Réf. : Cass. com., 23 novembre 2022, n° 21-10.614, FS-B N° Lexbase : A10798UI
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par Vincent Téchené
le 02 Décembre 2022
► Une convention d'arbitrage, qui est indépendante du contrat auquel elle se rapporte, a pour objet le droit d'action attaché aux obligations découlant du contrat et non la création, la modification, la transmission ou l'extinction de ces obligations, de sorte qu'elle n'est pas un contrat en cours, au sens de l'article L. 622-13 du Code de commerce, dont l'exécution pourrait être ou non exigée par l'administrateur.
Faits et procédure. Une société (le franchisé) a conclu un contrat de franchise avec une société de droit espagnol, contenant une clause compromissoire. Cette dernière a cédé le contrat de franchise à une autre société (le franchiseur), en demeurant néanmoins le fournisseur exclusif de toutes les denrées alimentaires utilisées par les restaurants du réseau.
Estimant avoir été abusé du fait d'un concept déficitaire, le franchisé a engagé une procédure d'arbitrage, aux fins d'annulation de ce contrat, devant la CCI, laquelle s’est postérieurement dessaisie, faute d'avoir reçu des parties l'intégralité de la provision à valoir sur les frais d'arbitrage.
Par la suite, le franchisé ayant fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, l’administrateur judiciaire a été mis en demeure par le franchiseur de prendre parti sur la continuation du contrat. Estimant que le contrat comprenait deux conventions autonomes, le contrat de franchise stricto sensu et la clause compromissoire, l'administrateur a répondu qu'il résiliait avec effet immédiat la clause compromissoire, ce qui avait pour conséquence, selon lui, de permettre la saisine du tribunal de commerce du litige initié devant le tribunal arbitral, et qu'il demandait au juge-commissaire une prolongation du délai de réponse pour le contrat de franchise stricto sensu, laquelle a été accordée, pour une durée de deux mois. Aucune réponse n'a été apportée par l'administrateur dans le délai ainsi prorogé.
Le franchiseur a alors formé un recours contre l'ordonnance. Le tribunal, retenant que le débat sur la dissociation ou non du contrat de franchise et de la clause compromissoire relevait du juge du fond, s'est déclaré incompétent au titre de la demande de clause compromissoire, a invité les parties à saisir la juridiction compétente, a rejeté toutes les demandes du franchiseur, confirmé l'ordonnance du juge-commissaire et constaté la résiliation du contrat de franchise.
Le débiteur et son mandataire ont alors assigné le franchiseur cessionnaire et le franchiseur initial devant le tribunal aux fins d'annulation du contrat de franchise, pour dol et pour absence de transmission par le franchiseur d'un savoir-faire économiquement exploitable, et d'indemnisation du préjudice subi.
C’est dans ces conditions, relativement complexes, que la cour d’appel a retenu que le tribunal était incompétent pour connaître du litige en vertu de la clause compromissoire attachée au contrat de franchise et a donc rejeté les demandes du franchisé débiteur. Il s’est donc pourvu en cassation.
Décision. La Cour de cassation énonce qu’il résulte de l'article 1447 du Code de procédure civile N° Lexbase : L2276IPY que la convention d'arbitrage, qui est indépendante du contrat auquel elle se rapporte, a pour objet le droit d'action attaché aux obligations découlant du contrat et non la création, la modification, la transmission ou l'extinction de ces obligations. Il se déduit de cet objet qu'elle n'est pas un contrat en cours, au sens de l'article L. 622-13 du Code de commerce N° Lexbase : L7287IZW, dont l'exécution pourrait être ou non exigée par l'administrateur.
Par conséquent, la réponse de l'administrateur à la mise en demeure, selon laquelle il résiliait avec effet immédiat la seule clause compromissoire, ne pouvait produire aucun effet.
Par ailleurs, l'arrêt d’appel constate qu'il n'est pas allégué en l'espèce que la clause compromissoire était manifestement nulle et retient qu'elle n'était pas manifestement inapplicable.
Dès lors, le litige, qui opposait le débiteur franchisé aux franchiseurs, relevait de la convention d'arbitrage et les juridictions étatiques étaient incompétentes pour en connaître.
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les règles communes aux contrats en cours, Les autres contrats concernés par la règle de la continuation des contrats en cours, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E0006EUR. |
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