Le Quotidien du 18 octobre 2022 : Actualité judiciaire

[A la une] Cafards aux murs et matelas au sol… La justice ordonne des mesures d’urgence pour rétablir la dignité dans la prison de Bordeaux-Gradignan

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par Vincent Vantighem

le 19 Octobre 2022

            Il y a d’abord les cafards qui grouillent. Les murs lépreux qui s’effritent. Et le froid qui vous prend à la gorge. Sans parler des matelas posés à même le sol, seul refuge pour certains détenus contraints de dormir à moitié sous une table ou à côté des WC seulement séparés par un rideau de fortune… La justice a ordonné à l’État d’améliorer « en urgence » les conditions de détention à la prison de Bordeaux-Gradignan (Gironde).

            Dans une ordonnance rendue mardi 11 octobre, mais dévoilée jeudi 12 par l’Ordre des avocats du barreau de Bordeaux, le juge des référés du tribunal administratif enjoint au ministre de la Justice de prendre une série de neuf mesures en urgence. Améliorer la luminosité des cellules, changer les fenêtres, réparer les lits, mieux répartir la nourriture ou encore distribuer des produits d’hygiène…

            C’est le barreau bordelais qui avait lancé cette démarche judiciaire, soutenu par la section française de l’Observatoire international des prisons (OIP) et l’association de défense des détenus (A3D). Tous dénoncent les conditions de détention indignes en ces murs depuis la publication, en juillet, d’un rapport accablant signé par Dominique Simonnot, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL). Il faut dire que sa conclusion était sans appel : « l’hébergement d’êtres humains [dans cet établissement pénitentiaire] devrait être proscrit », avait-elle asséné.

« Il ne faut pas qu’on nous traite comme des animaux »

            Il suffit de lire les mesures ordonnées par le juge des référés pour s’en rendre compte. Par exemple, celui-ci ordonne de « mettre fin à l’utilisation du même véhicule pour le transport du linge souillé et celui des denrées alimentaires fraîches »… Ou encore de « s’assurer que la chaîne du froid est bien respectée ». Sans oublier sa demande pour proscrire « toute fouille intégrale dans les locaux inappropriés tels que les douches ou même le parloir des avocats ».

            Sur le plan de la santé, la justice administrative enjoint également à l’État de « mettre fin à son interférence dans la mise en œuvre des prescriptions médicales et décisions concernant les détenus ». De cesser aussi tout retard ou annulation d’extractions médicales non justifiée par des motifs de sécurité…

            Autant d’éléments que Frédéric, l’un des détenus, avait résumé lors d’une récente visite d’un parlementaire : « On a fait des choses pas bien dehors, mais il ne faut pas qu’on nous traite comme des animaux… »

« Ce n’est pas un hôtel, alors on remplit ! »

            Tous ces problèmes de salubrité publique seraient sans doute plus simples à résoudre si la prison de Gradignan n’était pas l’une des plus chargées de France. Début octobre, elle comptait ainsi 794 détenus pour 305 places, soit un taux d’occupation record de 217 % dans le secteur des hommes.

            Un établissement « sous-dimensionné » selon les propres mots de Dominique Bruneau, le directeur de cette prison qui se montre fataliste. « On ne peut pas mettre une pancarte à la porte disant : c’est complet ! Je ne dirige pas un hôtel, alors on remplit… »

            Sauf que l’on atteint les limites du système, visiblement. Il y a quelques semaines, l’un des détenus de l’établissement a obtenu sa remise en liberté dans l’attente de son procès après une demande dans le cadre de la récente loi d’avril 2021 « tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention ». L’un des premiers à obtenir ce type de décision.

            Les autres peuvent encore compter sur le barreau des avocats de Bordeaux. Se félicitant de la décision, il a indiqué qu’il veillerait désormais à « l’exécution diligente des injonctions formulées par le juge des référés ». Pour oublier un peu les cafards et redécouvrir la dignité.

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