y a doute sur les causes de l'accident, les dommages sont supportés par ceux qui les ont éprouvés, sans distinguer le cas où, soit les navires, soit l'un d'eux, auraient été au mouillage au moment de l'abordage.
Or, la Haute juridiction constate que, pour condamner les demandeurs au pourvoi l'arrêt, après avoir retenu qu'il n'était pas démontré que leur voilier était dérivant, énonce qu'il résulte de l'article L. 5131-1 du Code des transports que les dispositions relatives à l'abordage s'appliquent aux navires, bateaux et tout engin flottant non amarré à poste fixe, de sorte que les heurts survenus entre deux bateaux amarrés ne sont pas constitutifs d'un abordage. Il en déduit que les dommages survenus sur le bateau endommagé relèvent des dispositions de l'article 1384, ancien, du Code civil, applicable au litige.
La Haute juridiction casse l’arrêt d’appel : en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que les dommages subis par le bateau endommagé avaient été causés par la rupture d'une amarre sous l'effet du vent, à l'origine d'un phénomène de gîte important du voilier, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les textes visés.
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