Réf. : CE référé, 19 août 2022, n° 466082, inédit N° Lexbase : A68868ER
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par Laïla Bedja
le 02 Septembre 2022
► Les dispositions de l’article L. 1111-11 du Code de la santé publique (alinéa 3) qui prévoient que les directives anticipées de poursuite des soins et traitements ne s’imposent pas au médecin pour toute décision d’investigation, d’intervention ou de traitement dans le cas où ces directives « apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale » sont-elles conformes à la Constitution ? Telle est la question prioritaire de constitutionnalité dont aura à connaître le Conseil constitutionnel.
Les faits et procédure. Un patient hospitalisé dans un service de réanimation a fait l’objet d’une procédure collégiale d’arrêt des traitements après que plusieurs examens ont démontré que son état était insusceptible d’amélioration. Les proches du patient ont alors saisi le tribunal administratif d’une demande de suspension de l’exécution de la décision du chef de service de réanimation portant arrêt des soins prodigués au patient. La décision a été suspendue par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille en raison d’une lettre du patient adressée deux ans plus tôt à son médecin traitant manifestant son souhait, dans l’hypothèse où il ne serait plus en mesure de s’exprimer, d’être maintenu en vie, même artificiellement, en cas de coma prolongé jugé irréversible.
La procédure collégiale a alors été reprise et une nouvelle décision d’arrêt des soins a été prise au regard de la situation négative et de la qualité de survie qualifiée de « catastrophique ». Les proches ont à nouveau contesté la décision et le juge du tribunal administratif a rejeté la demande de suspension de cette décision. Un pourvoi en cassation a alors été formé.
La QPC. À l'appui de leur appel, les requérantes soulèvent une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 1111-11 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4870LWB. Elles soutiennent qu'en prévoyant que des directives anticipées de poursuite des soins et traitements ne s'imposent pas au médecin pour toute décision d'investigation, d'intervention ou de traitement dans le cas où ces directives « apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale », conduisant alors à mettre fin à la vie du patient contre sa volonté, ces dispositions méconnaissent le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine ainsi que la liberté de conscience et la liberté personnelle, garanties par le Préambule de la Constitution et les articles 1 N° Lexbase : L1365A9G, 2 N° Lexbase : L1366A9H, 4 N° Lexbase : L1368A9K et 10 N° Lexbase : L1357A97 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen.
Elles soutiennent également qu'en tout état de cause la possibilité d'écarter des directives anticipées dans une telle hypothèse de refus d'arrêt des soins et traitements prodigués n'est pas suffisamment encadrée, l'expression « manifestement inappropriées » étant imprécise, aucun délai de réflexion n'étant ménagé et la décision étant prise non de manière collégiale, mais par le seul médecin en charge du patient.
Il appartient au Conseil constitutionnel de rendre sa décision dans un délai de trois mois à compter de sa saisine (en l’espèce, 22 août 2022).
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