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par Vincent Vantighem
le 24 Octobre 2022
Une boîte à outils de communication prête à l’emploi. Avec des tracts, des affiches. Et même un site internet avec, évidemment, la photo de Marine Le Pen en bonne place. L’affaire dite « des kits de campagne du Front national » revient en justice, lundi 19 septembre. Après une première décision rendue en novembre 2019 par le tribunal judiciaire de Paris, c’est la cour d’appel qui examinera ce dossier d’escroquerie, d’abus de biens sociaux, d’abus de confiance, de recels et de blanchiment dans lequel sept personnes physiques et trois personnes morales sont renvoyées.
Au cœur de ce dossier remontant à 2012 – à une époque où le parti s’appelait encore le Front national – des kits de campagne qui étaient vendus 16 650 euros aux candidats FN aux législatives par « Jeanne », le micro-parti de Marine Le Pen et, surtout, fournis par Riwal, une société dirigée par Frédéric Chatillon, l’ancien président du Groupe union défense, un syndicat étudiant d’extrême-droite. Pour l’accusation, ce système cachait, en réalité, des prestations surévaluées, destinées à tromper l’État qui rembourse les dépenses de campagne des candidats dépassant les 5 % des voix lors du scrutin.
C’est pour cela que l’État avait réclamé très précisément la somme de 11,6 millions d’euros au titre des dommages et intérêts, soit le montant des dépenses électorales qu’il avait remboursé a posteriori. Mais, en première instance, le tribunal avait relaxé le parti de Marine Le Pen des accusations d’escroqueries, estimant ne pas avoir trouvé de manœuvres frauduleuses ni de preuves de surfacturation derrière la fourniture de ces kits de campagne.
Une relaxe et une « microcondamnation dans un sous-sous volet »
En qualité de personne morale, le Front national avait, en revanche, été condamné à une amende de 18 750 euros dans le volet abus de biens sociaux pour avoir profité d’avantages indus auprès de Riwal. À savoir : l’emploi fictif des deux élus Nicolas Bay et David Rachline, l’achat de matériel et surtout l’octroi au FN d’un crédit sans intérêt de plusieurs millions d’euros pendant trois ans. « C’est une microcondamnation dans un sous-sous volet, avait estimé Marine Le Pen. La relaxe du FN est une grande victoire. Nous sommes blanchis, et je m’en réjouis. »
La peine la plus lourde avait finalement été prononcée à l’encontre de Frédéric Chatillon, le dirigeant de Riwal, qui avait écopé de deux ans et demi de prison, dont dix mois ferme et une amende de 250 000 euros. Jean-François Jalkh, juriste du Front national à l’époque, et Wallerand de Saint-Just, trésorier, tous deux membres du bureau exécutif du parti, avaient aussi été condamnés. Le premier à deux ans de prison, dont six mois ferme, et à une peine d’inéligibilité de cinq ans. Le second à six mois de prison avec sursis. Quant au microparti, Jeanne, il avait été condamné, en tant que personne morale, à verser une amende de 300 000 euros, dont 150 000 euros avec sursis.
Un enjeu essentiellement financier
Mais, en toute logique vu la décision rendue, le parquet avait fait appel. Et c’est ainsi que tous les protagonistes de ce dossier sont donc convoqués, à nouveau, en appel, pour une audience qui s’annonce technique et aride et qui va durer un mois. Avec un enjeu essentiel pour le parti de Marine Le Pen : le risque de devoir rendre plus de 10 millions d’euros à l’État si la cour d’appel infirmait la décision initiale. Exsangue financièrement pendant des années depuis le résultat à l’élection présidentielle de 2007, le Front national (devenu Rassemblement national depuis), a repris des couleurs à tous les niveaux à la faveur des dernières élections législatives. Mais il verrait sans doute d’un mauvais œil de devoir sacrifier une partie de ses recettes actuelles pour des errements remontant à plus de dix ans désormais. Le procès en appel doit se tenir jusqu’au 19 octobre.
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